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Alors que je tendais en toute innocence le petit chaton vers le dénommé Kuro, ce dernier répondit à ma question. Et tandis qu’il parlait, mon visage s’embruma quelque peu lorsque le démon me parla de maltraiter les animaux et de mettre en colère la petite fille du stand. Je n’avais vraiment pas envie de maltraiter aucuns de ces animaux et mettre en colère quelqu’un n’était vraiment pas polit, mais un sourire radieux réapparu aussitôt sur mon visage quand il me dit que je pouvais lui donner un nom et ainsi le garder.
Et c’est mes bras toujours tendu que je lui répondis d’un ton des plus enjoué, totalement absorbé par l’idée de posséder un véritable compagnon.

"Oh oui ! Je serais gentil avec lui monsieur et j’irai voir madame Shiro quand le stand fermera ! En attendant je vais m’amuser avec lui !"

Sur ses mots, je câlinai doucement le Liroa et celui-ci me répondit en lançant de doux miaulement, ce qui me faisait sourire et rigoler joyeusement. Mais alors que je m’amusais avec le chaton, je sentis qu’on me percuta, assez pour que je lâche un petit cri de surprise en faisant quelques pas pour reprendre mon équilibre. Je me retournai alors pour voir ce qui m’avait heurter. Les joues un peu rougis, je n’aperçus qu’une jeune femme et je pris la parole pour m’excuser, croyant être en faute.

"P…Pardon…"

Dans le même temps, la nouvelle arrivante fit de même elle aussi, ce qui fit que nous nous excusâmes en même temps. Ce qui me fit rougir encore un peu plus.
Et tandis que l’homme lui présenta le stand, tout en répondant à sa question quant au chaton, de mon côté, je lorgnai de temps à autre vers la jeune fille, détournant instantanément le regard lorsque je croisai le sien. Je remarquai tout de même son cache œil, qui m’intriguait plus qu’autre chose à vrai dire, son œil valide était quant à lui d’un rouge tout aussi intriguant lui aussi. Son visage me faisait d’ailleurs penser aux poupées que j’avais pus voir quelques fois dans les vitrines de certains magasins. Elle me faisait même un peu peur, mais elle avait l’air aussi timide que moi.
Ayant répondu aux questions, Kuro nous laissa tout les deux, avec le Liroa, pour retourner s’occuper des autres animaux. J’étais quelque peu mal à l’aise de me retrouver avec cette inconnue, laissant planer un silence des plus gênant. Mais finalement, en regardant le sol du stand et en cherchant mes mots, je réussis tous de même à bafouiller quelques petites choses à l’inconnue devant moi.

"Ah…heu… Je…je veux bien… vous le laisser"

Je croisai son regard un instant, mes joues aussi rouge que les yeux de la jeune fille, et comme avec Kuro, je tendis doucement le petit chaton vers elle, un peu plus timidement cependant. Ce dernier lâcha à nouveau miaulement agréable à l’intention de l’inconnue, réclamant encore d’autres caresses.

"I…Il…Il est gentil…
J…Je…j’aime bien… les petits animaux…"

Grâce à la soudaine joie de pouvoir jouer avec une petite bête à poils, ma timidité avait soudainement disparue d’un coup, mais voilà qu’elle était revenue avec l’arrivé de la jeune fille. Je ne savais pas trop quoi lui dire et je me sentais un peu bête et gauche face à elle.

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Le jeune 'homme' aux cheveux argent haussa un sourcil interrogateur en entendant la jeune femme donner un ordre de silence. S'ordonnait-elle à elle-même de se taire... ? Allez savoir pourquoi l'Elémental en était venu à cette conclusion. Peut-être parce qu'il ne s'estimait pas assez bruyant pour qu'il lui soit ordonné de se taire. Ou peut-être parce qu'il avait déjà oublié qu'il avait adressé la parole à la jeune femme, considérant que son invitation à apprendre en lui tendant la pince de joaillerie était infiniment plus importante que les propos qui l'avaient accompagnée. Une demi-seconde d'étonnement écoulée, l'Elémental avisa le sourire mi-figue mi-raisin arboré par sa dame de mère, qui ne savait pas non plus comment prendre la chose. Que la jeune femme se soit mise à tutoyer ceux qu'elle vouvoyait un instant auparavant en intimant le silence était des plus étranges, des plus inattendus et des plus déconcertants. Aussi les deux Eren échangèrent un regard d'incompréhension en voyant poindre dans les prunelles céruléennes de la demoiselle des larmes et s'enfuir en bredouillant une vague promesse de retour – de quoi perdre encore un peu plus nos deux joailliers qui ne savaient si la demoiselle les portait ou non dans son cœur. Un problème qui se trouva clos dans un haussement d'épaule nonchalant partagé par les deux Eren, avant qu'un autre tracas pointe le bout de son nez. Ou plutôt, de ses doigts.

Car si Elisha fut prompte à remarquer les doigts baladeurs des détenus dont elle avait la charge, elle ne fut pas la seule. Non, ne vous attendez pas à ce qu'Ercan ait remarqué la chose, par contre, vu la hauteur à laquelle son esprit plane... Yuan, en revanche, étrécit les yeux en voyant l'une des créations de son fils finir dans la poche de l'un des criminels, mais elle garda le silence car à peine eut-elle remarqué le fait que la Protectrice du Bonheur en charge intervint, usant d'un ton qui se voulait autoritaire. Et, malgré elle, la joaillière ne put s'empêcher de sourire en voyant la demoiselle haute comme trois pommes commencer à faire la morale à des individus qui devaient tous la dépasser d'au moins une tête. Ercan, lui haussa de nouveau un sourcil dubitatif en voyant une pomme apparaître dans la main de l'un des détenus – pourtant, il avait bien vérifié, il n'avait pas de pomme à son stand, l'Elémental... - ainsi qu'une fiole d'alchimie qui lui était également étrangère. Mais son regard vermeil se riva bien rapidement sur le visage enfantin de la Magicienne occupée à mettre les points sur les i. Et, bien évidemment, comme les chiens ne font pas des chats, il esquissa à son tour un sourire amusé en voyant la demoiselle user de toute son autorité pour ordonner aux détenus de rendre ce qu'ils avaient emprunté.

« La prochaine fois, d'mande avant d'te servir, ironisa le jeune 'homme' aux cheveux argent, s'adressant au détenu le plus proche de lui. »

Nonobstant la confusion du criminel, l'Elémental reporta son attention sur sa mère. Qui était en train de toiser minutieusement, un à un, chacun des individus composant le groupe mené par Elisha. Même celui qui venait de tourner les talons pour revenir au stand d'alchimie afin de rendre ce qu'il avait subtilisé. D'une main distraite, la joaillière récupéra les bijoux que lui tendit Elisha avant de se retourner promptement et de saisir la première chose qui lui tombait sous la main – à savoir, une pince – et la lança vers son 'fils', qui l'esquiva d'instinct avant de l'attraper au vol.

« Fils, un peu plus d'attention la prochaine fois ! J'te jure. »

Après avoir déposé les bijoux dans un coin, la dame aux longs cheveux ébène fit craquer ses doigts, un sourire carnassier s'étendant d'une oreille à l'autre sur son visage aux traits fins. L'Elémental émit un petit soupir en examinant la pince qu'il avait failli se prendre en pleine poire – après tout, le lancer de pince était une discipline annexe au lancer de cuillère – et la posa derrière lui, sur l'un des plans de travail, tout en priant vaguement les Aetheri pour le sort des pauvres détenus. Ou tout du moins, celui de leurs chaussettes, au moins, qui risquaient de se retrouver sans propriétaire à la fin de la journée.

« La d'moiselle l'a dit, j'ai l'droit d'vous botter l'cul les mecs ! J'ai cru comprendre qu'y'avait des médecins dans la salle... Ca vous intéresse ? »

Pas de quoi faire une très bonne réputation à la famille Eren, mais elle avait l'habitude... Mais après tout, ils se tapaient bien dessus dans le coin du maître d'armes, alors pourquoi pas au stand de joaillerie, pour mettre un peu d'animation ?

« Au fait, Elisha, ça te tente ? demanda l'Elémental, imperturbable, en brandissant la pince qu'il avait attrapée. »

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Le sourire de la joaillière ne fit que s'élargir lorsqu'elle vit les yeux des détenus s'arrondir comme des soucoupes. Probablement que le goût de la baston était quelque chose d'insoupçonné chez les artisans joailliers... Pourtant, la dame aux cheveux ébène pouvait se vanter d'avoir un coup de pied aussi efficace que ses techniques de joaillerie, qu'elle perfectionnait à chaque fois que son 'fils' poussait la porte de la maison en ramenant des excentricités ou des mauvaises nouvelles – autant vous dire que cela arrivait assez souvent. Yuan fit de nouveau craquer les articulations de ses doigts, toisant à un à un les détenus, sans animosité réelle, mais avec une bonne envie de se défouler – peut-être qu'elle avait inconsciemment accumulé trop de stress ces derniers temps. Elle était même prête à exprimer sa gratitude, sinon son admiration, à celui ou celle qui aurait suffisamment de culot et de courage pour relever son défi. Réponse qui dut néanmoins être encouragée par la Protectrice du Bonheur en charge du groupe qui, loin de s'offusquer devant tant de violence, invitait le plus naturellement du monde des criminels à se faire latter la tronche par une joaillière sortie du fin fond de la montagne – en même temps, la Protectrice en question était Elisha, que Yuan n'avait jamais connu pour sa subtilité. Amusée par l'encouragement donné par la Magicienne, la dame aux cheveux ébène jeta un bref coup d'oeil vers le fond de la salle, dans lequel semblait errer la fameuse Mérédith. Restait à espérer que celle-ci ait suffisamment de tolérance pour accepter que la joaillière s'adonne à quelques plaisirs extra-professionnels... ou qu'elle était suffisamment aveugle pour ne pas aviser la dérive des événements au stand de joaillerie.

Finalement, le regard onyx de la joaillière se posa sur la la jeune femme svelte dont les cornes de chevreuil ne faisaient aucun doute sur son appartenance raciale et qui semblait être partante pour un exercice 'baston' improvisé. Probablement une demoiselle habituée à casser nez et dents qui s'était retrouvée en prison à cause de ses hobbies moyennement éthiques... La joaillière aurait préféré se défouler sur l'un des détenus ayant osé poser les doigts sur ses bijoux et ceux de son 'fils', mais elle ne laissa pas transparaître sa déception, se convainquant rapidement que la jeune femme Bélua ferait également l'affaire. Quelque part, sa conscience lui disait qu'inciter ainsi des délinquants à commettre davantage de délits juste pour le fun n'était pas des plus honorables, mais elle fit rapidement taire cette conscience pour adresser un nouveau sourire à Elisha qui venait de l'inviter à rejoindre la Bélua, quelques mètres plus loin. Ne se faisant guère prier, et laissant la gestion du stand à son 'fils', la dame aux yeux bridés contourna la devanture de son stand et ne tarda pas à rejoindre la dénommée Katleen... ainsi que tous les détenus du groupe qui jugeaient visiblement bien plus intéressante la rixe à venir que le reste du forum des métiers. L'Humaine en aurait presque éprouvé un soupçon de compassion pour Mérédith. Presque.

Sa longue tresse noire battant son dos nus, la joaillière vint se placer en face de la Bélua, nonobstant les regards appuyés des détenus, et se mit en garde, les poings serrés, prête à en découdre. Sur son visage était toujours dessiné un sourire confiant, amusé et espiègle – oui oui, tout ça en même temps. Elle exécuta deux pas lents sur le côté, sans briser la distance qui la séparait de son adversaire. Puis, sans prévenir, son poing droit partit au niveau du visage, dans une feinte destinée à préparer le coup de pied circulaire rapide, au niveau des côtes.

...

Un sourire moqueur se dessina sur les lèvres du jeune Eren. Bien sûr, même en planant à des lieues de la réalité, il s'était bel et bien rendu compte que l'esthétisme était une notion assez relative lorsqu'il s'agissait d'Elisha. Quoiqu'il ne méprisait pas tellement le sens artistique de la Magicienne, mais le trouvait plutôt curieux. Comme un peu tout ce qui était excentrique en ce monde, en fait. A part sa propre personne. Enfin, peut-être. Il ne s'était jamais réellement demandé s'il se trouvait lui-même curieux ou non. Bref, quoi qu'il en soit, il était loin de trouver la prétendue nullité artistique d'Elisha affligeante, et avait quelque part envie d'en voir un peu plus, même si il avait déjà eu un exemple avec un sabot transmuté qui n'avait plus vraiment ressemblé à grand chose sinon à un sabot transmuté après avoir subi la magie de la jeune femme. Songeur, l'Elémental laissa la demoiselle se saisir de la pince avec sa franchise habituelle, se posant soudainement une question des plus existentielles : lui non plus n'avait jamais prêté attention aux règles esthétiques et au concept de beauté alors qu'il était artisan. Souvent, entre l'esthétique et le pratique, il penchait pour le pratique. Même si au final, entre le pratique et l'excentrique, il penchait pour l'excentrique.

« Mmm bah.. faisons un truc pratique ? suggéra-t-il en invitant d'un geste de la main la demoiselle à venir s'asseoir devant le plan de travail. »

Lui-même s'approcha de ce dernier après avoir mis en place une sécurité électrique autour des bijoux exposés. Quiconque tenterait d'en subtiliser à nouveau se prendrait un petit coup de jus qui ne passerait probablement pas inaperçu... Et à présent que sa mère humaine et anti-magique s'était éloignée, il y avait moins de chances pour que la magie de l'Elémental fasse des siennes. Tirant du pied un tabouret, le jeune 'homme' aux cheveux argent s'assit à côté de l'emplacement qu'il avait désigné pour Elisha, au niveau duquel se trouvait, sur le plan de travail, un petit tas d'anneaux argentés de quelques millimètres.

« Une chaînette, ça peut toujours être utile, nan ? »

Il ne savait pas vraiment pourquoi, mais telle était la pensée qui lui avait traversé l'esprit. D'autant plus qu'assembler des anneaux de métal à l'aide de pinces était l'une des techniques de base de joaillerie. Attrapant une paire de pinces qui traînait sur le plan de travail, le jeune 'homme' ne tarda pas à faire démonstration de la méthode, ouvrant d'abord deux métallique à l'aide des pinces, puis les refermant une fois rassemblés.

« Et ainsi d'suite, fit-il, succinctement. »

Il n'avait jamais revendiqué de grandes prédispositions à la pédagogie, hein. Constatant qu'il manquait une pince à Elisha, il posa l'une des siennes devant la Magicienne, et attendit de voir les résultats de la première tentative de la jeune femme. Plutôt que de l'assommer de conseils plus ou moins utiles, il préférait d'abord voir comment la demoiselle se débrouillait instinctivement. Après tout, lui-même accordait une grande place au 'feeling' dans sa méthode de création...

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« Hey. »

Je sursautai en sentant une main se poser sur mon épaule, et manquai de peu de marcher sur le pied de l'impudent qui m'attaquait avec autant de traîtrise. Mais je me retins de justesse lorsque mon regard gris acier se posa sur un visage qui m'était familier, et dont la présence n'aurait pas dû me surprendre plus que cela. Le regard orange du jeune homme roux, qui avait posé sa main sur mon épaule, se fit rieur, et je ne retins pas le soupir exaspéré venant du plus profond de mon cœur. Dans l'absolu, je n'aurais pas dû être étonné de la présence de Feyd en ces lieux, étant donné qu'il passait sa convalescence à la clinique des Protecteurs du Bonheur. Atteint de Vaakum peu après son arrivée dans cet espace-temps, le pauvre Tiregan en avait vu des vertes et des pas mûres, tout en étant obligé de rester cloîtré au sein du Sanctuaire pendant que je vadrouillais par monts et vallées – à vrai dire, j'étais même un peu surpris qu'il ne m'en veuille pas plus que cela. Que le jeune homme roux ait décidé de faire un petit tour au forum des métiers afin de tromper son ennui sans avoir une ribambelle de médecins sur le dos l'enguirlandant à cause de son obstination était donc plus que compréhensible. Et dire que je ne l'avais même pas prévenu en revenant... Vraiment, des fois, je me disais qu'il fallait que je m'achète un cerveau. Ou des post-it. Bref.

« Laisse-moi m'en occuper, me fit-il avec un clin d'oeil. Pour une fois qu'il s'passe quelque chose dans l'coin... »

Je ne pus m'empêcher d'esquisser un sourire amusé. Pour un Tiregan en mal d'action, veiller sur deux détenus prêts à se taper dessus à tout moment semblait être une occasion rêvée de tromper l'ennui de sa convalescence. J'espérais juste que le jeune homme aux cheveux roux ne se surmenait pas trop et qu'il aurait la force d'intervenir si besoin. Ceci dit, j'étais loin de vouloir jouer les mères poules, et ne comprenant que trop bien l'ennui du Tiregan, j'étais on ne pouvait plus enclin à le laisser s'occuper de l'Elémentale de Feu et du casseur de nez. Probablement qu'il était tombé sur un Protecteur du Bonheur, sinon Mérédith elle-même, pour savoir en quoi consistait ma tâche – et accessoirement quelles étaient les libertés qui m'étaient permises. On passerait sur le fait accessoire que le Tiregan n'était pas officiellement Protecteur du Bonheur, hein...

« Merci. Essaye d'voir si l’acupuncture ça calme vraiment les esprits. Ou sinon, tu peux toujours faire ça à l'ancienne. »

Haussements de sourcils de la part des détenus, qui avaient parfaitement compris mon sous-entendu. Je n'étais certes pas réputé pour être moi-même un casseur de nez, mais il m'arrivait de temps à autre de perdre patience... et de recourir à des moyens plus ou moins déontologiques. Enfin, rien de bien méchant, rassurez-vous. Je suis prêt à parier qu'il y a bien pire que moi au sein même des Protecteurs du Bonheur. Le Tiregan m'adressa un nouveau clin d'oeil avant d'afficher un sourire carnassier en posant son regard sur les deux prisonniers, qui demeurèrent silencieux. Peut-être que, finalement, les aiguilles de l'acupuncteur seraient un moindre mal pour eux...

Je m'éloignai ainsi du stand du guérisseur pour retourner au stand de l'agriculteur, où j'avais laissé le reste de mon groupe. Qui, fort heureusement, ne semblait pas avoir connu l'apocalypse durant ce court laps de temps où je l'avais laissé sans surveillance. L'alcoolique chronique semblait végéter dans un coin, guère intéressé par l'agriculture ou la météorologie, le meurtrier involontaire observait d'un air songeur la demoiselle au nuage, l'Ange déchue et l'Orisha écoutaient attentivement l'agriculteur et la petite fratrie kleptomane semblait être aux anges, jouant avec des morceaux de nuage qui leur avait probablement été offerts par la demoiselle faiseuse de pluie – et d'autre chose, présumai-je. L'aîné avait beau avoir quinze ans, au fond, ils n'étaient que de pauvres enfants qui n'avaient probablement jamais reçu quelque chose de leur vie. Je m'approchai de la jeune femme aux prunelles céruléenne qui discutait avec l'agriculteur, mais demeurai légèrement en retrait, les deux ayant visiblement engagé une conversation qui ne me regardait en rien.

« Hé, Enzel ! m'interpella le plus jeune des trois blondinets – à peu près onze ans, selon mes souvenirs. Ca s'vend cher un nuage ? »

Je poussai un soupir désabusé, ne pouvant toutefois m'empêcher d'esquisser un petit sourire. Décidément, ces gosses avaient passé un peu trop de temps dans la rue, et pas suffisamment auprès de leurs parents. Quoique vu la tronche et le caractère desdits parents, peut-être que le résultat que j'avais sous les yeux était le moins pire possible.

« Aucune idée, répondis-je en toute honnêteté. Essaye de lui revendre, p'tetre qu'elle te dira, poursuivis-je avec un sourire narquois. »

Le garnement eut néanmoins suffisamment de jugeote pour saisir le sarcasme, et grommela quelque chose dans sa barbe que je ne compris pas. Je jetai un bref regard vers l'Ange déchue et l'Orisha, qui semblaient s'être lancés dans une discussion passionnante à propos de l'agriculture. La criminelle finit toutefois par s'approcher de nouveau de l'agriculteur, et lui poser une nouvelle question :

« Dis-moi... Tu penses qu'on peut se mettre à avoir foi en la nature quand on a perdu la foi en l'homme ? »

La question n'avait rien d'agressif, aussi surprenant cela puisse paraître. Seule la curiosité transparaissait dans la voix de l'Ange déchue. Et peut-être même un peu de gêne.

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