« Tu es sûr que c'est ici? Nous marchons depuis des heures. ». « Annabelle, voyons, je croyais que tu me faisais confiance! Tu es en train de blesser mon pauvre petit cœur si sensible! ». « Tu dis franchement n'importe quoi. Si tes sujets t'entendaient, crois moi, ça les effraierait. ». « Justement, je dois te parler de quelque chose. ». Oui, il me semblait que c'était le moment de lui dire ce que je projetais de faire d'ici quelque temps. Elle en serait sans doute surprise parce que je n'avais pas même évoqué le sujet avec elle – et avec personne d'autre pour être exact – mais je devais la mettre au courant. Son regard émeraude se porta vers moi, me fixant un instant étrangement avant de plaisanter : « Tu m'inquiètes. Déjà que lorsque tu m'as invité à te suivre en enfer je me suis demandée si tu ne voulais pas m'y laisser alors... ». J'attrapai son poignet, la tournant vers moi, nos corps si proches. Oh elle savait comme moi que je ne lui ferai rien, mais ça l'étonna. Mon air sérieux la calma mais je finis par rire, si bien qu'elle ne savait plus quoi faire. « Serais-tu devenu fou? ». « Ça se peut bien. ». « Bon, au moins, l'enfer ne te fera ni chaud ni froid dans ce cas. C'est une bonne chose. ». Nous continuâmes à marcher sans que je ne rajoute rien et, au bout de quelques minutes, je la voyais de plus en plus impatiente de savoir, celle-ci finissant par demander : « Bon, quelle est cette grande nouvelle que tu dois m'annoncer? C'est assez impoli de laisser une femme ainsi, dans l'attente. ». Je lui souris, amusé par sa manière de se comporter. A chaque fois que j'étais à ses côtés, j'avais l'impression de retomber en enfance ou de redevenir bénéfique. C'était une relation toute particulière mais qui avait le don de me donner un peu de joie de vivre. Elle canalisait mes pulsions meurtrières et je savais que je ne pourrai sans doute jamais assez la remercier de m'éloigner avec cette si grande facilité de la folie meurtrière qui avait de plus en plus de facilité à m'atteindre. « Tu as raison, je vais te le dire. Mais avant, embrasse moi. ». A son regard, j'explosai de rire, la poussant gentiment sur le côté. « Ben quoi? Ma femme se fait passer pour morte et reste recluse pour préparer sa montée au trône. J'ai besoin de tendresse moi! Mince alors! ». « Mon épée entre les deux yeux fera-t-elle l'affaire ô mon roi? ». J'arrêtai de marcher. « Non mais t'as vraiment des soucis de définition. Je vais t'acheter un dictionnaire pour ton anniversaire si tu continues. » « Et moi le guide du parfait séducteur. ». Elle rit, me poussant légèrement à son tour. Quelle vipère. « Bon bon, d'accord, je capitule, je vais t'exposer mon idée. ». « Bien. » « Bien! ». Elle me pinça alors la taille, geste savant qui me fit rire. J'étais malheureusement chatouilleux et elle le savait parfaitement. Oh peu de gens étaient au courant et le premier qui se serait amusé à cela hormis elle serait mort sur le coup sans aucun doute, mais je lui passais tout. « Je suis trop laxiste avec toi. ». « C'est parce que tu es secrètement amoureux de moi. ». « Ou simplement que j'ai envi de te mettre dans mon lit pour lâchement t'abandonner ensuite... ». « Je préfère ma version quand même. ». « Comme toutes les femmes je pense, sauf les folles comme Aria qui ont tendance à voir les hommes comme des objets... ». « Oh mais moi-aussi je vois les hommes comme des objets. ». « Mince... elle t'a converti! ». « Ce que tu peux être bête quand même Junounet chéri! ». Je la poussai plus fort. « Oh! ». « Pardon, majesté vénéré! ». Je lui souris, finissant par reprendre mon sérieux en soupirant. « C'est justement de cela que je veux te parler. Du trône. ».

Elle me regarda un instant, me montrant l'énorme porte de l'enfer. Nous étions arrivés mais nous resterions sur notre position un moment, le temps que je lui dise. « Tu es la seule à qui je ne cache rien, avec ma femme vu que nos esprits sont liés. Néanmoins, hormis cette dernière, tu es la seule en qui j'ai pleinement confiance et c'est pour cette raison que je vais t'en parler, aussi parce que cela te concerne. ». Je réfléchis un instant, finissant par reprendre. « Comme tu le sais, ce que je souhaite réellement c'est le cristal maître. Cependant, pour éviter que des gens ne se rendent compte de ce que je cherche, j'ai décidé de répandre le chaos officieusement, restant blanc officiellement. Néanmoins, mon but n'est pas que personne ne le sache et justement, je veux que les curieux le sachent. Ils sont tellement idiots qu'ils penseront avoir trouvé le pourquoi de mon comportement lisse en surface et ils ne chercheront pas plus loin. Je le vois bien, je sais que je me fais suivre, je sais que l'on m'observe et c'est pour cette raison que j'ai pris soin de pousser les individus à la guerre, que j'ai essayé de me servir des tensions, pour que les espions croient que mon but est la guerre mondiale. ». « Ce qu'ils pensent. ». Je n'avais pas peur de lui en parler ici car je savais que personne ne nous avait suivi, j'en étais sûr à cent pour cent, ayant fait des vérifications en mettant l'un de mes propres espions sur nos traces. Il était seul, nous étions seuls. « Oui, exactement. Certains commencent à bouger, à se rendre compte que je suis à l'origine de certaines choses et c'est précisément ce que je veux. Les tensions entre les anges et les déchus sont toujours au même point et je ne serai pas étonné qu'une guerre éclate entre les humains et les vampires. Il y a bien trop de sujets conflictuels pour que cela reste ainsi. Néanmoins, il faut quelque chose de plus grand, quelque chose qui créerait une guerre immense, et je ne vois qu'une solution : provoquer Zéleph. ». « Tu n'y penses pas! Il va t'écraser! ». « Justement, il me rendrait service... Annabelle, réfléchis! Si je suis bien portant, je ne pourrai jamais excuser mon absence et mon clone ne peut pas régner à ma place. Si jamais je combats le roi des réprouvés, j'en ressortirai mal en point... faut juste que je trouve le moyen de ne pas mourir, c'est tout, et mon clone pourra rester aliter pendant que toi, toi, Annabelle, tu gouverneras à ma place. ». « Jun... ». Je réfléchissais à un plan, quelque chose qui pourrait faire que je ne meurs pas. Je ne pouvais pas le défier directement bien sûr... il fallait quelque chose, mais quoi... « Je n'ai pas encore trouver la solution mais cet homme m'horripile, j'ai une envie de le tuer qui dépasse ma raison et ma volonté de rester raisonnable est bien basse justement. Je ne sais rien de lui, juste des racontars et j'aimerai l'observer de plus près, voir si je peux le tuer même. Je sais qu'à l'heure actuelle, c'est presque impossible d'arriver à un tel résultat, je sais que si je le combats, il sera plus fort que moi. Mais si je ne me mesure jamais à lui, je ne pourrai savoir quelle puissance je dois atteindre pour avoir une chance de l'éliminer définitivement. Je ne prendrais pas de risques trop grands, je n'ai pas l'intention de mourir. Cependant, faute de pouvoir le tuer, il peut me rendre le service de m'affaiblir. On dit qu'il n'attaque que physiquement et les coups et blessures de la sorte sont bien plus faciles à guérir que la magie. Je serai de nouveau sur pieds trois jours après et je pourrai m'éclipser. ». « Je ne suis pas sûre de pouvoir gérer une race, surtout en période de guerre. ». « Je suis sûr, au contraire, que tu seras parfaite dans ce rôle. Tu es la meilleure guerrière et la meilleure stratège que je connaisse, tu es intelligence et magnifique. Ne doute jamais de tes compétences. ». « Essayes-tu encore de me mettre dans ton lit? ». Je lui souris. « Je n'ai jamais nié. ». Elle me caressa la joue, doucement, plantant son regard dans le mien. « Très bien, je gouvernerai notre race le temps que tu te sortes de ton... hum... nous dirons que tu es dans le coma. Zéleph sera fier de lui si tu choisis de lui laisser l'officialité de tes blessures. ». « Mitsuko ne le supportera pas par contre. ». « Pourquoi cela? ». « Oh j'ai longuement réfléchis à ce sujet et j'en suis arrivé à la conclusion qu'elle m'aimait bien. ». « Arrête de te bercer dans tes illusions. ». Elle rit, souriant à mon tour. Elle ne pouvait pas comprendre ce qu'il y avait entre elle et moi. « Tu verras, elle risque de le lui reprocher. ». « En tout cas, c'est moi qui te reprocherai de m'avoir laissé comme une courge si tu ne reviens pas avec tous les cristaux! ». « Je ne vais pas pouvoir tous les avoir en une si courte durée... mais j'en aurai déjà récolté pas mal. Naram en possède un, je le sais et il faudra que je le lui prenne si je veux la totalité des fragments. Cependant, une fois que j'en aurai vingt, ma puissance sera déjà beaucoup plus importante et ce sera beaucoup plus facile de réunir les autres. ». Je la regardais, dans les yeux puis je finis par lui souffler : « Enfin, de toute manière, on en n'est pas encore là. Je dois convaincre les démons de se comporter véritablement comme tels. ». « Vas-y, montre leur ce qu'est un homme! ». « J'espère qu'ils ne pleureront pas comme des fillettes... ». Je ris. Nous savions tous les deux que les habitants de l'enfer étaient franchement plus gentils qu'autre chose en ce moment, de vrais anges en somme. Il fallait arranger cela car si, avant, il y avait quelques démons sympathiques, ça devenait la mode. C'était à en vomir.

Déposant un baiser sur la joue d'Annabelle, je m'engouffrai derrière la porte. Le paradis des horreurs hein? De la peur? De la souffrance? Pfff, ça ne m'impressionnait pas, surtout lorsque, comme moi, on maîtrisait justement la peur. Je me téléportai en haut de la tour, celle où vivait normalement le roi et ses conseillers. Foutaises, Blacky avait une charmante villa sur le bord de l'océan. Je ris, amusé, mon rire s'étendant exprès jusqu'à ce que j'attire l'attention de quelques démons, une poignée qui devint vite un groupe puis une centaine. Je les fixai alors, arrêtant de rire comme un dément. « Alors ce que l'on dit à la surface est vrai? Les démons seraient une bande d'animaux bien éduqués qui ne sortiraient jamais de leur enfer chéri? N'avez-vous donc aucune fierté? Le temps vous a-t-il transformé en anges aux ailes noires? ». Des murmures mécontents commençaient à se répandre dans la foule et je lâchai Lux Tenebris pour les calmer, pour leur faire comprendre que je n'étais pas l'une de ses créatures neutres qui jugeait sans jamais prendre possession. Il n'y avait pas pire lâcheté. Les réprouvés par exemple... pauvres choses. Enfin, je mettais Eriol à part bien entendu, étant mon fils. Ils avaient toujours les yeux fixés sur moi. « Vous savez, j'ai toujours cru que les démons n'étaient pas des créatures faites pour avoir un souverain. Allons donc, n'êtes vous pas tous de puissants guerriers? N'êtes vous pas sensés avoir tous soif de pouvoir? Hum... je dois avouer que ça me désole un peu de vous voir tous dans vos petites maisons, profitant d'un doux climat, faire votre petite vie, monotone. Ainsi donc je pense m'être trompé. Je pensais que vous vouliez conquérir le monde, montrer votre supériorité aux autres races. Mais non, vous vous contentez presque d'arroser vos fleurs, de prendre une tisane et d'aller dormir bien sagement dans vos petits lits. De vraies fées. ». « Hé toi! Viens te battre si t'es un homme!! ». Je ris. « Non mais vous vous entendez? Bientôt vous allez me dire que je suis un méchant vilain pas beau à me moquer de vous. Bande de couilles molles, je suis même sûr que vous n'êtes même plus capables de baiser une femme lorsqu'elle vous dit non. ». Concrètement, oui, c'était du viol, mais était-ce des démons ou des gentlemans? Fallait savoir à la fin. « Vous avez perdu votre façon d'être en vous laissant asservir par les rois qui se sont succédés et à présent que le monarque démoniaque a disparu, vous restez là, bien sagement, à attendre qu'un autre ne le fasse encore une fois. Plus personne ne vous craint, nulle part. Je pensais que les démons voulaient tous régner sur le monde et de ce que je vois ici, vous voulez simplement vivre votre petite vie dans votre petit espace. C'est pitoyable. Enfin, peu m'importe, si vous avez envi de continuer ainsi, libre à vous, mais je serai à votre place, je profiterai du fait que personne ne me dise ce que je dois faire pour faire ce que j'ai réellement envi : envahir le monde. ». J'avais usé d'hypnose depuis le début de mon discours. Bien entendu, je ne pouvais pas l'exercer sur tous les démons mais il suffirait que certains entraînent les autres pour que le résultat escompté soit là. Je finis par lâcher : « Enfin, comme vous voulez, moi je m'en fiche, je gouvernerai le monde sans vous... Salut! ». Je disparus, allant chercher Annabelle avant de nous ramener à la prison.

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