Un œil rivé sur la Gazette du jour, Oriane passait la brosse dans sa chevelure, tournant vivement les pages du journal lorsqu'elle eût terminée de survoler l'une d'elle avant de reprendre sa préparation. « Bon qu'est-ce que tu fiches ? C'est pas en traînant comme ça qu'on avancera dans les répétitions. » la sermonna Louve - pour changer - en passant l'entrebâillement de la porte de la loge. Aussi c'est à peine si la Luxurieuse tourna son regard en direction de sa collègue. D'autant que son attention venait juste d'être attirée par un article particulier. Jusqu'alors, le magazine traitait principalement du Fessetival, des événements s'y étant déroulés, certains imprévus et marquants tel que la rixe entre l'Isemssith Belegad et cet homme, parfait sosie du Baron Paiberym - elle se pinça la lèvre en lisant ce nom, souvenir d'un rêve bien étrange et ayant éveillé des désirs inavouables - ainsi que du succès de l'événement et des collectes conséquentes que les associations avaient obtenus. Mais celui-ci était différent. Il avait attrait également au Fessetival, mais en une autre demeure. Quelque chose de bien plus croustillant. « Bon, sérieusement Oriane. » - « Shhh. Une minute tu veux ? » fit-elle en levant l'index pour la faire taire. « Qu'est-ce qu'il y a de plus important que de travailler ton travail justement ? ». Un sourire malicieux se dessina sur les lèvres de la Déchue. « Un artiste imprévu s'est invité au Fessetival semble-t-il. Il aurait capturé des moments intéressant mais les aurait également légèrement altérés. ». L'Orgueilleuse fronça des sourcils. « Il les a altéré ? ». Une lueur maligne dans le regard, Oriane se tourna en direction de sa consœur. « Le genre de tableau sur lequel tu ne veux pas figurer. Surtout toi, vu ton péché. ». Alors elle comprit et se jeta sur l'article. « On sait qui a été peints ? » - « Non. Un peu tout le monde j'imagine. Les scènes les plus intéressantes ou inspirantes probablement. ». C'était décidé. Elle en aurait un. De qui ? Peu importe. Elle trouvait quelque chose d'amusant dans ces œuvres et il était évident que certains les garderaient jalousement dans des coffres, bien à l'abri des regards indiscrets. « Allons-y. » fit-elle à l'intention de l'Orgueilleuse qui était à son tour captivée par ce que racontait le journal. Mais elle ne fit rien remarquer. Oriane était d'une excellente humeur aujourd'hui et elle ferait en sorte que rien ne puisse mettre un terme à cela. Elle lui était si difficile de trouver de quoi la mettre dans cette état habituellement qu'elle se faisait une joie d'en profiter.

La Luxurieuse précéda Louve sur la scène, un large sourire aux lèvres. Pourtant, cette fois-ci, elle avait l'esprit à moitié présent. Suivant l'Orgueilleuse dans ses vocalises, Oriane songeait également à ces tableaux qui n'auraient pas dû voir le jour. Elle réfléchissait aux différents endroits où elle pourrait éventuellement en trouver un. Ce qu'elle aurait aimé que, comme la fois-dernière, il atterrisse directement sur le pas de sa porte. Ça lui faciliterait grandement les choses. « Hé oh ! Concentres-toi un peu bon sang ! On arrive à rien là. C'est pas possible, je ne comprends pas que Svetlana aie pu engager une incapable comme toi. » soupira la chanteuse désignée mentor par la maîtresse des lieux. La remarque tombant au creux de l'oreille de la Déchue, cette dernière évacua soudainement l'idée des tableaux, blessée dans son propre orgueil. Ce n'est pas comme si elle commençait à être habituée en réalité. Louve lui en balançait des équivalentes quotidiennement. Toutefois ce n'était jamais agréable à entendre. « Si Svetlana m'a embauché, c'est parce qu'elle est certaine de mes capacités et qu'elle est sûre que l'incapable que je suis peux rattraper ton niveau facilement et rapidement. ». Pour ne pas dire, la dépasser, même si cette idée relevait d'un excès d'ego, elle en avait parfaitement conscience. Néanmoins, comme pour le lui prouver, elle s'avança plus sur la scène et s'imposa à elle, déballant les paroles de leur duo et la partie qu'aurait dû chanter Louve. Pendant de longues secondes, cette dernière fixa la Luxurieuse, stupéfaite, non pas par sa prestation, mais par le culot qu'elle avait eu s'approprier sa partie et s'exposer avec à la manière d'une diva, ce qu'elle était loin d'être. Ce n'était même pas juste. Elle ne la chantait même pas dans les bonnes harmonies. Parfaite mauvaise foi qu'elle n'assumait pas, évidemment. Certes, Oriane ne la chantait pas de la même manière que l'Orgueilleuse. Toutefois, cela ne signifiait pas que c'était faux pour autant. La Luxurieuse jeta un regard en biais à sa collègue. Voyant son air courroucé, un rictus moqueur se dessina à la commissure de ses lèvres comme elle se tut, prête à la confrontation.

Oriane se dirigea en direction de l'appartement de Kyra, marquant un arrêt devant sa porte quelques secondes avant d'entrer. Elle n'y trouva personne. Faisant une moue déçue, elle décida tout de même de s'installer sur le canapé et d'y attendre La Petite Sœur. En croisant les doigts pour qu'elle soit la première à se montrer. Son regard croisa celui de l'un des compagnons de Kyra. Koka. Elle ne l'avait pas vu jusqu'alors. Elle se souvint que le furet avait trop de pouvoirs lui permettant de passer inaperçu, ce qui lui fit premièrement tirer la grimace. Elle se souvint également que Kyra avait dit un jour pouvoir échanger avec lui. Ou quelque chose dans le genre. Elle n'avait jamais trop comprit exactement le fonctionnement de ce pouvoir, mais sa grimace se troqua en un sourire. Si les deux pouvaient communiquer - elle supposait que c'était quelque chose dans ce genre là - à distance, alors peut-être la Gourmande se montrerai incessamment sous peu. Elle l'espérait. En attendant elle china en peu, y découvrant une magnifique boîte à chocolat. « Petite cachottière. » murmura-t-elle à elle même en détaillant le contenu. Elle élimina d'office ceux emballés. Ne restait que le chocolat noir et la pâte de fruit. Elle se saisit du cube de chocolat noir et croqua avec gourmandise dedans avant d'être surprise par la liqueur. Puis elle se tourna à nouveau vers l'animal qui semblait la fixer d'un regard accusateur. « Quoi ? Ta maîtresse a qu'à mettre moins de temps ! ». Si elle avait su, elle aurait dit cela plus tôt. Une dizaine de minutes s'écoulèrent où elle se trouvait seule en compagnie du furet avant que la porte ne s'ouvre. Croisant les doigts, elle se tourna pour accueillir - ou renvoyer boulet, tout allait dépendre de la personne qui allait passer la porte - le nouvel arrivant. Un sourire se dessinait sur ses lèvres en voyant la silhouette de Kyra. Kjěll. « Tu pourrais demander l'autorisation avant de piquer dans les affaires des autres. » lui fit-elle. Il. Elle ne savait jamais trop comment dire quand elle se présentait sous cette apparence. « T'étais pas là. C'est ta faute. » rétorqua la Luxurieuse avec un haussement d'épaule. Un sourire amusé marqua le visage de La Petite Sœur. « Qu'est-ce que tu voulais pour me faire quitter le travail comme ça ? ». Oriane s'accouda à la table comme elle s'assit. « Tu as entendu parlé de ces tableaux inattendu ? » lui demanda-t-elle avec un air malicieux. « Ceux qu'on dit improbable ? Oui, ça parle que de ça presque au bar. Pourquoi tu me demandes ça ? ». Un large sourire étendit les lèvres de la Luxurieuse. « Je vais en trouver un. ». Kjěll arqua un sourcil. « En trouver un ? Et pourquoi faire ? » - « Parce que j'ai envie. C'est un peu comme une édition limitée non ? Je suis sure que d'ici quelques années ils vaudront une fortune ! ». La Gourmande croisa les bras comme elle fronça des sourcils. « Je ne te savais pas Avare. » lâcha-t-elle avant de rejoindre Koka qui l'observait d'un regard suppliant en sautillant sur place. Ces bêtes, toutes des estomacs sur pattes, songea Oriane. « Je ne le suis pas. » rétorqua-t-elle. « C'est plus... ». Elle se tut. Elle n'avait aucune raison particulière. C'était une simple lubie. Elle en avait entendu parlé, elle avait décidé qu'elle en aurait un. Voilà. C'était tout. « Peu importe. Qu'est-ce que ça peu faire si j'ai envie de commencer une collection et que je la commence avec un de ces tableaux ? » déclara-t-elle finalement. « Oh. Rien. Je ne te savais juste pas amatrice d'art. ». Nouveau haussement d'épaule. « Et en quoi ça me regarde finalement ? Ne me dis pas que tu m'as fais venir juste pour me dire ça ? » demanda la Gourmande sur un ton grave. Elle n'était pas en colère - il lui en fallait plus, surtout lorsqu'il s'agissait de sa famille - mais simplement agacée d'avoir été dérangée pour une nouvelle qui aurait pu attendre qu'elle débauche officiellement sans avoir à s'excuser auprès de Iivo. Déjà qu'elle était bien peu présente en ce moment à cause de la présence de Maximilien. « Non, en fait je voulais te demander justement si tu avais une idée où je pouvais mettre la mains dessus. Tu dois bien avoir une idée ou quelqu'un doit bien en avoir parlé au bar ? ». Kjěll poussa un soupir, un index sous le menton, réfléchissant à sa demande. C'était possible oui que quelqu'un en ait parlé. Mais comme beaucoup de monde parlait de ces tableaux, elle avait presque arrêtée d'écouter ces conversations. « Essaie à l'hôtel des ventes peut-être ? Ou dans les brocantes aussi ? Tu peux éventuellement voir avec les prêteurs sur gage je pense. Bref, t'as compris l'idée. Le mieux c'est d'essayer partout. Même dans les endroits improbables. On parle bien de tableaux improbables après tout. »

Les deux Déchues s'attardèrent quelques minutes supplémentaires ensemble avant de se séparer, Kyra retournant à son service quand Oriane partait à la recherche de l'une de ces toiles. Sur les différents conseils que lui avait offert La Petite Sœur, elle élimina d'office l'hôtel des ventes. Non qu'elle n'imaginât pas qu'un tableau puisse s'y trouver. Au contraire, ce devait être plus que probable. Néanmoins, elle ne doutait pas qu'elle n'aurait jamais la fortune pour surpasser les acheteurs s'y trouvant. Ou alors elle y laisserait sa peau si elle voulait réellement jouer dans cette cours. Non, il valait mieux voir ailleurs, ce serait plus sûr, même si elle mettrait plus de temps. Aussi commença-t-elle à traverser tout Avalon, visitant chaque boutique ayant la chance de pouvoir en avoir une, se retrouvant parfois dans des endroits où elle ne mettait jamais les pieds. Elle n'aurait su dire combien elle avait fait de ces antiquaires et de ces brocantiers. Arriva un moment où elle se mit à songer que, peut-être cherchait-elle simplement au mauvais endroit et que ce n'était chez aucun d'eux qu'elle dénicherai son oeuvre d'art. Après tout, qu'avait dit Kyra ? Chercher dans les lieux improbables. Et si ce n'était pas à la vue de tous que ces tableaux indiscrets se cachaient. Si, pour mettre la main dessus, elle devait aller là où personne ne regardait et où le soleil ne brillait pas. En d'autres termes, par-delà la Porte de Phah, dans les vestiges d'Avalon. Toutefois elle ne s'y dirigea pas. Pas immédiatement. Elle préférait garder cet endroit comme la dernière des solutions. Après tout, on ne pouvait pas dire que circuler dans les bas-fonds d'Avalon équivalait à une balade champêtre. C'était tout le contraire même. La Luxurieuse leva le visage au ciel et poussa un soupir avant d'échapper un rire nerveux. Elle n'était pas inquiète des rencontres qu'elle pouvait y faire. C'était ridicule. L'ancienne Avalon regroupait toute la mauvaise graine et les détracteurs au régime actuel. De quoi rendre nerveux. Elle ne l'était pas. Elle était juste rebutée de croiser des êtres qui, elle se doutait, ne marchanderait pas à la loyale avec elle et lui proposerait des choses bien plus indécentes qu'elle n'aurait entendue jusqu'alors malgré sa nature. Mais soucieuse ? Non. C'était étonnant comme son degré de tolérance à faire face à l'adversité avait fini par se renforcer à force de rencontres qui n'auraient supposément jamais dues arriver à son simple rang de petite et pauvre chanteuse. Elle ne savait si c'était une bonne chose. Au moins il lui était bien plus aisé encore de se relever. Plus que ça, elle ne se laissait tomber que par peu de choses à présent. Mais ce qui la faisait trébucher la mettait bien généralement à terre et dans un piteux état.

L'Abjecto inspira profondément et se dirigea vers la boutique suivante. Une petite cloche raisonna à l'instant où elle poussa la porte, attirant son attention sur cette dernière. Puis, reportant son attention sur le lieu, elle comprit l'utilité de cette dernière. C'était un véritable bordel. On se croirait sur les vestige d'un camp de bataille tellement il y en avait partout, disposé dans tout les coins et d'une façon si peu ordonnée que l'antiquaire devait probablement être le seul à s'y retrouver. S'il n'était pas mort étouffé sous un tas effondré de statue, tableau, masque et autres bibelots. Mais non. Le commerçant était bel et bien vivant et il apparu comme sorti de nul part, tout souriant, derrière le comptoir de vente. « Bonjour ! » salua-t-il la Luxurieuse, faisant sursauter cette dernière qui le cherchait encore à travers les étagères. Le regard pétillant, les lèvres étendues jusqu'aux oreilles, elle se demanda un instant s'il n'avait pas exagéré sur les champignons avant de l'accueillir. « Bonjour. ». A peine lui eut-elle renvoyée la civilité que l'homme la coupa pour reprendre la parole, avec une révérence exagérée. « Je vous souhaite le bonsoir ma noble amie ! » - « Euh... Oui. ». Cette fois c'était sûr. Cet homme n'était pas sain d'esprit. Il fit le tour du comptoir pour rejoindre sa marchandise et la présenter d'une main. « Approchez, approchez. Venez plus prêt. Mais pas trop prêt hein. ». Oriane ne put retenir un rire qu'elle essaya de cacher derrière sa main face aux divagations de l'antiquaire. Mais avant même qu'elle ne lui obéisse, celui-ci se glissa à ses côtés et passa une main derrière ses épaules avant de continuer dans un débit qui dépassait l'entendement. « Bienvenue à l'Abarga, boutique des plus belles marchandises de ce côté d'Avalon, en solde aujourd'hui ! Profitez-en ! ». Alors le vendeur s'écarta de la Déchue pour retrouver son comptoir et fit apparaître entre ses mains un étrange objet dont il commença à lui faire la démonstration avant même qu'Oriane ne puisse lui expliquer la raison de sa visite. « Regardez, un combiné narguilé et cafetière qui en plus fait EN PLUS fait pomme-de-terre-frites ! » - « Frites ? ». Voilà bien un plat dont elle n'avait jamais entendu parlé. « Incassable, incassable ! ». Continua-t-il en montrant la solidité de l'appareil, tout fier, jusqu'à ce que celui-ci tombe en pièce. « Hum. Cassé. », conclut-il donc en le jetant par-dessus son épaule. Peu importe ! Il avait bien d'autres choses dans sa boutique ! Aussi fit-il apparaître un nouvel objet, tout aussi loufoque, et reprit-il son manège. Toutefois, aussi louée soit ses intentions, la Luxurieuse ne comptait pas attendre qu'il lui fasse la démonstration de chaque objet loufoque qu'il possédait. Aussi, dans un soupir, comme elle roula les yeux, elle tourna les talons et commença à prendre la direction de la sortie. Voyant cela, l'homme commença à paniquer et se précipita devant aussi rapidement qu'il déblatérait le fonctionnement de ses objets, la suppliant de rester. « Attendez une seconde ! ». Soudain son expression changea du tout au tout. Une main sur l'épaule de l'Abjecto, il reprit de plus belle comme il lui fit faire demi-tour. « Je vois que vous ne vous intéressez qu'aux objets exceptionnellement rare. ». Ces quelques mots suffirent à piquer la curiosité de la Déchue. « Il me semble avoir ici de quoi faire votre bonheur. » continua-t-il d'une voix exceptionnellement plus lente que précédemment tandis qu'il la guidait à travers les rayons du commerce, oubliant ses tours de passe-passe.

Oriane revint chez elle avec un air ravi. Elle n'aurait jamais songé trouver ce tableau dans la journée. Plus que ça. Elle n'aurait jamais songé le trouver dans ce bric à broc, entre les mains de cet homme qui, elle en était certaine, était atteint par la folie. Ce qui pourrait expliquer l'état de sa boutique. Mais actuellement ça n'avait aucune importance. Il pouvait bien être dément ou juste drogué, ça n'était plus son problème. Non. Son problème actuel était qu'elle n'avait pas la moindre idée d'où exposer la toile. On ne pouvait pas dire que son appartement soit d'une taille importante non plus. Une chaise retournée, elle y avait déposée la toile, cette dernière posée contre le dossier. Tapotant son menton de l'index, elle fixait les silhouettes des demoiselles - c'était étonnant ce mélange d'innocence et de volupté qu'elles dégageaient, le peintre avait un formidable coup de pinceau, c'était certain - réfléchissant à l'endroit où elle pourrait accrocher le tableau. Boraür pourquoi pas ? « Hum. ». Kyra ne voudra pas. C'est certain. Son regard se porta sur les murs de la pièce. Peut-être qu'il irait bien dans le salon finalement. Peut-être. « Hum. ». Elle reposa ses prunelles sur la toile. Peut-être aurait-elle dû réfléchir à cela avant de se précipiter en quête de l'oeuvre d'art. La Déchue releva le visage en entendant la porte claquer. Rajiv. Elle ne s'en étonna pas, c'était également chez lui après tout. « Tout va bien ? » lui demanda-t-elle. Elle avait bien remarquer son changement d'humeur il y a quelques jours. Si les choses semblaient s'améliorer depuis, ce n'était toujours pas ça. Pourtant il continuait à nier. Toutefois, elle n'était pas la mieux placée pour le blâmer. Néanmoins, elle restait sa mentor, aussi s'enquérir de son état était la moindre des choses. Malgré tout, une fois encore, il nia tout problème. « Non, tout va bien. Je ne vois pas pourquoi tu insistes comme ça vraiment. ». La Luxurieuse haussa des épaules, reportant son attention sur le tableau. « Encore un tableau ? » continua-t-il d'un air las. « Continue comme ça et on finira par devoir les accrocher au plafond. » ajouta-t-il, un rictus ironique aux lèvres comme il la rejoint, se plaçant derrière elle. « Oh ! ». Ce fut la seule remarque qu'il eût en découvrant l'oeuvre. D'abord surprit, une lueur lascive glissa dans ses iris tandis qu'un sourire amusé se dessina sur son visage. Le premier pour la situation représentée, le second pour les personnes qui y étaient peintes. Oriane se tourna vers lui, levant le visage à la recherche de son regard, intriguée par son interjection. « Oh ? ». Le Refute baissa les yeux, s'ancrant dans les iris de sa mentor. « Oui. Oh. En fait, j'ai déjà croisé ces deux filles, c'est pour ça. ». Oriane arqua un sourcil. C'était étonnant comme il ne croisait que des jeunes femmes aux allures innocentes. A croire qu'il avait un aimant à ça. Qu'est-ce qu'elle aimerait le lui emprunter parfois. Le sien était quelque peu détraqué et ne l'amenait qu'auprès de personnes bien trop influentes et puissantes pour elle. C'était épuisant.

Alors qu'elle sentait les lèvres du Déchu frôler sa nuque et ses mains descendre la chute de ses reins, un sourire se glissa sur ses lèvres lorsqu'elle sentit également ce dernier s'arrêter dans son mouvements. Est-ce qu'il commencerait à résister à ses envies ? Elle se décida à insister, le provoquer, jusqu'à ce qu'il prenne la parole. « Est-ce que c'est moi qui me met à imaginer tout les tableaux comme des toiles érotiques, et dans ce cas je suis sûrement en pleine récession, ou bien ton tableau se fout de moi ? ». L'Abjecto fronça des sourcils comme elle s'écarta de son élève. « Comment ça ? » - « Regarde. » fit-il pour unique explication en pointant la toile derrière la Luxurieuse. Celle-ci se retourna pour faire face à l'oeuvre. Alors se fut à son tour de s'exprimer d'un « Oh ! » étonné. En effet. La toile n'avait plus rien à voir. Elle n'avait plus rien de gênante. Ce n'était pas drôle. Toutefois, la question était "Pourquoi ?". Pourquoi, soudainement, cette peinture était devenue chaste et descente. Elle poussa un soupir, déçue. Si elle avait su elle ne se serait pas précipité ainsi. Ce vendeur s'était finalement moqué d'elle. Le tableau ne valait pas mieux que ses autres babioles. Alors elle se saisit du tableau et l'emmena avec elle dans la chambre, légèrement agacée. Elle pourrait très bien le mettre à Boraür finalement. En attendant, il resterait dans un endroit qui dérangerait moins. Du moins, ce fut là ce qu'elle voulût faire initialement. Tandis qu'elle dépassait le premier tableau qu'elle reçût de la Souriante, elle s'arrêtât soudainement, tournant le visage en sa direction comme elle fit marche arrière pour y faire face. « Bah ça alors. ». Ce fut les seuls mots qu'elle sût trouver, stupéfaite de ce qu'elle y vît. Immédiatement elle tourna les talons. Il fallait qu'elle voit Kyra.

Le tableau sous le bras, Oriane avait abandonné sans scrupule son disciple, trop intriguée par ce qu'elle venait de voir. Deux tableaux qui lui jouaient un tel tour, l'un d'entre eux qu'elle possédait depuis un temps certain en passant et dont elle était certaine de la représentation qu'il n'agissait pas ainsi. Aussi traversa-t-elle à la hâte la cité à tire d'aile, ne se souciant que peu de savoir si La Petite Sœur était de retour chez elle. Officiellement cette fois-ci. Face à l'échoppe du barbier, elle se posa enfin pour escalader les marches menant à son appartement quatre à quatre et en ouvra la porte à la volée. Mais une nouvelle fois, elle n'y trouva personne. Une moue, mélange de déception et d'agacement, se dessina sur son visage. Ne prenait-elle pas de pause avant son service de nuit ? Il lui semblait que si pourtant. Son patron n'aurait pas osé la lui retirer sous couvert qu'elle s'était absenté plus tôt ? La Luxurieuse réfléchi quelques instants et déposa doucement le tableau au sol, contre le mur, avant de fouiller la chambre de la Déchue. Si sa mémoire était bonne, y était cachée la clé de la maison de poupée. Si elle n'y était pas, c'est qu'elle s'y trouvait. Alors un sourire se posa sur ses lèvres car, si elle s'y trouvait, c'était qu'elle avait quelque chose à cacher au monde. Après quelques longues minutes où elle commença à y croire, elle fini par mettre la main dessus. « Flûte. » laissa-t-elle échapper dans un souffle avant de ranger la petite clé rapidement en entendant la porte claquer. « Flûte ! » lâcha-t-elle à nouveau, pour une toute autre raison cependant cette fois-ci. L'Abjecto se précipita alors dans la salle principale pour accueillir la Déchue et essayer de ne pas se faire avoir en flagrant délit surtout. « Kyr !... Ah. C'est que toi. » fit-elle en arquant un sourcil sur un ton bien moins enjoué lorsqu'elle vît qu'il ne s'agissait surement pas de Kyra, mais de son Humain. Lui-même marqua un temps, en voyant la silhouette de la Luxurieuse apparaître, loin de s'attendre à la voir en ces lieux. « Dommage, hein ? » répliqua-t-il, un rictus ironique aux lèvres. Ses iris virèrent un instant vers la chambre de Kyra avant de revenir s'ancrer dans celles d'Oriane, qui n'avait pas bougé d'un iota depuis son apparition. C'était toujours la même lorsque les deux se trouvaient dans la même pièce. Surtout seuls. Ils étaient tels deux chiens de faïence, ou à l'égal de ces bêtes qui se défiaient les yeux dans les yeux, immobiles et aux abois, guettant le seul mouvement de l'autre pour s'attribuer une victoire. Pourtant un nouveau sourire cynique vint se glisser sur le visage de l'Obstiné tandis qu'il croisait les bras. « Personne ne t'as apprit à ne pas fouiller dans les affaires des autres on dirait. ». Une moue irritée se dessina sur le visage de la Déchue. De quoi se mêlait-il celui-là ? En plus Kyra lui avait déjà fait une remarque du genre, à croire qu'on la prenait pour une gamine ! « C'est pas dans les tiennes que j'ai fouillée, en quoi ça te regarde ? Qu'est-ce que tu sais si Kyra ne m'a pas donné l'autorisation, hein ? » rétorqua-t-elle sèchement en croisant les bras à son tour. Il arqua un sourcil, doutant clairement des propos de la Luxurieuse. Qui plus est, elle pouvait bien s'amuser à chiner, elle ne trouverai rien de bien palpitant. Quoi que... Après réflexion, il y avait bien une chose, si. Elle le remarqua d'ailleurs immédiatement et un large sourire se dessina sur son visage comme le Kaahi lui jeta un regard assassin en comprenant  que ses pensées l'avaient trahies.

Ce fut cet instant que Kyra choisi pour apparaître. Non pas par la porte d'entrée. Mais depuis un livre négligemment posé sur la table, ce qui attira la surprise des deux autres protagonistes présent. Toutefois, malgré leur expression, malgré son arrivée fracassante, et malgré son arrivée qui ne datait que de quelques secondes seulement, justifiant un manque total de connaissance de la situation, elle put clairement sentir la tension palpable dans l'air. En même temps, ce n'était pas bien difficile. Ça l'était toujours avec ces deux-là. Aussi passa-t-elle son regard de l'un à l'autre avant de prendre la parole. « Est-ce que je peux savoir ce qu'il se passe ? » - « Mais d'abord tu nous dis ce qu'il vient de se passer, tu veux ? ». La Petite Sœur posa son regard sur l'ouvrage à côté d'elle. « Hum. certes. ». Il était qu'elle n'avait mit personne au courant sur le pouvoir qu'elle avait acquis grâce à Tyr. Ce devait être surprenant. « Tu te souviens ? Je t'ai dis que j'avais une affinité particulière avec les contes ? » commença-t-elle à l'attention de Maximilien. « En fait je peux entrer dans les Contes et vivre l'histoire de l'intérieur. » - « Et tu peux interagir avec les personnages ? » demanda Oriane avec une curiosité non-dissimulée. Si elle avait su qu'il suffisait de ça pour apaiser les tensions entre les deux. « Probablement. Je n'ai jamais essayé. Ce n'est pas le but en même temps. Ce serait risquer modifier le Conte et c'est quelque chose de dangereux de faire ça. ». Malgré la disparition de Tyr, les habitudes restaient. « A votre tour. J'ai manqué quoi ? Encore. ».

Un soupir échappa à la Gourmande tandis que ni Oriane, ni Maximilien, n'expliqua ce qui avait pu se passer en détail. Elle pensait bien qu'il pouvait bien n'y avoir aucune raison particulière. Oriane n'avait jamais apprécié Maximilien et il avait fini par le lui rendre, rendant chaque rencontre électrique. Aussi préféra-t-elle abandonner ici. La vérité étant qu'Oriane ne se serait pas gênée à révéler qu'il taisait quelque chose. Toutefois, elle se doutait bien qu'elle en subirait le revers de médaille. Cela valait pour le Kaahi également. « Pourquoi tu es venue ? Tu avais quelque chose à me dire ? » fit La Petite Sœur à la Luxurieuse pour changer de sujet. « Oui ! » s'exclama-t-elle, le regard pétillant comme elle rejoint sa peinture pour poser la tranche sur la table et l'exposer au regard de son aînée, rejoint par Maximilien tout aussi intrigué. Kyra papillonna des yeux. Une petite Ygdräe rousse aux cheveux indomptables et en tenue d'aventurière enlaçait avec un sourire rieur et éclatant dévoilant toutes ses dents une jeune femme. Le mouvement laissait deviner qu'elle se jetait dans les bras de la seconde, plus grande, sa longue chevelure claire et lisse glissant jusque sa chute de reins sur un vêtement élégant, alors qu'elle réceptionnait l'adolescente tendrement. « Ce n'est pas... » - « Si. L'Ygdräe dont on parlait l'autre jour. Celle qui a gagné à l'épreuve des Ondins. ». La Petite Soeur posa son regard sur Oriane dont un mince sourire éclairait le visage à cette mention. « Je croyais que tu voulais une de ces peintures improbables ? » - « Les peintures improbables ? » questionna Maximilien. « Tu sais pas ? Quelqu'un s'est amusé à peindre des situations improbables ou gênantes inspirées du Fessetival. » - « Ah. » répondit-il seulement après un temps. « Tu te sens visés ? » fit alors La Petite Soeur, moqueuse. « Si c'est seulement inspiré, je crois que j'ai pas vraiment à m'en faire en vrai. » ironisa-t-il après un soupir. Oriane arqua un sourcil. « Bon, mais du coup, en quoi il est particulier ce tableau ? » - « En fait, c'est pour ça que je venais te voir. Quand je l'ai récupéré il était pas si adorable. En fait, il y a même autre chose. C'est pas le seul qui s'est transformé ! Celui que j'ai reçu de Léto, le premier nu. Ils l'étaient plus. Nus. » - « Comment ça ? » demanda Kyra en ouvrant des yeux ronds. « Ils étaient couvert, avec des vêtements. Et pas avec juste un poncho. Et c'était un baiser tout ce qu'il y a de plus chaste. C'était dingue ! ». L'Abjecto était entre jubilation de voir ses tableaux pouvoir se transformer à ce point et colère... Et bien, de voir ses tableaux muter autant justement. « Du coup je venais voir si c'était possible d'emprunter le tiens. Je voulais voir si ça le faisait qu'avec les miens ou si c'était à cause de celui-là, parce que comme par hasard ça arrive quand je le récupère. » - « Que je te prêtes le mien ? » répéta la Gourmande en arquant un sourcil. « Roooh, fais pas l'innocente. Je sais que t'en a fais un de nu aussi avec ton Humain. » rétorquait Oriane allant reposer la toile, ses bras commençant à s'engourdir. « Je suis pas encore sourd, tu le sais au moins. » - « Oui. ». Kyra leva les yeux au ciel. « Tu peux ramener tes toiles ? Comme ça on verra si c'est juste les tiennes ou seulement quelques unes qui sont touchés par un sort ou quelque chose dans le genre. » - « T'en a qu'une toi ! Pourquoi c'est pas toi qui rappliquerai ? » - « Parce que le manoir est grand. » fit La Petite Soeur tandis qu'apparaissait entre ses doigts une petite clé. « T'as un manoir toi ? » - « Oui. Même si en vérité là où je vais c'est pas tout à fait ça. Mais j'ai réellement un Manoir sinon. ». Bien qu'elle n'y allât pas souvent, ce lieu n'était pas des plus rassurant. Alors elle capta le regard de la Luxurieuse. « Qu'est-ce qu'il y a ? » - « Rien. J'y vais. » conclut-elle en quittant les lieux. Si elle avait su qu'elle cachait sa toile dans la maison de poupée alors qu'elle tenait la clé un peu plus tôt.

Lorsque Kyra revint dans l'appartement, peinture en main, elle intercepta le regard curieux de Maximilien, appuyé contre la table. « C'est encore dans un livre que t'as disparue ? » - « Non, pas cette fois. » fit-elle avec un sourire rieur. « Peu importe. » répliqua-t-il en balayant l'air de la main. « Regarde ça plutôt. » ajouta-t-il en montrant la peinture qu'Oriane avait délaissée au sol. L'Abjecto posa la toile et se tourna vers celle d'Oriane. « Ooooh. C'est drôle ça. » - « C'est pas ce que j'aurai dis. » rétorqua-t-il avec un sourire mi-figue, mi-raisin. « Non mais. Tu vois ce que je veux dire. ». La petite Ygdräe et la jeune femme était toujours présente sur la toile. Mais les deux se trouvaient dans une toute autre situation. La jeune Ygdräe avait été peinte avec des traits plus adultes, plus mâtures, pourtant on y ressentait toute l'innocence de sa jeunesse. La blonde paraissait soudain plus entreprenante, mais la douceur de son visage était toujours présente. Cette fois ce n'était pas la rousse qui se jetait sur sa partenaire. Comme apparaissant d'un coin de la toile, la Déchue, ailes déployées et habillée des seuls vêtements offert pour le défilé de sous-vêtement du Fessetival, surplombait avec grâce l'Ygdräe dans sa même tenue d'aventurière pour enlacer son cou avec volupté, la jeune Elfe tendant elle-même les bras pour y accueillir l'Ange Noir. Si des visages étaient visibles en arrière-plan, ils étaient couvert par l'ombre. Seules les deux jeunes femmes brillaient sur le tableau. Il n'y avait qu'elles et les autres n'existaient pas. C'était ce qu'il se ressentait du moins. Elles étaient suffisamment proche l'une de l'autre pour y voir la sensualité qu'avait voulu y dépeindre l'artiste, mais pas assez pour toucher au domaine de l'érotisme.

La porte détourna l'attention de Kyra et Maximilien de la toile vers Oriane qui en passait le pas. « Bon. Elle est redevenue normale. » commenta-t-elle en tendant sa représentation du couple de Léto. « Ce n'est pas la seule. » répliqua Kyra, récoltant un regard interrogatif de la part de la Luxurieuse. Elle lui indiqua alors la peinture d'un geste du menton. Oriane délaissa ses toiles prêt de l'entrée avant de s'approcher. « Ah ! Bah voilà, c'était ça que j'avais acheté ! » déclara-t-elle ravie. « Quand est-ce qu'elle est redevenue comme ça ? » - « Pas longtemps après votre départ à Kyra et toi. » répondit Maximilien. « Ah. Donc c'est ça. Une histoire de magie. » compléta-t-elle négligemment, sous-entendant clairement l'incapacité de l'Humain à en générer, au contraire. « Ça a l'air. Regarde, il commence déjà à changer. » trancha Kyra avant qu'un nouveau débat ne naisse. Oriane posa son regard sur la toile avant de le glisser sur les autres tableaux. Kyra et Maximilien firent de même. En effet. L'oeuvre mutait, et elle n'était pas la seule.