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 [Q] - Mon appel imite le tonnerre

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Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~

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Latone
Jeu 30 Juin 2022, 01:10



Partenaire : Solo
Intrigue/Objectif : Acquisition de la Couronne du Tout.

~~~

D'un claquement, le conducteur fit élancer ses chevaux d'élite. Surentraînés par leurs précédents, et déshonorables propriétaires, ces bêtes de somme s'avéraient capables de tracter des chariots pleins à craquer d'arsenal ou un escadron complet de chevaliers en plates. Lorsqu'il était alors question d'escorter la titanesque Championne d'Hébé et quelques-uns de ses camarades, cette balade en direction des côtes ne représentait qu'une formalité. Avant d'être bien trop éloignée, Latone salua une dernière fois la Hurabis Prune Númendil et la Mord'th à ses côtés, Thémis Colechæ. Cette dernière lui avait promis de revenir à la Vigilante lorsque la Mère jugera ceci judicieux. Quant à Prune, de bien lourds fardeaux l'attendaient encore au sein de la citadelle d'Arcadia. Lorsque l'Ordre d'Hébé fut dissous par la Marche Terne, que les fers furent passés aux poignets du Duc Damon, un chef légitime de la région se devait d'être élu. Forcément, la Kirzor fut la candidate privilégiée, mais étant donné ses ambitions grandissantes : cette place ne lui convenait point. Elle se contentait très bien de son honorable titre de Championne et décida plutôt d'offrir les rennes d'Arcadia à l'une de ses plus fidèles alliées : Prune, fille de Léto Sùlfr.

Ce choix de passation n'était pas anodin et l'Orisha, descendante de la Titanide, avait fini par le comprendre lors de ses prises de fonctions en Lyscenni. Là où n'importe quel Guide aurait suffi à combler cette place d'intermédiaire, le fait que Latone ait jeté son dévolu sur Prune s'expliquait par une réflexion approuvable : Prune avait été élevée en partie par la Mord'th Thémis, celles-ci entraînaient alors un lien solide afin de tisser une route entre ce nouveau territoire de la Marche et leur capitale. Également, la Sùlfr faisait partie des Hurabis les plus sages et adéquates pour le titre de Duchesse d'Arcadia ; étant l'une des plus jeunes, Prune aurait pu se considérer comme illégitime, alors que sa place de Guide n'était en aucun cas flouée. Elle était une chevalière au fond de son âme, une noble Marcheuse qui saura assurer la transition au sein d'Arcadia. Depuis ce jour, Latone ne regrettait aucunement son choix. C'était d'ailleurs la seconde fois qu'elle retournait à la citadelle depuis le siège, des mois s'y étant écoulés depuis la dernière fois. Alors que la Bleue revenait du Conseil des Chefs, elle avait désiré à son issue d'être renvoyée directement à Arcadia afin de prendre des nouvelles de ses collègues et de les mettre au parfum des répercussions futures de cette réunion entre couronnés. Après tout, par la suite, Latone comptait bien évidemment poursuivre sa conquête de Linos, sa continuelle présence à Ciel-Ouvert se montrait alors plus que requise. Les vacances étaient terminées.

Sur la route, leur modeste cavalerie arpentait les différents niveaux de la citadelle, offrant à la Kirzor l'occasion de constater l'évolution des réparations. Mis à part les Marcheurs, les envahisseurs n'avaient pas limités les dégâts : Anges, Mages et surtout Réprouvés avaient laissé leurs marques sur l'infâme héritage d'Hébé. Les casernes reprenaient du service, les habitations aux pieds du château se remplissaient petit à petit et reprenaient un coup de neuf selon la motivation des nouveaux propriétaires. Les ruelles furent pavées, restaurées, les grands axes commerciaux reprenaient un second souffle. Dans quelques temps, on n'en oubliera presque qu'il y avait eu une guerre ici, tant les plaies auront disparues. Cela étant, pour Latone, c'était surtout le moral ambiant qui l'intéressait : l'atmosphère militaire et noble restait de mise, mais il suffisait de tendre un chouïa l'oreille pour capter les quelques nouveaux chants qui s'élevaient ici et là. Le fracas des épées devenait des percussions, les hymnes s'enchaînaient en harmonie, les pas chevaleresques s'apparentaient à des danses exotiques. Arcadia continuait d'élever une puissante armée, oui, mais ces chevaliers s'imprégnaient à présent des mœurs de Ciel-Ouvert. Ses Chevaliers devenaient des Marcheurs. La dissonance environnementale risquait de créer deux communautés plus ou moins différentes au sein de l'Empire, mais une telle disparité pouvait tout autant se retrouver chez d'autres peuples : différents Réprouvés naissaient aux quatre coins du monde, les Lyrienns survivaient dans un miasme chaotique, les Orishas de l'Edelweiss ne ressemblaient pas à ceux de Megido… Pourtant, ils formaient un Tout. La Bleue avait alors confiance, car si une cité aussi magnifique que Ciel-Ouvert pouvait élever une furie ambulante telle qu'elle, alors les Marcheurs d'Arcadia pourront très bien se lever aux côtés de leurs confrères du Voile Blanc. Petit à petit, portée par sa volonté, la Marche s'étendra sur les continents, autant sous la lueur des Ætheri que dans l'ombre des Mortels.

Bientôt, l'escorte dépassa les impressionnantes murailles qui donnèrent du fil à retordre aux envahisseurs – mais pas au timbre de la Voix – afin de fouler les terres environnantes de la capitale. Aussi joyeux que les bambins de la citadelle, les enfants des champs s'adonnaient aux coutumes de leur génération. Un havre de paix et de prospérité se dessinait sous ses iris bleutées, à mesure que les chaumières et longues étendues de récoltes s'alignaient sur leur route. Durant une période plus calme, peut-être que Latone ira s'engouffrer dans ces parterres fleuries, insouciantes des atrocités de ce monde. Ressourcer son esprit, embrasser son existence d'humaine… Elle s'était ouvert une porte de sortie, mais la réalité demeurait qu'elle s'était décalée pour laisser d'abord entrer une multitude d'innocents. Elle se battait pour que ces garnements jouassent au preux chevalier sans avoir à surmonter l'horreur du sang et des maléfices ; et elle se battra encore jusqu'à pouvoir mériter sa propre place, son propre repos salvateur. C'était ça, être une guerrière.

" Hurabis à bord ! Kirzor à bord ! "

Cette balade pittoresque se terminait ainsi, sur le tonitruant navire que les Marcheurs récupérèrent des restes de l'Ordre. La puissance maritime de la Marche s'était toujours montrée si faible, se contentant de quelques bateaux de marchandise et pas un seul fer de lance pour les attaques côtières. Avec la libération d'Hébé, le vent tournait en leur faveur. Il faudra encore du temps aux Marcheurs pour maîtriser ces véhicules sans yack pour les guider, mais au moins étaient-ils parvenus à ramener leurs poésies à bord.

" Pile à temps ! Autrefois Grand Écuyer de l'Ordre d'Hébé, le capitaine tout désigné accueillit sa cheffe sur le pont, avec la poigne propre à l'organisation. Seri Pierce, je suis l'Oklilleirro de l'Otreno Yumio, la caravane que nous avons fondé afin de dompter les Mers. "

" Et pas ta mère ! " S'éleva une voix du haut de la vigie.

" On a quelques sacripants parmi nous. En tout cas, n'ayez crainte, Hurabis : ce bateau est notre caravane et nous avons bien un yack pour nous montrer la voie. "

D'un signe qu'elle supposait narquois, le capitaine l'invita à venir jusqu'à la proue afin d'admirer sa figure. Latone ne put réprimer son amusement à son tour, tant l'ouvrage s'avérait si convaincant. Ses camarades se montraient chaque jour de plus en plus novateurs. Il en fallait pour sacrer une Impératrice.

" Très bien mon capitaine, je sens que je peux dormir sur mes deux oreilles à présent ! Poitrail bombé, la Bleue leva le bras vers l'horizon. Cap sur Ciel-Ouvert ! "

Il n'en fallut pas plus pour lever l'ancre et implorer les vents de les ramener au Voile Blanc.

~~~

Le ciel était dégagé. Comme chaque soir, Latone s'extirpait de sa cabine afin de remonter sur le pont. En général, les Marcheurs improvisés marins se réunissaient autour d'un feu et se racontaient des histoires, jouaient ou, moins surprenant, fredonnaient à tue-tête. Mis à part nouer avec l'hospitalité propre aux natifs de Ciel-Ouvert, c'était l'état de la voûte céleste qui l'intriguait. Forcément, la Bleue revenait de révélations et de suppositions plein la tête. Nichés sur leurs montagnes, les Marcheurs avaient déjà remarqué les anomalies du plafond de leur monde, l'une des caravanes versées dans la lecture des étoiles et des constellations s'était plusieurs fois présentée en panique aux portes de la Vigilante. Le fait demeurant que les raisons de ce chamboulement restaient nébuleuses… et étrangement fascinantes. La parade scintillante éclairait le bleuté de ses prunelles, devenue à présent un phénomène quotidien et annonciateur de grands changements imminents. Latone ne savait guère quoi penser de ces étoiles filantes, de ces traînées chaotiques, si ce n'était que des prophètes comme les Chamans auraient pu l'aiguiller sur la question. Hélas, même Léto n'avait pas l'air d'en savoir davantage, ou le cachait-elle… mais avec Latone ? Improbable. … Elle est l'instrument des Dieux, maintenant. Songea-t-elle soudainement, un sentiment mélancolique étreignant son cœur.

Lorsque la Championne se présentait à la surface, la plupart des Marcheurs s'amusait à lui accorder un hymne, une ode, une sérénade. Puisque cela alimentait son égocentrisme, la Bleue s'en délectait à chaque fois. Malgré tout, même couvée sous les Chants, elle garda un certain sérieux pour se poster aux côtés de Seri. Lui aussi contemplait le ciel et plus particulièrement l'arrivée d'aurores boréales.

" Dès que nous approchons du Mystérieux, je ne me lasse de les admirer. "

" C'est splendide, en effet. " Et difficile à comprendre, tant cet endroit semblait dicter ses propres lois.

Hélas, même les voiles colorés peinaient à masquer la course des astres. La Kirzor était un être facilement distrait, alors on la retrouvait à suivre quelques étoiles valsant ensemble, imaginer l'itinéraire et les desseins de certaines…

" Profitons encore de la sérénité des vagues. Lorsque nous frôlerons le Dévasté, le temps risquera de manquer de clémence. Mais nous aurons au moins la proximité avec les terres pour nous abriter si besoin. "

Le calme…

Une lueur incandescente se distingua au sein du firmament. Agressive, elle attira la plupart des regards sur elle. Les interrogations se multiplièrent, les plaisanteries les succédaient, avant de tonner une véritable inquiétude sur l'équipage. Violacée, elle se fit plus intense à mesure de son approche. Car il était certain, même pour une novice en la matière telle que Latone, que cette chose allait leur tomber sur la tronche.

" … Mé… – comment disaient-ils déjà ? – MÉTÉORITE ! "

L'objet, quel qu'il fut, s'écrasa à toute vitesse sur le navire, accompagnant sur son sillage le bruit strident du tonnerre. Surpris, à l'instar des Marcheurs, Latone s'était figée, sur ses gardes pour se protéger des dommages collatéraux. Pourtant, malgré l'impact évident, aucun dégât majeur n'affectait les planches de bois ; comme si l'objet stellaire les avait purement traversés… ou s'était faufilé dans les interstices. Plus que le phénomène, la violence sonore affectait encore leur ouïe, certains marins – plus près du "point d'impact" – luttaient contre ces échos interminables.

" Vous allez bien ?! " Seri avait de quoi être désemparé tant cette chute ne semblait avoir aucun sens.

De son côté, Latone eut à peine le temps de songer aux liens avec le débat entre Souverains que le tonnerre reprit de plus belle. Au-dessus de leurs têtes, le ciel se montrait toujours aussi dégagé ; la tempête semblait se produire juste sous leurs pieds. L'intérieur de l'Otreno Yumio se parait de la lueur violette de tantôt : la soi-disant météorite reprenait son activité, son mouvement strident secouant la charpente à vive allure, comme une luciole souhaitant s'échapper de sa cage. D'un regard, Latone et Seri s'entendaient sur un point : le navire ne résistera pas à une telle agressivité sur la durée.

Alors que l'ensemble de l'équipage cherchait à conserver son équilibre et à comprendre ce qu'il se passait, ils sentirent à chacun leur tour qu'une force attractive les attirait justement vers la coque. Plus cette lueur se débattait pour se libérer, plus cette pression gravitationnelle s'accentuait. Et les forces mises en jeu résultèrent en une singularité surprenante. Pour Latone, le monde tout autour d'elle semblait s'éloigner : le navire lévitait au-dessus des flots, de plus en plus haut.

" Depuis quand ton bateau peut VOLER ?! " C'était tout bonnement impensable !

" Il ne peut pas ! Avec les successions de tonnerres sonores, il leur était difficile de s'entendre. C'est comme si le ciel nous rappelait à lui ! "

L'éclair devenait une corde à laquelle l'Otreno Yumio se raccrochait, afin d'y flotter et de remonter jusqu'à sa source. De plus en plus haut, et de plus en plus vite, les Marcheurs perdaient contrôle de leur navire, uniquement guidés par la volonté de cette manifestation emprisonnée dans la coque. Tout ce qui leur était alloué, c'était de s'accrocher et prier. Jusqu'où iront-ils ? Qu'allait-il arriver ? Tant de questions que Latone se posait il y a peu au sujet des étoiles.

L'inévitable survint lorsque le bois finit par craqueler sous eux, l'accumulation d'énergie provoquée par l'objet céleste eut raison de la résistance de l'Otreno Yumio. Il provoqua, dans un ultime appel tonitruant – le dernier arc électrique de cette tempête – la rupture du navire et la dispersion de ses occupants. L'écho parut s'éterniser pour Latone, le temps se gelant durant l'éclatement. Crier était inutile, sauver quoi que ce fut s'avérait trop tard. Tout ce que l'Orisha entrevit durant ce court moment inerte dans le Temps, c'était l'éclat de cette manifestation. Ébahie dans les prémices de sa chute, son être tout entier s'accordait sur la nature de cet assaillant égaré : magie. Elle-même fruit pur de cette force de la nature, Latone ne put qu'y répondre en lui tendant la main.

Le calme… au sein de la tempête.


2328 mots ~



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Latone
Dim 10 Juil 2022, 20:18



Son inertie se rompit sous l'assaut prononcé du maître des astres, et ce malgré les pans de rideaux tirés pour la prémunir au maximum de la lumière. En plus de l'intensité croissante de cette dernière, les premiers rires enfantins lui parurent, les premières frictions du dur labeur et les premiers chants de moineaux. Ses paupières s'entrouvrirent, luttant contre toutes ces afflictions qui alourdissaient son enveloppe charnelle ; la couverture sur elle était épaisse et saupoudrée de plusieurs pièces de fourrures. La jeune femme ne bougea guère, trop fatiguée pour esquisser ne serait-ce qu'étirer ses bras. Elle se sentait bien ici, ainsi protégée du froid. Elle était nue, mais ça ne la dérangeait pas plus que de mesure. Le seul bémol à cette soudaine émergence était sa sécurité : ses prunelles étudièrent avec une lenteur abyssale ce qui semblait être une chaumière, remarquant – attirée par son étreinte réconfortante – la présence d'une cheminée alimentée, un modeste salon qui lui rappelait les intérieurs chaleureux de Ciel-Ouvert.

Si elle était rentrée à la maison, pourquoi son instinct grondait ?

La porte d'entrée grinça, le froid mordant fit aussitôt intrusion dans l'ombre du supposé propriétaire. La vue de la convalescente se perdit et elle n'entendit qu'à moitié cette voix.

~~~

Un frottement prolongé la tira à nouveau de son sommeil. Cette fois, ses forces semblaient bien plus présentes. Pas encore assez pour être… comme "elle-même", mais ceci représentait un bon début. Ce bruit qui l'avait réveillée, elle le reconnaissait. Il lui remémorait un souvenir particulier à Ciel-Ouvert, un doux moment où deux mains lui étaient tendues et la guidaient sur une énorme flaque gelée. Elle glissait et craignait de tomber, non pas pour se faire mal mais plutôt par peur de briser ce mur de glace et de couler jusqu'aux profondeurs abyssales. Franchir un miroir et ne plus pouvoir revenir. L'eau, sous toutes ses formes, était si terrifiante…

Cette oppression lui injecta une dose suffisante d'adrénaline pour se relever davantage. Ses yeux finirent par s'habituer à la lumière ambiante, bien plus agressive que tout à l'heure. Étant donné l'intensité du maître des astres, la demoiselle supposa qu'elle se trouvait sous son zénith. Pour corroborer sa théorie, des flammes léchèrent la fonte en cuisine, des arômes aussi attrayants que familiers la tentèrent. Son estomac grogna, aussi ronchon et capricieux que son for intérieur. Elle pourrait ramper jusqu'aux fourneaux, elle serait bien capable de supplier qu'on la portât pour la biberonner comme un nourrisson. Elle était si faible et en détresse.

Si lui n'était pas là, à qui appartiendra cette main tendue ?

" Enfin réveillée ? Ses iris uniformément violacées suivirent la voix de son bienfaiteur. J'ai rarement vu quelqu'un profiter autant de mon divan. "

La concernée était troublée, un brin méfiante et n'osait pas bouger de sa position. L'homme le nota bien et la comprenait parfaitement. D'une adresse remarquable, il lui prépara de quoi la rassasier.

" Deux jours sont passés depuis que je vous ai trouvée inconsciente dans la nature. En deux-trois mouvements, il lui servit sur un magnifique plateau un déjeuner bien chaud et beaucoup d'eau. Mangez, buvez. Vos vêtements sont propres et pliés sur la commode à côté de vous. "

Sans plus de cérémonie, le gaillard retourna en cuisine et sembla confectionner des réserves afin de les emporter avec lui, à l'extérieur. La jeune femme se retrouva aussi décontenancée que libérée d'un énorme poids. Tous ses soucis s'évaporèrent dès l'instant où toute son attention se focalisa sur sa faim et sa soif. Si elle se retrouvait effectivement affamée et assoiffée depuis deux jours, elle aurait pu finir par bondir sur le généreux plateau de victuailles tel un Goled. Pourtant, si elle se hâta bien de se sustenter, le moindre de ses gestes se caractérisa par une minutie et une élégance toutes les deux remarquables. Elle ne renversa rien, pas une miette ou une goutte n'échappa à sa voracité, tout parut calculé et efficace. La demoiselle s'adonna même au luxe de ranger comme il faut les couverts et de tout disposer comme elle les avait trouvés. Un soupir d'aise lui échappa pour conclure ce qui s'apparentait à une orgie pour elle. Ses gestes parurent enfin moins mécaniques, plus libres. Son bienfaiteur n'était pas encore revenu ; puisqu'il mentionnât ses vêtements, elle profita de son absence pour renfiler sa tenue. Cette dernière sentait bon, une fragrance florale s'en dégageait, et le propriétaire se permit même de la rapiécer par endroit. Qu'où qu'elle fût tombée, le sort lui semblait favorable.

" Nous revoilà. "

Droite comme un piquet, l'invitée demeura inerte sur le divan et attendit comme un signe, une autorisation. Sur les traces de son bienfaiteur, une enfant s'engouffra dans la chaumière et s'arrêta net en constatant que l'endormie émergeait bel et bien de son long sommeil. Elles se fixèrent un temps avant que la petite se précipitât à l'étage.

" Je vais chercher mes patins ! "

" Doucement dans les escaliers ! Un rire ponctua cet avertissement. Aaah, les gamins… "

Il remarqua le succinct sourire de la jouvencelle, ainsi que le vide complet dans ses bols et verres.

" Le repas était à votre convenance ? Il reposa ses affaires dans un coin. Quand la faim nous étreint, on est capable de consommer n'importe quoi. Ces assiettes vides ne veulent rien dire pour moi. "

" C'était très bon… Elle leva les yeux en sa direction, neutre et pourtant voilée d'une certaine tristesse. Merci de m'avoir sauvée. "

Il était inutile pour lui de revenir là-dessus ; c'était coutumier dans la région. Vive comme l'éclair, la fillette de tantôt dévala les marches et se précipita dehors, ses fameux patins en main. D'un signe, son sauveur l'invita à faire un tour dehors. Elle obtempéra.

Après avoir affronté le baptême du soleil, la demoiselle cessa de plisser des yeux et admira l'étendue enneigée qui se dressait tout autour d'elle. Elle se trouvait dans un village au beau milieu des collines enneigées, mais ce froid-ci ne lui remémorait aucunement celui du Voile Blanc. De même, l'air était plus léger que celui des montagnes. Cet endroit n'était pas sa maison et son dernier souvenir remontait à ce flash lumineux et au potentiel naufrage du navire. Mélancolique, la Marcheuse s'immobilisa aux côtés du gaillard qu'elle dépassait aisément de taille. C'était étrange, il lui paraissait plus impressionnant tout à l'heure. Quoi qu'il en soit, outre l'activité ordinaire du bourg, ce fut la patinoire au centre et sa ribambelle d'enfants s'y amusant qui hameçonna son attention. Cette activité eut l'intrigant pouvoir de l'apaiser ; d'enfin lui assurer qu'elle était en sécurité.

" Jiah. Elle ne comprit pas sur le coup. C'est mon nom. Elle arbora une mine surprise puis acquiesça, silencieuse. Et vous ? "

Je sais qui nous sommes.

" Nuée. "

" C'est un beau nom. "

Beau… On lui avait dit qu'elle était belle une fois. Il lui avait complimenté ses cheveux et ses fleurs. Pour le coup, il lui manquait les dernières. D'un violet nocturne, sa crinière lisse descendant le long de son dos, amassée en une unique tresse dépassant aisément ses fesses. Ses iris plus claires masquaient sa véritable nature et la troquait pour une identité bien plus surprenante. Sa peau était claire, propre aux montagnardes, et sa musculature ne révélait aucun attrait pour la force brute. Grande et élancée, Nuée se présentait comme une femme qu'on pouvait facilement sous-estimer, puisqu'elle ne dégageait que le charme des filles de Ciel-Ouvert et non leur côté bourru.

" C'est amusant. Nuée lui offrit toute son attention. Vous ressemblez à une Orisha que j'ai croisée il y a longtemps. Elle s'était battue contre un ours et m'avait suppliée de traiter ses blessures, en déblatérant des propos plus incohérents les uns que les autres. J'ai eu à peine le temps d'en finir avec les premiers soins qu'elle s'éclipsât sans crier gare. Curieux personnage… "

C'était elle. Mais plus vraiment aujourd'hui. Elle se sentait bizarre, incomplète. Il lui manquait bel et bien tant de choses pour repartir du bon pied ; pour tout simplement partir et poursuivre son aventure. Elle n'avait d'autres choix que de rester le temps de retrouver toutes ses ressources. Laisser suffisamment de temps à l'orage de revenir.

" Au moins, vous, vous avez eu la politesse de me remercier. "

C'était bien lui, ce fameux Jiah. Il ne lui servait à rien de lui expliquer que c'était la deuxième fois qu'il lui fit office de gardien ; ce serait plus compliqué qu'autre chose. Son lot de bizarreries aura alors tout le temps de se dérouler.

" Donc, Nuée… Reprit-il en se détachant des pitreries des bambins sur la patinoire. Que faisiez-vous au beau milieu des terres sauvages du Berceau Cristallin ? "

La Marcheuse ne masqua aucunement son étonnement. Elle se trouvait donc si loin de son foyer ?

" Je… Elle tenta, avec une réelle intention, de rassembler le maximum de rémanences. J'étais en mer… et mon bateau s'est… " Envolé, mais c'était si stupide. Peut-être pas autant qu'une tarée se battant contre un ours enragé du Berceau.

" … Vous étiez bien loin de la côte. Vous tentiez peut-être de chercher votre équipage, mais vous aventurer seule dans le Berceau est une très mauvaise idée. Il se massa le menton, un brin taquin. Du moins, pas sans préparation. Elle ne sut quoi répondre, toutes ses pensées étaient tournées vers d'éventuels survivants. Personne n'a encore rapporté un naufrage sur nos terres à ma connaissance, mais nous lancerons des recherches pour trouver vos camarades, et ce fameux bateau. Il grommela dans sa barbe. On va éviter d'attirer l'attention des Raëlbran… Étant donné son manque de réaction, il devina qu'elle n'avait aucune idée de ses allusions. En soi, ce fait le rassura, puisque les Thrandwim ne pouvaient guère piffer la famille rivale. Si vous n'êtes pas du coin, d'où venez-vous ? "

" De Ciel-Ouvert. "

" Oh, vous êtes une Marcheuse ! Ils sont rares par ici. Au moins, vous êtes habituée au froid. Et elle était tout autant préparée, étant donné la tenue qu'il avait récupéré sur elle. Où alliez-vous avec votre bateau ? "

" Nous étions partis d'Arcadia pour rentrer à Ciel-Ouvert. "

" Et… vous aviez perdu le contrôle de votre navire à cause d'une tempête, ou un abordage ? "

Elle secoua la tête, négative. C'était encore plus cocasse que ces cas de figure et elle le savait très bien. Nuée leva les yeux au ciel gorgé par la course du firmament.

" Une étoile nous est tombée dessus. "

Elle l'avait dit avec tant de sérieux que Jiah ne pût croire à une plaisanterie. Finalement, cette Nuée n'avait peut-être pas encore repris tous ses esprits. Ou était-elle tarée, il devait encore le découvrir. Néanmoins, avant toutes ces hypothèses, une question plus capitale lui était venue.

" À part être une Marcheuse, seriez-vous une Lyrienne ? Cette constatation attira son regard pourpre. Ce dernier reflétait l'éclat d'une divinité instable. Je sens une force pulser en vous. "

" Oui… De nouveau, ses iris se confondirent aux corps lumineux, danseurs de l'horizon au-dessus de leurs têtes. Ma Voix puise dans le grondement céleste. "

Un orage se fit entendre au loin. Il arrive.


1931 mots ~



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Latone
Lun 11 Juil 2022, 16:07



Le fauteur de troubles se trouvait non loin. Depuis son signalement, le ciel s'était comporté de manière étrange. Enfin, pas plus qu'actuellement avec ses comètes et autres étoiles filantes à tout bout de champs, mais un tel fracas sur leurs terres n'avait aucun sens. Le froid suffisait déjà bien assez à les faire rentrer chez eux le temps que le calme revint. Néanmoins, ces rumeurs, tout ce sang sur son sillage, et surtout cette neige fondue… Pour les Réprouvés Krah’Koda, rien de tout cela n'avait de sens. Et le nouveau peloton se confrontait à une surprise de taille lorsqu'ils rejoignirent les lieux du soi-disant massacre : la pluie. Il ne pleuvait jamais sur le Berceau Cristallin. Qui que fût ce fou à lier, il n'amenait rien de bon avec lui. Les Bipolaires étaient partis de Sot’Rahgol à l'aube, afin de couvrir le maximum de temps de recherche. Les locaux ignoraient comment ce type avait pu causer autant de remous durant ces derniers jours, ni qui il était vraiment au fond, ses intentions… Tous ces détails commençaient à perdre en importance à mesure qu'ils se rapprochaient de la source.

De l'œil de la tempête.

Il agita sa lame dans l'air, fendant la chair d'un autre loup sauvage. Postés à distance suffisante, les Krah'Koda purent éviter le courroux de la meute et observer l'inconscient se débattre pour sa vie. Le jeune homme était couvert de sang, sa chevelure mi-longue trempée s'accolaient à son enveloppe suante, ses yeux semblaient translucides, d'une intensité décroissante, d'un lilas pastel si ténu. Rien qu'à le voir ainsi, cela suffisait à plaire l'esprit combattif des Réprouvés de la région, car ce guerrier se contrefichait totalement de la morsure glaciale, comme si l'écarlate sur sa peau nue permit de le réchauffer. Quasiment torse découvert, les quelques pièces de sa tenue encore survivantes des assauts laissèrent penser qu'il venait lui aussi d'un pays froid. Malgré tout, à sa carrure, il ne ressemblait guère à l'un des leurs. Au mieux, il était un très jeune Manichéen un chouïa en retard sur ses renforcements musculaires. Au-dessus de la moyenne des autres peuples cela dit, ce qui expliquerait pourquoi il était encore debout, encore noyé dans sa frénésie sanguinaire. L'orage gronda, prêt à secouer cette parcelle de sapins sans sommation.

" Vous… ! "

Il les remarqua enfin, après s'être débarrassé des nuisibles de la nature. Sa voix était forte, jonchée de tonalités agressives et caverneuses. Il tituba en souhaitant se retourner en leur direction, la lame qu'il tenait dans sa main droite était brisée depuis un bail et pourtant, il s'était démené avec elle pour repousser toutes les menaces sur son passage.

" Où est Nuée ?! "

Les affres du Berceau n'effrayaient point les Krah'Koda, ce n'était alors pas ce cinglé qui allait les faire repartir la queue entre les jambes.

" Qu'est-ce qu'il raconte ? "

" C'est lui qui a fait tout ce carnage ? "

" Il y a même un ours dans le lot… "

" Il faut le neutraliser. "

Il entendait très bien et leurs réactions lui déplurent énormément. Un nouvel éclair fendit les cieux et éclaira sa silhouette aux apparats monstrueux. Qui qu'il fût, il n'avait pas sa place ici et devait être chassé le plus loin possible. D'ordinaire, les natifs de Sot'Rahgol venaient en aide aux égarés du Berceau Cristallin, trop insouciants pour braver efficacement ses tourments extrêmes. Températures négatives, vies sauvages et hostiles, le blanc immaculé et les avalanches… Avec cet orage sorti de nulle part, c'était comme si cet étranger s'était trouvé un phare pour le guider, une corde à laquelle se rattacher pour s'extirper des griffes de la mort.

" Nutaar (Putain) mais t'es qui, toi ?! "

Tout comme leurs congénères de la hiérarchie classique, les Krah'Koda ne croyaient point aux superstitions. Mais un gars enragé qui trainait avec la pluie ne présageait rien de bon.

" Moi… ? "

Il observa sa propre main directrice, tremblante, tâchée de sang, de neige boueuse, à peine lavée par les larmes du ciel. Elle n'avait plus la force de soulever cette épée faiblarde. Il pourrait s'en remettre à sa force brute seule. Il pourrait… Toutefois, son autre main renfermait avec fermeté une fleur. Et celle-ci, il se refusera de la relâcher avant de la lui avoir rendue.

Je sais qui nous sommes.

" Je suis sa flamme qui brûle et qui éclaire son chemin… Il jeta l'arme plus loin, entre les cadavres encore chauds des bêtes sauvages. Je suis son éclair qui transperce sa nuit… Il frappa son poing sur son torse, près de son cœur, prêt à protéger la fleur de Nuée. Plus que tout, je suis sa foudre qui témoigne notre force. Je suis – il leva les yeux en l'air, un sourire fou aux lèvres – le Feu du Ciel. "

Même pour des Bipolaires, ce type manquait d'un grain. Et généralement, on se débarrassait d'eux le plus rapidement possible, afin de limiter les dommages collatéraux. Ce dont Feu du Ciel était capable de provoquer sans une once d'hésitation ; sans doute même avec une dose de complaisance.

" Il suffit avec vos questions à la con. Il se rapprocha, visiblement à cran et prêt à en découdre avec une résolution absolue. J'en ai posé une en premier et vous ne m'avez pas répondu ! Où est Nuée ?! "

" On sait pas qui c'est, ardyr (merde) ! "

Ces titans sans cervelles ne lui servaient à rien ! Il serra davantage son poing contre son torse, ralentissant sa progression imminente sur ces quelques obstacles tout en chair.

" Elle n'est pas loin, je le sens en moi… Il serra les dents. J'entends sa détresse et sa peine ! Je dois la retrouver ! Il les désigna, tous autant qu'ils étaient. Vous me la cachez mais vous n'empêcherez pas nos retrouvailles ! J'en fais le serment ! "

Malgré la dangerosité croissante de cet individu aux propos aberrants, les villageois de Sot’Rahgol ne pouvaient absolument pas laisser un tel barbare vagabonder au sein de leurs contrées. D'autant plus qu'il risquait de tomber sur leurs maisons et… qui sait ce dont il serait capable de provoquer ? Feu du Ciel méritait un contrôle que seule Nuée possédait. Sans elle – loin l'un de l'autre – ils étaient condamnés à s'autodétruire. Ces Manichéens ne comprenaient rien à leur nature, à la beauté de leur existence et à la nécessité de leur naissance. Ils étaient un Tout que Feu du Ciel se promettait de reforger par tous les moyens possibles et imaginables. La moralité ne faisait pas parti de son vocabulaire, puisqu'après tout : il était une arme.

" Tu sais quoi ? Tu m'emmerdes. Le plus enhardi des Réprouvés fit craquer ses phalanges. Cassons-lui la gueule, faisons-lui payer son caractère de cinglé. S'il en crève, ça nous fera un boulot en moins. "

Rien de plus ou de moins pour convaincre une bande de Bipolaires de passer à l'attaque. Ce fou à lier représentait une menace et ce genre de problématique, ils les réglaient à l'instar de leurs congénères de Bouton d'Or ou de Sceptelinôst : dans le sang et l'alégresse. Cette évolution des événements était parfaite pour Feu du Ciel, puisqu'une nouvelle source de pouvoir prenait appui sur ses multiples confrontations. Et qui y avait-il de plus belliqueux que des Réprouvés ? Lui-même les connaissait suffisamment pour partager leur amour du combat.

" Vous pensez pouvoir me crever, moi ?! Il ne put retenir son rire aux éclats, caler sur le chant du tonnerre au-dessus d'eux. Ces bestioles n'étaient qu'un échauffement ! Et vous… Son sourire de pleines dents illustrait toute sa folie combattive. Vous participerez à la consécration de ma puissance ! "

Précautionneux, il s'assura de mettre la fleur de Nuée à l'abri dans les replis de ses vêtements avant de lever les mains au ciel. Ils allaient découvrir qui il était, ce dont il était capable. Il allait graver son nom dans leur crâne et potentiellement sur leur peau. Il était prêt à tout pour vaincre, la victoire était la liqueur des Grands de ce monde. Un jour, il s'y baignera de tout son saoul ! Hélas, sans Nuée, il n'y arrivera pas par ses propres moyens. Ce fut pourquoi il implora les cieux de lui accorder une miette de son courroux afin de pouvoir rivaliser avec ces quelques barbares. Ses poings, puis petit à petit son corps tout entier, revêtirent un manteau électrique plutôt instable. Feu du Ciel ne pouvait qu'espérer que ceci suffira à compenser l'absence de sa moitié, mais dans tous les cas : il croyait dur comme fer en sa suprématie.

" Ramenez-vous ! " Les éclairs lacérèrent le sol autour de lui.

D'un concert de hurlements, les deux partis se jetèrent purement et simplement sur la tronche pour en découdre. De plus près, étonnamment, Feu du Ciel rivalisait avec aisance en stature avec les guerriers. Pour rétrécir l'écart de force avec eux, il se servait d'une magie native boostant ses fibres musculaires. La foudre s'écoula le long de son corps tel son sang et permirent à ses attaques d'octroyer plus de vigueur. Dès le contact, ses victimes sentirent toute la force que renfermait son enveloppe, puis la sentence de l'élément céleste suivit le mouvement pour les écarter d'un coup sec. Feu du Ciel était vif, réactif aux vaines stratégies – si tant elles existaient – des locaux belliqueux. Son style martial semblait se baser sur la force brute, quitte à encaisser les coups s'il pouvait tracer son chemin au passage. Le furieux ne craignait point les assauts à son encontre et l'ouragan ténu dans ses yeux reflétait toute sa volonté d'en finir une bonne fois pour toute. Il ne se donnait pas en spectacle et ne cherchait pas l'attention : seul comptait le résultat ; lui encore debout et eux à ses pieds dans une neige de sang. Brutal dans sa gestuelle, assoiffé d'adrénaline, c'était comme si les cieux avaient libéré le mouton noir de ses rejetons. Il était, tout bonnement, une force en quête de suprématie totale.

Feu du Ciel n'avait pas l'air humain. Il pouvait vraiment être qualifié comme une arme, à manier avec prudence… Cependant, les arcs foudroyants qui le suivirent décrièrent sa nature dans toute sa splendeur : un Lyrienn béni par Vëtëtimë. Et en ce sens, le belliciste était capable de comprendre le langage des nuages. À nouveau seul et confronté aux conséquences de son mal intérieur, il tendit l'oreille afin de retrouver les Échos de l'orage, ceux qui le guideront jusqu'à Nuée. Pas à pas… J'arrive.


1805 mots ~



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Lun 11 Juil 2022, 22:41



Jiah observa Nuée, une certaine lassitude naissante se crispant sur son propre visage. Malgré tous ses efforts, la Lyrienne ne semblait faire preuve d'aucune assurance, comme engoncée dans une dépression qu'il ne comprenait pas. Elle faisait preuve d'une passivité sans limite, capable d'observer l'extérieur enneigé via la fenêtre toute une après-midi. Il avait beau la nourrir, la loger, vérifier son état physique, elle ne faisait elle-même aucun pas pour sortir de sa bulle. À force, elle devra bien assumer les charges de son séjour, puisque lui-même payait les frais de la location. Un voyageur ne restait jamais bien longtemps au Berceau Cristallin… encore moins une Marcheuse. Parfois, elle évoquait un compagnon et assurait qu'il arrivera bientôt. C'était impensable de se comporter ainsi ! Le natif de Brangul dut prendre les devants pour faire filer la nouvelle, trouver cette fameuse épave sur les plages côtières ou, dans le meilleur des cas, un survivant errant au sein du froid environnant. Jusqu'alors, il se retrouvait au même stade que Nuée : patienter, espérer. Cette fille de Vëtëtimë n'était pas très bavarde mais plutôt amicale, enjouée quand il faut et pourtant toujours accablée par une mélancolie propre au chagrin des cieux. Finalement, ce nom lui allait si bien et se doutait que ses tuteurs ne le choisirent point par hasard. De ce fait, l'hôte oscillait entre agacement et peine. Si seulement la mère de ses enfants était toujours de ce monde pour lui conseiller comment faire…

Trois coups soudains à la porte. Le locataire hésita, sachant que Nuée aurait pu le prévenir d'une arrivée étant donné son soi-disant rôle de veilleuse. Il n'en fit guère tout un plat et se précipita vers l'entrée, espérant des nouvelles des recherches. Face à lui se dressa plusieurs voyageurs encapuchonnés, leurs couleurs lui évoquèrent sur l'instant des armoiries bien reconnaissables : la Marche Terne.

" Brave homme, excusez-nous de notre intrusion. Mais nous avions entendu dire que vous logiez une Marcheuse. "

La nature Lyrienne de l'émissaire permit de désamorcer d'éventuelles tensions et Jiah acquiesça aussitôt, les invitant à venir se réchauffer à l'intérieur.

" Elle est là. "

Le chef du groupe s'avança et se débarrassa de sa capuche. Contrairement à ses camarades, il n'avait point besoin d'un feu de cheminée ; tout ce qu'il comptait, c'était la fameuse Marcheuse. Il ne perdit pas plus de temps et s'approcha lentement, prudemment d'elle, afin d'en profiter pour l'observer. Elle portait bel et bien leurs couleurs. Son visage, en revanche… Même lorsqu'il s'accroupit à sa hauteur, Nuée continua d'épier par la fenêtre, l'intensité de ses iris rappela une figure connue aux yeux du Marcheur.

" Ma dame… Elle daigna alors lui accorder son attention. Me reconnaissez-vous ? "

Longuement, Nuée parut confuse et pourtant intriguée. Son regard étudia les traits de son visage, ses souvenirs et connaissances s'imbriquant à la perfection au sein de sa caboche.

" Ykürr… Thero… ? "

" Par Senere, c'est bien toi… Latone. "

Elle papillonna des yeux. Elle n'était pas surprise de découvrir qui elle était vraiment – tout cela, elle le savait très bien – mais plutôt qu'il s'adressa à elle avec cette identité.

" Latone ? La Latone ? Jiah s'approcha, dépassé par les événements. Elle s'est présentée sous le nom de Nuée, je vous le jure ! "

" Je vous crois. "

" Et je croyais que Latone était une Orisha… "

D'un geste, le Hurabis attendit l'autorisation de sa supérieure pour la toucher. Un regard entendu s'esquissa entre eux et Ykürr dessina les traits faciaux de Nuée avec son gant, faisant quelques fois pivoter délicatement la tête afin de s'assurer de son identité.

" Latone est bien une Orisha. Mais "cette" Latone est une Lyrienne. Afin de comprendre, il invita cette dernière à lui raconter ce qu'il s'était passé et hocha de la tête à la conclusion du récit. Je pense comprendre ce qu'il s'est passé… Il se leva et invita Nuée à en faire de même. Ce genre de phénomène ne m'est guère inconnu. Quoi qu'il en soit, nous aurons besoin de te rapatrier pour t'aider à… t'accoutumer à cette condition. Jiah, n'est-ce pas ? Vous connaissez autant que moi les inconvénients de l'étreinte élémentaire. Voire de ses ravages… Le Guide fit un signe à l'un de ses collègues afin de récompenser le généreux villageois. Au nom de la Marche Terne, nous vous remercions d'avoir traité avec déférence notre Hurabis en cheffe. Si vous pouvez nous fournir d'autres informations sur nos compagnons disparus, veuillez s'il vous plait nous les transmettre. "

D'une main réconfortante, le Lyrienn de la Glace enjoignit la Lyrienne novice à le suivre. L'heure de rentrer à la maison avait tonné.

" Les nouvelles du naufrage nous sont rapidement parvenues, je me suis hâté de rassembler des caravanes pour le Berceau Cristallin et couvrir les environs tels que le Désert et l'Antre. L'Oklilleirro Pierce, en l'occurrence, est en sécurité. C'est un véritable désastre : nous n'avons aucune nouvelle de Charras depuis Amestris, et toi qui disparait après le Conseil… Il saisit la poignée. Je vais poursuivre les recherches, mais toi… Il ouvrit la porte. Tu devrais rentrer à Ciel-Ouvert. "

Quelques pas à peine à l'extérieur et toute âme s'immobilisa. Guère plus loin se tenait une silhouette lugubre, couverte de rouge et visiblement exténuée. Son visage tout juste perceptible derrière sa crinière rebelle s'avérait méconnaissable pour l'ensemble des acteurs présents. Pourtant, Ykürr eut une certaine intuition, qui se révéla presque vraie lorsque Nuée réagit, pour la première fois, avec entrain. La Lyrienne fit face à l'inconnu, celui-ci drapé d'une aura belliqueuse. Mais pas à son égard, ô non, jamais il ne s'en prendra à elle. Ce serait un péché aux yeux de la Mort.

" Nuée… " Il tendit la fleur qu'il protégeât durant tout son périple ; elle était intacte, si jolie.

Telle une invitation, la Marcheuse se détacha de son protecteur afin d'amincir la distance qui la séparait de lui, celui dont elle attendait la venue.

" Tu as bravé le Désert de Mow, annihilant toutes les menaces sur ton passage. "

Le Lyrienn acquiesça, un tantinet jovial en sa présence.

" Tu as attendu au sein du Berceau, convaincue de notre réunion. "

Une fois face à face, les deux entités levèrent leurs mains et les étreignirent ensemble. Ils s'étudièrent longuement, d'une manière aussi poétique que hautement troublante : comme s'ils agissaient en tant que le reflet de l'autre. Parfaitement synchronisés, étrangement semblables, la supposition d'Ykürr parut moins difficile à encaisser. Malgré tout, pour tout autre spectateur, seule l'anomalie de la situation sautait aux yeux. En guise de levé de rideau, le guerrier ensanglanté rattacha la fleur dans les cheveux de la Marcheuse.

" Latone. Ils se tournèrent vers lui sur le même tempo, avec la même attention luisant dans les yeux. Nous sommes confus. " De plus amples explications se montraient nécessaires, ils l'entendirent bien.

" Nous sommes un Tout. Nuée déposa sa main sur le torse gelé de sa moitié. Il est aussi bien Latone que moi. " L'autre enlaça d'un bras les épaules de sa moitié à son tour, tel un gardien.

" Elle est la Nuée et je suis son Feu du Ciel. "

" Maintenant que nous sommes réunis, nous pourrions rentrer… "

" Mais puisque Charras n'est toujours pas revenue, nous allons la chercher à Amestris. "

Les Marcheurs ne masquèrent pas leur surprise, Thero lui-même ne comprenait pas comment ce Feu du Ciel avait pu apprendre pour la Guide disparue… Mais si ces deux entités représentaient bel et bien la même personne, tout prenait son sens. C'est de la folie. Et quel adjectif caractérisait tant la Bleue depuis son entrée dans la Marche ? C'est vraiment de la folie.

" Vous devez retirer l'artefact qui vous a transformés. Il était persuadé que c'était l'explication du naufrage, maintenant que les faits se présentaient sous son nez. J'ignore pourquoi votre "Tout" – Latone – s'est séparé en deux à son contact, mais une trop longue exposition à cette magie vous sera néfaste. Vous connaissez la formule ? "Je mets fin à mon règne" ? "

" On n'a pas le temps, Charras est encore en vie ! "

" Vous n'en savez rien. "

" Il n'y a qu'une manière de s'en assurer ! "

" Et je vous en empêcherai. "

Nuée écarquilla les yeux, comme blessée par cette initiative. Feu du Ciel ne cacha pas non plus sa déception, mais puisque c'était inévitable… Il avança, Nuée juste sur ses pas. Leurs émotions décrivaient toute leur résolution.

" Mon appel imite le tonnerre. Elle déposa sa main sur l'épaule de sa moitié masculine. Par ma Voix s'abattra mon courroux. Une force répulsive prit naissance à l'endroit de Nuée, alors que de nombreux arcs électriques s'échappèrent de son corps, avant de se rassembler au niveau de sa main, de ce contact avec sa moitié. Et le Feu du Ciel se répandra sur mon sillage ! "

Toute la magie élémentaire s'assembla afin de revigorer le fameux Feu, celui-ci s'engonçant dans une frénésie si addictive. Il goûta à l'offrande tant attendue de Nuée et se mit à railler d'une telle évolution. Enfin ! Enfin retrouvait-il tout ce qui faisait de lui une arme, le courroux du tonnerre ! Il devenait un véritable Lyrienn de la Marche Terne ! Et en ce sens, il mettra à profit toute sa force au nom de l'Empire. Ses iris déterminées démontrèrent un fait : Ykürr représentait un obstacle.

Malgré toute cette exaltation magique, ce dernier conserva son calme. Même s'il ne comptait pas rivaliser avec la Bleue, il connaissait bien mieux les Éléments qu'elle. L'unique souci étant qu'ils étaient deux… et curieusement, la part féminine demeurait à l'écart, tandis que le fougueux Lyrienn réduisait la distance entre eux, les paumes gorgées d'électricité. Comptait-elle l'attaquer à distance ? Il se méfiait bien sûr, mais il préférait laisser ses hommes à l'écart. Il possédait un autre avantage : la supériorité de son propre Élément. Feu du Ciel s'élança et lui balança une lance de foudre, qu'il dévia aisément en soulevant un pan de glace – puisant dans l'environnement – juste à temps. Étant donné la puissance allouée, ce Lyrienn ne semblait faire preuve d'aucune once de retenue, ni de bon sens. Cela déplut au Guide qui dressa plusieurs concrétions glaciales face à lui, afin de déstabiliser son adversaire. Ce dernier contourna avec vivacité les renforcements, paraissant tel un orbe électrique. Il l'atteignit bien vite et les deux forces éléments se confrontèrent dans un souffle. Les deux Lyrienns renforcèrent leurs membres et échangèrent plusieurs coups ; le contondant de la glace eut bientôt raison de l'assurance du manipulateur de la foudre. Face à ce mur incroyablement solide, Feu du Ciel s'énerva et redoubla d'intensité dans ses attaques. Il puisait dans la force magique de l'originelle, Latone, ce qui inquiétait plus ou moins Ykürr. S'il continuait d'escalader une telle violence… La protection du village primait, ce fut ainsi que le Hurabis obtempéra pour une issue de secours. Son attention dévia un bref instant sur Nuée ; depuis le début des hostilités, elle était demeurée passive. Il revint sur Feu du Ciel : il pouvait le manipuler à sa guise et comptait bien vérifier cette théorie. Le Thero écarta sèchement le Lyrienn et se précipita sur la Lyrienne. Cette dernière esquissa un pas en arrière, surprise par l'initiative de leur adversaire.

" NE LA TOUCHE PAS ! "

Feu du Ciel enragea et rattrapa l'inconscient qui osait s'attaquer à Nuée. Au dernier moment, ils comprirent que tout ceci ne représentait qu'un leurre, puisqu'Ykürr se détacha de la part féminine pour assommer son poursuivant. Le coup fut si précis que le Lyrienn tomba raide, inconscient. Un silence morne s'abattit sur eux.

" … Mais… Relève-toi… Aucune réponse. Mais-mais-mais… Elle s'accroupit sur lui et le secoua. Mérelèvtwaeuuh ! " Sans réaction, contre toute attente, Nuée se mit à pleurer.

Ykürr n'en croyait tout bonnement pas ses yeux. Il comprenait bien que les couronnes ou autres babioles de ce type pouvaient engendrer des effets surprenants, mais voir l'ambitieuse Latone Kirzor sangloter parce qu'elle avait perdu… Il en avait mal à la tête. Au moins, l'électricité dans l'air semblait s'être estompée : Feu du Ciel neutralisé et Nuée démunie d'hostilité.

Une ombre se détacha du brouillard ambiant, le crissement régulier d'une caravane reconnaissable. Le Hurabis identifia aussitôt celle qui guidait le yack, Nuée également, qui retrouva un semblant d'espoir. Elle l'avait appelée en guise d'ultime recours, et comme escompter : son appel trouvait toujours une entité charitable.

" Narengawa… aide-moi… "

Il n'en fallut pas plus à la Marcheuse pour embarquer ces deux fragments d'âme avec elle. La fille de Narantuuya ne répondait qu'aux ordres de la bénie et ignora alors tous les Marcheurs qui pourraient s'opposer à cette folie.

" Tu es libre… Abonda Ykürr en regardant Nuée monter à l'arrière du véhicule, Feu du Ciel sur ses épaules. Mais tu devrais savoir que ta liberté s'arrête là où commence la mienne. "

Les deux Hurabis se fixèrent, leurs crans respectifs testés. Nuée, tout comme Latone, se laissait porter par ses émotions. Les conséquences pouvaient se montrer catastrophiques, toutefois la Kirzor s'avérait suffisamment mâture pour en avoir conscience. Une fois sous sa protection, Narengawa invita Mambo à tracer leurs routes jusqu'à des terres encore plus inhospitalières.

" Ils… vont vraiment à Amestris ? " La direction semblait tout indiquée.

" Guide, on la laisse partir ? "

Ykürr essaierait forcément de contrer une telle aberration ; en temps normal.

" … Nous avons d'autres rescapés à retrouver. Si vous ne connaissez pas Latone, sachez qu'elle en fera toujours à sa tête. La caravane disparut dans l'horizon oppressant. Mais au moins, elle se trouve entre de bonnes mains. " Sans parler de la Géante, il avait bien remarqué cette petite Fae dans la fleur de ses cheveux violacés.


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