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 [Q] - Autour de la barre | Miles

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Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~

~ Orisha ~ Niveau I ~
◈ Parchemins usagés : 2293
◈ YinYanisé(e) le : 24/05/2014
◈ Activité : Horticultrice
Latone
Dim 13 Juin 2021, 17:57



Partenaire : Miles Köerta
Intrigue/Objectif : Latone infiltre le domaine des Gandr pour leur chiper des informations sur Linos. Malheureusement pour elle, Miles est aussi sur place.

~~~

Le fredonnement rythmique de la Fae aida l'Orisha à se détendre. Affalée sur son siège, Latone profita des éclaircis du zénith pour digérer son déjeuner. La prochaine Marche était imminente et ce fait la travaillait. Ce serait la première fois qu'elle descendra avec son nouveau corps, sa véritable identité. Et donc, sans les muscles et l'endurance de la Sùlfr. Pour être honnête, elle avait confiance en ses capacités. Sa Voix se fit plus acérée, même si le Velthar continuait d'être une chimère à ses yeux. Elle ne comptait pas utiliser sa part de Kyri, du moins pas en toute conscience. Pour le reste, sa musculature s'affirmait, elle contrôlait à la perfection les mécanismes de son nouveau réceptacle. Latone avait encore, certes, beaucoup de points à assimiler, mais sa survie en Linos semblait assurée. Il restait le cas du Bleu Roi, dont la présence risquait de compromettre la prochaine expédition. Les Marcheurs en patrouille ne le croisèrent guère, pas une seule trace laissée sur son sillage. Les plans de la Marche devraient alors se focaliser sur l'exploration et la conquête, afin d'étendre un peu plus leur emprise sur la Cité Miroir. Cela lui paraissait comme la meilleure approche : tant de questions restaient en suspens, notamment avec les Hihtyx. Qu'était-il arrivé aux Kirzor après la soirée chez les Dontheilea ? Qui parmi les sœurs de Lolaha étaient aussi des Kyris et pourquoi le cachaient-elles ? Où était parti le fameux Navyu ? Trop de questions, et pas assez de réponses. La chasse devait reprendre.

" Hmm, hmm, hmm, hmm ♪ "

Clo s'occupait de son jardin avec entrain. Sa gaieté apaisait les nerfs de l'Orisha, mis à rudes épreuves avec tout ce qu'elle subissait dernièrement. Bien souvent, la Fae se dandinait avec un air sur le bout des lèvres pour arroser les fleurs, vérifier le bon état des jeunes pousses, la production des fiers Juns. Clo sortait littéralement de nulle part et pourtant, elle tombait fichtrement à pic pour Latone. Cette dernière fut dévastée lorsque cette salope d'Alfar avait détruit son jardin, ce beau lopin de terres fertiles dont elle s'occupât avec fierté, acharnement et espoir ! Parfois, quand Latone déprimait, elle repensait à la gueule de cette usurpatrice après qu'elle l'avait battue ; elle ne ressemblait plus à rien, comme si la Kirzor lui avait craché du poison à la tronche. Le Velthar se présentait comme une arme dangereuse, parfaite pour une tarée de son acabit, si on exceptait les maux qui la tiraillèrent par la suite. En tout cas, Clo avait retapé le jardin, comme neuf, comme si rien ne s'était passée, malgré la perte du vieux Yack, Mambo… Ainsi, lorsque l'Orisha n'était pas là, les Juns se retrouvaient entre de bonnes mains. Un jour, elle s'occupera du cas des Faes, étant donné que le Monde des Chants intéressera forcément la Marche.

La Bleue sirota son jus de fruit, son regard éperdu sur l'envol de Clo. Elle se déhanchait avec les sonorités flottant dans sa tête, si minuscule. La Fae avait d'ailleurs cette chorégraphie intrigante, où – lorsqu'elle devait rejoindre les feuilles plus bas – s'accrochait à la tige et tournoyait autour à l'aide de ses longues jambes. Ce genre de danse, plutôt sensuel il fallait dire, lui rappelait que… D'un coup, ses yeux s'écarquillèrent et sa main se resserra sur le verre. Mais bien sûr !


~~~

" Entrez. "

Sequela, domaine des Gandr, milieu de soirée. Le vigile de service soupirait déjà, prêt à s'en aller dès son devoir terminer. Il n'avait accepté la proposition que pour bien se faire voir aux yeux de Nepherites, l'une des Gandr les plus craintes au domaine ; en quelque sorte, le bras droit du patriarche. La Vampire lui donnait des sueurs froides à chacun de ses passages, comme si elle était capable d'assassiner d'un unique regard. Il n'était qu'un Gandr comme un autre : cette peur était naturelle et inculquée dès son plus jeune âge. Pour sa part, il ne craignait rien, car son Gène s'activait à volonté. Cela ne l'excluait pas des tâches les plus futiles, après tout il n'avait rien accompli de particulier pour la famille. Trier les invités sur le volet à cette soirée organisée spécialement par Nepherites devrait lui rapporter quelques points, c'était toujours ça de pris. Il donnerait n'importe quoi pour en finir et retourner dans ses quartiers. Toutes ces danseuses commençaient à lui donner le tournis aussi. Elles étaient si vulgaires, des morceaux de viande tout juste bon à mater…

" Vous êtes ? " La prochaine se couvrait bien plus que ses congénères au moins, enveloppée de la sorte dans un gros manteau. Ça caillait tellement, elle avait bien raison.

" Fleur. " Il vérifia la liste. Il y avait bien une danseuse de prévu sous ce pseudonyme.

" Elles ont vraiment des noms à coucher dehors. " Soupira-t-il volontairement à voix haute, alors qu'il lui libéra l'accès pour la laisser passer. Allez, Fleur, va te trémousser sur la piste et t'empaler sur la barre, devait-il se dire.

Connard. En dépassant les quelques Gandr sur son passage, Latone fit en sorte que la couronne fleurie sur son crâne masquait autant que possible son identité. À l'intérieur, ces hédonistes devaient être moins vigilants, surtout si l'alcool commençait déjà à couler à flot et que les spectacles s'enchaînaient sous leurs yeux embués par la débauche. Au moins, l'Orisha avait réussi un sacré exploit, car ni Léto, ni aucun Guide n'était parvenu à infiltrer le domaine jusqu'à aujourd'hui. Du moins, ils n'eurent pas l'audace d'aller aussi loin. La Marche gardait un œil constant sur les Gandr et leurs agissements, même s'ils s'enfermaient la plupart du temps entre leurs quatre murs dénotant avec l'architecture typique de Ciel-Ouvert. Depuis le retrait de Berholt Gandr, la dynastie ne semblait plus se préoccuper des projets de la Marche Terne. De son vivant, Tlaalee-Aan regrettait la tournure des événements : retirer les Gandr de leurs alliés symbolisait une perte financière et matérielle conséquente. Les Guides avaient fini par s'en passer, y compris avec l'ouverture de la première porte de Linos…

Toutefois, pour Latone, une variable la tiquait au sein de l'équation : le Gandr des souvenirs de Lolaha Kirzor. Il fallait croire que les origines de la dynastie remontaient jusqu'à l'âge d'or de Linos, ce qui représentait une information capitale pour leurs investigations. Les Gandr refusaient de parlementer, toujours aussi rancuniers à l'idée d'avoir accepté une Sùlfr sur les trônes de la Vigilante, auparavant. Latone se contrefichait de leurs états d'âme : elle n'était pas Léto, pas même une Sùlfr, et elle avait apparemment connu un Gandr. Le patriarche actuel, celui qu'on surnommait le Lion Blanc, Berholt Gandr, devait forcément posséder des indices sur le Siffleur, même minimes. Cela lui paraissait inconcevable que les Gandr n'aient pas gardé des traces de leur passage sur Linos, alors que leur nouveau foyer, Ciel-Ouvert, fut bâti littéralement sur les vestiges de la cité souterraine. Bien évidemment, Latone pourrait attendre de nouvelles Hihtyx pour peaufiner le récit historique, mais elle n'était pas connue pour sa patience. La décision de forcer le dialogue avec Berholt lui revenait, personne mis à part Clo ne connaissait le plan de la Hurabis.

Car oui, la Fae aida l'Orisha à infiltrer Sequela. Latone savait que les Gandr organisaient régulièrement des soirées au domaine, que ce fût pour affaires ou pour le plaisir. Les petites Voix de la Vigilante lui révélèrent que ces hédonistes recherchaient des adeptes du pole dance pour leur prochaine célébration. Latone n'y connaissait rien en la discipline, ses propres pas de danse s'avéraient encore trop rigides. Toutefois, la naissance d'Akaris en sa Voix pourrait lui donner un avantage non négligeable. Grâce à Clo, elle assimila les mouvements les plus faciles afin d'entretenir l'illusion, si elle ne parvenait pas à localiser le patriarche tout de suite. La Bleue s'était donc offerte l'une de ces fameuses tenues, si peu couvrante, serrée au possible… Cette vision qu'elle eût devant le miroir la dégoûtait. Elle n'était pas une danseuse et ne se trouvait pas si belle que ça. Même si les mots doux du Köerta à son égard lui avait réchauffé le cœur, se retrouver accoutrée la sorte dégradait son image. Enfin, elle se rassura à l'idée que la plupart des Marcheurs s'étaient déjà rabattu sur un déguisement afin de remplir certaines missions. De toute façon, tout ceci n'avait pour but que de découvrir l'identité de ce Gandr et de son histoire. En phase avec Vertigo, cet homme l'intriguait.

Arrivée au niveau du salon, Latone fut époustouflée de la gueule de leur demeure. On aurait presque l'impression de ne plus être à Ciel-Ouvert. Toutefois, même les Gandr honoraient les Chants et la Musique, ainsi entendit-elle un saxophone résonner près de la piste. Les notes subtiles d'un violoncelle, également. La pièce était vaste et accueillit des dizaines de tables basses et de sièges rembourrés, tout pour donner un confort absolu aux invités et une vue imprenable sur la scène aménagée pour l'occasion, un bar servait leurs meilleurs crus, des servants au sourire crispé allaient et venaient pour fournir les élus en boissons, victuailles et, le cas échéant, indications. Certaines danseuses se mêlaient aux groupes, même lorsque l'une d'elles était à la barre, peut-être bien pour continuer à divertir. Pour un peu, on pourrait presque croire que la demeure était devenue un cabaret privé, à moins qu'elle l'ait toujours été. Au-dessus d'eux, quelques balcons successifs s'imbriquaient les uns sur les autres, menant aux quartiers privés des Gandr, sur au moins trois étages. Latone remarqua quelques regards sombres par-dessus les rambardes. Ce devait être en haut, quelque part, que le Lion Blanc se terrait.


" Toi là. On l'avait arrêtée d'un coup d'épaule. Les danseuses passent par la pièce adjacente, tu ne rentres dans le salon qu'après ta prestation. Latone retint un grognement mais pas son agressivité. Sans un mot, elle suivit la direction sans tarder, afin qu'on ne la cramât pas. … Tu ne trouves pas qu'elle est diablement grande, celle-là ? " Cela ne semblait pas gêné l'autre ; avec un peu de chance, elle brisera par mégarde la barre verticale avec son poids, cela leur fera du spectacle

Berholt Gandr hantait ses pensées alors qu'elle se retrouva en compagnie des autres acrobates en tenue moulante. Puisqu'elle les dépassait aisément d'une tête, Latone préféra les éviter autant que possible, point d'humeur à discuter. Elle trouvera illico Berholt et parviendra à lui arracher ses vers du nez. Mais pour l'heure, elle devait attendre une occasion d'attirer l'attention, tout en réussissant l'exploit de ne pas se faire virer en moins d'une minute. Tapie dans le semblant de loges en compagnie de ces dévergondées, la Hurabis n'attendait qu'une unique chose : l'annonce de Fleur.



1870 mots ~



By Jil ♪
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Miles Köerta
~ Orisha ~ Niveau III ~

~ Orisha ~ Niveau III ~
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◈ YinYanisé(e) le : 20/09/2014
◈ Activité : Traqueur [Corvus Æris] | Marcheur
Miles Köerta
Lun 28 Juin 2021, 23:28



« Nom et prénom? Aligna le vigile avec une conviction frôlant le zéro absolu.

- Hakiel Gandr.

- Miles Köerta. »

Le porteur stoppa de nouveau sa pupille sur mon visage abîmé, l’air soupçonneux, interdit, comme s’il ne croyait pas vraiment en ma présence en ces lieux. Même si nous savions pourquoi il se montrait, tout à coup, aussi réticent à notre présence, nous fîmes comme si de rien n’était, le laissant plutôt vérifier sa liste pour notre entrée. En promesse de ma bonne foi, je lui offris même un sourire, l’un de ceux que l’on pouvait définir de joli et de charmant malgré la détérioration avancée de mon visage. À cette vue, pourtant, il détourna aussitôt les yeux, hochant vaguement de la tête lorsqu’il confirma notre inscription sur ses papiers. Il est nerveux… Constatais-je en continuant de lui sourire, espérant qu’il se décide à agir rapidement. Cependant, le jeune homme ne savait pas sur quel pied danser actuellement, les jointures de ses poings craquant discrètement à la pression qu’il exerçait sur son document.

« Est-ce qu’il y a un problème? » S’interrogea Hakiel en penchant sa tête sur le côté, s’impatientant en voyant que le portier ne nous laissait pas entrer.

En réalité, ce dernier ne savait pas s’il devait m’arrêter ici, sur le perron de l’entrée, ou s’il devait se décaler pour nous laisser passer. D’un côté, il savait pertinemment ne pas avoir l’autorité de m’expédier hors du domaine – surtout que mon nom se trouvait bel et bien sur la liste des invités –, mais d’un autre côté, il ne savait pas comment réagir à ma présence. J’étais connu à Ciel-Ouvert pour partager bien plus que le lit de la Guide Sùlfr – Kaine et Toesia à l’appui –, la même Marcheuse qui avait retiré Berholt de son trône de fer en arrachant aux Gandr la Marche dont ils avaient toujours été très fiers. Depuis, si la famille n’avait plus la main mise sur l’organisation et qu’elle n’y accordait que peu d’attention à la suite de ce revers de main, les souvenirs de cette défaite gardaient tout de même un goût amer sur leur palais.

« Nous pouvons vous présentez nos invitations si vous le vou–

- Non. Tout est en règle. Désolé pour ce contretemps. Passez une belle soirée. »

Il avait choisi l’option de ne pas s’en mêler, de suivre les consignes qui lui avaient été données sans poser de questions. Son travail consistait simplement à faire entrer ceux qui se trouvait sur la liste et à retourner ceux qui ne s’y trouvaient pas. Si l’amant de la Souriante avait son nom sur ses papiers, il pouvait assister à la soirée. Après tout, il n’était personne pour décider si, oui ou non, j’avais le droit de poser les pieds à Sequela. Et sans demander son reste, le vigile se dégagea du chemin menant à l’intérieur du bâtiment en poussant les portes de la demeure. Hakiel le remercia d’un sourire crispé, tandis que je lui fis un léger signe de la tête. À peine venions-nous de le dépasser que je ne pus empêcher mon regard de se porter par-dessus mon épaule, voyant à temps la silhouette du vigile disparaître derrière le battant qui se refermait dans son dos. Le claquement de la porte suivit quelque temps après, nous enfermant au cœur des bruits et des odeurs qui embaumaient, chacun à leur manière, l’atmosphère particulier du domaine.

« Je suis encore surpris que tu sois parvenu à les faire accepter ma présence à cette soirée. »

Hakiel m’adressa un regard en coin, tapotant doucement mon épaule pour attirer mon attention.

« T’es ici à ma demande. Puis, je n’ai pas fait grand-chose. C’est mon père que tu devras remercier, pour avoir accepté ma requête.

- Un : pas question que je remercie ce type. Et deux : raison de plus pour te dire que t’as géré comme un chef. Si ce n’était pas de ton obstination, ton père m’aurait gentiment demandé d’aller voir ailleurs. S’il ne le ferait pas au cours de la soirée, lorsque nous nous croiserons. C’était un chasseur actif des Sùlfr et de ceux qui n’avaient pas éveillé le Gène. À ses yeux, j’dois être sale et contaminé. Pas que ça me déplaise, cela dit », lui partageais-je en rigolant, laissant flotter un sourire mutin sur la commissure de mes lèvres.

Je préférais être cent fois « souillé » par les bras de Léto, par ses lèvres et ses caresses, que d’être bien vu aux yeux de ce détraqué. Hakiel secoua la tête, relâchant un soupir amer.

« Te méprends pas : c’est son âme qui est sale et contaminée. C’est lui qui est malade, grogna l’homme-animal d’un air mauvais, sans cacher son animosité. Tous ces gens qu’il a éviscéré, tous ces innocents qu’il a tué simplement pour préserver la « pureté de la lignée » … Franchement.

- Tu sais pourquoi ton vieux veut te voir maintenant, après tout ce temps?

- Non, mais j’appréhende.

- Et pourquoi, toi, t’as accepté de le rencontrer? Surtout ici…

- C’est la première fois qu’il me contacte depuis mon départ à Basphel, depuis que j’ai appris ses… activités. Le Corbeau émit une pause, secouant distraitement les plumes de ses cheveux : ce n’était pas le moment de se remémorer le passé. Je veux simplement entendre ce qu’il a à me dire et ensuite, on rentrera. »

Nous progressions d’un pas lourd jusqu’au salon, les danses et les couleurs englobant aussitôt notre vision sous les lumières tamisées, suspendues au-dessus de nos têtes. L’ambiance était aux sourires et rumeurs, aux plaisirs et à la boisson, le tintement des verres dans lesquels flottaient les boissons introduisant notre arrivée. Nous tentâmes de faire profil bas, surtout moi, qui usa de quelque pouvoir pour me fondre dans la masse et ne pas trop attirer les regards sur moi.

« D’ailleurs, la question me démange depuis que nous sommes partis, mais… est-ce que les lunettes sont vraiment nécessaires? »

Taquin, je baissais les lunettes rondes sur le bout de mon nez, dévisageant au-dessus de leur verre l’expression de mon petit frère.

« T’es ridicule.

- Eh! C’est toi qui m’as demandé de mettre mon plus bel ensemble, et les lunettes font partie du costume. »

Commandant deux boissons, Hakiel refoula un gloussement tout en roulant des yeux.

« On est à l’intérieur! Tu peux les enlever, je crois.

- Naaan! J’les trouve classe. »

Le gratifiant d’un sourire alors qu’il essayait de me chiper mes lunettes, nous attendîmes patiemment que nos boissons nous soient offertes.

« Bon, bon, garde-les si ça te chante.

- Et comment!

- Tsk! Concentrons-nous pour trouver mon père. »

L’Eversha s’était assis à un banc surélevé, attirant l’attention de l’un des barmans du comptoir pour savoir s’il avait croisé un certain Nakian Gandr. Auprès de lui, je zyeutais plutôt les environs avec attention, remarquant l’engouement de certains jeunes hommes – et de quelques femmes aussi – devant le déhanché sensuel de la danseuse qui se présentait actuellement sur scène. Elle était provocante, lascive et émoustillante, ses mouvements autour du poteau ressemblant à ceux d’un félin, en traque de sa prochaine proie. Et sa proie, c’était cette femme aux lèvres noires qui se tenait aux premiers rangs de la scène, et qui profitait langoureusement de chacun des tremblements que sa muse lui infligeait, lorsque ses doigts voyageaient pour la frôler ou que son parfum entêtant venait l’aguicher. Toutefois, le spectacle prit lentement fin au même moment où la chanson exhala ses derniers soupirs, le bruit des instruments s’estompant doucement, sans s’éteindre pour autant. La musique, au contraire, se métamorphosa, prenait un tout nouveau souffle, une toute nouvelle vie qui prit le pas sur l’ancienne mélodie. Et au rythme qui montait crescendo, une seconde danseuse fit son apparition à la barre. Cependant, nous étant détournés de ce qui se produisait sur scène, Hakiel et moi fouillons plutôt l’intérieur de la salle avec minutie, puisque le barman ne semblait pas avoir croisé celui que nous recherchions.

« Est-ce que tu le vois quelque part? » Demandais-je au Corbeau.

Malgré mes mutations, je ne réussissais pas à le localiser.

« Non…

- Ne fais pas ta timide, Fleur! » Pouvions-nous entendre non loin de la scène.

L’Eversha continua de sonder le salon tout autour de nous, tentant de distinguer le visage austère de son père. Mais le Réprouvé semblait absent.

« Peut-être qu’il n’est pas encore arrivé? »

Le jeune homme se retourna dans ma direction, m’agrippant par l’épaule dans le même mouvement.

« Essayons de monter aux balcons. On aura une meilleure vue de là-ha… Miles? »

J’avais les yeux grands ouverts, incapable du moindre geste.

« Miles? T’en pinces pour cette danseuse ou bien? »

Son ton était blagueur, mais légèrement pressant : nous avions mieux à faire que de baver sur leurs cuisses.

« Allez, viens, on va s’essayer aux balcons inférieurs. »

Mais je ne bougeais toujours pas, criant en mon for intérieur un puissant « LATONE?! » qui envahit l'espace de mon esprit. Elle avait beau avoir été parfumée, maquillée, et enroulée dans ce costume, qui se trouvait bien loin de ses goûts originaux, je reconnaissais son odeur à travers tous les autres effluves. Mais qu’est-ce qu’elle fiche ici, à se frotter à ce poteau?! Je voulus lui faire quelques signes discrets, mais la jeune femme ne m’avait pas remarqué, emportée dans sa chorégraphie.

« Miles, secoue-toi.

- Non, non, attend, tu saisis pas, lui chuchotais-je en tirant brusquement son collet pour le rapprocher de ma hauteur. C’est Latone. Tu sais, l’ancienne Hozro de Léto dont je t’ai parlé à mon mariage. C’est elle. »

Battant des cils, Hakiel releva lentement son visage jusqu’à la scène.

« Quoi? Mais qu’est-ce qu’elle fout ici?!

- Tu poses la question au mauvais gars. »

Putain, et je peux même pas crier son nom pour l’appeler! Mais c’est quoi son cirque? Je voulus me lever de mon siège pour me rapprocher de la scène, mais Hakiel me retint à la dernière seconde par le bras, secouant discrètement de la tête.

« Attend deux minutes. Elle a peut-être… euh… un plan?

- Qui requiert ce genre de couverture?

- Peut-être? On sait pas du tout pourquoi elle est ici. Alors ne faisons rien d’inconsidéré, s’il-te-plaît. On pourrait lui causer plus d’ennuis qu’autre chose. »

Je me pinçais l’arête du nez, prenant une gorgée de ma boisson. Il avait raison.

« Écoute, on va faire comme ça : je cherche où se trouve mon père et toi, tu gardes un œil sur Latone. Essaye d’attirer son attention. Elle doit être ici pour une bonne raison. »

Encore heureux, songeais-je en roulant des yeux, m’accoudant sur le comptoir du bar alors qu'Hakiel s'infiltrait au coeur de la foule pour rejoindre les balcons inférieurs. C’est une nouvelle de ses fantaisies? Continuais-je de me questionner, tentant de comprendre les agissements de la Bleue tout en scrutant l’enchaînement de sa danse. En tout cas, elle est pas mal. Elle sait chanter et dan… Mais dans un sursaut, je fermais brusquement les paupières. Elle avait fait un faux mouvement. Tout le monde crût qu'elle allait manger le sol de plein fouet. Pourtant, en ouvrant un œil, je remarquais, comme les autres spectateurs, qu’elle s’était brillamment rattrapée. Un soupir de soulagement s’extirpa entre mes lèvres. Elle ne sait que chanter, en fait. Latone, par les Dieux, descend de là! Qu’est-ce que tu fais ici?

Mes interrogations étaient nombreuses.


1 916 mots | Post I | Le texte en gras, italique correspond aux paroles de Miles lorsqu’il communique par télépathie.

Miles utilise les pouvoirs suivants :
- Camouflage : pouvoir permettant à l’utilisateur de détourner l’attention des gens sur autre chose que sur lui-même. Par conséquent, plus sa magie est forte ou plus il se trouve à proximité de sa victime, plus il est capable de camoufler sa présence au point d’en devenir indétectable.
- Télépathie et communication à distance [gains du Lien d'Ësse'Aellun]





[Q] - Autour de la barre | Miles Signat16
Merci Léto ♪:
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Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~

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◈ YinYanisé(e) le : 24/05/2014
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Latone
Sam 03 Juil 2021, 01:26




Ce saxophone la rendit folle. Latone déglutit plus par réflexe face à cette cacophonie aux allures apocalyptiques qu'à sa prestation en elle-même. Très bien, elle dansera autour d'une satanée barre, ce n'était pas la Mort – hein Jun ? – mais se dandiner sur une telle insulte aux Échos relevait du sacrilège. Ils faisaient bien de se terrer dans leur domaine tout pourri, ils n'avaient rien à faire à Ciel-Ouvert et encore moins à Linos. La Kirzor inspira profondément, afin de ne pas griller sa couverture, ni l'une des danseuses qui lui pétaient les ovaires. Ces chipies faisaient exprès de parler aussi fort dans son dos ? À se moquer de sa tenue de scène et de son caractère rochon ? Elle avait bien hâte de leur refaire le portrait, après avoir enfin mis la main sur ce qu'elle cherchait. Dans le pire des cas, si elle ne trouvait vraiment rien, elle se contentera de courroucer l'illustre Lion Blanc sur son propre territoire.

À peine le rideau poussé que l'invasif éclairage lui fit perdre comme quelques secondes de la réalité. En un flash, le temps que ses yeux s'habituèrent à l'atmosphère du salon, Latone – ou plutôt, Fleur – se retrouva sur le devant de la scène, près de ce fameux poteau. Comme fascinée par l'inconcevable situation, sa main effleura le métal avec une lenteur non désirée. Ce contact froid lui fit bien comprendre que c'était la réalité : elle venait vraiment de se présenter sous les projecteurs, comme à Aïkisu. L'ambiance s'avérait diamétralement différente : l'euphorie et le bien-être troquaient leurs places à la sensualité et la perversion. Leurs regards la dégoûtaient et lui donnaient l'impression de ne pas mériter son surnom de Vertigo. Ce serait comme si Lolaha montait soudainement sur scène pour lui foutre une baffe ; celle-là, elle la sentirait passer. Un engouement oral la tira de sa léthargie, maintenant l'attention était on ne peut plus braquée sur elle. Les quelques danseuses présentes par-ci par-là ne suffiront plus à la couvrir, il fallait sauter dans le bain. Oh que non : elle n'était pas timide, juste déterminée à les battre à leur propre jeu. Leurs visages décrépis par la défaite serait un si beau spectacle, la meilleure des récompenses !

Bien, qu'il en fût ainsi. D'une main de maître, Fleur saisit la barre et se cramponna au rythme de ce satané instrument à vent. L'interprète s'avérait tant en transe qu'il réalisait une chorégraphie plutôt obscène. À l'inverse, la danseuse redoublait d'efforts pour répéter le plus fidèlement possible les leçons de Clo. Transposer la gaieté des Faes autour d'une vigoureuse tige à l'art sulfureux de la danse à la barre se montrait comme, disons, un défi de taille. Il se pourrait bien que la petite Fae assistât à la prestation, pour la meilleure comme pour le pire. En tout cas, Clo fut d'une grande aide autant pour la technicité de la danse que pour la tenue. Comment rendre attrayante une femme aussi bourrue ? Un doigté féerique, tout bonnement. Le justaucorps l'enserrait plus que de raison, mais ce n'était rien comparé à l'équilibre précaire causé par les talons. Sequela semblait être un autre monde, alors qu'il suffisait d'une porte pour retourner à l'enchanteresse vie de montagnarde. Tourbillonnant autour du poteau, Latone chassait au mieux ses pensées négatives pour conserver son anonymat, consciente que les Gandr pourraient avoir quelques tours dans leur sac. Ses jambes se raccrochaient à la barre durant sa valse, craignant à plusieurs reprises que les collants se fissureraient sur l'instant. Quoique, cela l'aiderait à mieux respirer, tant sa poitrine était comprimée ! Grommelant malgré elle, le pompon arriva lorsqu'elle sembla s'imaginer Miles la sermonner. Cela sortait tellement de nulle part. Me voilà à entendre des voix, ça y est je suis folle. Et si le Köerta la découvrait de la sorte ? Et s'il la trouverait vraiment "pas mal" ? La perspective la fit flancher et perdre soudainement sa stabilité ; un coup de ces fichues ballerines ! Les cœurs se resserrèrent et les souffles coupés. Au dernier moment, Latone se souvint des conseils de la Fae : sa jambe la plus étirée s'agrippa à la barre, la chute s'interrompit avec théâtralité. Sauvée, Fleur sourit au public qui soutint ce geste risqué. Malheureusement, un regard en direction des balcons lui fit comprendre que les plus hauts placés n'en avaient strictement rien à faire d'elle, malgré toute sa hargne. Sermonnée aussitôt par ladite voix intérieure, la Kirzor ne se priva pas d'extérioriser toute sa frustration : On va fermer sa gueule, à la fin ? Tiens, en voilà une bonne idée.



Fleur usa de la barre pour se redresser et faire face à ces décadents. Elle lança un regard noir aux interprètes qui lui cassaient les pieds depuis le départ. D'un claquement de mains, l'acrobate installa un silence assez puissant pour attirer le maximum d'attention sur elle. Latone concentra sa magie afin de laisser Hihtyx reprendre en main la musique, de doux échos d'un piano accompagnèrent ses premiers pas, de retour vers la barre. Comme si Sequela prenait vie, les lumières se teintèrent d'un rouge charnel et mirent en évidence chacun de ses prochains mouvements. La Hurabis ferma les yeux et tourna autour du poteau, se laissant aller quelques secondes le temps de laisser la tension monter et son Khitarr éclater.

Puis-je m'asseoir sur vos genoux ?

La Voix suave instilla un frisson.

Accordez-moi juste un instant…

D'un bond, sa ronde se poursuivit autour de la hampe.

J'ai encore fait une grosse… bêtise.

Ses talons claquèrent le sol, ses bras tendus en arrière.

Je comprendrai que l'on m'inflige…
Un châtiment.

Son dos se colla contre la barre, alors qu'elle réitéra des flexions sur jambes le plus sensuels possible.

J'ai été extrêmement désobéissante.
J'ai été vilaine, vilaine, vilaine.
Alors si monsieur veut bien se donner la peine, de me donner de la peine…

Se relevant d'un coup, sa jambe passa autour de son pilier pour reprendre la valse.

J'aiiiiime entendre vos mains claquer
Quand je me cambre.

Ce qu'elle fit.

J'ai besoin d'être corrigééééée.
J'ai été méchante, méchante, méchante.
Je veuuuuux, sentir le doux soufflet
De vos réprimandes.
Je crois que j'ai bien méritééééée
Une grosse fessée.

Opposée au public, la peau de sa main fila contre sa fesse droite pour la frapper. Autant l'impact et la salacité élevèrent une ovation. Prise malgré elle au jeu, Latone entama le second acte en s'asseyant au bord de la scène.

Je veux sentir ma peau brûler.

Le Chant du Khitarr s'immisça davantage et donna l'illusion que son épiderme fumait.

Mes joues rosir.

La vapeur s'intensifia et embauma le salon d'un parfum envoûtant. Le flou installé pourrait presque en aveugler certains. Vive dans son élément, Latone était descendue de la scène et dansait entre le long des tables.

Bien installée sur vos genoux.
Mon sang bouillir.

Elle fit languir un badaud en passant tout près de lui, pour finalement se raviser.

Quand mes fesses seront embrasées,
Je vous laisserai les embrasser…

Elle se pencha sur un autre, qui recula, intimidé par la stature de la demoiselle.

Et puis m'étreindre.

Fleur se redressa et ses bras enlacèrent son propre corps. Pivotant sur la pointe de sa chaussure, une étonnante chaleur fit son apparition, alors que la fameuse vapeur se teinta de rouge.

C'est un incendie, venez m'éteindre.

Elle écarta les bras.

Venez…

Souriante, son Hihtyx hissa d'un niveau le volume de la musique pour le bouquet final.

J'aiiiiime, entendre vos mains claquer
Quand je me cambre.

Telle une furie insaisissable, elle bondit de table en table, faisant fi des verres renversés sur son passage.

J'ai besoin d'être corrigééééée.
J'ai été méchante, méchante, méchante !

Son périple lui fit rejoindre le comptoir. Le barman retint autant son souffle pour ses cocktails que pour la prestation sous ses yeux.

Je veuuuuux, sentir le doux soufflet
De vos réprimandes.

Jetant son dévolu sur un pignouf à lunettes teintées, l'infiltrée glissa du bar pour se poser sur ses genoux. Sans prêter plus d'attention, elle saisit ses verres et les enfila.

Je crois que j'ai bien méritééééée

D'une poigne de fer, elle se raccrocha à sa cravate et se laissa tomber à la renverse, l'autre ayant la présence d'esprit de la rattraper et soutenir la position. Sa Voix en flammes fit détoner son plus beau Tonohr.

UNE GROSSE FESSÉÉÉÉÉE !

Le souffle – bien loin de chercher à tout balayer sur son passage, heureusement ! – laissa les invités bouche bée, le Khitarr de Fleur dissipé, jusqu'au moment fatidique où les premiers applaudissements et sifflements saluèrent son audace. Latone reprit appui sur les jambes de l'éphèbe, les lunettes mirent en avant son sourire éclatant. Elle n'avait jamais essayé un tel accessoire, c'était rigolo de distordre les couleurs de sa vision. La Bleue serait partante de les lui piquer, ce ne serait que juste rétribution après avoir collé ses fesses sur lui. En tout cas, si avec ce cirque les Gandr d'en haut ne lui adressaient pas un instant, il ne lui resterait plus qu'à réduire le domaine en cendres. Alors, Berholt, qu'est-ce que tu vas faire ?

" Viens par-là, ma jolie ! "
Évidemment, chacun souhaitait sa part du gâteau. En toute réponse, Latone se contenta de tendre les lunettes à son propriétaire.

" Une danse privée ? " Des piécettes tintèrent entre ses doigts. Il était vrai que certains élus purent avoir un show pour eux tous seuls, dans les pièces adjacentes prévues à cet effet. Sequela se dessinait comme un véritable club en cette soirée.

D'autres propositions et invitations se succédèrent, la prochaine danseuse aura bien du mal à faire oublier sa prédécesseure. À force, Latone ne les écoutait même plus, car un détail important venait de pointer le bout de son nez. Les regards échangés avec l'homme initialement accoudé au bar la figèrent, les verres encore entre ses doigts tremblèrent au rythme de son enveloppe charnelle. MILES ?! Elle n'arrivait pas à croire qu'une connaissance à elle osait être présent, non seulement chez les Gandr, mais de surcroît en cette soirée précise. De toutes les personnes qui auraient pu être sur ce tabouret, le Köerta faisait parti de celles que la Kirzor reniait catégoriquement. Il l'avait forcément reconnue – son œillade en disait long – et maintenant, Latone ne savait plus trop quoi faire sans éveiller les soupçons. Trop de regards continuaient de couler sur elle pour enrager, voire le repousser avec violence. Le sang ascensionna jusqu'à son visage, comme si les effets du Khitarr persistaient. Cette déplaisante circonstance l'enserrait autant que le costume. Tiraillée entre prier les Ætheri de la tirer de ce cauchemar et l'envie de faire retomber sa couronne de fleurs contre ses yeux pour se camoufler, cet horrible silence lui insuffla le courage de briser la torpeur.

" Pourquoi t'es là ?! "


1691 mots (sans la chanson) ~
Défi Top-Site : Latone chantera La Fessée de Luce
Avec le Lien d'Ësse'Aellun, les pensées de Latone (gras et italique) sont captées par télépathie par Miles



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Miles Köerta
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Miles Köerta
Dim 04 Juil 2021, 19:14


CLAP! Le son fut unique mais efficace. Le silence, alors progressif, se généralisa bientôt dans tout le salon de Sequela, obligeant l’intensité de son regard à s’égarer quelques instants du visage de son interlocuteur pour le perdre sur la scène, en contrebas. Les deux hommes se taisaient, à l’instar de leurs homologues qui perçurent, par à-coups, le changement d’énergie au sein de la salle depuis les balcons. Et si quelques hères furent trop concentrés dans leurs échanges pour se rendre compte de la nouvelle ambiance, ils le remarquèrent pourtant bien rapidement au moment où les lumières, chaleureuses et secrètes, prirent une teinte plus agressive et charnelle; un rouge passion, voluptueux, qui éveillât aussitôt l’instinct des hédonistes aux plaisirs des rapprochements et de l’érotisme. Puis, une mélodie naquit, dont l’écho ne fit que mûrir de seconde en seconde, et ce, sans même qu’aucun musicien n’ait fait vibrer l’anche de son saxophone, ou fait frotter les cordes de son violon, ou bien presser les touches de son piano. Pourtant, la musique gonflait et se renforçait dans l’air ambiant, les premiers coups des instruments à corde joignant non pas le rythme d’un déhanché provoquant, mais plutôt la lascivité d’un Chant. À ceux et celles qui étaient les plus près de sa personne et de sa Voix, les trépidations qui se répandirent à l’extérieur et à l’intérieur de leur chair furent incontrôlées, instantanées; un plaisir pour les sens que l’on souhaitât réitérer dans le cœur de ces grands vivants, et dont l’artiste exauça bien vite le vœu. Dès lors, elle parvint à les conquérir par la sensualité de son Chant, par les effets de sa Magie, par l’étalage de ses charmes féminins et par la chaleur de ses légers soupirs. Oh oui, qu’elle avait été vilaine : vilaine de les faire languir, vilaine de se rendre ainsi inaccessible, vilaine d’éveiller leur appétit sans les laisser se rassasier, à deux, à trois ou dix s’il le fallait. Cela ne les dérangeait pas de partager. Ils étaient ouverts d’esprit.

« Je ne savais pas que vous nous réserviez une telle surprise pour cette soirée, Sir Gandr », siffla discrètement l’homme qui se trouvait en face de lui, visiblement impressionné par la prestation – mais surtout l’audace appréciée – de la jeune artiste.

En bon hôte, son voisin se contenta de le gratifier d’un sourire poli.

« Où avez-vous trouvé ce petit lapis? »

Lapis, en diminutif au lapis-lazuli, dont la couleur bleu, profonde, était littéralement renfermée dans chacune des mèches de la chevelure de la danseuse-vedette. Cependant, l’adjectif le précédant fût aussitôt changé dans l’esprit de l’invité lorsqu’il se rappela la taille de l’acrobate : il opta dès lors pour un lapis flamboyant, qui savait embraser les désirs et faire fourmiller les passions par un naturel claquement sur son séant.

« Je n’aurais jamais cru qu’une simple danseuse de poteau pouvait posséder un chant si beau. »

Une Voix pouvait être magnifique, envoutante, tout en ayant un Chant désastreux, cassant, et en y réfléchissant bien, il se demanda alors quel genre de cri cette nymphe possédait lorsqu’elle se mettait à hurler, lorsqu’elle entendait et sentait une main la claquer. Toutefois, à sa première remarque, le Lion Blanc ne fit qu’acquiescer silencieusement, ne délivrant le fond de sa pensée. C’est vrai. Qui l’aurait cru? Et d’un geste de la main, il fit signe à l’un de ses domestiques de s’avancer. Il avait un message à transmettre.




Alors, Berholt, qu'est-ce que tu vas faire? Encore cette voix… Sûrement sortir la perpétratrice de tout ce bordel. Comparativement aux précédentes interventions, celle-ci résonna clairement entre mes deux oreilles. En observant son visage, en reprenant peu à peu contact avec la réalité – ce même contact qui me semblait avoir complètement perdu dès qu’elle s’était mise à chanter –, je commençais lentement à faire les connexions dans mon esprit. Pourtant, l’intérieur de mon crâne était toujours assujetti à ce torrent d’incompréhension et d’étonnement, mon visage s’écrasant un instant dans la paume de ma main, comme pour en cacher une gêne intégrale qui aurait tôt fait de prendre d’assaut mon faciès. Mais ce n’était pas tant l’envie de disparaître ou la timidité d’un jeune homme qui faisait ainsi trembler tous les membres de mon corps. Toutefois, la situation dans laquelle nous nous trouvions me forçais à refouler cet irrésistible frisson en prenant plusieurs grandes inspirations, tandis que, tout autour de nous, des pièces étaient secouées et de jolies paroles lui étaient soufflées. Calme-toi. Calme-toi, m’imposais-je d’un ton impérieux, cherchant à reprendre un minimum le contrôle de mon faciès et du trémolo de ma voix. Voyant que l’artiste me tendait les lunettes, je me permis enfin de retirer mon visage d’entre mes doigts, croisant aussitôt son œillade. Qui se figea dans une expression d’horreur. À sa vue, je ne pus m’empêcher de lui adresser un sourire en coin, plus pour dissimuler mes propres ressentis que pour la rassurer, reprenant délicatement mes lunettes en main, au même instant qu’un grand cri tonna entre mes oreilles. Je déglutis difficilement, la dernière connexion se liant naturellement au reste de mes suppositions. Ce n’était pas comme s’il s’agissait simplement de moi qui m’imaginait les réparties de Latone… Par les Dieux! Est-ce qu’elle m’entendait aussi ou étais-je le seul à pouvoir m’infiltrer ainsi dans son esprit? Est-ce qu’elle pouvait connaître tout ce qui se tramait actuellement dans ce cerveau?

« Elles… te plaisent? » Croassais-je le plus sereinement possible en balançant les lunettes sous son nez, cherchant encore à agripper quelques inspirations de calme en plus, tout en desserrant la cravate de mon collet.

Cependant, dès que son interrogation parvint à trouver chemin entre le pincement de ses lèvres, je me permis d’approcher l’un de mes doigts sur la surface de celles-ci afin de l’interrompre, modelant mon sourire pour le rendre plus joueur et charmant. Très bien. Très bien. J’étais de retour dans les apparats de ma persona.

« Tu devrais t’éloigner de celui-là, Fleur. »

Détournant ma pupille de la Bleue, je fis volte-face de sorte à étudier l’invité qui venait de s’avancer. Il était plutôt bel homme, avec ses cheveux bruns, ses grands yeux violets et sa silhouette modelée dans le marbre des Anges. Il devait faire tourner toutes les têtes à son passage, son sourire ayant certainement emprisonné plus d’un cœur, comme il nous le démontra en étirant ses lèvres pour les beaux yeux de l’artiste aux mèches bleues. Il veut la renverser dans son lit. En même temps, je jetais un rapide coup d’œil en direction de Latone.

« Tu passeras un meilleur moment en ma compagnie, dit-il en dessinant une nouvelle enjambée, rapprochant son visage de celui de l’acrobate. Je te réprimanderai, si besoin. »

Finalement, je reportais mon attention sur Latone. Feignant de ne pas avoir entendu la remarque de l’autre invité, je me penchais tranquillement au-dessus de l’oreille de l’infortune danseuse, remontant l’une de mes mains jusqu’à la pointe de ses cheveux, immisçant de la sorte mon bras entre elle et le don juan. Distraitement, j’enroulais une mèche le long de mon doigt.

« C’est un joli spectacle que tu viens de nous offrir. Un plaisir pour l’imagination et les yeux », lui partageais-je en tout bien, tout honneur, un ton moqueur ourlant pourtant mes paroles.

De fait, je pressentais le coup de poing qu’elle allait bientôt me jeter dans le ventre, alignant une suite qui nous rappela tous les deux à l’ordre :

« Tu veux attirer l’attention de Berholt Gandr? » Chuchotais-je si bas qu’elle fût l’unique personne à pouvoir m’entendre, ma Magie s’activant également de sorte à réduire l’acuité auditive des figurants les plus près de notre position, sans éveiller leurs soupçons.

Elle vise un gros poisson.

« Ne sois pas surprise. On prétend que les Orishas seraient des genres de devins. J’en suis peut-être un? »

Je me fichais de sa gueule. Son expression doit être magnifique présentement! Mais je n’étais pas en position pour le constater par moi-même.

« C’est une couverture dont tu as besoin? Alors, joue le jeu. »

Mais la jeune femme réagit à peine. Aux grands problèmes, les grands moyens, pensais-je en soupirant intérieurement.

« Tu veux entendre une histoire de cul? »

Latone eut comme un léger sursaut, alors que je rapprochais plus encore mon visage du sien, donnant l’illusion à un spectateur extérieur que j’avançais pour lui offrir un baiser, mes lèvres frôlant sa peau. Ainsi, d’une inflexion tendre et chaude, prenant des accents volontairement graves et sensuels pour éveiller une quelconque réaction de sa part, je soufflais à son oreille :

« Prout. »

La voix suave instilla un frisson. Mais pas pour les mêmes raisons que sa Voix, à elle, nous avait fait connaître un peu plus tôt. La tension parut s’alléger tranquillement, et en voyant son corps trembler, je finis par me reculer, n’abandonnant le rictus qui apparaissait entre mes cicatrices.

« Suis-moi, Fleur. Tu ne seras pas déçue.

- Tsk!

- Ne te fâche pas. Je te la passerai une fois que j’en aurais fini avec elle. Elle est carrément mon type.

- Je ne prendrais pas tes restes, baiseur de Sùlfr.

- Hum… Je pensais que vous étiez plutôt ouverts d’esprit chez les Gandr. Tant pis pour toi », déclarais-je en haussant des épaules, empoignant le menton de la danseuse improvisée tout en plongeant mes pupilles dans l’océan de son regard.

Dans le même mouvement, j’étirais mon cou pour rejoindre la hauteur de sa bouche, suspendant mes lèvres à quelques millimètres seulement des siennes.

« Mais j’ai pour habitude de marquer mes proies, de les garder auprès de moi jusqu’à ce que ma faim s’apaise. Je suis particulièrement insatiable, vous savez, susurrais-je en laissant voyager ma seconde main sur ses formes, son justaucorps étant si serré que c’était comme si je touchais directement à sa peau. Par conséquent, si ça te déplaît tant que ça, va te chercher une autre danseuse. Parce que celle-là, elle me fera danser toute la nuit. »



Je refermais la porte de la salle privée derrière nous, prenant une profonde respiration. Cette dernière tremblait dans le fond de ma gorge, secouée par une émotion violente qui revint en force.

« Sérieusement… Murmurais-je en finissant par coller mon front au battant de la porte, laissant mes bras glisser le long de ma silhouette afin d’enserrer mes côtes. Avec l’aide de quel Dieu je suis parvenu à rester aussi calme? »

Pourtant, je ne pouvais plus me contenir. Je ne savais pas comment j’avais réussi à dire et à faire tout cela sans me trahir. Cependant, à présent, c’était plus fort que moi. Mon corps se remit à trembler violemment, tandis que mes joues se gonflèrent d’air sous l’impulsion du rire que je tentais vainement de refouler. Mais ce n’était plus possible. L’hilarité explosa de ma gorge dans une tempête bien trop longtemps retenue prisonnière. Mes jambes ne parvinrent plus à me soutenir, de telle sorte que je me laissais tomber au sol, mes bras serrant encore plus mon ventre, comme pour en soulager les crampes qui viendraient à poindre.

« J-J’ai be-besoin d’être cor…rigééééée! J’ai été mé-méchante, méchante, méchanteeeee, essayais-je de chanter, sans y parvenir, tant la douleur à mes côtes étaient insupportable. Je n’a-n’arrive pas à croire que tu ais… Pfffft! Hahahaha! Je crois que j’ai bien méritéééééé! Une grosse fessééééée! Mon rire ne fit que se renforcer. Si c’est un rêve, je ne veux pas me réveiller. C’était beaucoup trop beau. »

Mais la Marcheuse n’était pas du même avis, un premier talon fusant droit dans ma direction. Cela étant dit, je l’évitais avec la grâce d’un canard qui s’étouffe, l’horrible éclat de rire ne s’essoufflant. Réitérant aussitôt un nouveau lancé, la Bleue tenta de viser mon visage, que je préservais d’une seconde agression en levant mes bras.

« Vous commencez à être vilaine, vilaine, vilaine, ma Dame! Vous avez besoin d’être corrigée… » Alignais-je en lui adressant un clin d’œil.

C’était la goutte de trop qui fit déborder le vase, la furie aux cheveux bleus se jetant à ma gorge.

« Temps mort! Stop! STOP! J’en peux plus! Je vais mourir! » Expirais-je en riant, profitant d’une brèche dans l’offensive de la Guide pour me défaire de sa poigne.

Latone répliqua immédiatement en agrippant un coussin pour me le lancer à la figure. Ce dernier, je l’encaissais sans même tenter de me défendre, l’attrapant à mon tour pour le lui jeter à la tronche. Nous tournâmes dans le petit salon pendant plusieurs minutes, à la manière du chat qui pourchasse la souris, sautant entre la table et les quelques divans rembourrés. Toutefois, après un certain temps, je la laissais me rattraper, mon souffle tressautant.

« Je peux mourir heureux! » Lui confiais-je en m'esclaffant.


2 095 mots | Post II | Sans les paroles de Latone et les paroles de la chanson




[Q] - Autour de la barre | Miles Signat16
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Latone
Dim 11 Juil 2021, 01:04




Silence. Il… lui intimait le silence ? L'écarlate de l'embarras se mua peu à peu en une colère palpable, si bouillonnante que l'Orisha ne perdit pas une seconde pour dompter la bête. Oh que oui, elles étaient bien sympathiques ses lunettes, pourraient-elles crisser entre ses dents, si elle ne se préparait pas à lui dévorer la main dès la première occasion. Distraite par l'audacieux qui osait les approcher, Latone ne lui offrit qu'un air confus et indécis. La présence de Miles lui procurait à la fois de l'inconfort et une certaine sérénité, ce qui la ferait disjoncter sur place. Peut-être serait-ce son ultime échappatoire, d'ailleurs… Hé, elle était une comédienne présentement, ce ne serait que respecter son rôle. La voix dans sa tête revint à la charge et lui procura un frisson bien particulier : ce ne pouvait être que le Köerta, tant les notes de sa mélodie lui furent si reconnaissables. Il était un regain au sein de cette gueule de loup. Hors de question. Elle jeta une œillade à Miles le temps d'un instant ; contrairement à ces chipies, Latone n'était pas une fille facile. Sa poigne sur la manche de l'albinos se raffermit à mesure que le bel éphèbe tenta son approche. Un pas de plus et il se prendrait un crachas, d'où le réflexe instinctif de s'interposer du côté de Miles. À partir de ce moment précis, Latone se figea et ne ressembla qu'à une statue de glace. Le regard écarquillé, éperdue sur le visage de son ami, la Bleue ressentit les mêmes effets qu'à Aïkisu, lorsque l'effronté osa jouer avec sa natte fleurie. Une nouvelle fois, la jeune femme comprit que ce simple toucher avec l'apex de ses mèches lui plaisait. Elle allait même jusqu'à comprendre que c'étaient du fait des doigts du Köerta. Pourquoi ? Peut-être que ces contacts, alors en possession du corps de la Sùlfr, lui manquaient. Peut-être qu'ils l'intriguaient et la rendaient avides. Peut-être que… elle voulait se considérer comme spéciale à ses yeux. C'était un sentiment étrange et immuable, pourtant si limpide chaque jour. Les lèvres entrouvertes, elle capta le moindre de ses souffles sur sa peau, comme transportée par ses palabres et commérages, prête à fermer les yeux lorsque ses lèvres se colleront aux siennes. Il avait vu clair dans son jeu, mais elle ne le remarqua qu'à peine ; du moins, jusqu'à la déception finale, émise par une singulière imitation de pet. Es-tu sérieux ?! Elle se mit à trembler, pour diverses et folles raisons. Miles profita de cet état de faiblesse pour l'attirer dans ses filets. Encore, Latone se retrouva absorbée par son jeu d'acteur et à s'y prêter beaucoup trop à son goût. Ses joues s'empourprèrent et elle fut si aisée à isoler.

~~~

Plantée au centre de la salle, dos au Köerta, le regard fixé sur la table prévue pour diverses activités, toutes plus exquises les unes que les autres, la Kirzor demeurait rougissante. Pas de colère, ni même d'euphorie, mais d'un bouleversement indescriptible. En quelques coups de langue, Miles l'avait arrachée à l'émérite dragueur et l'avait laissée avec des intentions si séduisantes. La marquer… Il pourrait la marquer tout comme il l'avait fait avec Léto. Il pourrait lui laisser une telle chance et l'élire au rang de conquête. Exactement comme Margueritte Hautbourg avec le beau brun dont elle ne se souvenait plus du nom. Il se disait insatiable ? Elle n'en savait rien. Elle imaginait que… enfin, avec la Sùlfr, ce devait être forcément quelque chose. Disons qu'elle n'avait pas les mots. Mais rien que ce terme, "insatiable", émis par sa propre voix, cela lui fit mordre sa lèvre. Et cette manière qu'il avait de la toucher, par Jun, c'ét—

" … "

… Il s'esclaffait bel et bien. Elle lui balança son talon. Puis un autre. Non, non, pas une seule pensée, par une réflexion, juste : tuer Miles Köerta. Sans les escarpins, Latone arrivera bien par l'atteindre. Il osait en plus reprendre sa chanson ?! Furieuse, s'apprêtant à lui arracher la tête, elle s'immobilisa pourtant à l'inflexion de l'Orisha ; contre toute attente, ce vil renard ne fit preuve que de ruse ! Elle agrippa le premier objet à portée – un coussin – pour lui faire payer. Trop mou ! Juste : tuer Miles Köerta !

" Tu vas crever ! Elle le rattrapa enfin et le plaqua contre un mur, s'imaginant le faire passer au travers du moindre centimètre de cette foutue demeure ; mais bon, sans succès. Ce satané sourire… ! Entre la rage et la folie, son visage ne reflétait plus que les reliquats de la furieuse Hozro. Je peux te l'assurer : la mort est ennuyante pour l'éternité. Elle arma son poing. Tu vas le découvrir sous peu. Lui souffla-t-elle, avec la même intonation qu'il osât user sur sa personne tantôt. Toute proche, une lueur éclaira, fugace, ses iris. Mais pas avant t'avoir fait payer ton affront. Elle le redressa, ses mains fermement raccrochées à son col. Assis. " Siffla-t-elle, les yeux dans les yeux.

Sans trop savoir si le Molosse se payait encore sa tête ou si la Bleue s'avérait super convaincante, elle constata avec une certaine satisfaction qu'il obtempéra. Elle l'avait relâché et le voilà affalé sur le divan, patient quant au sort qu'elle lui réservait. Cette inversion des rôles lui plaisait. Oh, il ne sera pas déçu. Après tout, c'était lui qui voulait une danse pour toute la nuit. Droite comme un piquet, Latone se concentra quelques secondes, le temps de faire le vide dans son esprit embué par l'adrénaline. Écho de sa précédente prestation, elle claqua une fois des mains. Les lumières de la pièce ne muèrent point, mais la musique qu'on entendait à travers les murs – presque – insonorisés fut couverte par le Hihtyx de la Marcheuse. Un air aussi frénétique que suggestif allait accompagner sa nouvelle lubie. Elle rouvrit les yeux, l'air plus serein ; en réalité, elle ne l'était point.


" Tu m'as fait tourner en bourrique, à mon tour de te rendre la pareille. Elle leva l'index, vindicative. Interdit de te lever. "

La musique environnante s'emballa et l'artiste monta sur la table, équipée de l'éminent poteau de danse. Sans ses talons, cela lui paraissait moins impressionnant que prévu. Malgré tout, elle démarra sa danse en solo, usant de tous les stratagèmes possibles pour reproduire une prestation aussi grandiose que sur scène. À tout moment, elle pourrait lui sauter dessus pour le coller, le faire languir comme ces affamés de Gandr. Regarde-moi. Elle n'était plus que Fleur, la plus belle Voix de Ciel-Ouvert. Et cette fameuse danseuse n'avait plus que ses iris focalisées sur l'intrépide à lunettes teintées, au moins lorsque ses sensuels mouvements lui permirent d'établir le contact. Souffle-moi encore ces mots. Pas un soupir d'aise, pas un chant, juste une femme qui arracherait toute l'attention d'un homme rien qu'avec son déhanché. Durant cette ode à l'intimité, Latone sembla comme oublier toutes les implications de sa présence, toutes ces histoires de Gandr. Jusqu'au moment fatidique où elle se retourna, son manège mettant à l'honneur son postérieur enroulé dans ce fichu déguisement. Sa main se leva, prête à abattre sa sentence sur la vilaine, exactement comme durant la Fessée. Toi seul a le droit de me réprimander. Alors que le mouvement fut bien décrit, elle s'arrêta au dernier moment à quelques centimètres de sa fesse et lui dévoila un majeur bien tendu.

" C'est ça que tu veux, connard ?! Elle t'a plu ma fessée, hein ?! Soudainement de nouveau enragée, elle se jeta sur lui. Oh, il avait beau l'éviter, il demeurait sur le divan et c'était bien tout ce qu'elle désirait. En attrapant son costume, elle put se rapprocher, quasiment à califourchon sur lui. Foutu cavaleur, sale profiteur, baiseur de Sùlfr, HA ! Elle multiplia les insultes tout en se dandinant avec légèreté pour le narguer, jusqu'à que l'équilibre précaire de leur position lui fit glisser sa main jusqu'au fessier de la demoiselle. Un frisson diablement électrique la parcourut et lui fit insuffler plus de force dans son emprise. Tu oses… ! " Il prétextait avoir voulu la rattraper car elle allait se casser la gueule. Peut-être ! Mais ce n'était pas une raison !

Poussant un juron, et Miles au passage, elle s'éloigna à l'autre bout du divan. Avec le contrecoup de toute cette mascarade, sa respiration se fit plus pressante. Le Hihtyx se dissipa dans le Silence, laissant place à l'ambiance propre de Sequela. Les voilà, deux imbéciles sur un sofa, dans une pièce dédiée au plaisir des yeux et de la chair. Elle réarrangea ses cheveux et sa couronne fleurie, faisant mine quelques secondes de l'ignorer. Elle tira sur le costume pour bien l'ajuster. Elle devrait remettre les talons aussi… Les voilà quittes, dirons-nous. Latone se contentait de ce simili de vengeance. La Hurabis ne fit que se prêter au jeu de sa persona, tout comme lui.


" Je te déteste. Siffla-t-elle en le fixant de travers, prête à bondir à la moindre approche de sa part. Tu te moques ouvertement de moi alors que tu es chez les Gandr, toi, le putain de mari d'une Sùlfr. Elle n'en avait plus rien à faire des raisons de sa présence, tant son comportement la rebutait. Tu vas te faire tuer… Était-ce de l'inquiétude qu'elle ressentait ? Elle se leva, soudaine, et le pointa du doigt. C'est quoi ton problème ?! Pourquoi je te fais rire ?! Si j'ai envie de danser, je danse, un point c'est tout ! Compris ?! Elle croisa les bras. Si je veux chanter la Fessée, je chante la Fessée, et cela n'a rien à voir avec le fait que j'adore les fessées ! Silence, la musique du salon s'était arrêtée et des applaudissements retentirent. Latone la Bleue redevint la Rouge. … CE N'EST PAS CE QUE JE VOULAIS DIRE ! "

Le battant de l'entrée grinça, il mit fin à leur quiproquo immédiatement. Point gêné de son intrusion, le serviteur jeta un regard nonchalant sur les dégâts laissés par les joyeux lurons. Ce ne serait pas la première fois qu'un show ait pu vriller à ce point. Las, il ferma la porte derrière lui, son attention focalisée sur la soi-disant Fleur.

" Seigneur Gandr vous invite à l'étage. La Bleue n'en croyait pas ses oreilles. Elle jeta une œillade en direction de son compagnon. Veuillez me suivre. " Il était pressé et elle n'avait pas le choix. Le patriarche des Gandr n'attendait pas.

Alors que le messager s'avançait déjà vers la sortie, Latone étira un gigantesque sourire victorieux. Toute guillerette, elle fila enfiler ses talons. Bien entendu, l'albinos chercha à attirer son attention, mais elle n'eut cure de ses conseils ou avertissements. Elle se contenta de passer près de lui et de tirer une fois encore sur sa cravate, en guise de moquerie.


" Le spectacle est terminé. " Reste dans le coin s'il te plait, on se revoit juste après… Elle priait qu'elle l'entendit, sur un malentendu…


1917 mots ~
- L'empreinte du Neru : Un lien particulier lie votre personnage à Miles Köerta. Il s'agit d'un lien d'amour, de respect et de domination consenti au moment du rêve. Vos deux personnages deviennent capables de communiquer par la pensée et de faire preuve d'empathie l'un envers l'autre. L'Aisuru [Latone] possède néanmoins une caractéristique de domination sur son Orine [Miles]. Lorsqu'il exige quelque chose, cela crée chez l'autre le besoin d'obéir ou de l'aider au mieux. L'Aisuru sera inspiré en présence de son Orine. Il se peut également qu'il ou elle développe une attirance physique pour l'Orine et trouve excitant de l'imaginer attachée par ses soins.



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~ Orisha ~ Niveau III ~

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◈ Parchemins usagés : 1157
◈ YinYanisé(e) le : 20/09/2014
◈ Activité : Traqueur [Corvus Æris] | Marcheur
Miles Köerta
Sam 24 Juil 2021, 00:14



J’avais un sourire malicieux, qui s’agrandit plus encore lorsque les pensées de la Bleue vinrent se lover au creux de mon crâne. J’avais bien conscience de l’embarras qui l’étranglait au vu de la situation, mais celui-ci avait rapidement fini par lâcher sa prise autour de sa gorge. Incapable de contenir plus longtemps le feu qui montait à l’intérieur de la jeune femme, l’incommodité s’était violemment métamorphosée en rage pure, vive, explosant littéralement au moment où l’ancienne Hozro m’avait collé au mur. Sa colère était brûlante, palpitante au plus profond de ses pupilles, et sans même leur porter un regard, je parvins à distinguer la courbe de ses poings du coin de l’œil. La menace soufflée par ses paroles était on ne peut plus claire. Malgré cela, je n’effaçais le rictus dont s’était armé mon visage, relevant plutôt un sourcil à la suite de ses propos.

« Ah oui? Exhalais-je calmement dans un ricanement, enserrant par réflexe le tour de son poignet. Et comment comptes-tu faire ça, exactement? En me donnant une claque au derrière? »

Elle avait les poings fermés, les jointures immaculées ; rien que par cette observation, j’avais ma petite idée de ce qui pourrait suivre, mais je savais également que je pouvais éviter son offensive avec mes capacités, si je le désirais vraiment. J’avais une peau craquelée mais dure; le danger m’attirait mais je savais aussi le prévenir lorsque le besoin le demandait. Dans le cas présent, pourtant, je m’amusais simplement de sa gêne, parce que celle-ci était tout bonnement, irrésistiblement, hilarante. Ce que j’avais vécu était unique en son genre. Combien de fois, dans une vie, verriez-vous une telle prestation, engagée corps et âme, par la seule et l’unique Latone de Ciel-Ouvert? C’était la première fois que je la voyais bouger dans un tel accoutrement, danser sur de telles envolées lyriques, et s’il s’agissait certainement du dernier spectacle de ce genre qui me serait heureux de voir, je préférais savourer et chérir chaque seconde de cet instant, quitte à en mourir par la suite. Mais vous saviez quoi? Cela en aurait valu la peine.

N'empêche, j’avais beau penser à tout ça, je ne pouvais me permettre de mourir maintenant. Plusieurs choses me raccrochaient encore à ce monde ; la vie que j’y avais construite, je ne pouvais me permettre de la perdre de manière aussi ridicule. C’est pourquoi je me préparais à encaisser les prochains coups, me concentrant déjà à trouver le moindre écart dans sa posture pour m’immiscer au cœur de la brèche. Toutefois, à ma surprise, ce ne fut ni un poing ou la pointe d’un genou qui vint se heurter à moi. Au lieu de quoi, l’ordre qui franchit la pulpe de ses lèvres résonna fortement entre mes deux oreilles, l’écho se répercutant avec une vivacité telle qu’il ébranla les barrières de mon subconscient. Pendant une poignée de secondes, je restais simplement là, immobile, à la dévisager, yeux dans les yeux, laissant la tension nous envelopper sous couvert de lumière tamisée et de chants étouffés. Nous étions comme deux soldats ennemis qui venaient de se découvrir dans un champ de bataille abandonné, solitaires au milieu du silence ; solitaires et seulement armés de nos hésitations et de nos pensées, attendant que le premier craque. Pourtant, plus le contact de nos prunelles s’éternisait, et plus je sentais ma volonté vaciller sous le poids de son œillade : la résignation, si elle ne m’apparut pas comme une alternative sur le moment, s’imposa petit à petit à mon esprit, et ce, jusqu’à ce que je perçoive mes jambes céder et mon corps se déplacer. Tout mon être se laissa naturellement porter jusqu’à la surface du divan, contre lequel il s’échoua, un soupir s’extirpant en même temps de ma bouche entrouverte.

« Eh bien, avec un tel ton, ça promet d’être intéressant, souriais-je en m’accoudant contre le dossier du siège rembourré, braquant mes mires dans sa direction. À quoi tu penses? » La Marcheuse ne répondit pas, arborant une expression étonnamment posée, voire même paisible.

Il y avait anguille sous roche. Cet état s’opposait beaucoup trop à la tempête dont je venais tout juste d’être témoin.

« Comme tu voudras », finis-je par abdiquer, roulant des yeux face à son silence.

Advienne que pourra, comme disait l’expression, et je savais que la réponse ne saurait tarder dès l’instant où elle claqua ses mains entre elles. Le son fut unique mais efficace, encore une fois. Mes oreilles entendirent aussitôt le changement dans les échos environnants, les bruits extérieurs reculant au fur et à mesure que la nouvelle musique s’imposait dans notre salon privé. Les instruments fictifs s’accordaient dans une euphonie plus dynamique et agressive que ceux qui avaient été employés au cours de sa superbe performance sur les joies de la Fessée – rien que d’y penser, j’avais de la difficulté à refouler le petit gloussement que j’avais diablement envie de laisser éclater. Cependant, sa réaction me laissa quelque peu dubitatif. La faire tourner en bourrique? De quoi parlait-elle au juste…? Soudain, une idée. Par les Dieux… Elle ne faisait tout de même pas référence à ce qui s’était produit dans le salon, quand même! … Si?

« Je crois qu’il y a malentendu, répliquais-je en me redressant, dans l’intention de la rejoindre. C’était une feinte, une comédie pour éviter la foule en chien – et le chien lui-même. Je te l’ai dit – non? – de jouer le jeu… »

Mais, une fois de plus, Latone ordonna, nous nous joutâmes dans un combat silencieux de regards, et ce, jusqu’à ce que ma volonté flanche – encore ?! – et que mon corps réagisse par instinct, reposant mon séant sur le divan. J’aurais pu me questionner, me demander pourquoi sa voix me paraissait si intransigeante lorsqu’elle s’adressait ainsi à moi, pourquoi ma détermination s’altérait pour obtempérer aussi aisément au moindre de ses caprices, mais le comportement de mon amie m’intriguait plus qu’autre chose. Genre, vraiment beaucoup. Qu’est-ce que c’était que cette histoire, et POURQUOI DIABLE se rapprochait-elle à nouveau du poteau ?!

« Hum… Un rictus fleuri de nouveau sur la commissure de mes lèvres, ces dernières tremblant sous le choc d’un nouveau rire – léger et nerveux. Tu peux m’expliquer? »

Maintenant, j’étais vraiment curieux de savoir ce qu’elle tramait, mon regard suivant le plus infime de ses gestes alors que sa main venait rejoindre la hampe. À l’écho puissant des percussions, la Bleue se laissait virevolter autour de son pilier, ses jambes et ses bras se raccrochant à celui-ci dans une suite acrobatique plus physique et surprenante que salace et dévergondée. Tout son être était devenu un tableau mouvant, dessinant des arabesques au milieu du vide comme pour marquer l’air de courbes et de droites aussi douces et aussi brutes que sa valse. Pourtant, dès que le piano et la guitare basse reprenaient leurs droits, dans des notes plus modérées et graves, la danseuse renouait naturellement avec la femme en elle. Son corps se collait, langoureux et amoureux, au support de sa danse. Il se cambrait avec une sensualité nouvelle dès que son regard se portait dans le mien, tandis qu’elle se permettait de tracer certains chemins sur les galbes de son corps à l’aide d’un doigt téméraire et audacieux. Durant la première minute de sa performance, le désarroi s’étendait à tous les ravages de mon visage : j’étais incapable de dire si elle se foutait de moi ou si elle était vraiment sérieuse. Qu’est-ce que je devais faire, au juste? Rire encore plus ou restreindre toute hilarité, au risque d’être jeté contre le métal de la hampe dans une vilaine intention de me casser les dents?

Regarde-moi. … Hein? Mais à cette première impression qui s’enveloppa autour de mon esprit, je sentis tout mon corps se figer et ma respiration se couper brutalement. Désorienté, je cherchais à ancrer mes yeux dans ceux de l’Hurabis, mais cette dernière faisait exprès de laisser courir son regard à la surface de mes lunettes, reportant son visage dans une tout autre direction ; loin des yeux, loin du cœur. Souffle-moi encore ces mots. Cette fois, ce fût mon cœur qui se mit à trembler, alors que ses paroles, dans une litanie agréable et chaude, se répétaient ainsi : Regarde-moi. Souffle-moi encore ces mots. Toi seul a le droit de me réprimander. C’était un chuchotement transi et mielleux, tendre et voluptueux… Mais celui-ci se brisa violemment au soulèvement de son majeur et aux premières insultes qu’elle me proféra : l’ire, dans un bouleversement puissant, me balaya sans avertissement, fracturant en morceaux l’illusion créée.

« Mais calme-toi! Parvins-je à articuler par-dessus sa voix, cherchant à éviter sa poigne, qui s’accrochait fermement au col de mon costume. Qu’est-ce que t’as, à t’énerver comme ça? »

Il y a trente secondes à peine, plus que sa danse et ses frottements contre le poteau du salon, ses pensées m’avaient laissé dans un état comateux, profondément étonné et ébranlé d’entendre des réflexions aussi lascives – et presque surréelles à mon ouïe – de la part de la Bleue. Et maintenant, voilà qu’elle me sautait à la gorge comme une lionne au cou de son repas.

« À rester trop longtemps dans l’antre des Gandr, t’as fini par apprendre leur vocabulaire et leurs manières de con », sifflais-je.

Est-ce qu’il s’agissait de sa vengeance? M’avait-elle cru lorsque je lui avais dit être devin? Ou je n’étais pas le seul à avoir accès au fil de ses pensées? C’est pour ça qu’elle aurait fait exprès de songer intérieurement à ce genre de choses? En croyant que je les capterais et que je les prendrais pour vrais, authentiques? Mais, en premier lieu, pourquoi elle s’était énervée en prétextant vouloir me faire payer?! Ce n’est pas comme si je lui avais promis quoi que ce soit! Et même si! Pourquoi en faire tout un plat? Je n’étais pas! Je n’étais pas… … Aphélie… Le mot résonna brusquement entre mes deux oreilles, les échos du rêve, les réminiscences de notre danse et les dernières paroles qu’elle m’avait partagé au village d'Aïkisu émergeant soudain. Toutefois, je n’eus le temps de prendre pleinement conscience de ces mémoires, Latone perdant soudainement l’équilibre sur mes genoux. Par réflexe, je la rattrapais de mes deux bras, une main portée à sa taille et l’autre à ses fesses. Mais ça n’avait pas du tout été fait exprès. Au diable ce qu’elle avait pu penser, ce que vous aviez pu lire précédemment – je sais que l’on voudra vous faire croire le contraire! – mais je l’avais vraiment rattrapé dans la seule intention de lui éviter une chute désastreuse.

« C’était ça ou tu te pétais le crâne sur le coin de la table! » Insistais-je dans un grognement.

Elle ne m’écoutait pas. Elle me repoussait et, sans demander mon reste, je la relâchais également, sans chercher à la garder auprès de moi. Pourtant, je me bornais à conserver un contact visuel avec Latone, le silence tout autour de nous s’implantant progressivement.

« Est-ce que t’as bu? Qu’est-ce qui te prend aujourd’hui? C’était quoi ce numéro? »

Elle se taisait, réajustant son justaucorps.

« Si tu avais voulu te venger parce que je me suis moqué de toi, un tabac en bonne et due forme aurait suffi, tu sais. Mais non, au lieu de quoi, t’as décidé de faire… ça? Je me penchais dans sa direction, à la hauteur de son visage. Qu’est-ce qui se passe? »

Elle ne répondit pas – encore –, laissant sa colère parler pour elle – encore.

« Excuse-moi, mais tu ne peux pas nier que c’était… (je cherchais le mot le plus adéquat) … surprenant! Oui, non, c’était trop drôle. C’est tellement pas… toi! Puis, qu’est-ce que ça change si je rigole alors que la majorité de ces débiles heureux se trouve dans le salon principal à attendre leur prochain morceau de viande? Pour quelle raison les Gandr viendraient à me sauter à la gorge? Parce que j’ai voulu faire comme eux en me tapant la danseuse chouchou? J’haussais des épaules, indifférent. Pour ta gouverne, j’ai été invité à cette soirée et, baiseur de Sùlfr ou non, j’ai pas souvenir d’avoir enfreint quoi que ce soit. Alors que toi, je n'en dirais pas tant. »

Je la fixais franchement. Je n’avais pas complètement oublié sa crise de tout à l’heure.

« Mais c’est quand même gentil de t’en inquiéter, petite Fleur. »

La furie explosa de nouveau, se levant d’un bond. Tout du long, je me contentais de la contempler, repensant à cette folle idée sur le rêve, sur ce qui s’était dit au village d’Aïkisu… J’aurais mal interprété tout ce bordel? Je n’en savais rien, mais ses précédentes réactions me disaient que c’était sûrement le cas et… Une minute. Qu’est-ce qu'elle vient de dire?

« …

- …

- … Je. »

C’était embarrassant, son hurlement d’indignation le témoignant avec une fureur disproportionnée. Tournant la tête sur le côté afin d’éviter son regard, je soufflais dans un murmure discret :

« Par Sympan tout Puissant. Après quoi, elle se demande vraiment et sérieusement pourquoi je me fiche de sa gueule… »

Je redressais la tête, au même instant que la porte de notre salon s’ouvrit sur un invité impromptu. Nous nous mîmes à le fixer, mes pupilles se rétrécissant à l’entente de son message. Le Seigneur Gandr…

« Hum… »

Mais la Bleue longeait déjà la pièce pour récupérer ses souliers, un air guilleret s’étirant jusqu’à ses oreilles. J’esquissais un premier geste pour lui attraper le bras, mais au dernier instant, je me ravisais discrètement, pensant qu’il serait préférable de continuer à jouer le jeu. Eh… Mais mon esprit tenta quand même de l’appeler, en vain. Eh! Elle dépassa ma hauteur, s’arrêtant un moment. Sans me départir de mon masque souriant, mes yeux, quant à eux, l’observaient sérieusement. … Pourquoi elle veut aller le voir? Pourquoi faisait-elle cela pour le Lion Blanc?

« Vous avez véritablement fait forte impression, là-bas. »

J’avais entendu ses réflexions. C’était tellement étrange.

« Merci pour votre temps », lui confiais-je en lui adressant un sourire ravi.

Je veux savoir ce qui se passe. Me répondra-t-elle comme j’ai cru le percevoir, plus tôt, avec son « Hors de question » vindicatif? Ne fais rien que je ne ferai pas. Je croisais les doigts.

Et la porte se referma. Je rabattis mes paupières, écoutant le bruit de leurs pas. Puis, quand il me sembla qu’ils étaient à bonne distance, j’ouvris mes yeux, étirant le bras pour repousser le battant de la porte. Les suivre discrètement, c’était comme rester dans le coin, n’est-ce pas?


2 334 mots | Post III




[Q] - Autour de la barre | Miles Signat16
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Latone
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Latone
Sam 24 Juil 2021, 20:09




Des vifs sifflements surgirent à son retour. Il fallait croire que quelques Gandr n'étaient parvenus à se lasser de la si délicate et vilaine Fleur. Leurs regards redescendirent sur ses courbes, mises à l'épreuve par le toucher singulier de l'Orisha. Du mieux qu'ils purent, ils tentèrent de capter son attention afin de la dérober à leur tour. Il n'en fut malheureusement – pour eux, bien sûr – rien, étant donné qu'ils comprirent bien vite qu'une escorte se rassemblât à ses pieds. En chœur, la plupart de ses fans hissèrent leurs regards vers les hauteurs. Penser qu'une nouvelle arrivante ait pu faire autant sensation, c'était un sacré coup de poker. Et les Gandr les plus avides, justement, adoraient les paris risqués. Ils parasitaient la moindre dynastie naissante afin de grapiller la gloire et la fortune. Pénétrer dans leur hiérarchie relevait tout bonnement du génie. Peut-être que dans quelques mois, le nom de Fleur résonnera parmi les légendes de Sequela.

J'ai envie de vomir. Et elle n'avait même pas bu. Finalement, toutes ces pirouettes autour de la barre n'aidaient pas à garder la tête froide. D'autant plus que les dires de son ami continuaient de la hanter ; que ce furent ses palabres ou ses probables réflexions. Il ne comprenait pas cette mascarade, mais elle n'en savait pas plus que lui, au final. C'était comme tourner autour du poteau, sans atteindre la vitesse adéquate, sans trouver le rythme et l'accord parfaits. Ils n'arrivaient pas à communiquer et cela la frustrait. Elle n'avait plus qu'une hâte : en finir avec ces Gandr pour pouvoir sortir. Peut-être que Miles n'aura pas fui entretemps et que les circonstances, plus paisibles, l'aideront à tout mettre à plat ; autant dans sa caboche qu'avec le Köerta. Une bonne inspiration plus tard et Latone réussit à faire fi du brouhaha environnant pour suivre les laquais du patriarche. Honnêtement, la Kirzor ignorait comment l'entrevue se déroulera. Seront-ils seuls ? Se comportera-t-il aussi mal qu'avec Léto, à l'époque ? Latone n'avait jamais rencontré Berholt en chair et en os. Seuls des souvenirs de la Sùlfr lui indiquaient toutes les difficultés auxquelles elle se confrontera. Le Lion Blanc n'était point homme à se faire dompter. La Bleue se convainquait d'avoir affronter plus dangereux – le Bleu Roi devenait un joker à cette allure – mais sortir victorieuse de cette réunion risquait d'être tendue. Elle n'aurait pas dit non à la présence du Köerta… Seulement, comme elle l'avait soulignée, sa sécurité lui importait. Il avait une famille et la Mort ne devrait le cueillir par sa faute. Ce serait plutôt… déchirant, qu'elle provoquerait plus de mal que de bien pour son ami. Ce ne sera jamais son intention.

Arrivée au premier étage, l'ambiance lui parut déjà plus pesante. À ce niveau, les habitués et résidents se mêlaient dans le plaisir hédoniste, en ne se détournant sur les bas-fonds qu'en de rares occasions. Lorsqu'une curiosité comme elle parvenait à les rejoindre, les Gandr cédaient à la tentation de la découvrir, de la dénuder sur tous les plans. Elle fit profil bas le plus possible. Même si le corps de la Sùlfr ne lui revenait plus, elle lui ressemblait assez pour provoquer quelques fois certaines confusions. Une couronne de fleurs au-dessus des yeux et un costume suffisamment aguicheur pour omettre ses traits faciaux devraient convenir à son infiltration. Et dans le pire des cas, il semblerait qu'elle ait capté la présence de son ange gardien. Tu es sérieux. Elle sourit malgré elle. Même si Miles usait de fourberies et de sorcelleries, sa connexion lui notifiait sa proximité. Sans parler de leurs pensées communes et fluctuantes. C'était un état toujours aussi imprévisible, néanmoins utile au vu de la situation. Quoi qu'il en soit, elle ne le voyait pas et ne cherchait pas à griller sa couverture. Bientôt, les escaliers vers le second. Je ferai attention. En écho à son conseil, ou avertissement. Plus les marches furent gravies, plus la musique s'étouffait pour laisser place aux chuchotements aguicheurs, aux tensions dans les regards, aux caresses plus ou moins discrètes. Elle déglutit : cela ne lui ressemblait pas d'être au centre de ces messes-basses. Le Köerta vit juste. Il faut que je lui parles, c'est important pour la Marche. Au troisième étage, les invités se firent beaucoup plus rares. Les portes, pour la plupart, verrouillées, renfermant des secrets. Dans un sens… c'est important pour moi aussi. Les visions de Lolaha s'écoulaient à travers les flots de son subconscient. Malgré elle, Latone devait revêtir le manteau d'enquêtrice pour élucider sa précédente Vie.

Lorsque la porte se referma derrière elle, abandonnée entre les griffes du Lion Blanc, Latone se sentit aussitôt désarmée, désemparée par le silence persistant entre ces murs. Le bureau du patriarche arborait toutes ses conquêtes, tout son parcours jusqu'à aujourd'hui. La moindre babiole sur le coin d'un buffet démontrait une victoire depuis longtemps acquise. Planté au milieu de la pièce, Berholt fixait Fleur comme une proie. Elle releva la tête, elle illustra sa détermination pour être arrivée jusqu'ici. Ils étaient bien seuls, bien livrés à eux-mêmes. Dans un sens, c'était parfait, alors qu'un goût de défaite lui prenait à la gorge.


" Guide Latone… Évidemment qu'il avait deviné, même si elle tenait à garder sa belle couronne fleurie. Vous vous parez d'indignité. Il ne se gêna pas pour observer son costume sous tous les angles, il était libre en Sequela. Mais l'opprobre me revient davantage, tant vous osez immiscer le burlesque en mon antre. " Il était puissant. La sueur lui collait à la peau, sans pour autant la faire taire.

" J'avais besoin de vous parler. Elle haussa les bras. Puisque vos portes nous sont toujours fermées, on s'adapte. " Il fronça des sourcils, elle perçut même un grognement bestial.

" Puisque vous avez mis tant d'effort pour venir me voir, je ne vous accorderai que deux minutes. " Avec ce qu'elle lui révèlera, il lui léguera bien plus.

" Il y a longtemps, j'ai rencontré votre ancêtre. "

~~~

Le Lion Blanc se tut, comme s'il mûrissait son deuil vis-à-vis du parchemin. Lorsqu'il le donna à la Hurabis, un frisson singulier les frappa tous les deux. Ledit parchemin laissait son caractère sacré les envahir. Même Latone, avec sa brutalité habituelle, fit d'une incommensurable douceur pour ne pas trop froisser l'offrande. Plus que faire preuve de respect pour la famille la plus puissante de Ciel-Ouvert, ces écrits représentaient un nouveau pas sur les traces de son passé.

" Depuis des générations, notre dynastie a tenté tous les orchestres et prestations possibles et imaginables. Rien ne s'est produit. Ses doigts lâchèrent petit à petit le papier. Rien n'a changé. Ses iris bestiales dardèrent le bleuté des siens. Elle referma ses doigts sur le présent. Avec vous, il se pourrait bien que nous trouvions enfin réponses à ces éternelles questions. "

Elle n'ajouta rien de plus, elle en avait déjà bien trop dit. Elle n'avait pas l'impression qu'il ne la croyait pas ; au contraire, plus Latone s'était enfoncée dans certains détails, plus Berholt semblait s'intéresser au récit. Puis avec les Hihtyx, les illusions s'avéraient plus parlantes. Même si les Gandr ne se prêtaient pas encore aux Chants, ils firent preuve d'une certaine sensibilité à leurs égards. Les avoir comme alliés ne serait pas négligeable. Elle devait creuser encore plus, découvrir l'identité du fameux Gandr…

" Sortez et ne revenez qu'en cas d'absolu nécessité. Il renifla très brièvement, le regard éperdu sur un coin du bureau. Je vous conseille de raccompagner le petit malin qui vous sert de camarade, avant que mes descendants ne se rendent compte de son audace. D'un claquement de doigts, des serviteurs les rejoignirent. Fleur a terminé son travail. Offrez-lui séance tenante son paiement et indiquez-lui la sortie. Aussitôt dit, l'un des servants accourut pour diffuser la nouvelle et ramener le manteau de la danseuse. Bonne soirée. " Froid, insensible, le Gandr se détacha d'elle comme si elle n'était vraiment qu'un bout de viande périmé.

Ça s'est mieux passé que prévu. Hors du bureau, l'Orisha osa, cette fois, se montrer moins discrète pour trouver Miles du regard. Peut-être que seul Berholt l'avait pris la main dans le sac, elle ignorait trop les potentielles chimères que renfermaient ce domaine. On connaissait Nepherites comme une chasseuse de l'ombre, entre autres. Ceci étant, les œillades insistantes du serviteur l'obligèrent à se plier au jeu et retourner au rez-de-chaussée. La fête battait encore son plein et plus de danseuses s'étaient mêlées aux tables. On lui rendit son manteau dans lequel elle s'enfouit le plus vite possible, elle voulait vraiment en finir une bonne fois pour toute avec cette satanée soirée riche en émotions. L'offrande du Lion Blanc prit refuge dans sa poche intérieure.

On lui tendit la bourse, le cliquant du métal ravirait n'importe quel Gandr aux alentours. C'était de l'argent sale. En revanche, Fleur s'était déplacée et fessée pour cette raison : se nourrir, survivre. Alors, à contrecœur, elle accepta le paiement. Avec ça, la sortie lui tendait les bras. Cependant, un intrus plus que bienvenue s'immisça entre elle et le froid des hauteurs. Elle lui sourit tout naturellement.


" Vous voulez me tenir compagnie ? " Elle ferma les yeux, toute guillerette. Son sourire crispée démontrait tout le fond de sa pensée : dehors, des Gandr pourraient aller jusqu'à la chasser pour la consumer. Et je ferai un massacre. Il valait mieux être accompagnée.

Miles l'enjoignit à l'attendre dehors, ayant quelques affaires à régler avec quelqu'un d'autre. Latone n'en fit pas tout un plan et obtempéra. Elle passa le long des invités, le vigile, ne perdit point une seconde pour dévaler le pont et se posta un peu plus bas. Cette fois, elle était enfin libre.

Restreinte depuis trop longtemps, sa colère lui fit saisir la couronne pour s'ôter des épaules l'identité de Fleur. Latone aimait bien trop ce couvre-chef pour le jeter par-dessus le précipice. Puis, Clo risquait de ne pas s'en remettre. Elle expira profondément, le souffle se gela par-delà ses lèvres colorées. Il lui paraissait décevant de constater que la mission, en elle-même, se concluait par un franc succès, alors que les complications rencontrées sur sa route alourdissaient le bilan. Elle ne comprenait toujours pas comment elle avait pu tomber sur Miles, ni comment il rentrait tant dans sa tête. Et surtout… Bon sang, toute cette soirée était un fiasco. Elle refusait de laisser de tels dégâts sur son passage. Elle voulait faire quelque chose, n'importe quoi pour faire en sorte que le Köerta ne l'abandonnât pas pour… pour quoi, en fait ? Latone n'arrivait même plus à réfléchir. Seule la possibilité que Miles pourrait ne plus la voir comme son amie mais juste comme la tarée d'antan s'ancrait au sein de ses réflexions.

Quelques courtes minutes plus tard, la Kirzor vit enfin débarquer l'objet de son désir. Accompagné d'un jeune homme, les deux compères discuter et se dire au revoir. Les sourcils de Latone s'arquèrent par réflexe, en une mine plutôt affligée : ainsi, Miles avait vraiment été invité et semblait passé une soirée en bonne compagnie. Elle avait tout cafouillé. Elle demeura songeuse, même lorsqu'il arriva à sa hauteur. Pas un mot ne fusa de suite, comme une prolongation du silence gênant de tout à l'heure.


" Hé… Elle passa une main dans sa coiffure. Tu n'y retournes pas ? Il ne semblait pas de cet avis et se montra plutôt insistant sur les intentions et actes de la Bleue. C'est bon, c'est bon, je vais parler. Marchons un peu. " Cela ne lui plaisait pas trop de rester dans les parages.

Étant donné l'heure plus ou moins tardive, les avenues d'Ode se gorgeaient de tous profils, animés par l'amour pour la Chanson. Non loin, le Coryphée battait son plein avec les chants nocturnes. Étant en quelque sorte née ici, Latone connaissait les ruelles les moins fréquentées pour éviter au maximum les oreilles indiscrètes. À cette heure-ci, Aria sera moins bondée et plus propice aux échanges discrets. Seule l'aura du Molosse saurait lui faire prendre confiance sur ses confessions, ses trouvailles, ses buts. Ils erraient sans destination.


" Les Guides et les Gandr ne s'entendent plus très bien depuis que Léto s'était élevée jusqu'à la Vigilante. Berholt faisait parti des Guides et a fini par quitter la Marche. Ils n'aiment vraiment pas les Sùlfr, hein ? Elle haussa les épaules. Bon, parfois… j'ai des visions sur mon passé. Elle croisa son regard. Il faut croire que j'avais une vie avant. Mais je ne m'en souviens pas trop. Elle soupira, cela prendrait tellement de temps de tout lui parler. En fait, les souvenirs me font comprendre que j'étais une Linèsienne, que j'ai vécu à l'époque où Linos existait encore, une ville renfermée dans la montagne, avec son peuple versé dans l'art de la Voix. Elle s'arrêta deux secondes pour se poser contre un muret. Une douce chute de flocons ponctuait leur décor. Parmi les gens que j'aurai fréquenté, il y avait un gars qui s'appelait Gandr. Il lui laissa digérer l'information, même toutes les informations, finalement. C'est pour ça que j'ai voulu en parler à Berholt, pour voir s'il savait quelque chose, n'importe quoi sur Linos ou sur lui. "

Son regard s'abaissa. Il s'était moqué de sa tenue et de sa prestation, alors que le tout servait bien ses desseins. Ce n'était pas son genre de s'infiltrer avec subtilité, Latone ne connaissait que l'art de la guerre et les dégâts collatéraux. Malgré tout, les Gandr représentaient un gros poisson. Agir inconsciemment aurait plus qu'entaché sa réputation : cela aurait été toute la Marche qui aurait trinqué, par sa faute. Oh bien sûr, elle n'avait agi que par elle-même, sans en avoir avisé qui que ce soit. Après tout, c'était Latone : bornée et irréfléchie.

" Après que je lui ai tout raconté, il m'a donné ça. Elle exhiba le document et le déroula pour lui montrer. Selon lui, cette chose aurait été transmise de génération en génération parmi les Gandr, depuis les tout débuts. Mais son utilité aurait été perdu dans le temps. Elle l'observa un brin plus. Toute façon, à vue d'œil, on dirait juste une partition. Mais il y a quelque chose de bizarre… C'est comme vibrant… Ses sourcils se froncèrent. En fait, ça me rappelle Linos… Je ne saurai pas l'expliquer. Pas encore. Elle releva le regard. Si nos suppositions sont exactes, il y en aurait d'autres à Linos. Il garde une autre partition de son côté, en guise d'assurance, qu'il disait. "

En bref, seule la prochaine expédition pourrait lui apporter un début de réponse, voire une Hihtyx venue de nulle part. Ces deux pistes représentaient ses uniques options. Lasse, elle se détacha de son support et cacha à nouveau le précieux manuscrit. Elle reprit la marche, plus lente, songeuse.

" Je ne m'attendais pas à tomber sur toi. Vraiment. Sinon, elle aurait revu tout son plan, très clairement. C'était tendu. Elle ne parlait plus que pour remplir le silence, tout en évitant tous les détails graveleux : son costume, son spectacle, leur show privé, ses crises. Grr… Elle venait prendre conscience d'un détail. Hors de question que je passe à la Vigilante comme ça. Il faut que je me lave, me change… Elle eut une idée qui lui plaisait assez. Le bleu de ses yeux s'ancra dans l'écarlate des siens, sa voix presque plus douce. Tu veux bien me raccompagner à la roulotte ? " J'ai grave besoin de boire.


2703 mots ~



By Jil ♪
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Miles Köerta
Mar 03 Aoû 2021, 18:52



En toute honnêteté, j’aurais pu m’essayer à grimper un étage de plus. De la sorte, mon ouïe aurait mieux capté la conversation entre Latone et le Lion Blanc, parce qu’à l’heure actuelle, depuis ma position, tous les bruits parasites de l’environnement m’empêchaient de percevoir avec justesse les mots qu’ils se partageaient. La musique et les ovations du salon principal s’étendaient jusqu’à cette hauteur, criantes; les conversations et les hilarités des privilégiés aux balcons sonnaient comme des clameurs à mes tympans, assourdissantes. Je n’arrivais tout simplement pas à entendre avec exactitude ce qui se disait dans cette pièce en particulier, mes yeux quelques fois portés vers le plafond.

De là, ma vision était en mesure de percer littéralement les couches de la matière afin de les distinguer, tous les deux, face à face, discuter de cette histoire qui était importante pour la Marche et pour Latone également. Et à leurs expressions, je pouvais deviner que la conversation était sérieuse. Très sérieuse. Cela étant dit, le plus étonnant à mon avis, restait le fait que le Gandr, connu pour son opiniâtreté, l’écoutait avec grande attention sans grimacer ou la fusiller de son œil de fauve. Leurs lèvres bougeaient rapidement au fil de leur échange et si l’idée d’employer mes dons de Traqueur me traversaient l’esprit, notamment pour lire sur leurs lèvres, je voulais également éviter que mes intentions soient si évidentes.

En utilisant mes pouvoirs, mes veines se gonflaient, devenaient apparentes à la vue, palpables au toucher, et je savais qu’en une telle posture, j’éveillerais immédiatement les soupçons sur ma personne, ne serait-ce que si quelqu’un remarquait ma présence par inadvertance. Car, malgré la Magie dont je m’enveloppais pour passer inaperçu et rester discret, presque invisible, je savais également qu’elle n'était pas infaillible et qu’un mauvais pas pouvait m’entraîner dans une chute terrible. Après tout, je n’étais pas invisible, je ne l’étais que partiellement, comme si le cocon qui m’enserrait forçait les regards à se détourner de moi, à ne pas me prêter grande attention, même si je me tenais à quelques centimètres de leur personne. Mais nous n’étions jamais trop prudents. L’allure des chambres aux étages plus haut, le silence des couloirs et le peu de foule qui y cheminait me laissaient supposer qu’il s’agissait de salles privées pour les mieux nantis de la grande dynastie, statut que Hakiel, Nakian et moi-même ne possédions pas. Par conséquent, me promener sur ces balcons en toute impunité serait vraiment trop risqué, malgré toutes mes habiletés. Puis, là-haut, j’étais persuadé qu’il y avait certaines personnes que je ne désirais pas le moins du monde croiser, comme cette cinglée de Vampire qui était responsable du présent événement, Dame Nosferapti… ou quelque chose comme ça… Non, non, Miles, c’était Nepherites son nom, pas Nosferapti. Bref, elle : il était hors de question que je tombe nez à nez avec cette femme. Elle dégageait la même énergie que le légendaire Lion Blanc. Charisme, puissance et influence : à mes yeux, ils se ressemblaient beaucoup sur ces points, mais cette chasseuse de l’ombre avait ces ténèbres, cette cruauté, cet amusement du sang et du sadisme en plus que le Lion Blanc ne semblait pas détenir, du moins, pas avec autant d’intensité et de plaisir.

C’est pourquoi, si je me faisais chopper ici, à ce niveau, je pouvais facilement m’inventer des excuses pour justifier ma présence puisque j’étais parvenu à retrouver la trace de Hakiel et de son père à cet étage-ci. À un moment, je m’étais permis de tendre l’oreille dans leur direction, abandonnant brièvement l’échange entre Latone et le Gandr pour écouter ce dont le père et le fils discutaient. Nakian avait toujours eu une voix basse, grave, comme s’il marmonnait constamment au fond de sa bouche. De fait, elle m’était difficilement discernable parmi la cohue, mon ouïe parvenant seulement à extirper quelques informations de ses mots mal mâchés. À l’inverse – et peut-être parce qu’elle m’était si familière –, la voix de Hakiel m’apparaissait aussi claire que le cristal et c’était certainement pour cette raison que je devinais aisément que le Corbeau était mécontent, pris dans un tremblement nerveux de colère. Je déglutis. J’espérais que tout irait bien pour mon petit bonhomme.

« Sortez et ne revenez qu’en cas d’absolu nécessité. »

Je fis comme si de rien n’était, buvant une gorgée du verre que j’avais en main, mes jambes me guidant vers les rampes d’escalier qui tourbillonnaient vers les étages inférieurs. Déjà fini? C’était de l’ironie. Cette attente m’avait semblé avoir duré des heures. Ouais, j’ai pu voir ça. Je n’aurais jamais pensé qu’il accepte de te rencontrer, encore moins de cette manière. Encore une fois, je basculais ma tête vers l’arrière, comme pour prendre une respiration, mes yeux sondant le plafond. À sa sortie du bureau, je remarquais aussitôt le mouvement de ses yeux qui balayaient les environs, comme à la recherche d’un compagnon. À cette vue, mes paupières se refermèrent par réflexe, mon bras soulevant de nouveau mon verre, que je bus cul sec. Si c’est moi que tu cherches, arrête tout de suite. Un : je ne suis pas au même étage que toi ; et deux : si je l’avais été, j'aurais tout de suite pensé que tu voudrais me vendre à l'ennemi. C’est ça que tu veux? Rigolais-je mentalement, me dirigeant vers le bar afin de remplir mon verre, allégeant également la pression de ma Magie de camouflage pour que je leur sois à nouveau perceptible, pleinement. Ce barman va croire que je veux finir torché… Dans tous les cas, juste, suis le domestique. Je reste dans le coin, pas de souci. Et comme promis.

« Vous passez une belle soirée?

- J’en passais une jusqu’à ce qu’on vienne me voler ma conquête.

- Vous parlez de Fleur? »

J’acquiesçais tranquillement, avalant une nouvelle gorgée.

« Là, j’attends un ami et… Oh! »

Sans demander mon reste, je me détachais du comptoir, me glissant silencieusement jusque dans son dos.

« Comme on se retrouve! » Lui souriais-je en retour, remarquant bien vite l’absence du domestique qui l’avait amené auprès de Berholt.

T’as vraiment une humeur de Réprouvé ce soir, dis donc. C’est comme ça que tu remercies quelqu’un qui accepte de te raccompagner? Ses pensées intérieures étaient vraiment violentes parfois… Je ne savais pas du tout ce que j’avais fait pour la mettre dans un état pareil. D’accord, je m’étais moqué d’elle, mais on se moquait constamment de la gueule de l’autre. Qu’est-ce qu’il y avait eu de plus aujourd’hui que les autres jours? C’était incompréhensible.

« Je te rejoins dehors, lui partageais-je finalement. Je dois d’abord retrouver Hakiel et lui dire que nous partons. »

Et, par chance, je savais qu’Hakiel venait de terminer, lui aussi, sa discussion privée. Son odeur se renforçait. Je n’allais pas complètement l’abandonner dans la gueule des loups.



« On est deux dans ce cas, gloussais-je discrètement après une vaine tentative à vouloir étouffer le rire au fond de ma gorge, et une œillade désapprobatrice de la part de la principale concernée, que je balayais d’un sourire éclatant.

Elle répondit par un soupir, expirant un bref « C’était tendu » que je lui accordais sur l’instant.

« Hum… Dans ce cas, tu pourrais venir à la maison pour te chan– »

Mais Latone pensa à autres choses : une qu’elle exprima à voix haute et une seconde qu’elle gronda silencieusement, dans son subconscient. À ce constat, je me permis un regard dans sa direction, un sourire mutin sur le bord des lèvres :

« Après toutes ces pirouettes, t’as pas déjà la tête qui tourne? »

C’était la première fois que je lui offrais une réponse aussi claire à l’une de ses réactions mentales.

« Fiou, moi je sais pas trop. J’ai déjà pas mal bu en vous attendant, Hakiel et toi, lui confiais-je tout en traçant le chemin vers la roulotte. Maaaaaais je dis jamais non à quelques verres. Surtout s’ils sont gratuits! »

La devançant en sautillant tranquillement, je me mis à fredonner un air chantant au milieu des flocons qui dégringolaient du ciel. Ma mélodie s’entremêlait à l’harmonie des autres voix qui s’élevaient doucement au sein de Ciel-Ouvert, les chants nocturnes inspirant le calme et la sérénité du sommeil, surtout depuis que les rêves du Bleu Roi ne perturbaient plus aussi violemment nos nuits. Et peut-être était-ce dû à l’alcool que j’avais précédemment ingéré et qui semblait me donner des ailes, mais derrière cet air joyeux, frivole, je repensais constamment à ce que Latone m’avait partagé à propos de son passé, de cette partition, de Linos… Je n’arrivais toujours pas à croire qu’elle avait croisé un Gandr – ou plutôt Le Gandr?

« J’arrête pas de penser à ce que tu m’as dit, tout à l’heure, avouais-je en pivotant dans sa direction, cessant mes petits sauts pour la laisser me rejoindre. Tu étais une Linèsienne… Et sais-tu comment tu t’appelles? Euh… Comment tu t’appelais, plutôt? »

Parce qu’aujourd’hui, elle était et resterait Latone, n’est-ce pas?

« Wow… Sifflais-je en levant les yeux vers le couvert nuageux sombre et pourtant envahi par le blanc des flocons. Je comprends maintenant pourquoi tu as ce talent inné avec la Voix et les Chants. Je fermais les yeux un moment, pointant alors le doigt en direction de la poche dans laquelle elle avait dissimulé le papier jauni. Et ces partitions, tu penses qu’elles servent à quoi? Je rectifiais presque aussitôt. Je veux dire, oui, c’est pour jouer de la musique, mais en quoi sont-elles importantes pour toi et ton passé à ton avis? Est-ce que ce Gandr de ton passé était un compositeur? Ça pourrait être une de ses œuvres, peut-être? »

Je la bombardais de questions tout en soulevant quelques hypothèses qui allaient et venaient entre mes deux oreilles, mais après un certain temps, voyant son expression figée, je finis par soupirer, levant les yeux droit devant nous. La roulotte n’était plus qu’à quelques mètres, et avec un empressement presque enfantin, je me plaçais derrière la Marcheuse, plaquant mes mains sur ses épaules pour l’inciter à avancer plus rapidement.

« Allez! Allez! Allez! Va faire c’que t’as à faire : je vais nous préparer un truc, m’enthousiasmais-je lorsque nous arrivâmes enfin devant la porte de la roulotte, la Bleue déverrouillant celle-ci pendant que je scannais l’intérieur de la maison mobile. Tu les ranges où, tes bouteilles? »

Je fouillais dans l’armoire qu’elle m’indiqua, sortant quelques alcools que je considérais d’un air faussement professionnel.

« J’ai peut-être une idée… Je me râclais la gorge, arborant une voix de jeune serveur qui présente le menu à sa cliente : Seriez-vous intéressée, ma Dame, à goûter à un cocktail épicé à la poire? »

J’entendis le petit rire dans sa réponse, m’activant déjà à rassembler les ingrédients, tandis que la porte arrière de la roulotte se refermait. En observant les ingrédients alignés, je remarquais aussitôt un oubli.

« T’as des poires en réserve? »

Je l’avais demandé d’une voix plutôt forte afin qu’elle puisse m’entendre de l’extérieur, par la fenêtre que j’avais ouverte entretemps, mais en n’entendant aucune réponse de sa part – ou parce que je ne lui en avais tout simplement pas donné le temps – je me dirigeais d’un bon pas vers la porte arrière, l’ouvrant à la volée, appuyant mes coudes sur la rambarde de la petite terrasse qu’elle avait aménagé derrière la roulotte.

« Joli. Tu t’es vraiment fait un petit coin de paradis, ici. »

Et son jardin prospérait étrangement bien, malgré l’attaque perpétrée par l’usurpatrice, il y a quelques temps de cela. Lui souriant pendant que son corps disparaissait entre les vapeurs soulevées par le bain, je poursuivis :

« Je voulais te demander si t’avais des poires en réserve et où tu les rangeais. Aussi, t’as quelque chose à manger? Parce que je meurs de faim. J’ai pas eu le temps de piger dans le repas à Sequela. »

L’endroit était vraiment paisible. Nous pouvions même entendre la course d’une rivière à proximité. Je pris une profonde inspiration, profitant de l’atmosphère de détente.


1 989 mots (Sans les paroles de Berholt et Latone) | Post IV




[Q] - Autour de la barre | Miles Signat16
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Latone
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Latone
Jeu 05 Aoû 2021, 00:01




" Tu me prends pour une débutante ? " Donnons-lui une barre et elle lui en montrera d'autres, des pirouettes. Digne d'une Fæ !

Ce sourire, ce regard à peine masquer par les lunettes, tous les éléments répondaient pour provoquer l'ire de la Bleue. La colère presque gamine à laquelle on pouvait assister entre ces deux-là, comme chien et chat. Bien souvent, leurs collègues en riaient ; et si la tempête n'arrivait pas, ils savaient qu'elle ne tarderait pas à pointer le bout de son nez. Soit parce que lui ne réussira pas à se retenir de la taquiner, soit parce qu'elle aura trouver le plus insignifiant des détails pour le frapper. Pourtant, à sa grande surprise, le Köerta accepta sa requête avec un certain plaisir. Latone ne trouva rien à redire, si ce n'était une reconnaissance toute silencieuse. Elle réajusta ses mèches, réprimant un sourire, alors que l'idiot se laissait transporter par les aléas de l'alcool. Elle n'avait même pas eu le droit à un seul verre depuis le début de la soirée, ce ne serait que justice de rattraper son retard ; surtout si lui s'était gavé.

" Lola… Elle releva les yeux sur lui. Lolaha Kirzor. Cela la gênait plus qu'escompter, elle avait l'impression de se mettre à nue. Une célèbre cantatrice d'opéra. "

Il la complimentait. Elle ignorait si se faire appeler Lolaha lui procurerait autant d'effet. À ses yeux, elle avait toujours été Latone, pourquoi cela changerait-il ?

" Déjà, ce sont des reliques. Du peu que nous avons de Linos, ce sont bien l'un des rares objets encore intacts. Son regard s'éperdit en direction de là où se situait la porte. Avant, je voulais m'y rendre pour détruire ce salopard. Mais plus je me découvre, plus je veux fouiller le moindre recoin en quête d'un indice, d'un bibelot, n'importe quoi. Quant à Gandr, lui aussi représentait un grand mystère. Il était soldat, mais… peut-être qu'il composait sur son temps libre ? Elle se tut quelques secondes face aux hypothèses de l'Orisha. Je ne le connais pas encore assez. "

Latone n'aimait pas conjecturer : elle préférait le concret, les faits. Tergiverser éternellement sur la moindre question ne serait qu'une perte de temps pour la fameuse initiative de recherche. Dans quelques jours, la Hurabis retournera à Linos et, si les Ætheri l'acceptaient, elle en ressortirait plus sage, plus instruite. Elle n'arrivait pas à supporter ce suspense depuis le dernier souvenir impliquant sa nature de Kyri et ce tueur en série. Bientôt, elle arriva au point de rupture où elle allait lui faire fermer sa gueule.

Malheureusement, ils étaient déjà arrivés à destination. Contre toute attente, Miles semblait bien enthousiaste pour un détour imprévu. Dans un sens, Latone en était plutôt ravie. Elle lui devait bien ça, après toutes ces horreurs en Sequela.


" Placard du bas, au fond. Tandis qu'elle rassembla ses affaires pour la nuit, le jeu de rôle du Naäzkil la fit sourire. Elle mima un semblant d'hésitation plutôt cruche. Hmm, je goûterai volontiers votre recette secrète. Avant de se détourner, et de finir sur une œillade complice. Je vous attendrai dehors, dans mon bain. " La fraîcheur de la rivière ne lui suffira pas pour se détendre.

Après avoir ravivé les braises pour chauffer son bain à remous, Latone profita du temps que les vapeurs se manifestassent pour admirer le ciel étoilé. Ici, ils étaient si à l'écart de la Cite des Chants qu'ils pouvaient presque respirer, ne plus se préoccuper de toutes ces Marches et ce passé tumultueux. Même après son confinement, Latone se sentait encore bien dans cette roulotte et ce petit coin de paradis. Elle l'appréciait et l'entretiendrait encore longtemps ; rien que pour son jardin. L'Orisha finit par déposer la couronne de fleurs et par se débarrasser de la tenue de danseuse. En réalité, elle avait prévu de la déchirer en bonne et due forme une fois la mission accomplie ; pourtant, son altercation avec Miles l'avait poussée à vouloir la conserver le plus intact possible. Au cas où.

Libérée, l'Aäsho s'engouffra dans l'eau chaude pile à temps pour éviter le regard nuisible du Marcheur sur son corps. En sa compagnie, Latone avait développé un remarquable cocon de pudeur. Chaque jour, c'était de pire en pire. Elle plongea de tout son corps dans l'eau et émergea en expirant un long soupire d'aise. Elle pourrait rester toute la nuit là-dedans. Elle passa une main dans ses cheveux et rouvrit son regard disparate sur un Miles détendu.


" J'ai toujours des poires en réserve. Tu ne devrais pas être surpris que mes Juns sont très productives ! Il n'aimait pas le nom et elle s'en foutait. Tu en trouveras dans l'armoire à droite, dès que tu rentres. Elle songea à sa requête en faisant des bulles à la surface, sans le lâcher du regard. Dans le four, il y a un gâteau. Elle se rapprocha du rebord. Tu te souviens quand tu es venu la dernière fois ? Tu m'as donné un livre de recettes. Elle se débarrassa de ses mèches envahissantes. Eh ben, j'ai fait le gâteau au fromage avec coulis de fruits rouge. Même d'ici, la jeune femme parvenait à voir les étoiles scintiller dans ses yeux. Vas-y, sers-toi. C'est ma façon de m'excuser pour avoir pourri ta soirée. " Il avait été invité et elle avait tout gâché.

Il était re-rentré aussitôt, il devait avoir une sacrée faim ! Quoiqu'il en soit, la Kirzor usa de cette brève attente pour se laver un peu plus, frotter sa peau rougie par la chaleur. Le costume laissa quelques marques sur son sillage. Ses paumes chassèrent les reliquats de son maquillage, quitte à polluer l'eau, elle en avait plus grand-chose à faire. Elle se sentait mieux, plus détendue, et elle allait passer une petite soirée avec Miles. Son cœur tonna à cette réflexion.

Lorsque son invité revint, Latone assista à la suite de leur petit jeu où, théâtrale, il lui présenta ce cocktail qu'il qualifiait de divin. Elle réprima de souligner que c'était parce que ses propres poires étaient divines. Quant au gâteau, elle insista sur le fait qu'il pouvait le consommer à sa faim. C'était sa deuxième tentative et la première s'était soldée par une réussite plutôt convaincante. À vrai dire, elle était même contente de pouvoir le faire goûter ; il avait l'air d'adorer cette recette. Pour l'heure, il lui tendit enfin le nectar tant attendu, le tout servi dans le plus raffiné des gobelets qu'il ait pu trouver dans son foutoir.


" Merci bien, Monsieur. "

Les effluves volatiles s'attaquèrent à son odorat avec une vivacité remarquable. Parmi les flux, Latone reconnaissait bel et bien la poire, son fruit fétiche. Pour le reste, malgré son goût prononcé pour l'alcool, elle devait avouer ne point être studieuse sur la composition des cocktails. Elle ne pouvait faire que confiance au Köerta, découvrir ses petits talents cachés. Accoudée aux rebords du bain, elle tenta enfin l'aventure avec une franche gorgée en guise de première approche. L'intensité la surprit et la fit s'écarter par instinct.

" Oh, c'est corsé ! Sa gorge la brûlait. J'adore. Assura-t-elle sur-le-champ, conquise par la recette. Il n'y en aura plus d'ici ce soir. " S'amusa-t-elle en buvant à nouveau. Il pouvait compter sur elle !

Il y eut ce petit temps de flottement où ils burent en silence et où Miles se rassasia autant que possible. Une sorte de reconnaissance à cette quiétude environnante. Clo n'était même pas là pour briser le calme de par ses pitreries. Et Mambo, qu'il reposa en paix. Les deux protagonistes ne pouvaient point rester en place. Latone initia la première un sujet bien important : elle-même. Elle captait les pensées du Molosse et comprenait qu'il était diablement curieux de ce qui gravitait autour de la fameuse Lolaha Kirzor. Alors, pour descendre ce cocktail et dévorer ce gâteau, Latone lui récita toutes ses visions ; tous ses passages à Zyurm, tous ses rêves, tous ces Hihtyx. Elle oublia sûrement quelques détails mais se focalisa sur les plus importants : son identité, ses sœurs si différentes, sa sœur exécrable, le mystérieux Gandr, les événements marquants… Elle dévoila tout. Elle lui faisait confiance, elle le souhaitait dans la confidence. Dans un sens, elle priait pour comprendre avec lui. Les Guides n'usaient de ces souvenirs qu'en guise d'informations, alors que la Kirzor ne pouvait ignorer tout le côté sentimental.

Elle avait eu une Vie. L'Esprit gorgé de fureur, sans aucune conception morale ou rationnelle, avait eu une Vie !


" Ne m'appelle pas Lolaha. " Elle était catégorique.

La Bleue sirota les restes de son cocktail et quémanda une nouvelle tournée avec un grand sourire à pleine dents. Satisfaite, elle posa sa tête contre le rebord. L'alliance entre le chaud et l'ivresse provoquait un début de tournis. Malgré tout, son visage à moitié caché derrière son bras, elle lutta et fixa d'un œil distrait l'Orisha.


" Hmmmm… Exhala-t-elle longuement, comme si elle s'apprêtait à somnoler ; il n'en était rien. Je ne te l'ai pas dit ? J'aime bien tes lunettes. Son regard fut charmeur, sincère, avant qu'elle ne cédât à l'inévitable. Je supporte mieux ta sale tronche quand tu les portes. " La réaction ne se fit pas attendre.

Réjouie par son audace, elle se redressa un brin et fit un mouvement cyclique avec son index. Par ce biais, elle lui fit comprendre qu'elle comptait sortir et qu'il n'avait – bien évidemment – pas le droit de la regarder jusqu'à nouvel ordre. Entendue, Latone s'extirpa du bain et attrapa la serviette pour se réfugier dans la roulotte, afin de se sécher en toute tranquillité.

Quelques minutes après, la propriétaire rouvrit la porte et s'installa aux côtés du Köerta, sur la terrasse. La furie s'était engouffrée sous le même manteau que tantôt, mais il ne renferma qu'un pyjama guère attrayant. En ce lieu, Latone s'autorisait une telle entorse à l'image. Après tout, elle était chez elle. Puis bon, malgré toute sa volonté, elle n'avait pas beaucoup de lingerie en stock, manque de temps ou lacune en organisation.


" Je me demande vraiment depuis tout à l'heure comment on fait pour se parler dans nos têtes. " Cette réflexion plutôt solitaire n'attendait guère de réponse.

Elle s'affaissa un peu plus le long du dossier, comme si elle se trouvait encore dans le bain et qu'elle se noyait. Toute la tension de son corps s'était évaporée, transportée jusqu'aux cieux par les vapeurs libératrices. À contrario, son esprit bourdonnait, assailli d'incertitudes. Elle but, observa son jardin plus loin.


" … Tu n'as pas aimé ? Les réminiscences du show sulfureux hantèrent son esprit. Tu m'aurais préférée avec un kimono et une natte fleurie, comme à Aïkisu ? " Le contraste entre les deux prestations s'avéraient évident.

Sans un échange visuel, Latone laissait son attention flotter sur son territoire. Elle sentait qu'elle pouvait deviner n'importe quelle de ses expressions via un simple souffle de sa part. Elle baissa les yeux sur sa boisson, un semblant de reflet se créa à la surface. Maintenant, elle avait faim.


" J'aime danser pour toi. "


1927 mots ~



By Jil ♪
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Miles Köerta
Sam 07 Aoû 2021, 17:14



À la mention du gâteau au fromage, mon cœur rata inconsciemment un battement et la salive remonta soudainement au fond de ma bouche, à la manière d’un geyser qui expulsait l’eau de son ouverture. Par réflexe, je fermais doucement mes paupières, levant mon nez vers le ciel afin d’inspirer une grande bouffée de l’air qui nous couvait. En un instant, les effluves de la nature affluèrent jusqu’à l’intérieur de mes narines dilatées, l’essence des arbres, des arbustes et des poires cultivées envahissant tout mon odorat de leurs fragrances forestières. Toutefois, à travers l’odeur des bois, je reconnus celle que l’homme avait touché et manié, altérée au fil de ses manipulations : les matériaux ayant permis de construire le bain et la roulotte de la Guide en étaient imprégnés, mon odorat disséquant chaque parfum de cette superbe combinaison. Et presque immédiatement, la douce odeur sucrée de la pâtisserie trouva chemin jusqu’à mes voies olfactives, se lovant avec taquinerie entre mes deux oreilles, immergeant mon esprit. À ce constat, un sourire fleurit sur les traits de mon faciès. Ce dernier flottait et tremblait plus je me laissais envelopper par sa présence impalpable mais si forte désormais. L’alcool me remontait tellement au nez que je n’avais pas remarqué un détail aussi énorme? Aussi énorme que le brin de culpabilité qui semblait peser sur les épaules de la Bleue, puisqu’elle s’excusait d’avoir « gâché ma soirée ».

« Bah! Ne t’en fais pas pour ça, lui signalais-je en arborant une indifférence évidente, souriant de plus bel. En tout cas, t’as pas à me le dire deux fois! »

Dans un nouveau sursaut d’énergie, dépassant l’encadrement de porte pour filer, telle une tornade, à l’intérieur de la roulotte, je me mis tout de suite en quête du dessert, le trouvant là où mon amie me l’avait indiqué. Il reposait au milieu du four, n’attendant qu’une main gourmande pour le goûter et quelques dents affamées pour le savourer. Cependant, avant de m’attaquer au gâteau, un cocktail m’attendait également pour lui rendre honneur. C’est pourquoi je me détournais – difficilement, ne le cachons pas – des complaintes de mon estomac, commençant à travailler d’une main agitée, plus en raison du cumul d’énergie que je ne parvenais à extérioriser que par la nervosité engendrée par les relents de l’alcool. En quelques manœuvres habiles, les poires furent glissées sous la lame du couteau et je me mis à les trancher avec une rapidité inégalée, tout en restant précis et adroit, miraculeusement. Cela étant, tout était dans le doigté, l’équilibre et la dextérité.

Ainsi, un à un, les ingrédients furent pelés, tranchés et réduits en morceaux fins pour certains. Puis, je rejetais l’ensemble dans une casserole d’eau chaude, mixant les poires, le sucre en cube, le peu de vanille que j’avais trouvé dans les armoires de Latone, les quelques morceaux de gingembre hachés et la pelure d’orange pour qu’ils puissent mijoter, libérer et fusionner leur saveur. Croquant dans les morceaux d’orange qui me restaient, je mélangeais doucement la mixture jusqu’à ce que le sucre se dissolve complètement. Satisfait, j’arrêtais aussitôt le brassage : il ne restait plus qu’à laisser reposer le tout pendant une vingtaine de minutes à peu près. Pendant ce temps… Mon regard, carnassier, se porta immédiatement sur le gâteau qui patientait non loin. C’était l’heure, l’heure de profiter de l’un des meilleurs plaisirs vivants : manger. Surtout que, si le goût était à la hauteur du visuel, je m’attendais à déguster une gâterie digne des Divins. Bon… Où elle avait bien pu ranger le coulis aux fruits qui accompagnait le gâteau?



Le silence s’était de nouveau installé entre nous pendant que j’enregistrais chacune des informations qu’elle venait de me partager. Elle avait pris le temps de tout me raconter depuis son bain, elle, appuyée au bord de la caisse et moi, assis non loin sur les marches de la terrasse, la contemplant tranquillement. Ce brusque retour à la réalité avait été suffisant pour calmer mes précédentes ardeurs, ma conscience cherchant à prendre quelques respirations à travers les vapeurs de l’alcool qui le ramollissait.

« Lolaha… » Murmurais-je.

J’avalais la dernière bouchée de mon morceau de gâteau, ressassant dans le même temps tout ce qu’elle venait de me partager. Alors c’était à ça qu’avait ressemblé sa vie avant… avant de… de… Je luttais soudainement pour déglutir, prenant quelques gorgés de la boisson alcoolisée pour faciliter le passage de l’agitation. J’avais beau être au courant du secret sur la Mort, je ne pouvais quand même pas m’empêcher de considérer cette réalité dans les yeux d’un simple être humain qui se voyait naître, grandir, mûrir, vieillir, et mourir. Je pensais à la souffrance qu’elle avait dû ressentir au moment de dépérir ; de la peur qui avait dû l'enserrer à l’instant où elle s’était sentie partir, son corps cessant de lui répondre, son monde s’altérant derrière le rideau de brume qui recouvrait ses mires. Je pensais à la tristesse qui avait dû la poignarder en songeant, dans ses derniers soupirs, à tous les regrets qu’elle allait sûrement emporter avec elle dans l’Au-Delà et, inévitablement, au fond de ma poitrine, je perçus un battement violent. Il se réitéra lorsque je m’imaginais son visage décomposé par la Vie vacillante, par le trépas envahissant, et je fus obligé de vider mon verre cul sec pour forcer mon imagination à ralentir, à se calmer sur les images morbides de sa… de sa m… mo…

Merde. Même entre mes deux oreilles, le mot ne souhaitait pas s’évader, comme volontairement bloqué, interdit. Je dissimulais discrètement mon visage entre mes doigts, prenant le temps de purifier mes idées grâce à l’odeur de la forêt qui nous entourait. Après tout, ce n’est pas comme si elle m’avait décrit comment cela s’était déroulée. Le savait-elle seulement? Je ne le croyais pas. Cependant, de ce qu’elle m’avait confié, plusieurs événements s’étaient produits au cours de sa première Vie, des instants chéris et d’autres qu’elle aurait certainement préférer oublier, des rires échangés et quelques hontes qu’elle choisissait de dissimuler. Toutefois, la tournure que prenait ses derniers souvenirs ne me rassuraient pas, la présence écrasante et menaçante de ce Navyu agitant et distordant la fin inédite de son récit au sein de mon esprit. Pourtant, si la question me hantait, elle ne semblait pas déranger plus que cela la principale concernée, dont la voix s’éleva sans crier gare pour m’avertir. Cet avis, de l’ordre de la sommation plutôt que de la recommandation, semblait même vouloir mettre un terme à ce carrousel infernal dans lequel s’était engagé mon imagination. Doucement, je vins à secouer ma tête, remettant mes idées en place tout me levant des escaliers pour m’avancer jusqu’à sa hauteur.

« Compris, cheffe! Exhalais-je en lui offrant un sourire, rattrapant son verre vide avant de retourner à la roulotte, revenant quelques secondes plus tard avec sa commande. Dit quoi? »

À ses propos, mes prunelles descendirent naturellement jusqu’aux lunettes que j’avais coincé dans mon col, mais se relevèrent aussitôt pour croiser ses iris, ancrées sur ma personne. Cependant, la douceur de son regard ne correspondait pas aux paroles qui sortirent ensuite de sa bouche.

« Ça, c’est parce que t’es pas capable de reconnaître la véritable beauté, même quand elle est sous ton nez », répliquais-je faussement offensé, imitant la diva à l’égo blessé.

Pour renforcer la caricature, je dépliais les branches de mes lunettes d’un mouvement sec du poignet, avant de les replacer soigneusement sur l’arête de mon nez, lui tendant son verre par la même occasion. Mais avant que ses mains viennent frôler la surface du gobelet, je le retirais aussitôt de sa trajectoire, repoussant vers l’arrière quelques mèches de ma tignasse.

« Oh! J’oubliais! Je ne sers pas aux gueux et aux rageux. »

Rien de plus crédible que de terminer la scène sur une langue tirée pour lui indiquer tout le sérieux de cette altercation. Enfin, le temps qu’elle sorte de son bain, qu’elle s’habille et me rejoigne sur la terrasse, je n’y pensais déjà plus, mon visage tourné vers la nuit étoilée qui s’élevait au-dessus de nous, grande, belle et calme. J’avais passé mes jambes entre les barreaux en bois de la rambarde et appuyé mes bras le long de la rampe. Lorsque Latone vint s’asseoir sur le banc tout près de moi, je me retournais pour lui rendre son verre.

« Je suis décidément trop bon avec toi! » Me justifiais-je devant son air narquois.

Puis, je reportais mon attention vers le firmament obscur, profitant de la fraîcheur nocturne.

« Ça, c’est une bonne question… »

Pensif, je finis par me tourner dans sa direction, retirant mes jambes des espaces entre les barreaux par la même occasion.

« Est-ce que t’es capable de savoir à quoi je pense précisément, là, maintenant? J’écoutais sa réplique. Eeeet non! La réponse était : les crêpes que je me suis enfilé ce matin. Dieux qu'elles étaient bonnes! »

Par conséquent, ce n’est pas comme si elle avait un accès illimité à mes pensées, en fait. Alors… Tu sais quelle est la différence entre un éléphant et un homme? Non? Eh bien, le premier arrive au moins à attraper des cacahuètes avec sa trompe. Sa réaction m'offra la réponse que j'attendais. Il ne s’agissait vraiment que de communication mentale, il semblerait. N’empêche, cela ne répondait tout de même pas à une question fondamentale : pourquoi? Pourquoi nous deux? Pourquoi maintenant? C’était bizarre, mais c’est pas trop mal. Fais pas de blagues vaseuses, par contre. C’était l’hôpital qui se foutait de la charité.

Un nouveau silence, entrecoupé par la brise du soir, tandis que nos verres se portèrent simultanément jusqu’à nos lèvres pour une nouvelle gorgée. Au loin, nous pouvions entendre le hurlement d’une meute qui tentait de se regrouper. Entretemps, je me mis à observer Latone du coin de l’œil, intrigué par son incommodité subite.

« Oh. C’est de ça qu’elle s’inquiétait? Vraiment? Ça te tracasse à ce point? »

Je m’étais relevé, m’asseyant tout près d’elle sur le banc et même si nos regards ne s’entrechoquaient pas sur le moment, je pouvais deviner le trouble que cette situation lui provoquait. Mon opinion sur la question semblait vraiment lui tenir à cœur.

« Pour être honnête avec toi, je pense que la combinaison kimono et fleurs dans les cheveux t’allait bien mieux que le style de ce soir. »

Les vêtements typiquement orines étaient bien plus légers que ce justaucorps qu’elle avait été forcée de porter pour les besoins de son… infiltration. Peut-être était-ce mes gènes orishas qui parlaient ainsi, mais m’imaginer revêtir un vêtement aussi serré me rendait instantanément claustrophobe.

« Le costume de ce soir était bien, vraiment, mais c’est juste pas mon style… Et toi? T’étouffes pas du tout dans ces fringues? J'étais sérieux. Et en parlant de style, j’aurais jamais deviné que tu pratiquais la danse de poteau! Bon, c’est pas le plus surprenant à mon avis, parce qu’après le coup de la Fessée, c’est quand même assez difficile de faire plus osé, mais…

- J’aime danser pour toi. »

Je me tus instantanément, la main que je venais de lever dans les airs se suspendant au bout de mon bras, inerte. Durant de longues secondes, je l’observais muet comme une tombe, laissant la réalisation nous immobiliser dans cette nouvelle posture. À aucun moment, pourtant, elle sembla vouloir redresser le menton, son regard se perdant à la surface du cocktail qu’elle remuait tranquillement. Et pendant que la lueur dans mes pupilles transita de la surprise à la douceur affective, je finis par dérober mon regard de ses épaules, dissimulant l’écarlate de mes iris derrière l’ombre de mes paupières.

« Pour moi, hein? » Répétais-je finalement tout en étirant un sourire sur la bordure de mes lèvres.

L’expression que l’on devinait entre les cicatrices de mon visage indiquait clairement que je n’étais pas tout à fait présent, les vapeurs de l’alcool altérant l’éclat de mes yeux et la gravité de mon faciès. Pourtant, je me savais encore parfaitement maître de mes pensées et de moyens.

« Je me suis foutu de ta gueule pratiquement toute la soirée et tu aimerais recommencer ça? »

Je ne l'avais pas mentionné pour me moquer d'elle. C'était seulement un fait. Tranquillement pourtant, je glissais le plat de ma main sous son menton, soulevant sa tête du même fait.

« Mais tu dis ça parce que ce n’est pas la première fois que tu danses pour moi, n’est-ce pas? »

Mon sourire venait de disparaître. Nous connaissions tous les deux la réponse. Les bribes du rêve ne s’étaient pas fait oublier, pas après cette étrange conclusion à Aïkisu. Pourtant, les événements de ce soir me laissaient perplexes, là où, hier encore, les interactions avec la Bleue me laissaient supposer autre chose… Bon sang. Depuis que ce mot « aphélie » m’était revenu à l’esprit, je ne pouvais m’empêcher de penser au rêve, à la chanson qu’elle m’avait dédié devant une foule en pleine euphorie. Pouvais-je seulement considérer ses sentiments comme de la simple tendresse à mon égard? De l’admiration détournée peut-être? … S’il s’agissait bien là de ce que je pensais, je comprenais pourquoi elle avait voulu me faire payer. Nous pourrions douter de l’efficacité de cette punition, mais le fait est que je saisissais un peu mieux le fond de sa pensée désormais. Eh! Bizarre quand même de remarquer cela alors que j’avais arrêté de compter combien de verres je m’étais enfilé en une soirée. Je laissais un soupir m’échapper, me redressant alors dans un bond pour me remettre sur pied.

« Laisse-moi te faire un présent également. Pour m’excuser. »

Je descendis de la terrasse en sautant par-dessus la rambarde, atterrissant sur mes deux pieds de l’autre côté, dans le tapis de neige. Puis, je relevais la tête, croisant son regard avant de me redresser complètement, commençant à marmonner un rythme dans un fredonnement chanté, espérant l’inspirer à joindre sa Voix à mon Khitarr. Et sans crier gare, mes jambes se mirent à bouger toutes seules, enchaînant les jeux de pieds déjantés sur les mouvements fluides de mes bras. Mon corps dans son intégralité se laissait emporter par la mélodie aux notes rythmées, racontant une histoire, alors qu'à un instant, une main se tendit vers l'Orisha, l'incluant brièvement dans mon conte. Je lui adressais un sourire charmant puis, refis un tour sur moi-même, me perdant à nouveau dans cette valse inhabituelle. Si elle désirait en rigoler, que grand bien lui fasse. Je ne m’en plaindrai pas. Et sincèrement, j'appréciais bien ce moment de défoulement, le saut final de ma chorégraphie en témoignant, alors que mon corps se contorsionnait dans un salto et que je tombais, en équilibre parfait, sur la rambarde. Enfin, je croisais mes jambes et basculais mon buste vers l’avant, dans une révérence. J'attendis ses applaudissements – ou ses rires ininterrompus – avant d’enchaîner sur mon prochain mouvement. Sans demander son avis, je lui attrapais le bras, l'incitant à se lever.

« T’as dit aimer danser pour moi. C’est gentil, mais t’aimerais pas plutôt danser avec moi? »

L'espace sur la terrasse n'était pas assez grand. C'est pourquoi, de nouveau, je me laissais tomber dans la neige, faisant craquer cette dernière sous mon poids, la retenant toujours par le bras.

« Je ne comprends pas comment les gens de toutes les nations peuvent se présenter avec le sourire et vouloir participer à un bal organisé par les Sorciers, comme si le monde entier avait oublié qu'ils détiennent d'autres êtres humains en les exploitant comme s’ils ne valaient pas mieux que des animaux… »

Un rictus dangereux fleurit sur mon faciès, mes pupilles se perdant un instant dans la vague, instables.

« Si l’idée de voir brûler les fondations de leur Vorace me paraît être un plus beau tableau que tous ceux existants en ce monde (mon visage s’altéra soudainement, moins sinistre, en un instant) pour cette nuit, rien ne nous empêche d’avoir notre propre soirée dansante ici même. On a tout : de la boisson, du gâteau, un… Je m’interrompis, considérant la neige qui nous entourait. ... un semblant de piste de danse! »

Yeux dans les yeux, je l'invitais à me rejoindre.

« Recommençons notre danse et terminons la correctement cette fois. »

Je la contemplais, marquant une pause. Et dis-moi ce que tu ressens vraiment, Latone.


2 719 mots (Sans les paroles de Latone) | Post V

Dis-toi que la chorégraphie réalisée par Miles est celle-ci (0:00 à 1:25), mais avec moins de… rythme que ces gars-là je dirais XD





[Q] - Autour de la barre | Miles Signat16
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Latone
Mar 10 Aoû 2021, 16:35





Latone roula des yeux face aux pitreries de son camarade. Sa voix devait être l'une des seules dont elle pourrait finir par s'accommoder entre ses deux oreilles ; pour autant, elle ne souhaitait pas en subir d'autres. Les blagues de Miles lui suffiront amplement. A ce propos, elle se demandait comment l'embêter à l'avenir avec cet "avantage" et, surtout, comment faire en sorte de ne pas le retourner contre elle. Il suffisait d'une faille pour que l'Orisha eût accès à toutes ses cartes. Ce qui, pour une duelliste de sa trempe, hors de question.

La confession glissait de ses lèvres, aussi naturelle que son Khitarr. Malgré son apparent inconfort, Latone ne préférait pas emmagasiner tous ses sentiments et créer une frustration au coin de son âme. Elle ne prenait pas de pincette, elle disait ce qu'elle avait sur le cœur et cette soirée lui faisait bien comprendre que de toutes les mains tendues, celle de Miles lui paraissait bien plus attrayante. Elle ne pouvait juste pas l'expliquer, c'était ainsi. Peut-être était-ce dû à sa marque, celle-là même ayant transcendé les barrières du Corps pour imprégner son Esprit. Ses lèvres scellées contre les siennes, en un présent rien que pour elle. Elle, Latone, la Bleue, et non pas sa promise, sa muse, sa reine. Pour autant, il demeurait aussi idiot qu'elle. Affres de l'ivresse ou non, il ne comprenait toujours pas ce qu'elle ressentait.


" Qu'est-ce que ça aurait donné si tu m'avais rencontrée à Linos ? Railla-t-elle à sa mention des moqueries. Lola'… Je – rectifia-t-elle – portais des tenues plutôt serrées, des robes, de… la lingerie de femme. Ce devait être un spectacle grisant pour un étranger à la scène. J'étais ainsi. L'était-elle encore, sous ses apparences de guerrière émérite ? Cela n'aurait rien changé, tu te foutrais de ma gueule, comme touj— "

Alors que son emprise se resserrait sur son verre et que son visage se tordait sous l'impulsion d'une colère enfouie, la main de l'albinos apaisa aussitôt son mal. Elle le fixa droit dans les yeux, se laissant faire contre toute attente. Ses mots la figèrent ou la firent déglutir, cela revenait du pareil au même. Elle avait enfin eu sa réponse ; ou plutôt, ils s'en étaient tous les deux rendus compte : le Neru prenait forme et leur rappelait les bribes les plus importantes de ce rêve commun. Pour Latone, plusieurs éléments lui paraissaient encore flous, mais cette tradition de rendre un baiser l'avait hantée depuis Aïkisu. Alors pourquoi n'obtempérait-il pas ? Tout ce qu'elle avait tenté ne serait que vain ? Cette idée naissante disparut au même instant où il lui promit des excuses immédiates. Par rapport à quoi ? Pour avoir été si aveugle vis-à-vis de leur escapade onirique ou pour son comportement à Sequela ? Toutes ces questions ne lui traversèrent même pas l'esprit, tant elle semblait aussi intriguée que ravie de voir le Köerta faire quelque chose pour elle. N'importe quoi.

Songeuse, la Hurabis le regarda faire et s'élancer dans une parade aussi surprenante que bienvenue. Latone écouta sa Voix, religieusement respectueuse. Depuis leurs retrouvailles à l'Archipel, elle n'avait jamais eu l'occasion d'entendre la sienne, de voir son Khitarr à l'œuvre. C'était touchant réconfortant. Mais ce qui la captiva d'autant plus fut cette chorégraphie endiablée et rythmée par la dextérité propre au Marcheur. Elle capta son invitation et elle réagit enfin à son présent. Elle ne riait ni ne l'ovationnait : elle souriait, des étoiles plein les yeux. Parfois, il y avait du bon à se retrouver hors de la scène. Dominée, ombragée par la révérence, Latone ne put que se rendre à l'évidence que c'était plutôt satisfaisant de le regarder se pavaner pour elle. Mollement, comme pour le provoquer, elle applaudit avec une lenteur qui n'avait pour but qu'attaquer ses défenses. Son sourire en coin et son regard en biais trahissaient ce nouveau croche-patte à son attention.

D'ailleurs, Latone espéra profiter de sa position pour le faire tomber de la rambarde, mais Miles la prit une nouvelle fois de court en l'invitant dans la danse. Danser avec lui… C'était une idée intéressante et les échos du Neru appuyèrent son audace. Éprise, Latone ne le lâcha pour rien au monde et fit glisser sa main dans la sienne lorsqu'elle le rejoignit sur leur fameuse piste de danse. Durant un moment, elle fut captivée par cette hargne qu'il lui confiait. Elle soupira ; s'il savait que Kerby avait tenté de l'enrôlée au dit bal, elle aurait bien aimé voir sa réaction. Mais il avait raison : les gens comme eux, les lucides, n'avaient rien à y faire ; si ce n'était avec des torches et des massues.


" Il n'est pas trop tard pour s'y rendre et danser sur leurs cendres. Elle se rapprocha de lui, cette lueur caractéristique au fond des pupilles. Chanter notre victoire et leur trépas. "

L'idée de la Marche lui monta à la tête et redescendit dans les limbes de l'oubli lorsqu'il évoqua cette soirée intime, ce lieu rien que pour eux. La jeune femme observa autour d'eux : le cadre était parfait et il s'en accommodait bien. Elle retourna sur lui et son intention la berça, comme si elle venait de s'injecter le plus doux nectar au monde. Réitérer leur danse onirique la tentait. C'était comme une chance, comme si les Ætheri l'avaient écoutée. Un flash du Neru lui apparut, lui remémorant ces rubans écarlates qui les enserraient, les rapprochaient et les éloignaient en une valse effrénée. Ses deux mains dans les siennes, elle plongea dans son regard rougeoyant. Latone était prête.

" Suis-moi. "

Point de Hihtyx, point de Khitarr, pas même besoin de Voix. Pour cette nuit, seuls les corps répondront à la mélodie de leurs cœurs. Elle ferma les yeux et ses muscles répondirent à l'appel, imprégnant ceux de son partenaire d'une cinétique particulière. Au même instant, elle tournoya sur elle-même en s'éloignant, l'éjectant au passage lui aussi de l'autre côté de leur scène. Elle s'arrêta nette et prit une pose théâtrale, ses poignets joints au-dessus de sa tête après s'être délestée de son manteau. En rouvrant les yeux sur lui, Latone constata avec plaisir qu'il l'avait imité ; tant bien que mal. L'alcool ne les aidera pas à être aussi doués que lors de leur précédente prestation. Cela lui importait peu, tant qu'elle pouvait être avec lui. Dénuée de ses talons, sa tenue actuelle ne laissait guère place à la féerie, mais c'était cette dissonance qui lui plaisait. Pour contrebalancer, la Bleue usa de la pointe de ses pieds pour initier son pas de danse. Les torsions de leurs enveloppes accompagnèrent la chute des flocons, leurs charges chassèrent la neige sur leur passage. Ils se croisèrent par moments pour mieux se séparer et prolonger ce moment. Leur moment. Au fur et à mesure que leurs attaches chimériques se reformèrent, les notes du Neru se firent entendre pour masquer le chant du vent et le hurlement des loups. Ce n'était ni sa magie, ni la sienne, simplement la leur, celle qu'ils cultivaient ensemble. Petit à petit, leurs pas les firent de plus en plus se rapprocher. Même si Latone avait l'air de s'épanouir, ses œillades à son attention purent lui faire comprendre qu'elle traquait encore des réponses, avide. Pourquoi tu ne me le rends pas ? Le goût de ses lèvres lui manquait. Il se faisait tant attendre alors qu'elle avait réalisé sa part du marché lors de ce rêve. Qu'est-ce que tu attends ? Lui soufflerait-elle lorsqu'ils ne se trouvaient plus qu'à quelques centimètres. Consciente qu'il l'entendait, sa bouche ne se mouva point. Leurs mains se joignirent dans une ronde où elle réclamait, de par son simple regard, une réponse, une bonne fois pour toute. Fais-le ou repousse-moi. Ils se détachèrent au point culminant, alors à quelques mètres l'un de l'autre, lorsque leur musique rendit son ultime note.

Latone venait de comprendre : c'était sa faute. Leur dernier échange onirique refaisait surface, lorsqu'elle était sur le point de lui confier son plus beau présent. Le rêve s'était dissipé à ce moment précis, aussi cruel qu'un juge apathique. La Bleue ignorait si elle l'avait oubliée par déni ou par malchance, mais maintenant, elle comprenait enfin l'inaction de Miles. C'était à elle de le donner. Elle se sentait soudainement trop conne. Était-ce que tu attendais, pour finir correctement notre danse ? Elle se ressaisit, assoiffée et essoufflée par leur semblant de tango. Mon aphélie. Le mot lui était enfin revenu. La Marcheuse lui fit face, sans se dérober.


" … Est-ce un rêve ? " Ce n'était pas le cas et il le confirma.

Sans attendre une éternelle seconde de trop, Latone se précipita sur lui d'un pas déterminé. À la volée, elle lui retira ses lunettes et les jeta au loin. Je te le donne. Elle l'embrassa. Son baiser promis atteignit les lèvres de cet homme qui la mettait dans tous ses états. Moins gauche que le précédent, qui remontait à cette époque presque lointaine où elle imitait encore sa Chamane, l'offrande dura le temps escompté. Le froid des montagnes laissait place à une agréable chaleur. Elle s'était raccrochée à son costume, dans lequel elle le trouvait si charmant, alors que son propre pyjama ne faisait pas rêver. Enhardie par l'échange, l'interruption lui provoqua une étincelle de frustration, un arrière-goût de reviens-y. Plus que prévu d'ailleurs, car des larmes silencieuses s'écoulaient sur ses joues. Latone s'était perdue dans ses prunelles de rubis et finit par prendre compte du phénomène qu'au bout de quelques secondes.


" Que… Elle chassa une première larme, aussi éberluée que lui. Je… ne comprends… pas trop… " Était-ce normal de pleurer lors d'un baiser ? Celui qui comptait le plus ?

Sa respiration se fit plus stable. Elle sécha définitivement ces larmes, toujours aussi perdue. Comme lors de cette nuit chez les Corvus, Miles voulut s'enquérir de son état et faire n'importe quoi pour la remettre d'aplomb ; mais elle allait très bien, simplement troublée. Par ailleurs, son froncement de sourcils et son léger grognement démontraient sa forme, son agacement face à cette situation qui lui échappait. Elle le fixa, si proche. Non, non, non, il était hors de question que cela recommença. Tout était si beau, la Kirzor voulait juste en profiter. Au diable ces singularités, elle n'en avait que faire. Elle ne voulait pas souffrir de son attirance pour lui. Nettement mieux, elle enlaça le Köerta et l'obligea à rester près d'elle, contre elle, pour elle.


" Ça va. Assura-t-elle, sincère, avant un fugace baiser. Ça va ! Insista-elle, encore avide. Juste… Elle chercha ses lèvres, d'un regard langoureux. Embrasse-moi… "

Les larmes du bonheur.


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Miles Köerta
Ven 10 Sep 2021, 16:56



À l’instant où ses lèvres se scellèrent aux miennes, la voix dans ma tête se tut par la même occasion, emportant avec elle les doutes, les interrogations et les présomptions qui avaient assailli mon subconscient. Entre mes deux oreilles ne restait plus que le vide et le néant, un silence temporaire qui se remplit soudainement d’une vague de chaleur incommensurable, d’un irrépressible tressaillement. Ils étaient de plus en plus intenses en mon sein, prenant d’assaut non seulement les profondeurs de mon esprit, mais également les impressions de tous mes sens. Mon odorat percevait son effluve avec une acuité décuplée, les arômes de la boisson s’accouplant à son odeur corporelle si familière et fruitée. Sa présence se serrait à la mienne avec un appétit insatiable ; ma peau, ma bouche, parcourues par les tremblements de sa fièvre et de sa passion. Tel un astre retenant un corps céleste à son périhélie, la poigne de ses doigts venait jusqu’à s’accrocher à mon col, tout aussi avide, tandis que l’intérieur de mes bras finit par l’englober doucement, par réflexe… Était-ce ainsi que le rêve s’était terminé? Par une offrande de cette nature, de cette intensité? Pourquoi n’en avais-je aucun souvenir alors que sa chorégraphie et sa chanson me paraissaient aussi vives et limpides? S'agissait-il de ce qu’elle avait attendu depuis tout ce temps, que je lui redonne ce qu’elle m’avait octroyé? Contre mon torse, je pouvais entendre le battement de son cœur assujetti à des secousses insensées, enhardi par une flamme qui ne cessait de grossir au fond de sa poitrine plus le goût de nos lèvres s’unissait, plus l’effleurement de nos peaux s’approfondissait et fragmentait notre état d’aphélie. Es-tu certaine que ce soit ce que tu veux? Lentement, mes paupières se soulevèrent, mes pupilles observant le faciès de la Bleue, éperdu. À cette vision seulement, un frémissement ébranla le creux de ma poitrine, ineffable. Étais-je certain que c’est ce dont elle avait besoin? Le souffle de nos respirations s’entremêlait tandis que des souvenirs, au creux de ma mémoire, surgirent doucement, étreignant ma conscience et mes phalanges, qui se crispèrent soudainement. Les réminiscences éveillées, un sourire peinait désormais à s’effacer sur la commissure de mes lèvres.

D’un geste discret, mes doigts coururent à la surface de sa peau, cherchant à enserrer ses poignets, mais au même instant, Latone mit fin au baiser, ses yeux cherchant les miens dans un sursaut effréné, agité. Je ne bronchais pas sous le poids de son regard, déterminé à l’étudier, à la contempler, et ce, malgré la boule qui se formait dans mon estomac.

« Tu t’es améliorée depuis la dernière fois. Bien joué! »

Je ne pouvais me défaire de qui j’étais, lui offrant un rire bien malgré moi, plaisantin. Mais en même temps, j’avais l’impression d’étouffer, un feu irradiant au fond de ma gorge. Et ne s’agissait-il pas de mes inspirations qui cognaient ainsi à l’intérieur de ma cage thoracique, violente et affolée? Je restais silencieux un moment, prenant le temps nécessaire pour rattraper ma respiration. Jusqu’à ce qu’elle se bloque complètement. Jusqu’à ce que j’aperçoive l’humidité s’accumuler dans ses yeux : une bruine fine, d’azur et d’améthyste, qui s’épaissit au creux de ses iris pour s’altérer et, brusquement, déborder.

« Tout va bien? Les premières larmes se déversèrent le long de ses joues, glissant à la lisière de son menton, nombreuses et soudainement inépuisables. La-Latone?! Je lui attrapais aussitôt les épaules, suspendant mon visage à la hauteur du sien, tentant de la calmer par un humour tout aussi déséquilibré. C’est si affreux que ça de m’embrasser? Je fis entendre un léger gloussement, mais le rire dessiné par mes lèvres frémissait dans un malaise angoissé. Eh, qu’est-ce qui t’arrives, sérieusement? Elle ne comprenait pas elle-même et je finis par rester muet, définitivement, la laissant se calmer par ses propres moyens un certain temps. Ça va mieux? »

Il semblerait. Du moins, c’est ce qu’elle prétendait. Je ne décidais pas de chercher plus loin, laissant mes mains glisser le long de ses épaules pour nous détacher. Seulement, je fus soudainement attiré dans sa direction, atterrissant dans l’étreinte de ses bras.

« Latone… »

Mais ses lèvres effleurèrent les miennes, m’obligeant à me taire, immergeant ma conviction dans un nouveau battement assourdissant. Et ses yeux… Elle continuait de me fixer avec cette étincelle dans les yeux… J-Je me paralysais, scrutant son visage, son regard, la pulpe de ses lèvres, qu’elle me commandait d’emprisonner dans un énième baiser. Je déglutis, un martèlement sourd se fracassant à mes tempes. Devais-je le faire? Ma main rejoignit sa joue, effleurant l’ancien sillage qu’avait tracé l’une de ses coulées de larmes. Devais-je vraiment le faire? Je méditais sur la question, les vapeurs de l’alcool enfouissant plusieurs de mes raisonnements tout en embellissant son visage, tout en altérant mes impressions. Je la trouvais belle à cet instant, l’ambiance ou l’alcool – je ne saurais l’interpréter – rendant plus lumineux l’éclat dans ses yeux. Elle me faisait penser à Lét… NON! Non! Non… Je fermais brusquement mes paupières, laissant tomber mon front contre le sien.

« Qu’est-ce que je risque? Une claque ou une morsure? Je la gratifiais d’un sourire insolent mais nerveux, attrapant son visage à deux mains, ancrant mes iris dans les siens. Qu’est-ce qu’on est en train de faire, Latone? J’vois que t’es sérieuse et en même temps… Qu’est-ce qui s’est passé? J’avais cessé de sourire. T’as jamais aimé que je t’embrasses auparavant et là… J’émis une pause, laissant échapper un rire. La dernière fois, t’as même sauté par la fenêtre du premier étage alors qu’il y avait une tempête dehors. »

Le souvenir de cette fameuse nuit était bien tenace, bien ancré, dans mon esprit. Je me rappelais les moindres détails, de notre combat à mains nues aux arcs électriques qui nous avaient enveloppés, brûlant quelques coins de mon parquet de leurs langues acérées. Je me rappelais notre dispute et notre incompréhension de la situation; je me rappelais ses mots – à propos de Léto, de nous – et  nos hésitations. Nous avions été comme des navires perdus dans la tempête, chavirant, inconscients, en direction d’un horizon incertain. Nous étions tombés au milieu de l’ouragan dans lequel hurlait chacun de nos sentiments. Nous nous étions criés l’un à l’autre, frappés les jointures l’un contre l’autre, par-dessus cette tempête rugissante, afin de nous entendre, afin de nous comprendre, afin de nous libérer de ses chaînes qui nous avaient retenu trop longtemps à ce mensonge. Elle avait voulu se détacher de ce monde qu’elle ne croyait être sien; de ce monde dans lequel elle ne faisait que servir, tuer et ne pas vivre, selon ses dires; de ce monde auquel je n’avais cessé de la ramener en raison de mes sentiments pour Léto. Elle n’était pas ma femme et ne le serait jamais. Malgré tout ça, je l’avais embrassé, je l’avais désiré, simplement parce qu’elle possédait son corps, avec ses yeux, sa force, ses mimiques et toutes ces choses qui avaient fait de Latone une Léto presque parfaite et identique… Elle était au courant de tout ça, n’est-ce pas? C’est pour ça qu’elle avait sauté de la fenêtre la dernière fois; c’est pour ça qu’elle détestait que je l’embrasse! Elle s’était fâchée, nous nous étions engueulés… Et je ne voulais plus de ça. Parce que je ne voulais pas perdre ce que nous avions construit malgré toutes les intempéries; parce que ce que nous avions aujourd’hui était différent de ce que nous avions à ce moment-là…

« J’peux pas, murmurais-je en prenant une profonde inspiration, détournant mon regard du bleu violacé de ses prunelles. Si je t’embrasse maintenant, ce serait me moquer de ce que tu ressens et je… je peux pas te faire ça. Pas une nouvelle fois. »

Parce que je tiens à toi. Je me décalais légèrement, gardant pourtant son visage en étau entre mes phalanges. Mon cœur tremblait avec violence, les secousses descendant jusqu'à l’apex de mes doigts. Si quelqu’un d’autre m’avait embrassé de cette façon, j’aurais certainement obtempéré sans me poser plus de questions. Ce qui aurait engagé cette personne n’aurait pas été de mon ressort, si ce n’était peut-être de la nuit qui aurait suivi. Mais parce qu’il s’agissait d’elle, l’affection que j’avais développé à son endroit m’obligeait à reculer. Est-ce que je l'aimais? Sans aucun doute. Mais ce que je ressentais pour elle n'était pas ce qu'elle attendait de moi, de cela, j'en étais certain.

« Je ne veux pas te faire du mal en risquant de voir quelqu’un d’autre à travers toi, Latone. »

J'étais sincère, caressant distraitement son visage.


1 423 mots | Post VI




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Latone
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Latone
Sam 11 Sep 2021, 16:39





La caresse sur sa peau amplifia ce feu qu'ils alimentaient mutuellement, celui de deux êtres perdus dans les bras d'une tempête. Latone se plongeait dans le vermeil, sans faillir un seul instant. Mais ce qu'elle y trouva ne fera qu'effriter petit à petit cette euphorie qui faisait battre son cœur. Peut-être que l'alcool embuait ses idées ; mais elle n'était point ivre. Pourquoi ne s'abandonnait-il pas, lui aussi ? S'était-elle trompée ? Non, impossible. Ce songe leur était commun, ce n'était pas explicable autrement. Miles en riait et elle se laissait berner, comme si le déni opacifiait le sens véritable de son regard. Inévitable, le doute envahit son être, écho des pensées de l'Orisha. Était-elle certaine ? Bien sûr, sinon elle n'aurait jamais pu… Jamais elle aurait osé se ridiculiser devant, se mettre à nue pour lui arracher ce baiser tant attendu, rattraper du mieux qu'elle pût son aphélie. Pourtant, leurs sentiments respectifs avaient beau être aussi limpides que des révélations, Latone ne comprenait pas encore les maux de Miles.

La Fille des Chants demeura silencieuse, soudain cristallisée par l'emprise du Chasseur. Elle se surprise à le respecter par son mutisme. Parce que ce n'était plus une question de chamailleries, ils ne s'éternisaient pas dans un concours enfantin ou narcissique. Ce moment lui était chère, il n'y en aura peut-être plus d'autres. Tout recommençait ce soir sous la douce chute des flocons de Ciel-Ouvert. Ainsi, il ne la comprenait pas. On aurait pu croire à une tradition, tant Latone ressortait encore – quelques fois – ses mimiques inhumaines. Pourtant, la jeune femme ne s'était jamais montrée aussi réelle qu'en cet instant.

" Et alors ? Elle soutint son regard, absolument sérieuse. Je n'ai pas le droit de changer d'avis ? "

Ce soir-là, dans la chambre conjugale, relevait sa plus haute stupidité. Même depuis le baiser au Voile Blanc finalement, puisque cette histoire prenait forme à cette source. Se détacher de l'enveloppe qui n'était pas sienne, de cette coquille qui effaçait peu à peu sa propre identité, confronter ces relations chimériques, tout cela lui avait fait un bien fou ; en tant qu'Esprit, impensable ! Miles avait participé à l'humaniser, même sans le vouloir. Il était devenu un ami, et leurs sentiments tonitruants firent battre son palpitant.

" Auparavant, tu embrassais ta femme, pas moi. Elle posa aussitôt son index sur les lèvres de l'albinos. Le baiser que tu m'as offert juste après ne compte pas, parce que je te l'ai rendu. Comme on rend… un livre, ou que sais-je. C'était un prêt, pas un échange, voilà ! Sa main descendit pour se poser sur son torse, comme prête à l'agripper à la moindre fuite. Et avant, j'étais une morte, tu te souviens ? Ce n'était pas… Elle baissa un brin les yeux. Pas pareil. Songeuse, elle finit par relever son regard. J'aime quand on s'embrasse maintenant. " Se fit-elle enfin plus clair.

Depuis notre rêve, notre chant et notre danse. Au-delà du simple plaisir charnel, la Kirzor comprenait la complexité du lien qui les unissait. Le phénomène lui échappera peut-être encore durant des jours, voire des mois, néanmoins il continuera de la hanter et de faire battre ces petits papillons dans son ventre lorsque le Koërta envahissait ses réflexions ; de par sa voix, son sourire, son visage, la saveur de ses lippes. En soi, être aussi invasif lui avait paru pénible, déjà y compris avec son insolence et la facilité déconcertante avec laquelle il la maîtrisait. Mais ensuite – alors qu'elle craignait que les émotions de sa Chamane détinssent sur elle – Latone capta ses propres ressentiments et mit un certain temps à les interpréter. C'était elle, juste elle et son monde. Le problème – car c'en fut un à l'origine – étant que Miles Köerta en faisait partie. Elle ne l'avait pas choisi, c'était tout bonnement le fil rouge.

Si les mots pouvaient être des lames, Latone saignerait entre les doigts réconfortants de son aphélie. Le refus lui fit autant mal qu'un coup de poignard. Pourtant, l'Orisha n'écarquilla point les yeux, elle réussit à demeurer inerte, comme si elle endurait avec brio les coups pour mieux contre-attaquer. Sa bataille lui fit perdre l'avantage, son esprit bouillonnant dans les méandres de son Âme. Elle respira un petit peu plus fort afin de calmer cette hargne qui ne servirait pas le bien commun, son souffle se givra et la vapeur se désagrégea contre le faciès tailladé du Molosse. Un froid dans leur cocon ardent. Mais je tiens à toi aussi. L'écho fut spontané, obligatoire pour elle. Si sa voix refusait de s'exprimer, celle de son for intérieur prendra le relais. Vaincue par l'inflexion de son camarade, la main de Latone glissa petit à petit de sorte à pendre le long de son corps, aussi molasse que son bras. Peu à peu, il lui échappait vraiment. À part user de son honnêteté, la Kirzor ne voyait aucun moyen de le retenir ; la violence physique, pour une fois, ne résoudrait rien.

" Tu l'as déjà fait. Oui, il l'avait déjà confondue avec Léto trop de fois. Cela ne pouvait plus durer. La Marcheuse recouvra un second souffle et emprisonna les mains de l'Orisha contre sa peau, ses paumes fermement accrochées à ses phalanges. Est-ce que ça a changé quelque chose ? Elle se remémora l'archipel de Sorellis, le concert d'Aïkisu, le Neru. Il devait s'en souvenir aussi. Ça a failli, mais pourtant… nous voilà. " Elle était toujours là, à vouloir le retenir.

Latone puisa dans sa force pour redorer l'éclat de ses iris, afin de ne pas faillir, ne pas le fuir, ne pas le quitter des yeux. Maintenant qu'elle y pensait, cette conversation était inévitable, car le parallèle entre la toute puissante Hǫfðingi et la misérable Linèsienne s'avérait évident. Son aphélie était lié à la première, envers et contre tout. Même si les sentiments de la Sùlfr batifolaient au gré du vent, ils demeuraient sincères et renforcés à l'égard du Köerta. Se présenter sur leur sillage serait comme une trahison. Ses sourcils se froncèrent un chouïa plus : c'était bien ça le problème. Depuis sa résurrection, même un brin avant finalement, Latone avait pris conscience de sa véritable valeur. De son nom.

" En fait, tu dis ça mais… tu m'as appelée par mon nom bien avant ma renaissance. Tu nous voyais peut-être toutes les deux à la fois mais c'était suffisant pour que tu me remarques, moi et mon existence. Un petit sourire se dessina. Tu entends ma Voix. Därka älsh gadëus edh ëm ëjgsy. (Tu es capable de me voir.) " Il était un Marcheur et un Orisha, capable de toutes ces prouesses.

Par réflexe, son emprise sur ses mains se raffermit. Cette situation la dépassait, elle les dépassait tous les deux, car un facteur commun se logeait dans leur relation, un boulet beaucoup trop lourd à traîner, même à deux, même avec toute la volonté du monde. Pour une fois, son alter-ego la terrifiait.

" Je ne veux pas remplacer Léto. Elle se le répétera encore et encore si nécessaire. Le plus important demeurant que Miles devait l'entendre. Regarde-moi. Elle ne l'obligea pas, mais elle avait besoin qu'il lui fît face. Regarde-moi et ose dire que je ne suis pas différente. Ose dire que notre danse n'appartient pas qu'à nous. La Bleue resta infaillible, forte de ses convictions. Léto… n'a rien à voir avec tout ça. " Son absence dans le songe en était une preuve, comme tant d'autres.

Cela se montrait bien étrange pour la Hurabis de se retrouver dans la position de la sermonneuse. Étant donné son savoir-être non conventionnel, Latone s'était systématiquement découverte à contre-courant de Miles, bien plus lucide et moralisateur qu'elle. Il était capable de la suivre dans ses folies, mais avec parcimonie. En cela, la Kirzor appréciait cette qualité, cette capacité à lui inculquer la juste limite. Pour cette soirée, en revanche, elle refusait de se laisser abattre. Les Dieux n'avaient sans doute pas entendu son vœu à Aïkisu, alors cela lui donnait une autre raison de redoubler d'efforts, voire de les tripler.

" Miles. Elle se rapprocha, de sorte à capter son attention. Si tu ne peux pas, alors je viendrai à toi. Résolue à assumer les conséquences par elle-même. Car je sais, je sais que quand je te vois, quand j'entends ton chant… quand je me donne à toi, je ne ressens que du bon. Je me sens vivante avec toi. Ses joues s'empourprèrent, son faciès révéla toute sa sensibilité en tant que jeune femme. Son sourire trancha le silence glacial, jusqu'à que la neutralité reprit le flambeau. À toi de décider : laisse-moi me faire du mal ou va-t'en. "

Doucement, ses mains libérèrent celles de son prochain. Ses muscles se détendirent, une démonstration de l'anéantissement de ses barrières. Miles ne serait plus que le seul maître de leur destin, car Latone lui faisait toute confiance. Les paupières de la Bleue se refermèrent lorsqu'elle trouva le courage de s'élancer : son corps se tordit vers l'avant, cherchant à empoisonner leurs lèvres une nouvelle fois, ensemble.


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By Jil ♪
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Miles Köerta
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Miles Köerta
Dim 12 Sep 2021, 17:23



Latone pinça la pulpe de ses lèvres avant qu’elle n’esquisse une nouvelle enjambée dans ma direction. Yeux fermés, bouche entrouverte, sa démarche était assurée, la tension de ses traits s’allégeant du même fait. Son désir tremblant la guidait jusqu’à mon visage afin d’y cueillir un nouveau baiser sur mes lèvres. La première seconde, tout ce qui me frappa ne fût que le martèlement d’une injonction silencieuse à l’intérieur de mon crâne, qui m’incitât à ne pas bouger. Durant ce bref instant, pourtant, je souhaitais l’attirer à moi de mes propres mains afin de que nous puissions nous nourrir de l’espoir qu’engendrerait cette union aussi ardente qu’éphémère. Mais par simple désir, immodéré et incontrit, étais-je vraiment près à la laisser se faire du mal? Mes paupières, alors, se mirent à papillonner, ma conscience noyant brusquement la flamme qui brûlait dans mon bas ventre. La seconde suivante, avant qu’elle ne puisse pénétrer plus profondément encore dans mon espace personnel, je décalais mon visage sur la gauche, baissant mon regard. À moi de décider, avait-elle mentionné. Ses mots, à présent, hurlaient dans mes tympans.

« … Ce n’est pas à toi de le rendre », me justifiais-je simplement.

Au fond de ses yeux, je captais aisément la disparition de son étincelle. Mais doucement, je tendis mes bras dans sa direction, son corps soudainement tiré jusqu’au mien dans une étreinte immuable.

« Je ne te laisserais pas te faire du mal, encore moins te laisser seule comme ça, chuchotais-je au creux de son oreille tout en la serrant plus fermement au creux de mes bras. Suis-moi. »

J’avais décidé, la libérant du même fait. Mes phalanges dévalèrent la longueur de son bras, s’accrochant doucement à sa main. À l’image de deux enfants perdus à travers les bois, je la guidais sur la courte distance qui nous séparait de sa roulotte, ouvrant le battant de la porte afin de nous engouffrer dans la chaleur de l’habitation.

« Hum… Assis-toi là-bas et attends-moi. »

Je lui indiquais le petit divan non loin de la table à manger sur lequel, bien des semaines plus tôt, elle nous avait accueilli, Léto et moi, à un petit-déjeuner improvisé. La laissant s’installer à son aise – avec ses interrogations peut-être – je m’appliquais plutôt à retirer mon manteau de mes épaules pour l’accrocher à l’entrée, cherchant des yeux un bout de tissus qui pourrait servir à mon dessein. Cependant, n’apercevant ce qui me fallait, je choisis de me rabattre sur ce que j’avais de plus près : d’un coup sec, mes ongles s’ancrèrent à l’une des manches de mon costume, y arrachant un simple et long morceau. Voyant la fabrique reposer dans ma paume, un sourire se mit à chatouiller le coin de mes lèvres, mon pas s’engageant de quelques enjambées pour rejoindre la Bleue. Lui présentant brièvement le tissu, je finis par l’entourer autour de mes yeux, attachant solidement les pans du morceau derrière mon crâne. Peut-être était-ce le moment de lui clarifier mes intentions.

« Je veux te Voir. J’émis une pause, me retournant dans sa direction, les yeux clos, complètement voilés derrière le tissu déchiré. Aärk kjülialsh byulvok ët Karäna uu. (Je veux vraiment te Voir.) »

Démuni de ma vue, je me fiais au reste de mes sens pour me rapprocher de sa position, balayant avec mille précautions mes environs jusqu’à toucher ce que je désirais. De fait, un simple geste de Latone avait suffi, ses mains ayant refermé leur étau autour des miennes, les accompagnant à destination.

« Merci, souriais-je avant de poser un genou au sol, histoire de me poster à même hauteur qu’elle à peu près. Tu me fais confiance, pas vrai? La légère pression qui s’exerça autour de mes doigts me le confirma. Ne bouge pas et laisse-moi te regarder dans ce cas. »

Rapidement, mes mains suivirent l’envergure de ses bras, escaladant précipitamment ses épaules pour finalement s’arrêter au sommet de son crâne. De là débutait mon observation. Ceci était ses cheveux. Je le savais déjà, mais les toucher de la sorte était vraiment une tout autre expérience : ils étaient si épais et longs, leur pointe se perdant ici et là à la surface du siège. Tentant l’expérience en faisant jongler la chevelure entre mon dextre et ma sénestre, je compris rapidement qu’une main seulement se fatiguait à devoir regrouper l’ensemble des mèches dans un poing.

« Les laver doit être un sacré calvaire », m’exclamais-je en baissant légèrement mon faciès là où – je le supposais – se trouvait ses yeux.

Ceux de Léto étaient beaucoup moins épais et moins longs également. Je poursuivis mon examen, m’attardant un certain temps sur le contour et les attributs de son visage. Ses sourcils étaient épais, ses paupières particulièrement molles, cachant une paire d’yeux aussi expressive que les lignes de son faciès. Ses joues étaient plus creuses que celles de Léto, un nez aquilin trônant entre eux, alors que ses oreilles, rondes, sans pointe, se décollaient légèrement. Ceci était son visage, un visage plus élancé qu’ovale, aux traits fermes et fins. Je descendis encore un peu, glissant inévitablement sur la forme de son menton, sur la douceur de sa gorge et la solidité de ses épaules.

« Je m’excuse d’avance, l’avertissais-je tranquillement, ça risque d’être un peu froid. »

Je collais mon nez au creux de sa gorge, inspirant à intervalles réguliers l’odeur de son être, de sa personne; les fragrances de son unicité aux saveurs d’agrumes et de poire. Je les connaissais par cœur, ma mémoire olfactive ayant enregistrée depuis longtemps les nombreuses nuances de son parfum. Pourtant, je respirais son odeur non pas pour la reconnaître au milieu d’une toile monstrueuse d’autres bouquets olfactifs, mais pour me plonger, corps et âme, dans sa présence. Je souhaitais qu’elle m’envahisse, aussi écrasante que les relents de l’alcool qui s’attardaient dans mon esprit. En même temps, mes mains parcouraient avec plus de minutie la forme de ses bras, percevant au toucher la résistance des muscles qui s’étaient développés sous son épiderme. Un sifflement admiratif s’échappa de mon clapet, tel un oiseau chantant les prémices du printemps.

« Pas mal, la complimentais-je. Mais il t’en faudra plus pour prétendre pouvoir me vaincre. »

C’était de la pure provocation, peut-être pour diminuer la nervosité qui faisait trembler mon palpitant; peut-être pour la détendre en raison de cette étude approfondie. Par ailleurs, je le remarquais assez aisément, mais sa peau, bien que ravagée, l’était beaucoup moins que celle de Léto. Si des cicatrices la marquaient bel et bien, comme me le confirmait le bout de mes phalanges en explorant les galbes de sa silhouette, son tableau de trophées n’était en rien comparable à celui de ma femme et son corps ne possédait pas le gabarit colossal avec lequel il était aisé de reconnaître la Souriante. Les réflexions s’accumulaient ainsi à l’intérieur de mon esprit, les comparaisons s’additionnant entre la Chamane et l’ancien Esprit, comme pour trier l’information que je récoltais à chaque caresse, à chaque palpation. Une avait ceci que l’autre n’avait pas; les deux possédaient cela, mais au toucher, ça n’avait pas les mêmes dimensions ou ne se situait pas au même endroit. À ce constat, je souris.

« Comment as-tu eu cette blessure? Posais-je à la Bleue tout en effleurant la cicatrice en question, une vilaine taillade qui barrait le côté droit de son ventre, sous son pyjama. Et celle-ci? »

J’avais décalé ma main pour toucher son poignet. J’écoutais ses réponses avec attention, m’imprégnant de son histoire par la même occasion. Aveugle, c’était si évident, si flagrant, et malgré tout ça, comment se faisait-il qu’en la regardant avec une vision aussi aiguisée que celle de mes yeux, je n’arrivais pas à voir au-delà du spectre de Léto? Étais-je simplement attiré par leurs attributs physiques? J’suis une ordure en réalité? Sous le bandeau improvisé, la pression que j’exerçais sur mes yeux fût multipliée. La Voir au-delà des yeux, tel était mon intention actuellement, et peut-être qu’à partir de cette base, serais-je en mesure de la distinguer au-delà du physique et du matériel. Enfin, la pointe de mes articulations remonta son buste, effleurant sa gorge au passage jusqu’à atteindre la hauteur de sa mâchoire. Mes jointures la caressèrent un instant, légères et éphémères, débordant sur la peau de ses joues : elles étaient un peu froides, en raison du climat que nous avions abandonné derrière la porte, mais je percevais une chaleur hasardeuse courir sous son épiderme. De nouveau, un sourire fleurit à la commissure de mes lèvres, l’apex de mes doigts pinçant gentiment son profil d’un geste espiègle. Je sentis un mouvement de recul, une réaction instinctive. Cependant, ma main recouvrit le contact de nos peaux presque aussitôt et si elle avait pu s’attarder encore un peu contre celle-ci, afin de s’amuser à façonner quelques mimiques ridicules à son visage, elle décala pourtant mes doigts un peu plus bas. Ces derniers, comme un voile, finirent par frôler la courbe de ses lèvres. Sans m’arrêter, ils continuèrent de les toucher avec délicatesse, une infinie tendresse.

« Latone Kirzor… »

Ceci était ses lèvres. Et je me redressais légèrement pour les emprisonner dans un baiser, la pointe de mon nez effleurant son visage, distraitement. Le présent ne dura qu’une poignée de secondes à peine, le temps que ces quelques mots brisent notre caresse pour traverser le bout de mes lèvres :

« Latone Kirzor », réitérais-je d’une voix grave, repartant à la conquête de sa bouche, mon corps réduisant la distance qui nous suspendait l’un à l’autre.

Elle était Latone Kirzor. Elle était Latone Kirzor. Non, je n’avais pas pu la regarder et lui dire qu’elle n’était pas différente de la Sùlfr; non, je n’avais pu lui affirmer que notre danse, sous la chute des flocons, ne nous appartenait pas. Léto n’avait rien à voir avec tout ça et pourtant, son existence me semblait si omniprésente. Et j’avais peur, peur de revoir en mon amie un fragment de la Souriante; peur que ce que je ressentais pour elle n’était que l’altération distordue de mes sentiments pour Léto. Une simple et cruelle compensation. Cette réflexion fit naître un frisson désagréable le long de ma colonne vertébrale. Je détestais cette impression. Je détestais penser à ça. Pourquoi devais-je ramener Léto dans ces affaires, dans nos affaires? Pourquoi, à chaque fois, je ne pouvais pas me contenter de Latone et simplement d’elle? Étais-je stupide? Égoïste? Simplement pervers et diabolique? Je veux te Voir, songeais-je en posant mon Troisième Œil à la surface du sien, mes yeux restant clos. Cette conviction, je la répéterais encore et encore, si nécessaire. Je n’agissais pas par pitié et charité, je n’agissais pas par cruauté. Du moins, c’est ce que j’espérais, la réflexion se faisant engloutir par la vague émotionnelle qui me chavirait. J’avais décidé de le faire pour nous deux. J’avais décidé d’ouvrir les Yeux. Grâce, Ætheri, faîtes que j’ouvre les Yeux, pour que cesse définitivement cette boucle atroce. Au creux de mon esprit, je perdais le contrôle, balayé d’un côté et de l’autre, entre mes convictions et mes doutes; entre mes frayeurs et mes espoirs. Et au sein de cette tempête, il y avait moi, pressant plus profondément mes lippes aux siennes.


1 858 mots | Post VII

Mot à rajouter à l’Arshalà :
- Karäna uu : il s’agit d’une expression employée chez les Orishas pour exprimer un besoin de « voir » l’autre au-delà des yeux. (Je trouverais une meilleure définition plus tard xD)





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Ven 24 Sep 2021, 16:36





L'incompréhension l'avait traversée de bout en bout, à juste titre. Malgré son essence, malgré ce sang qui coulait dans ses veines, malgré ces attributs qui définissaient son appartenance, Latone ne se sentait point assez proche de l'Orisha qu'elle incarnait. Tant de notions, de concepts, mais surtout de sentiments lui échappaient encore. Honnêtement, elle faisait d'incroyables efforts, des exercices en quête de Soi, nouer avec ce monde qui était à présent le sien. Elle aurait pu redevenir Alfar, même finir Lyrienne, et pourquoi pas Fae tant qu'on y était, cela aurait été du pareil au même. Toutefois, ce qui la poussait tout autant à se découvrir, à s'agripper fermement aux chaînes de la Vie, c'était d'être comme Miles. Inconsciemment, petit à petit, son attention ne se focalisait plus sur son alter ego naturelle, mais sur le Molosse du Voile Blanc. Cela lui semblait étrange de se rendre compte de ce détail fondamental : aujourd'hui, Latone se découvrait bien plus proche de Miles que de Léto, alors qu'en tant que Hozro, l'inverse s'avérait évident. Sur ce divan, elle était telle une gamine, perdue, curieuse, scotchée par les moindres faits et gestes du Köerta. Elle ne pouvait que recroqueviller ses jambes contre elles et observer. L'admirer. Instinctivement, elle se mordit la lèvre lorsqu'il arracha sa manche, le bout de tissu lui évoquant les liens colorés qui tapissèrent leur songe commun. C'était comme une porte ouverte vers ce monde qu'elle appréciait, cette alternative où Latone se complaisait sans vergogne. Au-delà de la symbolique, les intentions de son invité la tiraillaient. C'était à la fois une leçon et une découverte. Ainsi, la Bleue se montrait très attentive, diamétralement différente de son humeur ordinaire. Ses prunelles s'arrondirent lorsque le fameux tissu lui servit à tout bonnement s'aveugler. Qu'est-ce que cela pouvait bien dire ? Elle ne comprenait pas bien le lien, même si son imagination papillonnait au gré de son cœur, au galop depuis leurs caresses, cette proximité. Cette soirée en elle-même la rendait ivre, comme si elle plongeait dans le monde onirique tout en restant éveillée. C'était comme perdre le contrôle pour le meilleur.

Me Voir… ? Latone ne pouvait que rester lèvres scellées. En tant qu'Orisha, la connotation du mot la faisait muer en une notion toute particulière. Elle l'avait déjà en partie compris le soir de sa renaissance, alors que son souffle s'apaisa sur ces mots. La Voir… La Bleue était trop novice pour envisager une solution, un moyen de montrer à son confrère ce qu'elle était vraiment, ce qu'elle valait. Entre ses mains expertes, elle était si sage. Plus que par pure détresse, la Kirzor n'attendait qu'une réponse définitive de sa part. Voudra-t-il se faire du mal avec elle ? Goûtera-t-il davantage à son poison ? Toutes ces questions, de surcroît avec la situation actuelle, la taraudaient. Son corps réagissait alors à la place de son esprit tiraillé, agrippant les mains de l'homme dès l'occasion présentée. Évidemment qu'elle lui faisait confiance, sinon ils n'en seraient même pas là. Elle déglutit, totalement désemparée par cette expérience hors de son commun, pas moins curieuse de la suite. À l'intérieur de la roulotte, au sein de ce havre de paix, Latone fut assaillie d'une sensibilité plus puissante. Il l'avait déjà enlacée, ils s'étaient déjà touchés plus que de raison, mais l'examen tactile de Miles lui provoqua quelques frissons, tels les arcs électriques qu'ils s'échangeassent. N'était-ce pas la première fois qu'il lui touchait les cheveux de la sorte ? Elle sourit, expirant un ricanement tu, son regard s'évada une poignée de secondes. Cette crinière bleue nuitée représentait une épreuve matinale, quotidienne. Malgré tout : elle aimait ça. Elle aimait simplement se poser et imaginer mille façons de les dompter, puis de les décorer avec quelques touches Faeriques. En ce sens, Clo s'avérait être une incroyable virtuose. Miles n'arrivera pas à lui arracher sa Voix aussi facilement, car Latone s'était promise de se taire, de profiter de ce moment privilégié qu'ils se partageaient ; dans le même temps, elle se disait qu'il avait besoin de toute la concentration possible. Une erreur et peut-être que tout serait terminé. Arrivée aussi loin, Latone ne pourrait se résoudre à accepter la défaite. Retenant un souffle, Miles amena son toucher plus en profondeur. Elle ne le quitta pas des yeux, comme résolue à plonger dans son regard, bien au-delà que ce que tout textile serait capable de masquer. Elle releva le menton, un frisson supplémentaire. Il l'emprisonnait dans une sorte de transe, le Temps semblant se distordre autour d'elle ; ou bien son ivresse ternissait sa perception du moment.

" Cette blessure… Répéta-t-elle, un brin ahurie. Le cyan et le violacé s'attardèrent sur ladite affliction. C'est quand nous avons traqué les Larmes du Tonnerre, au Nord de la chaîne montagneuse. Il y avait un sacré dénivelé à notre désavantage, j'ai failli me prendre une flèche. Son sourire était inconstant. Failli. Ce qui était suffisant pour marquer le corps. Quant à la seconde blessure, elle se fit muette longtemps. … Couteau de cuisine. " Beaucoup moins épique.

Cet interlude eut le loisir de la détendre. Elle ne savait pas s'il le faisait exprès, mais elle ressentait une extrême bienveillance de sa part. Chaque nouveau toucher lui fit peu à peu prendre conscience de l'utilité de cette étape dans leur relation. Latone comprenait pourquoi elle s'attachait à cet imbécile, capable de lui insuffler le Souffle de la Vie. Enfin, les habitudes eurent la vie dure et ils se chamaillèrent, brefs, avant que ses doigts effleurassent la toxicité de sa bouche. Elle était prête, elle voulait qu'il la Voie. Elle frissonna à son appel, elle trembla lors du fugace baiser. La jeune femme ferma les yeux, son Troisième Œil endormi, proche de ce précipice sans fin, une chute si longue et libératrice. Elle était Latone Kirzor.

Ce fut son tour de le Voir. Entraînée dans la descente, sa main remonta jusqu'à la tignasse ivoirine et ses doigts s'y enfouirent, comme pour raffermir leur mutuelle possession, elle-même pour cueillir l'Orisha dans ses bras. Latone se fit d'autant plus violence pour se prêter au jeu, les mimiques de son visage jonglant entre félicité et véhémence. Le goût de ses lèvres fut bien plus addictif que les poires divines. Sans rompre la bacchanale, sa poigne glissa des cheveux du Köerta, afin d'explorer à son tour ses plus infimes traits. Une importante découverte vint alors frapper son esprit : Latone – la Furie Ambulante, la Colérique, l'Intraitable – faisait preuve de délicatesse. En frôlant les fissures de cette enveloppe craquelée, la Bleue se retrouva hésitante. Même si son corps brûlait de désir au rythme des baisers, sa main n'osait pas appuyer sur de telles marques. Pourtant, elle se le répétait encore et encore à chaque nouvelle embrassade que c'était une nécessité. Elle devait le Voir. D'une timidité maladive, l'Orisha affleura les cicatrices engendrées par les mutations, elle s'imprégnant de cette enveloppe charnelle pour la retracer par cœur. Son image mentale se précisa, alors que leurs Voix s'entremêlaient autant que leurs lippes.

" Miles… Lukhas… Köerta… ! "

La Marcheuse ne prit conscience de son intrusion sous le costume que trop tard, tant emballée par cette nouvelle danse rien qu'à eux deux. Regarde-moi. Dis mon nom. Encore. Elle voulait arracher ce bandeau, comme pour confirmer leur Vision.

À son tour, lui aussi explorait sa carrure. Qu'était-ce qu'un pyjama dans une telle configuration ? Un obstacle futile. Pour autant, Latone se sentit bien embêtée par son inexpérience. Devait-elle se dévoiler plus, par elle-même, même s'il prenait les devants ? Elle ne s'était pas préparée à une telle tournure des événements, mais… J'ai peur. Une évidence soufflée face à toutes les questions. Pour toute réponse à cet écho échappé, son subconscient matraqua ses barrières. Non, le poids de son regard et ses mains raccrochés à lui démontraient sa résolution. Car avoir peur, ce n'était pas une preuve de faiblesse mais de force. Latone voulait l'Entendre, elle voulait le Voir. Son propre toucher se fit plus pressant, quitte à faire mal pour grapiller le plaisir. Le Malsag s'apparentait à une arabesque sous ses paumes, prête à décrire le moindre de ses reliefs. La Hurabis avait beau vouloir prendre l'ascendance, ses muscles ne suffisaient effectivement pas pour le vaincre : lorsqu'elle poussait, c'était elle qui se retrouvait aplatie contre le divan. Prise en étau par la volonté de l'Orisha, Latone succomba. Son haut fut écarté, d'abord par lui, puis par elle. Ouvrir les Yeux s'avérait bien plus contraignant qu'imaginer. Pourtant, la novice parvint à se cantonner à sa place. Elle soupira entre deux baisers alors qu'il couvrit d'autant plus son cou, son épaule, que son emprise put dessiner les formes de son buste. Elle tira sur sa cravate pour la retirer, avec plus de mal que de bien. En un rien de temps, la Bleue se retrouva sous lui, prisonnière sur ce canapé. Il y eut comme une accalmie, très courte, où Latone rouvrit les paupières par réflexe. En tant qu'Orisha, une telle mécanique se montrait dispensable. Néanmoins, elle eut besoin de l'admirer, tout près d'elle, sur son territoire, rien que tous les deux, loin de tout, de tous. Sa nervosité se divulguait davantage, depuis plusieurs secondes auparavant pour être exact. Il y avait toujours ce souci, toujours cette peur de… Latone se sentit comme assaillie et le mal reprenait le dessus. Bientôt, lutter la lassa, jusqu'au virage fatidique.

" S… Stop… Expira-t-elle au détour d'un baiser ; le dernier. Sa main s'était posée sur son torse dans le but de le repousser, mais elle se contentait bien de juste décrire une minime distance. Elle tenta de soutenir son regard, tout en reprenant contrôle sur sa respiration. Je… Je ne me sens pas prête… Bien sûr que si ; c'était malgré tout trop dur. Elle ne désirait que la perfection. Doucement, elle retira le tissu qui couvrait ses iris vermeilles. Je crois que… Son sourire fut tout aussi nerveux. C'est ma… première… Son faciès s'empourpra un peu plus. Même si… Quand j'étais Lolaha, peut-être que… Elle baissa les yeux, l'ignorance l'irritant plus qu'autre chose. Sa main, tout comme son attention, remonta jusqu'à la joue du Köerta. Enfin, je veux qu'on… prenne notre temps. Elle le caressa distraitement. Désolée. Souriante, la juvénile déposa une douce offrande sur la joue opposée, pour finir par une promesse murmurée, signée. Une autre fois. " Bien que le désir se fût fait ardent, le surmonter était une tout autre histoire.

L'objectif principal s'était au moins réalisé : il avait dit son nom, il avait dissocié les entités hantant son esprit. À cela, Latone lui en fut très reconnaissante. Elle se redressa ; en réalité, elle-même plutôt déçue de ne pas ressentir l'envie ou la nécessité, elle ignorait. Il manquait quelque chose, alors que l'étincelle s'était faite naturellement. Peut-être était-ce, contre toute attente, une mauvaise confiance en soi ? Songeuse, la Bleue reboutonna son haut, embarrassée face à un Albinos encore enhardi. L'ambiance venait vraiment de se refroidir. Il fallait remédier à ça. Fidèle à elle-même, elle fonça !

" Si ça se trouve, tu aurais fini avec des toiles d'araignée sur la langue. Très mauvaise idée. Je vais oublier ce que je viens de dire en allant boire un verre. " Elle se précipita dans la cuisine, toute pivoine.

Faisant fi de la réaction de Miles, l'hôte du modeste lieu s'accorda une bonne lampée de jus pour se ressourcer. Cette soirée enchaînait les péripéties à un degré inimaginable. Un soupire d'aise plus tard et elle jeta un œil à l'extérieur. Il se faisait si tard.

" Reste pour la nuit. Son ton pourrait presque insistant, il pouvait le deviner avec une simple œillade sur ses prunelles déterminées. C'est assez grand pour deux, même si on est des perches. Et euh… demain, je te ferai un bon petit-déjeuner. Tu as l'air d'avoir bien apprécié le gâteau. " Commenta-t-elle, amusée par le moule si peu rempli sur le plan de travail.

Séduite par sa propre idée, la Kirzor s'empressa d'arranger le terrain pour disposer les tas de fourrures. La composition de ce lit improvisé fut si étudiée qu'elle avait fini par trouver le nombre idéal de couches, comment les imbriquer et surtout comment se blottir dans l'empilement. Une fois le travail terminé, Latone l'invita à la rejoindre. Le four encore chaud à proximité les bercera une bonne partie de la nuit. Installée, elle fixa le plafond ; des lianes fleuries avaient été dressé par la Fae du jardin.

" Tu sais ce qu'il serait bien à ce plafond ? Elle laissa planer un silence de réflexion. Une ouverture. Juste pour regarder les étoiles et s'endormir sous leur ballet. Même si elle n'avait plus besoin de lever les yeux au ciel pour admirer la sienne. Instinctivement, elle chercha sa main pour l'emprisonner et capter son attention. Merci Miles… Tu es… vraiment… Une révélation. Elle s'affaissa contre la fourrure rembourrée, toujours à l'observer, à suivre les traits de son visage qu'elle connaissait maintenant par cœur. Je voudrais te voir tous les jours… " Elle l'écouterait encore et encore, jusqu'au bout, avant de s'évader dans les bras d'Harabella.


2297 mots ~



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