À la découverte de Juvaniel
Tekoa, Kiara & Perséphone

☙ Rival & Philip strand - Down

Hoquetant, Perséphone sentit la panique se diffuser en elle, la posséder entièrement, aussi facilement que l'eau pénètre la terre. Ses yeux se fermèrent et n'existèrent plus que la sensation de gorge parcheminée, l'odeur de sa chair brûlée et la paralysée figeant ses membres. La douleur était telle qu'elle n'était guère plus qu'un élément aussi banal que l'oxygène qui se frayait tant bien que mal un chemin jusqu'à ses poumons. Sa respiration se réduisit et la vague de panique reflua, passa à travers elle. Les effets des herbes fumées poursuivaient leur œuvre et l'apaisaient mieux qu'elle n'aurait su le faire seule. L'idée qu'elle put mourir l'avait effleurée, la toucha de nouveau de ses doigts. Elle ne voulait pas de son étreinte. Ses yeux se rouvrirent en grand et elle resserra les pans de la couverture sur elle malgré la chaleur étouffante de la pièce et malgré sa peau devenue aussi sensible que du papier de verre.

L'adolescent s'était rapproché, son regard aimanté par Kiara. Cela lui était égal, il avait une présence trop envahissante. Que son attention se déporte ailleurs lui permettait de prendre du recul. Détachée, comme si elle flottait au dessus de la scène, la Sorcière les regarda s'embrasser sans marquer le moindre étonnement. Son regard placide glissait sur eux, vide de toute substance. Peut-être était-ce comme le cycle des soleils dans le brasier ou comme les fumerolles dansant furieusement, une vision d'un autre monde. Quoi qu'il en soit, cela ne la concernait nullement, elle se préférait observatrice de cette nouveauté dans le décor. Elle aurait voulu que tout s'arrête mais ne trouvait pas l'énergie de sortir de là.

Son corps réclamait plus d'air, sa vision se piquetait de soleils noirs qui éclataient comme des feux d'artifice et sa tête dodelinait au bout de sa nuque, légère comme un nuage. Une seconde plus tard, elle se retrouva contre la bouche de l'étrange adolescent et tout son être se révolta contre cette invasion dès qu'il en pris conscience. Ses poings se serrèrent et les cloques explosèrent de souffrance. Traversée par ce trop de sensations d'un seul coup, elle protesta sourdement et se projeta en arrière dès qu'il la relâcha. Elle vacilla en arrière, son fessier se réceptionnant maladroitement au sol. Elle regarda leurs lèvres se rejoindre, encore stupéfaite du contact. Plus rien n'avait de sens. Cela faisait un moment déjà, depuis que la fumée toxique avait manipulé ses sens et modifié la structure de ses pensées. Elle fixa Kiara sans lui répondre, se redressa et trébucha en arrière, jusqu'à la porte. Elle se sentait de trop dans ce tableau et l'extérieur l'appelait. L'air pur la frappa, presque trop bon trop vite. Ses genoux chutèrent au sol et elle fut prise d'une quinte de toux si violente qu'elle ne sentit qu'à peine des bras qui la soulevaient ni n'entendit les voix l'interrogeant. Les abysses de l'inconscience s'accaparèrent des derniers lambeaux de sa conscience et elle s'y laissa tomber avec soulagement.

Message IV | 531 mots

Bye bye o/ /sbaf

La chaleur se déroba soudainement. Mon corps à demi-nu se heurta à une fraicheur qui emplit mes poumons si vite qu’elle me glaça. Je fermai les yeux, mes paupières lourdes. Mes yeux pleuraient encore à cause de la fumée. Rougis, le contact de l’air frais les soulagea autant qu’il leur rappela leur état. Je faillis chuter. Mon esprit n’était pas clair. Il ne le redeviendrait que de longues heures plus tard. Mes doigts sentaient encore le corps de Kiara contre eux. Les sensations sur mon épiderme me marquaient bien davantage que ce qui touchait à la vue. J’essayai de me souvenir, sans que les bribes ne s’alignassent pour former un tout. La fuite de Perséphone ne m’avait pas troublé. Je l’avais à peine remarquée, comme si les Ætheri l’avaient appelée ailleurs et qu’il était normal qu’une jeune fille à la chair rongée par le feu partît en mission. Mes croyances et la drogue m’empêchaient de considérer l’horreur de sa situation. La Foi expliquait chaque chose. Les Dieux ne pouvaient pas se tromper, là où mes interprétations pouvaient s’avérer fausses.

Si je restai un instant au même endroit, je me mis ensuite à marcher. Le paysage sortait d’une période de froid. Par terre, des restes de neige subsistaient ici et là. Leur règne touchait à sa fin. Le beau temps revenait et la vie ne tarderait pas à reprendre ses droits. Cette terre me semblait vierge de toute présence à l’heure actuelle. Des ruines la parsemaient. Je m’en approchai. Mes doigts caressèrent ce qui avait dû être un autel. Des tiges de lierre le recouvraient. Je n’avais aucune idée d’où est-ce que je me trouvais et de qui m’y avait envoyé. Était-ce un rêve ou la réalité ? Je ne pouvais pas deviner que ma présence en ce lieu était liée à Kiara. Elle était la promise de Lucius Paiberym et son père la faisait espionner. Notre danse avait été interrompue avant que les choses ne devinssent trop sérieuses. Pourtant, tout me semblait flou. Même l'odeur de chair grillée n’était plus qu’un lointain écho. Rien ne me paraissait grave, pas même le fait d’être perdu et seul. Il me faudrait trouver de quoi allumer un feu, le temps de me reposer et de recouvrer mes esprits. Ensuite, je chasserais et parcourrais l’inconnu.

Mon regard fut attiré par un objet brillant. Je m’en approchai et pris la pierre dans ma main. Je l’étudiai et la rangeai dans ma poche. D’autres se trouvaient là. J’oubliai le feu et suivis le chemin qu’elles formaient.

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