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 | Les Portes V - Cette fois je ne fais pas l'erreur de donner un titre à l'avance |

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Priam et Laëth
~ Ange ~ Niveau III ~

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◈ YinYanisé(e) le : 02/02/2018
◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam et Laëth
Mer 24 Avr 2024, 08:45



Unknown

Les Portes – Chapitre V

En groupe | Dastan


Rôle :


Bien que Ludoric tentât de se raisonner, l’impression – la conviction – qu’Adolphe et Placide se connaissaient depuis longtemps s’enracinait en lui. Pourquoi ne lui en avait-il jamais parlé ? La question laissait peu de place au doute. Ils ne s’étaient jamais rien cachés. C’était, du moins, ce qu’il avait toujours cru. L’évidence du contraire lui sautait aux yeux et imprimait dans sa gorge un goût amer, et dans sa poitrine le tranchant d’une lame de fer. Ils allaient sans doute trouver un endroit où s’isoler, et là… Le roux déglutit, à deux doigts de faire demi-tour pour ne pas s’infliger ce spectacle. Une part de lui pensait en avoir assez vu ; l’autre, poussée par la curiosité et l’espoir de se tromper, l’incitait à continuer. Placide ne lui aurait jamais infligé cela. Il était honnête, juste et droit, et surtout, il l’aimait. Lui aussi l’aimait, et pourtant, Clémentin… Il n’avait pas cédé, mais il avait failli. Il doutait de plus en plus de l’amour que lui portait le Prince, et la façon dont le palefrenier l’avait embrassé l’avait bouleversé. Il avait senti tout son corps s’embraser de désir pour le brun, même si le sien était dirigé vers Rosette. Quand ses mains s’étaient faufilées sous son haut et qu’il l’avait attiré contre lui, il avait cru atteindre un point de non-retour. Il n’était pourtant pas venu pour cela. Il s’était rendu dans ce qu’il avait découvert être un bordel parce qu’on l’y avait invité, et en lieu et place du rendez-vous, il avait trouvé Clémentin alité, très probablement drogué. Il avait voulu l’aider, mais quand ses lèvres avaient volé les siennes, tout avait été oublié. Par instant, il songeait avec honte qu’il aurait pu absolument et définitivement tout oublier et tout abandonner si le brun avait cessé de prononcer le nom de la fille qu’il aimait. Rosette avait plané au-dessus d’eux et c’était peut-être cela qui l’avait conduit à repousser le garçon – plus que l’étrangeté de la situation, plus que la possibilité d’être tombé dans un piège, plus que son état semi-conscient, plus que son amour pour Placide. Il s’en voulait. Pour tout. Cette culpabilité l’habitait si bien qu’il projetait peut-être sur Placide ses propres fautes. Et ce souvenir le hantait tant qu’il ne voyait que le duo et pas les ombres qui les encerclaient peu à peu.

Il ne les perçut que trop tard : quand le face à face parut inévitable. Adolphe était-il de leur côté ? Avait-il traîné le Prince dans un piège ? Le sang du guerrier ne fit qu’un tour : la réflexion devait céder la place à l’action. Vif, anxieux, il pivota brièvement pour scruter les alentours, jetant un coup d’œil à Anthonius, enroulée dans sa cape et une robe de chambre. « Antoinette. » murmura-t-il. C’était ainsi qu’elle souhaitait qu’on l’appelât, désormais, et en public, mieux valait ce nom que celui qui lui avait été attribué à la naissance. « Tu vois ces grosses caisses, là-bas ? » Du menton, il indiqua un point légèrement sur leur gauche. « Je veux que tu te caches derrière. Si jamais ça tourne mal, dès que la voie est libre, cours aussi vite que tu le peux vers la maison. D’accord ? » Un échange de coups l’obligea à couper court à ses recommandations ; il se tourna avec vivacité vers les combattants, défit sa cape pour plus d’aisance, et en quelques enjambées, se glissa entre Placide et les attaquants, arme au poing. Un premier homme se jeta sur lui, qu’il repoussa d’un coup de pied dans l’estomac. Une lame fila vers son visage ; il se courba vers l’arrière pour l’éviter. Le sifflement du coup effleura sa pommette. Il se fit la réflexion qu’il n’avait jamais tué personne. Une boule d’angoisse se forma dans son ventre, aussitôt chassée par l’adrénaline et l’impérieuse nécessité de protéger Placide. Adolphe tomba ; il se retrouva seul face à la quinzaine d’assaillants : il était évident qu’il ne pourrait pas venir à bout de chacun d’entre eux. « Cours ! » cria-t-il au blond avant de parer un coup d’épée visant sa hanche. Il regrettait de n’avoir pas emmené la sienne : les poignards ne rivaliseraient pas longtemps face aux lames longues. Ludoric tournoya sur lui-même et ficha l’une de ses armes dans la cuisse de l’un des hommes. Son poing finit sa course dans la figure d’un autre. Il esquiva un coup de massue en bondissant vers l’arrière. Son pied gauche se posa sur l’épée abandonnée d’Adolphe : déséquilibré, il tituba. Il n’en fallut guère plus à l’un des assaillants pour le faire chuter d’une poussée. Sa tête heurta le sol avec violence, et lorsque le Lieugrois rouvrit les yeux, ils rencontrèrent une lame dont la pointe appuyait sur sa gorge. Il déglutit, le cœur enflammé. Il espéra que Placide avait obéi et disparu, et qu’Anthonius avait pu le suivre, saine et sauve. Ce fut sa dernière pensée. Le bout d’une botte frappa sa tempe et l’arracha à la réalité.



Message III – 831 mots




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Seiji Nao
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Seiji Nao
Mer 24 Avr 2024, 09:29





Attentif aux mots que la belle choisissait, Marcellin ne la quittait pas des yeux. Inquisiteur, son regard se promenait sur son visage, s’attardant sur ses lèvres ou ses pommettes. Comme un puma devant un cerf, il se demandait à quoi ressemblait l’intérieur de son corps. Sa vie en colocation ne lui permettait pas une telle fantaisie, mais l’idée de posséder son propre humain empaillé excitait ses sens ; il s’était promis que, s’il se mariait un jour, il s’offrirait un cadeau de ce genre.

Le violet battit des cils un instant. Pour l’heure, il devait se concentrer, et préparer les réjouissances pour qu'elles eussent lieu : les rêves ne descendaient pas du ciel.  

« Si vous pensez en avoir les moyens sans vous mettre en danger, je serais ravi de vous compter parmi mes informateurs. Anthonius est, quoi qu’il en soit, à garder à l'œil. »

La légitimité de celui qui poserait la couronne sur sa tête ne l’intéressait guère. Les monarques d’aujourd’hui et d’hier se fondaient en une masse informe, au sommet de laquelle se tenait Judas, sous un horizon en flammes. Cependant, un enfant commettait des erreurs qu’un adulte évitait, d’autant que le jeune prince ne semblait pas dévoré par l’envie de poser ses fesses sur le trône.

« S’il devait lui arriver malheur, ou s’il ne reprenait pas la place qui lui est dûe, ses aînés risqueraient fort de ne pas apprécier. »

Il suffirait qu’une petite voix venue du passé leur souffle la nouvelle. La passivité du plus jeune lui appartenait, et il espérait presque qu’une telle opportunité se présentât, par curiosité.

« À propos de la chaise musicale en cours au palais… La cheffe des armées se montre, à mon avis, un peu trop gloutonne. C’est une chose de tenir la moitié du royaume entre ses cuisses, une autre de vouloir mener la barre. »

Depuis les récents évènements, Marcellin nourrissait une haine sans pareil pour la rousse. S’il l’avait d’abord crue complice de la révolte et de l’assassinat de la Reine, elle avait déçu toutes ses espérances en déployant ses braves soldates dans les rues. Ainsi, elle s’était érigée en symbole de l’ordre _ et il la savait trop intelligente pour que ce fût accidentel _, devenant tout naturellement son ennemie.

« Sa prochaine apparition publique pourrait lui jouer un tour. »

Toutes ses colombes se tenaient prêtes. Idéalement, celle qui croiserait son chemin lui ôterait la vie. Hélas, elle ne manquait pas de ressources pour se tirer d’affaire. Il espérait au moins qu’elle sortirait diminuée de cette charmante rencontre : les gens souffraient plus de la dégénérescence de leurs proches, parce qu’ils les perdaient deux fois, sans que leurs souvenirs pussent les glorifier.

À l’évocation de la rancœur qu’éprouvait Pénélope, un sourire de compassion factice détendit ses traits.

« Je suis navré d’apprendre que votre frère ne vous a pas traitée dignement. »

Le poète constata avec plaisir que la brune ne sombrait pas dans l’apitoiement. Il détestait cordialement ceux qui transformaient le mal qu’on leur faisait en excuse pour leur inaction.

« La vengeance est une noble motivation. Il y a quelques semaines, je vous aurais recommandé de l’épouser avant d’entreprendre quoi que ce soit, mais dans le chaos actuel, il n’a plus rien de valeur à vous offrir. »

Avant de leur asséner le coup fatal, il fallait toujours profiter le plus possible de ses victimes.

« Je suis certain que vous saurez vous élever par vos propres moyens. »

Sans vraiment s’en rendre compte, il avait parlé à voix haute. L’entretien tournait de toute évidence en sa faveur : elle avait marqué des points.

« Toutefois, l’occasion est idéale. Plus rien ne protège le semencier, et les gens qui lui en veulent ne manquent pas. Il suffirait d’une étincelle pour que son ancienne condition devienne une condamnation. Aurait-il commis des actes… répréhensibles, qui pourraient attirer sur lui la colère du peuple, ou le couperet de la justice ? »

Le poète passait bien des nuits à rêver des horreurs auxquelles les citoyens de Narfas, abandonnés à leur rage et à leur désespoir, se livraient, et se réveillait souvent avec l’entrejambe humide. Jeter de l’huile sur le feu pour donner libre cours au potentiel destructeur des petites gens était un rôle écrit pour lui. Si Sextus devait payer les pots cassés, faire tomber une tête de plus ne condamnerait pas plus le violet aux Enfers.

« Si ce n’est pas le cas, il existe toujours des méthodes plus tra... »

Une voix dans son dos lui fit fermer la bouche. Sortie d’outre-tombe, où elle appartiendrait bientôt pour de bon, la grenouille de bénitier venait gâcher son plaisir. Les lèvres pincées, le poète l’observa faire ses ablutions. Son index se posa sur ses lèvres : il espérait que la belle comprendrait que ses colocataires n’étaient pas dignes de confiance.

Il s'apprêtait à moquer sans vergogne les minauderies du vieillard devant son invitée, lorsque ce dernier s’aventura plus loin que prévu. Sa tentative de séduction le surprit tellement qu’il demeura silencieux un instant, le laissant fanfaronner tel un chien en rut. Ses pensées dérivèrent vers les trésors de sa chambre : en fin de compte, le choix de son totem n’avait peut-être pas été si judicieux.

« Je vous prie de m’excuser pour son comportement, Pénélope. Cela dit, ce n’est pas surprenant. Adolescent, il adorait piquer dans l’assiette des autres. Et puis, les religieux, comme les animaux, subissent de plein fouet la saison des chaleurs. »

Son dédain pour les porte-parole du divin n’était pas un secret. Certes, la foi représentait un outil merveilleux, et s’il comprenait que le pouvoir qu’elle donnait sur les autres attirât, il trouvait ridicule de croire en ses propres mensonges.

« Tu manques à ce point de fidèles ? Je crains que bientôt, tu ne viennes les chercher directement entre mes draps. Non pas que je m’oppose à ta politique de recrutement, mais tu risquerais de refroidir l’ambiance. »

S’il l’évoquait avec légèreté, cette perspective lui déplaisait franchement : il ne passait jamais bien longtemps avec ses conquêtes, et en entrant à l’improviste, le cul béni pourrait mettre au jour ses manigances.

« Si tu traites toutes les femmes de la même manière, je comprends pourquoi Herminiette s’enferme sans cesse dans sa chambre. Je pourrais te donner des cours, si tu veux. »

Marcellin ne manquait jamais une occasion de provoquer Sextus. Depuis le premier jour, son mépris lui hérissait le poil. Le fait que, jusque-là, il eût mené la course, ajoutait à son agacement. Il n’aimait ni perdre, ni être ignoré, et ses moqueries répétées trahissaient son mécontentement.

« D’ailleurs, elle sort beaucoup plus que d’habitude, ces temps-ci. Je me demande bien ce qu’elle trouve à faire en ville, vu le désastre dehors. Tu ne trouves pas ça étrange ? »

Un bâillement échappa au violet. Ses prunelles passèrent sur Pénélope. De leurs précédents rendez-vous, il avait cru deviner qu’elle ne portait pas la religion dans son cœur. L’information qu’il tenait risquait de dévier son allégeance, et il ne pouvait le tolérer. Aussi se releva-t-il pour murmurer à l’oreille de son rival, s’assurant de ne pas le toucher.

« Savais-tu qu’elle a orchestré l’assassinat de Jésabel ? Je ne serais pas surpris que Gaspard ait subi le même sort, et avec son amour pour la science et le pragmatisme, je crains fort que tu ne sois le prochain sur sa liste. »

Si la chance l’accompagnait, le prêtre de pacotille lèverait les yeux de son nombril et regarderait le danger en face. Entre les tracts qui se multipliaient en ville, les absences inhabituelles de leur consoeur et la révélation qu’il venait de lui servir, le calcul n’était pas difficile à faire. Il fallait espérer qu’en plus des aberrations divines, on lui eût enseigné les bases des mathématiques.

« Enfin, pour ce que j’en sais, elle s’est peut-être juste trouvé un amoureux. Après tout, que sommes-nous pour contrarier les volontés du cœur ? »

Le violet haussa théâtralement le ton, comme si lui-même en était la victime, et se tourna vers Pénélope. Le plus doux des sourires fleurit sur son visage.

1 327 mots | Post III

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Adriæn Kælaria
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Adriæn Kælaria
Jeu 25 Avr 2024, 11:22

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Les Portes V
Lambert



Lambert fixa le visage de Balthazar, comme s’il cherchait un indice. Il n’en vit toujours aucun. « En effet. La situation doit m’angoisser et jouer sur mes perceptions. Il m’arrive de percevoir l’ombre des morts. » Le brun hocha la tête, compréhensif. « Puis-je vous demander un service ? » « Bien sûr. » « Pouvez-vous me décrire la situation actuelle de Narfas ? » L’ancien conseiller royal regarda l’ancien monarque. « Je pensais que la Cheffe des Armées ou Garance vous auraient aiguillé à ce sujet. » Son interlocuteur émit un rire amusé. « En effet mais je crois me souvenir de mes cours de politique qu’un homme avisé ne s’en tient jamais à un seul son de cloche. L’information joue un grand rôle dans l’exercice effectif du pouvoir mais ce n’est pas à vous que je vais apprendre cela, n’est-ce pas ? » Lambert comprit entre les lignes que l’homme qu’il avait en face de lui était on ne peut plus renseigné. Il soupira et sourit à son tour. « Vous avez raison. » Il prit une inspiration afin de brosser un portrait de la situation. « Narfas est actuellement divisée entre plusieurs clans. Certains désirent la restauration du régime qui vient de tomber, d’autres ont des projets différents. » « Et Tamara m’a trahi. » Lambert évalua la portée de l’affirmation. Elle sonnait comme une question sans en être une. « Oui, effectivement. Elle incarne le renouveau et son nom est souvent accolé à celui de Primaël Noyarc. » « Je la suspectais depuis longtemps de former sa propre armée avec le fruit des rapts. » « C’est ce qui semble le plus probable en effet. Les soldates qui l’entourent sont des étrangères. Elle n’a pourtant pas perdu la main sur l’armée royale. Elle a également promu son fils. » « C’est une erreur, si vous voulez mon avis. Adolphe n’est qu’un enfant. Cela risque de lui coûter cher s’il n’est pas à la hauteur. » Lambert acquiesça. « J’imagine que la criminalité a explosé. » « Oui. Le trafic de stupéfiants n’est plus un secret pour personne. Le trafic d’êtres humains également. Il y a eu de nombreuses disparitions et certaines ventes se font à ciel ouvert. L’armée a dû mal à gérer et réprime de manière forte parfois, ce qui attise aussi la haine d’une certaine partie de la population contre elle. » « Qui dirige le trafic d’êtres humains ? » « Je l’ignore. Le chef se fait appeler La Main et son nom n’est pas connu. » « Comme c’est cocasse. » se permit le Roi. « Si j’étais libre, je pourrais probablement améliorer les choses. » « Comment ? » « Pour le trafic de drogue, je n’en sais rien mais j’étais proche de l’ancienne Main. Il ne fait aucun doute qu’elle a été coupée et qu’une autre a pris la relève. » Il y eut un silence. Lambert osa. « Excusez-moi mais j’ai du mal à comprendre comment un Roi pourrait être proche d’un individu aussi problématique sans chercher à l’arrêter. » L’autre rit. « Vous a-t-on déjà dit que vous étiez naïf et que ça vous rendait attendrissant ? » Lambert écarquilla les yeux. Balthazar s’approcha et lui choppa les poignets. Il le fixa de derrière les barreaux. Le blanc tiqua. Il y avait quelque chose, chez lui, de... « Montarville devait être un homme exemplaire… ou très bien dissimuler ses secrets. À votre avis, combien de dirigeants profitent de la pègre pour asseoir leur pouvoir ? Il s’agit d’une question d’équilibre : effrayer le peuple d’un côté pour mieux le rassurer de l’autre. » « … » « Ne faites pas cette tête. Je suis quelqu’un d’ambitieux. Si je n’ai pas éliminé Wesphaline et sa sœur, c’est parce que la situation me seyait. Posséder le pouvoir en apparence signifie le posséder vraiment. Le monde entier pensait que j’étais la tête décisionnelle de Narfas. J’aurais pu les faire tomber mille fois. » « Je ne comprends pas. Je vous pensais acquis à la religion. » Pourtant, malgré ses dires, Lambert comprenait la théorie. Avant de naviguer dans les profondeurs de Narfas, jamais il ne se serait douté que Balthazar n’était pas le réel dirigeant. Aux yeux du monde, il l’était. Comme Gaspard passait pour le Grand Prêtre. Seule la noblesse était au courant de l’ascendance féminine. La vérité était apparue aux plus démunis qu’avec le renversement du régime et la divulgation d’informations confidentielles. L’autre se tut mais le d'Eruxul capta une lueur étrange dans son regard, comme s’il ne désirait pas divulguer une information, comme si le sujet de la religion créait en lui une dissociation. L’ancien conseiller de Montarville osa finalement la question pour laquelle il était venu voir le Roi. « Qui êtes-vous ? »

779 mots
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Aäron Taiji
~ Alfar ~ Niveau I ~

~ Alfar ~ Niveau I ~
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Aäron Taiji
Jeu 25 Avr 2024, 13:11


Image by Pavel Filimonov

Les Portes V
Balthazar



Les yeux du monarque se plissèrent. Il lâcha Lambert et recula dans sa cellule. Il lui tourna le dos et revint à la fenêtre, lentement. Son regard balaya le paysage de Narfas qu’il pouvait percevoir d’ici. Ce champ de vision limité commençait à l’agacer. D’un autre côté, entre les barreaux, il était également protégé ; jusqu’à ce que ceux qui l’avaient fait enfermer n’en décidassent autrement. Il resta un instant silencieux. Il pouvait sentir l’impatience de l’ancien conseiller et cette tension jouait en sa faveur. Néanmoins, il devait réfléchir à la situation. Lambert n’avait pas attaqué le vif du sujet en rentrant ici. Cela signifiait qu’il n’était pas sûr ; ou qu’il désirait lui tirer les vers du nez autrement. Il s’arrêta sur sa première impression. Il n’était pas sûr. Cependant, il avait vu quelque chose. Cette piste n’aurait pu être imaginée autrement. « Savez-vous vous battre, Lambert d’Eruxul ? » Balthazar connaissait la réponse. Lambert avait beau être le conseiller de Montarville, il avait dû faire l’armée. Sa silhouette parlait pour lui. Il avait vieilli et n’avait plus été sur un champ de bataille depuis longtemps mais il devait savoir frapper et viser juste. « Je me débrouille. » répondit-il. « Faites-moi sortir d’ici et je vous dirai ce que vous voulez savoir. Nous sommes en soirée et les effectifs sont mobilisés à l’extérieur. » Balthazar ne lâchait plus le visage de Lambert. Il le trouvait très expressif, ce qui avait le don de le distraire. Après des jours d’enfermement, il se contentait d’un rien. « Le soldat qui viendra interrompre notre conversation a un jeu de clefs à la ceinture. » C’était toujours le même à cette heure-ci, antipathique au possible. « Je ne compte pas vous faire sortir d’ici. » « Qu’avez-vous à perdre ? Que je sois ici ou dehors, ma vie est menacée de la même manière. Vous n’aurez qu’à m’attacher. » « Mon nom est sur le registre. On saura que je vous ai aidé. » « Si le registre disparaît, il n’y sera plus. Si vous ne le faites pas pour moi, faites-le pour Montarville. » L’étonnement, encore. « Qu’est-ce que Montarville a à voir là-dedans ? » Rien, mais il n’était pas obligé de le savoir. « Je ne dirai rien de plus avant d’être libre. » décréta-t-il, en s’asseyant sur son lit de fortune.

Lorsque le garde arriva, Balthazar étudia le visage de Lambert. Il y vit l’hésitation. Ses lèvres s’étirèrent lorsque le blanc frappa le soldat en plein dans la carotide. Il savait que parler de Montarville aurait raison des réticences du conseiller. Il aimait trop son ami pour résister à l’envie impérieuse d’en apprendre plus. « Dépêchez-vous de changer de vêtements. » articula Lambert, la gorge sèche. Le monarque déchu se leva et obéit. À partir de maintenant, un jeu de dupe vis-à-vis des autres soldats s’ouvrait. Par chance, il était particulièrement doué pour paraître ce qu’il n’était pas. Dans les escaliers, il indiqua à Lambert quoi dire, en lui précisant qu’il aimerait éviter d’avoir à se battre, domaine dans lequel il était très loin d’exceller. Il mentait, bien sûr. Devant les autres soldats, le d’Eruxul articula la phrase convenue. « Pouvez-vous me raccompagner jusqu’à la rue ? Ces bâtiments sont de vrais labyrinthes… » Balthazar, muet, lui fit un geste de la main pour l’inviter à emprunter la bonne direction et le suivit. Quelques minutes plus tard, ils étaient dehors et assez éloignés pour qu’on ne les retrouvât pas facilement. « Je vous l’avais dit. Les effectifs ont été réduits à cause de la situation. Néanmoins, je ne pensais pas que ce serait aussi fa… » Sa phrase fut coupée. Il sentit le mur derrière son dos et l’avant-bras de Lambert contre sa gorge. « Qui êtes-vous ? » répéta le blanc, visiblement tendu à cause du stress que l’opération avait distillé dans ses veines. Balthazar n’attendit pas que la situation s’envenimât. Son talon écrasa le pied de l'homme et il sortit la dague qu’il avait trouvé dans les habits du soldat. Il la planta dans le ventre du blanc et inversa leur position. Le visage de son adversaire traduisit sa douleur. Ils se regardèrent. « Si je ne vous tue pas, c’est parce que vous m’êtes agréable. Je garde cependant le registre. » le menaça-t-il, tout en se reculant en sortant le cahier de sa veste. Lambert ne l’avait pas vu le dérober. Sous le coup de l'action, il l'avait même complètement oublié. « Je ne sais pas ce que vous savez, Lambert d’Eruxul, mais si j’étais vous, je ne chercherais pas à creuser davantage. Percevoir l’ombre des morts est une chose. Voir planer l’ombre de la mort sur soi en est une autre. Pensez à votre fille. » Il sourit. « Je vous recontacterai au besoin. » Si le conseiller survivait et lorsqu’il aurait repris ce qui lui appartenait. Il devait d’abord trouver l’identité de la nouvelle Main. Il la trancherait lui-même, sans aucune hésitation.

804 mots
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Ikar Pendragon
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Ikar Pendragon
Jeu 25 Avr 2024, 18:28



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Les Portes V


Rôle :

« Vraiment ? »

Je souris à Adolphe. Peut-être pourrait-il véritablement m’aider ? Je me dis que si je pouvais ne pas compter que sur Ludoric, les choses iraient bien mieux. J’étais sans doute un véritable fardeau pour le soldat. Je lui en demandais trop et c’était probablement pour ça qu’il regardait ailleurs, du côté de Clémentin qui semblait mille fois plus débrouillard que moi. Je retins un soupir. Il devait étouffer, à être à la fois mon amant et mon protecteur. À Lieugro les choses étaient différentes. Avant l’intervention de Judas, nos vies n’étaient pas en jeu et notre seule inquiétude était la révélation de notre amour clandestin. À présent, elles l’étaient à chaque instant.

« Pourquoi, ta mère veut me tuer ? »

Je ris mais acquiesçai à l’idée de le suivre chez lui.

« C’est impressionnant en tout cas ! Ludoric a suivi un peu le même parcours. Enfin, il ne commande rien mais disons qu’avec l’intervention de Judas il a été mis sur le devant de la scène. Il a pu suivre Childéric d’Ukok, surveiller Zébella d’Uobmab et devenir mon protecteur. Comme lui, tu finiras par les convaincre, j’en suis sûr ! »

Je l’écoutai en hochant la tête. Je n’avais pas d’avis sur la question de sa mère. Je l’avais croisée quelques fois par hasard et l’avais trouvée bien portante. Elle avait des gros seins et un regard déterminé. J’en étais ressorti chamboulé.

« Je ne sais pas trop. On me tient éloigné des discussions pour être honnête. Je suis visiblement dans la même situation que toi : on ne me trouve pas assez légitime pour traiter des questions politiques. Personne ne parle d’Adolestine et de Coline non plus. Le fils de Garance a disparu en même temps que Childéric et Zébella mais je n’en sais pas plus. Je ne peux faire que des suppositions. »

Je vis les ombres bien après Adolphe, comme si mes yeux étaient incapables de percevoir le danger. Je m’arrêtai comme lui, la mine interrogative, et repris d’un pas similaire quand il m’indiqua de le suivre sans rien avoir remarqué.

Quand je finis par me rendre compte que nous étions suivis, je blêmis. Le reste s’imprima en taches ensanglantées sur ma rétine. Les coups, les parades, les lames, le pourpre et l’ordre immédiatement suivi de l’effondrement du corps du soldat. Je poussai un cri de souris tout en reculant, la culpabilité ancrée dans le cœur. Si j’avais été rationnel, j’aurais compris que ces hommes ne venaient pas pour moi. Ils s’étaient interrogés sur mon identité. Néanmoins, la peur me fit oublier leur question et je m’imaginais déjà responsable de la mort du fils de Tamara.

Paralysé, je ne pris conscience de la présence de Ludoric que lorsque sa voix résonna, m’intimant de courir. Malheureusement, mes pieds étaient comme attachés au sol.

« Lud… »

J’eus la sensation que ma voix était incapable de s’exprimer, bloquée dans ma gorge. Quand il tomba par terre, mes yeux s’exorbitèrent. Je tentai de l’appeler une nouvelle fois, voulus le protéger mais, pris par l’horreur, j’étais devenue une statue de pierre, incapable d’agir ou même de respirer. Il fallut quelques secondes avant que tout se débloque : quand la botte termina sa course dans le crâne du roux.

« LUDORIC ! Qu’est-ce que vous lui avez fait ? Laissez-le ! »

Je me jetai sur l’auteur du coup avec la ferme intention de le terrasser. Mon insurrection ne dura pas longtemps. J’aurais mieux fait de courir mais mon cœur était incapable d’abandonner mon amant là. On m’avait élevé avec l’idée que la vie d’un prince valait plus que la vie d’un soldat, qu’il était du devoir du deuxième de protéger le premier et que le devoir du prince était de ne pas cracher sur le sacrifice du soldat en se rendant. J’avais compris cette leçon sans l’approuver moralement. Néanmoins, je m’étais juré de m’y tenir. L’hypothèse ne valait plus aujourd’hui, quand le soldat était Ludoric.

Le brigand rit devant mon audace, en se rendant compte bien vite que contrairement aux deux autres, je ne serais pas un adversaire problématique.

« Je ne sais pas qui c’est celui-là mais on va l’embarquer au cas où. Fouillez les alentours, des fois qu’il y ait d’autres chiards. »

La grosse main de l’homme se referma sur le tissu de mon vêtement, au niveau de ma nuque. Il balaya mes jambes et me traina comme ça.

« Ferme ta gueule sinon je t’assomme comme les autres. »

Mon regard chercha le corps de Ludoric. Je ne dis rien. Je préférais rester conscient pour savoir où est-ce qu’ils comptaient nous amener.

766 mots
Placide se fait kidnapper avec Adolphe et Ludoric | Les Portes V - Cette fois je ne fais pas l'erreur de donner un titre à l'avance | - Page 4 1929536143

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Kitoe
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Kitoe
Jeu 25 Avr 2024, 23:27

Herminiette
Les portes - Narfas
Lana Lubany - POINT OF NO RETURN


Pas une seule seconde Herminiette ne lâcha sa protégée des yeux. Son attention fermement accrochée à sa personne, elle avait penché la tête en avant pour se mettre en position d’écoute. Elle absorbait chaque mot avec une concentration toute particulière, les yeux à peine plissés comme pour observer directement le cours de ses pensées à l’intérieur de son cerveau. Elle ne cherchait pas à l’interrompre.
Luthgarde emmena la bleue sur différents chemins. Elle semblait intarissable. Cette conversation devait la soulager, d’une manière ou d’une autre, ce que Herminiette était heureuse de constater. Elle aimait récolter ses opinions. Il devait y avoir chez cette jeune femme, une attitude qui lui plaisait suffisamment pour lui accorder de la considération jusqu’à ses contre-arguments. Le monologue, néanmoins, fut interrompu par un fracas inattendu. La maîtresse de maison se leva de son siège.

-Ne bouge pas.

Elle ne voulait pas que Luthgarde se blessât inutilement. Herminiette fit rappeler un domestique de la maison. Ce dernier s’occupa de l’incident et quelques minutes plus tard, les deux femmes étaient de nouveau seules. La maîtresse de maison se garda une remarque sur le petit incident. Elle n’aimait pas savoir sa partenaire en affaire si aisément troublée. Celle-ci avait encore beaucoup à apprendre, mais malheureusement elles n’avaient pas le temps pour se parer d’une telle éducation dans les règles de l’art. De retour dans son fauteuil, Herminiette croisa ses jambes dans l’autre sens. Où en étaient-elles ?

-Marcellin est l’un des plus grands dangers pour le Royaume. Il se réjouit du désordre actuel car il souhaite le donner en pâture à Uobmab. C’est un fou à lier qui n’a soif que de sang.

Il y avait diverses façons de l’exprimer, mais une seule chose à comprendre : un individu qui prônait la politique de Judas était par définition un problème à éliminer. Ce point élucidé, Herminiette se pencha en avant, plaçant un coude sur son genou surélevé.

-Te placer auprès de Lambert d’Eruxul nous serait d’une grande aide. Elle suspendit sa réflexion quelques secondes. Par ta proposition, dois-je en conclure que tu sais jouer la comédie ?

Elle, ça n’était pas son fort. Herminiette était maîtresse dans l’art de cacher ses émotions ; en exprimer des fausses était toutefois hors de sa portée.

-Serait-ce trop demander, si je souhaite que tu deviennes, en quelques sortes, son amie ?

Elle exagérait peut-être un poil, mais c’était l’idée qui l’animait. Lambert était proche de Garance, et Luthgarde était loin d’être Garance. Mais justement ; peut-être qu’une autre personne que la princesse était exactement ce qu’il fallait à ce pauvre homme.

-Je veux en savoir davantage sur lui. La manière dont il raisonne, ses convictions.

La jeune femme lui dépeignait un homme fiable à première vue. Pour tout dire, cela arrachait à la bleue l’ombre d’un sourire. Garance était peut-être un rapace duquel se méfier, mais Herminiette ne faisait pas plus confiance au bon cœur de ce lâche individu, incapable de tenir ses promesses et de porter ses responsabilités sur ses épaules, comme un conseiller de son acabit aurait dû le faire. S’il avait trahi sa propre fille, ce n’était pour aucune autre motivation que sa propre peur. Et s’il n’était guidé que par sa peur, alors cela faisait de lui une contrainte qu’il allait falloir régler.

-En m’entretenant avec Garance de mon côté, nous aurons une meilleure vision de ce qu’ils représentent pour Narfas et Lieugro.

Quant au sujet épineux de la religion dans lequel Luthgarde avait tenté de s’engager, Herminiette ne rétorqua rien. Elle comprenait qu’elle aurait du mal à l’arracher à ses convictions, aussi futiles étaient-elles. Il y avait des choses que le cœur n’appréciait pas chambouler. L’Ombre détestait cette faille du genre humain. Cela l’empêchait de se montrer complètement transparente avec sa protégée et la forçait à lui mentir sur une partie de ses plans. La bleue posa son regard sur ses mains. Elle n’avait pris aucun plaisir à le faire, et elle ne l’avait fait que parce que cela avait été nécessaire. Malgré ses dispositions, elle s’était salie. Il lui avait fallu temps et persévérance pour faire disparaitre toute trace de sang de sous ses ongles. A force de frotter à l’aide d’une brosse et de savon, elle s’était asséché les mains et sa peau s’était craquelée par endroits. La crème venait difficilement à bout de ce bref instant de… vie. Herminiette releva la tête. Quoi qu’il en fut, elle ne souhaitait pas fragiliser la confiance que Luthgarde lui portait. Parler de Jésabelle, c’était risquer de la donner à Sextus. C’était aussi tourner les soupçons vers elle quant au cas de Gaspard. Parler de sa volonté implacable de créer un Etat laïc, reviendrait à la braquer davantage. Alors mieux valait ne rien dire. L’important était seulement de marcher sur le même sentier.

-J’ai quelque chose pour toi.

Sur l’étroite commode qui occupait le mur latéral se trouvait un pochon, que Herminiette avait soigneusement déposé plus tôt, alors qu’elle attendait Luthgarde. Elle laissa le soin à cette dernière d’en découvrir le contenu.

-Je ne veux pas te faire peur. Se justifia-t-elle. Seulement, par les temps qui courent, ce genre de disposition n’est jamais de trop.

Un petit couteau, aisément dissimulable dans une poche, sous des vêtements ou dans une botte, mais à la lame juste assez longue pour atteindre les organes lorsque les circonstances le recommandaient. Le principe de ce genre d’arme était de la garder affutée le plus longtemps possible tout en restant en vie : moins on l’utilisait, mieux on se portait.

916 mots



Bijin
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Kyra Lemingway
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Kyra Lemingway
Ven 26 Avr 2024, 14:13


Les Portes V

La venue d'une tierce personne, le mouvement d'un objet dans un environnement ou une situation où l'on ne l'y attendait pas était toujours un événement en soi. Une chose ou une personne sur laquelle on était obligé de se retourner, ne serait-ce qu'un court instant. L'entrée d'un individu dans une salle de spectacle silencieuse, ou sa sortie. Un rire qui n'avait pas lieu d'être. Une fenêtre qui s'ouvrait sous l'action du vent. Il ne s'agissait que de mouvements sans importance du quotidien, et pourtant ils revêtaient une étrange importance dans la seconde qui suivait leur action. L'arrivée sobre de Sextus était l'un de ces événements qui forçait à porter sa pleine attention sur lui et mettre l'échange en pause, ne serait-ce que le temps de l'observation. Un silence qui se poursuivit néanmoins dans la surprise. Car, si Pénélope comptait bien rendre toute son attention à celui qui guidait ses actes, la chose lui fut pour ainsi dire impossible considérant l'intérêt dont faisait preuve Sextus à son égard. Bien sûr, ce serait mentir que nier être flattée de revêtir une plus grande importance aux yeux du prêtre que ne pouvait en avoir Marcellin. Elle avait trop d'orgueil pour repousser un individu nourrissant de bonne volonté son ego. Son regard allait de sa main lovée dans celles du religieux à ses yeux avant de glisser sur le visage de Marcellin. Sextus n'en avait peut-être pas conscience, mais certaines de ses paroles étaient comme du sel jeté sur une plaie ouverte. Le lit de Marcellin est souvent occupé. Jamais encore elle n'en avait juste effleuré les draps, et ce malgré leur niveau de confidence. À moins qu'elle soit en train de se leurrer à ce sujet ? « Je prends note de votre proposition. Cependant, je crois déjà avoir pu découvrir la forme de mes ténèbres, et il ne me semble pas qu'elles soient du genre à s'apaiser après une confession. » déclina-t-elle poliment la suggestion du brun dans une quasi-certitude des arguments qu'elle avançait. La jalousie était un sentiment aussi monstrueux que pouvait l'être la vengeance. Or, le cœur de Pénélope était rongé par ces deux. Ou plutôt, l'un avait fait naître l'autre et nourrissait son feu à mesure que lui-même même croissait. Et, malheureusement la paix de l'âme ne suffisait pas à les essouffler. Celle-ci n'advenait d'ailleurs qu'une fois la cause de l'existence de ces sentiments disparue.

L'enlevée ramena sa pleine attention sur Marcellin lorsqu'à son tour il intervint. Le fait qu'il usa de la métaphore du vol la rassura quelque peu dans sa crainte de lui être indifférente. Un souci qui fut balayé par la répartie du poète et le mépris qu'il renvoya à Sextus. Ce que l'un exprimait par l'ignorance, l'autre le faisait par le cynisme. Le temps d'une minute, elle eut l'atroce sensation d'être de trop. Cette simple idée la poussa pourtant à vouloir demeurer au milieu des compétiteurs, et plus encore alors que Marcellin se redressa pour évoquer à messe basse ce que Pénélope supposa être quelques secrets concernant Herminette. À l'évidence cette proximité qu'elle avait espérée était encore loin d'être. Pourtant elle rendit son sourire à son partenaire, quoiqu'abimé des doutes que cet échange avait éveillés en elle. « Peut-être serait-il plus aisé de lui demander directement la raison de ses sorties plutôt que de faire de simples suppositions potentiellement fausses. » se mêla-t-elle à l'échange sans vraiment dissimuler la lassitude de la façon dont elle avait été, pour quelques secondes, mise à l'écart. Elle se pencha pour récupérer la boîte de thé et l'ouvrit. « Ce serait également l'occasion de voir avec elle si elle accepterait de me céder sa chambre. » ajouta-t-elle dans un sourire amusé comme elle huma les fragrances du mélange. Elle était pourtant à moitié moqueuse dans sa déclaration. En vérité, c'était même la principale raison pour laquelle Pénélope avait accepté cette rencontre nocturne. Non pas de prendre la place de la troisième Ombre, mais de demeurer chez eux la nuit tombée. Les rues n'étaient pas sûres une fois le soleil tombé et elle avait ainsi espéré être invitée à rester jusqu'au retour du jour au moins. La conversation interrompue et la discussion promettant prendre une tournure différente, elle avait décidé de s'imposer. « La population est ivre du sang versé, et elle n'est pas prête à vouloir dégriser, et c'est d'autant plus vrai la nuit. En cela la proposition de Monseigneur Sextus est difficile à refuser, ne serait-ce que pour cette nuit. ». Elle posa son regard sur ce dernier en le mentionnant. En même temps elle referma le pot, songeant à la petite flasque scellée dans sa sacoche. Avec des négociations et des arrangements, des caresses et des supplications si nécessaires, elle arrivait à soutirer de temps à autre à Melchior un peu de sa marchandise. Puis elle avait fait des tests avec une de ses "amies" d'avant la Révolution pour savoir à partir de quelle dose minimale les effets de la drogue commençaient à être visibles, dérangeants, et sur quelle durée. Elle avait ainsi pu constater le moment où la fatigue était devenue délire ; où la paranoïa prenait plus de place que le bon sens. En vérité, cette fille était encore un cobaye aujourd'hui, lui permettant d'observer les effets sur le long terme. La pauvre avait fini par devenir totalement dépendante de la chose. Le pire était qu'elle n'avait aucune idée de ce dont elle était en manque puisqu'elle ne s'était jamais volontairement droguée. C'était à ça que Pénélope aspirait en dispersant la marchandise de son frère auprès de ces petites mains dont on prêtait trop peu attention alors même qu'elles côtoyaient des individus de Pouvoir, ou en capacité d'en avoir. L'orpheline tâchait cependant de ne jamais prendre plus que ce que son frère lui accordait. Ce serait risquer de perdre son soutien que d'être traitée de voleuse, raison pour laquelle elle réclamait parfois, auprès de certains de ses "clients", monnaie sonnante et trébuchante qu'elle lui rendait. De même que, si le monde était encore ignorant de la situation du Grand Prêtre, c'était également dans le but de garder sa confiance. Ils n'étaient que deux à être certains de sa survie, et s'il n'était pas à l'origine de la fuite, ce serait forcément elle. En l'état actuel des choses, le secret restait donc profitable. Et puis, cette situation était un peu comme un jeu pour elle dont le but était de trouver jusqu'à quel point elle pouvait lui demander des faveurs et à partir de quel moment il lui opposerait un tel refus qu'elle ne pourrait plus qu'user du sexe pour obtenir ce qu'elle désirait. La partie venait de s'étendre à la maison des trois Ombres à présent. Suite à l'échange auquel elle avait assisté, elle en était venue à se demander ce qu'elle devrait réellement faire pour que Marcellin la regarde comme le faisait Sextus et si elle n'aurait pas dû mélanger un peu de cette drogue dans les feuilles de thé qu'elle venait d'apporter. Deux raisons l'avaient, jusqu'alors, retenu dans son geste. D'abord, le fait que la livraison arrive directement entre les mains de Marcellin. Ensuite, elle n'avait jamais voulu interférer directement dans le duel que le trio s'offrait. Cependant, l'un semblait vouloir l'introduire au jeu, ce qui changeait quelque peu la donne et sa marge de manœuvre. Elle sourit tant à l'un qu'à l'autre.
©gotheim pour epicode


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Adriæn Kælaria
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Adriæn Kælaria
Sam 27 Avr 2024, 08:53

| Les Portes V - Cette fois je ne fais pas l'erreur de donner un titre à l'avance | - Page 4 Vrht
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Les Portes V
Gao



Gao sourit. Destructible. Il n’était pas certain de vouloir détruire Primaël ; sauf s’il ne lui laissait pas le choix. Dans l’idéal, il préférait que les choses allassent dans le sens de ce qu’elles avaient été par le passé. Maintenant qu’il s’était vengé, il estimait qu’ils étaient quittes. Ne restait plus que cette question de pouvoir à trancher ; ainsi que la tête d’Ivanhoë. « C’est certain. Jusqu’ici, ils n’ont fait que temporiser en tentant des gérer les problèmes à chaque fois qu’ils se présentaient. » Mais ils ne pouvaient pas se permettre de le faire éternellement. Le doute était un véritable parasite lorsqu’il commençait à être distillé. La vérité et le mensonge se mélangeaient et la population, crédule, préférait inévitablement les mensonges ; bien plus scandaleux, bien plus aptes à faire parler. Pour Gao, Primaël jouait à un jeu dangereux et n’était pas le seul. Lui aussi avait été catapulté à une place qu’il n’aurait jamais pensé obtenir ; il n’en aurait même pas voulu dans un autre contexte. Le bleu n’avait jamais été aussi haut placé. Lui non plus. Inévitablement, ils allaient commettre des erreurs. Inévitablement, leurs intérêts allaient diverger. Surtout, Primaël avait été esclave. En acceptant de prendre la suite de la Main, il avait aussi accepté d’être l’ennemi de son ancien amant. « Je souhaite également intégrer le gouvernement. En échange, je pourrais tenir une partie de la pègre. » Jusqu’à ce qu’il décidât du contraire. Le sort des semenciers lui importait tout autant. « L’avantage de mon statut c’est qu’il peut servir aux affaires de Primaël. Néanmoins, il manque parfois de raison. C’est un idéaliste. » Il risquait de refuser son offre parce qu’elle était mal. Finalement, Ivanhoë serait peut-être plus utile vivant que mort. Il le connaissait mal mais se disait qu’il fallait bien que l’un des trois eussent les pieds sur terre. Il connaissait Tamara. Elle était aussi idéaliste que Primaël. L’un était élégant, là où l’autre était rustre. Si les mots de Primaël convainquaient, les coups de talons de la rousse avaient le même effet. Pour le reste, ils étaient tous les deux désirables et en avaient conscience. Gao regarda Garance. Elle aussi en avait conscience. Il lui sourit. « Nous verrons. Même les joueurs les plus honnêtes sont heureux d’avoir un joker dans leur jeu. » Si ses hommes faisaient bien leur travail, il aurait un atout de poids d’ici quelques temps ; au cas où les discussions se passassent mal.

Alors qu’ils s’apprêtaient à partir, un bruit sourd fit trembler la porte à plusieurs reprises. Gao alla ouvrir et tomba sur la silhouette massive de l’un de ses hommes. Il vit à son regard que l’ordre avait été réalisé mais qu’il y avait eu des imprévus. « Entre. » Le criminel fixa son regard sur Garance un instant, avant de ramener le bras qu’il tenait derrière lui vers les deux adultes. « J’ai trouvé cette gamine devant la porte. » annonça-t-il. L’ancien semencier la contempla et lança une œillade à la sœur de Montarville. Si elle était là depuis longtemps, elle avait entendu beaucoup de choses. Il décida de mettre de côté cette affaire pour se concentrer sur la plus importante. « Dis-moi. » « On a capturé la cible mais elle n’était pas seule. Avec elle, il y avait deux garçons de Lieugro vu leur accent. Un petit blond et un roux qui doit avoir suivi un entrainement militaire. Que ce soit la cible ou le rouquin, les deux ont voulu protéger le blondinet. En fouillant, on a trouvé une gamine. Elle vient de Narfas et on ne sait pas si elle a quelque chose à voir avec les trois autres. Dans le doute, on les a tous amenés à la planque. » « Le blond a un accent de Lieugro ? » « Oui. » Gao réfléchit. Cela aurait pu être Anthonius sans l’accent. « On va aller chez Primaël. Si je ne suis pas rentré demain midi, tue-les. » Ils ne seraient plus d’aucune utilité. Le criminel acquiesça. « Tu peux t’en aller. Merci pour ton efficacité. Ta famille sera récompensée. »

Une fois qu’il fut parti, il se tourna vers Garance. « Ne reste plus que le sort de notre petit oiseau indiscret à trancher. Ton papa ne t’a jamais appris qu’il ne fallait pas écouter aux portes ? » demanda-t-il, en regardant Rosette cette fois. Il releva les yeux vers sa tante. « Je vous laisse décider. »

744 mots
Rôle:



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Sam 27 Avr 2024, 21:39


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Les Portes V ; Narfas
Jezeṃiās, dans le rôle de Sextus



Rôle - Sextus:

« Comme vous voudrez. Si vous changez d'avis, vous savez où me trouver. » Sextus n'insista pas davantage, conscient que son refus n'avait rien de définitif. Certains, par prudence ou par esprit de contradiction, avaient simplement besoin de se voir donner une marge de réflexion avant de revenir sur leur décision. Lui n'était rien sinon patient. Plus jeune peut-être, il avait pu se montrer plus impulsif mais il avait vite compris que cela ne menait jamais à rien de bon. Dans tous les cas, s'il en jugeait la fréquence des apparitions de Pénélope chez eux, il savait que leurs chemins se recroiseraient à nouveau. Il aurait aimé pouvoir dire le contraire pour Marcellin. Il le laissa déverser son fiel, par habitude, et accorda à leur invitée un vague sourire contrit, comme pour s'excuser de la rendre témoin de cette scène de ménage pour laquelle il n'avait pas signé.

« Allons Marcellin, garde tes traits d'esprit pour tes admiratrices. Elles y seront plus sensibles que moi. » Habitué à la nature provocatrice du violet, Sextus s'en lassait toujours le premier. Les rares fois où il pensait à son colocataire, il se demandait ce que l'autre cherchait en l'invitant dans des joutes verbales somme toute stériles. Peut-être s'ennuyait-il ? L'ennui était, après tout, le fléau des êtres médiocres. Or, le Prêtre n'aimait pas perdre son temps, pas avec ceux qui risquaient de le tirer vers le bas. Très tôt, il avait écarté ses concurrents de ses pensées pour se concentrer sur son plan, assez simple finalement. Se montrer visible au bon moment et auprès des bonnes personnes, être pertinent et finalement, devenir indispensable. Les années passant, l'écart avec les deux autres Ombres n'avait fait que s'élargir et il ne se rappelait de leur existence que lorsqu'il les croisait dans leur demeure, comme plus tôt quand il avait été surpris de trouver Marcellin dans le salon.

« Ce que Herminiette fait ne me regarde pas. Si elle a trouvé une raison de vivre à l'extérieur, les dieux lui ont souri et j'en suis heureux pour elle. Il n'est pas bon de rester enfermé et éloigné de ses pairs. » Il ignorait en revanche pourquoi Marcellin surveillait ses allées et venues. S'était-il amouraché de la brune par un coup du destin relativement tordu ? Était-ce pour cette raison qu'il invitait tant de femmes dans son lit, pour instiller sa jalousie ? Il se secoua mentalement pour se libérer l'esprit de ces futilités. Il se fichait bien de l'équilibre mental de cette vieille fille. Il avait même espéré qu'elle en profite pour développer une forme aiguë de dépression. Mieux encore, si elle se suicidait, leur Ordre ne pourrait pas leur reprocher sa mort. L'assassinat était considéré comme tricherie. Officiellement. Dans les faits, il suffisait juste d'être malin, ils le savaient tous les trois. Il doutait cependant que Marcellin saurait tenir sa langue, tout fier qu'il serait s'il était à l'origine de leur trépas. L'innocence n'était pas son fort.

Il se tint droit et immobile alors que les lèvres de l'Ombre susurraient à son oreille. Son expression se modifia une fraction de seconde, trahissant sa surprise. Il se reprit et regarda le violet droit dans les yeux. Un sourire fin s'étira lentement de part et d'autre de son visage. Il était épaté. Marcellin lui présentait la conclusion de ses hypothèses comme s'il espérait une caresse pour ses efforts cérébraux. Que croyait-il ? Qu'il allait suffoquer d'horreur en apprenant les desseins de la brune ? Ils cherchaient à se nuire depuis le début. Il les croyait juste très médiocres à ce jeu-là. Sans doute craignaient-ils une réprimande de l'Ordre s'ils dépassaient les limites. Quoi qu'il en soit, Sextus prospérait comme prévu, même plus vite que prévu avec la disparition des Grands Prêtres, et c'était tout ce qui importait. Il ne manquait d'ailleurs jamais de faire son rapport d'évolution, même s'il se doutait que des espions rapportaient déjà leurs faits et gestes aux plus hautes instances. Quant à Herminiette, il ne la croyait pas capable de commettre un tel acte. Marcellin devait soit lui mentir dans une tentative pour le déstabiliser, soit avoir de fausses informations. Il regarda Pénélope. Ce n'était guère le moment ni l'endroit pour creuser le sujet. « Merci Marcellin. » fit-il finalement, pesant soigneusement ses mots. « Ton inquiétude pour moi me touche. Je prendrais le temps d'y réfléchir. » Et de vérifier ses informations. Il se tourna vers la d'Eésnep. « Sans doute, mais Herminiette n'aime guère qu'on l'interroge sur sa vie privée, et je n'ai pas pour habitude de le faire. » Et pour ce qui était de sa chambre, sans doute auraient-ils plus de succès en lui demandant de se manger la main qu'en lui demandant d'être aimable une fois dans sa vie. « Prenez plutôt ma chambre. J'insiste. Laissez-moi juste informer les domestiques de faire le nécessaire et vous pourrez vous y installer pour cette nuit. Veuillez m'excuser. »

En sortant, il laissa tomber son masque affable et se frotta la cicatrice sur son menton par habitude. Selon lui, Jésabelle avait été tuée par les mêmes rebelles qui avaient assassiné la Reine. Herminiette était-elle réellement à l'origine de sa mort ? S'était-elle alliée aux rebelles ? Il fut tiré de ses pensées par un domestique qu'il croisa. Il en profita pour l'instruire de préparer sa chambre pour leur invitée et de la prévenir lorsque ce serait prêt. « Et vous, Monseigneur ? » « Ne vous inquiétez pas pour moi. Je trouve que la nuit est la meilleure des compagnes pour prier. Il y a une petite banquette dans ma salle réservée à la prière si je désire me reposer, cela me suffira amplement. Merci, Alan-Gui. » Il lui sourit et se dirigea vers le petit salon attenant celui qu'il venait de quitter, son objectif initial toujours présent.

« Ah. Décidément. » lâcha-t-il, avant de sourire avec courtoisie à cette autre invitée. S'il avait su, lui aussi en aurait ramené une. Il s'avança avec le même naturel que précédemment, les mains jointes devant lui. « Bonsoir. Excusez-moi pour ma réaction, je viens justement de quitter Marcellin qui était en compagnie de Pénélope d'Eésnep à côté, le parallèle m'a étonné. » Venait-il à nouveau d'interrompre une nouvelle parade de séduction ? C'était à croire que ses concurrents n'avaient que ça en tête. Ça lui convenait. Pendant qu'ils comptaient fleurette, lui restait occupé et concentré.

« Mais vous tombez bien, je voulais te parler, Herminiette. Je n'ai pas pour habitude d'être friand de la conversation de notre poète local, ses sonnets ont une tendance hérétique trop prononcée pour arriver à me charmer, mais il avait quelque chose de plus substantiel à dire, pour une fois. » Il marqua une pause et sonda les traits de l'Ombre. « Il m'a un peu parlé de toi, Herminiette. Il semblait réjoui à l'idée que tu sois amoureuse car tu sortais davantage. Les artistes ont toujours beaucoup d'imagination à revendre, n'est-ce pas ? Mais ce n'est pas cela qui m'a intéressé, je trouvais juste cette anecdote amusante pour quelqu'un comme toi, si sérieuse. » En cela, ils étaient similaires. Le poète devait s'ennuyer parfois, coincé entre eux deux. Il accrocha ensuite son regard à celui d'Herminiette, pour ne pas rater une miette de sa future réaction. « Il m'a dit que les Lieugrois étaient à l'origine du meurtre de Jésabelle. Moi qui pensais que c'était l'œuvre des rebelles. » Il se tourna vers Luthgarde. « Bien sûr, ce ne sont que des suppositions, ma chère. Je ne vous vise absolument pas, vous ne faisiez qu'accompagner les Lieugrois, n'est-ce pas ? Et Gaspard m'a parlé de vous en termes élogieux avant de disparaître subitement. Nous le regrettons tous. Je prie chaque jour pour qu'il nous revienne sain et sauf. Cela rassurerait bon nombre de nos partisans. Y compris vous, j'imagine ? » Il lui sourit, compatissant. En réalité, il ne comprenait pas ce que cette fille, pieuse a priori, fabriquait avec Herminiette qui prenait une ride à chaque mention faite des dieux.

Message III | 1405 mots

Sextus se promène chez lui et peine à trouver un endroit tranquille pour comploter et prier en paix. La colocation c'est vraiment le pire bail.


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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Sam 27 Avr 2024, 21:58




Les Portes – Chapitre V

En groupe | Hélène


Rôle :


Garance acquiesça. « S’il souhaite conserver sa position ou tout simplement survivre, il se rendra vite compte qu’il lui faut être réaliste. » Montarville avait clairement fait partie des idéalistes. Il avait toujours agi avec l’idée que les gens étaient fondamentalement bons et justes. En invitant Judas et ses enfants sans prendre davantage de précautions, il avait fait entrer les loups dans la bergerie avec une insouciance si scandaleuse et dangereuse qu’elle lui avait coûté à la fois sa vie et son royaume. Sa propre sœur aurait pu être la cause de sa chute ; mais jamais il n’avait tenté quoi que ce fût contre elle. Il avait cru à son intégrité et à sa bienveillance, il s’était confié à elle et n’avait pas su voir le renard qui se cachait derrière la colombe. Les idéalistes étaient aussi souvent naïfs. Primaël avait cependant eu une vie bien différente de celle d’un Prince devenu Roi ; il avait été esclave, semencier, rebelle, peut-être d’autres choses encore. S’il suintait toujours de naïveté, elle serait étonnée.

Elle sonda Gao et lui sourit en retour. Le problème des réalistes résidait dans leur difficulté à pouvoir faire confiance aux autres. Elle ignorait jusqu’où elle pouvait lui tendre la main, et les réponses du blond lui indiquaient qu’il agissait avec la même prudence. Il fallait qu’elle trouvât un moyen de pression à faire jouer contre lui en cas de besoin. Un point faible, n’importe quoi. Dès leurs premiers échanges, elle avait cru comprendre qu’il connaissait Primaël depuis longtemps. Qu’il l’appréciait sans doute plus qu’il ne l’aurait dû. Son sourire masquait un silence qui révélait probablement qu’il préférait le manipuler plutôt que de le supprimer. Affaiblir le bleu et le placer sous sa coupe lui permettrait peut-être d’exercer un ascendant sur l’esclavagiste, ou au moins de pouvoir tirer quelques ficelles. Il avait apparemment déjà un ou des atouts dans sa manche. Elle ne s’attendait pas à ce qu’il les lui dévoilât, car elle n’aurait pas fait autrement. Le temps d’une seconde, elle se demanda comment pouvait se passer une réunion entre un homme qui asservit et un homme qui libère.

Quand la silhouette du subalterne de Gao se dessina dans l’encadrement de la porte, la régente ne détourna pas son regard du sien. Il ne dévia que lorsqu’une tête rousse fit son apparition. Ses yeux bleus détaillèrent Rosette de la tête aux pieds ; de ses cheveux réunis en queue de cheval à son indécent pantalon et à ses bottes de cuir qui n’avaient certainement pas été taillées pour une femme. Elle ne comprenait pas que Lambert laissât sa fille sortir vêtue de la sorte. À Lieugro, les infirmières parvenaient à faire leur travail en robe ; et les nobles qui les rejoignaient pour faire preuve de charité ne se départissaient pas de leurs plus beaux atours en passant le seuil de l’hospice. Habillée ainsi, elle ressemblait à l’une de ces soldates que Tamara faisait courir dans les rues. Qu’elle écoutât aux portes ajoutait simplement au dévoiement qui semblait s’être emparé de l’adolescente. Fréquenter Clémentin, qui bien qu’il fût de sang royal n’en restait pas moins un roturier dans l’âme, ne lui réussissait visiblement pas. Cela semblait encourager les gênes de pie fouineuse que sa mère avait dû lui transmettre. Madeline, si proche d’Éléontine, avait toujours aimé mettre son nez dans les affaires des autres et faire jouer sa langue de vipère. Elle n’avait jamais compris que Lambert se fût entiché d’une femme pourvue d’un esprit aussi fade.

Ses iris volèrent brièvement jusqu’à Gao. Leur impassibilité masquait son agacement à l’égard de la fille d’Eruxul. Elle ne fit cependant aucune remarque et se contenta d’écouter le rapport adressé par le malfrat. Son rythme cardiaque s’accéléra à la mention des Lieugrois, qu’elle identifia immédiatement comme étant Ludoric et Placide – qui n’étaient pas censés être dehors à une heure si tardive. Elle regarda Gao. Si la « cible » était le joker qu’il comptait utiliser contre le trio narfasien, les deux garçons concernaient davantage le camp de Lieugro. En soi, elle se moquait qu’ils mourussent. À plus ou moins long terme, Placide était condamné : il menaçait ses prétentions à la couronne, et celles de ses enfants. Tant que Ludoric l’aimait et lui était loyal, il devrait subir un sort similaire. Cependant, qu’un étranger se permît de prendre cette décision à sa place raviva en elle des braises d’énervement. Qu’il les retînt en otage constituait également un problème ; même si elle n’était pas attachée à leurs existences, il lui fallait faire semblant si elle souhaitait conserver le soutien de Lambert – surtout devant sa fille. Et si elle pouvait se soustraire à la pression que l’on aurait pu exercer sur elle via les deux adolescents, l’ancien conseiller de Montarville n’y échapperait jamais. Elle fronça les sourcils mais demeura silencieuse. Elle ne comptait pas froisser son hôte. Contester son choix devant son subalterne aurait immanquablement porté un coup à son autorité comme à son ego.

Lorsqu’ils ne furent plus que trois, elle regarda d’abord Rosette, puis l’ancien semencier. Elle devait gagner du temps pour réfléchir, mais ne rien prononcer que l’adolescente pût utiliser en sa défaveur auprès de son père. Pour lui, ses paroles comptaient. « C’est bien aimable. Vous auriez aussi pu me consulter au sujet du sort des deux Lieugrois que vous avez capturés. » Son regard d’acier se planta dans le sien. « Puisque vous aurez une place dans ce gouvernement, les requêtes que je compte porter auprès de Primaël s’adresse aussi à vous. Je n’ai probablement rien à dire au sujet des Narfasiens que vous jugerez bon d’éliminer ou de retenir en otage, et je vous y aiderai même si cela peut garantir aux miens la sécurité qui leur est due. Mais si vous tuez ou emprisonnez des Lieugrois… » Un sourire affable ourla ses lèvres. La blonde avait toujours maîtrisé l’art de paraître agréable même lorsqu’elle s’opposait à son interlocuteur. Elle avait grandi et évolué dans un monde d’hommes où seuls les outils des femmes étaient à sa portée ; elle avait fait siens ceux du sexe masculin en les rendant plus doux, plus caressants, plus conformes à ce que l’on attendait d’une Princesse. Les uns comme les autres n’en demeuraient pas moins tranchants. « J’entretiens l’espoir que nous puissions compter l’un sur l’autre et coopérer sur toute la ligne. » lui indiqua-t-elle. Ses iris céruléens le scrutèrent quelques secondes. « Quant à Rosette… » Elle se tourna vers l’adolescente, dont le regard revêche soutint le sien. Elle ressemblait à Lambert, quand un sursaut de révolte secouait ses traits. La rousse n’éprouvait absolument aucune sympathie pour Garance et cette dernière en avait conscience. Il était évident qu’elle ne supportait pas sa proximité avec son père. Elle la détailla, silencieuse. « Si vous me faites quoi que ce soit, mon père le saura et vous tuera ! » La blonde haussa les sourcils. Si elle ressemblait son géniteur, elle possédait surtout la fougue maladroite de la jeunesse. « Tu crois ? » Elle s’approcha et prit son menton entre ses doigts. Cette impétuosité malhabile, et son cœur. Elle sourit. « Ton père ne supporterait pas de me voir mourir. »



Message III – 1182 mots




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Dim 28 Avr 2024, 08:54




Les Portes – Chapitre V

En groupe | Yngvild


Rôle :


« Comme tu ne supporterais pas de voir mourir ton cher Clémentin. » Le visage de Rosette se crispa, et l’oisillon qui siégeait en son cœur s’emballa. « Vous n’avez pas le droit de faire ça. Mon père… » - « Ai-je dit que je comptais le tuer ? » Le regard de l’adolescente la scruta, avant de courir jusqu’à Gao, comme si elle espérait y trouver une aide. Finalement, il se planta à nouveau sur Garance. « Si j’avais souhaité sa mort, ce serait déjà fait. » La main de la blonde se défit de sa mâchoire et son bras retomba le long de son corps, entre les plis de sa robe. Elle avait prononcé ces mots avec tant d’insouciance, comme s’il s’agissait d’une banalité, que le sang de la rousse se mit à bouillir dans ses veines. Comment son père pouvait-il être aussi aveugle ? Comment pouvait-il passer de sa mère à une femme pareille ? Depuis qu’ils étaient partis de Lieugro, son vrai visage se dévoilait : à travers ses actions, à travers ses manigances, à travers l’attitude détestable de son fils – à cet instant, Rosette espéra que son cadavre pourrissait quelque part afin qu’ils ne le revissent plus jamais. Elle n’en voulait pas comme frère, de la même manière qu’elle ne voulait pas d’elle comme belle-mère. « Vous essayez juste de me faire peur. Ça ne fonctionne pas. » asséna-t-elle avec autant d’aplomb que possible. « J’essaye simplement de te mettre en garde. Je n’ai pas choisi d’être ton ennemie, Rosette, et je ne veux pas l’être. Nous aimons toutes les deux Lambert et je crois que c’est une raison suffisante pour tenter de coopérer lorsque cela est possible. » La jeune noble la fixa. Ses yeux descendirent sur son ventre. Elle refusait qu’il fût de son père. Elle refusait de croire à ce qu’elle disait. « Je n’ai pas envie d’essayer de m’entendre avec vous. » Elle releva le menton avec assurance. « Ne me sous-estimes pas, Rosette. Je pourrais t’être d’une grande aide dans les jours et les semaines à venir. Je sais des choses que tu ne soupçonnes même pas. » Elle marqua une pause brève qui, malgré elle, suspendit l’adolescente à ses lèvres. « Clémentin a des ennemis jusqu’ici, qui n’attendent que le bon moment pour passer à l’action. » Les sourcils de la rousse se froncèrent. Il était déjà venu à Narfas. Il ne s’en cachait pas et certaines personnes l’avaient reconnu, comme l’oncle de cette enfant qu’elle avait soignée plus tôt. Qui d’autre ? « Vous mentez. » cracha l’adolescente, pleine d’une virulence appelée par la crainte. Ce que proférait Garance était pourtant possible. Parfois, la légèreté et l’esprit libre de celui qu’elle aimait pouvait froisser autrui. Que savait-elle ? Qu’avait-elle vu et entendu ? Gao en voulait-il à Clémentin ? Ou Melchior, avec qui il conversait, au rez-de-chaussée ? La peur inonda ses artères. « Il n’y a pas que les Narfasiens. » Les prunelles de Rosette sondaient celles de la blonde, à la recherche d’un indice, d’une vérité qu’elle ne dirait pas, d’un élément qu’elle cacherait, d’un mensonge. « Je suis sûre que tu l’as remarqué, toi aussi. » Tout son corps se crispa. « Ludoric nous protège. » - « N’est-il pas dans un cachot, à l’heure actuelle ? » La jeune fille leva vers Gao un regard empreint de colère et de peur. Elle haïssait cette situation, car il n’y avait absolument rien qu’elle contrôlait. « Quand bien même. Ludoric ne vous protégera pas toujours. Réfléchis, Rosette. » Tout son cerveau s’activait, propulsé par l’adrénaline. Ludoric… Elle songea à ses regards sur Clémentin, à ceux de Placide en retour. Il ne pouvait quand même pas vouloir… Et si ça n’était pas qu’une histoire de cœur ? Il leur avait affirmé haut et fort vouloir devenir Roi. Mais Placide ne pouvait pas… Mais si c’était le cas, alors Ludoric… Ses pensées s’accrochaient les unes aux autres, s’emmêlaient, s’enchevêtraient ; et entre leurs ramifications se dessinaient des probabilités, des hypothèses, des doutes. Des dangers. « En tant que femmes, nous ne pouvons pas toujours compter sur les hommes. Parfois, il faut agir par soi-même. » Garance recula d’un pas, rompant net la discussion. « Nous partons. File et que je ne te reprenne plus à écouter aux portes. » L’adolescente serra les dents. Melchior ne s’en prendrait probablement pas à Clémentin. Les hommes de Gao semblaient garder la demeure. Placide était enfermé. « Est-ce que je peux venir ? » demanda-t-elle en se tournant délibérément vers le blond.



Message III – 730 mots




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Orenha
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Orenha
Dim 28 Avr 2024, 10:49


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Les Portes V
Orenha dans le rôle de Luthgarde

Rôle:
Tandis qu’Herminiette se levait pour appeler un domestique, Luthgarde prenait son ordre au pied de la lettre et restait figée, un morceau de tasse au creux de sa paume. Elle semblait absente, le regard fixe et lointain, comme si son esprit était à mille lieues du Royaume de Narfas ; pourtant, son attention était belle et bien ancrée dans le présent. Ses yeux étaient rivés sur la cuillère en argent qui gisait là, parmi les éclats de vaisselle éparpillés au sol.
L’ustensile qu’elle avait utilisé pour remuer son thé, dont elle avait apprécié le tintement mélodieux contre les parois de la tasse, qu’elle avait même porté à ses lèvres pour ne pas salir la soucoupe.
Même par terre, au milieu des débris, son lustre restait inaltéré. Du manche délicatement décoré jusqu’à la pointe arrondie, la cuillère brillait, immaculée.
Luthgarde s’en saisit en tremblant. Son reflet lui apparut : net, mais à l’envers, déformé. Comme c’était à propos. Durant quelques instants, la jeune femme éprouva un rejet intense envers la femme cynique qu’elle semblait être devenue : celle qui s’était soudainement souvenue que l’arsenic faisait noircir l’argent, avait machinalement cherché les taches sombres sur l’ustensile, et s’était sentie soulagée de savoir que le poison envoyé par son gouvernement ne laisserait pas de traces aussi évidentes.
Des frissons de dégoût lui parcoururent l’échine. Elle venait de se prendre la main dans le sac à avoir peur, non pas de l’acte ignoble qu’elle aurait peut-être à commettre, mais des conséquences qu’il engendrerait pour sa propre sécurité. N’était-elle pas censée être au-dessus de tout ça ? N’avait-elle pas déjà accepté d’endosser toute responsabilité si il lui fallait agir pour le bien commun ?

« ...adame ? » Alan-Gui était penché près d’elle à une distance respectueuse, occupé à nettoyer les débris. Son intervention sortit Luthgarde de sa transe. Elle se redressa, confuse, avant de tendre la cuillère au domestique. « Je vous remercie et je vous prie de me pardonner pour les dégâts. »
Malgré le temps passé ici, l’envoyée d'Erréil avait encore du mal à se faire à l’idée de devoir laisser quelqu’un nettoyer derrière elle. Elle esquissa un sourire contrit à l’homme avant de retourner s’asseoir en face de sa bienfaitrice.

Le nœud qui lui obstruait la gorge s’épaississait de minute en minute. Herminiette confirmait ses craintes ; aurait-elle seulement pu la convaincre du contraire, après ce que Luthgarde avait vu ? La sueur qui coulait le long de ses tempes n’était pas la conséquence de la tiédeur de la soirée ni de la boisson chaude dans son estomac ; elle était aussi glacée que le bout de ses doigts.
La jeune femme se mordait les lèvres pour retenir les questions qu’elle se savait ne pas être en position de poser : quelle était la relation exacte entre les Trois Ombres ? Qu’est-ce qui les forçait à devoir se surveiller les uns les autres, au point où ils avaient pris la décision de cohabiter ? Comment Herminiette pouvait-elle vivre avec le monstre qu’était Marcellin ? Savait-elle seulement jusqu’où sa folie l’avait mené ?

Lorsqu’elles en revinrent au sujet de l’ancien conseiller royal, Luthgarde se détendit un peu. « J’accède avec un grand plaisir votre demande, ma Dame. En tant que missionnée du Royaume d’Erréil, j’ai de bonnes raisons de reprendre contact. Je n’aurai même pas besoin de mentir sur mes intentions. C’est une personne que j’estime et j’ai la quasi certitude qu’il cherche à faire régner la paix tout autant que nous. Bien entendu, je ne vous mentionnerai pas et si je venais à apprendre quoi que ce soit qui pourrait nuire au Royaume de Narfas, je vous en ferai part sans tarder. »
La lettre s’écrivait déjà toute seule dans sa tête ; la jeune femme avait hâte de retrouver sa chambre afin de pouvoir se consacrer pleinement à sa rédaction. Le plus tôt elle serait envoyée, le plus tôt elle recevrait une réponse.
Elle n’avait pas vu l’homme depuis leur arrivée ici, bien qu’elle ait parfois aperçu sa fille Rosette s’affairer auprès des blessés. Si le père avait autant de cœur que sa fille, il n’y avait aucune inquiétude à avoir quant à ses intentions. Sans doute était-ce lui qui lui avait transmis la vertu de la bonté en premier lieu ; Luthgarde avait pu constater durant le voyage à quel point il chérissait sa fille.
Si les traits de l’ancien conseiller royal s’étaient quelque peu estompés dans sa mémoire, elle gardait un vif souvenir de ses yeux bleus pénétrants et de sa posture droite en toutes circonstances. Il semblait prêt à porter le monde sur ses épaules, si il le fallait.

L’érudite avait conscience de la frivolité de certaines de ses émotions, mais elle décida de se le pardonner, du moins pour le moment. Tout ce qui pouvait alléger un tant soi peu son cœur était bon à prendre. Elle accepta même la pointe d’orgueil qui s’était immiscée dans sa joie de constater que sa bienfaitrice n’avait formulé aucune objection à son plaidoyer sur la religion. Se pourrait-il qu’elle soit enfin parvenue à briser la carapace de l’Ombre ? Luthgarde avait souvent rêvé de ce moment ; Herminiette baissant sa garde pour se laisser effleurer par la grâce divine. Comme elle avait prié pour que cela arrive ! Les évènements récents étaient trop lourds à porter pour celui qui ne possède par la Foi. Mais aussi pieuse qu’elle l’était, Luthgarde savait que ce n’était pas une chose que l’on pouvait imposer à autrui, et elle ne souhaitait pas forcer les remparts qui se dressaient autour de son alliée à chaque fois que le sujet était évoqué.
Il semblait qu’enfin, leurs discussions portaient leurs fruits. C’est d’un pas léger que la jeune femme se leva pour suivre sa bienfaitrice, non sans lui avoir serré les mains avec intensité, un grand sourire entendu aux lèvres.
Il se décomposa dès que l’éclat de la lame accrocha son œil. Elle sortit complètement le couteau de son pochon et le soupesa un instant en silence. Léger. Moins qu’une fiole de poison. Moins mortel, aussi, selon les circonstances. Ses phalanges blanchissaient sous la pression qu’elle exerçait sur le manche pour ne pas trembler.
L’élève qu’elle était il y a un mois aurait été choquée, aurait protesté ; elle aurait repoussé le couteau, invoquant les Divinités, jurant de ne jamais user d’une telle violence sur quiconque, quelles que soient les circonstances.
L’envoyée qu’elle était aujourd’hui se contenta de dissimuler la lame en hochant sombrement la tête.
« J’en prendrai soin. Je ne laisserai rien nous arriver. » Sa voix était grave et basse, chargée de promesses. « Merci pour votre sollicitude. » Une émotion étrange la submergeait.
Du soulagement. Elle n’avait pas réalisé à quel point elle redoutait la désapprobation de sa bienfaitrice. Par ce geste, ne lui promettait-elle pas de ne pas la rejeter même si elle était un jour amenée à commettre l’irréparable ? Luthgarde la regarda un moment sans rien ajouter, la gratitude mouillant ses yeux sombres.  

Bien que le couteau ait déjà disparu sous ses vêtements, elle sursauta en étouffant un cri de surprise lorsque la porte du Placard s’ouvrit brusquement. Reconnaissant immédiatement Sextus, elle se courba dans une révérence qui, elle l’espérait, cachait son air coupable. Apprendre que les deux Ombres s’étaient tenues dans la pièce juste à côté d’elles durant leur discussion ne l’aida en rien à apaiser son trouble.
« Bonsoir, mon Père. » La tension dans la pièce était palpable. Elle jeta un coup d’œil à sa bienfaitrice, se rappelant son avertissement. Il lui faudra peser ses mots.
Les boutades du Prêtre eurent le mérite de détendre immédiatement l’atmosphère. Luthgarde saisit aussitôt la perche. « Oh ! Vous m’aviez caché cela, Dame Herminiette ! De qui s’agit-il ? C’est vrai que je vous trouvais particulièrement en beauté, ces derniers temps. » C’était sans doute un boniment de la part du poète, ou un malentendu ; mais mieux valait rebondir sur une plaisanterie que de rester muette pendant que les Ombres se regardaient en chiens de faïences.
Peine perdue, visiblement.
« Beaucoup de sang a été versé dans les Royaumes de Lieugro et de Narfas, récemment. Les personnes avec qui j’ai voyagé cherchaient asile et réconfort. Tout sauf le carnage et la violence qu’ils fuyaient. » Elle soutenait le regard de Sextus en souriant, soudainement sereine. La mention du Grand Prêtre avait agi comme un baume apaisant sur une brûlure à vif.
« Je suis honorée d’apprendre que Sa Sainteté vous ait parlé de moi. » Honorée, flattée, peut-être, mais pas étonnée. N’était-ce pas naturel après ce qui avait transpiré entre eux ?« Sachez que mes prières accompagnent les vôtres. Il ne fait aucun doute qu’elles trouveront Son Éminence. Lorsqu’Il sera de retour parmi nous, je suis certaine qu’Il sera enchanté d’apprendre que vous avez ouvert le Temple aux blessés et aux nécessiteux. C’était très noble de votre part. » Elle pressa une main contre sa poitrine où elle sentait sentir son cœur battre avec intensité. « Ayons Foi. Bientôt, la paix sera restaurée. » Jamais elle n’avait prononcé de paroles avec autant de conviction ; car ce n’était pas les siennes, mais celles des Cieux, du Très-Haut Lui-même, ce Dieu Narfasien qui n’était que l’un des nombreux visages arborés par les Omniscients.
C’est par la bouche de Gaspard d’Epilut qu’Il avait choisi de s’exprimer, et à son tour, le Grand Prêtre l’avait choisie, elle, comme Son porte-paroles.
Dans ce pays en flammes, Luthgarde attendait son heure ; celle où elle pourrait révéler au monde qu’elle était l’Élue et la Prophétesse, et que son ère serait celle de la paix absolue.

Message III (XI) | 1607 mots

Résumé :
Deluluthgarde parle avec Hermimum et Papa Sextus.



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Dim 28 Avr 2024, 11:44


Melchior avait hésité à poser ces deux questions. Il y songeait depuis des semaines, attendant un moment parfait qui n’était jamais venu. Aujourd’hui, sa curiosité avait dépassé sa patience. Il restait silencieux, tandis que son apprenti répondait de ses crimes. Il était particulièrement attentif à la gestuelle et au ton du garçon, à l’affût du moindre signe qui trahirait des intentions néfastes. Il s’attendait sans doute à un discours plus sinistre, qui ne contienne aucune mention de pâtisserie aux œufs. Pourtant, après l’avoir écouté attentivement, il ne pût s’empêcher de constater que la réponse de Clémentin ressemblait énormément à l’image qu’il se faisait de lui. Un moulin à paroles, doublé d’un brave type.

« Merci pour ton honnêteté. Sache que tu n’es pas moins légitime qu’un autre. » Melchior était presque sincère. Il aurait pu être de ceux qui soutenaient la hiérarchie nobiliaire mais dans son pays, c’était cette même noblesse qui, entourée du clergé, avait décidé de ruiner l’ordre naturel des choses et d’imposer aux hommes des chaînes. Il avait donc remis ces structures en question et, avec, l’idée que le sang ait quoi que ce soit à voir avec la qualité d’un Homme. Pour preuve : son frère jumeau était un gigolo. « Je ne compte pas me mettre à la vente ou même l’achat d’esclaves, non… » Il ne bannissait pas entièrement l’idée mais dans l’immédiat, avait déjà bien trop à faire. « Ce n’est pas dans les valeurs des D'Eésnep. » C’était dans celles de l’ancien roi, à en croire Clémentin. Le marchand avait eu du mal à dissimuler sa surprise, lorsque cette information lui était parvenue à l’oreille. Il n’en revenait toujours pas. Voilà une nouvelle qui aurait dû paraître à la une de tous les journaux : « Balthazar n’était pas qu’un flan au service de son épouse ». Et, visiblement, il s’était fait voler son gâteau.

« Les ventes d’esclaves n’ont pas ralenti. Quelqu’un a donc dû remplacer notre bon vieux roi, oui… et je cherche à l’identifier. Il pourrait même s’agir de plusieurs personnes, en réalité. Des anciens subalternes de la Main, peut-être. Tout est si organisé qu’il ne semble pas y avoir de concurrence entre eux, en tout cas. » Un bon commerçant se doit de connaître son marché, et il avait rapidement réalisé qu’il existait une assez grande intersection entre sa clientèle et celle de la Main. Il voulait savoir à qui il avait affaire. Il avait quelques pistes, mais n’était pas encore certain.

« Je ne vais pas te demander de voler quoi que ce soit d’autre. Je voulais juste savoir si je pouvais t’accorder confiance. Je savais que tu avais piraté ce navire avant même que tu ne mettes un pied dans cette demeure. » Il se dispenserait de lui expliquer le pourquoi du comment. Peut-être que Clémentin imaginerait Melchior à la tête d’un réseau d’espions. La vérité était bien moins impressionnante. « Tu retiendras que je t’ai tout de même accordé ce poste. Je t’ai laissé avoir accès à ma marchandise, en sachant pertinemment que tu aurais pu t’envoler avec. Ce doit être un gage de bonne foi, non ? » Il y avait plusieurs raisons pour lesquelles le garçon d’écurie n’était pas un suspect principal. Il était le premier à remarquer les trous dans l’inventaire, avait été fouillé à plusieurs reprises, et n’avait – en apparence – pas nécessairement accès à un réseau de distribution qui lui permettrait de vendre ces stupéfiants. Pour autant, le marchand n’avait pas pu s’empêcher de ressentir du doute, jusqu’à ce que cette histoire de bateau ne soit clarifiée.

Melchior sentit des vibrations parvenir à sa colonne vertébrale, et bondit immédiatement pour décoller son dos de la porte. Sursauter était source d’embarras, mais depuis toujours, il avait été sensible aux stimuli soudains. Alors, à défaut d’être imperturbable, il avait appris à rapidement récupérer son sang-froid une fois la surprise passée. On avait toqué à la porte quatre fois. Ce ne pouvait pas être Rosette – ce nombre faisait partie d’un code préétabli. Quatre, cela voulait dire « information imminente ». Car oui, si le marchand n’avait pas de réseau d’espions à l’époque où Clémentin s’amusait à détourner des navires, il pouvait désormais se targuer d’avoir une chaîne d’approvisionnement d’informations assez solide.

« Entrez. » Godefroy apparut dans l’encadrure de la porte. Il ne fit qu’un pas avant de remettre à son employeur un autre vélin – encrypté comme les précédents – et partit aussitôt. Il n’était généralement pas autorisé dans cette section-là de leur demeure, sauf en cas d’urgence. Il valait pour lui de ne pas s’attarder dans cette pièce ; c’était comme mettre un ours dans une ruche. Melchior n’attendit même pas d’entendre la porte se refermer pour commencer à lire. Les yeux rivés sur les mots qu’il décodait lettre par lettre, il se tourna en direction du garçon. « Je vais avoir besoin d’un instant. » Sécuriser chaque message avait comme désavantage de les rendre difficilement accessibles, même pour lui. « Tu peux attendre ici ou aller chercher ton amie, si elle s’est perdue, mais essayons de reprendre cette conversation aussi tôt que possible. J’aurais sans doute un service à te demander. »


Post XI | 859 mots | Melchior parle à Clémentin puis reçoit un message.
Rôle - Melchior:


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Les Portes V
Jil, dans le rôle d'Anthonius





Maintenant que je suis forcée de garder un œil sur lui, je crois bien que je reconnais l’interlocuteur de Placide : c’est le fils de Tamara. L’impertinent. J’exagère peut-être, mais le premier souvenir qui me frappe en le voyant, c’est son manque de tact, le jour où j’ai rencontré Placide et cette autre fille, comment s’appelait-elle… Rosa, Rosie… Non, Rosette. C’était il y a quelques semaines, j’ai l’impression que ça a eu lieu dans une autre vie. Ce n’est probablement pas si loin de la vérité. Quoi qu’il en soit, si mes souvenirs sont bons, il y a encore moins de raison de craindre pour la fidélité du prince blond. J’en fait la remarque à voix haute :

— « La dernière fois que je l’ai vu, celui-ci, il faisait tout pour séduire Rosette d’Eruxul. Je pense que vous n’avez pas à vous inquiéter de quoi que ce soit, c’est peut-être un idiot, mais un idiot tout ce qu’il y a de plus hétéro. »

Plus tard, j’apprendrai quel mauvais juge de caractère je suis. En attendant, je commence à regretter de m’être levée, et à me rassurer sur le fait que je ne vais pas être kidnappée. À celui qui connait le déroulé des évènements à venir, il doit naturellement sembler que je m’obstine à vouloir être déçue. Ludoric lui ne semble pas prêter attention à ce que je dis, je pense qu’il ne m’a même pas entendue. Son entière attention est focalisée sur Placide et son interlocuteur. Il exsude de tension et d’anxiété, et rien que je puisse dire n’y fera changer quoi que ce soit. Au-delà de sa surdité temporaire à mes remarques, je crois qu’il n’aurait pas été plus attentif quoi qu’il en soit. Il doit me voir comme un rejeton royal, isolée de toute inconvenance, en complet détachement avec la réalité de la vie. Et il a en partie raison. J’ai beau vouloir m’enorgueillir d’être relativement perceptive, mes qualités d’interlocutrice se limitent aux gens de bonne famille, aux héritiers, aux grands marchands, aux gardes royaux, éventuellement. Lorsqu’ils commencent à marcher, nous les suivons à une distance respectable, pour ne pas être démasqués.

Quand ils rencontrent un groupe d’hommes, je sens un frisson me parcourir. Je n’entends pas ce qu’ils se disent, mais je devine à leur attitude qu’ils ne viennent pas échanger des mondanités. Et pour une fois, j’ai raison. D’une voix tendue, Ludoric m’ordonne d’aller me cacher : il s’attends aussi à ce que ça dégénère. J’hoche la tête, mais je n’ai pas le temps d’aller bien loin : la discussion vire au combat. J’écarquille les yeux, je fais un pas en arrière. En quelques instants, Adolphe tombe, et Placide demeure, seul. Son fiancé s’élance ; j’hésite. Ma main est visée au pommeau de ma rapière, mais l’espace d’un moment, j’ai l’impression d’avoir oublié toutes ces années d’entrainement et de duels. Ça n’a rien à voir avec un duel, ils sont une quinzaine ! Ludoric a beau être un bon bretteur, il apparait clair qu’il ne tiendra pas longtemps. Quant à Placide, il semble tout aussi figé que moi. Malgré l’ordre clair de notre protecteur, il reste en place, suffisamment longtemps pour le voir tomber, et s’enrager. Si je dois y aller, c’est maintenant. Allez ! Je baisse les yeux sur mes bottes, immobiles, sur mes jambes, tremblantes. Dans un bref flash, j’imagine la suite des évènements : le kidnapping, les coups, les viols, répétés. Tout ce que Mère m’a prophétisé, tout ce contre quoi elle m’a toujours protégé, à quelques dizaines de pas. J’ai juste à m’enfuir, mais ça non plus, j’en suis incapable. J’angoisse, je meurs.

Quand ils se saisissent du prince sans effort, la réalité de ma propre faiblesse me frappe de plein fouet, et tout se débloque. Je me précipite derrière un mur, je cours vers les caisses que Ludoric m’a montré, je me contorsionne pour passer derrière, en me blessant contre les bords bruts et tranchants du bois. Mon cœur semble prêt à exploser dans ma poitrine, j’ai envie de vomir, j’ai envie de hurler. Malgré l’urgence de la situation, je ne peux pas m’empêcher de penser à la suite : même si j’arrive à m’échapper, ensuite quoi ? Encore un autre refuge, encore une autre fuite, peut-être une nouvelle identité. J’ai envie de me rouler en boule et de mourir ici, une bonne fois pour toute, pour être libéré de cette angoisse. Une éternité passe, pendant laquelle je les entends marcher, rire, s’insulter en fouillant la zone. Je veux croire qu’ils ne me trouveront pas, je veux croire qu’ils passeront à côté sans me voir.

— « Là, y en a une ! »

Je hurle, je me débats. Je griffe, je mords. Quelque chose explose au niveau de ma tempe ; je sombre.


794 mots



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Je laissai un temps passer avant de prendre la parole, tout en acquiesçant aux derniers mots d’Ivanhoë. « Si je résume la situation, nous devons rencontrer Lambert et Garance au sujet des réfugiés, ainsi qu’Herminiette et, si possible, les deux autres Ombres afin de jauger leurs volontés et leur utilité éventuelle. Pour te répondre… » Je regardai Primaël. « … je ne sais pas si Balthazar sait quoi que ce soit concernant les grands pontes de la criminalité. Nous devrions l’interroger sur la question. Il pourrait nous donner des pistes intéressantes. Néanmoins, c’est un homme discret. Ses confidences ont toujours été ponctuelles. » Il faut dire que je ne cherchais jamais à les provoquer. « De plus, malgré plusieurs de mes mises en garde et malgré mes conseils, il n’a jamais changé de position. Il s’en est toujours remis à sa femme et n’a jamais cessé de refuser de se rebeller contre elle et ses directives. » D’où ma trahison. Je ne savais que penser de lui. Était-il lâche ou cachait-il quelque chose ? Je le croyais incapable de dissimuler quoi que ce fût. Il était fade, mais coucher avec le Roi avait un petit côté excitant qui m’avait maintenue dans son lit. Je devais néanmoins admettre qu’en de rares occasions, il s’était avéré surprenant. Depuis qu’il était en prison, il était particulièrement vigoureux. La peur de la mort sans doute. « Nous devons également tirer au clair cette histoire d’incendie. Si je comprends bien, tu désires rencontrer Clémentin. » dis-je, en jetant une œillade à Primaël. « Et toi Ludoric. » Mes prunelles s'étaient déplacées jusqu’à l’efféminé. « Si nous devons nous partager le travail, je devrais rencontrer Balthazar. Néanmoins, j’ai une meilleure idée. Ça nous ferait gagner un temps précieux tout en nous permettant d’observer les rapports entre les différents protagonistes et de dénicher ceux qui possèdent du pouvoir dans l’ombre. Nous pourrions aussi provoquer les tête à tête à notre guise. » Je souris et perdis mes lèvres sur mon verre. Je le vidai d’une traite. « Organisons un dîner et invitons toutes les personnalités importantes du Royaume. » Je plantai mes iris dans ceux de Primaël. « Narfas n’attend plus que tes directives. Tes alliés comme tes opposants sont suspendus à tes lèvres. C’est toi qui dois dicter les règles. Tu pourrais annoncer ce que tu comptes faire avant le repas. Nous observerons les réactions et pourrons peut-être même surprendre ceux qui comptent tricher avant même qu’ils ne le fassent. » Tout s’accélérerait inévitablement. De la même manière que mon conditionnel se transformait parfois en futur dans mes phrases, les suppositions d'aujourd'hui feraient place aux certitudes de demain. « Envoyons également des cartons d’invitation à des individus qui seraient capables de céder leur place pour de l’argent ou des privilèges afin de lancer l’appât. Ceux qui tirent les ficelles des réseaux dans l’ombre seront inévitablement tentés de s’inviter. » Le monde marchait ainsi. L’influence et la richesse achetaient tout, sauf les idéalistes et les personnes intègres. « Même si Ivanhoë et moi pouvons enquêter, ce coup nous aiderait forcément à repérer les chefs de file en question. » Je souris. « Je pourrais escorter l’ancien Roi. Il ne me faussera pas compagnie. Il sait que ma main peut être rude. » Il m’avait déjà contrariée par le passé. Mes dents n’étaient pas uniquement là pour soutenir mon sourire. Je pouvais également m’en servir pour mordre autre chose que des cuisses de poulet. « Ce serait idéal, sans parler du fait que réunir tout ce petit monde dans un endroit que nous connaissons nous donnera un avantage de taille. Il faudra préparer un repli au cas où, bien sûr, mais nous pourrons aussi préparer de quoi les tenir tous tranquilles. J’ai confiance en mes soldates. Elles assureront notre protection sans problème. Si je leur demande d’éliminer un invité gênant, elles s’exécuteront. Tout comme Clémentin te doit la vie, elles me doivent la leur. Ce dîner pourrait également rétablir l’ordre dehors, ce qui balaierait la question du nombre de soldats dont j’ai besoin. » Je me levai et fis quelques pas dans la pièce. « Une fois l’annonce de ce que nous comptons mettre en place faite, la situation ne pourra que s’améliorer. Ton projet… » Je me repris. « Notre projet est le plus viable. Il donne une chance à chacun de faire entendre sa voix et emportera fatalement l’adhésion du plus grand nombre. Ceux qui le refuseront seront faciles à écarter. Je n’aime pas user de propagande mais elle pourrait être utile. La mort d’un individu peut également être sociale, même si je pense que nous allons inévitablement devoir assassiner quelques personnes supplémentaires. » Ceux qui placeraient leur intérêt propre devant l’intérêt commun de Narfas. Je me déplaçai pour me rapprocher de Primaël. « Tu es habile avec ta langue. Tu les convaincras. » lui déclarai-je, mes lèvres portant le sous-entendu sans détour.

777 mots
Eméliana - Tamara:

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