Lana haussa les épaules. « La reine des petites ambitions, sans doute. » S’empiffrer de sucreries, piétiner le sol en gigotant ses hanches graisseuses, baver sur des garçons indifférents aux battements imbéciles de ses cils. La danse pouvait être un art noble, mais en tentant de reproduire des mouvements qu’elle ne maîtrisait probablement pas, elle la travestissait en vulgaire gigue populaire. « Je reprendrai le contrôle des eaux. » répondit-elle, en posant son regard sur la brune. « Cela fait bien trop longtemps que mon peuple a abandonné une partie de sa souveraineté aux Gælyan. Ce sera la première chose que je veillerai à changer. » Elle leva son verre au niveau de ses yeux, sans effleurer celui de ses comparses. Les lèvres bordées par le liquide, elle entendit un toussotement qui lui fit baisser sa coupe. Elle pivota pour découvrir la silhouette de Lorcán, toujours engoncée dans ces vêtements qui, finalement, ne lui allaient pas si bien. L’Ondine croisa les bras sur sa poitrine. Ses yeux tombèrent sur sa paume ouverte vers elle, avant de remonter lentement vers les siens. Si elle avait tenu un poignard, elle le lui aurait enfoncé dans la paume, déchirant la peau, sectionnant les tendons et lacérant les os. « Pour vérification ? » répéta-t-elle, assassine. « Ton aveuglement me dépasse. » Elle retint de justesse un « quel imbécile », puis se tourna vers les deux femmes. « Veuillez m’excuser, notre noble cause m’attend. » D’un signe de tête, elle les salua puis, sans prendre la main de Lorcán, lui fit signe de la suivre. S’il n’obtempérait pas, elle lui arracherait la tête.
Parvenue sur la piste de danse, ses iris remontèrent vers les siens pour s’y planter. « Alors ? Tu as chanté tes louanges à Kiara ? » L’ego du roux était aussi boursoufflé qu’une tête de Réprouvé. « Je suis bien étonnée qu’elle ne t’ait pas gardé. » commenta-t-elle, auréolée d’ironie. Les prétentions de l’adolescent allaient bien au-delà de ses capacités réelles. Il visait haut, et cela le rendait un petit peu intrigant – tant parce que l’ambition était une bonne chose que parce que son éventuelle chute serait délectable. Cependant, il n’en demeurait pas moins un vantard incapable de démontrer ses dires. Elle n’avait pas menti lorsqu’elle avait dit qu’il ne l’intéressait pas : il n’avait pas pour lui la moitié des qualités qu’elle exigeait chez un homme. Néanmoins, elle était vexée qu’il lui eût préféré son amie. Elle prit sa main pour la placer elle-même sur sa taille, avant d’accueillir l’autre au creux de la sienne. La proximité de leurs corps répandit un long frisson dans son dos, qu’elle plaça sous le signe de l’agacement, quand il avait tout à voir avec les vagues qui valsaient entre ses hanches. Bousculant les convenances, elle initia elle-même la danse.
« Je discutais justement de la façon dont les hommes devraient paraître dans le monde. L’une proposait de vous empailler pour vous transformer en porte-manteaux, l’autre de vous soumettre tout à fait, et la dernière ne vous trouvait pas suffisamment désagréables pour songer à vous accorder une autre place que celle qui est déjà la vôtre. » Elle passa les détails sur ses commentaires concernant les qualités physiques de certains d’entre eux. « Elle défendait une thèse selon laquelle plus une femme vous plaît, plus vous êtes idiot. Si je la croyais, je dirais que tu dois être fou amoureux de moi. » Lana sourit, comme si elle plaisantait. Elle avait surtout envie de lui faire comprendre son offense et de le voir ramper à ses pieds. Elle s’appliquait, aussi, à ne pas paraître excessivement désagréable. Le défi lancé par son frère la suivait où qu’elle allât, et elle comptait bien le relever. Au loin, elle crut discerner sa silhouette. Elle plissa les yeux et ses mains se crispèrent sur Lorcán. Il n’était pas censé être présent. L’Ondine inspira et se pressa un peu plus contre son partenaire, comme si la promiscuité prouvait l’affectivité. Elle démontrerait à son jumeau qu’il avait tort de la sous-estimer. Elle s’était entraînée avec ce répugnant Sorcier ; elle poursuivrait avec cet Alfar orgueilleux.
Message IV – 687 mots
Lana quitte Eméliana et Leigh. Elle danse avec Lorcan et commence à subir les effets de l'Aliénation et des drogues vaporisées dans l'air (entrée en matière douce, le prochain post sera celui de l'apocalypse).
Zeryel ~ Ange ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 206 ◈ YinYanisé(e) le : 25/01/2023
Le son de sa voix apprit deux choses à Lorcán. Il s'agissait effectivement de son Ondine préférée, et elle était remontée comme une pendule. Il salua galamment ses compagnes de bavardages, puis suivit docilement la petite harpie des mers en se demandant s'il ressortirait en un seul morceau de la soirée. Comme elle avait refusé sa main, il devina qu'il avait probablement quelque chose à voir avec son ire. Ça le fit sourire, du premier sourire sincère de la soirée. Il aimait déchaîner toutes sortes de passions.
« Ah. C'était donc Kiara. » Il avait commencé à le déduire en additionnant un et un. Lana avait-elle pu mal prendre qu'il eut invité son amie au lieu d'elle ? La plus mauvaise partie de lui lui chuchota à l'oreille de tirer le maximum de la situation. Une grande amitié serait-elle brisée ce soir ? Par sa faute ? Par tous les Ætheri, Lorcán n'en avait pas attendu autant de cette soirée et chaque minute supplémentaire lui apportait des surprises de plus en plus croustillantes.
« Mmmmh, nous n'étions pas vraiment compatibles. » admit-il. Pas le moins du monde. Oh, il l'aurait soulevée sans discuter, mais de là à en faire quoi que ce soit d'autre, il fallait rester sérieux deux minutes. « Elle soupirait après un autre, en vérité, et je préfère que ce soit mon prénom qu'on gémisse dans mon oreille. » Il lui glissa une œillade en coin et écarta ses doigts dans son dos pour raffermir sa prise. Il ne l'avait jamais touchée ainsi, elle ne le lui aurait jamais permis, et il sentit son entrejambe manifester un début d'intérêt, trop léger pour que sa partenaire puisse le sentir, mais suffisamment pour que l'empire de ses sens s'éveille, aux aguets. « En réalité, je pensais qu'elle en pinçait pour toi. Il faut croire que je me trompais. » Et qu'en retour, Lana avait besoin d'une petite suiveuse qui acquiesce à toutes ses lubies de princesse. Lui aussi aurait bien eu besoin d'un chien de manchon qui trottinerait derrière lui. Zeryel n'accepterait jamais, et il ne voulait surtout pas d'un Ange dans son entourage. Ils étaient divertissants à taquiner mais il préférait soigner son entourage de personnalités plus amusantes.
À sa surprise, la blanche le repoussa dans les premiers pas et il trébucha, peu habitué à cette configuration. Au temps pour faire étalage de sa dextérité en danse, songea-t-il avec aigreur. Il supportait mal d'avoir l'air malhabile. Mais la Sirène avait le don pour le bousculer, au sens propre comme au figuré. L'oublier pouvait lui être plus fatal que s'étaler au beau milieu d'un bal.
« Charmante discussion. » commenta le roux, reprenant confiance dans son jeu de jambe, attentif à ne plus se laisser surprendre même si elle ne cessait de le distraire en plaquant son corps au sien. La tête commençait à lui tourner bien qu'il n'eut rien consommé. « Ah, ça... » Il laissa volontairement la phrase en suspens mais non sa main qui accompagna son rapprochement en glissant le long de sa cuisse pour la relever contre sa hanche comme l'exigeait la danse, bénie soit-elle. Sa respiration se noya. Ses courbes sans défaut allaient le rendre fou, il le savait, il en avait rêvé. « Je plaide coupable. » conclut-il en adoptant le même ton pour la laisser deviner s'il plaisantait ou non. Actuellement, la jeune fille hantait ses pensées, mais pas encore son cœur, bien qu'il sentit quelque chose pulser, mais au sud de son torse.
« Et ta théorie à toi ? » Par sa nature, certainement rien de très avantageux. Il était d'ailleurs surpris qu'elle le tolère à ses côtés. « Non, je vais deviner. Et si je réussis, tu me devras un baiser. » Il sourit, se croyant malin, le poisson déjà ferré dans son panier grâce à son super hameçon. « Je parie que l'idée de la soumission t'a beaucoup séduite. » Il avait entendu parler du sort réservé aux mâles à Port Dirælla. Certains journaux plus audacieux parlaient d'esclavagisme sexiste. Il ne comprenait pas qu'ils ne se soient pas révoltés. A moins que la presse ne révèle pas qu'en échange de leur labeur, ils étaient ensuite récompensés ? Il fallait bien faire perdurer la race après tout. Elles pouvaient bien se promener le nez en l'air tant qu'elles voulaient, il fallait bien écarter les cuisses à un moment donné. Dans ces conditions, lui aussi aurait accepté de porter quelques briques. Mais juste quelques unes. Le travail manuel ne seyait pas au délicat, c'était un coup à s'abîmer les ongles, sans compter que le plein air, salé qui plus est, n'était pas clément pour garder une peau jeune et belle. Il suffisait de voir à quoi ressemblait un matelot ou un paysan pour s'en rendre compte. Un petit frisson d'effroi le parcourut en s'imaginant le visage couturé de rides du soleil, son teint lie de vin virant au noir et la peau sèche comme de la terre craquelée.
Pour chasser l'horreur de cette effrayante vision, Lorcán se concentra sur son second sujet favori, après lui-même. « De mon côté, j'ai longuement discuté avec ton amie. Sur l'amour et la séduction. Sur les avantages que présentaient les Sirènes pour mes préférences personnelles aussi. Ce fut très instructif. » Il la fit tourner, regrettant chaque seconde où elle était loin de lui, avant de la réceptionner de nouveau dans ses bras. Elle évoluait avec autant de grâce que lui, sans doute même davantage devait-il admettre. Il en éprouvait autant d'admiration que de jalousie. Elle le fascinait, il voulait se consumer dans son rayonnement naturel, pénétrer son monde et s'accaparer sa lumière pour la faire sienne. Elle pouvait devenir sa gloire. Invisibles, les particules de drogues flottant dans l'air se cramponnaient à son cerveau à chaque inspiration prise, si bien qu'il s'apercevait à peine des prémices de ses délires. Il nageait dans une félicité complète et grisante. « Ça ne me poserait pas de problème de me soumettre si c'est toi de l'autre côté de la laisse. » s'entendit-il dire. « Par contre, ce n'est pas dit que je le ferai facilement. Je ne suis pas Kiara. » Il lui restait encore assez de fierté pour ajouter cela.
Message VI | 1073 mots (J'ai pas trouvé la définition de "concis" dans le dictionnaire )
A force de courir partout, elle avait fini par trouver la porte qui donnait aux coulisses de ce grand événement. Elle s’était plantée devant en attendant de discerner l’activité de l’autre côté, au passage d’un serveur. Avec ses yeux plissés, elle essayait de voir ce qu’il se passait à travers les murs. Sa concentration trop importante la fit presque rater la sortie d’un homme qui, plateau en main, venait ravitailler le buffet. Sans hésiter une seconde de plus, Lia fonça vers l’ouverture. Les dix mètres furent avalés en quelques bonds et ne causèrent pas le moindre heurt. La Démone se faufila derrière le battant et tenta aussitôt d’atteindre une table sous laquelle se cacher.
-Hey !
Lia plongea sous le meuble et se précipita à l’autre bout. Le principal problème était qu’il n’y avait aucune nappe pour masquer sa progression.
-Vous, là ! Vous n’êtes pas autorisée à entrer ici !
Un type se baissa et Lia vit sa main essayer de la happer. Elle l’esquiva in extremis. Autour, la forêt de jambes et de pieds s’étaient éloignés de son emplacement. Lia trébucha en arrière alors qu’elle reculait. Elle tourna la tête à la recherche d’une autre table. Si elle allait vite et qu’elle faisait une sorte d’ellipse, elle pourrait récupérer un couteau quelque part et faire demi-tour sans se faire attraper. Prenant une inspiration, la brune se donna une impulsion sur ses pieds. Elle comprit que quelque chose n’allait pas quand, au lieu d’avancer, elle glissa et se heurta au sol froid.
-Aïe !
Ses dents avaient claqué avec le choc contre sa mâchoire. Le cuisinier qui lui tenait la cheville la tira jusqu’à lui puis la souleva dans les airs. Lia avait beau se débattre, l’homme avait une force impressionnante et il n’avait aucun mal à la maintenir ainsi la tête en bas. Lia plaqua ses mains entre ses jambes. Sa robe était levée et on voyait sa culotte.
-Lâchez-moi ! Hurla-t-elle d’une voix stridente.
-Cette pièce est interdite aux convives. Nous allons vous ramener en salle.
Lia secoua vivement la tête. Elle prenait des teintes cramoisies.
-Non, je veux un couteau ! Il me faut un couteau !
Autour, les hommes et les femmes s’étaient penchés vers elle. Lia avait l’impression d’être entourée de chiens qui la reniflaient. Elle n’avait jamais été aussi humiliée.
-Erk. Fit l’une d’eux. Sors-nous ça de là.
-Donnez-moi juste un couteau et je m’en vais. Pleurnicha la Démone.
On ne l’écouta pas. Aussi vite qu’elle était entrée, Lia fut remise à l’endroit et éjectée de la cuisine. Elle se retrouva, chancelante, au bord de la salle de bal. Nerveuse, elle vérifia que sa robe cachait bien ses fesses. Ses joues étaient rouges de honte et elle pleurait sans s’en rendre compte. Lia maintint son équilibre en s’appuyant contre un mur. Plus le temps passait et plus elle se sentait bizarre. L’atmosphère couplée à la raclée qu’elle venait de se prendre ne faisaient pas bon ménage. Elle avait envie de retourner se gaver de nourriture pour y noyer son désarroi, mais elle savait que les deux blondes l’attendaient. La Démone traina les pieds jusqu’à l’extérieur. Là, l’air lui sembla plus frais et léger. Elle réalisait qu’il y avait ce quelque chose de suave dedans, mais qu’elle ne comprenait pas tout à fait. Lia n’avait pas à savoir de quoi il s’agissait.
Le jardin était plus calme que la salle de bal et la Vile retrouva aisément le trio. Elle arriva dans le dos de sa victime en prenant son temps. Ce n’était pas l’impatience qui manquait, son état l’empêchait juste d’aller aussi vite qu’elle l’aurait souhaité. Elle pleurait encore, mais en silence. Une fois à la hauteur de la jeune femme, elle saisit son poignet. Lia croisa son regard, puis celles des jumelles.
-J’ai pas trouvé. Leur indiqua-t-elle la gorge serrée.
Ça ne faisait rien. Elle pouvait se débrouiller sans arme. Ses ongles courts étaient devenus des griffes, qu’elle n’hésita pas à planter dans la chair de l’insolente. Puis, la Démone tira violemment sur son bras pour la forcer à se baisser. Elle-même s’étira pour saisir son cou de sa main libre. Elle était tellement en colère que son visage était déformé.
-Meurs.
700 mots Lia essaie de voler un couteau mais se fait recaler /sbaf/ Elle retrouve Phèdre et Iphigénie, et menace Oriane
Je fournis un effort pour me concentrer. Mes iris fixèrent les traits de l’homme. Il me semblait fort et… Je plissai les yeux, comme si je cherchais à découvrir chacun de ses secrets enfouis. Il me disait quelque chose. « Moi ? » répondis-je faiblement. Au niveau de mon sourcil gauche, un début de migraine s’agrippa à mon crâne. Trop faible pour protester et ne comprenant de toute façon pas la manœuvre, je me laissai enlever. Tantôt, j’avais l’impression de danser dans ses bras. Tantôt, je flottais dans les airs. Mes perceptions étaient faussées et une partie de moi s’en rendait compte, celle qui tentait vainement de maintenir mon cerveau fonctionnel, le plus loin possible des sortilèges d’illusion. Mon corps bascula de nouveau en avant. Je détaillai la pièce avec ma vision approximative. Je connaissais cet endroit. Un bureau magicien. Je plongeai mon regard vert dans les yeux de mon interlocuteur. Le rouge qui les colorait me parut pourtant émeraude. « Je te reconnais. » murmurai-je. Lucius. « Oui, tu m’as manqué. » Je n’avais plus assez d’inhibition. Les mots sortaient d’entre mes lèvres plus vite que ma raison ne construisait de murailles d’interdits. Étais-je ici pour cette raison ? Une partie de moi en doutait. L’autre nageait dans un flou qui se voulait étrangement conciliant. Le fait que le Mage me touchât éveillait des sensations en moi que j’aurais préféré voir disparaître à jamais. Mais je n’avais plus de couteau à lui enfoncer dans le ventre et aucun argument viable ne me venait. Lorsqu’il me mordit, rien ne me parut suspect. Un frisson fiévreux me parcourut en lieu et place d’une réaction normale. Je refermai mes doigts dans ses cheveux. Dans ma tête, la haute silhouette d’Elias semblait me menacer. J’avais tiré un trait sur ma vie amoureuse depuis bien longtemps. Je m’étais laissée distraire par le Magicien mais il ne représentait que la décadence. J’étais une Salvatore. Seul le pouvoir comptait. L’amour ou le désir n’avait aucun poids face à ce même pouvoir. C’était la voie que j’avais choisie. Pourtant, dans les bras de Lucius, j’étais en train de perdre totalement pied. Quand il s’écarta, l’image du Mage Blanc continuait de se transposer à celle de l’inconnu. Je souris. « Ah... tu as enfin compris que tu devais me vouvoyer… » Ma voix était lente et pâteuse. J’avais l’impression de tanguer. « Mais enfin, Lucius… » J’amenai mon visage proche du sien autant que je le pus. Notre différence de taille était réelle. Elle l’avait toujours été. « Tu… » Je clignai des paupières et penchai la tête sur le côté. « Oh… » Derrière lui, il y avait quelqu’un d’autre.
« Bonsoir. Je vais vous demander de bien vouloir vous écarter gentiment de la Princesse Noire. » avant que je ne décide de faire de la corde à sauter avec vos intestins aurait pu être une suite probable de la phrase. La silhouette était celle de Kaahl. L’homme avait pourtant des cheveux longs et une aura sombre. Et des crocs. Il sourit, de bonne humeur. Ces crétins de Magiciens avaient confisqué chacune des Couronnes du Duc. Il les avait donc récupérées, toutes.
Au sol, le cadavre de mon garde du corps reposait. Ârès avait visiblement décidé de le remplacer. « Lucius… tu devrais faire a… ttention… » Je me sentais de plus en plus loin. Le noir fit progressivement disparaître les couleurs.
566 mots Eméliana prend Dorian pour Lucius. Ârès vient la sauver (on peut dire que c'est Ebola en quelque sorte ). Si Dorian est assez drogué pour vivre dangereusement, n'hésite pas. Ârès est plus puissant que Kaahl mais il a les Magiciens, les Rehlas et les Maîtres du Temps qui lui courent après actuellement. Val'Aimé est aussi à Seaghdha puisque Cyrius n'a pas voulu y aller et il a pour mission de fonction de protéger les enfants royaux (même si avec lui c'est approximatif, notamment parce qu'il désire faire tomber Cyrius). J'ai donc une bonne marge de manœuvre pour expliquer qu'Ârès laisse les intestins de Dorian en paix même si Dorian crie à la révolte
Les mains dans les poches, l'Arcesi traversait les rues de Mornhîngardh sans réfléchir à la destination qu'il empruntait, se contentant seulement de s'éloigner de l'appartement qu'il venait juste de quitter. Son esprit était trop agité pour qu'il s'intéressât à autre chose que les préoccupations que Bellone venait de faire naître en lui. Il avait essayé de ne pas la brusquer, de prendre sur lui pour ne pas laisser ses sentiments réagir à la place de sa raison. Lorsqu'il avait pris conscience que ce ne serait pas si simple, il avait préféré quitter les lieux avant de se laisser emporter et que les choses n'empirent. Il avait, par la même, espéré que l'air extérieur lui permettrait d'apaiser son esprit. Force était de constater qu'il était dans l'erreur et que c'était loin d'être le cas. C'était même tout le contraire. Après quelques minutes à ruminer en silence ses pas le menèrent jusqu'à un jardin public dans lequel il s'enfonça encore jusqu'à un petit kiosque. Là il s'arrêta, devant le ruisseau que surplombait la structure, vestige de la rivière qui s'écoulait depuis les Plateaux supérieurs et se dispersait en dizaines de bras à mesure qu'elle cascadait vers les Plateaux inférieurs. Dans la solitude de son environnement, la tempête qui avait commencé à gronder en lui éclata finalement. « Grán ! » s'exclama-t-il en cognant contre un arbre. Dans un même temps, l'obscurité teinta ses veines suivant le chemin de son poing qui s'écrasait sur le ligneux. Ce fut bref, néanmoins les stigmates de la magie noire imprimèrent l'écorce comme sa peau fut marquée pour quelques instants des ténèbres du sortilège. Agitant sa main douloureuse de s'être faite ainsi maltraitée, il expira longuement avant de se laisser tomber sur le banc sous le kiosque. La tête reposant sur une colonnade derrière lui, il se repassa le fil de l'histoire, cherchant à comprendre comment il en était arrivé là. Entre ses doigts, il fit rouler l'Acanthys. La gemme était terne et vraisemblablement le serait-elle longtemps encore avec cette nouvelle politique voulue par l'Amarante.
Il ne prit pas garde aux pas approchant. Après tout il s'agissait d'un jardin public, il n'était pas anormal de croiser des gens. Ce serait excepter le fait que les pas en question semblaient se diriger droit sur lui. Seulement alors il quitta les tréfonds de sa mémoire pour découvrir l'identité de l'intrus. « Nóirín ? Qu'est-ce que tu fais là ? » réagit-il, surprit, en constatant la présence de sa promise. « Je te cherchais figure-toi. ». répondit-elle en s'installant. « Quelqu'un m'a dit t'avoir vu entrer ici. » précisa-t-elle en se mettant à fouiller dans son sac avant qu'il ne l'interroge sur la façon dont elle l'avait retrouvée. « Tiens. Je voulais te remettre ça. » conclut-elle en lui tendant une lettre. Jämiel s'en saisit pour mieux la détailler. S'il n'y avait pas d'expéditeur clairement désigné, le sceau du clergé apposé sur l'enveloppe en laissait aisément deviner l'origine ainsi que le contenu. « Qu'est-ce qu'il y a ? » le questionna-t-elle ensuite en constatant le peu de réaction de l'Arcesi et la sévérité dans son regard. « Est-ce que ça a rapport avec Bellone ? ». Un rictus amer étira la commissure des lèvres du Nerethi. De ce simple fait la Déléis sut qu'elle avait visée juste. Alors elle se rapprocha pour poser sa tête sur son épaule comme elle glissa une main dans la sienne. « Peut-être est-ce à cause de cela que les Listes existent. ». Jämiel posa un œil accusateur sur Nóirín. « Dis-moi, est-ce que tu serais en train de sous-entendre que notre Lien est une erreur ? » - « Je ne dis rien de tel. Je constate seulement que votre relation est loin d'être celle que vous aviez avant et qu'il est possible qu'un Lien accidentel soit moins fort qu'un Lien prévu par avance. » - « Accidentel ? ». La brune soupira, consciente que ses mots n'étaient peut-être pas les mieux choisis pour décrire sans accrocs sa pensée. Elle décida ainsi de dévier légèrement la conversation plutôt que de répondre. « On dit l'air de Boraür être capable d'apaiser les maux de l'esprit. Vous pourrez plus posément échanger une fois là-bas. » - « Tu crois ça ? ». La réplique, sèche et sans hésitation, de Jämiel surprit la Nerethi qui se redressa vivement.« Qu'est-ce que tu entends par là ? ». L'Arcesi exhala un souffle ennuyé. « Ça n'a aucune importance. ». Bien sûr que c'était faux. Mais la nouvelle était encore trop fraîche pour qu'il en parlât sans passion. « Je ne crois pas que ce soit sans importance, non. Qu'est-ce qui s'est passé ? ». Avec le temps, la brune avait compris que les humeurs de son fiancé étaient fortement corrélées à celles de son Orine et à l'état de leur relation. Il lui avait fallu du temps pour l'admettre et le comprendre véritablement. C'était cette compréhension qui l'avait mené à ne pas s'indigner qu'il préférât l'omettre de ses projets en acquérant son appartement. Ils avaient trop à reconstruire pour qu'une âme externe s'invite entre l'Aisuru et son Orine. « Dis-moi. » insista-t-elle car, malgré tout ça, elle demeurait sa fiancée. Il s'écoula plusieurs secondes avant que Jämiel ne cède. De toute façon elle aurait été mise au courant un moment ou un autre. « Bellone ne vient pas avec nous. » - « Comment ça ? Elle ne vient pas à Boraür ? » - « Non. » exhala-t-il. « C'est cela qui t'a mis dans cet état ? ». Jämiel crut entendre le ton du jugement dans la réplique de sa fiancée. « Non. » réitéra-t-il sa réponse, plus durement. « Ce qui m'a mis dans cet état, c'est d'apprendre qu'elle ne m'en aurait peut-être jamais parlé avant le jour du départ. Que si elle ne vient pas c'est pour préférer aller à Utopia au milieu de ces insectes répugnants. » expliqua-t-il vivement, omettant avec mauvaise foi le fait qu'il ne s'agissait que d'un détour. « Utopia... » répéta Nóirín dans une grimace. « Il faut que tu lui parles. » répondit-elle cependant. « Ce n'est pas faute d'essayer. » - « Et que tu sois compréhensif. » ajouta-t-elle alors avec sérieux, ses prunelles ancrées à celles de son promis qui venait de se tourner vers elle, surprit. « Il ne faut pas que vous vous sépariez sur cette conversation. Tous les deux vous allez le regretter. ». L'absence de réponse du Nerethi lui fit supposer qu'il partageait cette opinion quand bien même il était en désaccord avec les agissements de son Orine. « Tu sais mieux que quiconque à quel point c'est difficile pour elle. ». Elle le devinait en voyant les efforts que fournissait Jämiel pour l'aider. « Je le sais, oui. » soupira-t-il. Cela n'empêchait pas que son dernier échange avec Bellone s'était avéré particulièrement douloureux pour lui aussi. Il lui avait été trop insupportable de découvrir à quel point il avait été laissé dans l'ignorance par la personne en laquelle il pourrait remettre sa vie. Était-ce ça le goût de la trahison ? « J'irais lui parler. Mais pas aujourd'hui. C'est trop tôt. » finit-il par capituler dans un soupir, ouvrant d'un même temps la missive qu'il avait toujours en main pour en découvrir le détail du contenu. « C'est pour quand ? » demanda la Déléis en jetant un œil sur le message, clôturant de ce fait leur discussion précédente. « La prochaine nouvelle Lune. » - « Ça veut dire que tu auras ton Anoraë avant de partir. Tant mieux. ». Un silence ponctua le commentaire. Avant de partir il saurait le chemin que comptait lui faire emprunter Dothasi. « Tu sais déjà ce que tu voudras en faire ? » - « Une chevalière probablement. Je réfléchis à la façon d'y intégrer l'Acanthys également. » - « C'est vrai qu'il y a ça aussi. ». Un sourire malicieux étira les lèvres de la Déléis qui s'était appuyée sur l'épaule de Jämiel. « Il paraît qu'il y a une joaillère de génie qui habite Utopia. » fit-elle moqueuse.
Ljund & Ni'Obë ~ Chaman ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 42 ◈ YinYanisé(e) le : 22/07/2023
Lun 14 Aoû 2023, 10:33
Message unique
À trois pattes sur le pont, les remugles de vinaigre provenant du seau irritaient mes narines. Après une heure à frotter, mon odorat ne s’était s’en était toujours pas accommodé.
- Tss.
Impitoyablement, le soleil dardait ses rayons sur ma nuque à peine protégée par un morceau de tissu sale arraché à un vieux vêtement et la migraine pulsait derrière mon front en noirs éclairs douloureux. Un peu plus bas, mon bras blessé protestait de chaque mouvement tirant sur les muscles et les nerfs déchirés par l’os. J’avais fini par aller me le faire soigner, mais j’avais encore plus mal qu’avant. Mes dents se dénudèrent quand la douleur reflua après une élongation de mon bras valide pour frotter une tâche crasseuse particulièrement coriace.
- Skor*… grinçai-je avant d’envoyer rageusement ma brosse cogner contre le bois. Agacé, je basculai sur mon derrière et renversai ma tête vers l’arrière, un bras sur les yeux pour les protéger de l’astre.
- Hé ! Calme-toi ! gronda Nini.
- Ouais, bah c’est pas toi qui frotte. rétorquai-je. L’avantage d’être morte, c’est qu’elle échappait au nettoyage sans fin de ce bateau dont l’odeur de poisson faisait désormais partie intégrante malgré les heures quotidiennes que passaient les mousses pour le lustrer. J’entendis ma sœur faire claquer sa langue contre son palais.
Comme j’étais invalide, je n’étais temporairement bon qu’à ça, au plus grand plaisir des autres mousses en apprentissage. Je curais tellement ce pont qu’il me suivait jusque dans mes rêves. J’étais certain de connaître par coeur les veines incrustées dans les lames du navire, ses ocelles impavides de différentes formes, les zones où le bois se décolorait et là où il se gondolait car le vernis supposé le protéger de l’humidité commençait à s’écailler malgré l’obsessivité du capitaine pour la bonne tenue de son bâtiment.
- On s’fait chier. râlai-je sans m’adresser à personne en particulier. La souffrance irradiant de mon bras et de mon front me rendait particulièrement irascible et tout devenait la cible de mon irritation. J’en avais assez de passer mes journées sur ce bateau où il ne se passait jamais rien. Je trépignais d’impatience du jour où nous nous aventurerions plus loin, là où la mer devenait traîtresse et ses habitantes plus agressives. Je rêvais qu’on cite mon nom dans les histoires.
- Tu devrais profiter de cette accalmie. Cette sauge, bénie des Ætheri, a fait naître les pires horreurs venues de leurs immondes abysses, elles vont finir par se risquer de plus en plus à s’approcher de nos côtes. Il y a des semaines qu’on attend le retour du Lapuri et je parie qu’il a rencontré une de ces saloperies de monstres. Et je ne crois pas non plus que la sauge retiendra prisonnières éternellement ces chiennes des mers. Tu devrais prier que les Ætheri nous fassent cadeau d’un répit, mais ce n’est que le calme avant la tempête. commenta Alfsol. Comme les autres Kazak, et même dans la mort, son aversion pour les Ondins ne connaissait pas de demi-mesure.
- Ils ont déjà commencé à s’agiter à Port Dirælla. intervint un autre esprit.
Mon bras redescendit et j’observai celui qui venait de prendre la parole. Je ne l’avais encore jamais vu. Fin et délié, ses traits avaient été peints par le pinceau de l’arrogance.
- J’y étais. ajouta-t-il en surprenant mon œillade curieuse. C’est même la raison de ma mort. Nous, les mâles, sommes exploités jusqu’à la mort. Il y a chaque jour des accidents de chantier. J’étais danseur, ma place n’était pas là-bas.
Les lèvres d’Alfsol s’étaient pincées à mesure que l’esprit parlait et elle leva les yeux au ciel. Je vis qu’elle se retenait de ne pas envoyer bouler l’esprit plaintif comme elle savait le faire parfois quand l’un d’entre eux atteignait les limites de sa patience.
- Oh, cesse tes lamentations. J’exècre les femmes Sirènes, mais je méprise encore plus leurs homologues masculins. Il suffisait de te révolter contre ces emmerdeuses au lieu de venir chouiner ici.
Je ne m’entendais pas toujours avec Alfsol mais cette fois-ci, j’étais d’accord avec elle. J’adoptai précisément la même attitude à l’encontre du trouble-fête. S’il avait péri dans d’affreuses circonstances, c’était bien fait pour sa gueule. Je retins de peu cette phrase acerbe, mais mon expression me desservait. L’Ondin nous offrit son regard le plus outré mais je n’en avais pour ainsi dire, rien à foutre. J’étais énervée. Si cet inconnu pensait qu’on allait venir pleurer sur sa tombe, il s’enfonçait le doigt dans l'œil. Les impies ne méritaient pas une seule once de respect de notre part, encore moins lorsqu’ils s’incrustaient ainsi dans les conversations. Sous prétexte qu’ils flottaient et qu’ils étaient intangibles, certains Esprits se croyaient tout permis.
- Vous pourriez être plus aimables. Je viens de mourir, tout de même !
- Qui t’as dit qu’on faisait la charité ici ?
Les Kazaks ne faisaient jamais la charité. Je l’avais sifflé sans avoir besoin d’y penser. J’obtins d’Alfsol un regard entendu. Ma réplique lui avait plu, ce qui gonfla mon égo. Notre doyenne était une référence kazake, alors son approbation valait beaucoup. Je poursuivis.
- T’es mort de quoi ?
L’Ondin parut sur le point de protester, trouvant sans doute impoli qu’on lui pose la question avec aussi peu de tact, mais l’attention qu’on lui portait lui fit retrouver sa posture noble. Il rejeta les épaules en arrière et prit un air tragique.
- D’épuisement. On m’a empêché de boire pendant des jours et ensuite ces vipères m’ont battu à mort. Elles me trouvaient trop faible.
Ljund ricana, se moquant ouvertement de l’éphèbe, et j’émis malgré moi un rictus railleur. Il n’avait même pas su honorer son propre trépas. Si j’étais au moins convaincue d’une chose, c’était que je n’étais pas morte dans une telle passivité. Je n’avais pas besoin de m’en rappeler pour le savoir.
- Et toi ?
Cette conversation cessa immédiatement de m’amuser. Je croisai les bras.
- Mêle-toi de ton cul la morue.
L’Ondin, vexé, était sur le point de partir mais je le rattrapai. Je venais d’avoir une idée. J’ignorai ce que cela pouvait donner et au vu du sourcil levé d’Alfsol, je risquais peut-être de perdre son approbation.
- Attends ! Excuse-moi ! J’ai pas fini. Tu peux nous en dire plus sur toi ?
Hautain, il se dégagea et entreprit de me regarder de haut.
- Pourquoi ? Tu ne préfères pas te mêler de ton cul ? Vous allez encore vous moquer. Il promena son regard sur le petit groupe et un rictus déforma son beau visage. Maudits Gælyan… ajouta-t-il à voix basse pour lui-même.
- Si tu veux qu’on aille en faire baver à celles qui t’ont fait ça, on peut s’arranger.
Je m’en fichais un peu pour être honnête. Je cherchais avant tout un autre intérêt à son discours : la source de motivation pour ne pas terminer comme lui.
- Tu veux que je demande de l’aide à un bipède ? Contre mon propre peuple ? Jamais !
Il s’étouffait et dans son indignation, fit voler en arrière sa chevelure nacrée. Alfsol eut un petit sourire narquois et lui souffla un commentaire de son cru. Il leur adressa ensuite un grossier geste de la main et s’en fut en les insultant dans sa langue. Je me détournai de l’Esprit. Tant pis, j’avais essayé.
- Lju. appelai-je. Il maugréa de façon inintelligible. Le pont va sécher avant que tu n’aies terminé. Allez, lève-toi, t’as presque fini.
Ce n’était pas vrai. Il lui restait pas mal de surface à traiter, mais je ne pouvais rien y faire. Si j’avais pu, je l’aurais aidé. A défaut, j’essayais de prendre un ton compatissant.
- T’es pas le capitaine, il me semble. grogna l’insolent en soutenant mon regard.
Je le considérai froidement. Je décidai de ne pas tenir rigueur de son insolence. Elle me blessait, mais je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même.
- Ca fait combien de temps que t’es en charpie déjà ?
J’évitais de trop compter les jours depuis que je n’avais plus de corps. Ça m'angoissait.
- J’sais pas, j’ai vu le médecin y a deux jours.
Je cachai ma surprise. J’avais cru qu’une éternité était passée. J’angoissai.
- On trouvera un autre guérisseur pour t’arranger ça rapidement.
- Et dire quoi ? Que j’ai encore trop mal ? Plutôt crever, je vais devenir la risée de tout le monde. C’est rien, je vais finir par m’habituer, j’suis pas une chochotte !
Je mordis l’intérieur de mes joues pour canaliser mon envie impossible de l’étreindre. Je n’aimais pas le voir souffrir ainsi sans pouvoir l’aider. Ça le rendait, en outre, moins efficace dans l’équipage. J’avais besoin qu’il le soit. Nous devions retourner dans les grandes eaux au plus vite si nous voulions avoir une chance de mettre la main sur celles ou ceux qui avaient instigué ma mort.
1536 mots
Skor = Merde
Dorian Lang ~ Vampire ~ Niveau II ~ ◈ Parchemins usagés : 227 ◈ YinYanisé(e) le : 22/08/2022◈ Activité : Chômeur grincheux
L'emploi d'un autre nom que le mien me fit tiquer. Le doute levé par son sang devint une ancre plombant mon coeur dans l'abîme. J'aurais voulu l'ignorer, continuer de croire et me débattre pour revenir à la surface, et tant pis si celle-ci était factice. À la place, je délaçai lentement son masque et le fit tomber à terre. J'encadrai son visage entre mes mains et le pressai, comme si je pouvais y graver par la force de ma volonté les caractéristiques de celle que j'avais cru étreindre. Ma joie se morcela en cendres dans ma bouche. Je ne savais plus. Je ne voulais pas savoir. « Non... » Je refusai cette réalité. Elle avait pu changer. Il y avait des années que je ne l'avais pas vue. Mes doigts s'enfoncèrent dans ses cheveux comme pour se persuader qu'ils avaient été noirs et lisses par le passé. Le physique ne résistait pas face à la magie, tout le monde le savait. Son apparence ne prouvait rien. M'avait-elle reconnu, moi ou un autre ? Ce Lucius. Mon pouce glissa sur les traces que mes dents avaient laissé sur son cou. Elle paierait ma déception de sa vie. Son sang m'attirait de nouveau, obscurcissant mon jugement. Il m'obnubilait tant que je ne m'aperçus de la présence d'un tiers qu'en entendant sa voix. Je pivotai tout en prenant soin de me placer entre elle et le nouveau venu. Je sentis mon être se rétracter face à son aura, de me fondre dans les ombres où je disparaîtrai. Ses traits avaient quelque chose de familier, comme si j'avais déjà vu ce faciès reproduit dans des articles ou sur des peintures, mais ses crocs luisant m'indiquaient pourtant être en présence d'un congénère. Je n'étais sûr de rien. Ce soir, rien n'était ce qu'il paraissait être, avec ou sans les masques et je n'avais plus les capacités pour réfléchir.
« Pardon ? » Quelle Princesse Noire ? Isahya n'avait jamais fait partie de la famille impériale. La confusion m'empêchait de collecter mes pensées qui m'échappaient comme si j'essayais d'attraper de l'eau avec un filet de pêche. J'étais agacé qu'on m'interrompe. De quoi se mêlait-il ? Je baissais les yeux sur le cadavre à ses pieds. « Si vous avez fini avec celui-ci, vous n'avez qu'à aller chercher quelqu'un d'autre à vous mettre sous la dent au lieu de voler dans l'assiette des autres. Il y a largement de quoi faire parmi les invités. » rétorquai-je avec mauvaise humeur, peu enclin à suivre sa demande. Un mouvement dans mon dos m'alerta et je réceptionnai la rousse avec mon bras avant qu'elle ne s'écroule au sol. Qui qu'elle soit, et qui qu'il soit, je ne la livrerai pas. Je n'avais pas pour habitude de donner ou de partager. c'est de la générosité qu'il attendait, il faudrait se tourner vers les Anges. Je raffermis ma prise sur sa taille, laissant sa tête pendre dans le vide vers l'avant. J'haussai les épaules et revint sur l'homme. Sa présence étouffante me mettait mal à l'aise. Quelque chose m'échappait et je n'aimais pas ça, mais j'aimais encore moins qu'on me prive de mes possessions. « Il ne reste plus grand chose à sucer d'elle, comme vous pouvez le voir de toute façon. Ce serait plus malin - et poli - d'aller voir ailleurs. En d'autres mots, dégagez. »
Mes yeux se fixèrent un instant sur la Princesse Noire. Cette petite chose fragile m’amusait beaucoup. Les différents acteurs en lice pour la Couronne ne m’arrivaient pas à la cheville. Il aurait été trop facile de m’emparer du trône. Je n’aurais néanmoins pas pu le garder longtemps, à cause de ceux qui me chassaient. À moins d’éliminer tous les Maîtres du Temps, je serais condamné à régner dans l’ombre. Le jeu m’amusait. Eméliana était une femme et elle était faible. La défaite des autres candidats n’en serait que plus réjouissante. La rouquine serait Impératrice Noire et je serais son Empereur, celui qui actionnerait les fils de ses mains délicates depuis les ténèbres. Et lorsque j’aurais fini ceux qui domptaient le Temps, alors je l’éliminerais pour prendre sa place. Lentement, comme une langue humide qui remonte un visage du menton jusqu'au front, mon regard arriva sur Dorian. Je voyais son identité. Si je ne l’avais pas captée par magie, j’aurais pu m’absenter une fraction de seconde et observer son existence entière sans qu’il ne me remarquât. J’avais beaucoup de frères et sœurs. Un deuxième allait bientôt arriver. Je le savais. Je sentais aussi un vide dans ce futur à venir, des actions inexplicables qui trahissaient la présence d’autres protagonistes. Ils n’étaient pas toujours détectables. J’abandonnai la politesse. « Tu m’en diras tant. » Être en ce lieu était problématique. L’Aliénation ne m’atteignait pas autant que lui mais les effluves des drogues étaient puissants. Je le regardai. J’avais souvent tué et mis en scène la mort. J’aimais lui lier l’Art, sortir les organes, les étirer, amener de la végétation dans mes scènes funestes. J’adorais les natures mortes. Il me faudrait tenter de conserver une partie du corps d’une de mes victimes tout en laissant pourrir l’autre. Le prochain Maître du Temps à mourir connaîtrait une fin grandiose. Un sourire s’esquissa sur mes lèvres. À moins que je ne m’occupasse du Vampire ?
Une autre aura s’invita, celle de Val’Aimé. Sa magie entourait son corps et s’étendit jusqu’au Vampire. « Trois frères, trois Destins. » m’amusai-je. Il me fixa, après avoir arraché la Princesse Noire aux bras du plus jeune d’entre nous sans s’approcher de lui davantage. La télékinésie était d’une utilité prodigieuse. Il aurait pu lui briser la nuque sans ciller. Un rictus déforma ses traits. Il était au fait de mon existence. « C’est donc vous. » Moi, celui qui avait été enfermé dans la prison dénuée de magie du Cœur Bleu et qui s’en était échappé. Moi, l’homme qui ressemblait au Duc Paiberym. « Oui. Et voici Dorian, notre petit frère. Vous devriez faire attention. » J’avais finalement craqué et m’étais éclipsé sans qu’on ne me vît. « Il risque d'avoir tendance à fricoter avec les Dames Noires à l'avenir, comme un Ange de ma connaissance. À croire que les Empereurs Noirs ne savent pas défendre leur propriété. J’espère que vous serez expéditif une fois la Couronne sur votre tête. » Il ne dit rien. Il n’était pas des plus bavards. « J’ai hâte. » lui révélai-je. Hâte de le mettre à genoux. Puis, je m’avançai vers le Vampire. Ma main enserra son cou tendrement. « Tu devrais apprendre la politesse. Ton Destin n’est peut-être pas de mourir demain mais je suis du genre à chier sur le Destin. Ne me tente pas trop. » Mon autre main s’avança vers son nez. Je lui fis une pichenette et disparus juste avant qu’un quelconque Maître du Temps n’arrivât. Ils annuleraient leur venue.
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Après le départ du trouble-fête, je regardai Dorian. Je n’avais rien dit mais avais parfaitement compris. Si nous étions réellement frères tous les trois, c’était forcément par notre père. Quant au reste... « Ce serait dommage d’avoir à exterminer tout un peuple pour une histoire de femme. » murmurai-je. Les relents de la drogue me faisaient pourtant miroiter un combat sanglant. J'adorais exterminer en masse et si, un jour, je devenais Roi, je marcherais sans aucune hésitation sur le peuple de quiconque tenterait de bafouer mon honneur, lien de sang ou non. « À bon entendeur. » J'emportai la Princesse avec moi et quittai ce lieu de débauche le temps de la placer en lieu sûr.
674 mots Fin. Vivement une nouvelle réunion familiale
La situation, si tant est que je l'eusse contrôlée à un moment donné, m'échappa comme un plateau qu'on aurait fait sauter de mes mains. Le temps d'un battement de cil, une force invisible m'enleva ma prise sur la fille et j'aperçus l'ombre d'un autre homme se profiler. Ma vive protestation resta coincée dans ma gorge. Le bureau paraissait trop petit pour ces deux-là ensemble et j'eus le désagréable sentiment d'être un insecte comprimé par une main invisible. Si ça leur chantait, je finirai écrasé contre le mur. Ça ne m'enchantait pas du tout.
Mes deux sourcils se haussèrent brusquement. « Quoi ? Je ne suis pas... Qui êtes-vous tous les deux ? » Malgré son ton plaisantin, j'avais compris qu'il ne mentait pas. Quel intérêt aurait-il eu à déblatérer un tel mensonge ? Mais comment me connaissait-il ? Et pourquoi, moi, je ne le connaissais pas ? Des questions à ne plus savoir qu'en faire, mon regard voguait de l'un à l'autre dans l'incompréhension la plus totale. Je détestais ne pas comprendre, je détestais son sourire qui semblait me narguer et s'agrandir à mesure que ma confusion croissait.
Celui qui parlait s'approcha et je suffoquai avant même de sentir ses doigts autour de mon cou. Je n'avais pas l'habitude d'être ainsi menacé, j'étais généralement celui qui menaçait. De près, je fus troublé par sa ressemblance avec le Magicien dont la presse parlait régulièrement. Mais celui qui me tenait exsudait une malveillance qui évacuait la possibilité qu'il s'agisse du Duc Paiberym. Le mystère englobait le personnage autant que les propos qu'il tenait.
Je clignai des yeux après sa disparition, agréablement surpris d'être encore en vie. Mon attention revint sur le dernier arrivé, puis sur celle qu'il m'avait volée. La Princesse Noire, avait dit celui qui se disait mon frère. J'avais l'esprit trop embrumé pour additionner les informations en ma possession, mais je savais que j'avais mis les pieds dans une pagaille qui portait la signature des Sorciers. « Ça dépend, est-ce qu'elle en vaut la peine ? » rétorquai-je, encore frustré qu'il me l'ait volée si cavalièrement. Je me fichais pas mal qu'il s'agisse de sang royal ou de la dernière des fermières, je n'aimais pas qu'on m'empêche de terminer ce que j'avais commencé. Si besoin, je pourrais la retrouver maintenant que j'avais bu son sang, mais s'il était vrai qu'elle appartenait à la couronne sorcière, j'aurais du mal à conclure cette entrevue comme elle avait commencé. Tout comme avec Èibhlin quand elle aurait officialisé son mariage. Deux, ça commençait à faire beaucoup pour parler de coïncidence. L'homme quitta la pièce mais j'y restais, profitant du calme retrouvé pour me plonger dans mes pensées. Les drogues rendaient l'exercice difficile mais j'étais trop chamboulé pour me laisser aller à l'effervescence ambiante de nouveau. Je sentais son poids dans ma tête, je savais qu'elle finirait par abaisser chaque barrière, l'enchantement était trop fort pour moi. Une tête passa par la porte laissée entrebâillée. L'agacement sillonna sur mes traits. Pourquoi tout le monde pénétrait ici comme dans un moulin ?
Message VII | 554 mots
J'ai hâte aussi 8D Je suis toujours preneuse de situations qui permettent de justifier son titre de Grincheux
Eutropius baignait dans les vapeurs euphoriques de l'air ambiant. Son esprit faible avait tôt fait d'être balayé par les artifices mis en œuvre par leurs blafards hôtes. Il ne se souvenait plus quand il s'était débarrassé de son masque. Personne ici ne le connaissait de toute façon, à part ses camarades. Désinhibé, il s'était mis à demander à chaque personne rencontrée s'il s'agissait ou non d'un Enfant de la Nuit. À chaque réponse négative, il se détournait de l'interlocuteur avec un dégoût manifeste. Une fois, il était tombé sur une Vampire. Elle était occupée à danser avec un homme, le nez plongé dans son cou alors qu'ils tournoyaient lentement mais ça n'avait pas arrêté le Sorcier qui les avait interrompus. Les lèvres carmines de la danseuse luisaient fortement et Eutropius avait jugé son maquillage fort étrange. Quand elle avait acquiescé à sa question, il s'était suspendu à son bras et avait commencé à la supplier de façon inintelligible. « Je ferai ce que vous voulez, mais transformez-moi, s'il vous plaît ! Regardez ! » Il avait défait sa manche et lui avait mis son poignet sous le nez. La Vampire avait froncé le nez. « Beurk. Tu as l'air d'avoir un goût infect. » avait-elle lâché avec dédain avant de le repousser du bout des doigts. Il avait trébuché en arrière et quand il s'était redressé, elle avait disparu avec son partenaire.
Grisé malgré son échec, l'étudiant avait slalomé entre les bassins ruisselants, observant ceux qui s'y prélassaient sans ressentir le désir de les rejoindre. Il préférait libérer ses pulsions dans des lieux plus intimes, à l'écart des regards, sans que d'autres puissent venir le gêner. Il s'était ressaisi, se remémorant son objectif en tête. Il avait juste besoin d'un Vampire et ce que ces débauchés fabriquaient dans les bains à l'eau colorée ne lui disaient rien qui vaille.
Il avait fini par tomber sur un couloir parallèle à la salle de réception et s'était trouvé naturellement attiré par une porte ouverte. À l'intérieur, un homme était assis, le menton dans les mains. Leurs regards se rencontrèrent alors qu'Eutropius pénétrait à l'intérieur. « Bonsoir, je cherche juste un endroit pour souffler. » Sa voix était pâteuse. L'homme avait écarquillé les yeux alors qu'il s'approchait. « C'est une plaisanterie ? » Interdit, Eutropius l'avait fixé. L'homme ne portait pas de masque et son teint blême tranchait sur la pénombre de la pièce. « ... » L'inconnu s'était levé et lui avait brusquement pris le menton pour lui lever le visage. Le souffle coupé, l'adolescent avait entendu son coeur battre à grands coups dans sa poitrine. Impressionné, il ne pipa pas un mot alors qu'il se faisait dévisager.
Zeryel ~ Ange ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 206 ◈ YinYanisé(e) le : 25/01/2023
Mar 15 Aoû 2023, 20:08
Le Bal de Seaghdha & autres aberrations
“ Écrit par O. ”
Aller simple pour la boucherie
Il est sur toutes les lèvres, le Bal de Seaghdha est officiellement ouvert... y compris aux Basphéliens ! ! Stupéfaction et absurdité sont au rendez-vous. Déjà, des exclamations résonnent dans les couloirs et troublent la concentration, comme un mauvais présage de ce qui adviendra. Des invitations ont été reçues et tous ne sont pas convié. Allez savoir quels sont les critères de ces buveurs de sang ?
Le bon sens aurait attendu d'Avril d'Ovipa une interdiction pure et formelle de s'y rendre mais c'est aux parents et tuteurs que la responsabilité reviendra. Vous l'aurez compris, sortez vos meilleurs talents d'acteur pour jouer un gros caprice à papa et maman pour obtenir le droit de ... servir de plat de résistance ??? Il m'est pénible de souligner le danger sous-jacent à cet évènement d'envergure, mais quelqu'un doit le faire. Depuis plusieurs jours, je suis témoin de l'excitation vulgaire qui règne à la simple évocation d'un bal masqué et qui aveugle nos naïfs étudiants sur ce qui n'est rien de plus qu'une mascarade. Laissez-moi enlever ces œillères : Ceci est un piège ! Si gros que personne ne semble le voir ! Je le dis, et je le souligne pour les optimistes : l'étiquette de Basphel ne protégera pas vos fragiles nuques de ces avides bestioles. Ne vous fiez pas à leur apparence humaine, il n'y en a pas un qui ne fantasmera pas de vous vider jusqu'à la dernière goutte de votre sang !
Et pendant ce temps, tout le monde semble oublier que chez ce même peuple qui nous invite si aimablement, une lignée entière des leurs s'est faite décimée. Rien n'est clair sur les circonstances de ce génocide, on ignore qui sont les coupables du massacre mais mon âme de détective ne peut s'empêcher de flairer ici et là les remugles de la vérité qui se cache derrière ces tristes - tout est relatif - nouvelles. En effet, si nos ennemis au visage pâle se sentent de faire la fête après avoir appris la mort des leurs, c'est qu'ils ne sont pas complètement innocents. Je ne serais pas surpris d'apprendre qu'ils pratiquent quotidiennement le cannibalisme comme certains Démons, cette race cousine par de nombreux aspects.
Si cela ne suffit pas à refroidir votre folle décision d'y risquer votre peau, alors je vous souhaite sincèrement de nous revenir sains et saufs.
Note subsidiaire : Je prie nos camarades Vampires de se rassurer car ils ne sont pas visés par ma diatribe. J'ai confiance en Basphel pour contrôler, à défaut d'éradiquer, vos défauts raciaux. Si je peux me permettre une suggestion : mettez en place une alarme magique pour ne pas rater vos heures de repas et ainsi éviter de faire subir aux innocents les conséquences de votre soif.
Note subsidiaire 2 : SI VOUS ÊTES OU AVEZ ÉTÉ VICTIME D'AGRESSION PAR UN VAMPIRE, PARLEZ-EN AUTOUR DE VOUS. IL NE S'AGIT PAS DE DELATION MAIS DE SOUTIEN PSYCHOLOGIQUE ET CELA PERMETTRA D'ÉVITER D'AUTRES "ACCIDENTS" !
Le sexisme est la solution, ou pas !
On le sait, tous les journaux en parlent, la mystérieuse muraille de sauge continue d'emprisonner chez eux ces pauvres Ondins (la relativité, toujours). On les plaint, un peu, sans trop de conviction, et je ne peux m'empêcher de noter un manque flagrant de moyens mis en œuvre pour débarrasser les mers et océans de la mauvaise herbe. Peut-être que les grosses têtes ont réfléchi quelques secondes et en ont conclu que la vraie mauvaise herbe n'était pas la sauge, mais bien les hommes-poissons.
Je vais dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : Est-ce que le monde n'est pas plus tranquille quand les Sirènes ne viennent pas chambouler le commerce maritime, menacer les trajets d'innocents voyageurs, ou gâcher les séjours balnéaires de familles qui souhaitaient seulement profiter de leurs vacances ? À méditer.
Autre effet de la sauge, et au plus grand plaisir des zoologistes, des espèces mutées voient le jour au contact de cette herbe qui ne cesse de nous surprendre. Jugées dangereuses selon les derniers rapports des passionnés qui les étudient, on vous recommande de garder vos orteils au sec pour vos prochains voyages en bateau !
Quant aux infortunés Ondins restés sur terre, ils sont reclus à Port Dirælla. Qu'à cela ne tienne, ils ne perdent pas le nord et ont décidé de profiter des travaux de reconstruction pour aménager la Cité de façon à améliorer cette situation inédite et qu'on imagine inconfortable. Tous s'y emploient. Tous ? Non, voyons. Seuls les mâles. Ce serait catastrophique de ruiner la manucure parfaite de ces dames sur les chantiers. Pendant qu'elles se prélassent, ils triment et au nom de quoi ? Une supériorité physique due à leur sexe ? S'arrêteront-elles là ? Aujourd'hui, ils tremblent sous leurs fouets, et demain ?
C'est là que je m'adresse à nos élèves Ondins ayant eu le malheur de naître homme. S'ils sont vos amis, vous pouvez d'ores et déjà faire vos adieux. J'entends d'ici les cœurs se briser en apprenant que le bel Adriæn Kælaria sera peut-être rappelé par son peuple pour aller s'abîmer les mains. J'ai une pensée pour le discret fils du moins discret Adam Pendragon. Né Ondin, Ikar Pendragon sera-t-il rappelé par sa mère pour mettre la main à la pâte ? D'élèves à esclaves, ils sont des dizaines à être concernés, et vous en connaissez sûrement. La situation vous paraît-elle juste ? Peut-on seulement parler de justice avec ces êtres biberonnés au sel ? Basphel va-t-elle mettre en place un projet de protection pour ces Ondins qu'on prive d'éducation pour servir de larbin aux fières matrones des mers ou resterons-nous sans rien dire ? La neutralité n'est-elle pas synonyme de lâcheté ? Ne donnons-nous pas raison à ce régime esclavagiste et injuste qui se met en place sous nos yeux en ne faisant rien pour lutter contre ?
Note subsidiaire : Si le sujet des mutations qui touchent les créatures aquatiques vous intéresse, je vous recommande de vous tourner vers Claer Risva qui saura vous donner de plus amples explications ou vous rediriger vers les articles pertinents dans les gazettes dédiées à la faune sauvage.
Le jeu des sept différences, version elfique
Connaissez-vous les différences entre les Ygdraë et les Alfars ? Sans doute est-il bon de réviser sur ce sujet car les uns comme les autres n'aiment guère être confondus entre eux. Si les premiers se contenteront au pire d'une remontrance vexée, les seconds pourraient vous planter un couteau dans le dos pour l'offense faite contre eux.
Or, on trouve récemment un curieux accroissement des individus de cette charmante deuxième famille sur les terres de Sympan. Ont-ils fini par faire le tour de leur forêt ? S'y étaient-ils perdus ? On raconte tant d'histoires sur la Forêt des Murmures, serait-il possible qu'ils aient eux-mêmes succombé aux pièges de leur propre foyer ? Ou peut-être désirent-ils vérifier si, des générations après, ils sont toujours supérieurs au reste du monde ?
Espérons que le retour à la réalité ne sera pas trop brutal.
Le choc avait fait s'évanouir la pointe d'agacement à voir une énième personne troubler ma tranquillité. Il devait avoir dans les quinze ans, a priori, et il ressemblait trait pour trait à moi lorsque j'étais adolescent, à l'exception de ses iris qu'il avait verts. Mon examen eut l'avantage de lui couper le sifflet. Il vacillait légèrement sur ses pieds, comme ivre. « Qui es-tu ? » Son odeur me répugnait. Comment, si jeune, pouvait-il avoir souillé autant son sang ? « Est-ce que vous êtes un Vampire ? » répondit-il à la place. Il s'approcha d'un pas, et je reculai de deux, méfiant. « Réponds à ma question. » Je n'étais pas d'humeur à gérer un jeune perdu dans un bal, surtout quand il me ressemblait autant, surtout après ce que j'avais entendu. À tout moment, je m'attendais à ce qu'il me réponde être aussi mon frère et un sourire ironique ombra les coins de ma bouche. « Eutropius. Eutropius Dogma. » Ça ne m'apprenait rien. « Vous êtes un Vampire, n'est-ce pas ? Ça se voit. » Merveilleux, j'étais tombé sur un imbécile. « Félicitations, tu n'es pas aveugle. » grommelai-je, acide. « J'ai rêvé de rencontrer l'un d'entre vous toute la soirée. Je ne vous laisserai pas m'échapper. » Qu'est-ce qu'il racontait ce nigaud ? « L'Aliénation te rend idiot. Je pense que ce que tu veux dire, c'est que tu vas avoir du mal à t'échapper si je décide de boire ton sang, ici et maintenant. » « Vous le feriez ? » Sa voix vibrait d'espoir. Je le jugeai fou. « Je ne suis pas assez affamé pour m'abaisser à boire ce qui te sers de sang. Qu'est-ce que tu es ? » « Un Sorcier. Je suis à Basphel. » Ah, un de ces morveux intellos. De mieux en mieux. « Vous avez un air familier. » « ... » « Vous pouvez enlever vos lunettes ? Je veux vérifier à quel point on se ressemble. » Je giflai sèchement sa main pour l'empêcher d'atteindre mon visage. Il avait un sérieux problème. « N'importe quoi. On ne se ressemble pas. » « Mais si. Ce doit être un signe. C'est forcément un signe. » « Qu'est-ce que tu me chantes ? » grondai-je, à deux doigts d'assommer ce taré. « Faites-moi l'un d'entre vous. Laissez-moi être comme vous, je vous en prie. » Stupéfait, je le dévisageai, à court de réparties. « Je vous laisserai tranquille ensuite. J'ignore comment tout cela fonctionne, j'imagine que vous devez me mordre ? Je suis désolé si mon sang ne vous attire pas, mais je ferai n'importe quoi. » Il avançait sur moi et je finis par le repousser brusquement en arrière. Il trébucha et tomba. Il se mit alors à quatre pattes et commença à ramper vers moi. S'il avait été moins ridicule, j'aurais pu me croire dans un cauchemar.
« Dégage. » « S'il vous plaît. » Eutropius s'était mis à geindre. Toute dignité oubliée, il agrippa l'ourlet du pantalon du Vampire. « Dites-moi au moins votre nom. » « Barre-toi ! » L'inconnu lui envoya un coup de pied en plein visage qui rouvrit la cicatrice qui zébrait sa joue. Son sang ruissela jusqu'à son menton avant de goutter au sol. Un muscle s'agita sur la mâchoire du Vampire et Eutropius eut un sourire victorieux. Il leva une main et se griffa directement sur la plaie. Le sang coula davantage, maculant ses mains et le sol. « S'il vous plaît. » murmura-t-il comme une prière. L'homme finit par s'accroupir pour se mettre à son niveau. Son regard était froid. Il tendit un index qui effleura sa joue blessée, et le suça ensuite avec un air pensif. Une grimace déforma ses traits. « Dégoûtant. Il y a comme un arrière-goût de poubelle. » Eutropius n'avait pas besoin de faire appel aux connaissances accumulées sur les Enfants de la Nuit pour deviner que ça desservait son plan. Il baissa la tête. « Pourquoi tu veux devenir un Vampire ? » « Parce que j'ai besoin d'être comme vous. Je me fiche de ne plus pouvoir sortir le jour, de ne plus manger normalement. Je veux juste vivre pour toujours, dans le noir, à faire mes recherches. » « Et le sexe ? » Le Sorcier cligna des yeux, surpris. « Je dis ça parce que tu es jeune encore. Tu n'as pas envie d'en profiter davantage ? » « Je... » C'était un bon point, qu'il n'avait pas trop considéré jusqu'à présent. Mais ce n'était pas le sexe en lui-même qui l'attirait. Ou peut-être un peu, mais il avait lu dans un livre qu'il ne s'agissait que des besoins naturels, des messages envoyés par ses hormones. S'il devenait un Vampire, il n'en souffrirait plus et cesserait d'abuser de ses congénères en les droguant. Il sucerait leur sang à la place, ça lui paraissait être un échange honnête. « Je m'en fiche. » « Mmh. » L'homme se redressa et alla s'asseoir. « Relève-toi, j'ai honte pour toi. » Lentement, Eutropius s'exécuta. « Alors, ça signifie que vous acceptez ? » « Non, certainement pas. » « Pourquoi ? » « À quoi cela me servirait-il ? Je n'ai pas besoin de toi. Je ne vois aucun potentiel en toi, aucune force. » « ... » « En ça, tu me ressembles. » L'adolescent fronça les sourcils. « Avant. » précisa-t-il. « Et, pour ça, je peux te dire qui je suis. Dorian Lang. J'ai un peu pitié de toi Eutropius. Tu as l'air de savoir ce que tu veux, mais ça ne m'intéresse pas de te l'offrir. On vous apprend à être intelligent non dans ton école ? Alors deviens-le, et reviens me voir quand tu pourras me prouver que tu peux m'être utile, pas avant. Maintenant, sors d'ici. Tu me déranges et ton sang pue. »
Bien que concentrée pour conserver son masque affable sous le loup, l’Ondine tiqua. Sa bouche se déforma ; si elle avait laissé libre cours à son mouvement, un rictus colérique, criblé d’une sensation de trahison, aurait déchiré ses lèvres. Au lieu de quoi, une grimace mal maîtrisée, mais passagère, détruisit la structure parfaitement indifférente de ses lèvres. Un autre. Elle avait toujours su que Kiara en pinçait pour son frère : c’était aussi évident que Susannah était grosse, Læn stupide et Lorcán imbu de lui-même. Ça faisait presque partie de sa personnalité. Elle ne pouvait pas s’empêcher de le regarder. Les autres ne l’avaient peut-être pas remarqué, mais elle, si. Parce qu’elle la connaissait parfaitement. Parce qu’Adriæn lui avait affirmé haut et fort qu’il la ferait sienne. Et cette idiote en parlait à un inconnu, plutôt qu’à elle ? Était-ce cela qui la retournait le plus, ou la confirmation de toutes ses suspicions ? Peu importait ; son regard d’acier était déjà à l’affût de la silhouette de la traîtresse. La foule trop dense et compacte rendait la tâche ardue ; c’était comme chercher une crevette dans un champ d’algues. Après tout, elle ne payait rien pour attendre. « Ça ne m’étonne pas. Les hommes ne sont, en général, pas très observateurs. » lui répliqua-t-elle, d’un ton plus acerbe qu’elle ne l’aurait souhaité. Le placement de ses mains sur elle ne suscitait pourtant aucune animosité supplémentaire ; elle était toute au bouillonnement de ses émotions vengeresses et à leur expression à travers la danse. C’était facile. Elle avait juste à se laisser aller. Tout, ici, y aidait.
Tandis que sa cuisse remontait le long de celle de l’Alfar, sa main s’ancra à sa nuque. « C’est bien ce que je me disais. » Peut-être disait-il la vérité ? Elle ne pouvait pas en être certaine. Qu’il l’aimât lui aurait accordé un avantage non négligeable. L’amour abêtissait. Il rendait moins méfiant, plus prompt à accepter l’impensable, plus conciliant. Il s’agissait d’une faiblesse dont elle souhaitait se prémunir mais qu’elle escomptait faire germer dans le cœur d’autrui. Dans le sien, dans celui du meilleur ami de son frère. Peut-être même dans celui de Léonidas. Les Sorciers n’avaient, après tout, pas d’autre utilité que celle de ramper aux pieds des Sirènes. Une ancienne Impératrice des Abysses l’avait bien prouvé. « Très bien, tu auras droit à un baiser. » consentit-elle, un sourire énigmatique collé aux lèvres. Il allait deviner. Les Sirènes avaient organisé tout leur système politique autour de la soumission, et les récentes décisions le surlignaient. En cela, son avis ne dérogeait pas aux mœurs de son peuple. Qu’il trouvât lui convenait, parce que si elle voulait séduire Johannês, il fallait bien qu’elle s’entraînât. Elle n’avait jamais embrassé personne, mais ne comptait pas lui donner l’impression de subir la succion d’un labre géant. Il risquait de le rapporter à son jumeau, et cette idée lui était proprement intolérable. Avec Lorcán, c’était moins risqué. S’il lui faisait la moindre réflexion, elle mettrait tout sur le compte de l’alcool, rejetterai la faute sur lui, lui expliquerait que c’était la façon d’embrasser des Alfars qui ne convenait pas et, surtout, elle l’exterminerait. Un sourire flotta sur ses lippes, qui s’étendit lorsque la réponse du roux ne tombât. « Bravo, tu n’es peut-être pas si bête que tu en as l’air, finalement. » Elle lui tapota brièvement l’épaule, comme s’il s’agissait d’un brave dauphin.
Au bout de ses doigts, elle vrilla ; elle vrilla tel un rouleau d’écume frappé par le soleil et poussé par le vent. Un sourire s’épanouit à nouveau sur son visage, tandis que devant ses yeux d’azur, la salle toute entière paraissait revêtue du drapé chaud et scintillant d’une bourrasque de sable. Le mécontentement au sujet des conseils en séduction si pertinents de Kiara – cette soirée lui était vraiment montée à la tête – ne l’enlaça qu’un bref instant, pour céder la place à une sensation plus apaisante, douce, presque chimérique, qui pulsait en elle avec une force de plus en plus libératrice. « Ah oui ? Et qu’en as-tu retiré de si instructif ? » s’enquit-elle, en revenant contre lui. Son corps avança, repoussant le sien sans jamais s’en défaire. Dans d’autres circonstances, elle n’aurait probablement pas osé se mouvoir ainsi contre un homme. D’ordinaire, elle entretenait une distance froide et calculée avec tous ceux qui souhaitaient l’approcher. Paraître inatteignable la réjouissait ; pourtant, ce soir, c’était la proximité qui la grisait. Imaginer une laisse autour du cou de l’Alfar charmait son esprit et, plus qu’elle ne l’aurait souhaité, son corps. « Oh, elle a bien essayé de résister. Je suis juste très persuasive, quand je veux. » Elle lui sourit, les iris ancrés dans les siens. Rompant la valse, ses mains se détachèrent de lui. Elles plongèrent dans ses cheveux, desquels elles ôtèrent un ruban. Quelques mèches d’argent, libérées, tombèrent sur ses épaules. Ses doigts s’envolèrent vers la nuque de Lorcán. Elle y fit glisser le tissu, avant de le nouer délicatement sur sa gorge. « Et voilà. Je suis certaine qu’un baiser suffirait à m’obtenir ta soumission pleine et entière. » Elle espérait qu’Adriæn les voyait. Elle lui réservait un sort similaire, le baiser en moins, l’étranglement en plus. Ses phalanges raffermirent leur prise sur le ruban pour attirer l’Alfar jusqu’à elle. Son regard glissa une seconde sur sa jugulaire. Plus tard, elle le mordrait.
Message V – 895 mots
Lana est toujours avec Lorcan, et à partir de maintenant, elle placera tout ce qu'elle dira et fera sous le coup des effets de la drogue et de l'Aliénation, et le premier qui lui rappellera un seul événement fâcheux sera exécuté en place publique
Lana Kælaria ~ Sirène ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 258 ◈ YinYanisé(e) le : 20/01/2021◈ Activité : En études
Le temps. Notion trouble. Kiara pensa aux nuages qui s’effilochaient dans le ciel. À l’aube qui s’étirait et au crépuscule qui s’allongeait. Au ressac marin, bercé d’un rythme régulier. À la pluie qui paraissait compter des fractions saccadées de secondes. Aux pas dont l’écartement se répète indéfiniment. Aux danses séquencées par les notes de musique. Aux mouvements de poignets du violoniste, aux gestes calculés du pianiste. Aux battements de cils d’un inconnu. Tout marquait le temps. Tout s’y inscrivait. Pourtant, elle était incapable de le saisir. Il lui échappait. Sa galopade endiablée l’entraînait loin, trop loin d’elle pour qu’elle pût le rattraper. Elle se savait ici et maintenant simplement parce qu’elle sentait sur elle un poids, un contact qui la maintenait dans la réalité. Devant ses iris noisette, les étoiles tournoyaient. Leurs murmures, d’abord aussi absents que d’habitude, s’étaient mis à tinter à ses oreilles. Émerveillée, elle avait levé les yeux vers le plafond, comme si, à travers sa voûte, elle avait pu vraiment voir les astres. Il lui semblait que c’était le cas. Leur musique résonnait dans tout son être pour la première fois. Malgré les longues minutes qui s’étaient écoulées depuis les premières notes, les larmes bordaient toujours ses cornées. L’émotion, vive et sauvage, plaçait tout son être en transe. Ses doigts tissaient leur chant dans les cheveux de la femme dont le visage était plongé dans son cou. « Lana… tu entends ? » finit-elle par demander, du bout des lèvres. Comme souvent, la réponse se noya dans les gorgées de sang qu’elle lui prélevait. Sa morsure lui semblait cependant plus douce que de coutume. Elle éveillait même des sensations qu’elle n’aurait jamais soupçonné un coup de croc de pouvoir lui faire ressentir ; le même genre de sensations que celles que Lucius avait créées et répandues partout sur son corps, que ses mains et sa bouche avaient façonné et ancré à tout jamais. Un sourire s’épanouit sur les lèvres de la Rehla, avant que ses ressentis ne s’estompassent progressivement. Les doigts de son amie se refermèrent sur son menton pour lui faire baisser le visage vers elle. « J’aurais bien continué, mais je crois que je risquerais de tuer votre enfant. » L’adolescente cligna des yeux. L’incompréhension l’englobait, et ni la drogue ni l’Aliénation ne l’aidaient à tirer une quelconque conclusion. « Vous devriez partir. » lui souffla la blanche. Ses phalanges caressèrent sa joue. Kiara appuya le contact, le regard vitreux. La première main se détacha, puis la seconde, et enfin le corps tout entier. L’appui perdu, elle chancela un peu. Stabilisée grâce au mur, elle vit son amie quitter la pièce. « Lana, attends ! » Avec une lenteur cahoteuse, elle tenta de la suivre. Le chant des étoiles s’accentua, jusqu’à vrombir dans le moindre de ses muscles. Ses jambes cédèrent ; elle s’écroula sur le carrelage lustré.
Message V – 474 mots
Kiara se fait mordre par une Vampire qu'elle prend pour Lana, puis elle s'évanouit (elle est dans l'une des pièces adjacentes, pas la salle de bal principale).
Lana haussa les épaules. « La reine des petites ambitions, sans doute. » S’empiffrer de sucreries, piétiner le sol en gigotant ses hanches graisseuses, baver sur des garçons indifférents aux battements imbéciles de ses cils. La danse pouvait être un art noble, mais en tentant de reproduire des mouvements qu’elle ne maîtrisait probablement pas, elle la travestissait en vulgaire gigue populaire. « Je reprendrai le contrôle des eaux. » répondit-elle, en posant son regard sur la brune. « Cela fait bien trop longtemps que mon peuple a abandonné une partie de sa souveraineté aux Gælyan. Ce sera la première chose que je veillerai à changer. » Elle leva son verre au niveau de ses yeux, sans effleurer celui de ses comparses. Les lèvres bordées par le liquide, elle entendit un toussotement qui lui fit baisser sa coupe. Elle pivota pour découvrir la silhouette de Lorcán, toujours engoncée dans ces vêtements qui, finalement, ne lui allaient pas si bien. L’Ondine croisa les bras sur sa poitrine. Ses yeux tombèrent sur sa paume ouverte vers elle, avant de remonter lentement vers les siens. Si elle avait tenu un poignard, elle le lui aurait enfoncé dans la paume, déchirant la peau, sectionnant les tendons et lacérant les os. « Pour vérification ? » répéta-t-elle, assassine. « Ton aveuglement me dépasse. » Elle retint de justesse un « quel imbécile », puis se tourna vers les deux femmes. « Veuillez m’excuser, notre noble cause m’attend. » D’un signe de tête, elle les salua puis, sans prendre la main de Lorcán, lui fit signe de la suivre. S’il n’obtempérait pas, elle lui arracherait la tête.
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Le son de sa voix apprit deux choses à Lorcán. Il s'agissait effectivement de son Ondine préférée, et elle était remontée comme une pendule. Il salua galamment ses compagnes de bavardages, puis suivit docilement la petite harpie des mers en se demandant s'il ressortirait en un seul morceau de la soirée. Comme elle avait refusé sa main, il devina qu'il avait probablement quelque chose à voir avec son ire. Ça le fit sourire, du premier sourire sincère de la soirée. Il aimait déchaîner toutes sortes de passions. ![[EVENT Mai & Juin] - Le Bal de Seaghdha - Page 7 950593777](/users/3014/30/04/80/smiles/950593777.gif)
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Je fournis un effort pour me concentrer. Mes iris fixèrent les traits de l’homme. Il me semblait fort et… Je plissai les yeux, comme si je cherchais à découvrir chacun de ses secrets enfouis. Il me disait quelque chose. « Moi ? » répondis-je faiblement. Au niveau de mon sourcil gauche, un début de migraine s’agrippa à mon crâne. Trop faible pour protester et ne comprenant de toute façon pas la manœuvre, je me laissai enlever. Tantôt, j’avais l’impression de danser dans ses bras. Tantôt, je flottais dans les airs. Mes perceptions étaient faussées et une partie de moi s’en rendait compte, celle qui tentait vainement de maintenir mon cerveau fonctionnel, le plus loin possible des sortilèges d’illusion. Mon corps bascula de nouveau en avant. Je détaillai la pièce avec ma vision approximative. Je connaissais cet endroit. Un bureau magicien. Je plongeai mon regard vert dans les yeux de mon interlocuteur. Le rouge qui les colorait me parut pourtant émeraude. « Je te reconnais. » murmurai-je. Lucius. « Oui, tu m’as manqué. » Je n’avais plus assez d’inhibition. Les mots sortaient d’entre mes lèvres plus vite que ma raison ne construisait de murailles d’interdits. Étais-je ici pour cette raison ? Une partie de moi en doutait. L’autre nageait dans un flou qui se voulait étrangement conciliant. Le fait que le Mage me touchât éveillait des sensations en moi que j’aurais préféré voir disparaître à jamais. Mais je n’avais plus de couteau à lui enfoncer dans le ventre et aucun argument viable ne me venait. Lorsqu’il me mordit, rien ne me parut suspect. Un frisson fiévreux me parcourut en lieu et place d’une réaction normale. Je refermai mes doigts dans ses cheveux. Dans ma tête, la haute silhouette d’Elias semblait me menacer. J’avais tiré un trait sur ma vie amoureuse depuis bien longtemps. Je m’étais laissée distraire par le Magicien mais il ne représentait que la décadence. J’étais une Salvatore. Seul le pouvoir comptait. L’amour ou le désir n’avait aucun poids face à ce même pouvoir. C’était la voie que j’avais choisie. Pourtant, dans les bras de Lucius, j’étais en train de perdre totalement pied. Quand il s’écarta, l’image du Mage Blanc continuait de se transposer à celle de l’inconnu. Je souris. « Ah... tu as enfin compris que tu devais me vouvoyer… » Ma voix était lente et pâteuse. J’avais l’impression de tanguer. « Mais enfin, Lucius… » J’amenai mon visage proche du sien autant que je le pus. Notre différence de taille était réelle. Elle l’avait toujours été. « Tu… » Je clignai des paupières et penchai la tête sur le côté. « Oh… » Derrière lui, il y avait quelqu’un d’autre. ![[EVENT Mai & Juin] - Le Bal de Seaghdha - Page 7 2289842337](/users/3014/30/04/80/smiles/2289842337.gif)
). Si Dorian est assez drogué pour vivre dangereusement, n'hésite pas. Ârès est plus puissant que Kaahl mais il a les Magiciens, les Rehlas et les Maîtres du Temps qui lui courent après actuellement. Val'Aimé est aussi à Seaghdha puisque Cyrius n'a pas voulu y aller et il a pour mission de fonction de protéger les enfants royaux (même si avec lui c'est approximatif, notamment parce qu'il désire faire tomber Cyrius). J'ai donc une bonne marge de manœuvre pour expliquer qu'Ârès laisse les intestins de Dorian en paix même si Dorian crie à la révolte ![[EVENT Mai & Juin] - Le Bal de Seaghdha - Page 7 943930617](/users/3014/30/04/80/smiles/943930617.gif)
ASHLING POUR 
À trois pattes sur le pont, les remugles de vinaigre provenant du seau irritaient mes narines. Après une heure à frotter, mon odorat ne s’était s’en était toujours pas accommodé. 
![[EVENT Mai & Juin] - Le Bal de Seaghdha - Page 7 Mv2f](https://zupimages.net/up/23/18/mv2f.jpg)
![[EVENT Mai & Juin] - Le Bal de Seaghdha - Page 7 O5u6](https://zupimages.net/up/23/39/o5u6.jpg)
![[EVENT Mai & Juin] - Le Bal de Seaghdha - Page 7 L06r](https://zupimages.net/up/23/10/l06r.jpg)
Eutropius baignait dans les vapeurs euphoriques de l'air ambiant. Son esprit faible avait tôt fait d'être balayé par les artifices mis en œuvre par leurs blafards hôtes. Il ne se souvenait plus quand il s'était débarrassé de son masque. Personne ici ne le connaissait de toute façon, à part ses camarades. Désinhibé, il s'était mis à demander à chaque personne rencontrée s'il s'agissait ou non d'un Enfant de la Nuit. À chaque réponse négative, il se détournait de l'interlocuteur avec un dégoût manifeste. Une fois, il était tombé sur une Vampire. Elle était occupée à danser avec un homme, le nez plongé dans son cou alors qu'ils tournoyaient lentement mais ça n'avait pas arrêté le Sorcier qui les avait interrompus. Les lèvres carmines de la danseuse luisaient fortement et Eutropius avait jugé son maquillage fort étrange. Quand elle avait acquiescé à sa question, il s'était suspendu à son bras et avait commencé à la supplier de façon inintelligible. « Je ferai ce que vous voulez, mais transformez-moi, s'il vous plaît ! Regardez ! » Il avait défait sa manche et lui avait mis son poignet sous le nez. La Vampire avait froncé le nez. « Beurk. Tu as l'air d'avoir un goût infect. » avait-elle lâché avec dédain avant de le repousser du bout des doigts. Il avait trébuché en arrière et quand il s'était redressé, elle avait disparu avec son partenaire. 
Le temps. Notion trouble. Kiara pensa aux nuages qui s’effilochaient dans le ciel. À l’aube qui s’étirait et au crépuscule qui s’allongeait. Au ressac marin, bercé d’un rythme régulier. À la pluie qui paraissait compter des fractions saccadées de secondes. Aux pas dont l’écartement se répète indéfiniment. Aux danses séquencées par les notes de musique. Aux mouvements de poignets du violoniste, aux gestes calculés du pianiste. Aux battements de cils d’un inconnu. Tout marquait le temps. Tout s’y inscrivait. Pourtant, elle était incapable de le saisir. Il lui échappait. Sa galopade endiablée l’entraînait loin, trop loin d’elle pour qu’elle pût le rattraper. Elle se savait ici et maintenant simplement parce qu’elle sentait sur elle un poids, un contact qui la maintenait dans la réalité. Devant ses iris noisette, les étoiles tournoyaient. Leurs murmures, d’abord aussi absents que d’habitude, s’étaient mis à tinter à ses oreilles. Émerveillée, elle avait levé les yeux vers le plafond, comme si, à travers sa voûte, elle avait pu vraiment voir les astres. Il lui semblait que c’était le cas. Leur musique résonnait dans tout son être pour la première fois. Malgré les longues minutes qui s’étaient écoulées depuis les premières notes, les larmes bordaient toujours ses cornées. L’émotion, vive et sauvage, plaçait tout son être en transe. Ses doigts tissaient leur chant dans les cheveux de la femme dont le visage était plongé dans son cou. « Lana… tu entends ? » finit-elle par demander, du bout des lèvres. Comme souvent, la réponse se noya dans les gorgées de sang qu’elle lui prélevait. Sa morsure lui semblait cependant plus douce que de coutume. Elle éveillait même des sensations qu’elle n’aurait jamais soupçonné un coup de croc de pouvoir lui faire ressentir ; le même genre de sensations que celles que Lucius avait créées et répandues partout sur son corps, que ses mains et sa bouche avaient façonné et ancré à tout jamais. Un sourire s’épanouit sur les lèvres de la Rehla, avant que ses ressentis ne s’estompassent progressivement. Les doigts de son amie se refermèrent sur son menton pour lui faire baisser le visage vers elle. « J’aurais bien continué, mais je crois que je risquerais de tuer votre enfant. » L’adolescente cligna des yeux. L’incompréhension l’englobait, et ni la drogue ni l’Aliénation ne l’aidaient à tirer une quelconque conclusion. « Vous devriez partir. » lui souffla la blanche. Ses phalanges caressèrent sa joue. Kiara appuya le contact, le regard vitreux. La première main se détacha, puis la seconde, et enfin le corps tout entier. L’appui perdu, elle chancela un peu. Stabilisée grâce au mur, elle vit son amie quitter la pièce. « Lana, attends ! » Avec une lenteur cahoteuse, elle tenta de la suivre. Le chant des étoiles s’accentua, jusqu’à vrombir dans le moindre de ses muscles. Ses jambes cédèrent ; elle s’écroula sur le carrelage lustré.