Nissa lui posa la question sur les pierres, auquel il s'attendait, pourtant, il sentit qu'elle était distante, ailleurs. Elle releva sa tête et tourna son regard vers la forêt, comme si elle entendait des bruits anormal. Il la regarda en plissant les yeux. Malgré ses sens développés, il n'entendait rien d’alarmant. Il fronça les sourcils et suivit son regard. *Tient, il semblerait que la folle se soit réveillé*. Dit Zess. *Je ne veux pas entendre ça de ta part* *Eh ! Je n'ai pas d'ami imaginaire, et je me mets par à crier dans tous les sens pour n'importe quelle raison*. Setho retint un soupir, et passa un bras autour des épaules de la demoiselle. Il ne savait pas trop comment réagir face à une telle réaction. Il voulait faire quelque chose, mais quoi ? Il n'aimait pas se sentir impuissant, mais il ignorait comment faire. En terme de relation humaine, il était vraiment nul.

Soudain, la Princesse se leva et commença à crier contre un ennemi invisible. Le Réprouvé se leva également, et voulut poser sa main sur son épaule pour la rassurer, mais il la laissa en suspens, ne sachant quoi faire. Nissa se mit à crier. Il ne pouvait rien faire, même pas lui dire que tout irait bien. C'était un ennemi contre lequel il ne pouvait rien. Des démons intérieurs qu'elle devait vaincre si elle voulait qu'ils disparaissent. Il se décala quant elle recula pour ne pas qu'elle lui fonce dessus par mégarde. *C'est fou. Elle sait que c'est faux, mais elle en a quand même peur... Intéressant*. Se dit Zess en analysant son comportement. Encore une fois il l'ignora, restant les bras ballant. Soudain elle s'interposa entre lui et la ''chose''. Setho comprit qu'elle voulait le protéger, même s'il n'était pas en danger. La ''chose'' sembla disparaître, car elle sembla se calmer, ne serait-ce que la tension dans ses épaules.

Nissa se tourna vers lui, et il vit dans son regard qu'elle était encore déstabilisé. Il sonda son regard, pour essayer d'en apprendre un peu plus, mais ce fut Zess qui lui fournit la réponse, beaucoup plus fort que lui pour analyser les gens. *Je dirais qu'elle vient d'apprendre quelque chose, ou alors comprendre une chose qu'elle ne voulait pas voir au départ*. Elle lui dit alors ce qu'elle voulait. Non qu'il revienne pour le bracelet, mais bien pour elle. Cette remarque eut pour effet de le déstabilisé. Il la connaissait à peine, et voilà qu'elle voulait qu'il s'attache à elle en deux rencontres. Il ne comprenait pas, pourtant il se rendait compte que le bracelet n'était qu'un prétexte pour revenir. Il ne comprenait pas pourquoi il voulait tellement la voir. D'accord il était curieux, mais tout de même, c'était quelque chose qu'il n'arrivait plus à comprendre, qu'il n'avait sûrement jamais compris.  «Nissa je... je... »

Soudain un mal de tête le prit. Il plaqua ses mains sur ses tempes, et se plia en deux, reculant. Pas maintenant ! Surtout pas maintenant ! Et pas avec Nissa ! Il tomba à genoux, se mordant la lèvres inférieure. Il dit, tant bien que mal, quelques mots.  «Tu ferais mieux de partir, s'il te plaît... ». Sa voix était faible, et à peine compréhensible.  «Il vaudrait mieux que... tu ne vois pas ça ». Il était encore déstabilisé par Nissa, et n'arrivait pas à réfléchir assez clairement pour lutter entièrement contre Zess. En fait, il pensait sûrement au fait qu'il pourrait la blesser, même si ce n'était pas réellement lui, et ça le ramenait à la mort de Caatalina, son ancienne ami que le second avait tué le jour de son apparition. Les sons autour de lui devinrent indistincts, tout autour de lui était flou. Il se retenait de crier, ne voulant pas attirer l'attention. Il se releva, souriant. Ce n'était plus lui, mais Zess. On pouvait le voir grâce à son œil écarlate.  «Eh bien, je suis heureux de te rencontrer Nissa. Je me demandais comment je te verrais à travers mes propres yeux ». Il tendit la main pour lui caresser la joue du bout des doigts mais Setho réussi à prendre le contrôle, d'une partie du corps seulement, et à s'attraper la main. *Oh non ! Je te laisserai pas faire !*. Il se tira de l'autre coté, tournant le dos à la Princesse.  «Tu peux pas me laisser tranquille pour une fois ? ». Lui rétorqua Zess.  «Pas cette fois ». Dit Setho, avec sa vrai voix. Il se mit encore à tourner sur lui-même, chacun luttant. Au final, il s'écroula au sol, la respiration courte et rapide. Il roula sur le dos, les bras écartés, l'oeil fermé. Il finit par le rouvrir. Il avait retrouvé sa couleur émeraude. Setho tourna la tête vers Nissa, mais ne trouva pas quoi dire, alors il baissa l'oeil, honteux.

Résumé:

Spoiler:

Setho vit le visage de Nissa apparaître au dessus de lui. Il leva son œil vers elle, une lueur triste dans le regard. Elle avait deviné ce qu'il était. En même temps, avec ce qui venait de se passer, seul un parfait idiot n'aurait pas deviné. Il tourna la tête. C'était une habitude qu'il avait prit. Depuis tout ce temps, il cachait toujours sa véritable identité, et, quelque soit les personnes qu'il rencontrait, il avait tendance à penser qu'elles finiraient toutes par le rejeter. C'était la seule façon qu'il avait trouvé pour survivre. Au final, il avait donc pensé la même chose pour Nissa. Il finit par prendre la main qu'elle lui tendit, et se releva. Il s'éloigna un peu d'elle, gêné, et essayant d'éviter de se gratter la paume de la main, comme quand il était dans une sorte d'état de panique. Il mit les mains dans ses poches, et écouta ce que lui disait la demoiselle d'une oreille distraite. Il n'arrivait plus vraiment à se concentrer sur elle.  «Je suis... Désolé pour tout ça... ». Dit-il, la tête basse. En ce moment, il se détestait, comme à chaque fois. Mais pour une fois il avait gagné. Peut-être que son contrôle augmentait.

Il releva la tête vers elle, pour voir qu'elle le regardait. Elle continua de lui parler, expliquant ce qu'elle ressentait.  «C'est rassurant de savoir ça. Si ce que tu m'as dit ma déstabilisé, c'est parce que je n'ai pas l'habitude... Et que... Non, c'est compliqué à expliquer ». Termina t-il en passant une main dans ses cheveux. Il recula la tête lorsqu'elle s'approcha un peu trop de lui, et tandis qu'elle parlait à Zess, il l'entendit rire.  *Non mais pour qui elle se prend cette gamine de me parler comme ça ? Je sens que je vais m'amuser avec elle si elle continue comme ça ». Mentalement, Setho l'envoya au plus profond de son esprit, l'enterrant. Il ne voulait plus l'entendre pour le reste de la soirée, sinon il allait péter un câble. Il devait déjà réussir à se calmer, et reprendre le contrôle de ses émotions. Son esprit était déjà fatigué par le combat qu'il venait de mener, si Zess refaisait le même coup, il n'était pas sur de pouvoir répliquer.

Il se pencha au-dessus de l'épaule de Nissa, qui commençait à dessiner sur le sol, cherchant une solution pour immobiliser Zess. Il fit un sourire crispé, quant elle lui parla d'un paralysant.  «Tu m'excuseras, mais essayer de me paralyser, ou de m'empêcher de bouger... N'est sûrement pas la bonne solution... Disons que j'ai déjà eu quelques mauvaises expériences en la matière... ». Il se demandait si la Princesse pouvait réellement comprendre ce qu'il disait. Elle était intelligente, certes, mais elle n'avait jamais subit le genre d'expérience qu'il avait vécu, et qui avait eu un grave effet psychologique sur son esprit. Elle se releva, et se tourna vers lui, réfléchissant toujours à un moyen.  «Oh pour ça, je pourrais peut-être t'apprendre. Il suffit juste d'un peu de technique. Je crois que je préfère ça, à... M'enchaîner, ou je ne sais quoi d'autre ». Oui, c'était sûrement moins dur pour lui de se faire assommer. Un peu honteux, mais il se demandait comment Zess pourrait réagir face à ça, et surtout il se demandait si Nissa aurait vraiment assez de force pour le vaincre.

Il croisa les bras, et fit mine de réfléchir, reprenant son attitude désinvolte et souriante.  «Eh bien... Je ne sais pas si j'ai encore envie, après tout, tu m'as crié dessus... ». Il sourit avant de faire un clin d'oeil, enfin autant que son état lui permettait, à Nissa. Ensuite, il attrapa doucement son poignet. Il désigna la première petite pierre bleue.  «C'est du lapis lazuli. Considéré comme la pierre de l'amour et l'amitié. Elle est censé créé une aura de tendresse et sympathie ». Puis il désigna une boule en argent.  «L'argent dit de ne pas négliger sa part du travail, et d'attention. Elle est la clé de la réussite pour certains ». Puis il désigna la plus grosse, au centre.  «Et celle-ci, c'est une topaze bleue. On dit qu'elle aide à surmonter les craintes et les obstacles. C'est une pierre qu'on dit qui est pour les savants, les écrivains, intellectuels... Et pour terminer, elle est censé favoriser la fidélité, l'amitié, la douceur, l'intégrité, et permet de calmer l'angoisse mentale ». Il trouvait que cette définition correspondait plutôt bien à Nissa pour l'aider à se sentir un peu mieux. Peut-être les bienfaits de cette pierre étaient réelles, et qu'elle pourrait aider la Princesse. Ou alors, elle y croirait, et, comme elle penserait que c'est vrai, réussirait à calmer ses crises. Ca arrivait parfois. Il lâcha son poignet en souriant.  «Et voilà. Ca fait un peu superstitieux, mais bon, on sait jamais, c'est peut-être vrai »

Résumé:

Les écailles argentées du dragon, finement sculptée dans le métal, s'enroulaient avec souplesse autour du joyau bleuté, serti entre les griffes de l'animal. Satisfait, Ercan referma doucement ses doigts fins sur le bijou et le leva à hauteur d'yeux, le scrutant de son regard vermeil, alors que par-dessus son épaule, Yuan Eren laissait échapper un sifflement d'admiration. Depuis quelques temps, l'art de son 'fils' se diversifiait, s'améliorait, et si par le passé l'Elémental avait été incapable de se restreindre à un seul sujet imposé par le client ou les circonstances, il était à présent passé outre cette difficulté. Son regard noir de jais quittant le bijou qu'observait son 'fils', il s'aventura sur l'établi servant d'espace de travail au jeune 'homme' qui, s'il avait hérité de bon nombre des techniques de joaillerie de sa mère, s'était à présent aventuré dans le domaine de l'innovation, usant notamment de cette magie dont elle-même était fatalement dépourvu – et de ce fait, elle se faisait à présent fréquemment mettre dehors par Ercan sous prétexte qu'elle perturbait son travail à cause de son anti-magie – et se posa sur quelques-unes des répliques du bijou que l'Elémental tenait entre ses doigts. Quand bien même les broches étaient issues du même modèle, elles en demeuraient incroyablement différentes les unes des autres. Le regard du dragon, la pierre autour de laquelle il était lové, les écailles scintillant de mille feux... Un détail, toujours un détail, qui rendait chacune des créations du jeune 'homme' unique. Et tant mieux, car c'était bien là ce qui démarquait l'artisanat du reste, cette empreinte à la fois similaire et différente que le créateur laissait dans chacune de ses œuvres.

Achevant sa contemplation, le jeune 'homme' aux cheveux argent fit glisser le bijou dans une petite sacoche qui semblait d'ores et déjà contenir d'autres œuvres, toutes imaginées et créées autour d'un thème précis : Suris, le dragon des Mages blancs, auquel ils rendaient hommage au travers de nombreuses coutumes. S'il avait été étonnant de constater dans un premier lieu à quel point la culture de l'Elémental s'était élargie ces derniers temps, il n'en demeurait pas moins au final quelque peu logique que l'artisan qu'était à présent Ercan se renseigne quelque peu sur les différentes modes de ce monde. Quand bien même il le faisait la plupart du temps de manière assez singulière, et Yuan n'aurait guère hésité parier un de ses reins que son 'fils' était aller fureter du côté du Lac de la Transparence et qu'il avait observé de près – mais vraiment de très près – les broches funéraires des Magiciens.

Ses réflexions furent interrompues par un violent claquement de porte s'ouvrant dans son dos, mais la joaillière ne daigna même pas de sursauter. Tout comme son 'fils', qui resta de marbre. La violence mobilière et immobilière était une chose commune dans cette maison, aussi personne ne trouvait moyen de reprocher à la nouvelle arrivante d'adopter aussi rapidement les us et coutumes de la famille – quoique Xena n'avait pas encore tenté le lancer de cuillers en bois. La Réprouvée, dont mère et 'fils' avaient deviné l'entrée sans même lui lancer un regard, se précipita vers le jeune 'homme', manquant de peu de fouetter de l'une de ses ailes le visage de Yuan, qui s'écarta vivement avec un sourire.

« Ercaaaaan ! Bouge-toi ! On est à la bourre ! »

Nonobstant l'agitation de la Réprouvée, le jeune 'homme' laissa échapper un petit soupir, achevant de fermer avec tranquillité la bourse qui contenait les créations qu'il comptait emmener avec lui, principalement composées d'argent, parfois ornées de quelques petites pierres semi-précieuses. Et lorsque la jeune femme aux cheveux poivre et sel posa joyeusement sa main sur l'épaule du joaillier, sans la moindre agressivité, celui-ci laissa sa magie prendre le dessus, et les deux énergumènes disparurent en un instant, emportés par les pouvoirs de l'Elémental, sans dire un mot de plus.

Peut-être ne s'habituerait-il jamais à l'influence de sa mère humaine sur ses pouvoirs. Ou peut-être était-il trop dépendant de ses pistes d'atterrissage pour apparaître ailleurs que dans un arbre. Si bien que lorsque l'Elémental se matérialisa, ce fut dans les branches de l'un de ces imposants colosses de la forêt jouxtant le Lac de la Transparence, sans qu'il ne fut plus perturbé que cela. S'accroupissant sur la branche qui venait d'être soudainement affligée d'un fardeau inattendu, il laissa, sans le moindre scrupule, la Réprouvée choir, lui laissant le loisir d'effectuer un atterrissage acceptable grâce à la paire d'ailes hétéroclites saillant entre ses omoplates.

« Attrape. »

Le jeune 'homme' aux cheveux argent laissa choir la petite bourse dans laquelle il avait glissé une partie de ses créations, laquelle vint atterrir droit dans les mains en coupe de la Réprouvée, dont les réflexes commençaient à s'affiner grâce aux habitudes étranges de l'Elémental. La petite bourse entre les mains, elle ne s'attarda guère plus au pied de l'arbre et, poussant un cri presque guerrier, se rua hors de la forêt pour arpenter la foule et commencer à tenter de vendre les joyaux de l'Elémental.

Lui-même ne tarda pas à mettre pied à terre et à prendre la direction du Lac, au bord duquel un bal avait commencé, quand bien même tous les convives n'étaient guère enclins ou obligés à se prendre au jeu. Lui-même n'avait guère l'envie de danser avec qui que ce soit, que ce soit à cause de son lamentable niveau de danseur ou à cause de ses autres préoccupations. Après tout, il était là pour profiter du rassemblement afin de se faire connaître davantage en tant qu'artisan. Et de ce fait, lui et Xena arboraient une broche différente de celles des organisateurs, représentant le dragon Suris lové autour d'une tourmaline bleu vert, mais là n'était pas la seule création que l'Elémental avait en réserve. De la bourse qu'il lui restait, le jeune 'homme' sortit un cercle de fer autour duquel étaient accrochés bracelets, bagues et pendentifs à l'image du dragon légendaire et déambula entre les convives, qui s'attardaient de temps à autre sur ses créations, à la fois interpellés par son art et la couronne tissée de feuilles de peuplier en bronze pendant à sa ceinture, témoignant de sa participation au concours artistique du centenaire de la précédente reine des Alfars et de la place qu'il y avait obtenu.

Et sans aucune raison, il s'approcha d'une jeune femme rousse aux prunelles céruléennes, semblant observer la danse de deux dragons, l'abordant sans la moindre hésitation :

« Dame, une broche de Suris pour vous porter chance ? »

Probablement n'était-ce pas la meilleure publicité qui soit pour une cliente élementale, mais il ne savait après tout rien de cette jeune femme...

Résumé:

J'avais de nouveau entrepris de scruter les environs à l'aide de ma synesthésie magique lorsque la voix de la Démone s'éleva de nouveau, la vipère aux cheveux de feu s'étant glissée à mon côté pour distiller son venin. Agacé, j'émis un claquement de langue tout en fermant les yeux, cherchant ainsi à couper de nouveau tous mes sens de la magie environnante, submergée par la présence de Mitsuko, aussi envahissante que désirable. User de cette méthode pour chercher les œufs était en soi la meilleure que j'avais à disposition, mais également celle qui me laissait le plus vulnérable aux attaques insidieuses de la jeune femme... Qui n'avait pas manqué de faire mouche une fois de plus, évoquant tour à tour cette étrange envie qui me rongeait d'occuper une place particulière dans son cœur et la nuit que nous avions passée ensemble au manoir Taiji, suite à cette soirée scandaleuse au cours de laquelle elle avait tenté – quoique – de vendre la main de sa dernière descendante. A fleur de peau, je tressaillis lorsque la main de la Démone se posa dans le creux de mes reins pour remonter doucement jusqu'à mon épaule, et je me forçai à rouvrir les yeux lorsque celle-ci me fit pivoter, après s'être posée sur mon épaule, malgré ce couteau invisible que la dame se plaisait à remuer dans une plaie encore bien trop fraîche. Quand bien même je n'avais jamais eu beaucoup d'amour-propre, je me devais d'avouer que la manière dont s'était achevée la soirée au manoir Taiji avait profondément blessé mon ego, mon estime de moi, et n'avait fait qu'accroître la puissance de ce lien qui existait entre la Démone et moi.

Et pas une seule fois n'osais-je imaginer que la situation déplaisait à celle qui semblait savourer à chaque instant ma déchéance, observant d'un œil que j'imaginais satisfait mes efforts qui me vouaient à m'empêtrer davantage dans les filets de la chasseresse qu'elle était. Prisonnier d'une haine aussi forte que le désir, j'étais incapable de tuer cette femme qui hantait mes pensées, tout comme j'étais incapable de me l'approprier pour la créature de luxure qu'elle était. Et d'une certaine façon, si j'étais bel et bien insatisfait de ne pas pouvoir mettre fin à la vie de la dame, j'étais en revanche quelque peu ravi de ne pouvoir me laisser allègrement choir entre les griffes de la Démone, ma haine demeurant un moyen de défense, certes quelque peu torturé, contre les tentations de la chair. Et les Aetheri savaient que ces dernières étaient nombreuses en présence de la jeune femme qui incarnait son péché à la perfection.

Si bien que lorsque sa question parvint à mes oreilles, je ne pus que l'écarter avec un rictus où se mêlaient l'ironie et le mépris. Quelque part, au fond, j'étais encore capable de rire de ma propre misère, mais également de la manière dont Mitsuko tournait les choses. C'était elle qui m'avait laissé entrer dans son jeu, danser allègrement dans le creux de sa main, m'encourageant dans ma stupidité et ma déraison. C'était elle, qui, dès le premier instant, avait fait naître en moi le désir, et avait attisé ma haine et mon mépris pour ce qu'elle avait fait de ma sœur. Osait-elle affirmer qu'elle le regrettait ? Je n'en croyais pas un mot. Mais avant même que ma réplique ne fuse, cinglante, je tressaillis lorsque l'ongle de la jeune femme s'enfonça sans prévenir dans ma chair, sa main ayant glissé de l'épaule au cou avec cette langueur qui lui était propre. Seulement, si je ne doutais pas un instant que la dame était partisane des jeux de violence entre partenaires, je devinai en quelques instants que son geste n'avait pas pour seul but de titiller mes nerfs déjà à vif.

La substance qui traversa ma peau pour se couler insidieusement dans mes veines et se propager dans mon corps fit monter en moi une chaleur presque insupportable, de même que mon esprit, guère clairvoyant jusque-là, se trouva davantage prisonnier de ce désir qui me rongeait, le décuplant au point que mon corps même se mit à y répondre. Déglutissant avec difficulté, je plongeai mon regard avide de désir dans celui émeraude de Mitsuko, alors que ses propos tentaient de trouver un sens dans mon cerveau étreint de sensations aussi sublimes que douloureuses. Parvenant malgré moi à conserver un brin de raison, je rivai malgré tout, et malgré moi, un regard désespéré sur un autre œuf dissimulé dans les hauteurs, que j'avais eu le temps d'apercevoir quelques instants plus tôt, avant qu'une vague de colère, de supplice et de violence ne m'emporte.

Ma main libre vint se poser brutalement à la base du cou de la dame et je la bousculai sans la moindre délicatesse, afin que son dos vienne heurter un arbre, alors que je plaquai mes lèvres sur les siennes, presque avec sauvagerie. Mon autre main laissa échapper l'oeuf, dont la chute fut amortie par les hautes herbes, et vint se plaquer sur la cuisse de la Démone, la griffant sans vergogne. Mon intimité vint frôler la sienne, alors que je la maintenais plaquée contre l'arbre.

« Oublie donc tes machinations et danse avec moi, vipère, si c'est ton désir, assénai-je avec colère une fois mes lèvres détachées des siennes. »

Désir et haine. Un paradoxe éternel qui ressortait même dans mes paroles, alors que je n'avais qu'une envie : lui faire payer. Peu importait les formalités et le reste, peu importait la réalité qui nous entourait. Peu importait ma résolution, bien vite oubliée.

Résumé:

~ L'Ombre venait de déroger à une des règles les plus importants du souverain des Ombres : la discrétion. Effectivement, à l'inverse de bon nombre de titres, l'Esprit de la Mort devait être d'un silence total quant à son identité et, normalement, son physique. La jeune fille, pour jouer pleinement son rôle en ces terres, aurait probablement dû substituer son apparence réelle pour une apparence faussée. Néanmoins, la demoiselle n'avait aucune envie de mentir aux yeux des gens et la fillette aussi avait le droit d'être ce qu'elle était ! Pour ce qui était de la révélation, Shiro avait vite apprécié l'adolescent. Elle trouvait, en Ryan, l'insouciance que tant d'adultes avaient hélas perdu ; le sourire, sincère et sympathique de quelqu'un qui aimait rire, plus ou moins finement. Il était simple, amical et lui-même, rien n'était faux ou alors elle l'aurait su. Non, sa compagnie était bien plus agréable que celle des plus hauts placés et l'Ombre le considérait déjà comme un ami. Le regard lunaire de Kuro aspirait, en revanche, une certaine méfiance à l'égard du Vampire. Cela était davantage dû à son naturel qu'à son rôle de "garde du corps". D'ailleurs, Shiro disait toujours qu'Eyji était son garde du corps "officiel", déjà plus imposant que le Démon, qui arborait une silhouette bien plus élancée et souple. A l'appellation hésitante du jeune homme, l'Ombre répondit : « Ah non, pas de Majesté ou quoi, moi je supporte pas ça, ça me fait de l'urticaire ! On est ami, non ? Alors pas de grandes tournures ! » Elle sourit, tandis que Ryan lui proposait de danser. L'Ombre rigola doucement avant de poursuivre : « Bien sûr que j'accepte, j'adore danser ! Et arrête dire que t'es un crétin. De vrais débiles, j'en connais, et je peux te dire que tu es loin de l'être. »

Le cornu fixa la scène, impassible, le lampion désormais dans ses mains. Son léger froncement de sourcils, presque imperceptible, était le seul trait traite de son expression. En effet, Kuro était un as du visage de marbre, rien ne se lisait sur sa figure et tout restait confiné en lui. Il fallait être puissant et posséder le pouvoir adéquat pour décrypter son intérieur et savoir ses pensées. Il resta assis, attentif aux deux personnes en face de lui. La Reine des Ombres écouta les questions du jeune homme et y répondit à tour de rôle, souriante : « Eh bien, je vis de temps en temps au Jardin Animalier, mon petit paradis, et sinon au Royaume des Abîmes... En effet, ça fait bizarre de plus vieillir, mais depuis le temps, je m'y suis fait ! Et puis c'est cool d'être jeune éternellement… Un amoureux, moi ? » Elle repensa néanmoins à Grimm', mais fit taire la chose, son côté adulte quelque peu attristé : « Bien sûr que non ! Toute façon, je suis trop petite pour en avoir un, na… Des enfants !? Ah, tu vois une gamine de huit ans dire qu'elle a des enfants ? Non, j'en ai pas et le jour où j'en aurais, eh bien j'aurais décidé de ne plus être plus une fillette pour devenir une femme. »

Sa dernière question fut celle qui l'interpella le plus. Son sourire s'effaça légèrement, néanmoins sans disparaître, et elle réfléchit un court instant. Les adultes... Quand penser quand on était à la fois très enfantine et, mature et grave par moment, comme ces derniers ? La jeune fille répondit en toute vérité : « Si, parfois c'est chiant, très chiant, je vais pas te le cacher... Ils ont une incroyable gravité, parfois des humours bien à eux, des expressions, des façons de parler, d'agir. C'est des grands quoi, moi je suis qu'une gamine. Parfois je ne suis même pas prise au sérieux ou alors il faut que je sorte mon titre. » Elle fit une pause. « Les adultes, c'est tout un univers. J'ai un pied dedans, mais un pied dans celui de l'insouciance, de la légèreté des enfants, de leurs joies, leurs rires et leurs sourires ! Je vois toujours les choses de deux visions différentes. Au fond, je crois que je suis heureuse d'être restée une petite fille, si seulement tout le monde pouvait garder une part d'enfant toute sa vie... » C'était un peu un idéal, mais l'Ombre continuait de croire que certains adultes avaient gardé une âme enfantine, plus ou moins prononcée. Par exemple, Eyji était une sorte de grand gamin par moment et rigolait de choses toutes bêtes. Elle conclut, avec un petit sourire : « Enfin, ça n'empêche pas que ce soit une petite fille qui dirige des adultes ! Pour en revenir aux enfants, je crois que si, au final, j'en ai un : Kuro ! Et crois-moi, c'est déjà beaucoup de boulot de s'occuper de lui. Il faut le faire rire et le faire sourire. C'est pas toujours une tâche facile. » L'Ombre rigola doucement en regardant le Démon, qui comprit qu'on parlait de lui.

Puis, elle revint sur le Vampire et le regarda avec une mine légèrement plus grave. Shiro lui avait quand même confié le mot clé de son identité, qu'elle cachait habituellement si bien. Il y avait un peu de relâchement sur ce coup... « Ryan... » Elle fixa le jeune homme de ses iris écarlates, étrangement sérieuse. L'Ombre lui expliqua : « Ce que j'ai t'ai dit, sur le fait que je sois une Ombre et l'Esprit de la Mort, n'en dis rien à personne, c'est clair ? Tu peux dire que tu me connais ou quoi, mais je te veux muet comme une carpe quand on te demande de qu'elle race je suis et, encore pire, mon statut. Je ne suis qu'une gamine, rien de plus. C'est un secret de la plus haute importance Ryan, comprends bien qu'il peut mettre en péril bien des choses, dont ta propre vie dans le plus catastrophique des cas... Je peux te faire confiance ? » Cette demande pouvait ressembler à un ordre, mais il n'en était rien. Jamais Shiro ne se serait permis ce genre de chose et que l'on fusse simple habitant ou roi de tout un royaume ni changeait rien. A ses yeux, un Homme restait un Homme et méritait le respect auquel tout Homme avait le droit. Néanmoins, la formulation de sa question montrait l'importance de cette information et les conséquences non-négligeables qu'elle pouvait avoir. Ainsi, elle voulait seulement savoir si l'adolescent pouvait garder cette confidence uniquement pour lui.

Résumé:

Après son explication, Nissa se mit soudainement à rire, et à tourner, s'écriant des phrases, qui faisaient sourire Setho. Il lui attrapa l'autre bras pour ne pas qu'elle tombe.  «Je serais ravie de venir un jour, mais ferme ta fenêtre, tu risquerais de tomber malade. En plus, je ne pense pas pouvoir entrer dans le château rien qu'en volant ». A moins qu'il ne soit vraiment pas protéger. Mais il ne voulait pas casser le moral de la jeune fille, alors il se rattrapa.  «Mais je t'avoue que je me suis encore jamais infiltré dans une chambre, et en plus de Princesse, je suis curieux d'essayer ». Il souriait, regardant Nissa qui continuait de danser, et d'écouter la musique. Il l'entendait également, mais ne l'écoutait que d'une oreille. Il ne voulait pas briser le moment de lucidité qu'elle avait, alors il riait avec elle.

Un gamin apparut derrière les rochers, provoquant la Magicienne, qui lui jeta sa chaussure.  En riant, le Réprouvé lui cria.  «Les enfants comme toi devraient apprendre à écouter avant de parler ! ». Il vint se planquer derrière lui, et il posa la main sur sa tête, lui ébouriffant les cheveux. Il sentit une bosse sur sa tête, et se tourna alors vers lui. Nissa se précipita, et lui prit le bras. Il se replia, et Setho sut aussitôt qu'il était blessé. Elle souleva ses manches, et vit des hématomes. Il s'accroupit à coté des deux, écoutant son histoire, tandis qu'elle le guérissait. Au départ, il ne dit rien, mais la magie blanche fit effet autant sur son mental que physique. Il se mit à parler d'un garçon qui le battait. Le Réprouvé savait que les enfants pouvaient être cruelles. Il avait échappé à ça jusqu'à ce qu'il arrive dans les villes. Heureusement, qu'il savait se battre, même s'il était tombé dans certaine situation dont il n'avait pas pu se sortir.

Dès que Nissa avait entendu l'histoire, Setho remarqua son changement d'attitude. Elle comptait venger l'enfant, car elle avait une lueur de détermination dans le regard. Il la regarda se lever, remettre ses chaussures. Avant qu'elle ne disparaisse, il fit un léger signe de tête, sauf qu'il était incompréhensible de savoir s'il avait dit oui ou non. Il caressa la tête du garçon, lui faisant un léger sourire rassurant, et de lui murmurer quelques mots.  «Ecoute, vient avec moi. On va aller dans la forêt. N'ai pas peur, je vais rester avec toi ». Il se leva, attrapant la main du garçon, et l'emmena avec lui. Il sortit de derrière les rochers, et partit vers la forêt. Il grommela quelque chose, faisant en sorte de ne pas être entendu par l'enfant.  «En espérant que Nissa ne fasse pas de bêtises sous le coup de la colère ». Il ne la connaissait pas encore très bien, mais si elle était aussi en colère qu'elle l'avait parut, et si elle tombait dans une crise, elle pourrait peut-être pousser le bouchon un peu loin. Le Réprouvé s'arrêta quelques secondes, et cria.  «Nissa ! Ca te dit de te montrer ? Ca n'en a peut-être pas l'air, mais se faire planter, c'est très déplaisant ». Il disait ça sur le ton du rire, mais il espérait qu'elle n'allait pas faire de bêtises.

Résumé: