Alþjófr attrapait plusieurs gobelets et les posaient au centre de la table basse avant d'aller récupérer une bouteille de Baalga dont il rempli les contenant à moitié, chacun des Nains présent se saisissant d'un des gobelets à présent plein. « A la nôtre et nos premières armes ! » chanta en chœur le groupe avant d'avaler cul-sec la liqueur, l'un d'eux manquant s'étouffer à moitié en avalant de travers, ce qui arracha un rire du reste de la communauté. « Alors, c'est vrai que t'es allé En-Haut ? » interrogea Ánarr, s'adressant à son voisin tandis qu'Alþjófr servait une nouvelle tournée, ce que le concerné confirma d'un large sourire, un éclat dans le regard. « Allez, tu vas bien raconter comment ça s'est passé ? Est-ce que c'est comme on raconte ? » insista Dáinn alors que le sourire de Aurvangr, l'interrogé, s'élargissait à chaque paroles prononcées à son attention. « Il paraît aussi que vos maîtres vous ont également proposés de vous joindre à la prochaine expédition Alþjófr, Mótsognir ? » répondit Aurvangr à toute les questions qui lui furent posées. « Ouai, à notre tour on aura l'occasion d'esquiver toutes les questions qui concerne le Monde d'En-Haut. » répondit le dernier interpellé avec ironie en attrapant le gobelet devant lui, ce qui eut le mérite de déchaîner un éclat de rire du groupe. « D'accord, j'ai compris. » répliqua finalement le Nain, vaincu par la répartie de son camarade. Il but une gorgée de la liqueur avant de commencer son récit. « En vérité le monde n'a rien de ravagé par les flammes, comme ce qu'on peut raconter. L'extérieur est même luxuriant. On est resté aux alentours de Nidavellir. C'est là que j'ai pu voir à quoi ressemblait réellement une forêt. ». Tous s'étaient tût, buvant le récit de leur ami comme s'il leur racontait une légende épique. « Et à quoi ça ressemble ? » fit l'un des Nains, brisant le silence de la communauté. « Hum. C'est difficile à décrire lorsqu'on n'a pas vu. » répondit Aurvangr en se caressant sa barbe naissante. « Alþjófr, t'as de quoi dessiner ? » - « Je t'apporte ça. ». Une fois le matériel en main, le Nain commença à dessiner ce qu'il avait vu en plus de décrire oralement. « Il y avait des arbres à pertes de vue. Et leurs feuillages recouvrait nos têtes, on ne voyait pas plus ce Ciel si haut ou ce Soleil si brûlant qu'on ne peut le voir ici. La végétation y est dense, et c'est un tapis d'herbe qui couvre le sol. ». Les jeunes Nains avaient les yeux rivés sur le dessin. L'aventurier était comme un conteur qui employait des termes qui ne leur étaient connus que par les ouvrages qu'ils avaient pu lire et, de ce fait, ils avaient une vague idée de ce à quoi tout cela correspondait. Vague seulement. Ils auraient bien été incapable de donner une forme à ces "arbres" ou à cette "herbe" ou même dire lequel des deux était le plus grand. Et d'ailleurs, à quelle point ces choses étaient-elles grandes - ou petites - par rapport à eux ? Nombre de questions qui traversèrent l'esprit curieux et impatient d'Alþjófr.

Ánarr posa bruyamment son gobelet sur la table avant de prendre la parole « Hé, c'est bientôt ton anniversaire Alþjófr, je me trompes pas ? ». Celui-ci confirma d'un signe de tête. Les anniversaire étaient toujours des événements exagérément fêtés. Mais c'était toujours des moments de retrouvailles également, en famille, entre amis. Agréable en sommes. « J'imagine que Án a prit de l'avance, comme à son habitude. » fit Norðri avec un rictus malin à la commissure des lèvres. « Yup. » répondit simplement Alþjófr, comprenant à quoi le Nain faisait référence, se levant alors pour aller récupérer l'ouvrage offert il y a quelques jours à peine. « Oh ! Le Vólþruspa. ». Tous se jetèrent des regards complices. Sauf Alþjófr, posant un œil interrogatif sur chacun. « Quoi ? » - « Il est peut-être temps qu'on t'avoue quelques choses. » - « Quoi ? » répéta l'intéressé. Un sourire malicieux se dessinait sur le visage de chacun de ses comparses. « Tu savais qu'elle ne faisait ça qu'avec toi ? Offrir le cadeau en avance. ». Alþjófr fronça des sourcils. « Va pas me dire qu'elle ne vous offre rien pendant les vôtres d'anniversaire. Je te croirais pas. » - « Oh, si si. Mais discrètement. Elle ne veut... » - « Voulait, la pauvre on vient de la cramer, mais je crois qu'il était temps. » coupa Norðri dans un rire. « Ouai, elle voulait pas que ça tu saches que t'aies l'exclusivité. ». Le visage d'Alþjófr devint soudain bien plus rouge à cette révélation et, bien qu'en partie cachée par la barbe, cela ne passa pas inaperçu auprès de ses camarades qui le charrièrent pendant de nombreuses minutes.

La veille de son anniversaire, Alþjófr rejoint Mótsognir, tous deux prenant la direction de Nidavellir. Ils avaient encore en mémoire ce que leur avait raconté Aurvangr il y a quelques jours de ça. Les arbres qui montaient vers le ciel et les feuilles qui empêchaient le regard de voir ce dernier. Le Soleil brûlant pas si brûlant que ça finalement et le monde aux couleurs vertes qui les cerneraient. « Tu crois qu'on risque de rencontrer des créatures dangereuses ? » demanda Mótsognir au bout d'un temps. « Aurvangr n'en a pas parlé. J'imagine que non et que nos aînés font en sorte d'éviter que ça arrive quand des jeunes comme nous font leur première sortie de toute façon. » - « Probablement. » - « Moi je me demande si on croisera Embla. » ajouta Alþjófr un sourire rêveur aux lèvres. « Ouais, ce serait cool. » répondit son ami, l'accompagnant dans son air rêveur. Chacun imaginait dans son silence à quoi pourrait ressembler cette première sortie. On leur avait dit que ce serait principalement de la cueillette. Peut-être était-ce mieux ainsi. Ils n'étaient pas des plus dégourdis encore à l'épée contre leurs maîtres respectifs qui les ménageaient pourtant. Alors s'ils devaient chasser un animal sauvage, il était probable qu'ils n'y arrivent juste jamais et que ça finisse par être l'animal qui les chasse.

Lorsqu'ils sortirent de la Terre de Feu, les jeunes Nains papillonnèrent des yeux, adaptant leurs pupilles à la nouvelle luminosité. Aurvangr leur avait dit que le Soleil ne passait pas les arbres, pourtant sa lumière leur brûlait les yeux. Un sourire se dessina sur le visage de leurs aînés en voyant la difficulté d'adaptation des jeunes Guerrier d'Estella. « J'étais pareil ma première fois. On s'habitue ensuite. » fit Ginarr en donnant une tape dans le dos de son apprenti. « Allez, avance. On n'a pas la journée. » ajouta-t-il en le devançant. Alþjófr ne tarda pas à le suivre,  commençant par simplement observer ce qu'il faisait, où il allait et ce qu'il cherchait avant de prendre l'initiative et remplir son propre sac de baies, de champignons et autres plantes. Le fils d'Estella s'arrêta un instant au pied d'un de ces "arbres" et leva le nez pour en observer le sommet. « T'imaginais ça si grand toi ? » l'interrogea Mótsognir en se rapprochant de son frère. Alþjófr nia silencieusement d'un signe de tête. « Tu crois que le reste du monde est aussi grand ? » - « J'espère pas ! » - « Parfois des intrus viennent se perdre dans les environs. Vous aurez l'occasion d'en juger si ça arrive quand vous êtes de sorti. » fit Nípingr, le maître de Mótsognir, en posant une main sur l'épaule de ce dernier. Un frisson glacé couru le long de la colonne vertébrale des jeunes Guerrier d'Estella à ces paroles. « Oh. Montre voir ta cueillette ? » ajouta le Forgeron à son élève. Il se saisi de l'un des champignons. « Tout les champignons ne sont pas comestibles. Ceux-ci sont vénéneux. Laisse-les donc ici, on voudrait pas décimer tout un village pour une erreur de débutant. » conclu-t-il en jetant le champignon qu'il tenant entre les doigts par-dessus son épaule. « Mais. C'est les même que les tiens. Comment tu fais pour savoir ? » répliqua Mótsognir sur la défensive. Son maître attrapa l'un de ses propres champignons et l'offrit à son apprenti afin qu'il l'observe en détail. « Ah. » fit simplement ce dernier en voyant où était la différence. Un unique liseré brun, dessiné au sommet du pied. Il fallait l'avoir vu au moins une fois. Il ne l'avait pas remarqué quand son maître les avais cueilli. Il aurait pu lui dire aussi ! Sa mauvaise fois l'empêchait seulement de dire qu'il n'avait juste pas écouté, ce qui arracha un rire à son ami.

La sortie fut de plus courte durée que les jeunes Nains l'imaginèrent. « Pour limiter les risques d'être découvert. » leur expliquèrent leurs aînés. En effet, ça se tenait. Mais pour le coup, même s'ils restèrent dehors une bonne heure, ils n'eurent l'impression d'y être resté qu'une vingtaine de minutes seulement. La découverte et la nouveauté faisait passer le temps bien trop vite. Alþjófr profita du chemin du retour pour questionner son maître sur ce qui les environnait. La terre, l'herbe et le ciel. Les arbres et la canopée que leur branchage garni formait au-dessus de leur tête. Le Soleil, dont quelques rayons arrivaient avec difficulté à traverser cette dernière pour caresser leur peau. Les grillons et les papillons. Ce nouveau monde qui s'offrait à eux et qu'il rêvait déjà de revoir. « Est-ce que le monde est entièrement recouvert d'arbres comme ça ? Et du coup le ciel et le Soleil sont invisibles ? ». Ginarr nia d'un signe de tête. « Non, il y a différents environnements. Certains plus dangereux, d'autres plus cléments. Phoebe ne garni pas ces différents lieux de la même façon également. On ne trouve pas de champignons dans les plaines par exemple. » - « Les plaines ? ». L'apprenti fronça des sourcils. « Chaque chose en son temps petit. » lui fit Nípingr à quelques pas de là. « Apprends à connaître ce qui est comestible ou non pour commencer, avant de chercher à t'aventurer loin de chez toi. » ajouta le Forgeron en jetant une œillade à son apprenti, une lueur taquine dans le regard. Mótsognir n'eut pas besoin de le voir pour se sentir visé et prit immédiatement un air bougon. « Ça va, j'ai compris, tout ce qu'on cueille ne se mange pas. Puis te plains pas ! C'est pas moi qui te harcèle avec vingt questions la minute sur le monde extérieur ! ». Nípingr eût un éclat de rire à la réplique de son élève. « C'est pas faux ! Bonne chance Ginarr, ton apprenti semble bien curieux en effet ! » fit-il alors à l'attention de ce dernier en lui donnant une tape dans le dos. Cette fois ce fut Alþjófr qui se renfrogna tandis que son maître prit la parole. « Je devrais m'en sortir, je commence à avoir l'habitude. »