Les Chaînes du Temps

- Excusez moi … J'espère que je ne vous dérange pas trop mais … Vous savez comment on sort de ce marais ??? Et euh … Ah oui ! Pourquoi vous parlez toute seule ? Je sursautais , faisant soudainement volte-face . Mais j'avais deviné à l'intonation et au ton utilisé qu'il ne s'agissait point là de Sébastian . C'était plus ... enfantin comme voix . Et je vous jure que j'ai failli déblatérer un truc du genre "Mini Narcisse" quand j'eus croisé les yeux de mon nouvel interlocuteur . À croire que ce génie n'était toujours pas sorti de ma tête mais je vais pas dire que c'était pour me déplaire . Mon regard se posa sur ce jeune blondinet qui me toisait comme si j'étais une ... une ... tarée . Une folle , une déglinguée . Pour une fois que quelqu'un me regardait comme j'étais ! ... Enfin non , pas tant que ça . Juste un peu sadique sur les bords , un tout petit peu ... beaucoup . Un petit peu beaucoup voilà . Mais c'était à cause de la disparition de ce Sébastian si soudaine- si il avait fui comme un lâche et que je le recroisais , ça allait être sa fête , croyez moi sur paroles-, que je passais pour une dingue . Je daignais tout de même répondre avec un grand sourire malsain , bien que le ton qu'il avait employé n'était pas tant plein de reproches que ça . - La sortie ? Tu la trouveras quand tes chaussures ne feront plus "Plotch plotch" dans cette horrible mixture verte mon p'tit gars mais tu n'es pas prêt de revoir la couleur de tes pompes , c'est moi qui te le dis ! Puis , je ne parle pas toute seule , puisque tu es là maintenant . Mais j'avais un coéquipier qui s'est apparemment ... fait la malle , je pense . Je crois ... que ce ton arrogant me venait directement , puisque sa tête me rappelait une autre personne avec qui j'étais amoureusement désagréable et arrogante -que ces adverbes et adjectifs vont bien ensemble dites- . Je lui tournai un instant le dos , les mains jointes derrière , regardant et détaillant avec grand intérêt l'arbre dans lequel était caché l'atelier de forgeron . Il fallait que j'escalade ce truc pour y entrer , quitte à défoncer le plafond , je ne voyais pas autrement . Je tournais le regard vers ce jeune homme , lançant avec un grain de politesse : - Mon nom est Sora au fait . Excuse moi de m'être montrée un peu rude mais ta tête ma rappelle quelqu'un ... Et toi , tu dois bien avoir un petit nom , n'est ce pas ? J'avais dit cela dans un clin d'oeil , souriant maigrement parce que ma tête réfléchissait à bien d'autres choses . Mais mes pensées se bloquaient . Parce que maintenant , je devrais oeuvrer seule pour entrer là-dedans , et ça n'allait pas être chose facile ... Encore que . - Dis , ça te dirait d'explorer un atelier un peu spécial avec moi ? J'ai pas franchement envie d'y aller toute seule ... Mais après avoir défoncer tous les pièges qui le protège , il y a de merveilles choses magiques à l'intérieur . Ça te dirait ... qu'on fasse ... équipe , ... hm ? Je grimpais d'un bond sur l'écorce de l'arbre , posant mon pied sur une branche semblant plutôt solide , m'aidant de mes mains accrochées alors à une autre branche un peu plus haute . Rapidement et d'un autre saut sans élan pourtant , j'atterris sans mal sur un morceau de souche sur l'arbre-même , une grosse branche qui semblait avoir été coupé . Mais c'était très propre et donc certainement pas naturel . Je m'attendais presque à tomber dans une trappe ou qu'un branche m'aggrippe ... - Il suffit de monter dessus , car les murs semblent être fait d'un bois magique plutôt solide qui ne semble pas être dégommable . Mais je pense qu'en défonçant un bon coup le plafond , formant un trou de notre largeur pour qu'on y passe , ça doit être faisable ...

*Foutu marais!* pestais-je malgré moi.

Un sourire étira les lèvres de Kolio et il ouvrit la bouche pour dire quelque chose. Je l'arrêtais d'un seul geste en marchant dans les plantes visqueuses:

*Ne dis pas un seul mot! Tu ne voulais pas venir, et on s'est perdu, et c'est tant pis pour moi, et ça fait deux jours qu'on tourne ici et patati et patata! Je sais c'est bon!*

Je me tournais rageusement pour continuer la difficile ascension dans cette odeur putride. Je ne supportais pas les marais, la seule chose qui m'importait ici c'était les plantes qui étaient rares et faisaient de parfais poison, c'était tout! Rien de plus rien de moins! Nous continuâmes donc notre marche en silence. Enfin, Kolio en silence et moi en balançant des chapelets de jurons rageurs. Cela faisait plus de deux jours que nous étions perdus dans les marais, et bien sûr, Kolio avait été réticent à venir j'avais insisté et on en était là, donc c'était de ma faute. Mais il fallait me comprendre, les ingrédients pour poisons devenaient en ville beaucoup trop chers, soit disant de plus en plus rares. J'avais donc décidé d'aller chercher mes ingrédients toute seule, sans l'aide de commerçant et donc gratuitement. Seulement cela n'avait pas été aussi facile que ça. D'une part j'étais censée être revenue au château de l'Antre de Vulcain ce soir, pour présider un Conseil suite aux aménagements d'Aeden et de nouvelles réformes. Prétendante au trône des Elémentals, je me devais d'être présente, mais avec ce marais où tout se ressemblait et mon sens de l'orientation bien médiocre, on était pas prêt d'y être! Et le pire, c'était que je n'avais même pas trouvé un seul ingrédient rare!!! Seulement des petites fleurs mortelles que je trouve au parc en ville!

"Non mais vraiment j'enrage! Kolio fais moi penser à m'occuper de l'idiot qui m'a indiqué où trouver des fleurs pour poison s'il te plaît."

Le lion rit légèrement avant de rétorquer:

"Avec joie mais à mon avis il doit déjà être barricadé dans le Désert en craignant ta prochaine venue!"

Il rit de nouveau pendant que je balançais mon pied dans une pierre. Pierre qui étonnement ne s'écrasa pas sur l'arbre en face de nous mais traversa un rideau de plantes vertes pour ricocher dans...des escaliers?? Que faisait des escaliers cachés dans un arbre en plein dans un marais? Alors là vraiment, c'était trop fort. Je déposais un pied sur la première marche et...

*Non, c'est trop risqué, je pense que tu nous a embarqué dans un pétrin assez important pour ne pas en rajouter!*

Je me tournais en répondant:

"Ah ça va, hein! Et puis de toutes façons, ce sera toujours mieux que de marcher sans but dans de l'eau putride et des algues marrons dégoutantes."

Le lion répondit à son tour en haussant la voix et non plus par pensée, provoquant un rugissement qui fit trembler le tronc creux:

"Je te rappelle que tu dois être présente au Conseil ce soir! Pourquoi ne prends-tu jamais tes devoirs au sérieux! Ce n'est pas comme cela que tu deviendras un bon Seigneur du Tout!"

La critique toucha directement au cœur. Je me tournais en ouvrant de grands yeux. Les oreilles du lion se plaquèrent en arrière et il se reprit:

"Non, Taki ce n'est pas ce que je voulais..."

Trop tard, blessée je dévalais les escaliers sans me retourner. C'était la première fois que le lion me faisait une remarque aussi blessante et outrageuse. Une larme coula doucement sur ma peau d'une blancheur cadavérique, larme que j'essuyais d'un revers de main rageur. J'étais donc arrivée en bas des escaliers et instinctivement demandais, sans même me soucier de voir si Kolio m'avait ou non suivi:

"Il y a quelqu'un?"

La solitude ... Elle pouvait me ronger , me dévorer , je m'en foutais pas mal ... Ce marais pourri jusqu'à la moêlle était sûrement maudit et m'avait sûrement déjà infesté pour que je perde la boule . Et j'étais la reine en cette matière là croyez moi . Sombrez dans une démence totale jusqu'à ne plus rien contrôler chez soi , ni ses gestes , ni ses actes , j'en étais totalement capable ! Et je l'avais déjà fait plus d'une fois !

Mais recommencez n'était pas une bonne idée ... Car même si ce lieu était ou plutôt SEMBLAIT désert , j'y avais déjà rencontré deux personnes totalement différentes du genre de l'endroit alors pourquoi pas une troisième ? De toute façon , cet état totalement fou que je pouvais arborer n'était pas ce qu'il y a de plus sain pour ma petite tête , j'évitais donc ... Mais j'avoue que là , j'en avais vraiment marre de chez marre ... Tiens donc , en voilà une coïncidence !

- Il y a quelqu'un?

Une voix féminine et semblant néanmoins tremblante ... Qui m'était également familière bien que je ne saurais pas remettre un nom dessus de suite . On entendait des pas sur le bois pourri , puis des "FLOC FLOC" dans la boue s'alternant l'un l'autre à une cadence régulière . Je soupirais , imaginant ce qui allait bien pouvoir me tomber dessus après un jeune homme brun aux yeux de sang , puis un blondinet … Je répondais tout de même à sa question lancée à qui pourrait l'entendre et je pense sérieusement qu'il n'y avait ici que moi pour y répondre …

- Oui , le grand méchant loup en personne ! Fuis tant que je ne t'ai pas encore dévorée fillette !

"Et moi , je suis la mère-grand , tu sais ... Pfff ."

La petite voix qui hantait mon esprit se mit à rire ouvertement , me donnant presque la migraine . Oui bon , je m'ennuyais alors quitte à dire des conneries pour amuser la galerie hein … Je continuais sur un ton ironique et moqueur , indiquant à la voix que j'avais entendue tout à l'heure où je me trouvais , avec mon discours assez … humoristique ...

- Ou peut-être le père Noël … Qui sait ? …

"Me voilà destinée au titre de lutin !! Et ben c'est pas la joie ce casting !"

Je m'asseyais en soupirant sur le tronc d'arbre , écoutant encore les pas qui se rapprochaient et décidait d'attendre jusqu'à ce que la personne à qui ils appartenaient apparaisse devant moi . Et lâchais finalement une dernière réplique :

- Qu'as tu mis dans ta lettre jeune fille ? J'ai peut-être ça dans mon laboratoire magique ... ?

Et ma conscience en rajouta une dernière couche , brisant une dernière fois le silence que j'apposais maintenant :

"Ou plus directement , mes deux amis m'ont lâché , veux-tu m'aider à désarçonner les pièges de ce labo afin que j'y obtienne un pouvoir quelconque ?!"

J'avais les bras croisés , assise en tailleur sur la souche dans la forge , regardant la nouvelle venue que je connaissais si bien .

- Il ne me semblait pas avoir marqué "-Ombre ironique et perdue dans un laboratoire en plein milieu des marais" comme cadeau dans ma liste au Père Noël mais après tout comme tu l'as déjà dit...qui sait?

Un gigantesque sourire moqueur mais chaleureux vint à s'étirer sur mon visage . Elle semblait ne pas être trop vexée de l'arrogance dont j'avais fait preuve ; encore heureux . Je pouvais vraiment invivable , exécrable même par moments , vraiment ! Pas jusqu'à ne pas me reconnaître moi-même bien sûr ... Parce que cette part de moi , je la connaissais comme ma poche .

- Ahah , bonjour Takias ! Je suis heureuse de te revoir très chère ! Comment vas-tu ?

Elle semblait attendre quelque chose , regardant derrière elle avant de faire volte-face et de me regarder à nouveau , prête à dialoguer gentiment , posant d'abord la question de base :

- Alors, qu'est ce que tu fais dans ce laboratoire ma foi fort étran...

Elle ne put finir sa phrase , restant bouche bée , comme si elle venait de se prendre un coup fatal d'épée dans le bide ou qu'elle avait vu la photo d'un membre de sa famille disparu ... Un truc du genre quoi ! Mais tout s'expliqua lors de sa prochaine sentence , simple stupéfaction en fait , me rappellant d'ailleurs son rôle important qui était également son métier .

- Mais, c'est une forge!!

- Effectivement belle élémentale de feu ! Mais attention , pas n'importe quelle forge ... Une jolie forge renfermant des secrets magiques surveillés par de jolis pièges .

Dis-je alors que je levais mon bras tenant mon sabre , retenant la lame qui menaçait de me tomber dessus , et me trancher la tête par la même occasion . e me levais et m'écartais de l'arme , la lâchant dès que je n'étais plus dessous , quasiment hors de danger on va dire , dégainant mon autre sabre .

- Je suis ici à la recherche d'un pouvoir magique ... Que je convoite plus que tout . Il pourrait également te plaire ! Mais je me vois mal débusquer tous les pièges toute seule ...

Un bruit métallique se fit entendre à ma gauche , et sans être assez rapide cette fois , une chaîne se mouvant seule vint s'enrouler autour de mon sabre , tirant d'un coup sec et me l'arrachant des mains tel un gros serpent avant de disparaître en reculant vers l'écorce , la chaîne disparaissant totalement alors que la lame heurta le mur et tomba au sol ... A l'autre bout de la pièce !

D'un jeté parfait , je roulais à terre , rampant presque , évitant la hache qui dansait telle une balançoire avec un enfant dessus au-dessus de moi , endroit où ma tête aurait dût passer si j'avais avancée droite et debout ... Elle s'écrasa juste derrière moi , me faisant tourner la tête pour voir la chaîne s'attaquer à mon cou , me plaquant contre le mur , mes mains empêchant le contact direct avec ma nuque , menaçant de m'étrangler dès que je lâcherais , ne tenant plus .

Exactement comme le serpent qui étranglait sa proie de sa queue ! Bloquée contre le mur , la chaîne tentant de se serrer contre mon cou , mes mains la retenant du mieux qu'elle pouvait . Je souriais pourtant à Takias répondant en tenant encore fermement .

- Tu as beau être forgeronne ma chère amie , je ne pense pas que ça te fera des faveurs ici ! Fais attention à toi , je me débrouille ...

Je ne me débattais pas trop pour l'instant , pas encore fatiguée ! Mais j'écarquillais les yeux en voyant autre chose , lançant alors vivement à Takias :

- Derrière toi !

J'étais ébahie, tout devenait clair et l'endroit que je venais de trouver m'intéressait bien plus que ce que l'on ne pouvait croire. Moi qui m'étais perdue en plein marais et était persuadé de ne plus retrouver mon chemin. Finalement je n'étais pas si mal tomber, et en plus de tomber sur une forge, je retrouvais une vieille connaissance! Un sourire étira mes lèvres pulpeuses, et j'écoutais avec attention Sora poursuivre:

- Effectivement belle élémentale de feu ! Mais attention , pas n'importe quelle forge ... Une jolie forge renfermant des secrets magiques surveillés par de jolis pièges .

La jeune Ombre eut juste le temps de dégainer son arme afin de bloquer la lame qui aurait fait rouler sa tête sur le sol à quelques secondes d'écart. De rapides coup d'oeil et une analyse habituelle de la situation me permit de voir un peu plus en détail certains pièges et armes entreposées dans la forge maudite. Je n'avais peut-être pas autant de chance que ça tout bien réfléchi...La voix de Sora intervint de nouveau au beau milieu des cliquetis métalliques des pièges qui se mouvaient dans l'obscurité des recoins de la forge souterraine.


- Je suis ici à la recherche d'un pouvoir magique ... Que je convoite plus que tout . Il pourrait également te plaire ! Mais je me vois mal débusquer tous les pièges toute seule ...

Un pouvoir? Une fois de plus, ma curiosité fut piquée à vif surtout que Sora avait -volontairement ou non?- tu plus de détail quant à ce fameux pouvoir, sans m'en dire plus. Un sourire se dessina de nouveau sur mes lèvres et je regardais Sora se faire arracher son sabre par une chaîne de métal, juste avant de voir une sorte de gros boulet attaché au plafond par une chaîne de métal rouillée se ruer vers moi. Je n'eus que le choix de me plaquer au sol à plat ventre en sentant le boulet de plusieurs tonnes frôler mes longs cheveux rouges et noirs. Le courant d'air qui entra me fit savoir que le fameux boulet, allait bientôt entamer son demi tour pour revenir et que j'avais tout intérêt à me relever sous peine d'être obligée de rester dans cette fâcheuse position pendant encore quelques temps, cible parfaite à d'autres pièges dans ce style. Roulant sur le côté je me relevais non sans quelques difficultés: l'agilité n'était décidément pas mon fort et je me plaisais plus dans la force brute ou magique qu'autre chose. Une fois debout, je pu voir Sora bloquée, par quelques chaînes contre un mur, elle me sourit cependant en m'assurant:

- Tu as beau être forgeronne ma chère amie , je ne pense pas que ça te fera des faveurs ici ! Fais attention à toi , je me débrouille ...

Je lui souris à mon tour en ouvrant la bouche pour répondre...entreprise vaine puisque coupée par la voix de Sora, visiblement préventive:

- Derrière toi !

Le seul réflexe que j'eus fut de m'enflammer dans ma totalité pour me tourner, tout feu tout flamme vers le danger auquel j'étais confronté de dos. Une armure??? Oui, c'était bien une armure mobile qui levait sur moi une épée à deux mains forgée grossièrement. Je dégainais ma rapière avec expertise bloquant d'une magnifique parade de prime, sa fente latérale et lente. Les deux lames s'entrechoquèrent et pour quelqu'un qui ne s'y connaissait pas, il devait me croire perdue. En effet, on aurait pu croire que ma fine et longue lame de rapière ne tiendrait jamais face à l'espèce d'énorme massue tranchante de l'armure ensorcelé, on aurait presque dit une aiguille face à un couteau. Mais le métal de ma rapière était l'un des plus résistant au monde et sa forme faisait d'elle une arme plus que redoutable qu'il ne valait mieux pas prendre à la légère. Enflammée, elle n'en était que plus dangereuse et chaque coup que je donnais en direction de l'armure perçait cette dernière, faisant fondre un peu plus à chaque fois le point visé, jusqu'à le traverser complètement. Mais ce n'était pas aussi simple que cela pouvait paraître et plus d'une fois, je sentis la lame hachée de son épée chatouiller ma peau ouvrant une éraflure qui me semblait plus grande à chaque coup encaissée.

Cela ne pouvait plus continuer, contrairement à l'armure magique j'étais moi, bel et bien vivante et la fatigue commençait à se faire sentir. Cela faisait plus de dix minutes que je ferraillais dans l'espoir de mettre hors d'état de nuire l'armure ensorcelée. Un coup un peu plus poussée de cette dernière et une geste mal placé de ma part m'offrit une blessure plus que considérable à l'épaule gauche, ajoutant une marque par dessus une vieille cicatrice de la guerre contre les zombis. Un gémissement sourd s'échappa de mes lèvres et la douleur ne fit que renforcer ma colère: je bloquais la lame de mon adversaire avec mon fleuret et d'un puissant coup de poignet la retournait vers le sol avant d'appuyer ma botte dessus, de toutes mes forces. L'arme tomba des mains de l'armure désarmée en un bruit sourd de ferraille rouillée. L'occasion rêvée: Je repoussais de toute ma stature le géant de fer et laissait tomber ma rapière pour attraper avec célérité mon arc et encocher trois flèches qui eurent tôt fait de se planter entre les plaques noires de l'armure, bloquant celle ci au mur de la vieille forge. Je lâchais encore une fois mon arme qui rejoignit sa compagne sur le sol. Étendant mes mains paumes ouvertes devant moi, je me concentrais de toutes mes forces sur le buste de l'armure qui se débattait. Une boule de feu se forma rapidement au creux de mes mains grossissant au fur et à mesure que de grosses gouttes de sueur coulait de mon front. Lorsque la sphère brûlante eut atteint la taille d'une grosse pastèque, mes doigts se fermèrent non sans quelques difficultés et la boule fut propulsée sur le torse de l'armure qui venait d'arracher la dernière flèche qui la maintenant dangereusement clouée au mur vieilli.

"Trop tard...!" murmurais-je dans un souffle.

Lorsque l'explosion de feu disparut, l'armure tomba à genou, trouée en son cœur avant de s'écraser sur le sol dans un bruit de ferraille. Je me tournais au moment même où six flèches d'acier partaient du mur gauche je pu me baisser pour en éviter les trois plus hautes, une fut calciné par un jet de feu de Kolio, une autre fut détournée par mon contrôle du métal mais je n'eus pas le temps d'éviter la dernière qui était arrivé par un angle mort de ma vue, se fichant douloureusement dans mon mollet.

*Tout va bien?*

C'était la voix télépathique de Kolio qui s'était approché pour renifler mon épaule. Je lui répondis par un grincement de dent en arrachant la flèche de mon mollet. Je sortis rapidement une fiole de ma cape et l'appliquais sur ma blessure avant de me tourner pour tenter de voir où en étais Sora. Décidément, cette escapade dans les marais ne se passait vraiment pas comme je l'avais prévu.

Takias , à mon grand soulagement , ne peina à se faire tout feu tout flamme -le surnom que je lui donnais prenant alors tout son sens- poru se retourner et parer sans problèmes les tentatives d'attaques de la coquille de métal vide , en vain bien sûr , l'élémentale était très expérimenté et ça se voyait , ses armes n'étaient pas non plus communes ; n'était-elle pas forgeronne après tout ? Néanmoins , d'un coup plus dur que les autres , le soldat de fer lui entailla l'épaule . Mais elle réagit vite , faite de réflexes aussi brûlants que son élément , une boule de feu dirigé vers le buste de son adversaire qu'elle avait soigneusement cloué au mur avec quelques flèches , elle s'écroula bruyamment , bel et bien neutralisée pour de bon .

Nous aurions la paix ... De ce côté-là uniquement , malheureusement . Le mur s'y mit et seule une des 6 flèches lancées par ce dernier percuta Takias en pleine jambe . Je grognais , me débattant . Elle retira vite la pointe , appliquant une mixture sur la blessure , pendant que je réussissais enfin à briser la chaîne avec ma super force . Je n'allais certainement pas la rejoindre , enfin pas trop prêt du moins , car une cible groupée n'était que ce qu'attendait cet endroit magique agissant de lui-même . Mais même si j'en avais fait ainsi ...

Plusieurs dizaines de chaînes sortirent des murs opposés , et chacune trouva sa place autour de notre anatomie , à ma compagne et moi . Et d'un coup sec , un fois qu'elles eurent réussi à nous saucissonner convenablement toutes deux , un coup violent synchronisé des chaînes agissant à la manière de centaines de serpents nous ramena violemment dos à dos . Coincées toutes deux enroulées dans des chaînes de métal qui semblaient bel et bien magique vu comment elles se dressaient et nous sifflaient au nez ... Je sentais mon énergie partir ... Chouette , ça capte l'énergie en plus !! Youpi je dis !

- Il faut s'en débarrasser au plus vite Takias si on ne veut pas finir vidée de toute énergie ici ...

Je fronçais les sourcils , réfléchissant ... Notre énergie se consommait heureusement à petit feu , et je remarquais que se débattre augmentait la cadence . Je restais immobile , mon dos collé à celui de Takias , avec cette sale impression d'être un morceau de viande en filets . Super ... C'est alors que la lumière se fait dans ma tête . Je bouge mes mains du mieux que je peux , jusqu'à pouvoir saisir au moins une chaîne pour chacune et lance à Takias :

- Attrape au moins une chaîne dans chaque main et diffuse-y toute ta magie des flammes ! Cette chaîne magique aspire l'énergie ... Si on lui donne de trop et de l'opposé de plus , le feu avec l'ombre donc , je pense qu'elle nous relâchera sans mal et peut-être même ... Nous délivrer le pouvoir de cet endroit ...

Je serre mes poings sur les morceaux de métal , fermant les yeux , concentrant le plus de ténèbres qui règnent en ce lieu , concentrées en moi , elles attendent patiemment que je les relâche ... Il faut être plus synchronisée que jamais car si nous lâchons cette énergie qui est nôtre en décalé ... Soit le feu dominera et me fera grillade ou mes ombres transformeront Takias en ténèbres pures ... Il faut doser , au juste bon moment ...

- Tu es prête ? Trois ... Deux ... Un ... Maintenant !!

Je donne tout ce que j'ai , sens la magie se diffuser dans les liens de fer . Je n'ose pas rouvrir les yeux pour voir si je suis morte , bien vivante mais sans Takias ou que tout s'est bien déroulée . Une sensation de ... Vide étrange m'emplit . Pas le triste vide sans fond , ni celui qui remplit de joie . Ni agréable ni désagréable ...

Spoiler:

Mon épaule me faisait souffrir et ma jambe m'élançait douloureusement mais au moins l'armure avait été mie hors d'état de nuire et les flèches n'avait pas blessé Sora. La jeune Ombre s'était tout aussi bien débrouillé que moi avec cet étrange laboratoire et il me semblait cependant que le plus difficile restait encore à venir. Comme pour répondre à ses pensées, deux grosses chaînes sortirent d'un mur latérale pour attraper mes pieds et m'immobiliser. J'eus un petit sourire, ce genre d'attaque ne marchait pas avec moi, on me l'avait trop faite pour que je n'y sois ps habitué, je sautais avec agilité et retombais quelques mètres plus loin non sans quelques douleurs lancinantes à la jambe avant de trancher les deux chaines d'un coup de hache rapide. Ce qui n'était pas normal c'est que les chaînes continuaient de se dérouler hors du mur et qu'elles n'étaient maintenant plus au nombre de deux mais bel et bien une dizaine, sortant de toutes parts, chaque pierre qui formait le mur semblait cacher à elle seule des centaines de pièges et d'armes de toutes sortes qui n'étaient pas vraiment là pour nous accueillir, ou du moins pas comme on l'attendait, la première chaîne que j'eus évité se recolla dangereusement à moi et m'attacha les mains derrière le dos, les autres ne firent que s'enrouler avec une tactique très particulière qui m'empêchait de bouger jusqu'au plus petit de mes orteils. En plus de cette position très inconfortable, les chaînes nous attirèrent, Sora et moi l'une contre l'autre, dos à dos. Mon épaule me faisait toujours aussi mal mais je me souciais plus du sort qui nous attendait que de la blessure. Je ne mis d'ailleurs que peu de temps à comprendre ce qui nous arrivait, les chaînes drainaient notre énergie magique et vitale telles des sangsues avides de sang. Des gouttes de sueur perlèrent à mon front et je sentais le souffle de Sora derrière moi. Sa voix me parvint aussi de façon claire.

"Il faut s'en débarrasser au plus vite Takias si on ne veut pas finir vidée de toute énergie ici ...- Attrape au moins une chaîne dans chaque main et diffuse-y toute ta magie des flammes ! Cette chaîne magique aspire l'énergie ... Si on lui donne de trop et de l'opposé de plus , le feu avec l'ombre donc , je pense qu'elle nous relâchera sans mal et peut-être même ... Nous délivrer le pouvoir de cet endroit ..."

Je tentais de tourner la tête pour apercevoir le visage de ma compagne mais c'était peine perdue. Je fis donc comme elle l'avait conseiller et après m'être tortillé comme un vers je finis par avoir une chaîne dans chaque main. Je fermais les yeux et commençais à concentrer toute mon énergie dans mes deux paumes. Je n'avais pas besoin de penser au feu, il sortirait tout simplement, c'était le feu qui faisait battre mon coeur et me gardait en vie, c'était l'énergie vitale qui coulait dans mes veines et qui sortait donc de façon naturelle de tous les pores de ma peau. Je pris une inspiration, gardant, les yeux fermés en entendant de loin la voix de Sora:

- Tu es prête ? Trois ... Deux ... Un ... Maintenant !!!

Je retenais mon souffle et une fois le décompte achevé, déversais toute mon énergie dans les chaînes. Mes paumes rouges et enflammées envoyaient toute mon énergie dans le métal étrange. J'espérais de tout mon coeur que Sora avait eu raison, sinon, la perte d'autant d'énergie d'un coup nous achèverais sûrement. Je me sentais sombre, je sentais ma carcasse se vider petit à petit de toute énergie, je voyais comme un feu qui perdait doucement de sa vigueur, de sa chaleur, il rapetissait jusqu'à .... s'étaindre complètement. Je sombrais dans une demi conscience, épuisé, vidée de toute énergie magique, voire vitale, je sombrais, simplement. Etais-je vivante? Etais-je morte? Allais-je rejoindre Sora au paradis ou en enfer? Qu'était-il advenu de Sora, était-elle comme moi dans cet étrange état d'apothéose?

Je fus réveillée par des coups de langue sur ma joue. J'entrouvris les yeux pour apercevoir Kolio, visiblement inquiet, au dessus de moi. Ou étais-je déjà? Ah, oui dans la forge bizarre...Mon esprit mit un certain temps à se remémorer ce qu'il s'était passé avant de que me redresse brusquement pour voir Sora à côté de moi.

"On a... on a réussi?" demandais-je, troublée. Autour de nous, la forge s'était littéralement transformée. Plus aucun objet ne traînait par terre, le soufflet était soigneusement accroché au dessus d'une cheminée dans laquelle brûlait un feu doux et chaud. L'enclume avait, semblait-il été derouillée et replacé sur la table, une chaîne était posée dessus et un homme à la barbe broussailleuse tapait dessus avec force et vigueur. Il n'y avait plus une trace de combat, plus de flèches sur le sol, les pierres semblaient avoir été repeinte et l'homme ne quittait pas son travail des yeux. Interloquée et me demandant si j'étais en train de rêver ou si je devenais folle, je me tournais vers Sora avec un regard interrogateur. Etais-je la seule à voir ce changement?

Je n'avais rien vu passé . Juste ... Un grand vide . Tout s'était fat si vite . Seule ... Puis ce Sébastian qui m'avait lâché en pleine course ... Et ce petit blondinet , Ed là qui ... Ben m'avait largué tout aussi vite en fait . Et Takias maintenant . Mais ... Où était-elle d'ailleurs ? Mes yeux papillonnaient tandis que je découvrais des chaînes tombant sur mes genoux et mes avants bras , lasses , comme si elles avaient précédemment servies à me maintenir attachée ... En me rappelant bien ... C'était le cas ! Je fis volte-face , remarquant Kolio qui léchait la joue de sa maîtresse , se réveillant tout juste d'un sursaut en croisant mon regard , aussi paumé sans doute que je l'étais il y a quelques minutes . Je ne pus lâcher une explication qu'elle demanda :

- On a... on a réussi ?

Je me grattais la tête , regardant autour de moi . Ce laboratoire qui semblait si hostile à notre égard et petite visite surprise tout à l'heure semblait désormais tout ce qu'il y a de plus inerte ... Je n'irais pas jusqu'à normal en connaissant les faits que nous venions de vivre .

- Je ... Je crois .

Sans pour autant me relever dans l'immédiat , je cherchais à comprendre . Inspectant une dernière fois le laboratoire étrangement calme , trop au goût de mon système de méfiance auto-défensif . Mais ne m'y fiait plus , me rappelant soudainement le but de ma visite dans le coin , braquant mes yeux bleus sur mes mains . Les tournant , zieutant les paumes et le dos ... Rien ? Je ne ressentais rien de nouveau . On avait ... Échoué ? Enfin on avait sauvé nos vies , ce qui était la moindre des choses sans doute .

- Zut , je ne comprends pas ...

Je soupirais , insatisfaite sans doute de tout ça pour rien , secouant ma robe et ses plis , la repassant au mieux sous mes doigts en dégageant la poussière qui s'y était incrustée en jouant aux ninjas en se roulant par terre dans ce vieil endroit pas terriblement ... Hygiénique pour deux sous . Je vous dis pas la tronche que j'ai fait en donnant un trop grand coup dans ma robe si bien que ma main est partie heurter un marteau sur la table et qui avant même de toucher le sol , fut retenue par deux chaînes sortant du sol comme deux serpents , le retenant en l'air .

Oh non , n'était-ce pas fini ?! Mais je remarquais en relevant ma main ... Que la corde métallique suivait mon mouvement ... Passant certes pour une tarée , j'étendais la chaîne en quelques gestes gracieux , l'enroulant autour de mon bras où elle vin déposer le marteau au bout . Je le remettais à sa place de mon autre main , et en serrant le poing d'un coup sec , vit tous les maillons de la chaîne se briser en des éclats lumineux . Je souriais ravie , envers ma compagne .

- Voilà exactement le type de pouvoir qui déménage que je souhaitais trouver en arpentant ce coin paumé .

HRP:

Je ne comprenais plus rien à ce qui se passait à vrai dire... Allongée sur le sol, j'avais de telles douleurs dans les épaules et le dos que j'osais à peine me relever. Pourtant il le faudrait bien si je voulais observer d'un peu plus prés cette forge qui semblait être redevenue comme avant comme par enchantement. Je me redressais en position assise et farfouillait dans ma cape sans grande conviction avant de trouver une fiole orange que je débouchais avec la bouche avant de m'en vider le contenu dans la gorge. Après quelques instants de pure immobilité je pu me relever sans craindre de retomber sur le sol sous la douleur des crampes, normales après un tel combat. Sûr, cette journée avait été chargée en émotion! Et dire qu'à l'heure qu'il était le Conseil devait attendre l'arrivée de l'Impératrice du Tout en râlant encore de ses retards qui n'avaient rien d'extraordinaires! Je souris à cette image et profitai de ces instants de répit sans paperasse à signer pour me remémorer un peu les derniers évènements... Ah oui, le laboratoire, les pièges, les chaînes qui avaient faillis nous étrangler avec Sora... Tiens, d'ailleurs où était-elle? Je relevais vivement la tête et aperçus le regard aussi interrogateur et perdu que le mien:

- Zut , je ne comprends pas ...

Cependant, Sora ne semblait pas être satisfaite, je ne comprenais pas pourquoi. Nous étions sortie vivante de ce trou qu'attendait-elle de plus, que le ciel nous tombe sur la tête? Je dépoussiérais ma cape et époussetais rapidement ma chemise et mes bas de soie tout en resserrant les lanières de mes bottes. Une fois que je fus sûre que mon apparence ne pouvant être éclatante était au moins convenable, je le relevais complètement me tournais vers Sora au moment où celle ci faisait tomber un marteau d'une enclume polie derrière elle. Je fis un bond en arrière et dégainais aussitôt ma rapière qui s'enflamma, prête à parer encore aux nombreux pièges qui nous avais été tendus quelques instants auparavant. Comme je m'y attendais des chaînes sortirent de terre, je me reculais encore, fin prête à ne pas me laisser attraper lorsque je vis que Sora ne bougeait pas... pire que ça elle semblait exécuter d'étranges mouvements avec son bras. Mais qu'est-ce qu'elle faisait?!? Elle dansait ou quoi? Croyait-elle vraiment que c'était le lieu et l'endroit? Je m'approchais d'elle avec méfiance, m'apprêtant à lui dire d'arrêter ses singeries lorsque je me rendis compte que les chaînes suivaient les mouvements qu'elle faisait, j'en restais bouche bée. Et lorsque, avançant la pointe de mon épée pour toucher les chaînes, je m'avançais moi aussi, une chaîne sortit de terre pour se joindre aux autres, chaîne que je pouvais contrôler apparemment. J'entendis la voix de Sora:


- Voilà exactement le type de pouvoir qui déménage que je souhaitais trouver en arpentant ce coin paumé .

Je restais quelques instants stupides et voyant que Sora avait serré le poing pour que la chaîne explose, je refis le même geste pour faire disparaître la mienne, puis, le tournant ers elle, je dis incrédule:

"Je me demandais dans quel coup fourré tu avais bien pu te mettre encore, mais pour une fois je dois avouer que ce n'était pas si bête de venir ici!"

Je lui souris et nous sortîmes de cet endroit de folie.