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 Sueurs glacées | Couronne du Milieu

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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Mer 10 Juin 2020, 21:33


« Prince Noir. » Je levai les yeux de mon bureau. Les parchemins s’étaient accumulés à droite de ma personne. À gauche, les affaires non traitées. À droite, celles qui l’étaient. J’avais passé la nuit dessus. « Parlez. » dis-je. D’un point de vue extérieur, je semblais seul. Ce n’était bien sûr pas le cas. « J’ai trouvé l’objet que vous cherchiez. » « Donnez-le-moi, dans ce cas. » Le silence qui s’en suivit m’apprit que la femme ne l’avait pas. « Pourquoi ? » demandai-je alors. « Si j’ai trouvé sa position, j’ai échoué à le récupérer. La quête du Milieu n’est exécutable qu’une seule fois et seul celui ou celle qui désire l’artefact peut s’en approcher. Si vous désirez cette Couronne, vous devrez aller la récupérer vous-même. Les Bagues répondaient à un procédé différent. » « Et n’y a-t-il pas une Bague qui me permettrait d’arriver à la même finalité ? » « Elles sont toutes appropriées. À moins de tuer les possesseurs, comme Priam Belegad, j’imagine que ce n’est pas envisageable, d’autant plus que, eu égard à leur apparition récente, nous ne savons pas encore si une Bague séparée de son propriétaire fonctionnerait sur quelqu’un d’autre ou, au contraire, cesserait de produire ses effets. » Il y avait un moyen simple et efficace de le savoir. Néanmoins, je n’avais pas envie de tester la déchéance chez cette espionne. Elle était littéralement invisible et pouvait également se rendre impalpable. Sa fidélité n’avait aucun prix. Elle me servait parce qu’elle le désirait. Mes doigts se joignirent sur la table. « Bien. Il me semble que, de toute façon, une Couronne est ce qu’il y a de plus ancien et pur. » « Les épreuves ne sont pas anodines, en effet, et leur création remonte à un temps si ancien qu’il est difficilement quantifiable. » J’en possédais déjà une. « Néanmoins, je dois vous prévenir que ce sera difficile. Si vous la désirez, c’est votre vie que vous risquerez. » Je souris. « Cela ne me changera pas énormément de mon quotidien. » Je l’avais dit avec un ton sarcastique. « Où se trouve-t-elle ? » « Cela ne va pas vous plaire. » « Dîtes toujours. » « Le continent des glaces. » Je soufflai par le nez, avant de rire doucement. De mieux en mieux. « Vous comprenez à présent pourquoi il m’était difficile de réussir les épreuves. » « Oui, en effet. Comment cela se fait-il qu’elle soit là-bas ? Eerah Von Dreth n’en était-il pas le dernier propriétaire ? Il l’aurait lui-même dissimulée au cœur d’un endroit impraticable pour la plupart des races ? » « Je n’en ai aucune idée, mon Prince. Les épreuves dépassent de loin ce qu’un Roi serait à-même de produire, surtout dans un endroit dénué de magie… À moins qu’il possédât la Magie Bleue pour les mettre en place sans que personne ne se doutât de rien ? » « C’est une possibilité. »

Je finis par me lever afin de chercher un parchemin dans l’un des tiroirs longs d’un meuble de la pièce. Il s’agissait d’une carte. J’en possédais plusieurs et, bien qu’il me fût sans doute possible d’utiliser la magie, j’aimais ne pas y recourir pour ce genre de choses. Je posai le rouleau sur mon bureau, déplaçai mes affaires grâce à la télékinésie et l’étalai là. Il s’agissait du continent des glaces ou, du moins, des zones connues et supposées. « Avez-vous une idée de sa position, sur cette carte ? » « Oui mais, encore une fois, l’épreuve en elle-même est plus… » Elle réfléchit un instant. « J’imagine que vous comprendrez bien vite, si elle est la même pour vous et moi, ce qui n’est pas certain non plus. » « Indiquez-moi juste la position. » « Je me suis enfoncée dans le continent depuis Ranaghar, en passant par la zone en gris. Comprenez que sans magie, l’aventure a été périlleuse. Le froid est glacial et j’ai pensé plusieurs fois à rebrousser chemin. J’ai fini par arriver vers ces montagnes. Je ne saurais vous dire exactement où mais j’ai été attirée par une grotte en particulier. C’est là qu’a commencé mon épreuve, avant de se terminer abruptement au bout de quelques jours, l’ermite jugeant ma volonté non suffisante. » « Un ermite ? » « Un ermite ou un Æther. L’ambiance était réellement étrange et l’épreuve… » « Que vous a-t-il demandé de faire ? » « Survivre. Je devais traverser la grotte, afin de déboucher sur l’autre versant de la montagne où commencerait réellement mon périple. Néanmoins, une fois à l’embouchure, l’ermite se trouvait déjà là. Il m’a annoncé mon échec, précisant qu’étant donné que je ne désirais pas la Couronne du Milieu pour moi, je n’avais rien à faire là. » Je l’écoutais tranquillement, réfléchissant à la situation. Pourquoi ne pas lui avoir fait la remarque avant qu'elle ne s'engageât dans la cavité ? « Me conseilleriez-vous un équipement particulier ? » « Non, si ce n’est de quoi vous sauvegarder du froid. L’ermite m’a demandée de choisir mes armes à l’entrée de la grotte après m’avoir ordonné de déposer les miennes propres. Malheureusement, comme précisé, je n’ai aucune idée de l’épreuve se déroulant après la grotte. À l’intérieur de celle-ci, j’ai surtout été confrontée à un parcours difficile pour avancer mais rien d’insurmontable pour une personne prudente et vive. » « D’accord. Merci. Vous pouvez prendre quelques vacances. Je vous recontacterai lorsque j’aurai besoin de vos services. » « Bien. Je suis curieuse de vous voir devenir un Réprouvé. » Cette femme me plaisait. Il n’y avait pas une seule once de racisme chez elle. Je doutais parfois de son appartenance à mon propre peuple, étant donné l’étrangeté de notre rencontre. Néanmoins, elle était exceptionnelle et m’avait beaucoup aidé jusqu’ici. Je lui devais, en quelque sorte, la vie.

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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Mer 10 Juin 2020, 22:10


J’étais au sein de la Maison de Poupée.

Ma chère Gustine,

J’espère que tout se passe pour le mieux sur l’Île de Boraür. Je devrais être bloqué encore quelques jours à Amestris. Il me tarde tellement de tous vous retrouver. Je suis sincèrement désolé pour tout ce qui est arrivé. J’aurais dû être présent pour vous protéger.

Je vous retourne les dossiers d’adoption pour Sjar et Hélène. Si vous pouviez écrire un petit quelque chose pour relater la situation et vos liens avec leurs précédents parents adoptifs, cela aiderait probablement la procédure. Je ne me vois pas abandonner ces enfants à des étrangers qui n’auraient pas conscience de l’événement. Nous nous arrangerons pour le Ma’Ahid.

Je vous aime tous. Kaahl.


Je soupirai et fermai les yeux. Ma main libre se contracta et ne fut bientôt plus qu’un poing tendu aux articulations blanches. En allant chercher la Couronne du Milieu, je retardais mes retrouvailles avec ma famille. La situation m’attristait autant qu’elle m’énervait. Pourtant, un instinct indescriptible me poussait depuis des jours vers cet objectif. C’était difficile à expliquer. C’était un besoin, une mission, une obligation. J’avais en tête l’idée implacable qu’il me fallait me rendre à Lumnaar’Yuvon afin de discuter avec les parents de Laëth pour leur donner des nouvelles. Pragmatiquement parlant, cette quête me semblait idiote et sans grande importance. Néanmoins, ce n’était pas ce que mes émotions me dictaient. Outre cette impression, j’avais le sentiment incompréhensible que quelque chose m’attendait chez les Réprouvés, un morceau de destin, ajouté là par mystère. Je savais pourtant que l’un comme l’autre me serait impossible sans être moi-même un Réprouvé. Je ne pouvais me rendre à Lumnaar’Yuvon en tant que Magicien. Je serais traité d’une façon odieuse et ne pourrais sans doute pas approcher les parents de l’Ange avant un temps bien trop long pour que je pusse me le permettre. Je ne pouvais pas non plus m’y rendre en tant qu’Elias Salvatore. J’aurais pu y aller sous couvert d'affaires diplomatiques avec une escorte mais le risque était bien trop important. Les Réprouvés haïssaient les Sorciers et, politique ou non, j’étais certain que si l’occasion de tuer un Prince se présentait à eux, ils ne la manqueraient pas. Ils n’y parviendraient peut-être pas mais je ne me replierais certainement pas sans dommages. Dans tous les cas, mon objectif premier : parler avec les parents de Laëth, ne serait pas accompli.

Je pris un nouveau parchemin, afin d’écrire à une toute autre personne. Outre ce besoin concernant l’Ange, il y avait un jeu que je ne pouvais ignorer concernant les Réprouvés. La situation actuelle entre Stenfek et Lumnaar’Yuvon était bien trop alléchante. Si les deux territoires se séparaient, l’unité se fracturerait et une faiblesse apparaîtrait, au moins le temps pour Stenfek de trouver un équilibre et de combler certains problèmes. Si Lumnaar’Yuvon était contre toute entente avec les Sorciers, quel que fût le domaine, ce ne serait probablement pas le cas de la capitale. Dans le besoin quant aux vivres, elle serait bien plus à-même d’accepter un accord économique. Je n’avais pas envie de faire la paix avec chaque peuple, ce serait même contre-productif, mais je voulais réussir à rendre les Sorciers indispensables dans plusieurs domaines, assez pour que certains comportements en provenance de mon peuple ne fussent plus considérés comme si problématiques. Tenir à la gorge pour avoir plus de libertés, en d’autres termes. Sans parler de mal et de chaos, ce qui permettrait de favoriser les Mages Noirs serait forcément bienvenue. Un accord économique avait de quoi satisfaire tout le monde. C’était un échange de marchandises et de services, qui permettait de faire fructifier l’économie de chacun. Le seul problème restait le manque de confiance de certaines races à notre égard. Je ne pouvais néanmoins pas leur en vouloir de se méfier.

Adam,

Je me vois dans l’obligation de repousser notre entrevue. Je ne suis pas sûr de pouvoir la maintenir avant ton départ de la Terre d’Edel. S’il s’avérait que ce soit effectivement le cas, je trouverais un moyen de te voir d’une autre manière, à Avalon.

Ârès.


Je soupirai. Je n’aimais pas du tout cette situation. Lui et moi allions devoir discuter de sa dernière fantaisie. Elle était très loin de me ravir. Normalement, nous devions nous voir sur la Terre d’Edel, une fois le jugement accompli, mais la situation venait de changer. J’avais envie de lui parler. Son absence me pesait et ma colère s’était transformée en quelque chose d’indescriptible. J’étais incapable de dire si je lui en voulais toujours ou non. J’imaginais que nous serions fixés lorsque nous serions l’un en face de l’autre.

Je fis venir le domestique, lui demandant d’envoyer les missives. Curieusement, jusqu’ici, ça avait fonctionné à chaque fois. Quant à Laëth, je n’avais toujours pas envie de lui écrire. Je pris néanmoins sa dernière lettre avec moi avant de partir pour les Terres Glacées.

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Kaahl Paiberym
Mer 10 Juin 2020, 22:42


J’avais emprunté le réseau mis en place par les Sorciers afin de me rendre à Ranaghar. Nous l’avions caché aux Magiciens, ce qui n’était pas pour me plaire. La prison du continent des glaces était censée refléter une coopération entre nos deux races. Néanmoins, il semblait que les Mages Noirs eussent bien du mal à accepter leur absence de magie. Ils compensaient par quelques fourberies. Les projets au sein de Ranaghar n’avançaient plus depuis longtemps et, bien que la prison servît toujours à détenir les meurtriers les plus dangereux, l’entente n’était pas particulièrement cordiale. L’un des dossiers dont je devais m’occuper concernait cet endroit mais il n’était pas dans les priorités du moment. J’y viendrais. Quoi qu’il en soit, à peine arrivé, l’on m’avait guidé au sein du village attenant à la prison et accompagné jusqu’aux portes d’une propriété dont la seule fonction était d’accueillir la famille royale lorsqu’elle se présentait, c’est-à-dire très rarement. L’endroit était plutôt grand mais simple. L’absence de magie rendait la vie sur le continent délicate, même si certains Mages Noirs avaient développé la Magie Bleue, comme une sorte d’adaptation à leur environnement quotidien. Je n’avais pas ce problème, pour maîtriser celle-ci depuis longtemps. Néanmoins, j’avais ressenti un malaise palpable dès mon arrivée. Le froid était mordant, le paysage blanc et grisâtre, tout ce que je détestais. Comme je n’avais pas de temps à perdre, j’avais fait en sorte de me confectionner un remède afin de palier à mon insomnie. L’objectif était simple : dormir profondément au moins huit heures, ce qui relevait du miracle chez moi, et partir le lendemain matin pour m’enfoncer au cœur du continent, à la recherche de la fameuse grotte.

À l’aurore, je quittai Ranaghar pour emprunter le chemin que l’espionne m’avait décrit. Elle ne m’avait jamais donné son nom. C’était intelligent. Comment désigner l’innommable ? Comment désigner l’invisible ? Il n’y avait aucune réponse. J’étais habillé principalement de fourrure et de cuir et deux armes se tenaient à ma ceinture. Mes bottes avaient été pourvues de lames pour me permettre d’avancer plus facilement. Avant de partir, j’avais mangé des aliments gras, qui me tiendraient longtemps au corps, et avais changé d’apparence. Celle d’Elias ne convenait pas pour se périple. Il valait mieux que je me rapprochasse de la mienne propre, sans pour autant dévoiler les traits de Kaahl. Cela aurait été dangereux. Les Sorciers qui pensaient que le Prince Noir était réellement vieux n’avaient pas l’intelligence de leur côté. Cela faisait bien trop longtemps que j’étais en vie, sans que mon physique ne bougeât. Pourtant, je l’aimais bien et comptais le garder, même après mon couronnement. Restait ensuite la question de mon identité. En tant que fils adoptif de l’Empereur Noir, beaucoup devaient se douter que je n’appartenais pas à la famille Salvatore. Personne ne connaissait mon véritable nom, ni mon passé. Elias était un mythe, une légende. Son existence l’était d’autant plus qu’elle était fausse, construite de toutes pièces. Je souris, malgré la morsure du froid sur mon visage. Je remontai la fourrure de façon que seuls mes yeux ne dépassassent. La situation était désagréable mais je devais lui reconnaître un avantage : perdu au milieu d’un paysage glacé, seul, j’avais l’occasion de réfléchir sans être interrompu d’une quelconque manière. Mes affaires courantes ne pouvaient me rattraper. Un instant, je pensai qu’une vie plus simple aurait été mieux pour mon équilibre personnel, d’autant plus depuis que les souvenirs du Suprême de l’Au-Delà m’avaient été confiés. Il y avait une partie instable en moi, une partie qui allait à l’encontre de certaines de mes valeurs, en confortait d’autres ou, encore, me plaçait dans une position peu tenable sur certains sujets. Cette volonté de sauvegarder les Chamans, celle de détruire les Humains, alors même que j’avais des enfants de ce peuple, ou encore cette attirance répugnante pour ma sœur, n’avaient rien pour me plaire véritablement. Je devais garder en tête le bien-être des Sorciers avant tout.

Perdu dans l’immensité glacée, je sentais mes muscles travailler. Ça ne me déplaisait pas. C’était douloureux mais beaucoup moins que ce que j’avais pu vivre dernièrement. Mon corps était de nouveau fonctionnel et ma condition physique n’avait jamais été plus optimale. Sans magie modificatrice de l’apparence, je pouvais constater avec un certain contentement que mes efforts sportifs avaient payé. Mes muscles étaient saillants et puissants. Je l’avais déjà remarqué précédemment, lorsque j’avais relevé que les tenues que je portais pour jouer Kaahl étaient bien trop petites en cas d’absence de magie. Néanmoins, le phénomène s’était encore amplifié. Il ne me restait plus que ma magie à museler lorsque je désirais m’entraîner au corps à corps pour que je pusse progresser davantage. Celle-ci intervenait bien trop pour me sauver la mise, d’une façon consciente ou non.

Après quelques heures à avancer péniblement dans la neige, je me retrouvai à l’endroit que l’espionne m’avait indiqué plus tôt. Il y avait de multiples grottes qu’il me faudrait visiter, tout en espérant trouver la bonne et rencontrer l’ermite.

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Kaahl Paiberym
Jeu 11 Juin 2020, 20:31


« » Je m’arrêtai à l’entrée de l’une des grottes. Je poussai un soupir de soulagement, en apercevant la silhouette massive de l’individu qui devait être l’ermite. Il possédait une barbe longue et en partie tressée. Elle était dense et ne semblait pas sale malgré les conditions de vie de son propriétaire. Ses cheveux étaient tout aussi imposants. Je m’avançai, remarquant que l’un de ses yeux était aveugle. La cicatrice qui en partait, pour s’étaler ensuite sur son front et sur sa joue devait être à l’origine d’une blessure grave. Son autre œil me fixait, d’un bleu intense. Je n'aurais pu l'ignorer. Sa peau portait la trace de quelques stigmates. Je me demandai s’il s’agissait d’un ancien esclave pour que son épiderme ait été marqué ainsi au fer rouge. Il ne souriait pas. Ses vêtements étaient un amas de fourrures de divers animaux. Sa silhouette était massive et imposante. Il était bien plus grand que moi. Il était aussi bien plus large. Il dégageait une aura profondément puissante, de celles que j’avais de moins en moins l’occasion de remarquer, eu égard à la mienne propre. Il m’était supérieur en tout point et ce constat me rassura autant qu’il me glaça. La force qui était mienne, la magie qui m’enserrait, cette impression de ne plus avoir de limites, ces choses m’effrayaient, bien plus que la possibilité que l’on pût me défier. J’avais peur de ce que je pourrais entreprendre, de la folie de mon esprit, de l’évolution de mes idées et de l’inconséquence de mes actions. J’avais peur que Lux in Tenebris détruisît ce et ceux que j’aimais, qu’elle ne laissât derrière elle que des cendres infertiles. Ma magie devenait de plus en plus impatiente. Elle désirait s’exprimer, condamner. Elle m’effrayait par sa noirceur et ce gouffre qu’elle me laissait entrapercevoir sous mes pieds. Elle n’attendait que ça : que je m’y jetasse, sans possibilité de retour. Elle-même souffrait de l’ambivalence de mes capacités, de ce pied dans le monde des Magiciens. La Magie des Ténèbres combattait la Magie de la Lumière dont j’étais pourvu, telle une intruse à l’intérieur de mon corps. Elle voulait la chasser, la faire taire à jamais. Je luttais. J’aurais le trône blanc et il était hors de question que les caprices de ma puissance m’en empêchassent.

L’ermite bougea lentement, uniquement les traits de son visage pour m’adresser la parole. « Ainsi donc est-ce toi qui n’a pas le courage de prendre ce que tu convoites et envoies quelqu’un d’autre à ta place en espérant que cela fonctionne. » « Je suis quelqu’un d’occupé. » dis-je, très peu enclin à me justifier de longues minutes. « Tu le seras d’autant plus si tu réussis mes épreuves. As-tu envie de réussir ? » Vaste question. Peut-être avais-je envie d’échouer, par principe, pour la forme, pour être rassuré. Je ne désirais pas avoir l’impression de pouvoir tout entreprendre. Le fait est que ma position de Prince des Sorciers me donnait de grandes latitudes. Les Momies me conféraient une puissance de frappe particulièrement importante, également, même si les conséquences de leur utilisation étaient néfastes, pour moi et pour ceux que j’aimais. « Oui. » dis-je. « Connais-tu les conséquences attachées à cette Couronne ? » « Une transformation en Réprouvé. » « Je sais que tu possèdes d’autres artefacts comme celui-ci mais il te collera au corps, tellement que tu ne pourras rester simple spectateur de ce qui se jouera dans le futur chez ce peuple. Comprends que si tu acquiers la Couronne, ce seront d’autres responsabilités qui pèseront sur tes épaules. Les Sorciers et les Réprouvés ne sont pas proches. Les intérêts des uns vont à l’encontre des intérêts des autres. Toi qui désires devenir Roi, es-tu certain que cela soit une bonne idée ? Si les Mages Noirs découvrent tes traîtrises, es-tu sûr qu’ils te pardonneront ? » « Je ne trahis pas les miens. » répondis-je d’une voix sèche. « Si tu en es convaincu alors… dépose tes armes, choisis-en d’autres et traverse la grotte. À son extrémité, la véritable épreuve commencera. »

Je pris mes possessions et les déposai sur une table derrière lui. Il y avait plusieurs lames. La plupart des armes étaient de très courte portée. Il n’y avait pas d’épée ou d’arc, par exemple. Il s’agissait surtout de dagues, de couteaux, de marteaux ou de haches. Je me rappelai mes performances au lancé de haches à Avalon, en compagnie de Priam. Je souris et pris l’une d’elles. La prochaine fois, s’il y avait une prochaine fois, je ne lui laisserais pas une seule chance de gagner. Je pris également quelques dagues avant de me tourner vers la cavité. « Vous savez que je peux traverser celle-ci facilement, n’est-ce pas ? » demandai-je alors. « Sans utiliser la magie. » précisa-t-il. Je souris. Parfait.

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Kaahl Paiberym
Jeu 11 Juin 2020, 20:32


Je courais. J’étais en train de traverser un gouffre sur un pont fait de lattes en bois, instable et dangereux. J’étais obligé d’être vif. Fendant l’air, des fléchettes se dirigeaient droit sur moi à une vitesse prodigieuse. Il était impossible de rester statique, sous peine d’être gravement blessé, voire pire. J’avais envisagé de me servir d’un objet trouvé en chemin comme bouclier mais un quelconque arrêt s’était avéré impossible jusqu’ici. La fourrure qui entourait mon corps était à la fois une protection efficace et un poids. J’avais chaud. Soudain, je me décalai sur le côté, sur la défensive. Mon œil avait capté un mouvement sur la droite. Une lame bien plus imposante avait manqué de me trancher le cou. Je repris ma course, le bruit des fléchettes se plantant dans le pont rythmant mon avancée. L’intervalle était régulier et l’intensité du bruit m’indiquait la distance qui les séparait de moi. Si je ralentissais, elle se réduisait forcément. N’importe qui ne pouvait réussir cette épreuve. Il fallait avoir reçu un entraînement physique et, surtout, ne pas avoir le vertige. Il n’y avait aucune balustrade à laquelle se raccrocher. Le vide à droite, le vide à gauche, le vide en dessous, et vingt centimètres de pont, qui tenait en place par un mystère dépassant les lois de la physique. Je me baissai pour éviter une hache. Je soufflai, crachant par là même les conséquences de mes efforts, avant de me relever. Je n’aurais jamais pu être victorieux avant la mue et la situation me faisait revoir à la hausse la puissance de mon espionne inconnue. Elle m’avait précisé que rien n’était impossible pour une personne vive et prudente. J’étais certain que la plupart des individus que je côtoyais au quotidien en aurait été incapable sans utiliser la magie. En parlant de celle-ci, je l’avais toujours et je le savais. Seulement, elle était maintenue à l’intérieur de moi. J’étais sûr que si j’avais souhaité l’utiliser, cela aurait fonctionné mais quelque chose me retenait.

Mes pensées parasites me mirent dans une situation périlleuse. Je dus me jeter vers l’avant, atterrissant brutalement sur le pont, qui tangua, pour éviter une gerbe de flammes. Je poussai un gémissement de douleur. Se prendre une latte en plein dans l’aine n’avait rien de plaisant. Je me relevai rapidement, sautant avec l’aide de mes mains pour réunir mes pieds sur le bois et pour repartir de plus belle. Je n’avais pas le temps de m’apitoyer sur mon sort. Je n’avais pas le temps de penser. Il me fallait simplement agir et oublier ma respiration saccadée qui me brûlait la gorge. J’étais presque de l’autre côté du pont. Je comprenais néanmoins que ce n’était pas l’extrémité de la grotte. Il y aurait très certainement d’autres épreuves.

Ce fut le cas. À peine arrivé sur la terre ferme, un nouveau parcours s’initia, fait de piques, envoyés depuis les côtés et de tremblements du sol, qui commença également à s’affaisser. Aucun répit. Si je restais au même endroit longtemps, je finirais par disparaître, emporté avec la roche à des mètres de là. Je faillis d’ailleurs être entraîné plusieurs fois et dus sauter bien plus haut, me hisser à la force de mes bras pour rattraper le nivellement de base. La cavité finit par se rétrécir à vue d’œil. Je m’engageai dans un couloir bien plus étroit. Le sol, tassé, m’indiqua clairement qu’un objet sphérique avait l’habitude d’y rouler. Je savais à quoi m’attendre, espérant ne pas avoir à faire demi-tour, poursuivi par un rocher prenant la totalité de l’espace. Le bruit caractéristique ne tarda pas à retentir. J’analysai rapidement la situation. « » Je me jetai par terre, collant mon corps contre la paroi droite du tunnel. Le rocher frôla ma peau mais passa sans encombre. Je me redressai et continuai mon chemin. Nul besoin d’être d’une intelligence supérieure pour comprendre que plus j’irais vite, moins j’aurais de chance de devoir manœuvrer de façon à éviter un deuxième rocher. Je dus néanmoins en laisser passer quatre, dont un beaucoup moins sphérique que les autres, qui s’enfonça dans mon bras, m’arrachant un râle. Je me relevai et gagnai la fin de ce premier périple.

Je m’avançai vers la sortie de la cavité, couvert de sueur. L’intérieur de la grotte était bien plus chaud que le reste du continent. L’effort avait fait travailler la totalité de mon corps. Ma respiration soulevait ma cage thoracique en spasmes incontrôlables. J’appuyai mes mains sur mes genoux afin de récupérer un peu. Ça faisait bien cinquante minutes que je courais sans m’être arrêté, à sauter et gesticuler pour éviter chaque obstacle. L’ermite, lui, se tenait là, inébranlable.

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Kaahl Paiberym
Jeu 11 Juin 2020, 20:32


L’ermite me fixa de son œil unique sans que son expression ne trahît sa pensée. Je me redressai et m’avançai vers lui, laissant ma respiration retrouver peu à peu un rythme régulier. Je ne parlai pas, attendant qu’il s’adressât à moi. « Tu es aussi habile qu’elle mais cette épreuve n’était rien de plus qu’une introduction. Ton véritable périple commencera quand tu sortiras de la grotte. La Couronne te testera et n’apparaîtra que si elle te juge apte à la porter. Un Réprouvé n’abandonne jamais. Il se bat jusqu’au bout et, surtout, il se bat contre lui-même, perdu entre le Mal et le Bien. » Je ne dis rien. « Tu es déjà dans cette situation. Tes peurs ne t’immobilisent pas mais elles hantent ton esprit. Tu as peur du Magicien que tu ne souhaites pas devenir mais tu ne peux t’empêcher de penser que tu souffrirais moins si tu rejoignais le côté que tu combats. Tu aimerais plus facilement. Tu aimerais plus sainement. Tu protégerais les tiens ainsi que des causes plus justes et bénéfiques pour le plus grand nombre. Tu trembles parce que tu ne sais pas qui tu es. Les mensonges qui bercent ton psychisme sont si prégnants et denses qu’il t’apparaît impossible de déceler ton véritable toi. Tu sais que tu n’es ni Kaahl ni Elias. » Mon souffle était devenu presque inexistant. Mon corps dans son ensemble était tendu. J’avais l’impression qu’il n’était pas fait de la même matière que moi, que ses connaissances dépassaient très largement les miennes. Un Æther ? Lequel ? Un Zaahin ? Peut-être. Les croyances étaient diverses. Peut-être était-il simplement un Roi des temps anciens qui aurait eu comme ultime mission de tester ceux désirant s’emparer de la Couronne du Milieu. Eerah Von Dreth était-il passé par cette épreuve ? « Je crois être condamné à ne jamais être moi-même. » soufflai-je. Était-ce grave ? Peut-être pas. L’identité se construisait, après tout, pas après pas. J’étais sans doute un mélange de tous les rôles que j’incarnais au quotidien. Je n’avais pas envie de me trouver. Je n’avais pas envie de me faire face. Je n’avais aucune idée de ce que j’étais. Un monstre, peut-être, une bête à peine humaine mais à l’intelligence aiguisée, assez pour mettre au point une stratégie qui durait depuis des siècles, assez pour tirer les ficelles de sa propre mise en scène. « Avance-toi et nous verrons. Tu seras obligé de confronter le Bien et le Mal si tu désires réussir à obtenir la Couronne. Sache simplement qu’une fois le combat, entre ces deux côtés, achevé, il n’y a pas plus stable qu’un Réprouvé. Ce peuple a su tirer sa force en prenant les avantages du Bien et les avantages du Mal. Si tu es assez malin, l’artefact t’aidera à l’avenir. » Je le fixai en silence, serrai les dents et tournai les talons. « Tâche de survivre. » me dit-il avant de me voir disparaître.

Je débouchai sur une étendue glacée. Ma sueur se refroidit rapidement, malgré les couches de fourrures. La différence de température fut frappante, si bien que je remontai de nouveau le tissu sur mon visage. Je n’avais eu d’autre consigne que celle de survivre et de me confronter à moi-même. Comment ? J’allais avoir tout le loisir de me questionner. Il n’y avait rien autour de moi, qu’un blanc profond et que quelques arbres recouverts de neige. Le ciel lui-même était blanchâtre. Je devais penser à la suite. Je n’avais aucune idée du temps qu’il me faudrait pour réussir l’épreuve. La température était trop basse pour que je pusse dormir dehors. Il me fallait donc trouver un abri ou en construire un, sans magie. Il me fallait également trouver de l’eau. J’avais mangé le matin même mais il ne valait mieux pas attendre d’être affamé pour chercher de quoi me substanter.

Je me mis en marche, essayant de suivre le relief de la montagne que je venais de quitter, dans l’espoir de trouver une grotte. Après plusieurs heures à errer dans le froid, je décidai de changer de méthode. Grelottant, je sortis la hache. J’allais abattre des arbres pour tenter de fabriquer un semblant d’abri. Il était important que la neige ne recouvrît pas mon corps lorsque je dormirais. Il me fallait également me construire un lit de fortune, qui chasserait l’humidité, une planche de bois assez épaisse et large pour que je pusse me reposer dessus. La nourriture ensuite. Je serrai les dents et me mis au travail. Au fur et à mesure que mes bras s’abattaient sur les troncs, mes sourcils se froncèrent. Mon apparence n’avait pas changé, seul vestige de ma magie. Mes muscles se contractaient sous l’effort, perdus entre la fourrure. Je n’avais rien pour lier le tout. Je devais réfléchir à une technique pour faire tenir le tout ensemble. Des encoches dans le bois me parurent être la meilleure solution, afin d’emboiter mes morceaux. Il fallait simplement qu’ils tiennent, de façon à ne pas être balayés par le vent. Je sentais un feu brûlant consumer mon corps. Intérieurement, ma détermination n’avait sans doute jamais été aussi puissante. Il en allait de ma survie. Il en allait de la preuve de ma véritable Force. L'Ange en moi me portait. Je ne pensai jamais une seule seconde que l’utilisation de la magie aurait pu me sauver sans aucun problème. Je voulais fabriquer, je voulais faire souffrir ma chair, je voulais rendre mes mains rugueuses et rougies par l’effort. Je voulais éprouver la rudesse et la dureté de l’existence, sentir la fatigue physique la plus absolue et éprouver la rage et le désespoir d’être le seul maître de mon destin.

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Ven 12 Juin 2020, 20:37


Moi aussi j’aimerais être avec toi. Je fixais le morceau de lettre en grelotant. J’avais construit une perceuse manuelle avec du bois. Je ne sentais plus mes mains mais les réactivai autour du bâton afin de lui faire prendre de la vitesse. J’avais mis du temps à me décider à déchirer la feuille. Je ne lui avais pas répondu. Je ne le ferais pas. Mes lèvres étaient bleues, cachées sous la fourrure. Au moins, j’avais réussi à monter un abri et à me fabriquer un lit de fortune. Ne me restais plus que le feu, ce feu qui ne voulait pas venir. Je me décalai, essayant de faire davantage barrière à l’air. Trouver des matériaux secs dans cet environnement m’avait pris un temps fou. J’avais dû monter aux arbres et creuser la terre pour prendre de la paille et des poils dans les nids et terriers des animaux qui vivaient là. Derrière moi, des cadavres pendaient mollement contre ma cabane de fortune. J’étais végétarien mais il n’y avait rien d’autre à manger. C’était ça ou la mort. Le choix avait été rapide. Maintenant, il fallait que le feu partît. Je soufflai un coup, las, et m’activai de nouveau. De la fumée finit par s’échapper de la perceuse et des braises se créèrent petit à petit. Il fallait simplement positionner celles-ci sur la matière inflammable en priant pour que ça fonctionnât. J’avais créé un emplacement au foyer, avec du petit bois. Lorsque la première flamme apparut, mon regard s’illumina. Moi aussi j’aimerais être avec toi. Je n’avais gardé que deux phrases de cette lettre. Le reste avait disparu dans l’âtre, dans l’espoir de nourrir le feu.

Quelques longues minutes plus tard, j’étais assis sur les planches qui me serviraient de lit, les mains avancées vers les flammes. J’avais dépecé les animaux et avais enfoncé une pique dedans, avant de les disposer au-dessus du feu. J’avais mal aux bras à force de les tenir. J’essayais de penser à autre chose. Je n’avais plus envie de construire quoi que ce fût. Je pensais à l’Ange, à sa lettre, partie en fumée, cette lettre qui contribuait à me garder en vie. Je n’avais pas dormi depuis mon arrivée ici. J’étais épuisé et étrangement fragilisé. Relire ce que Laëth avait écrit m’avait troublé. Je baissai les yeux vers l’autre morceau. Je t’aime. Elle n’avait aucune idée de qui elle aimait au juste. Elle aimait du vide, un mythe, un mensonge. Je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même. Je serrai les dents, baissant un instant mes mains pour reposer mes muscles douloureux. Elle ne devait pas m’aimer. Ce n’était pas Juste. J’étais cruel. Que se passerait-il lorsqu’elle se rendrait compte de tous mes non-dits, de mes contre-sens, de mes manipulations, de mes défauts et de la noirceur de mon cœur ? Il valait mieux qu’elle réservât ces mots à quelqu’un d’autre, quelqu’un qui l’aimerait bien plus que moi. Je devais lui rendre sa liberté, ne plus la revoir, l’arrêter dans ses folies sentimentales. Elle était trop fragile, bien plus que je ne l’avais cru dans un premier temps. J’avais fait une erreur stratégique en lui parlant de mon double-lien avec les Magiciens et les Sorciers. Ce n’était pas viable sur le long terme. Et qu’aurais-je fait si des Sorciers avaient décidé de s’en prendre à elle ? Je n’aurais rien fait. C’était ce que je me répétais en boucle, parce qu’une autre réponse aurait été parfaitement problématique. Pourtant, il y avait l’Ange en moi, qui ne me lâchait jamais. Il exacerbait la tendresse que je portais à la jeune femme. Celle-ci n’était pas nouvelle mais elle avait évolué. Son côté enfantin et ses peurs avaient fait naître mon affection. Sa fougue et sa façon insupportable de poser des questions et de me défier avaient provoqué chez moi d’autres choses. Je désirais son sang, je désirais ses bras. Je la voulais, elle, et j’avais beau me convaincre de la considérer uniquement comme une femme-enfant, un outil, un objet, je n’y arrivais plus. Je la désirais et j’avais besoin d’elle, autant que j’avais besoin d’Adam. Alors oui, peut-être que si des Mages Noirs avaient tenté de lui faire quoi que ce fût, je les aurais fait écorcher. Je n’en avais aucune idée.

Je fixai les deux morceaux de sa lettre avant de les prendre entre mes doigts. Je les portai vers les flammes. Le papier s’embrasa. Je ne le lâchai que lorsque le feu mordit ma peau. Je ne méritais pas sa compagnie. Je ne la désirais pas. Je voulais qu’elle m’oubliât. Sans elle, tout serait plus simple. Je n’avais pas envie de lui mentir, plus maintenant. J'avais juste envie de disparaître.

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Ven 12 Juin 2020, 23:55


« Je vous hais ! » criai-je, toujours aussi seul, perdu dans la neige. Mes mouvements semblaient fous. Mes bras étaient tendus vers les cieux et mes sourcils étaient gelés mais froncés. « Oui ! Vous là ! Les Dieux ! » hurlai-je. « Ça vous fait rire, hein ? » J’étais à bout. J’étais là depuis tellement longtemps que j’en avais perdu toute notion du temps. J’avais maigri. Ma masse graisseuse avait fondu puis, petit à petit, faute de provisions suffisantes, ma masse musculaire avait suivi. Fou d’une rage sourde, je lançai mon pied dans le seul objectif de briser la neige encore lisse devant moi. Mon corps n’aima pas ma tentative et je m’écroulai d’une façon lamentable. Je râlai. « Ça vous plaît de jouer avec le destin des gens ? » demandai-je d’une façon entrecoupée. Sur le dos, je me tournai pour me placer sur le ventre. Le sol me glaçait. Je serrai les poings et relevai la tête pour fixer le paysage devant moi. J’avais été doté à la naissance d’une grande patience mais celle-ci s’était épuisée ici. Loin de tout, j’avais pris conscience de ce qui comptait et de ce qui ne comptait pas. Les souvenirs de Devaraj me rendaient visite, le jour, la nuit, tout le temps, par intermittence, par traîtrise. Sa haine des Ætheri me rendait fou. Je m’étais coupé et la plaie avait pris une teinte affreuse. Elle puait et pullulait. Je délirais. « Je vais tous vous tuer ! Et je deviendrais le Roi ! » dis-je en me redressant, toujours furieux. « Vous ne m’arrêterez pas ! » articulai-je. Je parlais seul. Je marchais n’importe comment, me frayant un chemin dans la neige. « Je suis le premier à marcher ici ! Et vous savez quoi ? Je m’en fiche ! Je vais tracer ma propre route ! Je vais dégager toute cette neige à la main s’il le faut ! Jusqu’à trouver cette putain de Couronne ! » Je me mis à rire et chutai de nouveau. Je tremblais de froid. Je me relevai. D’un point de vue extérieur, sans doute avais-je l’allure d’un homme ivre. Je ne l’étais pas. « Je vais devenir Roi du Monde ! » criai-je, comme si cette annonce allait provoquer quelque chose. Rien. Que le silence, angoissant et agaçant, encore et toujours lui. « Et je deviendrais un Dieu ensuite ! Juste pour tous vous tuer ! » Toujours rien. Je crachai par terre et sortis ma hache. J’enlevai mon gant, laissant l’air de l’endroit frigorifier ma main. « Vous croyez que vous décidez de tout, hein ? » envoyai-je soudainement. « Ça ne vous dérange pas si je me tue, dans ce cas ? » fis-je en plaçant la lame sur mon poignet. « On verra si vous rirez toujours ensuite. » murmurai-je, alors que mon regard tombait sur ma plaie. Je grimaçai. « Non ! Je ne vais pas le faire. » me contredis-je. « Merde ! Vous m’emmerdez tous ! »

J’étais allongé sur mon lit de fortune, à penser aux lèvres de Laëth sur les miennes, à celle d’Adam autour de mon sexe. Je souriais comme un dément, imaginant les courbes de ma sœur d’un air à la fois dégoûté et curieux. Ma barbe commençait à être longue. J’étais seul, encore et toujours. Ma fourrure puait la mort, mélange subtile des animaux que j’avais tués, de ma sueur et du pus qui suintait de ma main. Je me demandais quand est-ce que je mourrais. Le problème c’est que la Mort me fuyait comme la peste. « Je sais que vous êtes là. » dis-je. Je ne parlais plus aux Dieux. Je parlais aux Esprits. « Répondez-moi. » Je fixai le bois qu’il y avait au-dessus de ma tête d’un air désemparé. J’alternais entre les phases d’espoir et de désespoir. Je n’avais aucune idée de ce qu’il s’était passé à Amestris durant mon absence. Je n’avais aucune idée de ce que faisait Gustine. Elle devait croire que je l’avais abandonnée. Je serrai les dents. Je ne le désirais pas. Je me redressai, soudain déterminé à rentrer chez moi. J’allais retrouver la Magicienne et mes enfants. J’allais pardonner les écarts d’Adam et lui dire que je l’aimais. J’allais demander à Laëth de pardonner mes écarts et lui dire exactement la même chose. Mais, surtout, avant, j’allais m’emparer de cette foutue Couronne.

Je me redressai, brisant l’accord tacite. Ma magie emplit l’endroit. Elle soigna ma blessure. Je sortis de mon campement de fortune et le détruisis. Je détachai la hache de ma ceinture et la jetai par terre. Je voulais cette Couronne et j’allais l’obtenir, même si, pour ça, il me fallait assassiner le gardien de cet endroit. Je me mis à crier contre le vent. « Teste-moi ! Vas-y ! Tu crois vraiment que tu pourras trouver mieux pour porter ta Couronne ? Je me bats tous les jours entre le Bien et le Mal ! Je me bats tous les jours contre moi-même, au sens propre comme au sens figuré ! Contre Ârès ! Contre mes besoins ! Contre mes envies ! Je me bats contre mes peurs ! Tout ça pour quoi ? Pour devenir le Roi de deux peuples en apparence antinomiques ! Tu peux me laisser crever dans la neige si ça te chante mais tu risques d’attendre longtemps ! Je vais rester debout ! Jusqu’à ce que tu reconnaisses mes qualités ! » Je respirais de façon saccadée. « Je peux aimer au point de haïr ! Je peux caresser et frapper ! Je peux construire et détruite ! Je peux soigner et condamner ! Je peux être Vertueux et Pécheur ! J’ai modelé mon corps pour être capable de combattre sans magie tout en maîtrisant cette dernière ! Je n’abandonne jamais ! Alors quoi ? Qu’est-ce que je dois prouver encore ? Est-ce que je dois brûler Lumnaar’Yuvon pour que tu me confies cette putain de Couronne ? Tu crois que c’est un jeu, que de me laisser là poiroter changera quelque chose ? Tu crois que je vais partir les mains vides ? » Je repoussai la neige qui m’entourait d’un geste des bras. La poudreuse s’écarta, formant un cercle à plusieurs mètres de moi. « Teste-moi, Foder ! » hurlai-je.

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Kaahl Paiberym
Lun 15 Juin 2020, 11:23


Alors que je ne m’attendais qu’à un énième silence pesant, j’entendis un grognement. Je me retournai. Un Goled venait d’apparaître. Il semblait aussi surpris que moi. Il devait faire deux fois ma taille et quatre fois ma largeur. Ses muscles saillants dégageaient une chaleur qu’il allait vite perdre. Il était ailleurs auparavant, quelque part où le climat était bien plus favorable aux populations, ça ne faisait aucun doute. J’amenai ma hache à moi en usant de télékinésie. Des fourrures et peaux parcouraient son torse par endroit uniquement. Le reste était nu. Je baissai les yeux et fronçai les sourcils. Sa transpiration et l’état de sa verge m’indiquèrent qu’il n’était pas en train de combattre mais plutôt de pratiquer le coït. Je souris, légèrement moqueur. Ça faisait tellement longtemps que j’étais ici que toute compagnie était la bienvenue. Pouvoir interagir réveilla mes sens. Malgré l’utilisation d’Umbra in Lucem, mon corps restait plus faible que d’ordinaire. Comme mon alimentation était mauvaise et que le froid était suffisamment glacial pour m’empêcher un quelconque confort, j’étais fatigué. Quant à l’interruption de ses ébats, je pouvais comprendre pour l’avoir moi-même vécu quelques mois plus tôt. Ce n'était pas agréable.

Le monstre grogna. Je ne pus m’empêcher de penser, légèrement sarcastique, que lui et moi ne pourrions certainement pas nous entendre. C’était une évidence et, à vrai dire, je l’avais su dès les premières secondes. Il était mon épreuve, la réponse à ma demande. « Allez, viens. » murmurai-je, en prenant une position de combat. Je n’étais pas certain de pouvoir le tuer à mains nues. Il grogna de nouveau, ne semblant pas décidé. Je fis craquer mon cou et lui envoya l’arme dessus. La lame se planta dans la chair de son bras. Je ris, clairement à bout. Je faisais actuellement face à une part animale de ma personnalité que je n’avais jamais encore expérimentée par le passé. Il y avait une lueur sauvage dans mon regard. Je voulais du sang, pas pour le boire, juste parce qu’il me semblait à ce moment-là que ça me ferait du bien de juste… faire un massacre. Mes frustrations et souffrances seraient expulsées de mon corps, ainsi. Sans doute étais-je hanté par le spectre du Colérique qui vivait en moi. Je voulais juste le planter, voir ses organes s’échapper de son corps, les attraper à pleines mains pour le vider. Je désirais juste défoncer sa sale gueule et éteindre le cri strident et désagréable qu’il venait d’émettre. L’une de ses grosses mains vint arracher la hache de son épiderme. Maintenant, il allait se bouger.

Je sautai sur le côté. Ces choses n’avaient aucune intelligence ni stratégie. Elles se contentaient de foncer, ce qui était déjà bien eu égard à leur force de frappe. Ça ne m’étonnait pas que Hena fût morte en combattant un Goled. Un mauvais coup pouvait suffire à faire basculer le rapport de force. « VIENS ! » criai-je. « Je vais te défoncer. » Je souris, mauvais. J’évitai un nouveau coup. L’air projeté par son mouvement me donna une idée. Je fis apparaître la Lame des Anciens entre mes mains, avant de me décaler de nouveau sur le côté. Il n’avait aucune arme mais ses poings en étaient des suffisantes. Je me baissai, passant entre ses jambes pour taillader l’une de ses cuisses. La bête poussa un râle. Je lui coupai le souffle en me retournant, envoyant la lame vers son torse, en un coup puissant qui, au lieu de le blesser, provoqua une rafale qui le fit reculer. Mon visage n’était plus que haine. Ma volonté de détacher chaque parcelle de sa silhouette de ses os était presque palpable. J’allais le dépecer vivant. Imaginaery s’activa, créant douze lames particulièrement affutées. Je les contrôlai par magie et les fis s’abattre à des angles anatomiquement stratégiques à pleine puissance. Plusieurs parties de son corps se détachèrent. Un Goled en morceaux. Il aurait été sanguinolent si la température n’était pas si basse. J’inspirai, physiquement fatigué, magiquement toujours en pleine forme. Je m’approchai, mon instinct m’indiquant de fouiller ses entrailles. Je trouvai deux choses dans ces dernières : la Couronne du Milieu et un nourrisson aux ailes écarlates. De l’air fut expulsé par mon nez devant la clarté de la situation. L’ermite devait me considérer comme un Réprouvé, à présent.

Je finis par retrouver la grotte. J’entrai. Le sort temporel se brisa, redonnant à mon corps toute sa force passée. Je compris rapidement que les semaines que je venais de passer dans le froid n’avait eu aucun impact sur le monde extérieur, chose que l’on me confirmerait plus tard. Pour les habitants de la Terre Glacée que j’interrogerais ensuite, je n’étais partie que quelques heures. Quoi qu’il en soit, l’homme n’était plus là. Le parcours non plus. Aussi, il me suffit de marcher une centaine de mètres pour atteindre la première entrée. Quand j’eus passé celle-ci, elle disparut, pour ne laisser place qu’à un mur de roches. Le bébé me regardait. J’avais pris la tenue du Goled pour le couvrir. Je n’avais même pas vérifié son sexe. J’avais eu bien trop peur qu’il mourût de froid. La principale question était la suivante : qu’allais-je faire de lui ?

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