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 [Q] - Autour de la barre | Miles

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Miles Köerta
~ Orisha ~ Niveau III ~

~ Orisha ~ Niveau III ~
◈ Parchemins usagés : 1157
◈ YinYanisé(e) le : 20/09/2014
◈ Activité : Traqueur [Corvus Æris] | Marcheur
Miles Köerta
Dim 10 Oct 2021, 06:39



… Touche-les. Ne t’inquiète pas et vas-y. Ces cicatrices ne font plus aussi mal qu’autrefois et elles font partie de moi. Même sans la voir, j’étais en mesure de percevoir son hésitation au-dessus des fissures qui excavaient ma peau. Ses doigts étaient timides, distants et indécis. Elle les effleurait sans oser les palper, tout en ayant tendance à décaler ses mains sur une surface un peu plus lisse, moins ravagée. Dès qu’elle croisait une écorchure, j’avais l’impression de goûter à son embarras, un étrange scrupule la suspendant, incertaine, à la frontière qui séparait encore nos corps. Pourtant, je restais parfaitement immobile au creux de la tendresse de son étreinte, n’attendant que sa caresse, aussi hasardeuse qu’elle soit. Ainsi, je ne tentais pas de formuler de nouvelle incitation à son endroit, languissant à sa prochaine action, dans l’attente qu’elle franchisse enfin la lisière qu’elle n’osait gravir et conquérir. Face à face, nous ne nous voyions pas, mais les palpitations qui faisaient trembler l’atmosphère étaient suffisamment vibrantes et électriques pour que nous puissions distinguer nos états d’âme sans vision et sans Bruit, une condition plutôt particulière, ici, au cœur de Ciel-Ouvert, qui se berçait jour et nuit de la Voix et des Sons de sa population. Pourtant, présentement, nous nous contentions simplement de laisser parler nos corps. Notre odorat s’imprégnait et se soûlait du parfum de l’autre, tandis que nos bouches se gavaient mutuellement de la saveur de nos lèvres et du reste de nos chairs. Voyageuses insatiables, nos phalanges exploraient les courbes et irrégularités de nos réceptacles, espérant calquer dans nos esprits, reconnaître au toucher, les contrés qu’elles traçaient dans leur sillage. C’est pourquoi j’attendais qu’elle me trace, qu’elle me dessine au cœur de son subconscient avec mes atouts et imperfections. Ces blessures faisaient partie intégrante de ma personne, de mon identité. Elles racontaient mon histoire et définissaient qui j’avais été et qui j’étais aujourd’hui, comme un tableau qui façonne le portrait de son peintre dans l’explosion des couleurs, dans le tracé de ses pinceaux.

Je me rapprochais de son faciès afin d’unir le bout de nos nez. En même temps, je cueillis sa main, que je glissais tranquillement jusqu’à hauteur de mon visage. Là, à cet endroit, je déposais ses doigts à la surface de mon épiderme, contre l’une de mes afflictions. Elles étaient là et faisaient partie de moi : je lui répéterais ces paroles un million de fois s’il le fallait, la pensée m’encourageant à frotter ma joue dans sa paume avec plus d’empressement. Je devais ressembler à un chiot en manque d’affection, mais je m’en moquais éperdument. Je voulais simplement qu’elle… me Voit, n’est-ce pas? Comme elle souhaitait que je puisse la Voir pour qui elle était, au-delà de l’ombre qui la recouvrait et la supplantait. Si, au-dessus de nos têtes, les yeux de Léto – ses Esprits, ses amis de l’Au-Delà – pouvaient observer, sûrement que l’éclat de la Hurabis saurait les aveugler, et moi également : elle saurait écarter l’obscurité qui la dissimulait.

Enhardie par mes actions, peut-être convaincue par sa propre conviction, dans tous les cas, l’assurance de la Bleue se raffermit et je pus sentir la pression de ses doigts sur les difformités de mon anatomie. Elle l’explorait désormais avec un aplomb renouvelé, une curiosité frivole et admirative, tout en déployant une douceur étrangement surprenante, mais non moins appréciée, dès qu’elle incitait son toucher à se souvenir de la carrure qu’elle retraçait. À ce constat, un rictus se devina au coin de ma bouche, une nervosité poignante et agitée l’assujettissant pourtant de ses légers tremblements. Toutefois, pour tout masquer, je me permis de lui voler un nouveau baiser, essoufflant prestement le nom qu’elle s’était mise à expirer. La chaleur de son souffle me fit frissonner, ma poigne autour de son enveloppe charnelle se refermant avec plus de solidité. Lat– Si mon esprit s’était automatiquement délivré, je parvins à freiner mes pensées juste à temps, secouant distraitement mon visage. Il faudra me l’arracher des lèvres, cette fois, Kaosh mhel Keajiak (Fille des Chants), la taquinais-je malgré la puissante injonction qui continuait de rugir entre mes deux oreilles. Je ne savais pas ce qui se passait, mais à certains moments, c’était comme si toute envie de lui rendre la vie plus difficile ne me traversait même plus l’esprit. Ce n’était pas drôle. J’adorais la voir rager pourtant, et m’imaginer quelle espèce de bêtises elle serait prête à réaliser simplement pour me retirer quelques mots de la bouche me rendait diablement curieux… Oui, voilà. C’était à ça qu’elle ressemblait, notre relation. C’est ainsi que nous avions toujours été, elle et moi, mais à présent, je n’arrêtais pas de réfléchir et de me questionner, étranglé par des inquiétudes qui m’effrayaient et que j’essayais de voiler… de faire taire peut-être… Parce qu’en franchissant ce pas, ne venais-je pas simplement de m’abandonner à ces instincts que j’avais tenté de refouler, quelques minutes plus tôt, à l’extérieur de la roulotte? Réussirais-je vraiment à la Voir? Réussirais-je à la dessiner de sorte que puisse s’effacer, petit à petit, les traces de Léto? Réussirais-je à distinguer dans cette tempête la silhouette de cette jeune femme pétillante qui ne cherchait que sa place dans ce monde? Je ne souhaitais pas la blesser ou lui faire du mal. De cela, j’en étais certain. Pourtant, encore maintenant, n’étais-je pas celui qui suspendait sa main au-dessus de ces cicatrices qui la rendaient si unique? Qu’elles soient les marques d’une guerre ou celles d’une malchance moins épique, n’étais-je pas celui qui hésitais désormais?

Je déglutis discrètement, mes réflexions se faisant cahoter par le hurlement confus de mes sentiments. Et tout ce que je parvins à faire fût de forcer mon chemin à travers la tempête. Je voulais la Voir. Sincèrement. Et je me mis à la surplomber de ma taille, à l’entraver de mon poids, l’entraînant dans ma descente, ne lui laissant le droit de parole. Je voulais vraiment la Voir. Et mes caresses se firent plus insistantes, mes baisers plus langoureux, mon toucher plus téméraire et audacieux. Je voulais simplement la Voir. Alors elle n’avait pas besoin d’avoir peur. Elle n’avait pas besoin d’avoir peur de moi ou… ou de quoi que ce soit. Parce que j’étais là pour elle, et serais auprès d’elle pour admirer son éclat et sa lumière jusqu’à ce que l’un de nous s’éteigne. Alors elle n’avait pas à s’en faire, parce que je saurais la Voir au-delà de la présence qui l’éclipsait actuellement. Elle était Latone Kirzor après tout. Il ne suffirait que d’un dernier baiser pour que je puisse la Voir… … Ou d’une nouvelle bouffée de son parfum… … … Peut-être me faudrait-il la mordre pour la goûter pleinement? Griffer sa chair pour y découvrir une nouvelle peau et la mettre à n–

« S… Stop… »

Violemment, tout mon corps s’arrêta, en effet, répondant à l’ordre.

« S-Stop? »

J’avais l’impression de m’écraser. Mon cœur, brutalement, cessa toute activité. Ma respiration galopait au fond de ma gorge, ma salive luttant à l’entrée de mon pharynx pour le traverser. Je l’écoutais parler sans esquisser le moindre mouvement, réagissant à peine lorsque le premier pan de mon bandeau me fut retiré. Cette fois, j’ouvris mes paupières en grand, braquant presque instantanément les flammes de mes prunelles dans la tendresse et l’incertitude des siennes. Encore, je déglutis, incapable de retirer cette sensation crevante de sècheresse au fond de ma gorge. Qu’est-ce que… j’étais en train de lui faire? La réalisation me coupa la respiration, fit battre follement les cils de mes paupières, et le baiser qui effleura ma joue n’en fût que plus brûlant à la surface de ma peau. À quoi pensais-je? Miles, Miles, bordel. Mais qu’est-ce qui te prend?!

« Ce n’est rien », murmurais-je après un long moment de silence, continuant de la fixer, énigmatique.

Puis, dans un réflexe, je me permis d’appuyer plus fermement mon profil dans la paume de sa main, refermant mes paupières par-dessus mes yeux. Calme-toi. Il fallait que tu te calmes.

« Tu as raison. Je… »

Mais la suite se noya bien vite, laissant plutôt la place à une longue respiration. Inspire et expire. Inspire et expire. Je ne devais pas forcer les choses; je ne devais pas forcer mon chemin à travers la tempête. Prendre son temps. Prendre notre temps… Calme-toi. Il fallait que tu te calmes. Il fallait que je réorganise mes idées, que je refroidisse mes pensées. Puis, lentement, je me décalais afin de lui laisser l’espace nécessaire pour se lever. Dans une glisse discrète, je me renfonçais dans le coin opposé du divan. Pendant qu’elle s’afférait à reboutonner son pyjama, je descendis complètement le bandeau de mon visage, celui-ci pendant mollement à mon cou. Le silence qui nous englobait était plus pesant que le scrupule qui m’enchaînait, mais à un certain point, l’effort de Latone parvint à m’arracher un sourire, voire un éclat de rire. La pression et la nervosité, la confusion et l’angoisse s’évaporèrent comme eau au soleil. Je me mis à rire et à rire sans parvenir à m’arrêter, essuyant quelques perles qui s’accrochaient à mes cils une fois l’hilarité tranquillement apaisée.

« Parfois, le silence est d’or, c’est un fait. »

Toutefois, Latone fit comme si de rien n’était, buvant son embarras à grandes gorgées de jus de poire. Une envie irrésistible de m’amuser de son état chatouilla le bout de ma langue, ne serait-ce que pour la voir s’étouffer les deux narines dans son verre. Mais à peine la plaisanterie traversa mon esprit qu’elle se fit balayer par l’agitation qui m’emprisonnait.

« … Je pense que c’est mon signal de départ pour ce so– Mais ma voix fût, cette fois, immergée par celle de la Hurabis. Ce n’est p… »

… pas nécessaire de faire tout ça pour moi. Cependant, les mots peinèrent à se faire entendre, puis finalement, à sortir complètement. Ils restèrent coincés au fond de mon palais jusqu’à ce que j’abandonne tout effort, mon regard courant, volontiers, sur les lattes du plancher. Je ne le mérite pas. Je ne pensais pas que ce soit une bonne idée. Pourtant, il avait suffi que je croise de nouveau l’étincelle qui brillait dans ses yeux pour que je me paralyse. Et avant que je ne le réalise, je compris que je n’avais pas la force de lui résister actuellement, pas après tout ce qui était survenu ce soir.

« C’est vrai que ce serait pas mal. On aurait peut-être même la chance de voir en avant-première une pluie d’étoiles filantes… Tu sais que, lors d’une pluie d’étoiles filantes, il est de coutume d’adresser un vœu aux Ætheri? On prie, très, très, très fort et au cœur du défilé, il se pourrait alors qu’une étoile dorée traverse le ciel, comme ça « Wooooooush! » Mimant la course du corps céleste avec mon bras, je poursuivis : Voir cette étoile serait signe de grande fortune, en plus d’assurer la réalisation de son souhait. Si mes iris s’étaient initialement posées sur le plafond, désormais, elles s’accrochaient aux mires bleutée et lavande de son regard à elle, de la même manière que sa main était venue chercher la mienne. Une révélation? Qu’est-ce que tu veux dire par ça? C’était la première fois que je recevais un compliment de ce genre : c’était adorable. Tu sais ce que ça implique, si tu veux tant me voir à tous les jours comme ça. Posément, je me penchais au-dessus de son oreille, lui glissant d’une voix suave : C’est un Ange qui se voit offrir, pour son anniversaire, un voyage à destination inconnue. Il découvre en arrivant qu’il est à Avalon et du coup, il est Dé-chu. À son expression, un rire dégoulina de ma bouche, alors qu’elle me tournât vivement le dos, exaspérée. Oh allez! Elle était bonne! Je suis sûr que si c’était Léto qui te l’avait raconté, tu serais en train de te plier en quatre au sol! Voyant que ma plaidoirie ne l’atteignit guère, je me repris aussitôt : D’accord, d’accord. Et qu’est-ce que tu penses de celle-ci? À qui donne-t-on les rênes d’une carriole entre un Lyrienn d’Électricité, un Lyrienn de Glace, un Lyrienn de l’Eau et un Lyrienn de Terre? Le Lyrienn de l’Eau, parce qu’il est un bon conducteur! »

En posant l’un de mes doigts sur sa joue, je libérais une petite quantité d’Électricité. Lorsque nos regards se croisèrent, cependant, je lui adressais un sourire, doux et bienveillant.

« Et je continuerai de te Regarder, Latone. »

Peut-être parce qu'elle était ma révélation.


2 046 mots (sans les paroles de Latone + la blague d’Avalon) | Post VIII | Je sais pas trop, mais cette empreinte du Neru a de drôles d’effets sur Miles xD




[Q] - Autour de la barre | Miles - Page 2 Signat16
Merci Léto ♪:
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Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~

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Latone
Sam 06 Nov 2021, 18:18




La matinée se présentait comme douce, le calme reprenant le flambeau de la tempête. Cette roulotte en avait vu de toutes les couleurs avec sa propriétaire actuelle, mais aucun événement n'y avait atteint une telle ampleur. Colères, taquineries, doutes, euphories, tant de stades émotionnels les avaient traversés et secoué la fragile charpente de la caravane. Aussi étonnant que cela puisse paraître, Latone avait réussi à trouver le sommeil, malgré toute l'ivresse qui l'avait animée en compagnie de Miles. Bercée par ses mots, elle ne put qu'échapper une mine complice, et un coup assez mal placé pour le punir de ses moqueries. Les étoiles finiront par prendre le relais ; car elles avaient beau ne pas être visibles pour eux, elles n'en restaient pas moins présentes, mélodieuses. Leur ballet leur offrit une nuit sans encombre, révélatrice selon les dires de la Bleue. Ceci représentait la pure vérité, car ce matin, tout ne sera plus pareil.

À cette heure-ci, seul l'Orisha aux prunelles sanguinolentes demeurait encore dans la roulotte, au beau milieu de l'amoncellement des fourrures, ce lit improvisé par les bons soins de l'autre Orisha. Cette dernière s'était effectivement éclipsée plus tôt, non pas sans avoir laisser une note à l'écriture brouillonne, bourrée de fautes de syntaxe, stipulant qu'elle était simplement partie cueillir des baies et reviendrait bientôt. Presque aussitôt le message décrypté, avec grand mal, que la fameuse Aäsho annonça son retour comme jamais auparavant.

" MILES KÖERTA ! "

Sa Voix résonna aussi forte qu'un Tonohr, l'intensité du cri entraîna quelques affaires dans leur chute à l'intérieur de la roulotte. Ce qui était sûr, c'était que cet appel semblait gorgé de rage. Il suffisait alors au dénommé de franchir la porte donnant sur la cour arrière pour retrouver la Bleue, emmitouflée dans son manteau de la veille et équipée des sacrées lunettes de l'albinos, le tout ramassé sur l'aller. Cette tenue masquait terriblement sa vive colère, sa denture resserrée au point qu'on entendrait presque l'émail grincer. Oui, elle était bien revenue avec un panier de fruits des bois alentours ; mais ce n'était pas tout.

" C'EST QUOI ÇA ?! "

Lorsqu'elle se décala, deux petits êtres singuliers saluèrent le Molosse avec une gaieté sans précédent.

" YOOO ! "

" PAPAAA ! "

~~~

Quelques minutes plus tôt.

Ces verres teintés lui paraissaient bizarres. Tout son environnement se couvrait d'un filtre obscur, quasiment pas pratique dans les zones ombragées de la forêt. Pourtant, elles la protégeaient des puissantes manifestations de Jeriel. Une invention incroyable, à n'en pas douter, mais Latone ne pouvait le nier : elle préférait admirer Miles avec, cela lui donnait un air assez mystique, et séduisant. L'Orisha souffla du nez, une fugace vapeur se formant sur son sillage. Ses pas s'enfonçant dans la neige se montraient aussi lourds que son état d'esprit. Elle ignorait fichtrement quoi faire après… tout ça. Elle savait pertinemment qu'une seule solution subsistait : en parler avec le principal concerné. N'était-ce qu'une ivresse passagère ? Souhaitaient-ils plus ? Latone ne pouvait décemment pas deviner le ressenti du Köerta, d'où cette brève échappatoire pour mûrir ses propres réflexions.

" Et je continuerai de te Regarder, Latone. "

Cette tendresse lui fit autant d'effets que n'importe quelle caresse de sa part. Ici, les mots comptaient tout autant que les actes bienveillants. Sa révélation prenait alors bien plus de sens. De passage vers la rivière, elle profita d'un bref répit pour se laver le visage, son reflet – à peine perceptible du fait des remous aquatiques – laissait transparaître un franc sourire en écho à leur souvenir commun. Avec Miles, elle pensait se fondre dans la peau de Lolaha lorsque Gandr apparaissant les Hihtyx ; les sensations et sentiments portant ces rémanences paraissaient tout aussi semblables. Pour autant, elle ne comprenait pas totalement la signification de cette alchimie, que ce soit ici, à Ciel-Ouvert, ou au loin, à Linos…

Un bruissement. Dans ces bois, un tel écho ne pourrait être que futile, mais les sens de Latone s'alarmaient. Puisque son corps voulait réagir ainsi, elle capta qu'un probable danger était réel. Elle n'était présentement pas armée, mais cela ne la rendait pas moins capable de se défendre : tant que la Voix demeurait, les Marcheurs savaient se sortir de bien de situations. Elle se retourna vers la source, toujours son panier en main. Si ses sens ne la trompaient pas, ce devait être une branche qui avait craquelé sous le poids d'un animal ; ou d'un homme. Guère intimidée, l'Orisha se rapprocha des quelques arbres plus loin et, à sa grande surprise, une étrange forme bleutée dépassa d'un tronc. Croyant à un Kangela au départ, la Kirzor se rendit compte de son erreur lorsque son regard se plongea dans ces grands yeux vairons. Bleu éclatant, rouge vermeil.

" Qu'est-ce que tu fais là ? " La tension de ses muscles se relâchèrent à cette singulière rencontre.

La petite fille joignit ses mimines dans le dos, alors qu'elle s'extirpa de sa modeste cachette, prise la main dans le sac. Elle ne répondit pas d'emblée, ce qui perturba Latone sur le coup. Entre autres, car cette gamine émanait d'une atypie remarquable. Rien que par sa tenue : une sorte de costume complet, comme un pyjama, qui décrivait les traits d'une redoutable créature marine ; un requin. Et ces yeux, ce visage, la Marcheuse avait l'agaçante impression de la connaître, alors qu'une telle entité devrait être ancrée dans sa mémoire. Elle lui rappela quelqu'un, c'était on ne peut plus certain. Et au-delà de tout ça, son comportement : l'inconnue ferma les yeux et se balança sur place, un petit rire témoignant de son amusement. À propos de quoi… ? Puis un nouveau bruit fit pivoter Latone et elle se confronta à un autre enfant, encore aux iris disparates. Vert émeraude, violet améthyste.

" Mai— ?! " Embrouillée par cette mascarade, la Bleue demeura figée face au garçon – du même âge que la fille – qui esquissait une position furtive.

" AH ! " Les yeux du garçon s'illuminèrent, fou de joie, et il se jeta sur elle la tête la première.

Latone encaissa la charge malgré elle, davantage déboussolée par la bizarrerie des événements que par l'ingéniosité du garnement. Elle recula, tout de même surprise par sa force pour son jeune âge. Visiblement satisfait, il se mit à rire, fier comme un paon. Même par ce froid, il laissait le haut de son corps apparent – peut-être bien pour exhiber ses muscles – simplement couvert par une épaisse fourrure de sanglier. Qui que furent ces enfants, ils devaient être de grands amoureux des bestioles. D'ailleurs, la plus petite rejoignit le rieur, aussi hilare que lui.

" Par Ezechyel, c'est quoi votre problème ?! " Elle se massa la côte touchée, irritée qu'il ait renversé sa cueillette.

" On t'a bien eu, mwahaha ! "

" Elle faisait diversion pendant que moi, tel le Sanglier des Temps Anciens, je me faufilai dans ton angle mort pour t'attaquer ! J'ai gagn— Tandis qu'il se tut soudainement, Latone resta bloquée sur le "Sanglier des Temps Anciens". Attends, j'ai… Il se tourna à tour de rôle vers la fille puis l'Orisha, éberlué. La petite, elle, étira petit à petit un puissant ravissement. J'ai... J'AI GAGNÉ ! Les mains sur les hanches, le poitrail bombé. J'AI BATTU MAMAN ! "

" TU AS BATTU MAMAAAN ! "

" … Mam— ? "

Insupportables, ils répétèrent encore et encore cette ode à la victoire, dansant en rond autour de la perdante qui ne comprenait absolument plus rien. Si elle n'était constituée que d'engrenages et de boulons, elle aurait depuis longtemps fini dysfonctionnelle. Ne pouvant qu'être passive face à leur cirque, elle accueillit avec joie la fin de leurs vacarmes.

" Il faut qu'on retourne à la roulotte ! "

" Allons tout lui raconter ! "

Latone papillonna des yeux, alors que les enfants s'engageaient, effectivement, dans la bonne direction. Mais comment pouvait-il connaître son emplacement ? Et d'autant plus son existence ? C'était censé être un lieu secret, abandonné, privatisé par ses bons soins. Mais qui étaient-ils à la fin ?

" H-HÉ, VOUS NE BOUGEZ PLUS ! Pour une fois – enfin – ils l'écoutèrent. Qu'est-ce que vous allez faire à la roulotte ? De qui vous parlez ? "

" Bah, on va rejoindre Papa ! "

" Papa qui est à la roulotte ! "

Il n'y avait que Miles là-bas pourtant.

… Oh non.

~~~

" Espèce de sale petit con ! "

Enragée, autant par ces garnements que par LUI, la Kirzor se précipita en sa direction pour le frapper. Malheureusement, malgré tous ses efforts, la colère rendait ses mouvements beaucoup trop prévisibles, sans parler de la naturelle dextérité de Miles pour s'extirper de la moindre trajectoire de ses poings ou de ses pieds. Elle poursuivit ainsi assez longuement, sur l'ensemble de la cour arrière, tandis que les enfants les applaudissaient et les encourageaient à tour de rôle. Latone espérait profiter de la neige pour le rattraper et le faire trébucher, mais il était trop fort, ce chien ! Alors, une fois de plus battue, l'Orisha cessa sa poursuite et reprit à grandes bouffées son souffle, toute rouge ; de par l'effort, la frénésie, et l'embarras.

" Pou-pourquoi… ces gamins… affirment que… – elle se redressa comme il faut, encore essoufflée – nous sommes leurs parents ?! "

Visiblement peu touchés par l'incompréhension des soi-disant géniteurs, les enfants continuèrent leurs ovations à coup de danses erratiques et de jeux de bouche imitant des instruments. Bruyants, libres, ils semblaient totalement détachés de tout et seraient capables de s'amuser au beau milieu d'un manoir hanté si l'occasion se présentait. En ce sens, cela corrobora davantage leurs dires, car Latone se reconnaissait autant en eux que Miles, le fameux "papa".

" Et plus encore… Elle se rapprocha de lui, point hostile, et darda le duo juvénile. Pourquoi ils nous ressemblent ?! Elle les désigna des deux mains, comme si elle dévoilait un gigantesque cadeau ; apparemment empoisonné. Regarde-les ! "

Ces enfants étaient des Orishas, à n'en point douter. Une petite pierre cernait leur front et mettait en valeur leurs prunelles dissemblables. À ce propos, il était possible de retrouver une ressemblance dans la colorimétrie des iris de leurs parents, de bleu et de rouge. Pour le reste, la fillette revêtait les traits fins de Miles, sa crinière immaculée et négligée arborant quelques mèches célestes. Quant au bambin, il se présentait comme un peu plus grand que sa sœur, et reprenait une carrure aussi affirmée que celle de Latone, sans parler de sa chevelure bleutée, saillante. Ils étaient si comparables.

À leur mention, les petits cessèrent leur brouhaha pour entreprendre des poses théâtrales, synchronisées. Ils aimaient se donner en spectacle et allaient le prouver.

" Je suis le plus grand Traqueur de Ciel-Ouvert. "

" Je suis le plus puissant des requins ! "

" Mais nooon, tu es censée dire que t'es la terrible Dévoreuse ! "

" Ah oui ! " Malgré la faute, ils reprirent leur manège avec énergie.

" Nous… "

" Sommes… "

" LES TERREURS DU VOILE BLANC ! "

Ils pivotèrent sur eux-mêmes et désignèrent leur frangin respectif.

" Elle est Aldis Groa Köerta Kirzor ! "

" Il est Snonven Bhaf Köerta Kirzor ! "

" Qu'on libère les Yacks ! "

" Les jumeaux cassent la barraque ! "

Ils imitèrent un bruit d'explosion, de nouveau hilares et incontrôlables. Aldis poursuivait un chant enfantin et très archaïque, tandis que Snonven continuait la musique rien qu'avec sa bouche, en enfermant celle-ci derrière ses mains.

" Köerta Kirzor… " Émit-elle avec une voix à moitié cassée, à deux doigts de pleurer.

" Habille-toi, Pa', allons chasser ! "

" Y a encore du gâteau, Ma' ? "

Latone désirait mourir à nouveau. Une bonne fois pour toute.

" Milesss… Siffla-t-elle telle une vipère, en se retournant vers le supposé coupable. C'est ta faute ! TU M'AS FAIT DES BÉBÉS PAR LA BOUCHE ! "

Les jumeaux éclatèrent de rire et se roulèrent dans la neige. Si seulement…


1980 mots ~ (sans les paroles de Miles)



By Jil ♪
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Miles Köerta
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Miles Köerta
Dim 21 Nov 2021, 19:22



« MILES KÖERTA! »

Je sursautais violemment au milieu des fourrures sur lesquelles je m’étais installé, à ça de renverser au sol le message qui m’avait été laissé ainsi que le verre que je m’étais servi. Cependant, certains ustensiles n’eurent la même chance, se fracassant dans un éclat bruyant contre le bois du plancher. Si la colère tremblait dans chacune des inflexions de sa Voix, l’apathie, au contraire, s’insinua dans chacune des fibres de mon corps, entraînant la chute, lasse, de mon visage dans le creux entrouvert de mes mains. Plus la résonnance de son cri continuait d’étendre ses échos à l’intérieur de mon esprit, plus mon être essayait d’en amoindrir l’intensité en réduisant la sensibilité de mon ouïe. On était le matin, merde. Pourquoi tu gueules aussi tôt! Ça va pas?! Maugréais-je faiblement dans son esprit. La réplique, cela dit, ne se fit attendre, aussi impérieuse que furieuse entre mes deux oreilles. Tout de suite, mes mains lâchèrent le message et le verre sur la table non loin de là, et se plaquèrent contre mes tempes, tentant de refreiner la puissance de ses cris. D’ACCORD! D’ACCORD! JE SORS! M'époumonais-je à mon tour, piqué à vif. Pas la peine de hurler, bon sang! Qu’est-ce qui se passait? Pourquoi était-elle aussi hystérique? Hier soir, elle n’avait cessé de s’agiter dans son sommeil, des murmures sombres traversant la barrière de ses lèvres. Peut-être avait-elle cauchemardé, et j’avais fini par l’entraver dans mes bras, solidement, espérant que ma présence puisse la réconforter dans le royaume d’Harabella. De fai, si la tension avait perduré dans l’ensemble de son corps, elle avait fini par s’apaiser, par se détendre tranquillement, sa respiration reprenant un rythme régulier et les sursauts de son être se réduisant à quelques spasmes légers. Malgré tous les hauts et les bas de cette soirée, la nuit s’était conclue sur une note quelque peu évasive, confuse et incertaine, mais elle s’était terminée dans une douceur légère et indescriptible.

Alors qu’est-ce qui s’était passé pendant sa balade? Elle se rappelait un truc qui était survenu durant la nuit? Je… Je n’ai pas fait quelque chose de déplacé j’espère… si? Est-ce que je l’avais frappé pendant qu’on dormait? Est-ce que j’avais eu une crise de somnambulisme et serais allé massacrer son jardin? Ouvrant un œil par dépit, je fixais le mur de l’autre côté de la roulotte, distinguant la porte qui menait dans la petite cour du terrain. Tout naturellement, ma vision s’affûta, se renforça, brisant les barrières de la matière pour être en mesure de voir ce qui se tramait dans cet extérieur de froid et de neige. Avec aisance, je reconnus la haute silhouette de Latone. En revanche, elle était flanquée de chaque côté, un peu plus en retrait, par deux petits bonhommes aux visages étrangers… Des enfants? Mais qu’est-ce qui se passe, à la fin? Fatigué de réfléchir, fatigué de chercher des réponses à une situation que je ne comprenais pas le moins du monde, je me levais enfin, traversant toute la longueur de la roulotte pour attraper mon manteau et ouvrir la porte. Instantanément, le froid me mordit le visage. Le vent glacial du Voile s’engouffra dans les boucles mal peignées de ma tignasse. Un rapide coup d’œil du côté de la culture m’indiqua que les poiriers étaient intacts : une frayeur se soustrait à mes suppositions.

« Que me vaut ce réveil si charmant de bon matin? Le sarcasme coulait de ma bouche comme la bave pouvait dégouliner des babines d’un chien, alors que je lui fis volte-face, plus clair et franc. C’est quoi ce cirque? »

Agitant plus encore le volume de sa voix, Latone hurla de nouveau, présentant les deux gamins qui l’accompagnaient.

« C’EST QUOI ÇA?!

- Oui, bonne question, c’est quoi ç…

- YOOO! Salua le garçon.

- PAPAAA! S'exclama la fille.

- Salut, gamins! Maintenant, Latone, si tu pouvais m’expliqu… »

Pause. Longue pause. Petit à petit, je prenais conscience de ce qui venait d’être dit. Entrouverte, ma bouche ne se referma tout de suite, permettant à une brise de s’y infiltrer, serrant ma gorge, perturbant le rythme de ma respiration. Brusquement, le pli de mon coude se colla à mes lèvres, une toux violente, saccadée, me prenant d’assaut, moi et toute ma volonté.

« Eh! Ça va?!

- Aaaaah! Il s’étouffe! Maman, faut faire le bouche-à-bouche!

- Qu-Qui?

- Mais non, le bouche-à-bouche, c’est quand quelqu’un se noie dans la rivière! Papa nous l’a expliqué la dernière fois! »

Yo? Papa? Maman? PAPA?!

« Ah oui, c’est vrai!

- Espèce de sale petit con!

- Un, un, un, un instant! »

Mais Latone venait déjà de bondir, toutes griffes dehors. D’un pas, je me glissais sur le côté, m’évadant de la trajectoire de sa première attaque, mais la vague ne s’arrêta pas là, ses poings plongeant jusqu’à mon visage, prêts à ce que leurs jointures se fracassent droit sur ma mâchoire.

« Je n’ai rien fait! Pourquoi tu m’accuses?! »

Je sautais d’un bout à l’autre de la cour, échappant à sa colère et à ses coups de poing, tentant de la raisonner, de faire entendre ma Voix entre le sifflement du vent et les hurlements des enfants. En vain. Rien ne semblait l’atteindre. Lorsque je croisais les reflets dans ses yeux, je pouvais aisément entendre cette envie lancinante qui lui criait de me tordre le cou. Pour cette unique raison, il était absolument hors de question qu’elle m’attrapât.

« T’as terminé?! Doucement, la pointe de mes pieds toucha le sol enneigé, alors que je m’assurais que Latone soit suffisamment épuisée pour ne plus avoir la volonté de me pourchasser. Reste! Couché! Ça suffit maintenant! Aboyais-je quand je la vis se redresser, les quelques mots qui sortirent de sa bouche me faisant trembler de la tête jusqu’aux pieds. Mais comment tu veux que je le saches? Je n’les ai jamais vu de toute ma vie, ces gosses! »

En plus, ils paraissaient sortir tout droit d’un autre univers. Ils dansaient et chantaient à tue-tête, sur une cadence aussi confuse qu’élaborée. Pour les yeux qui les analysaient, ils semblaient complètement déjantés. Qu’est-ce qu’ils faisaient avec leur bouche, au juste? Comment le garçon ne se prenait pas une pneumonie en étant complètement torse nu? Et c’était quoi le costume de la gamine? Un… requin? Surpris, je me retournais vers Latone lorsque celle-ci voulut me pointer un autre détail, plus que troublant, et en les observant de près, le choc n’en était que plus poignant.

« Putain de merde, c’est quoi ce délire? »

Les chants et les bruits de bouche se convertirent en subits éclats de rire.

« Papa a dit un juron ♪

- Alors qu’il sait pertinemment ♪

- Que ça rend Maman… quoi?

- Que ça rend Maman… quoi?

- COMPLÈTEMENT GROGNON! »

J’avais l’impression que mon crâne allait se fendre en deux, tellement, que je n’entendis que très vaguement la présentation du petit duo. En fait, j’émergeais de mon subconscient seulement lorsque l’on m’interpella sous ce drôle de nom, aux sonorités aussi bouffonnes qu’incongrues. Pa'. Papa…

« J’ai pas assez de caféine dans l’corps pour cette connerie. Je retourne me coucher.

- Nooooon! Reste! Il faut qu’on te partage notre superbe épopée!

- Durant laquelle on est parvenus à la te-rra-sser! »

Sur un ton toujours aussi rythmique et chantant, les supposés jumeaux se tournèrent comme un seul homme en direction de Latone, levant leurs doigts pour la pointer. Seulement, en voyant la flamme qui embrasait l’intégralité de ses pupilles, j’eus un mouvement de recul instinctif. Elle devait se calmer! C’était impossible que ces gamins soient nos gosses! Pourquoi elle s’énervait sur moi alors que ça devait être une farce ou je sais pas quoi!

« C'est ta faute! TU M'AS FAIT DES BÉBÉS PAR LA BOUCHE!

… QUOI?!

« T’ES CONNE OU TU LE FAIS EXPRÈS?! »

Et maintenant, je lui aurais fait des bébés par la bouche?! Par tous les Dieux de ce putain d’univers! Royalement agacé – non seulement, on m’avait hurlé aux oreilles dès le matin, mais en plus, on m’engueulait pour un coït qui n’a jamais eu lieu? –  je m’assurais de raccourcir la distance qui nous séparait, agrippant l’un de ses poignets dans la paume de ma main. Est-ce qu’elle s’écoutait, seulement? Est-ce qu’elle mesurait le degré de stupidité qu’elle disait présentement? Écartant doucement les lèvres, je me permis un sourire, une veine gonflant à mes tempes.

« Tu veux réessayer peut-être, histoire qu’on défit toutes les lois de la procréation humaine? Insolent, le rire fleurit plus encore sur le pan de mes lèvres, moqueur et volontairement badin, tandis que je me rapprochais de son visage, glissant fermement la pointe de son menton dans le creux de ma seconde main. Qu’est-ce que tu en penses? On pourrait faire des triplés et cette fois, je t’assisterai pour l’accouchement. »

D’un geste aérien, mes doigts volèrent de son menton pour rouler jusqu’à sa joue, puis jusqu’à la pointe de ses oreilles. Cependant, j’eus à peine le temps d’effleurer la surface de ses lèvres que je me reculais d’un mouvement rapide.

« Sérieusement, ce que tu viens de dire est aussi ridicule que cette situation. Tu n’as jamais eu d’éducation sexuelle avant? Comment tu as pu vivre auprès des Chamans et ne toujours pas savoir comment on fait des bébés! Discrètement, je coulais une œillade en direction des concernés. Les enfants tombent pas comme ça du ciel, bordel. »

Les bambins nous observaient avec de grands yeux remplis d’étoiles, comme s’ils ne comprenaient pas la teneur de nos propos. Je relâchais un grognement, m’avançant jusqu’à leur hauteur avant de me pencher dans leur direction.

« Aldis et Snonven, c’est bien ça? Ils hochèrent de la tête avec un aplomb renouvelé. Qui vous a payé pour faire cette blague?

- Heeeein? S’exclama Snonven, les yeux écarquillés.

- Oui. Qui vous a payé pour nous jouer ce tour? Pendant quelques secondes, le duo s’échangea un regard plus que perplexe : peut-être ne voulaient-ils pas être des balances… Bon, écoutez, on va laisser passer cette mauvaise blague, pour cette fois, mais ne recommencez plus, d’acc… »

À la surprise générale, le garçon et la jeune fille se mirent à rire à gorge déployée, extatiques.

« T’es encore endormi, Papa?

- Impossible, après ce doux réveil. »

Si j’avais pu grincer des dents, je n’en fis pourtant rien, me concentrant pour continuer de sourire.

« Bah alors pourquoi tu crois qu’on blague? Dis-lui, Maman, que c’est pas une plaisanterie! On t’as vraiment battu!

- Non, non, non! Ce n’est pas de ça que je parle! Je parle de cette histoire de Papa et de Maman.

- Oui? Qu’est-ce qu’il y a?

- Latone et moi ne sommes pas vos parents. C’est impossible. »

Une fois de plus, les enfants se regardèrent, et une fois de plus, ils éclatèrent de rire.

« Hahaha! Maman, t’as frappé fort!

- Vous êtes notre Papa et notre Maman!

- … Vous êtes de sacrés acteurs, vous deux. Jusqu’au bout, vous voulez tenir votre rôle. »

Pourtant, je ne lisais aucun mensonge, aucune ruse venant de leur part… Qu’est-ce. Qui. Se. PASSE! Étais-je vraiment encore à moitié endormi pour ne pas réussir à déceler leur tromperie, moi, un putain d’Orisha?!

« Maman! Dis-lui que c’est vrai! On t’as battu ET vous êtes nos parents!

- Regarde, Pa', regarde! Sautillant sous mon nez, le garçon me balançait la fourrure qui lui couvrait les épaules. Cette fourrure de sanglier, c’est toi qui l’a rapporté à la maison avec Kaine! Vous me l'avez offert pour mes huit ans. Pas vrai, Aldis?

- Exactement! Et ça, désigna la fillette en tirant sur son chandail, c’est le pyjama que vous m’avez acheté, parce que j’arrête pas de me plaindre du froid! »

C’était impossible. Ce n’était pas une farce, tous mes sens me l’indiquaient, mais c’était tout bonnement impossible.

« … Latone? J’peux te parler une p’tite minute? Et vous, les enfants, euh… faîtes attention aux poires en jouant. »

Tirant la Bleue par le bras, je l’amenais de l’autre côté de la roulotte, me postant droit devant elle.

« Explique-moi depuis le début. Qu’est-ce que c’est que cette histoire? »


2 001 mots (Sans les paroles reprises du post de Latone) | Post IX




[Q] - Autour de la barre | Miles - Page 2 Signat16
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Latone
Sam 27 Nov 2021, 18:53




CONNE ?! Il venait vraiment de la traiter de la sorte ?! Son inflexion résonna dans leurs esprits tel le puissant écho d'une caverne exiguë. Une veine supplémentaire gonfla au coin de sa tempe, sa colère atteignant un seuil propre à la Furie lorsqu'elle fut encore une Hozro déchaînée. Ça ne pouvait être que de sa faute à lui, car elle n'avait rien fait ! C'était comme ça que ça marchait. De toute façon qu'il lui arrivait une bricole, et que le Molosse n'était pas bien loin, c'était toujours à cause de lui que la situation s'envenimait. Rien que chez les Gandr, elle se serait très bien débrouillée seule et n'aurait pas eu à le raccompagner jusqu'à la roulotte pour… Un frisson la traversa, mais pas de froid. L'Orisha s'était rapprochée d'elle et entonnait une mélodie à la fois enjôleuse et narquoise. Trop essoufflée pour répliquer par les poings, Latone ne broncha pas alors que Miles la manipulât selon ses lubies de plaisantin. Était-ce leurs baisers qui avaient provoqué un tel phénomène ? Sûrement pas, mais le doute était permis. La Bleue affronta son regard, cherchant à comprendre s'il avait fait plus que la toucher la veille. Même si elle ne l'avouera pas – se le gardant comme un bien précieux – elle avait senti son étreinte tard la nuit, sa chaleur réconfortante et son souffle dans ses cheveux la berçant. Si la fatigue ne l'avait pas de suite emportée, elle aurait rassemblé ses forces pour l'enlacer à son tour, car c'était bien tout ce qu'elle pouvait lui offrir tant que ces craintes enserreront son cœur.

" A-Arrête tes conneries… Leur bagarre de tantôt exténuait sa flamme combattive, puis elle aussi voulait comprendre ce terrible malentendu. Elle se détourna à moitié de sa proposition indécente, son visage rougi par l'embarras et la rage. Je ne tomberai jamais enceinte et encore moins de toi ! " En était-elle réellement capable, d'ailleurs ? Après tout, elle revenait des Morts. Peut-être que ce don de Vie lui était malgré tout ôté.

Évitant de justesse d'imaginer Lolaha Kirzor comme mère, Latone eut le minime plaisir d'effleurer leurs lèvres avant de reprendre ses émotions. Depuis tout à l'heure, les fameux enfants les épiaient avec une attention poussée à son paroxysme. Ils avaient l'air tout bonnement heureux et ravis d'être en leur compagnie. Au fond, l'Aäsho avait le sentiment qu'elle aurait beau les châtier, ils continueront d'être des amours. Don d'Orisha ou instinct maternel ? Brrr...

" JE SAIS TRES BIEN FAIRE DES BÉBÉS, FIGURE-TOI ! Face au nouveau silence qu'elle jetât, elle se ressaisit aussitôt. Enfin je veux dire : JE SAIS COMMENT ON LES FAIT ! … Oh puis merde ! Autant qu'elle, Miles n'arrivait pas à croire que ces garnements étaient réels. Malheureusement, ils ne possédaient pas plus d'informations pour élucider ce mystère. Ah ouais ? Va dire ça aux Enfants des Cieux, alors. " Qui eux étaient réellement descendus du ciel, selon les poèmes à leur sujet. Attends une minute…

Y aurait-il un lien ? Tandis que le soi-disant paternel tentait d'établir un contact fructueux avec les énergumènes, Latone s'était plongée dans une profonde réflexion sur cette anomalie de leur réalité. Depuis le nouveau départ de sa Vie, Jun s'était montré bien présent dans la plupart de ses tracas. Il avait commencé à rendre son existence mouvementée, par ses apparitions à son insu alors qu'elle était censée se sentir intouchable sous forme spectrale. Son poirier accompagné de sa renaissance, ses minions qu'il envoyait à ses trousses pour la tester ou l'embêter – ou les deux – et par-dessous tout, ses fichus livres. Rien n'incriminait l'Æther à proprement parler, mais il lui était hautement probable qu'un homologue divin devait y être pour quelque chose. Pour avoir justement côtoyé les Chamans, cette possibilité lui paraissait limpide. Le Naäzkil cherchait des réponses par un raisonnement scientifique, alors que parfois, il fallait juste laisser tomber et faire avec. Ainsi était leur monde.

Leur monde ? Latone déglutit, le regard vague. Au-delà de supposer que tout ceci ne représentait qu'une vaste blague, pourquoi l'avoir liée autant à Miles Köerta ? Depuis le baiser du Voile Blanc, la Bleue gardait cette forte impression d'être attirée de force dans ses bras. Non pas que cela la dérangeait tant que ça finalement – au vu de la veille mouvementée – néanmoins, ces jumeaux… C'était d'un tout autre niveau. Toutefois, avec du recul, pas si incongru que cela.

" Hé Bhaf, Groa. Il était assez insolite de constater qu'ils ne les nommaient pas de la même façon. Vous avez quel âge ? "

" Bah, huit ans, justement ! "

" Mäma a toujours mauvaise mémoire ! " Bizarrement, elle faisait mouche.

Assurée d'être une potentielle piste, Latone délia à nouveau ses lèvres dans le but de percer le mystère, avant que Miles l'attirât de l'autre côté de la roulotte. C'était peut-être pour le mieux, mais la frustration gagna l'Orisha. Elle fixa dans le vide, son cerveau en ébullition, tandis qu'il la bombardait de requêtes. Tout ceci était n'importe quoi, mais se morfondre dans la plainte ne les feront pas avancer.

" Ta gueule, je réfléchis. "

Et d'ailleurs, son vermeil braqué sur elle ne lui plaisait pas. Elle n'arrivait pas à se concentrer et s'imaginait lui bander à nouveau les yeux ; d'une part pour éviter ses œillades gorgées de taquinerie, et d'autres part pour qu'il hélât encore son nom. Encore. Dis mon nom. Elle écarquilla les yeux à cet écho de la soirée et secoua vivement la tête pour se reprendre. Dans le même temps, elle se saisit des lunettes teintées du Köerta pour les lui rendre et masquer ces iris qui la faisaient chavirer.

" Je crois que j'ai une explication… Rien que par cette déclaration, elle réussit à piquer à vif le Molosse. Bon, en gros, j'étais partie dans la forêt et c'est là qu'ils m'ont sauté dessus. Ils ont agi comme tu l'as vu : bruyants, insupportables, têtus, et ils affirmaient que nous étions leurs… Elle roula des yeux, c'était vraiment au-dessus de ses moyens. Parents. Elle mima des guillemets avec ses doigts. Le truc, c'est qu'ils sont persuadés d'être nos enfants. Et je pense savoir pourquoi : ils sont spéciaux. Elle se tourna vers l'horizon, là où la cime des sapins peinait à masquer les hauteurs vertigineuses de la Vigilante. Il y a quelques semaines, un couple de Marcheurs est venu nous voir pour nous parler de leur enfant. Ils affirmaient qu'il n'était pas de leur sang, et pourtant leur ressemblait beaucoup. Tout comme ces jumeaux, il est apparu de nulle part et a aussi huit ans. Elle tira sur l'une de ses nattes, un coup d'œil en biais. C'est là que les problèmes s'entassent : ils font bien de nier que cet enfant ment, car Kashgar est un Orisha et sa compagne, Nora, une Vampire. Il n'y avait guère plus d'explication à ce niveau-là. Disons qu'ils ont fait fort, surtout Nora qui a perdu patience et a mordu l'enfant avant de le chasser. Le lendemain, il est revenu pour tenir exactement le même discours, comme si de rien n'était, et il n'avait plus la marque de la morsure. Elle haussa les épaules et soupira longuement. Il nous arrive la même chose. La Marche a évidemment lancé une enquête et une caravane a rapporté récemment que de tels enfants "naissaient" de la sorte un peu partout. À qui la faute ? Elle pointa du doigt les cieux, telle une évidence. Écoute, je… Elle lui fit bien face. Ces jumeaux sont un peu comme tombés du ciel. Mais nous sommes d'accord que c'est une mauvaise idée, hein ? Tu as une famille et je ne suis pas… enfin, une mère, quoi. Avec sa confession de la veille, cela tombait encore plus sous le sens. Trouvons une solution rapidement, allons les voir. "

Vindicative, elle lui saisit la main pour l'entraîner jusqu'à l'arrière-cour. Bizarrement, les enfants n'avaient pas l'air de faire un si gros boucan que ça ; et pour cause, ils n'étaient plus là. Latone papillonna des yeux, s'attendant soudainement à une nouvelle embuscade des fameuses Terreurs du Voile Blanc. Ils avaient laissé de belles traces dans la neige pourtant, il suffisait alors de reconstituer leur parcours pour constater qu'ils s'étaient aventurés jusqu'à la terrasse, puis à l'intérieur de la roulotte, la porte étant grande ouverte.

" OH LES MIOCHES ! " Sa roulotte était déjà trop bordélique pour accueillir deux vauriens supplémentaires.

D'un pas décidé, Latone rejoignit le palier de la porte et constata avec effroi qu'ils avaient dévoré tous les restes de gâteau, et plus encore ! Leurs babines étaient tâchées, comme si on leur avait plaqué le visage dans la bectance. Ils avaient beau réclamé à manger, ce n'était pas une raison pour se servir comme au marché ! Et si ce n'était que ça, le pire faillit arracher un cri d'effroi à la Hurabis : ils étaient en train de consulter les partitions de Gandr, avec leurs mains toutes sales.

" QU'EST-CE QUE VOUS FAITES ?! " Ils se retournèrent en rythme, l'air benêt.

" On mange parce qu'on a faim ! "

" C'est quand que vous faites la cabane à sucre avec Pä' ? On pourrait enfin se goinfrer de tires d'érable ! "

" JE NE PARLE PAS D— Hein ? "Cabane à sucre" ? " Elle se tourna vers Miles, confuse.

" Pour faire du sirop d'érable à gogo ! "

" Vous nous aviez dit que vous la ferez bientôt, alors au boulot ! "

" Pendant que nous, on s'entraîne sur le Sideri ! "

Un léger mal de tête assaillit l'esprit de la Kirzor. Ce mot semblait s'apparenter à un écho de Linos et lui rappelait les sonorités de la cité en ruines. Latone fit d'incommensurables efforts pour omettre cette soi-disant idée de cabane à sucre pour se concentrer sur cette information aux allures capitales. Elle se massa la tempe et chercha à garder son calme.

" De quoi vous parlez… Des partitions ? " Groa acquiesça hâtivement et Bhaf lui tendit le parchemin.

" Oui ! Le Sideri, la langue des Chants ! "

Pas plus avancée sur cette histoire, Latone profita au moins de l'offrande pour s'assurer de l'état de la partition. Malgré tout, la Marcheuse ne comprenait pas ce qu'ils entendaient avec ce langage : tout ce qu'elle voyait d'inscrit ne fut qu'une succession de compositions musicales, rien de concret pour des gamins de leur âge. Trop intriguée, elle s'accroupit à leur hauteur dans le but de décrypter.

" Je suis censée lire où ? "

" Bah, là ! "

" Sous les notations ? Il lui montra plus précisément. Entre les lignes ? "

" Oui, oui ! Tu ne vois pas les lettres dorées ? "

Non… La Marcheuse ne comprenait pas comment procéder. Devait-elle user de magie ? Si oui, laquelle ? À quelle dose ? Elle ne désirait pas dégrader le document, d'autant plus qu'il ne lui appartenait pas. Peut-être que seuls certains élus pouvaient lire le Sideri ? Mais alors, si – selon leurs affirmations – elle leur avait montré comment faire, alors elle-même devrait savoir quoi faire ? C'était si compliqué qu'elle aurait préféré que le patriarche des Gandr la dupât.

" En plus, les lettres sont censées être bleues normalement ! "

" Très juste, Aldis Groa Köerta Kirzor, alias la terrible Dévoreuse ! Ce doit donc être très important ! " La fillette plaqua ses mains sur ses joues, horrifiée.

" On a alors fait une bêtise ?! "

Au tour du garçon qui se tourna lentement vers leurs géniteurs. Il imita sa sœur et plongea son regard de chien battu dans les prunelles de leur mère. Toutefois, ses mains servirent à provoquer un nouveau son singulier, qui s'apparentait à quelque chose de familier pour les adultes.

" … Qu'est-ce que tu viens de faire ? "

" Quand Maman est pas contente, il fait le bouchon qui saute ! "

" C'est pour annoncer que tu vas péter un câble, haha… ha… ! " Grand sourire narquois.

Il n'y a plus de doute : il est de toi. Le fait qu'ils la connaissaient beaucoup trop la décontenançait, mais après mûre réflexion, peut-être qu'ils pourraient tourner cette problématique à leur avantage.

" Je pardonnerai vos bêtises si vous me lisez ce Sid-machin-truc. Les jumeaux se lorgnèrent l'un à l'autre, déconcertés. Allez, dis-moi ce qui est marqué, c'est important comme tu dis ! "

Ils éclatèrent de rire, encore. Jusqu'où leurs pitreries s'éterniseront ?

" Mais Mä', voyons ! "

" Tu ne nous as toujours pas appris à lire ! "

En fin de compte, se lever un beau jour et apprendre être mère, c'était une putain de malédiction.

2151 mots ~



By Jil ♪
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Miles Köerta
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Miles Köerta
Dim 28 Nov 2021, 18:54


Autour de la barre

Une fois de plus, la veine à ma tempe se gonfla. Ta gueule? Elle était de plus en plus charmante au fil des secondes, celle-là. À quoi réfléchissait-elle, de toute façon? Ma question n’était pas assez claire? Je me mis à grogner, encore plus irrité et indigné par la situation, maintenant qu’elle semblait avoir complètement ignoré ma présence. Ce n’est pas comme si, un beau matin, j’avais été réveillé par une gueularde qui s’était mise à m’attaquer pour aucune foutue raison en me traitant de sale petit con et en m’accusant de l’avoir engrossé simplement en échangeant un peu de salive. Nom de Dieu. À mon tour, j’avais cette envie irrépressible de l’étrangler, là, sur-le-champ, l’apex de mes phalanges tremblant, me démangeant douloureusement. Toutefois, en prenant de longues et profondes respirations, je parvins à refroidir mon ressentiment, à essouffler la flamme de violence et d’injustice qui me brûlait la gorge afin qu’il ne reste plus qu’une vague sensation aigre sur le bout de ma langue. Lentement, mes poings se serrèrent autour des manches de mon manteau, leurs jointures rougies par la pression que j’exerçais. Et pourquoi elle se taisait maintenant? Je voulais simplement qu’elle me raconte ce qui s’était passé dans ces bois! Ces gosses n’étaient pas apparus par Magie simplement pour nous casser les pieds, non plus! Elle avait beau avoir mis de l’avant la situation qui avait eu avec les Enfants des Cieux, à mes yeux, ce n’était pas du tout la même chose. Ces gamins ailés et sans Magie avaient été offert aux Humains par les Dieux. Il y avait eu des signes, une organisation : il s’était agi d’une action en faveur de toute la population humaine. Là, c’était bien plus personnel, bien plus particulier. Il s’agissait littéralement de deux petits illuminés qui se pointaient dans son jardin et qui nous pointaient du doigt en nous disant que nous étions leurs parents. Pourquoi eux et pourquoi nous? Ça n’avait aucun foutu sens… Soudain, un éclair traversa mes yeux, ancrant au fond de mon subconscient les nouvelles paroles, plus calmes et douces, de la Bleue. Par réflexe, je soulevais ma main, la déposant sur mon front. Aïe, aïe, aïe, ma pauvre tête. Pourquoi il avait fallu que je subisse tout cela dès le réveil? J’avais l’impression que mon cerveau allait exploser, se fracturer. Il semblait encore encaisser les contrecoups des cris furibonds de l’Éclat, sa Voix ayant secoué trop de fois, et ce, en une période relativement courte, chacune des fibres de mon esprit. Si les fracas se faisaient moins sourds et violents, les échos continuaient de résonner au creux de mes tympans, tapageurs et exaltés.

« Va falloir te décider, La…tone. Je me la ferme ou je parle », sifflais-je, rancunier, bataillant inconsciemment contre moi-même pour ne pas obtempérer à cette nouvelle injonction, en vain : son nom s’était tout naturellement échappé de mes lèvres, sans même que j’en sois conscient les premiers instants.

Toutefois, dès que je m’en aperçus, la rage revint faire vrombir mes cordes vocales. Qu’est-ce que c’était que ça, aussi? Qu’est-ce qu’il m’arrivait? Malgré la chaleur que j’avais pu percevoir dans son inflexion intérieure, j’étais bien trop agacé pour vouloir lui donner satisfaction. Pourtant, voilà que je cédais dès la première occasion… Raaaaah! À quoi rimait tout ce bordel!

« Qu’est-ce que! Eh! »

Je reculais d’un pas instinctif, remarquant trop tard la paire de lunettes qui me retombât sur le nez, un voile obscur assombrissant désormais ma vision. Je laissais courir un nouveau grondement au fond de ma gorge, soulevant les lunettes pour les planter sur ma tête.

« Elle a intérêt à se tenir, cette explication, parce que j’ai été injustement attaqué, insulté, engueulé – parfois, les trois en même temps! – à cause de toi. »

Malgré ma mauvaise humeur, Latone avait désormais toute mon attention. J’étais prêt à oublier ce qui s’était produit si les origines de sa colère se justifiaient. Cependant, plus elle parlait et plus l’ire en moi se renforçait. Elle devait vraiment me prendre pour un con… Voyant sa main se diriger vers la mienne, je la dégageais vivement de sa trajectoire, braquant le sanglant de mon regard dans ses prunelles.

« T’es en train… de me dire… que t’étais au courant de la situation depuis le début? J’émis une courte pause, croisant les bras pour ne pas lui en coller une. Et que, malgré tout ça, tu m’as quand même sauté dessus comme le dernier des goujats? Elle avait utilisé sa Voix contre moi, ses Cris bourdonnaient toujours dans mon esprit! J’en peux plus… »

Latone réitéra son geste en voulant m’attraper la main, mais une fois de plus, je l’esquivais. Le manège continua pendant une longue minute, durant laquelle la Marcheuse s’était remise à me pourchasser, alors que je ne souhaitais pas qu’elle me touche. Seulement, sa Voix laissa un nouvel écho entre mes deux oreilles, une supplication qui tranchait à la virulence que je pouvais deviner sur ses traits. Et comme une marionnette, un sacré guignol, ma main se desserra soudain pour se laisser mollement tomber dans l’emprise de son poing. Tu fais chier! Entraîné dans son sillage, je restais muet, soudainement devenu apathique à toute la frénésie environnante. Les enfants avaient touché aux partitions avec leurs mains sales? Quel drame! Latone et moi devions faire une cabane à sucre ensemble? Ils rêvaient en couleurs! Cela étant dit, je mentirais si j’affirmais ne pas être un peu curieux de ce qu’ils se disaient à propos du Sideri. La langue des Chants? Quand Latone les rejoignit, je me plaçais non loin de leur position, jetant un coup d’œil par-dessus l’épaule de la Bleue afin de distinguer ces fameuses lettres dorées. Cependant, je connus la même déception que l’Aäsho : j’avais beau solliciter l’intégralité de mes sens et de mes pouvoirs, la partition restait une simple partition à mes yeux. Face à nos airs déconfits, les enfants repartirent au galop, la petite Aldis nous observant avec un visage terrible en réalisant qu’ils étaient peut-être les fautifs. Elle avait une de ces expressions… C’était presque terrifiant. Au contraire, le garçon géra son stress d’une toute autre façon, un bruit bien particulier explosant dans sa bouche dès l’instant où ses mains claquèrent contre ses joues. À ce son, mais surtout en écoutant leur justification, un sourire fleurit à mes lèvres, un esclaffement suivant quelques secondes après. Me fais pas cette tête, Madame Pooum-Pssshiiiiiii! Le bruit du bouchon de champagne qui pète et celui de la mousse qui pétille : le gamin était devenu mon idole en un claquement de doigt, les enfants m’arrachant un second éclat de rire presque dans la minute qui s’enchaina.

« Mais oui, Mäma, pourquoi tu ne leur as pas appris à lire, avec tous les livres que je t’ai donné? Non, au moins, tu aurais pu les envoyer à Basphel. »

À mon tour, grand sourire narquois, ce qui parut briser les derniers brins de patience qui retenaient encore Latone. Néanmoins, quand la situation se calma de nouveau, je me postais derrière les enfants, déposant une main sur leurs épaules, les encadrant avec mes bras.

« Ne vous en faîtes pas, Papa va s’occuper de vous. Dans une frappe sournoise, je m’attaquais à leur tignasse, les ébouriffant promptement sous mes paumes. Si Mäma ne vous a pas appris à lire, je présume qu’elle ne vous a pas appris à écrire non plus? Les jumeaux acquiescèrent en choeur, un sourire un peu niais aux lèvres. Y’aura du boulot à faire dans ce cas… Mais pour le moment, ce n’est pas si important. Me décalant pour prendre les partitions des mains de Latone, je posais les parchemins sur la table au centre de la roulotte, en face des bambins. Seriez-vous quand même en mesure de recopier ce que vous voyez? Ces fameuses lettres dorées?

- Bien sûr! Ce sera du gâteau!

- Bwahahaha! Rien n'est trop difficile pour...

- … l’Élu du Sanglier des Temps Anciens!

- … et la terrible Dévoreuse du Voile Blanc! »

Au moins, ils sont motivés. Je me retournais vers la Marcheuse aux cheveux bleus, lui demandant de leur ramener des crayons et du papier. Peut-être que ces enfants n’étaient pas simplement apparus pour nous casser les pieds, finalement…


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Dim 05 Déc 2021, 12:37




C'était quoi son problème ? S'il avait mal dormi, ce n'était pas de son ressort. Il avait pris un risque en restant ici et c'était trop tard. Elle n'allait quand même pas lui servir le petit-déjeuner et taper dans la marmelade alors qu'ils avaient un, ou plutôt, deux sérieux cas à gérer. En fin de compte, c'était plutôt lui le gamin, dans le lot. Elle avait déjà été bien assez généreuse de l'inviter la veille, de lui servir le gîte et le couvert, et d'autant plus le laisser rentrer dans son cocon d'intimité ; c'était-à-dire son lit d'infortune. Si ce n'était que ça – ce qui était déjà beaucoup, enfin, passons – Latone se serait contentée d'encaisser et de ronger son frein jusqu'à que l'accalmie sonnera. Malheureusement, lorsque le Naäzkil percevait une brèche, il s'y enfonçait de tout son soûl. Avec les bambins de son côté, il la faisait tourner en ridicule, la faisant grincer les dents. Son écriture à elle n'était déjà pas au point, alors elle ne leur aurait très certainement pas appris dans l'immédiat ! Quant à Basphel… Oui, bon, ce n'était pas bête. Il voulait une médaille pour son idée digne d'un parent modèle ? Tout ce foutoir la gonflait à un point, à quoi bon se chamailler sur leur fibre parentale alors que l'un des deux avait déjà trois marmots à son actif ? Latone n'était pas une mère et n'allait définitivement pas laisser ce Molosse répandre sa semence en elle !

Puis, Miles la héla pour lui quémander des crayons et du papier.

Et puis quoi encore ?

Sans cesser de défier le vermeil de ses yeux, Latone croisa les bras et ignora tout bonnement sa requête. Comme si elle allait l'aider à la décrédibiliser encore plus, tss ! Il se croyait malin avec son idée de génie, mais c'était peine perdue, car elle était têtue comme pas deux. Non, non, ça ne se passera pas comme ça. Il s'était déjà assez foutu de sa gueule depuis le début, c'était à elle de maîtriser la situation d'une main de fer. En l'occurrence, un sourire terrible finit par prendre naissance sur son visage, le genre qui trahissait un coup de poker.

" Nos bambins savent très bien où sont les crayons. Pas vrai ? " Émit-elle, fière comme un paon.

C'était génial parce que si ces soi-disant enfants les connaissaient si bien, alors ils devaient être habitués à cette roulotte. Ils l'avaient trouvé sans qu'elle n'ait eu à les guider, mais ce ne devait être qu'un coup du mauvais sort. Avec un peu de chance, grâce à sa stratagème finement concocté, elle allait pouvoir écarter sa théorie de tantôt et ne plus devoir assumer l—

" Bien sûr ! " Ils se jetèrent en même temps vers le fameux tiroir, tels des fauves, du premier coup.

Bon, ils avaient définitivement une malédiction abattue sur eux. Malgré tout, Latone ne désespéra pas et masqua toute déception apparente. Au contraire : elle venait d'éviter la sale besogne quasi imposée par le Köerta. D'un air suffisant, elle l'épia en biais et aurait très bien pu émettre un rire si pompeux en d'autres circonstances. Tu es chez moi, petit malin. En son territoire, Latone se sentait si puissante. Afin de conserver cette bonne part de confiance, il lui suffisait d'éviter de regarder le canapé où Miles l'avait surplombée la veille, au risque de se remémorer ce moment de faiblesse. Ah, trop tard.

Diablement efficaces, les jumeaux revinrent avec le matériel adéquate et l'éparpillèrent sur la table, en égarant au moins le quart de leurs trouvailles en chemin ou par-delà ladite table. La Marcheuse se massa bien plus fort les paupières, une dernière et vaine tentative de se réveiller de ce cauchemar qu'elle refusait d'endurer. D'une humeur maussade, la Bleue traîna des pieds pour s'assoir à leurs côtés, son coude supportant sa tête à moitié enfouie entre ses doigts. Elle fixait les partitions, sans distinguer la moindre trace d'un quelconque "Sideri". Cette dissonance dans le Temps la troublait, car si ces enfants avaient huit ans, alors il a dû s'écouler de nombreux événements à Ciel-Ouvert. En tout premier lieu, étaient-ils un accident ? Avaient-ils été désirés par le Köerta et la Kirzor ? Ces questions seraient trop cruelles pour des petits, mais des informations comme sur l'état du Bleu Roi ou de la Marche Terne lui faisaient tant défaut. Pire encore, peut-être venaient-ils d'un univers totalement parallèle, pour être aussi… spéciaux. Dans tous les cas, le fait qu'ils tombèrent à pic pour élucider le mystère de Gandr témoignait d'une chance incroyable. Latone prit donc son mal en patience, les jumeaux galérant bien assez pour tenir un crayon correctement et d'autant plus pour l'utiliser. Plusieurs baguettes de bois périrent dans la bataille, autant par maladresse que par force mal dosée.

C'était alors, qu'enfin, le glas sonna. Hâtive, la Hurabis s'empara du manuscrit et l'étudia avec attention, ignorant le Molosse par-dessus son épaule… Hélas, elle ne pourra pas se permettre d'être seule pour le coup : si Aldis s'était amusée à simplement griffonner des petits dessins dans les marges, l'écriture de Snonven se montrait affreuse, illisible, indéchiffrable. Vaincue, Latone laissa retomber la feuille, n'ayant même pas reconnu la moindre lettre dans ce torchon. Même Miles ne perçut, à la rigueur, que quelques syllabes, mais pas suffisamment pour remonter jusqu'aux écrits originaux.

" … Vous n'êtes pas très doués. "

Si Bhaf prit la vérité avec légèreté, un sourire à la fois gêné et rieur, et sa main ébouriffant ses cheveux épais, la petite Groa arbora un air attristé, ses grands yeux humidifiés cherchant à grapiller la pitié de sa maman.

" Ils ne sont pas beaux mes dessins ?! "

Le palpitant de Latone s'emballa. Ce n'était absolument pas le sujet ! Mais ses yeux trop mignons là… !

" S-Si si si, c'est super beau même ! Bravo euh… Groa ! " En un instant, la génitrice malgré elle réussit à raviver l'engouement de la fille et d'empêcher une nouvelle catastrophe de se produire.

Cela étant, cette conclusion ne les avançait pas plus. Latone ne pouvait masquer sa déception et son envie d'aller broyer du noir au jardin et de donner des gros coups de pieds dans la neige en passant. Avec toute cet amas de complications, la jeune femme commençait à être à court d'inspiration et céder à la capitulation pour au moins quelques jours la titillait. Sans vraiment le vouloir, ses iris cyan et violette se braquèrent sur l'homme de la roulotte. D'autres idées, qu'on se marre un peu plus ? Mince, ça lui avait échappé, encore. Bref, elle ne voulait pas lui parler, les enfants l'intéressaient davantage. Au bout d'un moment, il fallait bien en finir.

" Bon, les petiots, c'est l'heure de rentrer à la maison. À leur expression confuse, Latone comprit un certain détail. Attendez, je ne vous ai jamais emmenés à la Vigilante ? Je vous ai gardés ici ? "

" Oui ! Comme tu dis souvent : c'est petit mais cosy ! "

" Sauf que l'usur-patissière a saccagé nos affaires, on n'a plus rien ! " L'usur… Ah, l'usurpatrice.

" Elle a voulu se débarrasser de nous et de Maman, mais Maman lui a botté les fesses si fort qu'elle a volé jusqu'au ciel ! " Bhaf imita une sorte de boulet de canon qui partirait très loin dans les nuages.

" C'est exactement ce qu'il s'est passé. Approuva l'Hurabis en bombant le buste, fermant les yeux pour s'imaginer un dénouement aussi exquis à ce combat. Bref, à partir de maintenant, vous allez vivre avec moi au château. Vous aurez une chambre plus grande et… on essaiera de retrouver vos affaires ou de les racheter. "

" Mais… et Papa ? " Le sujet qu'elle redoutait…

" La roulotte permettait à Papa de passer plus souvent ! "

Latone croisa les bras. C'était pourtant ce qui serait le mieux pour eux, le temps d'élucider la situation, et surtout leur relation.


1379 mots ~



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Miles Köerta
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Miles Köerta
Mer 08 Déc 2021, 04:16


Autour de la barre

J’essaye quelque chose au moins. Rappelle-moi ta contribution déjà? Hormis celle de gueuler et de frapper sans raison? Ah oui. Aucune. Roulant des yeux, je parvins à camoufler ma colère derrière un nouveau rictus de charme et d’optimisme, m’adressant directement auprès des enfants pour les encourager :

« Ne soyez pas déçus! J’ai une autre solution », m’exclamais-je tout en coulant un sourire insolent à l’endroit de la Marcheuse.

Peut-être que la méthode serait plus aisée compte tenu de leurs aptitudes, puisqu’elle solliciterait davantage leur vue et leur capacité de reconnaissance que leur talent en calligraphie – si nous pouvions l’appeler ainsi. De fait, s’ils n’arrivaient pas à retranscrire eux-mêmes les lettres qui apparaissaient sur la composition, sûrement réussiraient-ils à me les indiquer, à l’aide d’un support de référence, afin que je puisse les écrire convenablement sur papier. Apparemment décidé à aller jusqu’au bout, je me soulevais du sol, me dirigeant aussitôt en direction de la petite étagère murale, tout près du lit de la roulotte. C’est au creux de ces quelques planches en bois que Latone avait rassemblé la plupart des livres et documents qu’elle s’était procurée, plusieurs titres m’évoquant quelques souvenirs, puisqu’ils lui avaient été offert de mes mains, alors que d’autres ouvrages m’étaient complètement étrangers. À leur vue, je suspendis le bout de mes doigts à quelques millimètres à peine d’une première reliure, réfléchissant sur la nature des bouquins qu’il me faudrait choisir afin que nous puissions résoudre ce mystère inéluctable. Seulement, à l’instant où je jetais mon dévolu sur un premier volume, je sentis une soudaine résistance qui vint retenir mon bras. Surpris, je baissais les yeux.

« Pa’! Avant de faire ça, est-ce qu’on peut te raconter comment on a battu Mäma? »

Durant une poignée de secondes, ma seule réaction fût le battement agité de mes cils. Pourtant, un ricanement à l’intérieur de mon esprit m’arracha violemment à ma contemplation. C’est pas d’ma faute s’ils ont la concentration d’une moule! Maugréant dans ma barbe, je me permis de prendre quelques respirations avant de reporter l’intégralité de mon attention sur le visage de l’enfant. Un sourire et un air avenant s’étampèrent presque instantanément sur mon faciès, parés à l’amadouer afin qu’il aille en mon sens et cesse de divaguer.

« Vous pourrez me raconter cette fabuleuse épopée après qu’on ait terminé de retranscrire le manuscrit. Marché conclu?

- Nooooon! » S’écria soudainement Snonven en exerçant encore plus de force sur ma manche, dans l’espoir de m’éloigner des livres.

Je n’avais même pas le temps de rectifier les clauses de l’entente qu’Aldis s’y mit également, tirant mon autre manche de toutes ses forces.

« Ce n’est pas à tous les jours qu’il nous est possible de pourfendre,
- de surprendre,
- de vaincre,
- l’Éclat de Ciel-Ouvert! »

Avec une énergie renouvelée, maintenant qu’ils étaient deux contre un, unis et soudés, ils tirèrent et tirèrent avec acharnement, comme si leur vie en dépendait.

« Alors vieeens! On doit te raconter comment ça s'est passé! »

Mais elles étaient tenaces, ces petites canailles!

« D’accord, d’accord! D’un geste, je laissais tomber mes bras, ne leur opposant plus la moindre résistance. Vous ne voulez vraiment pas lâchez l’affaire. »

Tout en se retenant à la table pour ne pas tomber sous la soudaine impulsion, les deux garnements émirent en chœur un rire sournois et moqueur. Leurs regards pétillaient et le sourire, qui s’était ourlé à leurs lèvres, retenait de peine et de misère leur folle jubilation.

« C’est toi qui dit toujours… D’un mouvement théâtral, la petite fille se râcla la gorge, prenant un ton légèrement plus grave et intimidant : Une fois entre ses griffes, la proie n’échappe jamais au chasseur. Couplée à sa parodie, Aldis tendit soudainement ses bras dans les airs, crispa ses doigts, et exposa avec dignité et bestialité les pointes aiguisées de ses petites canines. Groaaaaa! Cette fois, tu étais la proie!

- Grouuuuuaaaa!! Suivant l’exemple de sa jumelle, le frère se souleva sur le bout de ses orteils et montra, lui aussi, sa dangereuse dentition. Préparez-vous à subir la colère de l’Élu du Sanglier! Il vous pourchassera, vous traquera, au-delà de tout horizon!

- Eh bien, eh bien, regardez-moi ça!
S’agirait-il d’un canichon croyant pouvoir se mesurer à un étalon?


- Silence, renégat!
Ce blasphème ne sera impuni,
Car derrière mon ombre, guerrier accompli,
Tu distingueras la stature et les défenses de l’impitoyable Alpha!
Agrouuuuuuaaaa! »


Et dans un éclat de rire, Snonven se mit à poursuivre sa sœur, qui profita de la carrure de Latone pour ne pas être attrapée. Je… ne savais pas quoi faire. Entre rire, m’exaspérer ou me prendre la face à pleine main, mon visage se tordait contre les assauts de la confusion. Ce ne sont pas eux qui voulaient me raconter comment ils en étaient venus à battre Latone, au tout début? Comment avaient-ils fait pour déraper de cette façon? Par chance, la Bleue reprit finalement les rênes, mettant un terme à l’exubérance de la jeunesse inépuisable en les invitant à retourner à la maison. Seulement, à la tête qu’ils lui adressèrent, nous comprîmes aussitôt que quelque chose clochait. C’est pas tant ton pied qui l’a envoyé de l’Autre Côté que ta Voix, fis-je remarquer, notant bien rapidement l’absence de réponse de sa part, voire de regard, ou de réaction. Sérieusement… Elle boudait maintenant? Alors que j’étais celui qui avais injustement été mis en tort dans cette histoire? J’y crois pas! Je devrais l’ignorer, ne pas vouloir lui parler après qu’elle se soit ainsi déchaînée sur moi, mais j’avais suffisamment de maturité pour faire les premiers pas vers une éventuelle réconciliation.

Comparativement à elle. T’es vraiment une enfant, soupirais-je, amer. Peut-être étais-je, moi aussi, un gamin, mais dans l’immédiat, je ne distinguais que ses enfantillages.

« Mais… et Papa?

- Hein? Quoi, moi?

- La roulotte permettait à Papa de passer plus souvent! »

Ah…

« Eh bien, pour le moment, allez avec… Mäma à la Vigilante, laissais-je entendre en enfonçant mes mains dans les poches de mon manteau – je ne remarquais que maintenant que je l’avais encore sur le dos. Vous y serez vraiment plus confortables! En plus, vous pourrez côtoyer une ribambelle de personnes là-bas! Je suis certain qu’ils apprécieront vos chansons.

- Et tu viendras?

- Bien sûr. »

Je l’avais promis de manière spontanée, sans réfléchir. De toute façon, je ne voyais pas d’autres alternatives, cette décision me paraissant la plus sûre et habile, dans le sens où il semblerait que la Marche soit déjà sur l’enquête et qu’avoir les enfants à proximité ne ferait que faciliter l’investigation sur cet étrange phénomène… Puis, je mentirais si je n’admettais pas que je ne me voyais guère arriver à la maison avec deux tornades sous les bras, et annoncer à Kaine et Toto qu’ils avaient un nouveau frère et une nouvelle sœur, fruits d’une relation complètement imaginaire entre l’ancienne Hozro de leur mère et moi-même; rien que d’y songer, j’avais l’impression de m’être tordu le cerveau.

« Puis, ça ne vous empêchera pas de revenir à la roulotte et d’aider… Mäma (Dieu que je ne m’habituais pas) avec ses poires.

- Naaan! Mäma ne veut plus qu’on l’aide depuis qu’on a fait une bataille de boules puantes avec de l’engrais. »

Complices, les deux vauriens s’échangèrent un regard en biais.

« Héhéhé, tu aurais dû voir ça. Subitement, les yeux de la petite Aldis s’écarquillèrent, sa tête se mit à trembler et ses mains, toutes aussi agitées, s’approchaient de ses joues : le tout était excessivement dramatique. Elle était comme ça! Aglaglaglagla!

- Mais après, on s’est pris une fessée », déplora Snonven en se frottant le séant, comme si la douleur revint hanter la surface de son derrière.

Et ils continuèrent ainsi, anecdotes sur anecdotes, au point où je me demandais dans quel genre de monde parallèle et surréel ces deux-là avaient évoluer pour vivre toutes ces histoires saugrenues…


1 302 mots (sans les paroles reprises du post de Latone) | Post XI




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Latone
Dim 12 Déc 2021, 11:54




Je vais en trouver d'autres des raisons de te frapper, s'il n'y a que ça qui te dérange. Masochiste. Les bornes étaient déjà dépassées depuis trop longtemps, sûrement des deux côtés par ailleurs. Malheureusement, Latone était si immergée dans la perte de contrôle de cette situation qu'elle ne cherchait même pas à se regarder dans un miroir. Les enfants naissaient d'une mère suite à l'offrande d'un père, alors, par A plus B, Miles se présentait comme le fautif tout désigné. Tant que la Marche n'aura pas élucider ce mystère frappant tout autant Nora et Kashgar, il fallait bien un autre coupable sur lequel se défouler. Cela tombait bien : Latone adorait se dépenser sur Miles. Dans le sens purement combattif du terme, bien évidemment.

Au moins, l'Orisha Bleutée ne pouvait qu'admettre qu'il se démenait pour comprendre ce soi-disant Sideri, le manifester sous leurs regards apparemment aveuglés et le décrypter. Avec du recul, Latone s'en voudrait d'être aussi boudeuse, mais elle n'arrivait pas à passer outre. Le moindre de ses gestes la crispait, la moindre de ses palabres la dégoûtait. Elle voulait juste être tranquille, se reposer en bonne et due forme après cette soirée éreintante. Mais non, il a fallu que deux tenaces sangsues la hantèrent et que son aphélie ne tenta rien pour lui en débarrasser. Et en plus, ces deux énergumènes s'empêtraient dans leur simili de victoire sur son ascendant, encore ! Saoulée, l'Aäsho roula des yeux et croisa les bras, ne cherchant même plus à quitter sa chaise ou à rajouter quoi que ce soit. C'était comme la pluie : il suffisait d'attendre qu'elle passe pour rouvrir les fenêtres et respirer. Cette fameuse pluie, elle finira bien par lui foutre la paix une bonne fois pour toute. Les pitreries des enfants ne l'atteignaient même plus, hermétique aux moqueries lancées à son sujet. Je ne suis pas une enfant ! Elle aurait aimé ne pas avoir à répondre, mais le flux des pensées ne se contrôlait guère, pas plus que cet étrange sort qui liait leurs réflexions, d'ailleurs. Cela étant, les ramener à la Vigilante n'était pas une si mauvaise idée, car il lui suffira de les refiler à n'importe quel Marcheur du coin pour ne plus avoir à les endurer ; peut-être pas à Narn en revanche, ce serait trop cruel. Au moins, Miles ne décida pas de lui voler ses marmots. Enfin, ces deux anomalies de leur vie commune déjà plus ou moins tumultueuse. Quoi qu'il en soit, dans cette configuration, ils pourront tranquillement reprendre leurs occupations en main et ne plus avoir à trop s'en préoccuper. Elle devrait passer voir Kashgar et Nora pour voir comment ils s'en étaient sortis…

" Et tu viendras ? " Oh qu—

" Bien sûr. " Qu-qu-grrrrrr… !

C'en était trop. Latone avait relevé la tête comme si une proie ou un prédateur venait de trahir sa présence, un craquement de branche ou un bruissement de buisson. Pour le coup, c'était plus l'un de ses nerfs qui venait de lâcher avec l'initiative inconsidérée de Miles ! Pourquoi prenait-il une telle décision sans lui demander son avis ?! Et si elle ne voulait pas ?! C'était chez elle, c'était à elle de lui ouvrir la porte ! S'il voulait tant voir ces mioches, grand bien lui en fera, mais il était hors de question qu'il se pointât dans ses quartiers. Ils n'auront qu'à se réunir dans le hall ou autre part, tant que c'était loin d'elle. Puis, quand on commençait à s'engager sur son magnifique jardin, une pente bien glissante… Son grincement de dents se faisait bien entendre. Si la Mäma lui en avait laissé l'occasion, il aurait été éclatant : ce bouchon de champagne.

" Personne n'approche mes Juns ! Grands ou petits, vous prendrez ma main dans la figure ou ailleurs si vous malmenez MON JARDIN ! Pour un peu, elle pourrait presque être une Fae hystérique. Ça suffit maintenant ! J'ai dit qu'on rentre ! Elle en avait vraiment marre de perdre du crédit avec leurs histoires sorties de nulle part. Il se pourrait que la plupart ne fût que le fruit de leur imagination débordante. Dehors, les deux ! ALLEZ ! "

Point affligés par l'humeur massacrante de leur maternelle, les jumeaux filèrent jouer dehors, rieurs comme jamais. Le cœur de Latone battait la chamade, empli de trop nombreuses émotions pour les supporter, trop vives pour les ignorer. Évidemment, car c'était l'heure de prendre des routes différentes. Même si cela ne se voyait guère en ce moment, la Bleue avait bel et bien gagner en maturité depuis sa renaissance. Cela étant, dès que ses iris vaironnes croisèrent le regard de l'albinos, elle sût qu'elle n'arriverait pas à passer outre leur futile dispute. Les départs étaient importants et signifiaient la note finale d'une musique. Cette dernière, malheureusement, s'avérait sans harmonie apparente.

" Qu'est-ce que t'attends ? Elle croisa les bras et, d'un signe de tête, lui montra la sortie. J'ai des affaires à rassembler, alors pars devant. Au moins, ils n'auront pas à partager le bout de chemin jusqu'à Ciel-Ouvert ; en plus, cela voulait dire se taper l'itinéraire ensemble durant tout le quartier Aria et une partie d'Ode. Dépêche-toi, bon sang ! Sinon je te les refile et tu te démerdes avec ! C'est ça que tu veux, Monsieur le Päpa Poule ?! Droite derrière lui, elle le poussa presque vers la sortie, du mieux qu'elle pût car le bougre était quand même bien costaud. Et n'essaye même pas de m'emmerder dans mes rêves, compris ?! " Tout ça c'était sa faute, son putain de baiser au Voile Blanc et leur putain de rêve commun !

À l'extérieur, Latone reprit son voile d'ignorance et se contenta de vérifier que rien ne trainait sur la terrasse avant de retourner dans la roulotte. Elle aura besoin du parchemin de Gandr et de quelques babioles à ramener à la Vigilante. La tenue de la veille… il valait mieux la laisser ici. D'ici, elle entendit les garnements piailler, leurs Voix aussi fortes que les leurs.

" À bientôt, Pa' ! "

Les deux enfants firent de grands gestes bien soutenus pour capter l'attention de leur paternel.

" On t'aiiiime ! "

" Salue Toto et Kaka de notre part ! "

Latone souffla du nez et finit par jeter un coup d'œil par la fenêtre. Toutefois, le Köerta n'était déjà plus à portée de vision. Elle toucha son Troisième Œil, déçue ; si elle savait s'en servir, elle aurait pu tenter de le voir ou de le sonder. Des idées stupides, encore.

Quelques minutes plus tard – bien assurée que l'Orisha était loin – la Bleue finit par verrouiller sa chère roulotte et capta alors l'attention des jumeaux, occupés à faire un bonhomme de neige très raté, tout branlant. Ils l'épièrent d'un air attentif, un sourire constant sur les lèvres, visiblement trop heureux de passer du temps avec leur soi-disant maman. Latone ne savait toujours pas quoi en penser ; d'eux, de tout ça. Elle n'avait pas l'air en colère, ni contente d'ailleurs, juste gênée.

" Vous êtes toujours comme ça ? " Ils papillonnèrent des yeux, se regardèrent entre eux, et reprirent de plus belle leur bonne humeur.

" On a l'habitude que Pa' et Ma' se disputent ! "

" C'est même bon signe qu'ils se chamaillent de temps en temps : ça veut dire qu'ils tiennent l'un à l'autre ! "

" Tu l'as dit, Suprême Dévoreuse ! Quand ils font des papouilles, c'est dégoûtant ! "

Ils tirèrent la langue en chœur, de réels acteurs. La Bleue se massa la tempe, le bouchon guère loin de sauter.

" En plus, c'est souvent Mäma qui saute sur Päpa, comme si c'était sa peluche ! "

" C'est parce que Päpa est trognon en renard ! "

Mais qu'est-ce qu'ils racontent, par les Ætheri… Tu sais quoi, ignore-les pour le moment. Son attention s'attarda sur les sommets de la montagne. J'ai vraiment besoin d'air. Puisqu'elle ouvrit la marche, les enfants ne se formalisèrent pas plus de son état et la suivirent de près, piaillant comme deux girouettes incontrôlables. Embuée par sa propre rage, Latone supportera plusieurs jours encore, rongeant son frein, avant de finir par comprendre que son idiotie ne la mènera que sur un sentier rempli de ronces. Lorsque les regrets frapperont, ils prodigueront de maux bien plus importants.

Et qu'était le remède aux maux du cœur ?


1438 mots ~ (sans les mots de Miles)



By Jil ♪
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Miles Köerta
Dim 12 Déc 2021, 18:55


Autour de la barre

Même si j’avais spontanément promis aux jumeaux d’aller les voir une fois qu’ils seraient installés à la Vigilante, je n’étais pas sûr de pouvoir – ou de vouloir? – tenir cette promesse sur une croix de bois et une croix de fer. Cette situation dépassait tout entendement et en dépit des apparences, je peinais encore à croire en cette histoire, en la légitimité de leurs propos : s’ils ne mentaient pas, ces enfants étaient pourtant persuadés de la véracité de leurs mensonges… Toutefois, entendre les rugissements de Latone au fond de mon esprit, dès qu’elle comprit que j’allais leur rendre visite, fractura ma concentration, ébranla vaguement mon palpitant. En cet instant, les Liens de ce Rêve se relâchaient, s’effritaient dangereusement, et tout mon être le ressentait à la manière d’un violent rejet, d’une coupure définitive. L’œillade noire, vindicative, je me mis à la toiser en silence. Wow! Raillais-je dans un crachat méprisant, contenant tant bien que mal l’ire qui vrombissait au sein de ma poitrine. Ne laisse surtout pas exploser ta joie! Et maintenant, elle ne voulait même plus voir ma face? Très bien. Soit! J’en avais marre de toute façon : d’elle, de ses crises d’hystérie, de ces enfants aussi déjantés qu’elle. Elle voulait que je parte? Elle n’avait pas à me le crier deux fois, et lorsque ses mains prirent l’initiative de me repousser à l’extérieur de la roulotte, je leur opposais machinalement une lourde résistance, tournant mon visage dans sa direction.

« Je sais marcher tout seul, alors lâche-moi, sifflais-je de très mauvaise humeur, me décalant vers l’avant pour ne plus qu’elle me touchât davantage. J’ai rien demandé de tout ça non plus, figure-toi. Mais qu’est-ce que t’en as à foutre de toute façon, hein? Je bouillonnais de rage, tout mon corps tremblant sous l’assaut de cette colère sourde. Tsk! J’me casse. J’en ai ma claque… »

Même le sourire des enfants peina à adoucir l’aigreur de mon ressentiment. J’avais envie de disparaître, de ventiler quelque part, loin, au cœur du Voile Blanc. Pourtant, même s’ils avaient été le déclencheur de cet enchaînement catastrophique d’exaspération et de hargne, je ne considérais pas Snonven et Aldis comme étant responsables de ce qui était survenus entre Latone et moi. Elle était la seule coupable, parce qu’elle était aussi idiote qu’égoïste; parce que tout ce dont elle pensait était son petit nombril… Je contractais les poings, mes jointures craquant vaguement, tout en prenant une grande inspiration avant de me retourner vers le petit duo.

« Bye-bye! » M’exclamais-je en leur partageant un grand sourire, les saluant de la main par la même occasion.

C’était le mieux que je pouvais faire actuellement. Et sans même un dernier regard en direction de la roulotte – en direction de Latone – je pliais mes jambes et me propulsais loin, très loin, de cet endroit. En quelques secondes seulement, je disparus tout simplement de l’horizon, comme je l’avais précédemment souhaité.



Plusieurs heures s’étaient écoulées avant que je me décide à me présenter à la maison. Les bruits habituels au sein de la chaumière rajoutèrent une couche à mon apaisement et percevoir tous ces sons, toutes ces familiarités, détendirent presque immédiatement la tension de mon corps. À l’étage, il m’était possible d’entendre Toesia jouer dans sa chambre, et elle semblait être accompagnée de Maydon et de Chia, ses amis de toujours; quelqu’un se lavait dans la salle de bain et aux légers chants que je captais, je reconnus l’inflexion réservée de la jeune Élise; au rez-de-chaussée, les voix de Dærion et de Hakiel étaient aisément perceptibles, les deux discutant du dernier livre du célèbre auteur de la trilogie des Aventuriers Maudits; puis, plus près de l’entrée, je pouvais écouter les bruissements d’un manteau que l’on rejetait sur ces épaules, un courageux se parant à affronter les rigueurs de l’hiver. J’approchais alors ma main de la poignée et, au même instant, la porte s’ouvrit, faisant apparaître la mine légèrement surprise de mon aîné.

« Hey! Salut, Pa’! On se demandait quand tu allais rentrer, s’exclama Kaine en vissant sa tuque sur son crâne, les regards de Dærion et de l’Eversha Corbeau se tournant brièvement dans notre direction. T’as passé la nuit à la roulette? Tonton Hakiel nous a dit que t’allais rentrer plus tard, mais finalement, t’es jamais revenu. »

Je profitais aussitôt du recul de Kaine pour traverser le seuil de l’entrée, ouvrant les boutons de mon manteau pour m’en délester.

« Ouais, ça a été compliqué… Un soupir franchit mes lèvres, toute furie violente s’étant évanouie depuis un certain temps, mais la rancœur continuait d’être alimentée. Je vous en parlerai plus tard. Là, je dois absolument aller me coucher. La matinée a été horrible. »

L’archer pencha discrètement sa tête sur le côté, curieux et intrigué de ressentir autant de lassitude en moi. C’est pourquoi, sans trop insister, il entreprit de dépasser l’encadrement de la porte, prêt à quitter la chaleur de la chaumière.

« Tu t’en vas quelque part?

- Je sors avec Océana. Tu te rappelles de ce spectacle musical sur glace dont je t’ai parlé la dernière fois?

- Ah oui! C’est la troupe de L’Écho des Montagnes qui va jouer sur scène. »

Le jeune homme acquiesça, enfonçant quelques pas dans la neige.

« C’est ça! L’un des artistes préférés d’Océana est membre de la troupe, et puisqu’il s’agit certainement du dernier spectacle que nous pourrons voir d’eux avant de partir étudier, on en profite! »

Le bonheur de mon fils réchauffa mon cœur, un tendre sourire se dessinant sur mon faciès.

« Amusez-vous alors. Oh… Attend! Rapidement, je reportais mon attention sur mon manteau, fouillant dans les différentes poches du vêtement pour y trouver ma bourse. Hum… Je pense que ça suffira, marmonnais-je avant de refaire volte-face. Tiens. Amène-la dans un bon restaurant après.

- Pa’, j’ai déjà de l’argent… »

J’insistais, ouvrant ses paumes pour y déposer le montant adéquat.

« Considère ça comme un cadeau pour vous féliciter d’avoir aussi bien performé durant vos examens.

- Ok, ok! L’Orisha soupira, mais son sourire le trahit. Merci Pa’! »

Sans perdre plus de temps, le jeune homme reprit sa marche, me saluant de la main, les yeux lumineux. Peut-être aurais-je dû rentrer plus tôt. Pour moi, voir mes enfants, admirer leur sourire et leur joie de vivre, était le plus puissant remède pour apaiser mes maux.


1 057 mots | Post XII | FIN




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