Un dernier thé pour la route
Fireflies - Owl City (Cover by Sungha Jung)

Le rythme de nos pas ralentit jusqu’à se suspendre complètement. Devant nous, un domestique s’était avancé afin de nous rencontrer et de voir notre invitation. En silence, je m'ocupais de la tâche, cherchant dans la poche intérieure de ma veste la fameuse carte qui nous avait été livrée. À mes côtés, Muramasa et Dame Sunano trépignaient discrètement sur place, leurs prunelles contemplant avec une sincère admiration la diversité des décorations qui embellissaient la résidence et ses terrains. Les ornements, qui se suspendaient aux arbres environnants, s’harmonisaient gracieusement aux centaines d’enjolivures florales qui parsemaient les chemins et les parterres du domaine. Ce qui retenait pourtant le plus leur attention était les nombreux invités qui pouvaient être aperçus tout autour de la résidence. Parés de bijoux et magnifiés sous la poudre de leur maquillage, les hommes étaient élégants, semblaient courtois, tandis que les femmes resplendissaient sous une auréole charmante de beauté. À ce constat, Muramasa détourna brièvement les yeux, les laissant courrir à la surface du sol. Une boule venait de grossir au fond de sa poitrine et si elle cherchât à l’oublier, à l’effacer de son esprit, l’opale de ses iris finit par tomber sur le visage de sa compagne. En voyant l’expression de Wakiya, la rousse posa une main à son épaule, attirant son attention.

« Tu es absolument magnifique, Waki », murmura-t-elle à sa cadette en la gratifiant d’un large sourire, replaçant tranquillement une mèche qui s’était libérée de la coiffure de la brunette.

Puis, elle lui tapota gentiment la tête. Wakiya n’avait pas à s’en faire. Malheureusement, parce qu’elle baissait trop souvent les yeux, plusieurs personnes ne pouvaient admirer le charme de ses traits. C’était une véritable tragédie, Ren glissant son doigt jusqu’à son menton pour l’inciter à lever la tête, à ne pas cacher ainsi son visage.

« Et plus encore maintenant. »

Pourtant, le regard de la Liée dévia sur ses propres vêtements, qu’elle jugea silencieusement, un maigre sourire flottant à la commissure de ses lèvres. Jamais, auparavant, son physique et la manière de se vêtir ne l'avaient dérangé, peut-être parce qu’elle n’avait pas été confrontée à pareille situation par le passé, ayant, depuis des années évoluée dans une réalité où ce genre de tracas ne lui était pas coutumier. Même s’il ne s’agissait que d’une séance de thé, à ses yeux, il lui semblait que les gens s’étaient vêtus comme s’ils s'étaient présentés à un bal. Légèrement agitée, elle reporta son intérêt sur son costume, un kimono aux couleurs chaudes, qui s’accordaient à la flamboyance et à la vivacité de sa chevelure incandescente. À sa ceinture, elle avait également suspendu ses armes, imitant quelque peu ma manière de faire, avec le fourreau de mes épées accrochées à mes flancs. Elle soupira. Malgré la confiance dont elle voulait se parer et l’audace qu’elle avait démontré en choisissant de me suivre jusqu’en Caelum, maintenant, elle n'était plus aussi assurée, laissant ses craintes laver le bon et la détermination en elle.

Me tournant dans leur direction, je tentais de capturer leur attention.

« Le thé se déroule dans le jardin. Ce domestique va nous y amener. Je scrutais les deux jeunes femmes un instant, percevant, pour chacune, le brin d’angoisse qui semblait les étreindre. Nerveuses? Il semblerait et devant leur air penaud, j’expirais un soupir, me plaçant dans leur dos pour les inciter à avancer derrière notre guide. Ne vous préoccupez pas de réflexions aussi superficielles. Vous n’êtes pas ici pour vous pavaner. Ce n’est pas un concours de beauté. »

Ren me fixa. Était-ce ma manière de leur dire de ne pas s’inquiéter de leur apparence?

« Tu es vraiment maladroit. L’un de mes sourcils se souleva à son commentaire, alors que mes yeux capta, sans mal, le sourire qui joua à la commissure de ses lèvres. Tu ne peux pas simplement nous dire que nous sommes jolies? »

De nouveau, je soupirais, dardant l’océan de mes mires sur leur faciès.

« Soyez vous-mêmes. C’est tout ce que je vous demande. »

Nous arrivâmes enfin devant les hôtes, le domestique nous laissant à leur soin. Une fois à leur hauteur, je leur partageais mes plus sincères sentiments en une légère révérence :

« Kaabo, Fúnmi tara Leenhardt atí Ogbeni banọ Katzuta. (Bonjour, Dame Leenhardt et Sir Katzuta.) C’est un plaisir d’avoir été invités. »

À mes côtés, Ren et Wakiya les saluèrent également selon les convenances pendant que je les introduisais au couple.

« Voici Ren Muramasa et Wakiya Sunano.

- C’est un honneur de vous rencontrer. Je suis Ren Muramasa, l’Orine d’Isley et d’Isiode Yüerell. J’espère que nous aurons l’occasion de discuter au cours de la journée. »

Elle se redressa, offrant un sourire tremblant, inconsistant, à l’Humaine et à son Ange Gardien, avant de rebaisser les yeux. En les observant ainsi, elle trouvait cela difficile à croire qu’ils aient pu blesser Isley. Toutefois, elle ne les connaissait pas et, de fait, ne savait pas ce dont ils étaient capables. À la suite des présentations, nous finîmes par nous éclipser, nous perdant tous les trois au cœur du jardin.

« N’hésitez pas à vous mêler au reste des invités. Si vous avez besoin de moi, je resterais sur ce banc. »

Ça ne me dérangeait pas. J'appréciais la tranquillité. Puis, je n'étais pas venu ici pour profiter de l'Astre-Père et du thé. En me voyant m’éloigner d’elles, Muramasa se tourna vers sa camarade, lui partageant ses réflexions.

« Eh bien… Il sait comment s’esquiver. Ren haussa des épaules, impuissante. Je ne suis pas du tout habituée à ce genre d’événements… Je me sens plus à l’aise au milieu d’un terrain d’entraînement, à faire danser mes lames sur des mannequins. Elle émit un rire léger, zyeutant consciencieusement leurs environs. Est-ce que tu reconnais quelqu’un? J’ai cru voir certains militaires angéliques, là-bas, mais je ne leur ai jamais parlé auparavant… Elle hésita. Devrions-nous nous mêler à eux ou… Oh! L’éclat verdoyant de ses prunelles s’illumina. Regarde, sur la gauche. Il s’agit certainement de la délégation d’Orines. »


◆ 1 004 mots | Post I | Isiode discute avec Ren et Wakiya. Les trois arrivent au domaine en même temps. Ils partent ensuite dans le jardin, où Isiode part s’asseoir sur un banc, seul. Isiode porte un costume comme sur l’avatar de mon post et Ren porte un kimono comme celui-ci. Tous les deux sont armés. Si Isiode attend que Neah termine d’accueillir les invités pour aller lui parler, Ren est libre - et par extension, Wakiya aussi, j'imagine, mais je laisse Léto s’occuper de son sort ♪

Un Dernier Thé pour la Route

☙ Merry go round of life cover by Grissini Project

Nichée au creux d'une végétation abondante, la demeure de Mancinia Leenhardt s'élevait tel un joyaux pâle et majestueux drapé dans les reflets dorés du soleil. Intimidé, je marchais dans l'ombre de la délégation Orine, laquelle se chargeait de montrer nos invitations aux gardes encadrant le portail ceinturant le domaine. L'architecture magicienne était telle que je l'avais étudiée sur les gravures dans la bibliothèque de Maëlith, aussi élégante et lisse que les manières de la noblesse des Mages Blancs. «Ferme la bouche, Haru.» S'amusa Natsumura, bien qu'elle soit elle-même impressionnée par la magnificence des lieux. Une main légèrement posée sur l'un des fourreaux renfermant ses dan geom qui ornaient ses hanches, l'autre s'appuya sur mon épaule. «Elle est réellement exceptionnelle si un tel domaine lui sert de résidence secondaire.» J'acquiesçai en silence. Plus prolixe par écrit, je lui avais déjà conté l'étendue de mon admiration pour Dame Hisaé et la Sertisseuse et lorsque l'invitation à prendre un thé était arrivée, je l'avais priée de me rejoindre. Nüka, qui ne la quittait jamais, avait mangé les friandises magiques qui réduisaient sa taille à celle d'un chiot et il gambadait autour de nos pieds, la langue pendante et les yeux brillant d'excitation face à toutes ces nouvelles odeurs. Moins démonstrative que le chien, Fei préférait rester aux terres d'émeraude lorsque je partais et m'autorisait à lui prodiguer quelques brèves caresses à mon retour, l'équivalent d'effusions de tendresse pour la martre sauvage.
Sensible à l'agencement décoratif du paysage, je promenai un regard attentif sur le vaste jardin et sur les variétés de plantes qui le façonnaient. Bien avant d'apercevoir nos hôtes, je ressentis l'effet du célèbre Ma'Ahid de la Marquise des lieux et je ralentis, pris de vertige. «Ce n'est pas très agréable.» Fit remarquer Natsu d'un ton pincé avant de pousser une exclamation catastrophée en voyant que Nüka avait repris sa taille normale. Joyeusement, le chien aboya avant de lécher la main de sa maîtresse. «Ah, on dirait que rien ne résiste aux Humains.» Constatais-je, amusé. La Magie faisait tellement partie de notre quotidien qu'il était difficile d'anticiper toutes les conséquences que pouvaient avoir la présence des Enfants de Sympa. La danseuse de Geommu fit la moue. «J'espère que personne n'a peur des chiens. Mon Nüky est assez gros mais il se sent encore comme un chiot dans sa tête, j'ai peur qu'il ne saute sur les autres invités pour s'amuser.» Elle s'accroupit pour murmurer dans l'oreille du chien des recommandations sur un ton qu'elle voulait ferme et sévère avant de se redresser lorsque nous arrivâmes devant les Ecuyers de l'Aurore, ses doigts fermement ancrés sur l'échine de l'animal. Dans un bel ensemble, nous reprîmes respectueusement la salutation de la porte-parole de notre délégation. Du coin de l'oeil, je constatais avec amusement que c'était désormais Natsumura qui était bouche bée devant le couple. J'avais déjà eu l'occasion de côtoyer de plus ou moins près l'Humaine mais c'était la première fois que je voyais son compagnon. L'évidente complicité qui les unissait fit naître un sourire tendre sur mes lèvres. Leur renommée de Prophètes d'Ësse'Aellun prenait tout son sens. «Je suis honoré de vous revoir, Marquise Mancinia, et c'est un plaisir tout aussi grand vous rencontrer, Capitaine Katzuta. Je suis Andrea Lim et j'ai eu la chance d'être présent lorsque vous nous avez invités à Utopia par deux fois.» Satisfait d'avoir réussi à me présenter sans bafouiller, je m'autorisai un bref soupir de soulagement et, remarquant le silence à mes côtés, je plantais un doigt dans les côtes de Natsu qui dévisageait le couple avec des yeux écarquillés. Après un sursaut, elle se reprit en rougissant brusquement. «Enchantée de vous rencontrer. Je m'appelle Natsumura Mugen et je suis également une Hanatsu. Merci de nous avoir invités.» Parvint-elle à débiter d'un seul souffle avant de river ses prunelles à ses pieds, les palpitations de son coeur l'assourdissant momentanément. Je m'écartais avec elle pour laisser nos autres sœurs se présenter et elle exhala un soupir. «Olala.» «Oui.» Approuvais-je.
Elle jeta un coup d'oeil par dessus mon épaule et son visage s'éclaira. «Oh regarde Haru, il y a d'autres Nysea (Orines) !» Je me tournais et de saisissement, ma bouche s'entrouvrit. «Wakiya...» Je me sentis rougir à mon tour et, l'embarras le disputant au plaisir de revoir la brune, je balbutiais en courbant le haut de mon corps : «Konnichiwa. Je suis heureux de vous revoir aussi, bien que je ne m'attendais pas à ce que ce soit ici.» Non sans glisser une œillade curieuse vers moi, Natsumura s'avança et pépia gaiement. «Konnichiwa ! Je m'appelle Natsumura Mugen ! Enchantée de vous rencontrer ! C'est magnifique ici, non ? D'où venez-vous ? Vos cheveux sont magnifiques, Ren Muramasa !» Soulagé de voir qu'elle prenait les rênes de la discussion, mon regard se perdit pensivement vers les frondaisons des arbres, incapable de croiser celui de la spécialiste du Shibari sans que mes joues et ma gorge ne se couvrent de plaques écarlates. Je craignais qu'elle puisse lire dans mes prunelles ce jour où, bien qu'étant seul dans le salon, les sensations grisantes du Shibari étaient revenues en force, à tel point que mon corps s'était retrouvé délicieusement arqué par des entraves invisibles et m'avaient laissé tremblant, des stigmates fleurissant sur mon épiderme avant de s'estomper comme si rien ne s'était passé. Cette soirée à Bara m'avait-elle si profondément marqué que mon corps puisse réagir ainsi ? Était-ce le résultat de désirs inconscients ? Etais-je anormal ? Je ne me serais pas senti plus honteux que si elle venait de me surprendre en train de me donner du plaisir et l'arrivée soudaine de deux enfants fut une véritable aubaine. Leur arrivée ne passa pas inaperçue et les oreilles de Nüka se dressèrent avec intérêt vers eux. S'échappant aisément de la poigne de Natsumura, le chien au pelage immaculé s'élança et s'arrêta à quelques centimètres d'eux, la truffe au ras du sol entre ses pattes de devant et son derrière frétillant en l'air, un enthousiasme indicible faisant battre sa queue.

Message I | 1078 mots

Spoiler:

Un Dernier Thé pour la Route

☙ Red Velvet - Happiness

«Bonjour ! Ah oui ! Nos invitations !» Le bout de sa langue pointant entre ses dents, l'Ygdraë fit basculer son sac pour fouiller dedans à la recherche de la précieuse enveloppe. «J'étais pourtant sûre que c'était là.» Son sourire s'effaçait quand l'invitation surgit sous son nez. Goguenard, Raïm lui tapota le bout du nez avec avant de la présenter à la garde. «C'est moi qui l'avait. Je ne te fais pas assez confiance pour ne pas la perdre.» «Hey !» Ses joues se gonflèrent et elle croisa les bras, faussement boudeuse mais le Boräk ne lui prêta pas la moindre attention et s'avança en premier dans le domaine de Qisar. Astriid le laissa les distancer pour attendre Valÿn, en grande discussion avec Aëvanna. Sentant le regard insistant de la rousse, cette dernière s'interrompit et renifla dédaigneusement. «Tu aurais pu défroisser ta robe, on dirait une pouilleuse. On n'est pas chez n'importe qui.» Astriid pinça l'ourlet du vêtement et admit d'une voix égale : «Ah oui, c'est vrai, je n'avais pas fait attention.» «C'est bien ce que je te reproche.» Maugréa la Cyraliel maugréa en agitant sa main devant la rousse jusqu'à ce que les plis s'évanouissent sous l'effet de sa magie. «Allons-y, nous ne sommes pas en avance.»

«Bonjour Mancinia !» Pépia Astriid en Alikir sitôt qu'elle aperçut l'Humaine, déjà bien entourée. Elle ne voyait pas Neah mais l'aura rayonnante de leur hôte suffisait à éblouir les Ygdraës qui la saluèrent à leur tour. Raïm lui, s'était éclipsé discrètement, préférant surveiller de loin sans se mêler aux groupes qui s'étaient formés. «Pardon d'arriver en retard, on sous-estime souvent le temps qu'il faut à plusieurs personnes pour arriver à destination. Quoi qu'il en soit, merci pour l'invitation, j'avais hâte d'arriver ! Nous n'avons pas encore eu l'occasion au cours de notre voyage de visiter vos Royaumes, est-ce que ce thé sera comme ceux que vous préparez à Utopia ? J'aimerai tellement visiter vos villes un jour ! Il y a tellement de monde ici ! Vous êtes une vraie célébrité. Sif est ici ? Il y a tant d'enfants ! C'est un manoir ? C'est très beau chez vous !» Presque sans reprendre son souffle, la Sylvestre se tourna vers tous les nouveaux visages. «Bonjour ! Je m'appelle Astriid Cëlwùn, nous sommes des Ygdraës en voyage.» Chacun déclina poliment son identité tandis qu'Astriid observait les connaissances de la Matasif. Plusieurs d'entre eux portaient des tenues presque similaires aux tissus soyeux et chatoyants et leurs traits étaient plus fins que ce qu'elle avait l'habitude de voir. Ils lui rappelaient Hanako, la petite blonde avec qui elle s'était liée d'amitié peu de temps avant de quitter les terres de Melohorë. Notant son regard curieux, Solenn se pencha vers Astriid pour lui murmurer à l'oreille. «Il s'agit d'Orines. Elles et les Humains de Sympan œuvrent main dans la main pour consolider leur entente, ce qui explique leur présence en si grand nombre.» «Oooooh. Enchantée de vous rencontrer. Vous voyagez aussi alors ? Qu'avez-vous vu d'intéressant jusqu'à présent ? Nous-mêmes étions à Lagherta avant, quel endroit fantastique ! Le ciel et ses nuages sont vivants et la faune est fascinante ! Je pense que je pourrais m'installer là-bas plusieurs décennies pour étudier les formes de vie là-bas !»

Message I | 581 mots

Astriid arrive quand Mancinia est avec Érina, Lexa, les Orines et les enfants. Elle est avec son groupe d'Ygdraës et ils se présentent et discutent.  

Un dernier thé pour la route
天地四方 - 暗猫の祝福 (Cover by tnbee)

Soudainement entraînée dans le sillage de sa compagne, Muramasa ne lui opposa aucune résistance, laissant plutôt voguer sa curiosité un peu partout dans le jardin alors qu’on la guidait jusqu’à destination. Ses yeux étaient envahis par les couleurs environnantes, pétillantes, qui se jumelaient et se mixaient selon le mouvement des robes et des bijoux, tandis que ses tympans vibraient doucement aux timbres des voix et des salutations que le vent leur transportait. Tout naturellement, les invités commençaient à se regrouper en fonction de leurs affinités, de leurs familiarités et selon d’autres amitiés de la même nature. Au début, la rouquine crut que son amie l’avait amené auprès des autres Orines simplement parce qu’il s’agissait de leur peuple, de leurs racines, mais comprit rapidement son erreur lorsque Wakiya les arrêta devant deux individus en particulier. Par réflexe, Ren adressa un sourire aux étrangers, portant son regard sur le jeune homme que la brune lui présenta. Poliment, la combattante lia ses mains devant elle, les posant un peu plus bas que son nombril, avant de se recourber respectueusement. Cela lui parut tellement bizarre, elle qui s’était habituée à la révérence des militaires angéliques.

« Konnichiwa Lim San! Je suis heureuse d’enfin rencontrer une connaissance de Waki. Vous êtes le premier qu’elle me présente, fit-elle en rigolant avant de glisser le sinople de ses mirettes sur le visage de la jeune femme qui accompagnait le dénommé Andrea. Konnichiwa Mugen Cukaṇē (Bonjour mademoiselle Mugen). Le plaisir est partagé. Oh! Voici Wakiya Sunano, dit-elle en présentant la jeune femme. Et à qui avons-nous l’honneur ici? »

Prudemment, la rousse posa la paume de ses mains sur ses genoux, fixant la truffe agitée du chien aux poils blancs. Toutefois, en se redressant, elle finit simplement par porter l’intégralité de son attention sur la femme aux longs cheveux de jade.

« En effet, le résultat est d’un charme surnaturel, presque féerique. La Marquise et son fiancé se sont vraiment surpassés pour rendre le tout si magnifique. »

Son regard s’évada quelques secondes sur un arbre, qui avait été enjolivé par la présence d’une multitude de fleurs aux couleurs chatoyantes. Toutefois, la rousse sursauta subitement à la suite des propos de son interlocutrice. Gênée, l’épéiste baissa distraitement les yeux.

« Me-Merci beaucoup. C’est Waki qui me les a coiffés avant notre départ! Je suis plutôt malhabile de mes mains, comparativement à elle, alors elle s’est proposée pour me les arranger convenablement », lui indiqua la combattante en tentant de cacher le pourpre léger qui colorait ses joues, sous ses taches de rousseur.

Elle qui s’était, toute sa vie, passionnée pour l’art du combat et de l’erhu, elle n’avait jamais porté grand intérêt à l’esthétique de son apparence, préférant déployer son énergie et tourner ses réflexions à ses entraînements. Certes, elle avait grandi auprès des Orines, mais avec l’entourage qu’elle avait côtoyé au cours de son existence, jamais elle n’avait véritablement senti le besoin de faire attention à son physique. Une fois chez les Anges, et surtout dans le petit cercle de la fratrie des Yüerell, l’apparence comptait encore moins. Cependant, l’arrivée de Wakiya, si gracieuse et délicate, si raffinée et discrète, l’avait inconsciemment amené à considérer plus sérieusement l’effort qu’elle pouvait mettre à son apparence.

« Votre tenue est également ravissante, Mugen Cukaṇē. Elle ne savait pas quoi dire de plus, mais était sincère. Vous êtes vous-même très élégant, Lim San. En balayant leur deux minois, Ren renchérit : Nous venons de l’Île d’Orhmior et accompagnons le Capitaine Yüerell, qui se trouve là-bas. D’un petit signe de la main, elle indiqua ma position. Il n’aime pas particulièrement les foules… Et vous? Est-ce que vous venez tous les deux de Bara? »

Mais elle eut à peine le temps d’entendre leur réponse qu’une petite fille aux ailes bleutées apparut brusquement dans son champ de vision. Elle avait bien entendu le cri enfantin qui s’était soulevé dans le jardin, plus haut et fort que le volume des autres conversations. Pourtant, jamais elle ne se serait imaginé qu’il lui soit adressé, même quand la propriétaire de cette voix tout enjouée, scintillante et excitée, s’arrêta devant elle. Durant une poignée de secondes, la rousse la dévisagea sans vraiment comprendre, étirant un sourire bienveillant malgré tout.

« E-Euh… Bonjour? »

Par réflexe, son regard alla chercher le soutien de la Sunano, mais la brune parut tout aussi larguée qu’elle, l’arrivée impromptue d’une jeune femme leur permettant de mieux saisir la situation.

« Je vois… Ne vous en faîtes pas pour cela. »

Laissant ses consœurs répondre à la question de l’Ange – Ren était devenue si familière à cet aura –, la Liée reporta plutôt l’opale de ses mires sur les épaules de l’enfant qui, dans les bras de sa gardienne, semblait être sur le point de pleurer.

« Bonjour… Sharihzad, c’est bien cela? Elle attendit patiemment que la petite fille daigne à nouveau se retourner dans sa direction avant de lui adresser un grand sourire, qui se voulait paisible et réconfortant. Je suis désolée d’apprendre que ta sœur soit partie. Elle te manque, pas vrai? Bien sûr qu’elle lui manquait, vu sa réaction et sa déception. En tout cas, ta robe est très jolie. On dirait une véritable princesse. C’est toi qui l’as choisi ou est-ce ta maman qui l’a trouvé pour toi? »

Ren coula une brève œillade en direction de l’Ange. Elle connaissait la situation des Enfants des Cieux, ces derniers ayant aussi bien été adoptés par les Mages blancs que par les Immaculés. Naturellement, elle voyait en ce trio une magnifique petite famille, l’entrain du chiot de Natsumura complétant agréablement le tableau.

« Hahaha! Tel maître, tel chien. Vous avez la même énergie! » S’amusa la combattante avant de sentir une pression de plus en plus écrasante se rapprocher.

Il ne lui avait suffit que de redresser la tête pour remarquer sa présence, encadrée par deux jeunes femmes qui ne lui étaient guère connues. Malgré cela, elle s’inclina respectueusement devant les trois nouvelles venues lorsque son nom fut formulé, ses pupilles retombant inévitablement sur les enfants et le chien surexcité. Se penchant à la hauteur du jeune Ihsan, Ren le gratifia d’un sourire, observant Aurel et Sharihzad, l’un à la suite de l’autre.

« C’est une bonne idée, qu’en dîtes-vous? Est-ce que vous me permettez de me joindre à vous? Voyant une nouvelle délégation arriver, la Muramasa soutint brièvement l’œil éclatant de la sylvestre qui venait de foncer droit sur la Matasif, avant de s’introduire à son tour et d’échanger un regard avec Wakiya, par-dessus son épaule. Est-ce que tu veux venir avec nous, Waki? »

L’Orine le lui proposait, mais s’attendait à un refus de la part de son amie. Après tout, un regard en direction du jeune Andrea lui indiquait que les deux souhaiteraient peut-être rattraper le temps perdu.


◆ 1 131 mots | Post II | Ren parle avec Wakiya, Andrea et Natsumura. Elle est surprise par Sharihzad et discute un peu avec elle pour lui remonter le moral. À l’arrivée de Mancinia, Lexa et compagnie, elle ne fait que les saluer avant de proposer aux enfants d’aller s’amuser avec Nüka. Lorsqu’Astriid et les Ygdraës arrivent, elle les salue également très rapidement, et propose à Wakiya de venir s’amuser avec eux.

Un dernier thé pour la route
A Thousand Waves Under the Moon - Yu-Peng Chen (Cover by Atharva Mohite)

Mon esprit revint brutalement à la réalité lorsqu’une agitation insoupçonnée m’arracha à mes pensées. Détournant les yeux du firmament qui m’avait englouti, je finis par les poser sur la source de tout ce bruit et en remarquant le rassemblement qui s’était soudainement agglutiné autour de Muramusa et de Dame Sunano, je me fis la réflexion que j’avais bien fait de m’éclipser. Cela étant dit, un regard dans leur direction ranima une vague impression au creux de mon esprit.

« Que vous soyez sensibles ou non à cette Beauté, si cette dernière vous amène à vous dépréciez en finalité, alors oui, je considère cela comme des réflexions superficielles, sans importance. »

À ma réponse, les prunelles olive de la brunette s’étaient lentement glissées jusqu’à mon faciès. Toutefois, lorsqu’il eut contact entre nos deux regards, la Sunano s’était dépêchée de baisser les yeux, n’osant plus ouvrir la bouche pendant un certain temps. Fermant brièvement les paupières, je me permis d’expirer une nouvelle bouffée d’air. Je ne comprenais pas réellement sa réaction et même si mon esprit aurait pu se troubler de ce souvenir, ne serait-ce qu’en raison du soudain mutisme de l’Orine, ce ne fût pas le cas. Bien au contraire. En réalité, je n’en voyais pas l’intérêt, car je n’avais fait que partager le fond de ma pensée avec elle. Néanmoins, il est vrai que le rapport que j’entretenais avec la Beauté et l’Inspiration n’était pas le même qu’aux yeux des Muses de Kennocha… Peut-être n’avais-je pas compris ses intentions et, dans ce cas-là, pourquoi n’avait-elle pas simplement pris la parole? L’intimidais-je encore malgré le fait que nous habitions tous deux sous le même toit…? J’exhalais un soupir, à peine perceptible. Finalement, force était de constater que ce souvenir troublait bel et bien mes pensées.

« Un morceau, Sir Yüerell? »

Reportant mon attention sur le domestique qui s’était avancé, je l’écoutais distraitement me présenter les petites gourmandises qui avait été soigneusement étalées à l’intérieur de son plateau. Malgré une présentation impeccable, je secouais finalement la tête, refusant poliment les encas.

« Peut-être plus tard, merci. »

Plus tard, cependant, on m’interpella de nouveau, mon visage se tournant instinctivement en direction de la voix. Non loin, une silhouette se rapprochait de ma position.

« Capitaine Katzuta. »

Temporairement, j’abandonnais mon assise afin de saluer le rouquin à la manière de la Nith-Haiah.

« Merci beaucoup. Je suis extrêmement reconnaissant à l’égard des Imperio Vaughan et McNuvelle de m’avoir offert une telle opportunité. »

Sans m’étendre plus que de raison sur le sujet, je lui présentais le banc d’un signe de la main.

« Vous pouvez vous asseoir, si vous le désirez, l’invitais-je tout en prenant moi-même place, l’interpellant après un certain temps : Ce dîner, il ne s’agissait pas simplement d’un rêve, n’est-ce pas? Cette fois, je braquais mes pupilles dans les siennes, étudiant sa réaction avec attention. Vous savez pourquoi je suis présent aujourd’hui et parce que je n’aime pas tourner autour du pot, j’irai droit au but. Vous avez été mis au courant de la visite impromptue de cette Reine au cœur de l’Avant-Garde par la police militaire. Leur avez-vous tout dit? J’attendis sa réponse, patiemment. Soyez honnête avec moi. Que pensez-vous de cette femme? Qui est-elle et que nous veut-elle? »

Je peinais encore à faire le lien entre le rêve où j’avais croisé Vaès, ce dîner et cette étrangère. J’avais l’impression qu’il me manquait un morceau du casse-tête. Je réfléchis un instant. Lors du dîner, je me rappelais qu’elle m’avait posé des questions saugrenues par rapport aux Anges, à savoir lesquels seraient en mesure de résister à la concoction qui se trouvait dans le flacon que l’on m’avait remis. Ensuite… Ensuite… Je me concentrais. Il s’était passé tellement de choses en si peu de temps. Mais n’avait-elle pas dit quelque chose en rapport avec… avec…

« … Savez-vous ce que sont les Sēnaṭīnēla? »

Je ne savais pas si ma prononciation était exacte, répétant tranquillement les syllabes du mot. Jusqu’à ce qu’un pressentiment me freine. Jusqu’à ce que ma voix s’éteigne au fond de ma gorge, alors que je me retournais tranquillement. S’étant glissées à nos côtés, deux jeunes femmes se présentèrent à nous, l’une d’elle m’étant étonnamment familière.

« Oh… Kaabo Fúnmi tara Taiji. Je coulais une brève œillade en direction du Katzuta, reportant mon attention sur la blonde. Je ne pensais pas vous revoir ici. Quittant notre banc, je me plaçais devant elle, debout, afin de les saluer convenablement. Le plaisir est partagé. Et merci. Vous leur transmettrez mes hommages également. Me redressant, je répondis à sa question, d’une voix aussi platonique que d’ordinaire : Très bien. Orhmior ne cesse de se développer depuis votre départ, et avec l’approbation du projet sur la cavalerie, nous serons bientôt à nouveau occupés avec un nouveau chantier. Je la considérais quelques secondes, mais elle guida mon attention en direction de la personne qui l’accompagnait. Enchanté, Fúnmi tara Sulys. Toutefois, au commentaire de la Taiji concernant ma montée en grade, je finis par relâcher un soupir discret. Merci beaucoup. Tout reste encore à prouver cela dit. Examinant brièvement l’amie de Dame Shanxi, je finis par reporter le bleu de mes iris sur l’architecte. Est-ce que Monsieur Vaughan a bien reçu ma missive concernant ma demande pour les établissements de la cavalerie? »


◆ 883 mots | Post III | Exceptionnellement, j’ai séparé mon post en deux parce que c’était beaucoup trop long autrement. Du coup, Isiode discute avec Neah, puis avec Helsinki et Shanxi lorsqu’elles les rejoignent.

Un Dernier Thé pour la Route
Andrea & Natsumura

☙ Merry go round of life cover by Grissini Project

«Orhmior ?» Fit Natsumura en essayant de se remémorer les cartes qu'elle avait étudiées. «Oh, vous êtes avec le Capitaine Yüerell ? Son nom est parvenu jusqu'à nos oreilles, vous accompagnez des personnalités intéressantes.» Impressionnée, son regard suivit la direction indiquée et elle m'adressa un sourire complice. Je n'aimais pas les foules non plus et seule la politesse me maintenait sur place à endurer ces bavardages. «Oh je... Non, nous sommes de Maëlith mais j'ai passé un bref moment à Bara. C'est là que j'ai rencontré Wakiya.» Répondis-je à voix basse tandis que Natsumura me considérait avec un air indéchiffrable. Elle savait depuis longtemps que je ne parlais que très peu de moi ou de ce que je faisais, même à elle et ce qu'il s'était passé lors de cette soirée était resté un mystère. Bien qu'ayant pressenti mon trouble, aussi visible sur mon visage que si je le lui avais crié dans les oreilles, elle s'était gardée de me poser des questions auxquelles j'aurai été incapable de répondre. Lorsque je ne savais pas quels mots mettre sur une situation, je me taisais et l'expérience avait été trop intense pour que je souhaite la vulgariser en me confiant à la Hanatsu. Elle s'en offusquait souvent lorsque nous étions enfants mais s'était habituée avec le temps à mon mutisme.
L'arrivée de Mancinia suivie de nouvelles têtes firent ployer à nouveau nos nuques pour saluer les amis de la Marquise. «C'est un plaisir de vous rencontrer, Lexa et Érina.» Fit Natsumura avant de se tourner vers leur hôte. «Oh oui ! Andrea m'en a tant parlé que j'ai fait un détour dans mon voyage pour le rejoindre et je ne le regrette pas. Merci de prendre soin de nous et pour votre accueil.» La Hanatsu s'inclina plus bas et je fis de même après avoir hoché la tête à ses assertions. Moins formels, les enfants s'étaient naturellement rassemblés entre eux pour jouer, ce qui sembla alléger l'atmosphère. Natsumura gardait un oeil prudent sur Nüka pour qu'il ne fasse pas peur en voulant jouer et j'intervins pour répondre à la Fille de Sympan. «Oui, en effet. Nous nous intéressons à toutes les formes d'Art mais nous nous spécialisons dans celui ou ceux qui nous passionnent. Nous les appelons alors nos Arts Divins. Pour ma part, je pratique la Harpe et je débute dans l'Art du Tatouage.» «Je suis une danseuse de Geommu.» Ajouta Natsu en décrochant un de ses dan geom pour le présenter sur ses paumes ouvertes. La lame au bout arrondit capta les rayons du soleil en dessinant des gouttes lumineuses sur leurs visages. Arrimés au manche, de minuscules grelots pendaient au bout d'un lien vermeil. Décoratives plus que dangereuses, Natsumura tenait à ses armes comme à la prunelle de ses yeux et en prenait un soin excessif en les huilant presque chaque jour. Elle rêvait plus tard de posséder des dan geom ouvragées comme celles que possédaient les plus grandes danseuses de cet art ainsi que de diversifier les armes avec lesquelles elle dansait.
Après avoir rangé soigneusement la lame dans son fourreau, la Hanatsu s'accroupit auprès de son chien dont la truffe frétillait avec impatience. «Il s'appelle Nüka. Malgré sa taille, il a toujours l'âme d'un chiot et il est très joueur. Vous avez raison, nous sommes un peu pareil tous les deux.» Sourit-elle avec tendresse. Ses doigts se frayèrent un chemin parmi les longs poils immaculés de l'animal et Natsu planta ses prunelles dans les obsidiennes du chien qui se mit à haleter, la langue pendant hors de sa bouche. Ses oreilles s'agitaient frénétiquement, captant tous les bruits intéressants et, las des caresses de sa maîtresse, il se dégagea pour venir renifler avec curiosité les plumes d'un des Enfants des Cieux. Le potentiel d'amusement était bien plus élevé avec l'énergie des plus petits qu'avec les adultes qui discutaient.
Aterré, je vis arriver de nouvelles personnes, dont une plus exubérante que les autres et qui semblait bien connaître la Sertisseuse. Leurs longues oreilles révélaient leurs origines sylvestres, un peuple auprès duquel nous étions naturellement proche. Notre amour pour la nature était presque similaire et j'espérais un jour avoir la chance de visiter leurs terres. Les végétaux qui composaient Melohorë méritaient le voyage à entreprendre ainsi que les mesures administratives pour franchir les frontières bien gardées des Elfes. J'inclinais à nouveau la tête pour les saluer mais esquissais un pas de recul. Bien que l'opportunité de pouvoir échanger avec des Ygdraës me tentait, tout ce monde me donnait le vertige. Une fois encore, Natsumura me sauva la mise en les saluant. «Bonjour...» Elle se mit à battre des paupières, confuse devant tous les Elfes, incapable de se souvenir de leurs noms. Elle émit un sourire d'excuse avant de poursuivre. «J'ai entendu parler de Lagherta, vous avez de la chance d'y être allés. Oui, nous voyageons aussi mais je commence juste, ceci est ma première étape mais Andrea a déjà voyagé à plusieurs reprises pour visiter Utopia. Le charme de notre hôtesse a capturé son coeur semble-t-il» J'acquiesçai en silence, l'ombre d'un sourire poli jouant sur mes lèvres. J'étais celui qui avait poussé la Hanatsu à me rejoindre et c'était désormais moi qui souhaitais presque partir.

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