Etait-ce un passe-temps morbide ? Une démonstration du caractère un peu vicieux ou encore sadique de la sirène ? Il était clair que passer certaines de ses soirées libres au cimetière pouvait démonter un certain désordre psychologique ou trouble émotionnel.   Si l’ondine appréciait de venir ici, ce n’était pas pour le plaisir de voir des vieillards pleurer, ou des adolescents jouer dans cet endroit, grisés par le frisson que provoquait cet endroit. Non, si elle aimait venir ici c’était pour le caractère extraordinaire que ce lieu prenait pour elle. Nissa comparait tout aux pratiques de son peuple dans l’océan. Ils n’avaient pas la possibilité de mettre les gens en terre, comme les humains, et ce lieu attisait toujours sa curiosité. Chaque cimetière se ressemblait et pourtant, l’architecture des pierres tombales, fabriquées par les humains en offrandes à leurs morts, étaient des cadeaux merveilleux, emprunts de beauté. C’était même dommage que plus personne n’y fasse attention une fois qu’elles étaient posées là.

La première fois qu’elle avait découvert un de ces lieux, elle c’était cru dans un espace destiné à la vénération d’un dieu tellement l’atmosphère était solennelle. L’air qui pesait ici «était toujours solennel… et calme aussi. Elle aimait ce calme qui régnait dans cet endroit. Elle avait beau avoir du mal avec les humains, ceux-ci étaient supportables dans cet endroit. Même les plus révoltés étaient respectueux du silence ici. C’était bien le seul lieu où c’était le cas, car ce n’était pas dans les parcs, les auberges, ou même les églises qu’elle pouvait se retrouver avec elle-même. Non, il n’y avait que le cimetière. Si Nissa était très religieuse et vénérait les Aethers en lesquels elle croyait, elle n’était pas intimidée et ne se sentait pas mal  l’aise avec l’idée que les corps de morts étaient entreposés sous ses pieds. Ce n’était pas les corps les plus dangereux, c’était leurs essences, leurs âmes qui faisaient qu’un corps était dangereux ou non. Et pour ceux-là, ce qui les animait les avait quittés.

Si elle était déjà venue pendant la journée, le manteau de la nuit faisait apparaître le cimetière sous une toute autre dimension. Cette nuit-là, la pleine lune éclairait, de sa lueur blanchâtre, tout l'espace. L’air était frais et humide, de la fumée blanche s’échappait de la bouche de la jeune femme à chaque nouveau souffle. Elle resserra davantage les mains, placées dans les poches de sa cape, contre son torse afin de conserver sa chaleur. Néanmoins, la température était douce, et le temps n’était pas au vent.
La jeune ondine était venue en ces lieux seulement avec son compagnon Land: un loup au pelage et à la musculature massive, qui l'accompagnait presque partout où il jugeait supportable d'aller. L'autre parti du temps, il faisait sa vie. Pour ce qui était des cimetières, il avait l'air de partager le goût de la sirène pour le calme de cet environnement. Enfin, il n'avait jamais manifesté de sentiments contraires. La jeune femme avait laissé Kimi à l'auberge. Cette jeune orisha qu'elle avait pris sous son aile était une grosse source de fatigue.


Elle s’arrêta devant quelques tombes, prenant le temps d’analyser le son des noms inscrits, ainsi que leur écriture. En recueillant toutes les informations qu’elle pouvait tirer de la tombe, comme l’apparence de la pierre tombale ou bien autour comme si il y avait la présence de fleurs ou non, elle essayait de s’imaginer la vie de ces personnes, leur famille, la manière dont elles avaient quitté ce monde. Si on la prenait en flagrant délit, elle ne pourrait pas nier que cette pratique était étrange. Néanmoins, elle n’était pas une pilleuse de tombe et ne dérogeait donc à aucune loi en traînant dans cette endroit. Elle pouvait donc avoir l’esprit tranquille. 
Le cimetière était vide. A cette heure du début de la nuit, elle devait être la seule à avoir l'idée d'être présente dans un tel endroit. Le léger bruissement de pas entrant en contact avec l'herbe lui démontra le contraire. Elle releva la tête, sortant de ses pensées.
En aucun cas, elle ne s'imaginait être agressée en cet endroit, mais on n'était jamais assez prudent. Machinalement, elle porta la main à sa ceinture afin de vérifier que son couteau y était bien suspendu, puis elle se détendit en apercevant une jeune femme déambulant, elle aussi entre les tombes. Elle ne semblait pas être pressée, et ne troublait pas le calme qui régnait en ces lieux, et c'était tout ce qui importait à la jeune femme.
De plus, elle n'allait pas aller l'interpeller en un endroit comme le cimetière. Si elle était venue pleurer ses morts, il aurait été vraiment inconvenant de la part de la sirène d'aller l'interrompre dans son pèlerinage nocturne. 

Mots: 806

Djinshee ne savait pas s'il faisait froid, mais la buée que sa respiration provoquait était abondante. Et la fraîcheur n'apaisait en rien son mal de crâne. Elle n'apaisait en rien le feu qui brûlait en elle et qui devait l'échauffée plus que d'habitude. Elle avait l'impression qu'ils étaient deux dans son crâne : elle et une autre présence qui avait décidé de vivre en colocation dans le simple but de l’embêter. Néanmoins son agacement diminuait. Au moins cet endroit avait le mérite d'être calme. Le comble pour un cimetière : il y régnait un silence de mort. Les plus peureux auraient sûrement pris leurs jambes à leur cou. Mais cette ambiance ne la dérangeait pas. Elle était bien trop concentrée à se calmer pour réfléchir à quoi que ce soit d’autre.

   Elle avait loué une chambre dans une auberge. Croyant y trouver la paix, elle s'était complètement trompée sur ce compte. Une baston générale avait éclaté, encore et toujours avec pour origine l’éternel débat sur les divins, envahissant même les chambres. Elle regrettait un peu de ne pas avoir emmené Enderah. Elle aurait pu ramener le calme en moins de dix secondes, et ça l'aurait fait rire. Mais la mauvaise expérience qu'elle avait vécu avec Shawn, elle ne voulait pas que son fidèle compagnon la revive une seconde fois.

   Elle passait devant chaque pierre tombale, s'attardait parfois devant certains noms. Après tout, peut-être avait-elle connu l'un d'entre eux. Peut-être serait-ce le déclic et qu'elle arriverait à se souvenir de son ancienne vie. Quoique cela ne faisait pas partie de ses objectifs en réalité. Elle s'en foutait.

   Elle n'était pas seule. Il y avait une autre femme accompagnée d'un gros chien. Et c'était tout. En même temps la nuit était tombée, et qui se plaisait à se promener dans un tel lieu la nuit ? Les Nécromanciens ou les tarés de toute évidence. Si cette femme en question était Nécromancienne, cela voudrait donc dire qu'elle était la seule folle qui réussissait à trouver un apaisement ici. Elle crut voir l'inconnue s'attarder quelques secondes sur sa présence. Elle en ignorait la raison mais elle se permit de lui faire un petit signe de la tête en guise de salutation. Elle se recouvrit correctement de sa cape. Elle avait tendance à s'en défaire, puisqu'elle n'en avait pas vraiment besoin. Elle n'allait pas attraper froid, encore moins sur ce continent tempéré.

   Un étrange éclat attira son attention. Cela n'avait duré qu'un centième de secondes. Puis du mouvement. Dans le noir elle n'y voyait pas grand-chose. Mais il y avait du mouvement au loin. Quelque chose de précipité. Elle plissa les yeux, une main sortie en évidence de sa cape et prête à s'embraser. Le clair de lune lui révéla rapidement l'origine de cette agitation : un homme qui courait, poursuivi par d'autres à l'allure douteuse. Elle prit un temps avant de percuter. Quand on parlait du loup... un Nécromancien à n’en pas douter. Pitoyable de surcroit mais était-ce vraiment utile de le préciser... Il avait intérêt à rester dans son coin et de la laisser tranquille. Elle n'avait aucune envie de devoir le débarrasser de cadavres ambulants. Elle était venue ici pour souffler et échapper à une dispute débile, par pour se battre. Au fond d'elle, elle savait qu'il n'y avait que peu de chances qu'elle ne se retrouve pas impliquée à cette histoire. Elle et sa chance légendaire. En somme, elle n'allait pas trainer, et elle souhaitait la même chose à l'autre femme.

   -Je vous conseillerais de partir. Dit-elle dans le plus grand des calmes.

   « C'est lâche... » soupira une partie d'elle, comme si cela venait justement de sa colocataire cérébrale. Elle cacha son auto-irritation. Il y aurait vraiment quelqu'un d'autre dans sa tête ? Il fallait qu'elle se taise intérieurement... c'était ridicule.

   Elle n'était pas paniquée. Les zombies étaient encore loin, elle n'avait que deux cents mètres à faire tout au plus pour se retrouver dans la rue commerçante. Elle commença donc à faire le chemin inverse, tentant de profiter de ses dernières secondes de quiétude avant le retour au brouhaha populaire.

   Son exaspération silencieuse fut interrompue par un contact glacial. Elle sursauta. La température de sa jambe bondit. Rien n'y fit. Elle alla même jusqu'au feu en vain. Quelque chose la tenait et son élément n’avait aucun effet dessus. Elle voulut se dégager mais perdit au lieu de cela l'équilibre. Un frisson terrible lui parcourut l’échine quand sa peau rencontra la terre humide. Elle se mordit la lèvre.

   Ce ne fut qu'à la lueur de ses flammes qu'elle comprit. Un bras. Une main - calcinée maintenant. Accrochée à sa cheville. Sortie de terre. Prise d'une pulsion étrange elle dégaina son poignard et le planta dedans. Il ne réagit même pas. Elle le charcuta, pourtant. Pour s'en débarrasser elle devait l'arracher. Mais... comment était-il sorti en fait ?


   Un autre bras fit son apparition. Les doigts squelettiques effritèrent la terre glacée. Bientôt un crâne, c'était ça ? Elle tira brusquement sur le poignet. Elle tira de toutes ses forces. Il céda dans un craquement peu désireux. Djinshee se releva, éprouvée. Il fallait qu'elle sorte. Elle se retourna et n'eut pas l'occasion de faire un pas qu'elle trébucha. Elle se retrouva face contre terre. Son corps tout entier était brûlant, bouillonnant, si bien que le sol autour d'elle se craquela, dépourvu d'eau. L'autre main venait d'attraper sa jambe.

Nissa répondit au hochement de tête l'inconnu tout près d'elle, puis son attention se reporta sur la tombe qui se trouvait devant elle. Son attention fut attirée par un bruit qui se rapprochait. C'était comme un bourdonnement agaçant perçant le calme de la nuit. Qui était l’impertinent qui osait briser le calme serein de ce lieu? Elle ne considérait pas les cimetières comme un lieu sacré, mais la plupart des autres races si. Elles n'osaient pas prononcer une parole dès qu'elles passaient l'entrée de ce sanctuaire des morts, et ici, un homme criait en courant. 

Le clair de la lune éclaira l'individu en question. Son rapprochement permit à la sirène de constater qu'il était jeune. Il criait, comme si il appelait à l'aide. Il passa par un autre chemin et partit dans une direction parallèle à la sienne. Des êtes démembrés courraient après lui d'une manière déséquilibrée. C'était comme si ils venaient de sortir de terre et peinaient à garder l'équilibre, comme des nouveaux nés...ou des morts vivants? Les sorciers n'avaient-ils pas le pouvoir de redonner aux morts la vie, enfin quelque chose qui pouvait y ressembler, afin qu'ils soient à leurs ordres? Etant donné sa jeunesse, et la difficulté que devait incomber l'invocation, puis le contrôle, il avait dû rater une étape quelque part, car c'était entrain de se retourner contre lui. Tant que ça ne se cantonnait qu'à lui. Elle haussa les épaules et détourna le regard en riant tout seule. Peu importe qu'elle paraisse malsaine d'esprit, elle était seule ici avec Land et l'étrangère. D'ailleurs celle-ci se dirigeait déjà vers la sortie. Elle sentit que l'agitation provoquée par l'apprenti sorcier l'irritait. Ce fut , sans doute, ce qui provoqua son départ. Elle ajouta d'ailleurs une sorte de conseil amical avant son départ "Partir? Pourquoi? C'est maintenant que cela peut devenir drôle. Je vous souhaite une bonne soirée." Elle la regarda s'éloigner....puis tomber. Venait-elle de trébucher? La jeune femme se retourna et Nissa remarqua que son pieds semblait emprisonner. Elle concentra son attention là-dessus: une main la retenait fermement.

Elle écarquilla les yeux d'étonnement. Oui c'était bien une main, aussi surprenant que cela soit-il. Le sorcier n'avait pas du doser la puissance de son incantation et donner vie à tout le cimetière. Quel idiot de jouer avec des forces dont il ne comprenait pas toute la complexité ! Une seconde main sortit de la terre et attrapa fermement la jeune femme à terre, Nissa se précipita vers elle. Elle sortit le katana, accroché dans son dos, de son fourreau, et coupa les mains du mort-vivant. Elle tendit une main vers la jeune femme afin qu'elle s'en serve pour se relever "Vous allez bien? Je m'appelle Nissa."
Elle l'aida à se relever. Land grogna et attira l'attention de la sirène vers le sol. Celui-ci était entrain de s'écrouler et des bras sans mains fouillaient le sol, cherchant un appui afin de s'en extraire "Ce n'est pas vrai !" Elle était plus exaspérée que paniquée à l'idée d'avoir un zombie cherchant à s'extraire du sol. Si ceux-ci étaient morts, ils n'étaient pas très malins. Les avants-bras sortirent du sol et Nissa les coupa de nouveau. Elle avait l'impression de couper des tranches de saucisson. La tête apparut et bientôt le mort vivant n'eut plus de voix. Il poussait des gémissements, des cris incompréhensibles, des grognements..."ça ne meurt pas ces machins?!" Lorsqu'il réussit à extirper sa tête, la sirène s'empressa de la couper, l'envoyant voltiger, sous l'élan de son coup, dans les airs, comme si elle frappait une balle avec un bâton. "Au moins lui ne nous fera pas de mal..." Elle se retourna en observant le cimetière. L'ensemble de celui-ci semblait s'éveiller. C'était une véritable armée des morts que l'inconscient venait de créer. D'ailleurs celui-ci courrait dans la direction des deux jeunes femmes. Si precedemment il avait dû être trop occupé à fuir pour les remarquer, il s'approchait d'elles deux avec la lueur, dans les yeux, du désespoir. Elles n'allaient tout de même pas le sauver ! D'ailleurs l'ondine ne savait même pas comment réagirait la jeune femme à ses côtés. Néanmoins elle sentit que ses émotions étaient en feux. Elle ne devait pas avoir un caractère facile, et elle devinait qu'il valait mieux ne pas là lorsqu'elle s'énervait, ou être la cible de sa colère. Sous la fusion de ces dernières, la sirène avait presque envie de se faire toute petite. "C'est toute la ville qui va être menacée si les zombies l'atteignent. Ils vont chercher à dévorer tout le monde et ils seront tous contaminés. Nous sommes les premières spectatrices du début d'une épidémie..." Nissa ne portait pas les humains dans son coeur, mais elle ne pouvait ignorer la portée beaucoup plus étendue que pouvait avoir ce genre de virus.Le sorcier arrivait presque à leur hauteur, essouflé.

Mots: 875

HRP:

La brune n’était pas du genre à fuir le danger. En temps normal, Djinshee aurait apprécié son état d’esprit. Mais sa « bonne humeur » n’était pas au rendez-vous de ce soir. Elle voulait juste être tranquille, se reposer… Elle avait l’impression qu’elle n’avait pas fait une nuit complète depuis des lustres. En même temps, les évènements avaient tendance à s’enchaîner très vite, depuis un moment. Ca commençait à suffire. Nombre de mortels avaient déjà dû tomber en dépression, il était peut-être l’heure de faire une pause… ? Non, elle n’allait pas se laisser abattre par la tristesse. C’étaient ses capacités physiques surtout, qui demandaient une trêve.

   La dénommée Nissa sectionna la seconde main et l’aida à se relever. Elle lui montra un bref sourire en guise de reconnaissance. Le molosse qui l’accompagnait ne semblait pas du même avis vis-à-vis des choses que sa maîtresse semblait trouver « drôles ». Des mains s’en étaient également prise à lui. La femme ne perdait pas de temps. Elle coupait encore et encore tout ce qui sortait de terre sans exception. Djinshee dégaina aussi son épée mais n’eut pas vraiment à s’en servir. Elle ne savait pas si elle devait bien le prendre : d’un côté, elle avait vraiment la flemme de combattre, de l’autre, elle se sentait bête à faire la spectatrice. Elle leva les yeux pour observer la tête que la femme catapulta une bonne vingtaine de mètres plus loin.

   -Pas mal. Commenta-t-elle, comme s’il s’agissait du jeu.

   Les cris d’alarme du Nécromancien s’approchaient de plus en plus. L’Elémentale balaya les lieux du regard. Il avait créé un véritable bordel, et il osait venir vers elles ? Elle le fixa quelques secondes, un air d’indifférence sur le visage, mais ce n’était pas le cas. En fait, elle voulait juste tenter quelque chose… Le Sorcier fut interrompu dans sa course et tomba à la renverse, sur le dos. Il gesticula, se releva, une main cachant son nez puis repartit de plus belle, allant un peu moins droit.

   -Vraiment, qui a osé lui donner un coup de poing invisible dans la tête ? Dit-elle en marchant vers lui. Elle l’attrapa par les cheveux une fois qu’elle fut à sa hauteur et envoya une boule de feu sur ses poursuivants. Elle lui siffla à l’oreille. J’espère que tu sais réparer tes erreurs, si tu ne veux pas t’en prendre un deuxième.

   Elle le lâcha avec une certaine violence. Il n’avait fait qu’attiser sa colère ! A cause de lui, elle avait toujours mal au crâne ! Elle sentit une aura moite et morbide dans son dos. Elle se retourna brutalement et trancha l’abdomen du mort-vivant. Son corps retomba sur le sol, séparé en deux parties distinctes. Elle lâcha un grognement agacé. Et elle n’en avait toujours pas fini avec lui ! Ses bras se mouvaient à la recherche d’un appui pour ramper jusqu’à elle. Elle lui envoya son pied dans le front. Il craqua avant de prendre un angle bizarre – le sommet de la tête touchait les omoplates.

   -Le début d’une épidémie ? Il faudrait déjà qu’elle commence…

   D’ailleurs, ne soignait-on pas certaines blessures en les brûlant ? C’était une façon de faire peut-être barbare mais c’était apparemment efficace dans certains cas. Elle décapita un autre zombie, mais le suivant l’embêta plus : il n’avait pas de tête.

   -A l’attention de Monsieur Je-Suis-Le-Roi-Des-Glands, je pense qu’il serait plus que temps que tu répares tes c*nneries, parce que mon poing dans ta face, il va bientôt partir. Et je te garantis que tu vas le voir passer, cette fois.

   Il était juste derrière elle, alors qu’elle se débattait tant bien que mal avec toutes ces vermines nauséabondes, faites de chair décomposée et d’ossements pourris. Son manque de répondant et sa panique laissaient deviner qu’il ne savait pas du tout comment s’y prendre.

   -Ne me dis pas que tu ne connais aucune formule pour les ramener dans leur tombe ?

   Ses yeux de braise se posèrent quelques instants sur lui. Elle serra son épée double entre ses mains et faucha l’unijambiste devant elle. Ses cheveux s’enflammèrent et elle l’attrapa par la gorge. Elle rangea son arme et lui colla une beigne digne de ce nom.

   -Comme quoi, on apprend des choses tous les jours : il y a des gens suffisamment médiocres en ce monde, qui ne se questionnent même pas sur les conséquences d’actes aussi dangereux.

   Certes, elle n’était pas une référence, mais la nécromancie, ce n’était pas pareil. Surtout maintenant qu’elle y était confrontée.

   -Je te donne le choix : soit tu te bouges et tu nous aides, parce que figures-toi que nous, on a la gentillesse de le faire, soit, la prochaine tarte, tu la verras tellement que tu garderas la marque à vie sur ton visage.

   Oh oui, elle rêvait de lui donner un coup de poing enflammé. Il l’avait énervée bien vite. D’habitude, ça prenait un peu plus de temps. Comme quoi, elle était effectivement fatiguée, et donc à fleur de peau. Une douleur à l’épaule l’assaillit. Elle asséna un coup de coude au zombie puis s’embrasa. Ils avaient beau être dépourvus de muscles valides, c’était qu’ils mordaient forts ces enfoirés ! Aussi, son feu, qui était d’habitude dévastateur, ne leur provoquait pas le moindre mal, si ce n’était la force du souffle que cela provoquait.


   Conclusion : ils avaient du pain sur la planche.

Nissa observa l’apprenti sorcier tomber au sol. C’était bien fait pour lui. La jeune femme à ses côtés la devança en se dirigeant vers lui et l’attrapant fermement par les cheveux. Elle n’allait pas le plaindre et était tout à fait d’accord avec le comportement de la jeune femme car elle partageait ses sentiments. D’ailleurs ce dernier ressemblait à un petit garçon se faisant réprimander par sa mère, qui savait qu’il avait fait une bêtise et qui ne pouvait pas se justifier. Car c’était exactement ce qu’il c’était passé dans ce cas là. La jeune femme, dont Nissa peinait à ne pas laisser les émotions flamboyantes de cette derniere l’atteindre tellement elles étaient fortes, semblait se jouer des zombies, les tuant en les enchaînant, sans avoir l’air d’y faire attention, celle-ci étant focalisé sur sa victime. Lorsqu’elle s’embrasa, la sirène eut un mouvement de recul. Le feu était l’ennemi de l’eau. Elle avait déjà rencontré un élémental d’eau, dont son caractère correspondait très bien à son élément, et le caractère de la jeune femme en face d’elle correspondait lui aussi tout à fait à l’idée qu’elle se faisait du feu. Néanmoins ce fut le silence du jeune sorcier qui fit entrer la sirène en colère, elle aussi. Elle s’approcha à la suite de l’élémental et s’adressa au sorcier « Quoi ? Tu ne sais pas comment les arrêter ? Tu ne savais déjà pas les créer et les garder sous ta coupe ! Qu’est ce qu’on vous apprend quand vous prenez possession de vos pouvoirs. Il ne faut jamais s’aventurer au-delà de ses connaissances. Voir les autres faire ne veut pas dire qu’on peut le faire. Que les hommes sont stupides, toi encore plus ! »
Elle remarqua la blessure de cette dernière, qui emportée par sa fureur, ne lui avait toujours pas communiquée son prénom. « Vous êtes blessée. Si c’est contagieux, vous n’allez pas tarder à devenir comme eux. Toi, dit-elle en s’adressant au sorcier, risque-t’on de devenir zombie si on est blessé par l’un d’entre eux ?. Il remua la tête d’une manière négative et très rapide afin de leur signifier qu’il ne savait pas. Mais quel imbécile… Land viens s’il te plait. N’ayez pas peur, il va vous guérir de cela. » Le loup massif avait le pouvoir de guérir les blessures. Il fallait qu’elles ne soient pas trop profondes et importantes, par exemple, il ne pouvait pas régénerer des organes ou réparer des tissus profondément entamés, mais pour des morsures, c’était dans ses cordes. Il attendit que la jeune femme s’accroupisse afin de poser son museau sur l’épaule de cette dernière. L’intervention dura quelques minutes, puis lorsqu’il se retira, il n’y avait plus de traces de blessure.
Un petit groupe de zombies, composé de quatre individus morts vivants, repérèrent les flammes de l’élémental, tel un soleil pour un tournesol, et ils se dirigèrent immédiatement vers eux. Le sorcier se leva d’un bond et vint se placer derrière les deux jeunes femmes qui étaient en position de combat. « Pitié, aidez-moi. Je ne peux pas les arrêter, mais ils me veulent. Je pense qu’ils n’ont pas appréciés d’être sortis de leur sommeil. –Je les comprends, et tu mériterais qu’on te lance en pâture à eux. Tu joues avec des forces dont tu ne mesures pas toutes les conséquences gamin. Le sorcier ne devait pas être beaucoup plus jeune qu'elle, mais de part son attitude, elle ne pouvait pas le qualifier d'une autre manière.–Ils ont faim, ils vous mangeraient aussi, ainsi que tous les habitants de la ville. »Le pouvoir de la sirène lui indiqua qu’il croyait vraiment en ce qu’il disait, mais une lueur de perfidie s’éveillait aussi en lui. En invoquant le bien commun, il ne pensait qu’à lui, et tenterait sûrement de s’échapper dans la mêlée. « Nous allons nous en occuper, mais ne compte pas t’échapper, car je n’hésiterai pas à te tuer. » En effet, après s’être occupée de ces derniers, elle voulait apprendre à ce jeune sorcier que ses actes auraient des conséquences, et pas très agréables pour en ce qui concernait le cas de ce dernier, et elle savait, sans même prononcer une demander à sa compagne de mal fortune, que celle-ci partageait aussi son désir de lui faire goûter sa colère. Elle le surveillerait du coin de l’œil peut-être mieux que l’ondine.



Elle rangea son katana dans son dos, et créa de l’eau qu’elle matérialisa sous forme de fouet, un dans chaque main. Lorsque ces derniers furent assez près, elle en lança un en avant en prenant de l’élan avec son bras afin de donner plus de force à son coup. Le fouet s’allongea jusqu’à claquer contre le zombie, puis la liane entoura la cheville de ce dernier qu’elle tira d’un coup sec afin de le faire tomber au sol, puis le tirer vers elle. Ne pouvant pas se relever, il n'eut pas la vitesse nécessaire pour esquiver le coup de son épée qui lui coupa la tête « Si vous voulez bien vous donnez la peine de le brûler… ». Le cimetière deviendrait bientôt un brasier.
 

Mots: 844

Nissa lui proposa rapidement ses soins, ou plutôt ceux de son compagnon. Djinshee éteignit le brasier qui lui servait de chevelure. Elle ne s’y refusait pas. Ne savait-on jamais quelle saloperie elle pouvait attraper, et puis, des soins ne se refusaient sous aucun prétexte. Elle ne devait pas avoir peur… ? Peur de quoi ? D’un animal qui la soignait ? Elle se retînt du commentaire qui ne méritait de toute façon pas d’exister. La cure apportée par la bête fut efficace. En quelques secondes, la douleur disparut. Elle sourit de nouveau à la brune et donna une caresse à son chien.

  -J’ai bien fait de tomber sur vous.

  Cependant, l’heure n’était pas aux grands débats. Elle regrettait vraiment de ne pas avoir emmené Enderah. En plus d’imposer le calme à l’auberge, elle aurait écrasé et déchiqueté tous ces morts en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire, avant de jouer au chat et à la souris avec le Sorcier pour finalement le manger. Quoique… Ces bêtes-là étaient possiblement bourrées de produits toxiques, vu comment certaines abusaient de l’alchimie… Il se réfugia derrière les deux femmes en implorant leur pitié, comme quoi – le pauvre chou – il allait se faire manger. Nissa répliqua en lui faisant la morale. Elle était un peu trop gentille à son goût…

  -Tu ne mériterais pas, tu mérites, tout simplement. Parce qu’elle comptait bien le tuer avant la fin de la soirée. Les personnes comme lui n’avaient pas à exister.

  Les morts-vivants convergeaient vers eux, attirés, sans doute, par la lumière qu’elle avait produite, ou l’aura de leur « maître », si cela existait - ce qui était peu probable, parce qu’à ce niveau d’idiotie, soit il n’en avait pas, soit elle était si nulle qu’ils avaient mieux à gagner à fuir. Elle en découpa deux, haletante. Son endurance laissait parfois à désirer. Mais ne serait-ce que par fierté – surtout pour une question de vie ou de mort, elle ne s’arrêtait pas. Le gamin, comme l’avait si bien nommé sa camarade, céda finalement aux menaces et dégaina une dague qu’il portait à sa ceinture. Il n’était pas à l’aise au combat et cela se voyait. Avec une arme aussi peu portante, elle voulait bien le croire… Mais quel abruti ! Il n’avait vraiment pensé à rien ! Elle tourna la tête vers Nissa lorsqu’elle usa pour la première fois de sa magie, curieuse de ce qu’elle leur réservait. Elle écarquilla aussitôt les yeux et tressaillit dans un mouvement de recul. Son cœur fit un bond. Elle crut un moment manquer d’air. C’était à se demander si elle avait oublié les zombies. Elle restait focalisée sur les mains de sa partenaire. De l’eau. Des fouets d’eau… ? Elle frissonna et se baissa légèrement lorsqu’elle les brandit. L’adrénaline lui proposait plusieurs solutions : fuir, fuir, ou fuir. Rien que de voir et de savoir qu’elle maîtrisait l’eau… Elle la regardait autrement… Sensation horrible de se sentir piégée, trahie par une personne à qui elle avait osé donner une once de confiance. Elle ne bougeait plus, incapable de l’approcher, au moins tant qu’elle aurait de l’eau sur elle, et surveillait ses moindres faits et gestes. Ainsi, quand elle lui demanda de brûler le corps qu’elle avait mis hors d’état de nuire, elle prit un moment avant de réagir, mais fut rapidement rattrapée par son instinct : mieux valait obéir si elle ne voulait pas subir ses assauts. L’attitude de supériorité qui avait commencé à naître en elle avait instantanément disparu. De sa main tremblante, elle fit jaillir des flammes qui se répandirent sur les corps mutilés, ou ce qu’il en restait. Ceci fait, elle dévisagea l’Ondine. Frisson. De la crainte, mêlée à un certain dégoût. Elle détourna les yeux. Elle ne lui en voulait pas, mais c’était plus fort qu’elle. Elle n’y pouvait rien. Personne n’y pouvait grand-chose, en fait, si ce n’était celui ou celle qui l’avait transformée. Et encore. Il aurait au moins fallut prévoir la météo… Enfin bref… Peu importait, le mal – si c’en était un – était fait.

  Il lui semblait que sa migraine revenait de plus belle. Elle n’en fit rien. C’était purement psychologique. La seule façon pour elle de l’affronter était de penser à autre chose. Il n’y avait donc qu’une issue : combattre ces choses. Quel cercle vicieux… Sa vie ne consistait donc qu’à ça ?

  -Ils sont combien, exactement ? Tu as déterré une partie ou, l’entièreté du cimetière ?

  Et sa voix vacillante… Nissa ne la toucherait pas, elle le savait. L’image de cet élément qu’elle détestait tant la hantait. Ce n’était pas le moment !

  Pas du tout, même. Ils étaient encerclés.

Evidemment, Nissa avait tout de suite vu que quelque chose n’allait pas. Ce n’était pas difficile, après tout.

   -C’est rien…

   Sa gorge était nouée. La brune eut la gentillesse de cesser d’user de l’eau. Djinshee se sentit aussitôt mieux. Ses forces l’avaient comme quittées, mais c’était mieux. Elle ajouta qu’elle n’avait pas l’intention de l’attaquer. Ca avait été inutile de le préciser, puisqu’il en allait de sa propre survie. Qu’elle le dise était tout de même bien. Elle se concentra de nouveau sur leurs ennemis numéro un. C’était vrai, elle était plus qu’indispensable ici. L’une comme l’autre était indispensable. Quant au Sorcier… bah il était con. Elles n’avaient plus de temps à perdre. Il était désolant d’en arriver là, mais elle allait devoir faire exploser le cimetière. Elle ne comprit pas pourquoi sa camarade de galère sortit une flûte. Comment lui expliquer que ce n’était pas le moment ? Et même, si elle maîtrisait l’art d’hypnotiser les cobras, elles avaient ici affaire à des zombies, ce qui, jusqu’à preuve du contraire, n’avait rien à voir. Elle se mit à jouer. La mélopée sonnait très étrangement avec le lieu et le contexte. Quelques morts-vivants s’arrêtèrent, toujours suivis par leurs voisins. L’Elémentale assistait au spectacle. Que se passait-il, exactement ? Pouvait-on réellement dompter ces choses ainsi ? Elles qui n’avaient plus de sens ? Elles qui se fichaient de la douleur de ses flammes ? En tout cas, ça avait l’air de marcher. Sans chercher à en savoir plus, elle fonça dans le tas et décapita trois d’entre eux en un seul coup. Elle sourit. Quoi de plus plaisant pour se détendre, après la peur qu’on lui avait offerte. Le compagnon de l’Ondine faisait de même. Il sautait sur eux, s’en prenant directement à leur visage, si l’on pouvait encore appeler cela des visages.

   Elle tranchait, tranchait. Elle s’était aventurée dans la masse, comme dans un champ de maïs et les abattait un à un. L’odeur de putréfaction était nauséabonde, mais elle tenait bon. Elle ne s’éloignait pas trop. Nissa était à découvert et seule. Si son numéro de flûte enchantée relevait de la véritable magie, elle risquait de vite faiblir. Et même, pour elle : elle était quasi collée à ces cadavres. Pour l’instant, elle espérait surtout ne pas attraper de maladie, mais s’ils se remettaient à bouger, elle était mal. Elle ne se changea en torche humaine que quand elle sentit que la mélodie faiblissait. Elle rejoignit aussitôt la jeune femme dans le cercle qu’avaient formés les zombies. Il y avait au moins trois rangées de corps par terre. Elle fit sortir un jet incandescent de ses mains, et elles furent bientôt entourées d’un rideau de feu. S’ils souhaitaient passer, ils allaient devoir brûler ! La chaleur ambiante était devenue si… Parfaite ! Elle s’assit par terre, éreintée et observa son œuvre. Les zombies tombaient les uns après les autres, notamment parce qu’ils trébuchaient sur les restes de leurs congénères. C’était joli. C’était très joli, mais il y avait un problème. Il manquait un spectateur : le Sorcier. Elle se retourna, dans un sens, puis dans l’autre. Où était-il ?!

   -Le Sorcier.

   Elle bondit. Il était parti ! Ce bon à rien s’était fait la malle ! Elle jura. Il ne payait rien pour attendre. Il allait mourir dans les plus atroces souffrances. Elle jeta un œil à Nissa. Elle gardait une distance raisonnable avec elle.

   -Je reviens.

   Certes, elle était crevée. Certes, elle allait en prendre plein la tronche si elle allait le chercher, mais elle ne le laisserait pas s’enfuir. Epée en main, elle courut et passa à travers les flammes. Elle se heurta à un zombie qu’elle s’empressa de découper, puis s’écarta vite de la masse pestilentielle. Elle zigzaguait entre les pierres tombales. Elle n’avait aucune idée d’où il pourrait se cacher, mais une chose était sûre : il était sorti de ce cimetière à la noix. Avec un peu de chance, elle le trouverait vite… C’était si grand ici, et ils étaient assez loin de la rue commerçante.

   Elle plissa les yeux. L’obscurité ne lui facilitait pas la tâche ! A tout hasard, elle balança une petite boule de feu devant elle. Elle fit une longue ligne droite avant de se dissiper dans la nuit. Elle crut voir un mouvement et accéléra. Ses muscles lui criaient qu’ils n’en pouvaient plus, mais son cerveau leur gueulait de continuer. Elle allait le trouver. Elle accéléra encore. Elle n’avait jamais couru aussi vite. Elle n’allait pas tenir longtemps. Mais elle le voyait. Elle le voyait. Cette forme noire, c’était lui. Usant de sa télékinésie, elle lui attrapa les deux pieds. Il tomba la tête la première dans la terre. L’heure n’était pas à la rigolade, mais vu de l’extérieur, ce devait être hilarant. Vite, elle se jeta sur lui. Il poussa un cri de douleur et toussa. Elle l’avait écrasé et avait manqué de l’assommer. Elle le retourna violemment, à bout de souffle. Sa gorge lui faisait mal et elle avait un goût de sang dans la bouche. Son poing partit tout seul, sans qu’elle n’ait à le commander.

   -C*nnard ! Cria-t-elle.

   Sa main s’enflamma et elle la lui envoya de nouveau. Il hurla et perdit connaissance quand l’air lui manqua. La moitié de son visage avait pris une teinte cramoisie, laissant place à la chair par endroit.


   Elle n’en pouvait plus. Elle se laissa tomber à côté de lui. Le simple fait de respirer lui faisait mal. Son cœur palpitait à toutes vitesses, si bien qu’elle commençait à songer à sa santé cardiaque. Elle sourit et lâcha un rire grave. Elle avait fini par le lui balancer, son poing de feu.

Djinshee était toujours aussi essoufflée. Elle serait bien restée comme ça. C’était sans compter l’intervention de Nissa, qui ne se gêna pas pour la tirer par le bras. Sa vision se brouilla, le temps que le sang remonte à sa tête. La sensation était désagréable. Surtout qu’elle ne faisait aucun effort pour l’aider. Ses jambes étaient en congé, et on venait demander leurs services. Cette femme avait du cran. On voyait que ce n’était pas elle qui avait fauché le maïs, incinéré les défunts pour ensuite piquer un long sprint, puis tabasser quelqu’un. Une fois debout, elle s’appuya à la première pierre tombale venue. Il lui fallait du feu, sinon elle n’allait plus tenir longtemps. Bonne nouvelle, les cimetières n’étaient pas réputés pour être des plus illuminés. Elles allaient bien s’amuser. En plus, elles allaient devoir abandonner le Sorcier. Dommage, elle aurait aimé le faire souffrir encore un peu pour ce qu’il avait fait. Mais son sort n’était au final pas si mal : dévoré par sa propre bêtise. Il eut même la chance de se réveiller en plein milieu du repas. Tandis qu’elle se faisait entraîner par sa camarade, l’Elémentale ne plus retenir un ricanement. Elle se tut rapidement, rattrapée par son souffle qu’elle n’arrivait décidément pas à reprendre. Elle rampa derrière la pierre tombale voisine à celle de l’Ondine et s’assit dans une position où elle n’avait plus le moindre effort à fournir. Ce n’était pas souvent qu’elle s’était retrouvée dans un état pareil. Si, en fait, c’était tous les quelques mois, maintenant qu’elle y pensait. La dernière fois avait été au Duel… C’était récent. Elle pencha la tête vers la jeune femme et prit le temps de comprendre ce qu’elle lui disait. Elle se moquait d’elle ?

   -Qu’on brûle tout, qu’on brûle tout… Je te laisse t’occuper d’aller chercher l’énergie nécessaire. Haleta-t-elle.

   L’utilisation du « on » n’était même pas judicieuse… Elle frissonna. Et il fallait que ça lui rappelle qu’elle contrôlait l’eau…

   -En plus, comment comptes-tu quitter la ville ?

   Elle comprenait, mais il était hors de question qu’elle reprenne le bateau avant de s’être un minimum reposée. Cela la fatiguait suffisamment, si en plus était faisait le trajet ainsi, elle risquait de mourir.

   Elle réfléchissait du mieux qu’elle pouvait à ce qu’elles pourraient faire. Impossible de les ramener dans leur tombe, et pour les tuer, elles étaient fatiguées… Au pire, elles pouvaient demander de l’aide… Aller à la ville et ramener vite fait bien fait quelques couche-tards... Mauvaise idée… Elle n’aurait su dire pourquoi, mais celle-ci était foireuse. Très, très foireuse, si elles voulaient ensuite quitter le continent.

   -Un objet très inflammable, à tout hasard, tu aurais ça ? De l’alcool, ou… Je ne sais pas, un truc…

   Elle s’arrêta. De l’alcool. Une taverne. Oui, ça revenait à appliquer son idée pourrie et à cambrioler un bâtiment en pleine beuverie, mais ça pouvait marcher. Faire une sorte d’explosion. Ca ne lui nécessiterait que peu de magie. Elle n’avait pas de meilleure solution.

   Elle entendit des bruits de pas derrière elle. Oh, non… Pas eux… Flairaient-ils leur odeur, ou étaient-elles si bruyantes ? Pourtant, elle avait fait très attention. Elle laissa retomber sa tête en arrière, contre la pierre froide. Etait-il plus fatiguant de courir ou de se battre ? Elle reprit son épée double, pivota et sépara la tête du reste du corps. Elle revînt immédiatement à sa cachette. Elle ne se voyait pas en tuer dix de plus.

   -Je confirme, de l’alcool ne serait pas de refus. Beaucoup d’alcool. Et du fort.

   Pas du cidre. De la vodka, ou du whisky. Le genre de liquide, qui, en plus d’être aqueux – et donc imbuvable si elle n’écoutait que son cœur – était imbuvable. Pour une fois, un tour au bar serait bénéfique et permettrait de terminer une baston. Elle découpa un zombie qui s’était un peu trop approché. Elle se pencha un peu en avant. Point de côté. Elle tâcha de respirer plus lentement de grandes bouffées. C’était insupportable, ces saloperies.

   -Que dirais-tu d’un détour par la taverne ? A moins que tu n’aies une autre solution…


   Maintenant qu’elle y pensait, il y aurait pour sûr une cheminée, là-bas. Elle pourrait y refaire ses forces. L’enjeu était donc double. Elle avait intérêt à accepter, car c’était la première et la dernière fois qu’elle l’entendait dire ça.

Le répit accordé par les zombies grâce à la dégustation de leur maigre festin, fut de courte durée. Ils étaient déjà à la recherche du prochain. Ils ne dégustaient même pas ce qu’ils se mettaient sous la dent, c’était une honte. Elle ne connaissait pas le système digestif des  morts vivants, mais elle était presque persuadée qu’ils ne gardaient pas la nourriture, qu’elle était directement expulsée. Avoir faim sans jamais être rassasiée devait être un supplice. L’élémental de feu avait l’air d’avoir repris du poil de la bête, malgré la fatigue. Si elle pouvait absorber l’énergie de ce qui l’entourait afin de restaurer ses forces, elle ne pouvait, malheureusement, pas la faire circuler de son corps à un autre afin d’en faire profiter ses compagnons d’armes. Alors que son esprit se vidait de toutes idées pouvant exterminer ces zombies et protéger les habitants de la ville, Djinshee proposa une idée brillante. Après tout, c’était elle l’experte en pyromanie, Nissa était la maitresse des eaux, elle éteignait les incendies, elle ne savait pas les créer. La jeune femme proposa d’user d’une bonne dose d’alcool fort afin de lui donner suffisamment de matières à brûler afin de réussir à enflammer cet endroit. Dans tous les cas, tous les individus présents ici étaient morts. Leur acte serait considéré comme une profanation, un acte de vandalisme digne de la peine de mort. C’est pour cela qu’elle pensait déjà à la manière dont elles s’enfuiraient de ce lieu. Elles auraient beau avoir sauvé les habitants, ils ne comprendraient pas et ne le sauraient pas. Le quotidien malheureux, solitaire et anonyme des héros. « Oui de l’alcool, il nous faudrait une bonne dose, ça nous détendrait et ne nous ferait pas de mal. » Elle sourit face à son propre humour. Elle savait que Djinshee ne parlait pas d’alcool et de faire un tour à la taverne afin de profiter d’une soirée de débauche, mais de se procurer de l’alcool assez fort afin de le brûler. Néanmoins, l’idée d’aller passer sa nuit là-bas, plutôt qu’à se casser la tête à résoudre un problème qui lui était tombé sur les bras car elle avait été au mauvais endroit au mauvais moment la charmait beaucoup plus à cette heure de la nuit, même si elle devrait remettre à leur place la moitié de la taverne. « Bon allons-y, je te couvre ! » Elle sortit de leur cachette et se dressa devant eux, propulsant une vague d’eau qui mit à terre tous ceux qui se trouvaient devant sa route, Land à ses côtés.

Djinshee fila dans son dos. Elle remodela l’eau qu’elle avait créé afin de la transformer en grosse bulle d’eau qui recouvrit tous les zombies présents de la tête aux pieds afin de les empêcher de marcher, car ils n’étaient pas assez à l’aise sur terre pour s’y promener, alors dans l’eau. Un réservoir d’eau se trouvait un peu plus loin dans le cimetière, elle pouvait le sentir. Elle les y traîna, en fournissant beaucoup d’efforts. Ce réservoir était en contrebas, encerclé par une pente abrupte. On aurait presque dit un trou dont les contours étaient fortement inclinés. Dès qu’elle les eut plongée dedans, elle courut vers la sortie afin de rejoindre l’élémental. Land la suivit jusqu'à la sortie puis y resta posté. Si il pouvait canaliser ceux qui tenteraient de sortir, cela leur donnerait davantage de temps. Elle pénétra dans la première taverne qu’elle croisa. Celle-ci se trouvait juste à côté du cimetière. La sirène se dit que le dirigeant avait été intelligent pour se placer à un endroit si stratégique : il n’y avait pas de meilleurs moments pour tenter d’oublier ses soucis que lorsque l’on venait ici préparer l’enterrement ou que l’on en sortait. Il devait avoir beaucoup d’argent et bien en profiter, ce qu’elle trouva, dans un second temps, répugnant. Il s’enrichissait proportionnellement au malheur des autres. Il fallait bien que tous les métiers existent, mais certains étaient beaucoup plus valorisants que ce dernier.


Elle espérait que l’élémental avait bien avancé dans son travail qui consistait à récolter de l’alcool fort. En pénétrant dans la taverne, elle ne fut pas surprise de voir beaucoup des clients  à terre et une Djinshee en furie au bar. En effet, elles n’avaient pas d’argents sur elle, en tout cas Nissa n’en avait pas et ne comptait pas en dépenser pour arrêter des morts-vivants, qui n’étaient pas de sa responsabilité, et sa compagne d'armes devait être dans le même état financier qu'elle « On en est où ? Tu as besoin d’aide pour ramener l’alcool ? ». Il fallait faire vite. Elle avait l'impression que les secondes qui passaient étaient des minutes, et les minutes des heures.

Mots: 779

Djinshee piqua le deuxième sprint de sa vie. Elle avait subitement accéléré lorsqu’en regardant par-dessus son épaule, elle avait aperçu une énorme vague submerger une partie du cimetière. Elle ne savait pas d’où elle sortait ses forces et son endurance. De la peur, certes, mais… Même à elle, ça lui paraissait anormal. Elle manqua de se prendre quelques pierres tombales ou de glisser, avant d’atteindre la sortie et de prendre un virage dangereux en direction de la première lumière qu’elle vit à travers les fenêtres d’un bâtiment. C’était bel et bien une taverne, d’après son enseigne. Elle poussa la porte, à bout de souffle, et s’écroula sur la première table venue. Les rires qui précédaient son entrée désastreuse se turent tous, en même temps que des protestations s’élevaient.

   -La porte ! Faites attention !

   L’avait-elle cassée ? Elle tourna la tête. Son cœur allait mourir.

   -Tais-toi, elle va très bien ta porte.

   Elle aperçut un feu qui crépitait joyeusement dans la cheminée. Elle s’y dirigea aussitôt.

   -Faites attention ! S’écria quelqu’un.

   Le plus naturellement du monde, elle se pencha vers l’âtre, puis stoppa net. Elle fit volte-face et scruta un à un les clients du bar.

   -Il y a un Humain parmi vous. Haleta-t-elle. Où est-il ?

   Silence. Elle les pressa. Elle n’avait pas que ça à faire, elle avait des zombies à tuer ! Un homme finit par lever la main, timide.

   -Pourrais-tu te décaler et aller au fond de la salle ? Ca me gêne d’en arriver là, mais c’est pour la survie de tout le monde ici présent. Donc ne discute pas.

   Il ne s’exécuta que quand elle lui montra ses armes. L’anti-magie disparut et elle alla se blottir dans les bras chaleureux des flammes.

   -Ma parole, mais elle est bourrée !

   -Je ne suis pas bourrée, je suis Elémentale, c’est très différent.

   Tous les yeux étaient rivés sur elle. Certains riaient. Elle détestait être au centre de l’attention. Surtout au ridicule. Son cœur se calma et ses poumons aussi. Elle sentit bientôt ses muscles, revigorés et détendus. C’était si agréable qu’elle aurait pu s’endormir. Mais elle dû se résoudre à quitter ce formidable lit. Les mains sur les hanches, une expression sévère sur le visage, elle regarda le tenancier.

   -Vous… voulez quelque chose ?

   -J’ai besoin d’alcool en grande quantité. De préférence, le plus fort que vous avez.

   La moitié de la clientèle éclata de rire. Elle dégaina son épée, furieuse. Il se turent aussitôt.


   -Calmez-vous, mademoiselle, ce n’est que de l’alcool.

   -Tais-toi ! C’est une question de vie ou de mort ! Vous avez ça, des tonneaux que je puisse transporter ?

   -Combien ?

   -Mais j’en sais rien !

   Elle s’approcha du bar et passa de l’autre côté.

   -Montrez-moi vos réserves ! Plus vite que ça ! Elle se tourna vers les clients. Et vous, vous ne bougez pas ou je vous fais la promenade au cimetière !

   Pour eux, ça n’avait pas le même sens, mais ça restait efficace. Le gérant l’emmena dans la réserve. Il ne devait pas être habitué à un tel comportement. Il tenta d’entamer la conversation pour détendre l’atmosphère.

   -Et… Pourquoi avez-vous besoin d’autant d’alcool ? Pour organisez quelque chose ?

   -Un feu d’artifice. L’alcool, c’est dégueulasse, autant s’en débarrasser. Croyez-moi ou non, mais il y a une légion de zombies dehors.

   Il devait être tenté de rire mais ne fit rien, de peur de se faire embrocher. Il ne voyait surtout pas le rapport avec l’alcool. Il lui montra de petits tonneaux d’environ trente centimètres de diamètre. Il était écrit « WHISKY ♥ » dessus – oui, il y avait vraiment un coeur. Djinshee lui ordonna d’en prendre deux et de lui en donner le même nombre.

   -Et c’est pas parce que mes deux bras sont pris que je ne peux pas vous tuer.

   Elle revînt à l’avant de la taverne. Nissa venait tout juste d’arriver. Elle fit voler les deux tonneaux du tenancier jusqu’à elle.

   -On en est que tu prends ces deux tonneaux, et on se casse ! Ca suffira.

   Sur ce, elle arracha le tablier de l’homme, fit un petit détour par le feu – en lâchant ses tonneaux bien entendu – puis disparut.

   -Et ma paye ! …

   Mais Djinshee était déjà loin. Elle se précipita à l’entrée du cimetière. Pour plus de confort, elle faisait voler les barils devant elle. Elle croisa le loup, et les déposa ici. Elle déboucha le premier, déchira le tablier qu’elle avait volé et en mit un morceau à dépasser du trou. Elle l’alluma du bout des doigts. Après s’être assurée qu’il tenait correctement, elle le propulsa en plein milieu du tas de morts-vivants qui s’approchaient dangereusement. Il n’y eu aucune détonation, seulement le bruit de la déflagration. Les flammes se répandirent sur un rayon d’une dizaine de mètres. Elle sourit, autant parce que ça marchait bien, que les déflagrations, c’était drôle.

   -Au suivant…

Djinshee agissait rapidement. A peine la sirène était-elle entrée dans la salle que cette dernière lui envoyait deux tonneaux à ramener jusqu'au cimetière. Elle était à bout de souffle et faisait comme elle pouvait afin de le reprendre en maintenant le rythme qu'elle se devait de tenir si elle ne souhaitait pas que les zombies sortent de la zone de confinement. De plus, elle s'inquiétait pour Land, elle avait très peur qu'il se fasse mordre et qu'il soit contaminé par le virus des morts-vivants. Elle n'était pas sûr que cela soit contagieux, mais elle ne préférait pas tester l'expérience ou la voir tester. 
Elle renversa un des deux tonneaux au sol et saisit l'autre avec ses deux bras. Elle avança difficilement en poussant celui au sol à la force de ses jambes, accélérant le pas afin que la distance qu'elle arrivait à produire par ses poussées, ne soit pas totalement gâchée par la légère pente qui faisait revenir l'alcool vers elle. Elle suait à grosses gouttes, ce qui n'aidait pas à améliorer sa mauvaise humeur. L'élémental progressait plus rapidement qu'elle et semblait avoir beaucoup plus de facilités, alors qu'elle était épuisée, à la limite de s'effondrer quelques minutes plus tôt. Dans la nuit, la question de Nissa résonna comme un cri en même temps qu'elle expirait l'air:
"Mais qu'as-tu mangé là-dedans? Ils t'ont donnés un steak hyperenergétique ? Je veux la même chose !"
Après les efforts fournis pour contenir les zombies, elle n'avait plus de force. Elle poussa une dernière fois le tonneau au sol du pied qui vint se placer à côté de ceux que Dinshee avait posé au sol, il les culbuta même un peu. Elle posa lourdement le dernier. Son attention se porta en premier sur le loup. Ce qu'elle vit la rassura, il était en bon état physique. Elles étaient arrivées à temps avant que leurs ennemis ne se sortent de son piège et progressent vers la porte qui leur aurait offert le festin de leur vie. L'élémental se mettait déjà à l'oeuvre afin de fabriquer son piège mortel "Tu as besoin d'aide?" Tout d'un coup l'adrénaline retomba et la fatigue s’abattit sur la jeune femme comme une masse. Cette dernière lui répondit par l'action en envoyant sa première bombe au centre du groupe de zombies qui se dirigeait vers elles deux. La sirène se jeta sur le sol, au cas où des débris de l'explosion soient propulsés sur elle. Elle se redressa sur ses coudes avant et analysa la situation: le feu commençait déjà à se répandre dans le cimetière. "Continue, il faut rester sur cette lancée." Pour le moment, elle était inutile, elle servait simplement à couvrir les arrières de Djinshee qui se concentrait à faire tout sauter. Du bruit provenant du village attira le regard de Nissa, elle ne s'attendait pas à ce que le danger vienne de là, mais elle fut très surprise. L'explosion avait réveillé les maisons aux alentours, et ces dernières s'illuminaient chacune leur tour. Les clients du bar, eux , n'avaient pas besoin de temps pour émerger de leur sommeil et se réveiller, ils sortaient déjà tous dans la rue afin de voir ce qu'il s'y passait. Le directeur de l'auberge les reconnut immédiatement, il avait dû se résigner à ne pas courir après les deux voleuses, peut-être trop fatigué et alcoolisé pour entreprendre cela, mais elles étaient là sous son nez. "Les voleuses sont là, elles ont pris tout l'alcool, allons leur apprendre les règles les gars... Et elles incendient le cimetière !" Elles étaient attaquées des deux côtés. Les humains étaient vraiment idiots, ils ne comprenaient pas qu'elles se battaient pour leur survie à eux. "Djinshee, je m'occupe d'eux." Elle n'avait pas besoin de donner d'ordre sur ce qu'elle devait faire à l'élémental, cette dernière s'en sortait très bien, une fois dans son élément. Elle s'élança en avant et s'arrêta à mi-chemin entre la taverne et le cimetière, ainsi elle pouvait toujours voir si d'autres individus arrivaient de l'autre côté. Lorsqu'ils t'entèrent d'approcher, elle créa simplement suffisamment d'eau afin de l'envoyer heurter les premiers qui tombèrent à la renverse. Cela ferait prendre peur aux moins courageux.


Mots: 745 

Sa camarade n’en pouvait plus. Déplacer ces tonneaux devait l’avoir vidée. Djinshee sourit en entendant sa question.

   -Mieux qu’un steak, un bon feu de cheminée.

   Le changement soudain des deux forces qu’elles représentaient avait quelque chose, qui, elle devait l’admettre, avait quelque chose de plaisant. Elle la craignait un peu moins.

   -Je pense pouvoir maîtriser un moment, reposes-toi.

   Son plan fonctionnait à merveille. Des zombies, elle en avait éliminé bien plus en une explosion qu’avec leurs deux épées réunies. Cela aurait pu continuer et elles auraient pu en finir si seulement elles n’avaient pas réveillé le voisinage et attisé la colère du tavernier. Nissa prétendait pouvoir s’en charger.

   -Dans cet état ?

   N’avait-elle pas moyen de se régénérer, avant ?

   Le problème était que se montrer violente envers eux ne les avancerait pas. Croiser des affiches avec leur visage plaquées sur tout le continent ne la charmait pas plus que ça. Si elles pouvaient se cacher… La jeune femme avait bien l’intention de le faire pour ce qui était de sa personne.

   -Ne les tue pas. Dit-elle en voyant sa partenaire à l’œuvre. Elle les plaignait et était bien soulagée de ne pas être à leur place. Subir des assauts aussi… aquatiques...

   Elle fit brûler le quatrième tonneau et courut rattraper la jeune femme. Elle les entraîna dans le cimetière. Il restait des morts-vivants, mais leur nombre avait considérablement diminué. Si les habitants décidaient de les poursuivre, ils comprendraient bien vite la situation. Djinshee s’empara de l’ombre alentours de la nuit pour les recouvrir. Ainsi, il y avait peu de chances qu’on les voit. Elles se cachèrent derrière une pierre tombale. Le plan était simple, elle ne l’aimait pas, mais elle ne voyait pas d’autre solution : se faire passer pour les héros de l’histoire… ça pouvait ne pas marcher. En fait, il y avait de fortes chances, dans le sens où les habitants ne sauraient pas comment réagir.

   -Où elles sont passées, ces deux-là ?

   -Elles n’ont pas dû aller très loin.

   Les cadavres déambulaient un peu partout, dans tous les sens, probablement à cause de la soudaine hausse de la concentration de nourriture sur leur territoire.

   -AAAAAHH !!! Mais qu… S’écria un homme en balayant son champ de vision de sa torche.

   Certains zombies l’avaient pris pour cible, lui ainsi que plusieurs de ses camarades. Ils s’apprêtaient à s’enfuir en vain ; le cercle était déjà fait. L’Elémentale sortit discrètement de sa cachette. Elle était toujours dans l’ombre. Son épée en main, elle élimina deux zombies, puis poussa ceux d’à côté avec sa télékinésie, créant une ouverture.

   -On va vous sortir de là.

   Quelle magnifique phrase toute faite, digne des plus grands idiots pensant vivre un conte fabuleux ! … Djinshee ne manquait pas d’originalité, et elle ne faisait que le constater.

   Elle prit deux des « victimes » par le bras, en profita pour consommer un peu de feu et repoussa tous les cadavres puants qui osaient s’approcher. Le plus vite possible, elle les libéra du cercle et se chargea des autres. L’exercice s’avérait plus difficile que prévu ; tandis qu’elle conduisait les ex-poursuivants, il lui était impossible de tuer, sous peine de blesser quelqu’un de façon involontaire, et de se le remettre à dos. La situation était suffisamment complexe et étrange – vraiment, elle avait atteint le fond – elle n’était pas d’humeur à empirer le tout. Elle était de plus en plus sceptique sur ce qu’elle tentait de faire. Nissa allait la prendre pour la dernière des attardées.


   Elle lâcha la dernière personne, qui fuit sans demander son reste. Elle le tira vers elle, dégaina son poignard et défit le zombie d’à côté des chairs qu’il restait pour maintenir sa nuque.

   -On ne se connaît pas. On n’a rien fait de mal, et c’est vrai d’ailleurs. Je t’ai sauvé comme on est en train de sauver des centaines de personnes. Tu parles, et tu seras pour mon prochain barbecue, tu peux en être sûr.


   Elle le laissa partir. Elle ne pouvait pas perdre plus de temps. Elle venait de sentir l’aura froide de la mort près d’elle. Elle fit volte-face, prête à combattre ce qu’il restait. Il n’y avait plus qu’à espérer que ça marche, même si l’affaire du vol de whisky n’était pas encore réglée…

Si la fatigue n’avait pas été aussi présente, elle aurait réagi à la réponse de Djinshee, mais à l’heure actuelle, le fait que l’élémental se nourrisse de feu ne la choquait pas, elle était même amenée à trouver cela normal.
La première attaque qu’elle avait lancé avait heurté les humains et les avaient fait tomber au sol, mais sans qu’ils subissent de dommages trop importants, ou même mortels. Ils se réveilleraient le lendemain avec des contusions et des courbatures, mais rien d’insurmontable pour ces ivrognes qui devaient avoir l’habitude de se remettre rapidement de leurs cuites de la veille. Elle se prépara à en lancer une seconde afin de s’assurer qu’ils ne se relèveraient pas afin de poursuivre les jeunes femmes et de les interrompre dans leur tâche, qui visait à sauver tous les villageois du canton. Djinshee l’interpella et elle se stoppa tout de suite. Un bruit de grosse explosion retentit, puis elle fut sur elle, l’attrapa par la main et la ramena dans le cimetière. Elle avait peut-être eut raison de réagir de cette manière, car l’attitude de ces hommes hérissait les poils de la sirène. Ils l’insupportaient grandement, et emportée dans son élan, elle pouvait admettre qu’elle aurait pu les tuer avec un coup mal dosé et non adapté à leur résistance.
 
La jeune femme se concentra sur l’aspect du cimetière et étudia les dommages que l’élémental avait faits grâce à de l’alcool et son feu. C’était du beau travail. Beaucoup de morts-vivants étaient éparpillés dans tous les coins, peu restaient encore debout, et en capacité de marcher. Néanmoins, beaucoup de tombes avaient été détruites par le souffle des explosions. Le cimetière de cadavres ressemblait à un cimetière pour pierres tombales. Elles se cachèrent derrière une tombe et attendirent. Le plan de la jeune femme à ses côtés ne s’imposa pas à l’esprit de la sirène facilement. « Mais qu’est ce qu’on fait là ? Il faut que l’on termine de tuer les morts vivants restés debout, sinon ils vont attaquer les ivrognes de l’auberge, puis le reste du village.. Tu en as tué beaucoup mais ils vont se reproduire comme des petits pains si nous n’agissons pas. » L’attention de la jeune femme n’était pas portée sur l’écoute mais plutôt sur l’entrée du cimetière. Certains des ivrognes apparurent à l’entrée du cimetière et furent pris pour cible par les zombies. Ils n’étaient pas bien malins. Djinshee sortit de leur cachette et élimina les zombies devant l’homme, tout en restant dans l’ombre. Nissa la suivit et comprit son manège. Dégainant, elle aussi, son katana, elle trancha la jambe d’un mort vivant qui approchait puis tous les membres principaux qu’elle éparpilla. Land c’était, lui aussi, caché lorsque les deux jeunes femmes l’avaient fait. Au moment où elles avaient repris le combat, il se joignit à elle, bondissant sur un ennemi à demi décapité qui rampait vers l’élémental et les humains. Elle colla son dos contre celui de la jeune femme, pour que chacune d’elle ait une vision de ce qui se passait dans leur dos. « Je viens de comprendre ton manège.. dit-elle d’un ton taquin. Nous allons donc nous donner en spectacle. » Celle-ci attrapa les humains et chercha à les mettre en sécurité. Pendant ce temps là, Nissa avait décidé de couvrir leurs arrières en attaquant, avec son arme, le peu de zombies qui restaient debout, ou bien, elle décapitait à l’extrême tous les membres qu’elle voyait ramper au sol.
Après tout cela, il lui faudrait une bonne nuit de sommeil. Elle pensait déjà à un bon lit, mais elle savait qu’il faudrait qu’elle parte loin de ce village et que, pour cette nuit, elle dormirait sûrement dehors, et cela la dépita.

Une fois que les humains se furent échappés, Djinshee revint vers elle « Tu as bien agi, même si ils méritaient de servir de repas aux morts vivants… » Le regard de cette dernière fut attirée par un homme en cape sombre, son regard planté sur les deux jeunes femmes. Entre eux, il y avait quelques zombies, mais ces derniers ne semblaient pas détecter sa présence. Son aura menaçante et ses émotions malveillantes étaient si fortes qu’elle pouvait les sentir de là où elle se trouvait, près de l’entrée du cimetière. Il dégageait la même chose que le jeune sorcier apprenti qu’elles avaient laissé se faire dévorer par ses créations, mais en plus puissant…

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