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 [Q] Le sort en est jeté | Kaahl

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Priam et Laëth
~ Ange ~ Niveau III ~

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◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam et Laëth
Mar 24 Déc 2019, 23:34



Partenaire : Kaahl.
Intrigue/Objectif : Puisque Jun a décidé de se transformer en Père Noël, Laëth se retrouve emballée dans un paquet, aux côtés d'un adorable chaton, et déposée chez Kaahl. Une entrevue un peu clandestine, puisqu'elle est supposée être en expédition, mais qui sera certainement l'occasion de remettre les choses à plat.

« Concentre-toi. » Laëth fronça les sourcils. Elle ne faisait que cela. La frustration, doucement, venait gronder dans sa poitrine. Tout son être exécrait l’échec. Il ne fallait pas céder ; elle ferma les yeux et souffla longuement, avant d’inspirer, plus posée. Lorsqu’elle rouvrit les paupières, elle focalisa toute son attention sur le bouclier qui se tenait entre elle et Adriel. Pulvériser. Son esprit dessinait parfaitement les contours éclatés de l’objet. Elle le détruirait – pour mieux le reconstruire par la suite, elle le savait. Le métal, doucement, commença à plier sous la force de sa volonté. Il était moins malléable que ceux sur lesquels elle avait travaillé jusqu’ici. Toutefois, ce début de réussite la galvanisa. Elle persévéra. La matière continuait de ployer mais ne cédait pas. Insatisfaite, elle se redressa, poings sur les hanches. « Comment tu fais pour le casser ? Je n’arrive qu’à le modeler. » L’Ange blond était immobile. Il ne la regardait même pas. « Hum. » De la pointe du pied, sourire mutin au coin des lèvres, elle tira dans un caillou, qui fusa jusqu’aux chaussures de son professeur. « Adrieeel. » Le marteau du silence frappa trois coups. « Adriel ? » Elle avait perdu son air taquin. Sourcils froncés, elle regarda autour d’elle en s’approchant de lui, juste de quelques pas. Le monde mourait dans l'immobilisme le plus total. Plus rien ne se mouvait. Une panique virulente monta dans sa poitrine et la tétanisa. Elle n’osait tellement plus bouger, coincée dans cet état où le cerveau se débat contre le corps, où le raisonnement bataille contre l’instinct de survie, qu’elle eut tout le temps de voir Jun Taiji s’approcher, souriant. Que faisait-il là ? Comment avait-il pu arriver jusqu’ici ? Que voulait-il ? A mesure que les questions se bousculaient, son regard s’assombrissait. Bien sûr, qu’elle se souvenait de lui. Elle ne prit pas la peine de répondre à sa question rhétorique, soit qu’elle ne fût pas encore remise de sa terreur passagère, soit qu’une autre, plus insidieuse et perverse, naquît tranquillement dans les creux de ses entrailles. Elle recula d’un pas, écrasée par sa prestance et les souvenirs qu’elle lui inspirait.

Toutefois, l’Ange n’osait pas le quitter des yeux – aurait-elle seulement pu l’ignorer si elle l’avait voulu ? Elle en doutait. « C-comment ? » Désormais, elle le dévisageait, à la recherche d’une explication. Sa pique, néanmoins, lui fit oublier ses paroles sibyllines. Elle fronça le nez. Elle lui aurait bien jeté un regard noir pour effacer cet horrible sourire de son visage, s’il ne l’intimidait pas tant, surtout dans cette situation. Si elle se fourrait dans un problème – comme elle savait si bien le faire –, personne ne viendrait à son secours. Le voir s’avancer lui donna envie de s’écarter, cependant, il dégageait un magnétisme qui l’en empêcha tout à fait. Ses iris acérés plantés dans les siens, la brune se contenta de soutenir son regard, jusqu’à ce qu’elle ne fût plus en capacité de le faire. Elle baissa les yeux. Elle n’osait pas lui demander ce qu’il voulait. Sans doute craignait-elle la réponse. « Adriel ? » fit-elle en relevant la tête. « Quoi ? Non, je-c’est-enfin- » Et puis qu’est-ce que cela pouvait bien lui faire, de toute façon ? Le contact de son doigt sur son menton lui fit serrer la mâchoire ; son bras autour de sa taille eut pour effet de contracter tous ses muscles. Cependant, elle l’écouta. Cet homme était complètement fou. S’il croyait qu’elle avait l’intention de le suivre bien gentiment, il se trompait, et… « Eh ! » Tous ses vêtements s’étaient évaporés. Quoique la pensée ne la traversât pas à cet instant, elle pouvait s’estimer heureuse du manque de pudeur des Réprouvés. Au moins, elle n’était en rien gênée. « Rhabillez-moi ! » Son rire pour toute réponse, son rire en écho à l’incompréhension qui tintait entre ses poumons. Les poings crispés, Laëth sentait la colère qu’elle avait chassée plus tôt revenir à la charge. Elle allait le… elle allait le… Elle n’allait rien du tout. Elle le savait. C’était très certainement ce qu’il y avait de plus agaçant dans cette situation. Il avait tout pouvoir. Elle n’était qu’une poussière sur son chemin. Est-ce qu’il allait…? Un frisson virulent griffa son dos.

Fort heureusement, lorsqu’il parlait, son imagination avait tendance à cesser ses fantaisies. Tout son esprit se concentrait sur ce qu’il disait. Elle comprit immédiatement à qui il faisait référence. Son cœur bondit comme un sauvage, vif et puissant. « Kaa-ha ! Reposez-moi ! » s’exclama-t-elle en se tortillant dans l’espoir vain d’échapper à son emprise. Il n’avait pas le droit ! Il n’en avait pas besoin. Elle n’avait pas conscience de sa véritable nature ; mais les êtres de son rang pouvaient se rire de la plupart des règles des mortels. Il lui suffit de prononcer quelques mots pour la calmer. Était-ce dû à l’autorité naturelle qui l'auréolait ou bien à son souhait inexistant de savoir ce qu’il pourrait lui faire endurer si elle continuait à gesticuler ? Sûrement les deux. Néanmoins, elle n’aurait pas pu se débattre longtemps : elle fut projetée sur un tissu velouté, eut le temps de voir un chaton apparaître devant elle, sentit un tissu se nouer autour de son cou, puis tout devint noir, et le « Jun ! » offusqué qu’elle lança se perdit dans les méandres de son voyage spatial.

***


Les espaces restreints disposaient d’un pouvoir terrible. Pouls qui s’emballe, respiration qui halète, sueur sur les tempes, cerveau paniqué. Laëth n’était pas faite pour vivre comme une bête en cage, et c’était tout son organisme qui paraissait crier son désaccord dès lors que l’exiguïté se refermait sur elle. Elle avait besoin de grands espaces ; des étendues infinies où vibrait la vie. Les lieux clos l’angoissaient. La peur tambourinait aux portes de son esprit. Elle se sentait prise au piège, sans aucune échappatoire. Condamnée. « Respire, respire... » se répétait-elle en essayant de contrôler son souffle. Elle ne voulait même pas tâter les limites de sa prison : ne pas savoir où elles se situaient, c’était un peu les nier, leur interdire d’exister. Elle déploya sa magie pour s’absoudre de ces épouvantables sensations. Pas de peur, pas de panique, juste de la sérénité et de l’ordre. Elle tenta d’appliquer cela à ses pensées empêtrées. Jun. Kaahl. Enfermée dans cette boîte, l’Ailée songeait qu’il n’y avait plus de doute permis quant au fait que les deux hommes se connaissaient. C’est intéressant, je trouve, que vous ne fassiez vraiment pas le lien. Le lien. Elle revoyait leurs visages et, lentement, une autre forme de malaise engourdissait son estomac. Les mêmes traits fins, les mêmes cheveux bruns, les mêmes yeux noisette. Cela ne l’avait jamais frappée. Il fallait préciser que la dernière fois qu’elle avait vu le Prince des Cauchemars, elle essayait de ne pas fondre en larmes et de ne pas se rouler en boule à même la neige. Elle n’avait pas véritablement eu l’occasion de le regarder. Mais cette fois-ci... La ressemblance était évidente. Qui était-il pour le Mage blanc ? Un frère ? Un oncle ? Un père ? Il lui aurait menti…? Ou bien ne le savait-il pas la dernière fois qu’ils s’étaient vus ? Peut-être qu’il préférait le cacher…

Un coup râpeux sur son nez la tira de sa réflexion. Elle sursauta doucement. Elle avait presque oublié la présence du chaton. Le petit animal ronronnait. Il recommença à la lécher et tapota délicatement sa joue du bout de sa patte duveteuse. Un sourire détendit la figure pincée de la jeune femme. « Arrête. » Le bébé chat poussa un miaulement faible. Dans l’obscurité, elle le sentit se rapprocher. Sa fourrure soyeuse caressa son menton. Il vint se blottir contre elle, lové dans son cou. Ce mouvement, comme s’il avait rompu un accord tacite, mit fin à l’inertie qui enlaçait l’Ange. « On ne va pas rester là toute la journée, hein. » Allongée sur la tranche, elle leva le bras et frappa du poing contre le haut du paquet. C’était étonnamment solide. Elle n’aurait pas pu en sortir par ses propres moyens. Cette pensée manqua de la faire défaillir ; une poussée magique la rappela à l’ordre. « Kaahl ? » Silence. « Si vous pouviez me sortir de là… » Peut-être n’était-il pas là ? « Je ne trouve pas ça très drôle. » Et si elle devait attendre des heures enfermée dans cette boîte ? « S’il vous plaît. » Comme pour appuyer sa demande – et dans ce qui aurait presque pu être une imitation –, le chaton couina. Toujours aucune réponse. L’Ange adopta une moue embêtée. « Bon. » Elle soupira. Peut-être qu’elle parlait toute seule, ou que Jun n’avait pas du tout expédié ce paquet au Magicien. Peut-être qu’il l’observait, un rictus aux coins des lèvres. Un goût amer gicla sur sa langue. « Je commence à en avoir franchement marre de me faire malmener comme un jouet, alors je vous prierais d’ouvrir cette boîte avant que je ne m’énerve vraiment, s’il vous plaît. » Il serait certainement capable de la mettre hors d’état de nuire avant même qu’elle ne pût esquisser un geste menaçant, mais peu importait. D’abord, parce qu’elle voulait juste susciter une réaction, même un « non » contre lequel elle pourrait s’insurger ; ensuite, parce que faire face à sa vulnérabilité n’était toujours pas son activité favorite. Et puis, comme le disait si bien Priam, ce n’était pas la conscience du risque qui l’étouffait. Saisie d’un accès de colère, Laëth tambourina du poing contre le haut du coffret, à s’en faire mal aux joints métacarpiens. Apeuré, le chaton émit un pleur aigu. « Oh, désolée. » murmura-t-elle en caressant la tête du petit animal du bout de son index, le cœur enrobé d’une tendre culpabilité.

Message I - 1590 mots
Joyeux Noël ! Signé : les lutins Me, Myself and I [Q] Le sort en est jeté | Kaahl 1219463048




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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Sam 28 Déc 2019, 23:58



Le sort en est jeté



Gustine s’était levée un peu plus tôt. La journée allait être remplie d’activités et elle devait tout préparer. Enjouée, bien que pressée, elle s’arrêta un instant à une fenêtre lorsque son regard fut attiré par un éclat de magie bleue. Elle observa ce qu’il se passait dans la cour avec un petit sourire attendri. Elle ne pouvait néanmoins pas s’empêcher de s’inquiéter pour moi. Utiliser les armes et la magie n’était pas sans risque et l’homme qui était mon adversaire n’était pas réputé pour être tendre. Maxus Vaughan était une force de la nature. En plus de savoir se battre, c’était un mage compétent. Tous les deux en armure, nous nous faisions face. Il m’entraînait. Ma douleur à la jambe ? Il n’en avait rien à faire. Il n’était pas là pour faire dans le sentimentalisme. Je fis apparaître rapidement une épée dans ma main. Une rafale de vent s’en échappa puissamment pour contrer le brasier qu’il venait de m’envoyer dessus. Je me téléportai pour apparaître dans son dos et traçai un pentacle qui le propulsa un peu plus loin. Je ne vis que trop tard qu’il s’était dédoublé. Un courant électrique secoua mon corps. Je serrai les dents. « Sans magie. » dit-il. Nous alternions depuis le début des phases de magie et d’autres sans.

Je me dirigeai rapidement vers une malle en bois pour reprendre mon arme d’entraînement que j’avais posé dessus à la fin de la précédente manche. Il fit de même. J’arrivais à corriger mes erreurs de positionnement petit à petit. J’aurais été meilleur sans cette douleur qui m’arrachait parfois un grognement essoufflé. « Vous devriez vous soigner. » m’avait-il dit, un peu plus tôt. J’aurais aimé pouvoir le faire. Ce n’était malheureusement pas possible et j’étais sûr de boiter le reste de la journée. Seulement, j’étais têtu. Je n’avais pas envie de me reposer. J’avais envie de devenir meilleur. Je m’élançai donc vers lui, maintenant ma garde autant que je le pouvais. Il avait rapidement remarqué que je manquais parfois de prudence. Ça l’avait étonné venant de moi mais je prenais des risques. Ce n’était pas des petits risques mais lorsque je réussissais à faire ce que je souhaitais, il se retrouvait en une fâcheuse position. Je n’étais pas un élève exemplaire, je me précipitais trop, mais il ne pouvait pas nier mes facultés. J’apprenais vite. J’étais juste imprudent. Il n’était pas le premier étonné. Le fait est que le combat m’aidait à évacuer la rage qui bouillonnait dans mon ventre. Aussi, lorsqu’il me désarma, je pris sa lame à pleines mains pour la rejeter plus loin à mon tour. Nous ne pouvions pas nous entailler avec celles-ci. Heureusement. Par terre, j’essayai de l’immobiliser. Il n’eut qu’un mouvement bref à faire pour me tordre le bras et inverser la tendance. « Magie. » prononça-t-il, en créant une arme qu’il propulsa en ma direction depuis les cieux. Je parai avec une autre arme, créée par mes soins, avant d’utiliser le contrôle du tissu pour dégager son corps de sur le mien. Je me relevai.

Nous avions déjà évoqué ensemble le fait que je manquais clairement de maîtrise dans les magies offensives. Il m’avait conseillé de corriger ça, sans quoi je me retrouverais rapidement en difficulté. Il n’avait pas tort, en théorie et avec ce qu’il savait. En réalité, Lux in Tenebris pouvait venir à bout d’un homme en peu de temps, sans mentionner la Valse Destructrice qui me permettait à présent de détruire la matière et donc son armure et ses armes, le sol aussi. Pourtant, malgré ça, je savais qu’il avait raison. J’étais nu s’il fallait attaquer rapidement. Avoir un pied chez les Lyrienns me permettrait sans aucun doute d’apprendre leur magie. Je devais me perfectionner. Je ne pouvais pas compter uniquement sur les pentacles et la télékinésie. « On arrête. » décréta-t-il après m’avoir envoyé le pommeau de son épée en plein dans le ventre après avoir fait se déplacer le cuir qui me protégeait. Le souffle coupé, il me fallut quelques instants pour récupérer. J’étais en sueur, les joues brûlantes. Le froid ambiant ne m’atteignait plus depuis longtemps, même si je le sentais via l’air qui sortait douloureusement de ma gorge et qui s’élevait en fumée autour de moi. « Vous vous êtes bien battu même si je vous déconseille de reprendre une arme avec vos mains comme vous l’avez fait. Quand elle est en bois ça va mais ne prenez pas de mauvaises habitudes. » Les mains sur les genoux, j’étais un peu penché en avant. Il posa l’une de ses mains sur mon épaule. « Merci Maxus. » lui dis-je. « De rien. » Il me sourit avec un air satisfait.


Un grand sourire égayait les traits de Gustine. La vieille Magicienne avait quitté la fenêtre quelques minutes plus tôt pour tout préparer. Elle n’aimait décidément pas me voir en train de me battre. Chaque coup donné par mon adversaire lui arrachait un frisson de crainte. Elle avait, bien sûr, remarqué que je boitais légèrement depuis quelques temps. Elle était fière que je m’investisse dans ce nouveau projet et avait même commandé quelque chose pour moi, pour m’aider, mais ça l’inquiétait. Elle s’approcha du sapin et replaça quelques boules et guirlandes en chantonnant quelque chose de doux pour se changer les idées. Nous devions aller voir les orphelins du Duché un peu plus tard et, ce soir, nous dînerions autour d’une grande table joliment décorée. Elle avait déjà tout mis en place mais elle devait encore accrocher les chaussettes à la cheminée et faire le gâteau. Son mari n’était pas présent au domaine. Il était parti visiter sa famille sur les Terres du Lac Bleu. En pensant à lui, une expression tendre habita son visage. Elle avait hâte qu’il revienne. Elle aurait certainement fini de lui tricoter son pull. Il serait beau dedans et il aurait chaud lorsqu’ils iraient se promener de nouveau ensemble. Avec les années, la collection de l’homme remplissait une armoire entière. Un jour, elle avait tenu à tous me les montrer, notant qu’elle avait fait des progrès depuis leurs années aux Palais de Coelya. Ils étaient en couple depuis tellement longtemps. Une confiance absolue régnait entre eux.

Gustine s’approcha du couffin où se trouvait le nourrisson qui était apparu quelques jours plus tôt. Je m’étais déplacé afin de faire les démarches nécessaires à son adoption. Rosalie était en train de jouer avec un petit sac magique. Il faisait de la musique lorsque le bébé le bougeait un peu, une musique légère et enjouée. La Magicienne avait tout de suite compris que je m’étais attaché à l’enfant et que j’allais la garder avec moi si je le pouvais. Comme j’aimais la musique, elle s’était déplacée en ville pour aller acheter des jouets comme celui-ci. L’attention m’avait touché.

Alors qu’elle allait partir dans la cuisine, elle crut entendre une voix. Elle se retourna et vit un énorme cadeau. Il n’était pas là avant, elle en était certaine. Elle avait vu beaucoup de choses étranges dans sa vie. Aussi, elle s’approcha, se demandant si le sapin n’attirait pas les présents. Excitée, elle tendit l’oreille. Quelqu’un était à l’intérieur. Elle entendit vaguement un s’il vous plaît implorant. La Magicienne se leva sur la pointe des pieds afin d’essayer de voir comment est-ce que tout ceci pouvait bien s’ouvrir. Quelque chose tapait depuis l’intérieur. Elle espérait que ce ne fût pas une mauvaise farce. Les étudiants étaient parfois taquins et pouvaient très bien avoir enfermé l’un de leur camarade dans ce cadeau. Pourquoi était-il ici alors ? Ça, elle n’en avait aucune idée. À peine posa-t-elle ses doigts sur le ruban qui recouvrait le tout que la boîte s’ouvrit. Les yeux de la petite vieille regardèrent à l’intérieur. « Oh par Suris… » murmura-t-elle lorsqu’elle aperçut une demoiselle nue comme un nouveau-né, un ruban autour du cou. C’était totalement inattendu. « Est-ce que… Oh la la… Je vais vous donner quelque chose pour vous couvrir, vous allez attraper froid sinon ! » s'exclama-t-elle en se dirigeant vers le canapé pour y attraper le plaid qui me servait de couverture lorsque je lisais dessus. Gustine n’aurait pu se douter qu’il s’agissait de Laëth. Elle la connaissait de nom, bien sûr, mais elle ne l’avait jamais vue. En étudiant la situation, il lui apparut que ce n’était pas une farce étudiante qui me visait. Cette jeune fille avait l’air bien perturbée.

Gustine utilisa sa magie pour créer une sortie dans le paquet. Ce fut à cet instant qu’elle vit le petit chat, qui s’échappa du cadeau. Elle le mit de côté pour le moment. « Ma petite fille, qu’est ce qu’il vous est arrivé ? » s’enquit la Magicienne, un peu inquiète.

J’avais enlevé le haut de mon armure en cuir. Il me fallait prendre un bain de toute urgence. Torse nu, je fis pivoter la poignée de la porte du salon, commençant une phrase qui se termina bien vite. « Gustine est-ce que vous pouv… » Je m’arrêtai. Mon regard se posa sur Laëth une seconde mais ne s’y arrêta pas plus, mon attention bien vite obnubilée par le monstre qui se trouvait dans la pièce. Je me raidis, fis demi-tour sans rien dire de plus et refermai la porte dans un claquement fébrile. Dans le couloir, je me mis à marcher sans trop réfléchir, fuyant vers la salle de bain sans m’arrêter.

Dans la pièce, Gustine se mit à rire. « Excusez-le. Ce n’est pas vous qui l’avez effrayé. » Elle se baissa pour attraper le chaton. « C’est cette petite boule de poils. » La vieille femme se mit à parler avec le chat. « Oh mais tu n’es pas effrayant du tout, ne t’inquiète pas. Non non non. Tu es un très très joli petit chat. Seulement, le Baron n’y peut rien ! C’est comme ça ! » La Magicienne reposa le chat par terre. Elle se dispersait vite. Elle regarda Laëth de nouveau. « J’espère qu’il ne vous est rien arrivé de fâcheux au moins… Quelqu’un vous a fait des misères ? Vous n’avez pas été… agressée, n’est-ce pas ? » La possibilité venait de lui traverser l’esprit et elle se trouva horrifiée de ne pas y avoir pensé plus tôt. « Mon petit, vous pouvez me le dire si quelqu’un vous a fait du mal ! Nous pouvons aller voir les autorités. Kaahl ne lâchera pas l’affaire avant que justice soit faite, croyez-moi ! N'ayez pas peur de parler. Je vais vous aider, je ne vous veux pas de mal. » Rosalie gazouillait tranquillement. Quant à moi, je m’étais dévêtu et avais plongé dans le bain en essayant de clarifier la situation. De toute façon, il était impensable que je reste couvert de sueur, dans cette crasse affreuse. Une fois que je serais propre, je verrais.

1763 mots
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Priam et Laëth
Dim 05 Jan 2020, 00:05



C’était Gustine. Le visage jovial ; joues rebondies et rosées, yeux pétillants, chignon noué avec une rapidité et une coquetterie qui rendait le tout attendrissant. Laëth ne dit pas un mot. Elle tenait le petit chat contre son cou. La lumière venait nimber son visage, et chaque coup de langue du soleil insufflait un air nouveau à ses poumons compressés par l’angoisse et la colère. D’une main ferme, elle sortit le chaton de sa cachette et le déposa près d’elle, dans le paquet. Elle se redressa ; un frisson dû au froid, ou à ses émotions enfermées dans une petite boîte et secouées, chamboulées, ébranlées, courut de sa nuque à son bassin. Elle regarda la vieille Magicienne, qui se précipitait vers un canapé pour saisir une couverture posée dessus. D’un rapide coup d’œil, elle remarqua que sous la montagne de décorations où se battaient des nuances rouges, vertes, blanches, or et argent, la pièce était épurée. Tendant les bras, Laëth réceptionna le plaid et s’enroula dedans. Si jamais elle avait eu un doute quant au propriétaire du salon dans lequel elle se tenait, il se serait évanoui : l’odeur de Kaahl se cramponnait au tissu. Ses poings se refermèrent dessus et elle serra les dents. Basculant à genoux, elle entreprit de se relever. Ce qu’il lui était arrivé ? Elle aurait certainement eu une réaction trop brusque si l’inquiétude de Gustine, et l’affection qu'elle suscitait malgré elle, ne lui donnaient pas envie de la rassurer. Elle avait toujours été comme cela ; face au vulnérable, son ire mourait à l’ombre de son empathie, et elle offrait toute sa compassion. Elle allait faire taire les doutes qui tenaillaient la Mage Blanche lorsque la porte s’ouvrit sur un Kaahl empressé. Les yeux de Laëth tombèrent sur son torse nu. Il s’était musclé depuis la dernière fois, signe qu’il poursuivait son entraînement militaire. Lorsqu’elle releva la tête vers son visage, elle y lut la terreur, le temps d’une seconde. La porte se referma et il disparut. Ah. Très bien.

De surprise, elle avait lâché le contrôle qu’elle exerçait sur ses émotions ; elles remontaient doucement à la surface de ses ventricules, dévorantes et cruelles. Elle inspira et bloqua sa respiration. Ne pas se laisser submerger, ne pas se laisser submerger, ne pas se laisser submerger. Reste calme, ne t’énerve pas. Ne pas exploser ; à la limite, imploser, plus tard. Tout se relâcha au son de la voix de Gustine. « Comment ? » Ses iris verts coururent jusqu’au chaton. Réta. Le souvenir de la Sorcière la frappa de plein fouet. Réta avait dit qu’il avait peur des chats. Kaahl avait parlé d'un frère. Soubresauts et bouillonnement ; les sentiments tourbillonnaient et se torpillaient mutuellement. Aussi désagréable, décevante et surtout repoussante que fût cette conclusion, elle était implacable. Il avait menti. C’était l'avantage des émotions ; elles trahissaient cent fois, elles ne mentaient jamais. L’Ange plissa les yeux, à la recherche d’une explication qui pût faire sens. Son impatience s’imposa rapidement : elle lâcha la bride de l’impulsivité. Elle prit une décision : lui demander droit dans les yeux serait bien plus rapide. Toutefois, elle se tourna vers la gouvernante et essaya de réunir tout le calme et toute la sympathie dont elle était encore capable. « Non. Ça va. » Elle lui sourit avec amabilité. Le sourire se crispa peut-être un peu trop sur le bord de ses lèvres. Tout son corps se tendait sous l’assaut émotionnel. « C’est gentil de vous inquiéter, merci, mais ne vous en faites pas. Vous êtes Gustine, c’est ça ? » Elle correspondait exactement à l’image mentale qu’elle s’était construite. La jeune femme tenta de se raccrocher à ses prunelles brillantes pour retrouver sa sérénité. « Je suis Laëth. » Elle connaissait nécessairement son nom ; si Kaahl ne lui en avait pas parlé, les rumeurs, dans leur course au scandale, avaient fait leur œuvre. Elle pouvait désormais y associer un visage, beaucoup trop crispé par les pensées qui cogitaient derrière. « Pour tout vous dire, c’est votre Baron qui me fait des misères. » Un rictus amer frémit sur sa bouche tandis que son cœur continuait à se maquiller de colère. Cependant, un gazouillement troubla son état. Elle se tourna et vit un berceau. « Qu’est-ce que... » Comme elle s’approchait, elle découvrit un visage poupon. Oh. Ah. Le bébé tapa dans le petit sac qui surplombait son couffin et une musique cristalline s’en éleva. Laëth resta interdite quelques instants, le regard rivé sur celui de l’enfant. « Alors finalement, il a adopté ? » C’était une question rhétorique. Kaahl lui avait fait part de son envie d’avoir des enfants ; et son désir d’assurer sa descendance n’était, de toute évidence, plus un secret pour personne depuis que la quasi-totalité des habitants de ces terres avait cru que ses formes s’arrondiraient dans les mois à venir. A ce souvenir trop frais, elle pinça les lèvres. « Où est-il ? » Sans prendre la peine d’attendre la réponse – en adressant, toutefois, un « désolée » de circonstance à Gustine –, elle fit volte-face et, drapée dans la couverture, sortit du salon. Elle marchait d’un pas vif, sans se soucier d’être vue – le spectacle d’une jeune femme vêtue d’une simple couette et déambulant dans les couloirs de la demeure du Baron devant être plutôt atypique. C’était un accoutrement encombrant : si elle n’avait pas craint le froid et de choquer la vieille Magicienne, elle l’aurait laissé tomber. Quitte à faire jaser les commères : qu’elles eussent une bonne raison de le faire, cette fois-ci ! Laëth ouvrait chaque porte à la volée et les claquait derrière elle. La boule d’énergie gravitait à travers l’habitation. Ce qui la propulsait, c’était une rage froide ; présente et tranchante, glacée par un semblant d’imparfaite maîtrise.

La chaleur souffla agréablement sur sa figure. Il était là, dans son bain. Laissant la porte ouverte, l’Aile Blanche se dirigea vers le Magicien, jusqu’à se planter face à lui, les pieds ancrés dans le sol. Le plaid s’ouvrait, dévoilant un peu sa jambe gauche et sa tranche. « Vous me prenez pour une imbécile ? » l’apostropha-t-elle. Son ton était sans doute trop mesuré pour qu’il ne devinât pas qu’elle exerçait autant de contrôle que possible dessus. Laëth ne voulait pas se laisser déborder. Déterminée, elle plongea son regard dans celui du brun ; ses yeux dans les siens, elle se sentit perdre pied. Ses prunelles se troublèrent ; la glace fondait doucement dans des flammes. Son palpitant frappait comme un fou et son sang galopait furieusement dans ses veines. Le monde tanguait, comme si toutes les ondes sensibles valsaient de concert. L’Ange dut cligner des paupières plusieurs fois pour conserver sa contenance. Elle resserra le poing autour du tissu qui la couvrait et releva le menton, tant défiante que méfiante.

Message II - 1107 mots




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Dim 05 Jan 2020, 02:16



Le sort en est jeté



Gustine resta silencieuse un instant après le départ de Laëth. Un petit sourire germa néanmoins sur son visage. Elle trouvait tout cela très intéressant. Elle comprenait pourquoi la jeune femme plaisait au Magicien. Le calme de Kaahl entrait en contradiction parfaite avec la fougue de leur invitée surprise. C’était comme mettre en présence la glace et le feu. La vieille femme présageait qu’il allait vivre un instant difficile et ça l’amusait de l’imaginer essayer de se justifier en vain. Il n’était pas de ceux à perdre leurs moyens mais qui sait ce que l’Ange pouvait provoquer chez lui. Elle finit par rire gentiment. « Ah la la, la jeunesse. » commenta-t-elle en s’approchant de Rosalie.

L’eau chaude m’apaisait. Je savais que ce ne serait que de courte durée. Je ne pourrais ignorer la présence de l’Ailée bien longtemps. Je fermai les yeux, inspirai et expirai. Elle tombait mal. Sa présence ici, en compagnie de ce chat, ne faisait aucun sens. Je détestais les imprévus. Je serrai les dents, incapable de prendre une décision. Je revis ces quelques secondes. Laëth était devant un paquet géant. Elle portait l’une de mes couvertures et était sans aucun doute nue sous cette dernière. Gustine avait dû la lui donner. Quelque chose n’allait pas. Il n’y avait aucune logique à cette scène. Elle ne serait jamais venue de son plein gré et complètement dévêtue. La Terre d’Iyora était loin. Elle aurait pris la peine de m’écrire pour me signaler sa venue. Pourquoi ce chat ? Ça ressemblait à un traquenard. Je pouvais imaginer mille scénarios. Aucun n’avait un semblant de sens. Je devais réfléchir et vite. L’Ange n’attendrait pas bien sagement avec Gustine. Je présageais qu’elle me chercherait. Elle voudrait discuter et, têtue comme elle était, s’il fallait qu’elle visite chaque pièce du château pour me trouver, elle le ferait. Combien de chances y avait-il pour que la vieille Magicienne lui ait expliquée ma réaction à la vue de l’animal ? Trop. Je ne pourrais pas m’en sortir aussi aisément que la dernière fois. Pourtant, je ne lui avais pas dit expressément que je n’étais pas phobique, simplement que Réta devait parler de l’un de mes frères. Une phobie pouvait être partagée. Un instant, je pensai à faire intervenir Ârès d’une façon ou d’une autre mais je n’avais pas assez de temps pour lui expliquer la manœuvre. Il n’était pas prêt, dans tous les cas. Plus tard.

Je pouvais entendre l’Ange se rapprocher. Elle faisait un tel raffut qu’il aurait été possible de la confondre avec un troupeau de bicornes. Aucun doute, elle venait bien de Lumnaar’Yuvon. Je me retins d’esquisser un sourire. Si elle me trouvait moqueur dans mon bain, ma sentence serait sans doute bien pire. D’un autre côté, j’avais envie de briser son élan. J’inspirai une nouvelle fois, profondément, juste avant que la porte ne pivote. Je me redressai un peu à sa vue, un mouvement qui pouvait être interprété comme étant celui de la surprise. « Non, pourquoi ? Je devrais ? » répliquai-je immédiatement. Si elle pensait qu’il ne m’arrivait jamais de me renfrogner, elle allait être déçue. C’était rare mais, vu les circonstances, il me semblait normal de réagir de cette façon. Elle avait fait irruption chez moi sans prévenir, nue et m’avait poursuivi jusqu’à ma salle de bain. « Qu’est-ce que vous faites ? » demandai-je alors sans spécifier ce que j’entendais par là. Elle essayait de se contrôler. J’étais trop habitué à manipuler mes propres émotions pour ne pas le remarquer. Aussi je me demandai soudain ce qu’il se passerait si elle arrêtait son manège. J’eus cruellement envie de la pousser à bout. Il fallait que je refrénasse mon désir.

Je me relevai, visiblement pas gêné le moins du monde par ma nudité. Ça commençait à devenir habituel entre elle et moi. Je l’avais d’ailleurs vue plus de fois nue qu’habillée, comme si les convenances s’écrasaient à notre passage. Ça ne me déplaisait pas, loin de là. Je quittai ses yeux pour la détailler davantage, mon regard se posant sur sa jambe dénudée. Je n’allais pas nier l’évidence : j’appréciais le fait qu’elle soit un minimum vêtue quand même. C’était plus tentant à bien des égards. J’aimais qu’elle porte mes affaires mais j’avais envie de les lui ôter paradoxalement. Je remontai sur son visage et sortis de l’eau, mes pieds mouillant le tapis. « Ça vous arrive souvent d’apparaître chez les gens nue et de les poursuivre jusqu’à leur salle de bain ? » fis-je, avec une pointe d'agacement dans la voix. Mes yeux, pourtant, semblaient avoir envie de la dévorer. Je m’approchai, lentement, tout en essayant de ne pas trop appuyer sur ma jambe droite. Nul doute : si quelqu’un l’avait surprise à déambuler ainsi chez moi, les rumeurs n’en seraient que davantage décuplées. Sa présence ici n’avait pourtant toujours aucun sens. Je m’arrêtai à une distance déraisonnable. J’étais très proche, trop. Un instant, mes lèvres s’entrouvrirent, comme si je m’apprêtais à ajouter quelque chose mais elles se refermèrent aussitôt. Je tendis la main en direction du meuble où se trouvaient les serviettes, pliées par taille et par couleur. L’une d’elle fila pour rejoindre mes doigts qui se refermèrent sur elle. Je fis un pas en arrière et passai le tissu dans mes cheveux. « J’aimerais comprendre ce que vous faites là. » finis-je par dire tout en me séchant les bras et le torse. Quand j’eus fini, j’attachai le tissu autour de ma taille et quittai notre proximité pour de bon pour me diriger vers un meuble surmonté d'une glace. Mon reflet n’apparaissait pas dans le miroir, victime de la chaleur ambiante. Je pris le peigne qui se trouvait là et l’utilisai pour me coiffer. « Ensuite, on verra pour vous habiller avant que... » Je m'interrompis. « Enfin, j'imagine que ça ne pourra pas être pire, de toute façon. » Je faisais référence aux rumeurs sur notre compte. Même si on nous surprenait dans une position fâcheuse, ça ne changerait strictement rien aux bruits qui courraient.

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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Lun 06 Jan 2020, 00:33



« Bien sûr, tous les jours, c’est mon passe-temps favori. » ironisa-t-elle. Ses rétines émeraude crépitaient d’insolence. Il n’y avait jamais eu ce genre de jeux, entre eux – en tout cas, pas comme cela. Ils avaient testé d’autres limites. Elle n’avait jamais cherché, consciemment ou non, les barrières qui contenaient son agacement. S’énervait-il seulement, parfois ? Il n’avait pas la réputation d’être un homme sanguin. Cependant, ses dernières mésaventures avaient enseigné à l’Ange que ce qui se dit ne doit pas être confondu avec ce qui est. Les langues savaient créer bien des illusions et cacher d’autres chimères. Peut-être qu’elle avait envie de le pousser à bout, cette fois. C’était sans doute idiot – elle s’en fichait. Elle ne pensait pas une seule seconde qu’il s’en prendrait méchamment à elle. Il y avait ce problème aussi, celui des êtres qui brûlent. Ils ne parviennent pas à s’accommoder du calme qui peut répondre à leur colère ; ils veulent des mots durs, des œillades acérées, des blessures et des plaies. Du combustible. Une raison de poursuivre ou de justifier leur état d’enragé. Tout sauf ce vide qui renvoie l’écho insensé de trop d’ires. Tandis qu’il s’approchait, elle remarqua qu’il peinait à déplacer sa jambe droite, mais l’inquiétude perça à peine sa poitrine, son pouvoir faisant son effet. Relevant la tête, elle scruta les yeux du Mage. Ses désirs contradictoires se mêlèrent à sa volonté de ne pas faillir, quand soutenir son regard devenait de plus en plus insupportable. Elle avait à la fois envie de se détourner, de lâcher la couverture pour mieux lui sauter au cou, de le repousser dans son bain pour ne plus voir cette figure qui lui soulevait le cœur de bien des manières, et de faire peser sur lui les reproches qu’elle retenait alors. Peut-être devrait-elle céder à chacune de ces pulsions ? Pas nécessairement dans l’ordre énoncé. Elle fronça le nez. Non. Ou juste une, parce qu’il se tenait beaucoup trop près. Il aurait suffi de moins d’une enjambée, moins d’une oscillation. D’une main levée, elle aurait pu toucher ses cheveux, sa peau, ses lèvres. Non. Elle recula d’un pas. La serviette qui siffla près de son oreille lui permit de se défaire de l’accroche de ses prunelles sans perdre la face.

Laëth rajusta le tissu qui la couvrait. S’il se déplaçait à travers la pièce, elle restait gainée au même endroit. Seule sa tête pivotait pour suivre ses mouvements. Elle commençait à éprouver des difficultés à encager ce qu’elle ressentait. Ses émotions tressautaient, vives et bientôt trop impétueuses pour qu’elle leur résistât. Il lui restait encore tant de chemin à parcourir avant de pouvoir prétendre les maîtriser. Elle serra les poings et les dents. Elle y arriverait. Il le fallait. Thadrias avait raison : les guerriers ne pouvaient pas se permettre d’être malmenés par leurs cœurs débridés. Ils devaient faire preuve de discipline. Rien n’échappait aux plus fines lames ; leurs pensées encadrées s’adaptaient aux imprévus avec une dextérité effarante. Ces idéaux peuplaient l’imaginaire de la jeune femme. Lorsque, ces images en toile de fond, elle regardait Kaahl, elle voyait tantôt un exercice, tantôt un problème. Elle n’aurait même pas dû s’y intéresser. Elle aurait dû chercher à renforcer son peuple de l’intérieur. Si l’armée n’avait pu tenir seule ce rôle, alors… Tomber sur un Ange, et chuter dans les bras de l’amour. Se marier, essayer d’avoir des enfants. Pas s’enticher d’un étranger. C’était peut-être pour cela, les rumeurs. Peut-être que les Ætheri la punissaient de cette infidélité à sa race. Peut-être qu’ils la mettaient en garde. Ou bien créaient-ils des épreuves pour la renforcer ? Elle n’avait pas la réponse. Elle n’avait pas beaucoup de réponses. Ses yeux, perdus dans le vague, revinrent sur le Magicien, et son pouls, rythmé par la fermeté, s’empêtra dans ses battements. Fébrile, il babillait, comme lorsqu’elle avait tenu sa lettre entre ses doigts. Elle se rappelait de l’attendrissement qui l’avait envahie et du sourire qu’avaient fait naître les dessins, malgré la rancœur qu’elle éprouvait encore. Et le rictus de Jun. Le rictus de Jun. Son regard s’assombrit à nouveau.

L’Ailée se laissa aller contre le rebord de la baignoire, sur lequel elle appuya sa main libre. Elle ignora la dernière remarque de son hôte : sa tenue était le cadet de ses soucis. « Moi aussi, j’aimerais bien comprendre ce que je fais là. Votre ami n’a pas été très clair quant aux motifs de cet arrangement. » Il avait laissé entendre que Kaahl n’était au courant de rien, toutefois, l’Ange doutait de pouvoir lui faire confiance – avait-elle seulement envie de le croire ? Elle inspira et se redressa, avant de s’approcher de quelques pas. La tête inclinée vers l’avant, elle semblait réfléchir. Elle cherchait comment formuler clairement et exhaustivement les événements qui l’avaient conduite ici, et les conclusions qui en découlaient. Une mèche brune tomba devant ses yeux, qu’elle replaça derrière son oreille. Sous ses doigts, elle ne sentit pas le ruban rouge noué autour de son cou. Elle releva le visage vers le Baron. « C’est Jun qui m’a placée dans ce paquet et téléportée chez vous. » Sa voix charriait l’animosité qu’elle éprouvait à son égard. « Je ne sais pas pourquoi, mais vous avez sans doute une idée, vous. » Les yeux légèrement plissés, elle le dévisagea. « Vous vous connaissez. Je suis même presque prête à mettre ma main à couper que vous êtes de la même famille. » Comme le Prince des Cauchemars l’avait souligné avec tact et délicatesse, les deux hommes se ressemblaient. Laëth avança encore. « Et vous avez peur des chats, comme l’a dit votre grand-mère. » Elle se tenait juste devant lui. « Vous avez menti, ou vous m’avez caché la vérité, comme vous préférez. Pourquoi ? » Elle arrima ses iris verts aux siens ; on y lisait la curiosité, une tristesse motivée par un sentiment de confiance trahie, une pointe de colère retenue, et toujours cette étincelle troublée. Le tout aussi cadenassé que possible.

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Lun 06 Jan 2020, 10:01



Le sort en est jeté



« Parce que je suis un menteur. » articulai-je en soutenant son regard. Elle n'avait pas la bague. Je fis un pas vers elle avec la ferme intention de la faire reculer. Elle reculerait, parce que je ne lui laisserais pas le choix. J’avais eu un court instant de réflexion entre le moment où elle avait parlé de Jun et celui où elle avait posé sa dernière question. Le fait qu’il se mêle de mes affaires provoquait chez moi des sentiments contraires. Pourquoi ? Qu’elle se rassure : je me posais aussi la question. Était-ce parce que je n’avais toujours pas utilisé son présent à bon escient ? Était-ce une menace ? Ou un message ? Que cherchait-il à me faire comprendre en l’amenant ici ? Y avait-il au moins quelque chose à comprendre ? « Figurez-vous que je suis un Sorcier. » Je fis un deuxième pas, fermement et ce malgré mon état. « Que mon passe-temps favori est de pousser les vieilles femmes dans les escaliers. » Le troisième pas fut plus décidé et sec. « Que votre Jun est… » Je laissai un silence s’installer, comme si je songeais à une réponse qui la satisferait pleinement. « … mon père. Même si je ne suis pas certain de savoir de qui vous parlez pour être honnête. » Le quatrième nous fit rejoindre la coiffeuse. Cette fois, je ne pourrais plus la faire reculer puisqu’elle venait de heurter le bois. J’avais esquissé un mouvement déterminé pour que le contact avec le meuble soit légèrement rude, sans pour autant lui faire mal. « À moins que l’homme que vous désignez comme étant de ma famille ne soit en réalité Jun Taiji ? » Je passai ma langue sur mes lèvres avant qu’un sourire incrédule ne se dessine sur mes traits.

C’était amusant, ce jeu de déplacements. Lorsque je cherchais à m’éloigner d’elle, elle me rejoignait. Malheureusement, je ne pouvais pas toujours respecter les règles. Il fallait qu’elle se méfie. Je n’avais plus vraiment envie de reculer pour le simple plaisir du va et vient à présent. J’aurais pu me détourner d’elle et lui répondre calmement qu’elle faisait erreur. Ça aurait été la solution raisonnable. Seulement, il y avait ce doute détestable ancré dans son esprit. À force de jouer avec le feu, elle allait finir par se brûler. Je ne manquais pas de ressources pour allumer les flammes de sa destruction. Que voulait-elle ? Un brasier infernal qui la calcinerait en quelques secondes ou un souffle délicat sur des braises qui la tueraient à petits feux ? Son insolence était le pire de ses fardeaux. Avait-elle seulement conscience du danger qu’elle courait ? Mes mains se refermèrent sur le meuble, de chaque côté de son corps. Je n’avais pas envie de lui laisser une échappatoire. « J’ai bien résumé votre théorie ? » demandai-je en me penchant un peu sur elle. Je la regardai. La fermeté apparente de mon entreprise commençait à s’effriter. Nous étions de nouveau proches l’un de l’autre. Il semblait même que je cherchasse à discerner ce qu’elle pensait, mon regard fouillant ses iris en quête de vérité. Je me radoucissais à vue d’œil, comme si j’arrivais au bout de mes capacités de provocation. Ma respiration se fit plus profonde. Je vacillai lentement tout en conservant une volonté farouche de ne pas la laisser s’en sortir aussi facilement. Je devais paraître paradoxal. Je m’étais vexé d’une étrange façon et, à présent que j’étais devant elle, que je l’avais coincée d’une manière peu convenable entre la commode et moi, je refusais purement et simplement de m’écarter et de m’excuser. Voilà de quoi tout ceci avait l’air : d’un enchainement d’attaques venant de chaque côté, avec un dernier assaut qui menait forcément à un statu quo ou à un abandon de l’un ou de l’autre. Je ne semblais pas décidé à me rendre et, pire, ma fougue avait un goût étonnement excitant. Restait que je lui avais promis de ne plus la toucher.

« Vous mettez mes nerfs à rude épreuve, en avez-vous conscience ? » lui demandai-je. C’était une question rhétorique, je n’attendais pas de réponse. Ma main droite quitta le meuble pour remonter jusqu’au ruban qui entourait son cou. Mes doigts attrapèrent l’une de ses extrémités. Le sens de tout ceci me sembla soudainement limpide. Elle était un cadeau. Je tirai sur le tissu, le papillon commençant à coulisser, se réduisant jusqu’à disparaître. Elle était à moi. Mon index se faufila entre sa peau et le nœud restant. Je le fis glisser et tirai dessus jusqu’à libérer totalement sa gorge. Il tomba au sol. J'aurais pu l'étrangler avec. Je me rappelai avec une précision parfaite à quel point je l’avais désirée lors de notre première rencontre, lorsque je portais la Couronne de la Nuit. Le sang qui coulait dans ses veines m’avait attiré d’une façon si compulsive et obsessionnelle. Je déglutis. Mes yeux quittèrent son cou pour retrouver ses prunelles. À mieux la regarder, il me semblait percevoir une évolution depuis notre dernière rencontre. Il y avait quelque chose de… « Je ne suis pas obligé de tout vous dire, si ? » la questionnai-je. Là encore, je n’attendais pas de réponse. J’avais envie de l’embrasser. « Vous ne me dîtes pas tout non plus. » Bien sûr qu’elle ne me disait pas tout. Il y avait cette lueur dans son regard lorsqu’elle le posait sur moi, entre les autres émotions qui bouillonnaient en elle. Elle essayait de se contrôler. J’avais envie de m’immiscer en elle pour lui faire relâcher sa maîtrise. Il me suffirait de contrôler à mon tour sa psyché pour faire céder un à un les cadenas qu’elle essayait de maintenir verrouillés. « Je n’ai pas d’explications à vous donner. Réta est aussi paranoïaque qu’excentrique et je ne suis pas le seul à avoir peur des chats dans ma famille. Je préférais simplement ne pas vous en parler. Je n’aime pas l’évoquer. Je n’aime pas non plus qu’on me demande pourquoi j’en ai peur. C’est comme ça, c’est tout. » Il y avait une véritable raison mais elle ne la comprendrait pas tant elle semblait folle. Pour Réta, elle avait effectivement fini par faire un vol plané. Malheureusement, la vieille peau était increvable. « Quant à ce Jun, que puis-je répondre ? Peut-être ? Pas officiellement j’imagine puisqu’il ne me semble pas avoir déjà entendu parler d’un Jun parmi les Paiberym mais je ne connais pas non plus par cœur mon arbre généalogique ni les secrets qu’il recèle. » Les infidélités n'étaient pas si rares. « Quelle importance ? Si vous me jugiez par rapport à ma famille, je pense que jamais vous ne m’auriez ne serait-ce qu’adressé la parole. » Je me tus. Après un moment d’hésitation, je décidai de ne pas lui préciser que la dernière fois que j’avais vu Jun Taiji, c’était en sa présence. Bien sûr qu’elle parlait de mon père. Je le savais. Seulement, insister sur cet homme en particulier ne servirait pas ma cause. Je ne comprenais d’ailleurs toujours pas la présence du chat aux côtés de Laëth. C’était bas. Je frissonnai en y songeant, un frisson qui pouvait être mis sur le dos de ma quasi-nudité. Je soupirai avant de déplacer ma main sur sa joue. Je l’effleurai avec douceur. Je n’étais plus du tout provoquant. « Je ne sais pas ce que vous faites ici. Peut-être que vous devriez rentrer à Iyora maintenant. » murmurai-je. « Je ne pourrai pas vous escorter jusqu’à un navire parce que j’ai pris des engagements mais je peux demander à des amis de vous aider. » Mes doigts s’étaient écartés mais mes lèvres avaient fait tout l’inverse. « Ou… » La situation était frustrante. Ma promesse me tenait et le fait que je joue un Magicien m’entravait. Je lui souhaitais de ne jamais me rencontrer en tant que Sorcier. Je n’aurais certainement pas eu cette patience, pas en devinant l’attirance qu’elle nourrissait à mon égard. C’était intéressant car si elle m’avait connu sous l’apparence d’Elias, nous n’en serions très certainement pas là. Que désirait-elle chez moi ? Qu’aimait-elle, au juste, hormis des mensonges ? « … vous pourriez rester avec moi aujourd’hui. » Même mon physique était factice depuis l’explosion. La douleur que je ressentais à la jambe par contre, elle, ne me lâchait pas. Elle était sans doute la seule vérité qu’elle serait à-même de distinguer pour l’instant. Pourtant, j’avais été franc lors de ma provocation. « Et demain, si ça vous dit. Nous pourrions continuer à nous battre. Peut-être même aurai-je l’honneur de vous voir habillée ce qui, je dois l’avouer, me rend de plus en plus curieux. Je vais finir par croire qu’il s’agit d’un mythe et que vous vous promenez vraiment nue au quotidien, quand vous ne volez pas les affaires des autres pour vous couvrir de façon douteuse. Vous êtes sûre d’être une Ange au moins ? » Mon nez caressa le sien. Je me reculai à ce contact et me mis à sourire, moqueur. Si elle me frappait, je l’aurais sans doute mérité cette fois. De toute façon, dans notre cas, il n’y avait que deux possibilités : soit je plaisantais pour essayer de faire cesser la tension, soit je me parjurais en posant mes mains sur elle. Je préférais la taquinerie pour l’instant. Réta et Jun étaient loin d’être les seuls problèmes qui entachaient notre relation. Il nous faudrait évoquer le reste.

1530 mots
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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Lun 06 Jan 2020, 16:55



Elle recula. C’était comme plier les genoux ou dévoiler sa nuque : haïssable. Toutes ses tentatives de résistance échouaient. Il avait l’ascendant, comme il l’avait toujours eu, et il en jouait. Chaque pas, chaque parole la chassait vers l’arrière. Elle avait l’impression de retourner à cette condition de proie qu’elle avait subie dans les labyrinthes. Son cœur cognait. Il se débattait telle une furie, comme s’il avait voulu s’arracher à sa poitrine. Le regard du Mage pesait sur elle et, si elle luttait pour ne pas s’en détourner, son menton n’était plus fièrement relevé. Elle le scrutait par en-dessous, les sourcils froncés dans une expression à mi-chemin entre le doute et l’anxiété. Lorsqu’elle heurta la coiffeuse, sa main libre vint se cramponner au rebord. Elle songea qu’elle avait peut-être fait preuve d’abus, mais aussi qu’il était susceptible – avait-elle touché une corde sensible ? Ses pensées dansaient frénétiquement. Le chaos l’empêchait de clarifier quoi que ce fût. Seule une certitude émergeait de ces abysses : il mentait. Il ne pouvait pas dire la vérité. L’esprit humain fait des merveilles. Forgeron d’illusions, il enflamme et tord le vrai jusqu’à le transformer pour qu’il devienne la réalité qui plaît le plus à son hôte. Quand bien même elle n’aurait pas pensé qu’il s’amusait à tourner son raisonnement en ridicule, elle n’aurait pas voulu croire ses déclarations. L’image qu’il avait construite et qu’elle avait adoptée entrait en trop grande contradiction avec ces possibilités ; si elle avait dû accepter ses dires, il y aurait eu une cassure. Trop importante. La seule hésitation qui pouvait persister concernait son lien avec Jun. Toutefois, il restait possible qu’il n’en sût vraiment rien, et qu’elle l’eût bêtement attaqué, aveuglée par la colère. Honteuse, elle baissa les yeux. Elle vit nettement les bras de Kaahl enfermer son corps entre lui et le meuble. Son pouls détala sur quelques secondes, tant à l’idée de leur proximité restaurée qu’à celle d’être coincée. Ses yeux retrouvèrent les siens, mais elle ne répondit pas à sa question. Elle osait à peine respirer. Mais elle ne voulait toujours pas céder. Elle ne parvenait pas à se débarrasser de l’idée qu’il lui cachait quelque chose, et en même temps, elle exécrait ce doute. Trop d’éléments lui échappaient – le temps d’une seconde, elle se surprit à souhaiter questionner Jun. Il devait être le seul à savoir ce qui se jouait. S’il avait pu les voir, il rirait sûrement. Ça lui donnait envie de hurler.

Les nerfs de l’Ange aussi affleuraient, récalcitrants comme réceptifs. Quand la main du brun s’approcha de son visage, elle voulut reculer encore, mais la commode retenait tous ses élans. Elle aurait pu essayer de le repousser, cependant, bien qu’il paraissait s’être calmé, elle n’en eut pas l’audace. Le ruban qui ceignait son cou n’attira son attention que lorsqu’elle le sentit glisser contre sa peau et chuter ; elle l’observa avec une suspicion qui se cristallisa rapidement en irritation. Non seulement, il l’avait jetée dans un paquet, mais en plus il avait fait d’elle, de sa personne, un cadeau. Elle serra les dents. On n’offre pas des cadeaux à des inconnus. On en accorde aux êtres chers au cœur ou, pour les plus sournois, à ceux qui se parent d’intérêt. Elle avait beau retourner le problème dans sa tête, les motifs du Prince des Cauchemars demeuraient troubles dès lors qu’elle les mettait en perspective avec les paroles de Kaahl. Soit l’un des deux mentait, soit le second s’avérait aussi ignorant qu’elle. C’était toujours la même conclusion, qui revenait comme une vieille rengaine : entêtante au point d’être insupportable. Elle ne voulait plus y penser ; elle ferait comme si ça n’avait aucune importance, oui. Elle aviserait plus tard ; pas comme ça, pas à chaud, pas prise au piège entre un meuble et le Mage Blanc, dont la seule présence suffisait à rehausser la sensibilité de ses sens. La pensée qu’elle devrait se promener avec son chat, Picasso, la traversa. C’était bas, mais cela lui éviterait bien des déconvenues. Néanmoins, pour prendre cette décision, il aurait fallu qu’elle fût raisonnable. Or, le cœur commençait à avoir ses raisons que la raison, plus que de les ignorer, ne comprenait pas. Depuis le début des rumeurs, ce qu’elle avait ressenti et la façon dont elle avait réagi la poussaient à cerner doucement ce qu’il lui arrivait. Elle se débattait encore, toujours. Avec ses émotions, avec ses sentiments, contre ses envies de l’instant. Elle essayait d’ignorer la main sur sa joue, les lèvres trop près des siennes, et de se forcer à croire que le mieux était de retourner immédiatement à Iyora. Mais le voyage était long… Les Anges seraient peut-être déjà repartis… Ou ils lui poseraient des questions, encore… Elle ne voulait pas subir de nouveaux interrogatoires. Si elle restait… Jun finirait bien par venir la chercher, non ? Il n’allait quand même pas la laisser ici, alors qu’elle n’avait rien demandé ? Une petite voix lui soufflait qu’il en serait capable. Un vent d’inquiétude mugit dans sa poitrine ; elle lui barra la route d’une salve magique. Si elle restait, elle ne risquait pas grand-chose. Les racontars n’avaient pas besoin de véracité pour se répandre comme une traînée de poudre et, comme l’avait souligné Kaahl, il leur serait difficile d’empirer leur cas. Et si elle était tout à fait honnête, elle avait vraiment envie de rester, et de… Elle ferma les yeux et entrouvrit la bouche ; il s’écarta. Envie de lui coller son poing dans la figure, oui. Ses paupières se rouvrirent et elle plissa les lèvres. « Hum. » Elle inclina son buste vers l’arrière.

Quelques semaines plus tôt, Laëth se serait certainement offusquée. Elle aurait foncé tête baissée sans percevoir l’humour – ou s’en serait vexée. Toutefois, à force de côtoyer Hena, elle avait appris à mieux appréhender les taquineries. Elle se racla la gorge et se redressa, se rapprochant de lui de sorte que leurs joues s’effleurèrent et que ses lèvres parcoururent la distance qui les séparaient de son oreille. « Vous pouvez vous écarter ? C’est… c’est embarrassant. » Elle se décala un peu et lui adressa un petit sourire en coin innocent. Pas une Ange, hein ? « Vous savez, entre Anges, on a l’habitude de respecter certaines distances, quand même. » Elle fit la moue. « C’est peut-être parce qu’on se balade tout nus, justement. Rester éloignés les uns des autres, ça évite de tomber enceinte… par erreur ? » Plus que d’encaisser les moqueries, elle savait y répondre – par moment. Elle avait toujours éprouvé plus de difficultés que Priam à ce sujet, parce qu’elle prenait tout trop à cœur pour réussir à en rire. Néanmoins, le peu de distance qu’elle parvenait à maintenir actuellement avec ses émotions suffisait pour esquisser quelques traits malicieux. « C’est pour ça que j’ai honteusement volé votre couverture, parce que je sais que vous êtes incapable de vous tenir. » Il y avait un dicton sur l’hospice et la charité : étrangement, il lui échappait… « Mais si vous la voulez vraiment, je peux vous la rendre. Je ne voudrais pas que vous soyez triste juste parce que j’ai cru bon d’être prudente. » ajouta-t-elle en desserrant légèrement ses doigts sur le tissu, sans le laisser tomber pour autant. Elle lui adressa une œillade espiègle, puis s’éloigna de quelques pas, enfin libérée de son emprise. Ses yeux coururent sur les murs et détaillèrent le mobilier, après quoi elle pivota pour lui faire face. L’Ailée avait repris un air un peu plus sérieux. « Retourner à Iyora par navire prendrait trop de temps. » Elle devrait y retourner. Elle ne savait pas comment, mais elle trouverait. Chaque chose en son temps. « Sauf si supporter ma présence est vraiment trop difficile, j’imagine que je peux rester. » Ses iris glissèrent jusqu’à sa jambe boiteuse. « En revanche, je ne suis pas certaine que les préceptes angéliques m’autorisent à me battre avec un handicapé. » Elle fronça doucement le nez, amusée. Toutefois, le capharnaüm de sentiments s’étant apaisé, l’inquiétude réussit à percer plus fermement sa carapace. Elle reporta son attention sur son faciès et demanda : « Vous vous êtes fait ça comment ? » Était-ce grave ? Une fois de plus, elle tenta de repousser l’émotion. Cette entreprise la fatiguait beaucoup et devait la faire paraître étrange, car elle sautait du tout au rien en quelques secondes. Ce n’était pas un pouvoir facile à manier pour elle – cependant, près de Kaahl, elle avait plus peur de se laisser déborder par ses ressentis que de sembler bizarre. Désireuse de ne pas rester là-dessus, elle fit quelques pas hasardeux, à la recherche d’un autre sujet de discussion. Quelque chose lui revint. Aisé mais sécurisant. « Et qu’est-ce que vous avez de prévu qui vous empêche de m’accompagner jusqu’au port ? »

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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Lun 06 Jan 2020, 22:30



Le sort en est jeté



Mes yeux suivirent le mouvement de son visage vers mon oreille. J’écoutai. « Ah oui ? » Un petit sourire venait de naître sur mes lèvres. Je pouvais sentir son odeur, mélangée à la mienne, celle qui se trouvait sur le tissu qui la couvrait. C’était une fragrance semblable à du pain d’épice. Grillé avec du beurre, il devenait sucré et chaleureux. Trop dosé, il devenait piquant. Couvert de miel, il prenait une toute autre saveur, beaucoup plus sensuelle, comme ma langue sur elle lorsque je finirais par faire plus que l’effleurer. J’interrompis ma pensée. Je délirais complètement. Depuis quand poussais-je les métaphores et les comparaisons aussi loin ? Le fait est que l’idée d’en faire ma femme ne voulait plus me quitter. Ensemble, nous pourrions devenir tellement plus que ce que nous étions actuellement séparément. Elle était encore jeune mais elle évoluait, sa répartie actuelle le prouvait. Plus elle se renforçait, plus elle devenait dangereuse pour moi. D’un autre côté, je ne pouvais pas tout avoir sans aucun risque. Je ne le voulais pas. « Ne vous inquiétez pas pour ça, je ne vous mettrai pas enceinte par accident. » soufflai-je en la laissant briser un peu notre proximité. Je ne la mettrais pas enceinte tout court. L’amour était un sentiment fourbe et j’en avais conscience. Des individus se laissaient maltraiter des décennies en son nom. Des folies étaient commises pour sa cause. Je devais simplement me débrouiller pour affirmer mon emprise sur elle. À partir de là, elle ne se douterait jamais de quoi que ce soit. Quand bien même douterait-elle un jour, elle préférerait se penser folle plutôt que de croire en ses intuitions. Plus je l’observais, plus je la voulais. Je n’avais pas l’intention de la maltraiter, au contraire. J’avais besoin d’elle. Je voulais que mon identité Magicienne puisse jouir d’un couple fort. Elle serait Reine à mes côtés parce que je m’emparerai du trône blanc. Sa sensibilité me guiderait dans les moments où seules les ténèbres m’habiteraient. Elle serait un phare parce qu’elle était bénéfique. En échange, je sauvegarderais les Anges, toujours. C’était un pacte silencieux que je lui offrais. Je ne le lui murmurerais jamais. Je ferais juste en sorte de le respecter, aussi longtemps que je pourrais la maintenir à mes côtés. Ce n’était pas fait. Je devais me doter de patience. Je devais avant tout obtenir l’artefact qui permettrait de me garder en vie. Je la voulais parce qu’elle avait ce mordant. J’étais certain qu’elle pourrait devenir une main de fer dans un gant de velours avec le temps, passer ses doigts doucement dans mes cheveux mais les refermer sèchement dans le cas où je dépasserais les bornes. Je voulais qu’elle puisse être ferme avec moi, je voulais qu'elle me soutienne aussi, le tout par amour.

Un sourire malin s’invita sur mon visage. J’acquiesçai. « C’est vrai, je suis le seul fautif. » dis-je en la suivant dans son jeu. L’ironie était un moyen de communication qui pouvait nous amener sur un terrain glissant. Elle n’avait pas idée de la fausseté de cette affirmation. Je ne faisais que ça, me tenir tranquille. Je pouvais paraître entreprenant mais je ne l’étais que par volonté. Parfois je me rapprochais, d’autres fois je la touchais mais je ne perdais pas le contrôle. Nous n’en serions pas là si je faisais réellement ce que je souhaitais. Si j’exauçais mes pulsions, sans doute serait-elle-même en train de pleurer actuellement, prostrée dans un coin, attachée et meurtrie. Les rumeurs sur son compte et les doutes de ses semblables lui paraîtraient bien insignifiants en comparaison. Seulement, je ne pouvais pas faire acte de violence vis-à-vis d’une femme que je désirais épouser. Invalide, elle ne me serait plus d’aucune utilité. Peut-être même aurais-je de la peine à la voir souffrir. Je l’ignorais. Je n’avais pas envie de le savoir. Je voulais simplement qu’elle se renforce, pour qu’un tel scénario ne puisse jamais survenir. Je voulais que sa puissance me maintienne en éveil. Je voulais que sa puissance écarte à jamais l’idée de lui arracher les ailes de ma tête ou, du moins, que cette idée ne reste qu’un fantasme malsain et irréalisable, pour toujours. Au fond, peut-être que mes volontés actuelles étaient légèrement dangereuses.

Mes yeux se posèrent sur elle, sur ses doigts qu’elle relâcha imperceptiblement. Je ris. Saleté. « Non, gardez-la. Ça me fait plaisir d’aider les nécessiteux. J’enverrai plusieurs tenues aux Jardins de Jhēn bientôt en précisant bien que la situation me préoccupe vraiment depuis que vous m’avez avoué que les Anges se promenaient nus dans la neige. Je préciserai avoir cru naïvement que vous étiez la seule dans ce cas. » Mon sourire s’agrandit. J’avais conscience que plus elle se renforcerait dans son domaine de prédilection et plus elle prendrait confiance en elle, plus je lui semblerais quelconque. Le désir à lui seul ne pouvait fonder une relation durable. L’amour s’estompait souvent au fil du temps. Ne restait alors plus que les souvenirs, la tendresse et la complicité. Je devais faire en sorte de créer toutes ces choses. Un objectif commun nous rapprocherait, d’où mon implication à venir pour son peuple. Cet objectif devait être secondé par d’autres, des projets communs, des intérêts communs, des actions communes. Tout ce qui pourrait nous lier me servirait. Il me fallait gommer nos divergences. Pas toutes. Certains combats rapprochaient et je ne voulais pas que notre relation devienne fade. Je voulais qu’elle pimente mon quotidien. J’avais envie que nos ébats soient brûlants. Autant joindre l’utile à l’agréable. Mon désir n’était pas factice. Elle ne me rendait pas indifférent non plus. Les meilleurs mensonges comportaient toujours une part de vérité.

Je la laissai se soustraire à moi pour de bon. C’était mieux. Il fallait que les choses aillent doucement. « Très difficile. » commentai-je en souriant. Je la regardais sans doute différemment à présent. Je plaisantais, bien sûr, mais j’avais aussi envie de partager un moment avec elle, une activité où nous ne serions pas que tous les deux et où aucun rapprochement ne serait possible. J’avais envie de la voir interagir avec autrui et d’être moi-même suffisamment entouré pour ne pas me focaliser sur elle uniquement. « Je suis sûr que les préceptes angéliques vous commandent d’être gentille avec moi. Je note que depuis votre arrivée, vous avez plutôt failli à votre mission. Vous devriez trouver un moyen de vous faire pardonner. » Je commençais à avoir froid. « J’ai voulu me rendre à Lumnaar’Yuvon pour dire à votre père que je vous avais mise enceinte. Conclusion : je me suis pris une hache dans la cuisse. » dis-je pour expliquer mon état. Je ris, mes yeux scintillants d’une lueur espiègle. Elle avait remarqué. Elle n'aurait pu le manquer. J'allais boiter toute la journée. J’attendis un moment avant de démentir. « Je serais probablement mort en fait si j'avais fait ça. Je vais quand même conserver ce secret pour moi parce qu’il en va de votre sécurité. » Je me déplaçai un peu vers elle. J’avais la chair de poule. « Ou simplement parce que si je vous raconte vous allez vous moquer. Et nous n’avons pas le temps de toute façon. »

Le fait qu’elle demande ce que j’avais prévu tombait bien. Je lui pris la main pour nous téléporter dans ma chambre. C’était la pièce la plus impeccable du château. Gustine essayait de vivre selon mes principes mais la Magicienne, bien que ne l’étant pas, me paraissait totalement désordonnée. Je repassais fréquemment derrière elle et je devais parfois me faire offense pour rester sans une pièce sans laver ou ranger ce qu’il s’y trouvait. C’était un exercice difficile. Je devais m’entraîner pourtant puisque, malheureusement, le monde comportait bien plus de gens sales et bordéliques que de gens propres et méticuleux. « Voyons… » Mes vêtements étaient pliés à la verticale dans des rangements parfaitement alignés. Seuls les habits les plus susceptibles d’être froissés reposaient sur des cintres. Je pris un pantalon noir et un pull blanc que je posai sur le lit avant de me tourner vers elle. « Je vais rendre visite aux enfants de l’orphelinat du Duché avec Gustine tout à l’heure. Depuis qu’elle est revenue de Boraür, elle ne pense qu’aux coutumes de l’île et elle travaille depuis quelques jours en coopération avec les gérants pour cette journée. » Sans la prévenir, je pris le contrôle du tissu qui la couvrait pour le lui ôter. Je souris dès l’instant où elle se retrouva nue. « Et… hum… » Je ne pouvais pas laisser mes yeux dans les siens, pas pour ce que je m’apprêtais à faire. J'avais donc une excuse pour la contempler même si j'étais certain qu'elle savait parfaitement que je la désirais. Ça se voyait. Je repris néanmoins mes explications, tout en me concentrant. « Il y aura différentes activités à faire avec les enfants. Elle m’a parlé d’une pièce de théâtre, de travaux pratiques et de pâtisserie. » Je plaçai ma main droite devant moi, arquant doucement mes doigts. Mes vêtements flottèrent jusqu’à la silhouette de la jeune femme. Le tissu se déforma sous mon commandement pour entourer ses courbes. Il fallait que j’enlève de la matière sinon ce serait trop grand. « Désolé mais vous devrez vous passer de sous-vêtements pour l’instant. Mes talents ont des limites. » Ou pas mais elle n'avait pas besoin de le savoir. Je continuai mon œuvre jusqu’à ce que le tout soit parfaitement ajusté. Ni trop serré, ni trop leste. Je la quittai des yeux pour prendre mes propres affaires. « Ce soir nous dînerons aux couleurs de Boraür et Gustine tient absolument à ce que nous nous offrions des cadeaux. C’est pourquoi je dois me rendre rapidement à Cael pour acheter tout ça. » J’étais vêtu de noir à présent et avais téléporté la serviette dans le bac à linge. J'en changeais à chaque fois.

Je m’approchai d’elle et lui prit la main. J’aurais pu nous téléporter de nouveau mais puisque la pièce était juste à côté, autant marcher. Une fois que nous fûmes arrivés, j’ouvris la porte et pris la clef qui se trouvait dans la serrure, de l’autre côté du battant. Je la lui tendis. « Vous dormirez ici cette nuit si vous désirez toujours rester. Si vous avez le moindre problème, je serai juste à côté. Je ne dors pas beaucoup alors il ne faudra pas hésiter. Vous ne me dérangerez pas. » Je lui souris. « Bien sûr, si vous préférez vous passer des emplettes, vous pouvez rester ici avec Gustine sans problème. Comme vous voulez. Elle tient à ce qu’on se fasse des cadeaux mais comme vous êtes un peu ici contre votre gré, et que ce n’est pas dans son caractère de toute façon, elle n’en sera pas fâchée. » Je m’arrêtai de parler et réfléchis. « Je crois que je vous ai tout dit… » Je m’attardai un peu sur elle. « Ces vêtements vous vont bien. Vous devriez féliciter le couturier. » Elle semblait avoir oublié Jun et Réta pour l'instant. Pour l'instant.

1783 mots

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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Mar 07 Jan 2020, 22:52



« Vraiment ? C’est adorable. Vous avez l’air déterminé à mériter votre surnom d’Ange de Volatys, dites-moi. » Un sourire étira ses lèvres. « Bientôt, on pourra vous appeler l’Ange des Jardins, ou l’Ange des Anges, quelque chose dans ce goût-là… le Sauveur des Anges ? » Elle pouffa. « Vous avez une préférence ? » le taquina-t-elle sans attendre de réponse. Elle était bien loin de se douter que, s’il parvenait à les réaliser, les projets de Kaahl pourraient l’amener à apparaître comme un être providentiel aux yeux de certains Ailés. « Oh. Très bien, puisque ça a l’air de vous rendre triste, j’essaierai de trouver un moyen de me rattraper. » Tant qu’elle gardait un semblant de contrôle, elle voulait bien jouer à son jeu – ou le sien ? Elle l’avait initié, après tout. Son trait d’humour la fit rire. « Oui, mon père aurait peut-être visé la cuisse, mais ma mère vous aurait sans aucun doute tranché la tête. » Le pire, c’était qu’elle était persuadée de ne pas exagérer. Traîtresse à leurs yeux, elle n’en demeurait pas moins leur fille. Peut-être songeaient-ils encore que cette petite de Réprouvés n’avait rien en commun avec les Anges, hormis l’apparence ? Dans tous les cas, elle les imaginait sans peine hurler et se saisir de leurs armes s’ils venaient à apprendre qu’un Magicien, un noret étranger, avait souillé leur descendance jusqu’à faire germer un fruit impur dans son ventre. Quelques temps plus tôt, elle-même aurait trouvé cela révoltant – et il demeurait une part d’elle qui répugnait à s’imaginer enceinte d’un homme de la race des Mages Blancs. Depuis longtemps, lorsqu’elle pensait au père de ses éventuels enfants, elle se figurait un Ange. L’infime possibilité – qui grossissait de jour en jour – que ce pût être quelqu’un d’une autre race la dérangeait. Et cela la faisait grincer des dents. Ce n’était pas tolérant. Elle se rassurait en se disant que c’était un vieux reste de son éducation réprouvée : on ne pouvait pas oublier vingt années de racisme en un claquement de doigts. Mais quand même. Il faudrait que cela cessât, un jour. Très prochainement – impatiente qu’elle était. Puisqu’il ne semblait pas prêt à lui dire comment il avait écopé d’une telle blessure, elle allait ouvrir la bouche – sa sécurité ? quelle sécurité ? –, mais la téléportation coupa court à sa protestation.

Elle était bien heureuse de s’être habituée au fait d’être téléportée. Les débuts avaient été sources de fortes perturbations internes. Ce n’étaient désormais que des souvenirs. Ses iris verts parcoururent la pièce. Tout était si bien rangé et nettoyé que le moindre grain de poussière devait trembler en ayant l’audace de se déposer sur un meuble. Laëth cligna des yeux, étonnée par tant d’ordre. Ses domestiques devaient y passer des heures. Il faisait aussi plus froid que dans la salle de bains. Elle frissonna et resserra la couverture contre elle. Malheureusement, elle n’eut pas le loisir de la garder plus longtemps. Contre sa volonté, le tissu lui échappa des mains, si bien qu’elle poussa un petit cri de surprise. Relevant la tête, elle croisa le regard amusé de Kaahl, qui descendait sur son corps, et plissa les yeux. « Quand je disais que vous ne saviez pas vous tenir… » Toutefois, elle n’en menait pas large non plus : ses pupilles s’envolèrent bien vite vers la fenêtre la plus proche. La nudité n’avait jamais posé problème à l’Ange. Le fait de savoir qu’il l’observait en sachant tout ce qu’elle savait ou croyait savoir… Cela la troublait plus, beaucoup plus. Et si elle retombait dans ses prunelles baignées de désir ? Elle préférait ne pas y penser. « Vous savez cuisiner ? » hasarda-t-elle. Cela ne se référait clairement pas à l’essentiel de son propos, mais c’était tout ce qu’elle avait trouvé pour se raccrocher à quelque chose de plus… de moins… tendancieux ? Ou pas. Le souvenir d’un rêve torride lui revint et elle rougit. Pourquoi fallait-il toujours qu’elle se piégeât seule ? C’était tragique. Remarque : elle aurait pu lui demander s’il était un adepte des travaux pratiques, ce qui aurait très nettement été pire. Elle coulait mais ne se noyait pas, au moins.

Comme elle sentait que désormais des vêtements l’entouraient, elle osa détacher son regard du ciel bleu et le reporter sur le Magicien. Qui était en train d’enfiler ses propres habits. Evidemment. Elle baissa les yeux sur sa tenue : pull blanc et pantalon noir, tout en sobriété, et étonnamment ajustés à sa taille. « Ouah, merci. » Bien pratique, ce pouvoir, malgré ses prétendues limites. « Ce n’est pas grave, ça me rappellera mes jeunes années chez les Réprouvés. » Le peuple bipolaire ne s’embarrassait pas de pudeur. Certains individus ne portaient effectivement jamais de sous-vêtements. L’Ange se rappelait même très clairement de sa mère lui déclarant que « c’est quand même un vrai gain de temps, il y a juste à baisser le pantalon ou remonter la jupe et hop, tu peux faire ton affaire entre deux buissons ». Elle se demanda ce que Kaahl dirait si elle lui sortait ça, mais se retint de le faire. « Oh. Je vois. » Tout ceci expliquait la décoration du salon. Elle avait entendu parler de cette île au sein de laquelle Santa’Claus aurait parfaitement pu vivre. L’engouement de Gustine ne l’étonnait pas : un voyage là-bas devait vous faire revenir des étoiles dans les yeux. L’idée de l’excitation enfantine de la vieille magicienne lui arracha un sourire. Cela ramenait à sa mémoire de nombreux Lus’Santa’Claus.

La main qui glissa dans la sienne la ramena à la réalité en même temps que le carmin teintait imperceptiblement ses joues. Cependant, il l’entraîna si bien à sa suite que ses émotions n’eurent pas le temps de la prendre d’assaut. Embêtée, elle recalibra son pouvoir. Il avait un effet pervers : plus elle l’utilisait, plus elle fatiguait, et plus son état se détériorait, plus elle devait utiliser sa magie. Le mieux serait peut-être de faire ce qu’elle exécrait. Lâcher prise. Horrible. « Merci. » dit-elle en prenant la clé et en la glissant dans une des poches du pantalon. Il y avait déjà plus de chance pour qu’elle utilisât celle-ci que la première qu’il lui avait donnée. Elle l’avait toujours, dans son sac, lui-même entreposé dans sa tente, quelque part sur les terres d’Iyora. « Hum, non, si je ne viens pas, vous allez à nouveau prétendre que je suis méchante, et je devrais encore trouver quelque chose pour me faire pardonner. » Elle lui rendit son sourire. Elle ne pensait pas du tout aux rumeurs et au fait qu’apparaître aux côtés du Baron Paiberym, au centre de la capitale magicienne, alors même qu’elle était censée se trouver au milieu de l’océan, nourrirait les commérages pendant plusieurs semaines. « Félicitations. Vous devriez peut-être envisagé une reconversion dans ce domaine, plutôt que d’essayer de vous battre. Ça vous éviterait de vous casser la jambe. » Sa blessure n’avait peut-être rien à voir avec ses nouvelles ambitions, mais puisqu’il n’avait rien voulu révéler, elle pouvait inventer autant d’histoires qu’elle le souhaitait. « Ceci dit, avant de partir, si vous aviez des chaussures à me prêter… »

***

Si Laëth avait oublié le point de détail à ne pas oublier, les regards qui se posaient sur eux le lui rappelèrent bien crûment. Avançant près du brun, elle déglutit. A cet instant, elle aurait aimé avoir refusé de l’accompagner. Retourner immédiatement à son campement. Pouvoir se rendre invisible. Disparaître sous terre. Rien de tout cela n’était possible. La ville rose la tenait entre ses griffes : elle devrait endurer les murmures qui couraient dans son dos. Quelle idée, aussi. Si elle avait été seule, elle aurait probablement échappé aux racontars. Certains Magiciens devaient connaître les traits de son visage, mais la plupart ignorait sûrement tout de son apparence. Néanmoins, ils savaient tous à quoi ressemblait le Baron, a fortiori depuis ses derniers exploits, et ils chérissaient trop les rumeurs pour avoir raté ce qui se clamait sur son compte. Il aurait fallu être le dernier des imbéciles pour ne pas chercher à établir un lien entre les racontars qui parlaient de son amour pour une jeune Ange et la femme qui marchait à ses côtés – quand bien même la dite Ange était supposée se trouver à des centaines de kilomètres de Cael. La brune gardait ses mains nouées, bien en évidence devant elle. Elle triturait nerveusement ses doigts. Penser à autre chose, vite. Son regard glissa sur les vitrines des magasins, dont la majorité était joliment présentée. En fait, elle n’avait jamais vu des devantures aussi travaillées. « Vous avez une idée de ce que vous voulez lui offrir, à Gustine ? » Parfait. Pensées positives, pensées positives. Oublier le reste du monde. Ne pas laisser de place au moindre élément parasite. Se concentrer sur Kaahl. Garder ses yeux bien rivés sur les siens. Enchaîner. « L’orphelinat… » commença-t-elle. « J’ai croisé le bébé, dans le salon. Vous l’avez adopté, c’est ça ? Vous allez en prendre d’aut- ? » Soudain, elle blêmit et s’immobilisa. L’orphelinat. Elle allait se rendre dans un orphelinat avec l’Honorable. Tout le potentiel de la situation lui sauta aux yeux. Elle ne pouvait pas faire ça. Elle ne pouvait absolument pas faire ça. « Je… » Elle plaqua ses mains devant sa bouche, avant de les retirer et d’esquisser quelques pas fébriles. Respire. Compte jusqu’à ce que tu sois calmée. Un, deux, trois… « On ne peut pas y aller. » lâcha-t-elle, malgré elle. « Enfin, si, vous pouvez, mais sans moi. Ce serait, ce serait… non non. » L’Ange secoua frénétiquement la tête, ses boucles brunes valsant sur ses épaules. « Tout le monde va croire, je ne veux pas… » Elle parlait vite, sans réfléchir à son propos, sans chercher à le structurer. Sa panique frappait sur ses efforts et réduisait peu à peu ses capacités magiques en miettes. Elle avait réussi à en rire plus tôt, dans la salle de bains, cependant, elle ne s’était pas tout à fait remise des soupçons qui avaient pesé – et pesaient encore en partie – sur son utérus. Se rendre dans un orphelinat, de surcroît avec le Magicien, c’était prendre le risque de décupler les rumeurs. Peut-être même qu’elles parviendraient à ses supérieurs. Si c’était le cas, pourraient-ils passer outre ? Ne se lasseraient-ils pas de cette Recrue qui ne leur apportait que des problèmes, mentait et salissait la réputation angélique ? Elle avait envie de vomir. Toutes ses pensées noircissaient sous le joug de la peur : d’autres sujets fâcheux, plus ou moins liés à ce qui avait déclenché sa crise, assaillirent son esprit. Les jeux de Jun, les paroles de Réta, les mots durs de Thadrias, l’attitude de Kaahl. Il n’avait pas de chance, il était présent. La terreur faisait feu de tout bois. « Pourquoi est-ce qu’il a fallu que vous parliez, bon sang ? » Il n’y avait pas de colère particulière dans son ton, simplement une préoccupation dévorante. Une détresse intense, qui faisait briller ses yeux de petites perles salées. Par réflexe – elle ne contrôlait plus grand-chose –, elle clignait des paupières pour les refouler. « Et pourquoi vous n’êtes pas venu me voir quand vous êtes allé sur Iyora ? » Il le lui avait dit dans la lettre, cependant, elle n’avait pas trouvé cette raison suffisante. Pire, elle avait jugé l’excuse mauvaise. « Ça n’aurait pas pu empirer la situation, de toute façon. Et moi, moi… » Rien ne sortirait. « C’est vous qui m’avez dit qu’il ne fallait pas lutter contre ses envies, qu’il ne fallait pas les fuir, et… et voilà ! » Laëth s’était entourée de ses bras et avait rejoint le contact rassurant d’un mur. Elle tremblait. Elle avait sans doute l’air ridicule. Aucune importance ; elle aurait tout le temps de s’en vouloir et de s’énerver plus tard. Ses émotions la bouffaient, au point que son univers s’y réduisait. Le reste n’existait plus.

Message V - 1954 mots
J'ai pris la liberté de faire une petite ellipse nastae
Pour le reste, euh... dans ma tête, ça devait bien se passer. Et puis, Laëth quoi /sbam




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Kaahl Paiberym
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Mer 08 Jan 2020, 12:38



Le sort en est jeté

« Je sais faire des tartes aux fruits. » dis-je. J’étais magnanime de lui donner le change dans une discussion que je savais commencée dans le seul objectif de la rendre moins mal à l’aise. « Pour le reste, Gustine m’a banni de la cuisine pour le bien commun de tous. » Ce n’était pas parce que je ne savais pas cuisiner, plutôt un souci dû à ma lenteur d’exécution. Je voulais toujours faire les choses biens, ce qui excluait les plats simples. Quand je n'accomplissais pas parfaitement la recette, je râlai et recommençai tout depuis le début. Dès qu’il fallait couper des fruits, des légumes, de la viande ou du poisson, je m’appliquais tellement que le temps filait sans se retourner et que le ventre de mes invités commençait sérieusement à les torturer. On pouvait donc dire, quelque part, que j’avais inventé une nouvelle technique pour martyriser les gens. Je souris à cette idée. Doser m’était aussi complexe. Aujourd’hui j’utilisais la magie mais lorsque j’étais moins expérimenté, dix centilitres de trop me rendaient anxieux. Bien sûr, à force, j’étais tout à fait capable de faire la cuisine en retenant mes travers, pour faire plaisir ou parce qu’il le fallait bien, mais ça ne me mettait pas à l’aise. Les tartes seules me détendaient, aussi parce que j’aimais trop ça pour attendre qu’on m’en fasse. Je me consolais en pensant qu’une fois Chancelier, je pourrais les créer de rien. Je n’aurais plus besoin de salir quoi que ce soit. Peut-être était-ce ça la solution ? Acheter une propriété avec juste les murs et le strict nécessaire et faire apparaître ce dont j’aurais besoin au fur et à mesure ? Peut-être un peu trop extrême. Je savais côtoyer la saleté mais une partie de moi restait désemparée face à elle. « Vos folles années chez les Réprouvés… Intéressant. » J’avais compris qu’elle parlait des sous-vêtements mais la phrase était tendancieuse. Mon sourire fut de circonstance mais je n’ajoutai rien. De toute façon, ses joues étaient déjà empourprées.
 
« Tant que vous trouvez quelque chose pour vous faire pardonner, vous pouvez être un peu méchante. » lui dis-je. « À force, je pourrai invoquer Dil Balto Voruma. » ajoutai-je avec un sourire malin. Je risquais surtout de me faire foudroyer par les Dieux si je m’en servais en plaisantant. Mon sourire s’agrandit à sa réplique suivante. Elle semblait en forme, fruit de son contrôle, probablement. Parfois, moi aussi je semblais gentil. Ça ne voulait pas dire que je l’étais. « J’y pensais justement. Je pourrais fabriquer de la lingerie. J’ai cru comprendre qu’un peuple entier en manquait. Il y a un commerce à établir avec les Réprouvés. Peut-être même que lorsque j’aurais les deux jambes dans le même état, j’arrêterai de boiter. Une aubaine. » Je baissai mes yeux vers ses pieds nus. J’allais sans doute pouvoir lui trouver ça.


Les regards qui se posaient sur nous me gênaient. Ils me gênaient parce que je savais que la femme qui était à mes côtés ne tiendrait pas longtemps dans cette atmosphère oppressante. J’étais habitué à supporter les regards et les messes basses. Être Prince des Sorciers supposait s’attirer les foudres de tous ceux qui jalousaient la famille royale et voulaient s’accaparer son pouvoir. La hiérarchie nobiliaire n’était normalement qu’une indication mais plus on s’approchait de la Couronne, plus il devenait aisé de faire jouer son rang contre n’importe quel opposant. Non content de me trouver de facto au sommet de la noblesse, je frôlais à présent les sommets de la hiérarchie décisionnelle. L’explosion de Valera Morguis prouvait que la puissance avait un prix, surtout chez les maléfiques. Les opportunistes avaient tôt fait d’essayer d’éliminer la concurrence. Je ne fonctionnais pas différemment. La différence se jouait sur l’habilité stratégique. Seuls les plus malins réussissaient sans mourir ou être trainés devant la cruelle justice d’Amestris. La force était nécessaire pour supporter les regards, les tentatives d’assassinat et la traîtrise ambiante. De tout ceci découlait le fait que je me fichais personnellement des rumeurs qui courraient sur l’Ange et moi. Je n’étais pas touché par elles. Néanmoins, elles m’agaçaient profondément. Je ne les avais pas souhaitées et ma perte de contrôle sur ces dernières me frustraient plus que de raison. Elles étaient un obstacle au bien-être de Laëth et, par la même, un obstacle à l’avancée de notre relation. Aussi, je la regardais à la dérobée depuis que nous avions commencé nos emplettes, attendant l’instant où elle craquerait. Elle craquerait. En analysant finement son comportement, c’était certain. Son pouls devait s’être accéléré, son regard était moins tranquille et son langage corporel la rendait farouche. Elle voulait fuir. Elle essayait pourtant de lutter comme elle le pouvait, en pensant à autre chose. « Je vais lui offrir un nouveau voyage à Boraür mais je ne lui annoncerai pas ce soir puisque je ne suis pas encore certain des dates. Je dois enquêter sur ses disponibilités avant. En attendant… Peut-être de la laine. Elle aime bien tricoter. Ce n’est pas très original, vous me direz, mais si je lui offre de quoi cuisiner, elle adore aussi, elle va m’accuser de faire ça par opportunisme. » Je lui souris. « Je suis gourmand. Si elle ne vous le dit pas au moins une fois aujourd’hui, je ferais le tour du château nu en criant ce que vous voulez. » Je n’étais pas sérieux mais vu son état, j’essayais de la suivre dans sa volonté d’oublier les yeux qui la fixaient. C’était peine perdue.
 
« Laëth. » murmurai-je tout bas, en m’approchant du mur contre lequel elle avait trouvé refuge. Je n’avais pas parlé plus tôt. Lorsqu’elle avait perdu le contrôle, j’avais su qu’il ne servait à rien d’essayer de l’apaiser ou de me défendre. Elle n’aurait probablement pas écouté et ça aurait pu déboucher sur une situation bien pire. La fragilité de cette femme me heurtait toujours autant. Elle éveillait en moi des choses qui pouvaient servir mes intérêts en tant que Magicien mais certainement pas mes intérêts en tant que Sorcier. La tendresse était terrible. Je ne la refoulais pas à l’égard des enfants, de Gustine et d’Adélie mais la refusais normalement en d’autres circonstances. À présent que j’avais envie de la prendre dans mes bras, je me retrouvais dans une impasse terrible. C’était un désir instinctif, qui me poussait à vouloir la protéger. Une tension avait enveloppé mon dos. Je restai silencieux un moment avant de poser mes mains sur ses bras. C’était tellement paradoxale de m’imaginer la faire souffrir en certaines circonstances mais de vouloir la sauvegarder dans d’autres, dès qu’elle montrait un signe de faiblesse en réalité. Je laissai consciemment mon trouble ressortir. La vérité avait le mérite d’être toujours convaincante. « C’est vrai. J’aurais dû venir vous voir. Je suis désolé. » Je devais trouver une solution aux problèmes que nous avions. J’étais l’un d’eux. J’étais bien trop connu sur les Terres Magiciennes, une renommée qui avait crû depuis ce qu’il s’était passé sur Volatys. Laëth jouissait aussi d’une popularité qui ne faisait que s’accentuer. Son visage était peut-être moins connu que son nom cependant. Je n’en étais même pas sûr. Forcément, l’attention des passants se focalisait sur nous, les rumeurs venant ajouter un ingrédient supplémentaire à un cocktail déjà bien instable. Je préférais éviter qu’il n’explose. Je gardais un mauvais souvenir de la dernière explosion que j’avais vécu. « Laëth… » Je venais de prendre une décision. « Ne soyez pas trop surprise par ce que je vais faire. » Le Baron Paiberym posait problème ? Soit. Je n’allais plus l’incarner. C’était aussi simple que ça. Elle savait déjà que je n’étais pas exactement tel que je paraissais être depuis notre dernière rencontre. Ça ne l’étonnerait probablement pas tant que ça que je puisse changer d’apparence aussi facilement. J’allais même faire mieux.
 
Je relâchai totalement ma magie, apparaissant tel que j’étais réellement. Je lui souris. J’aurais pu prendre une autre forme, plus belle. Ce n’était pas une question de maîtrise magique. J’étais tellement habitué que ma silhouette se maintenait, même lorsque je dormais. J’aurais pu. Seulement, je préférais celle-ci. C’était peut-être une forme d’excuse que de lui montrer une partie de moi. Elle n’en saurait rien. « Nous serons plus tranquilles ainsi. » Ma voix était basse et confiante. « Et si certains osent encore, je n’aurais qu’à les regarder méchamment. » Je souris. Ma main droite remonta pour venir se positionner dans son cou. « Faites-moi confiance. Il n’y a aucun risque concernant l’orphelinat. Nous nous y rendrons par téléportation. C’est un petit établissement. Je connais bien ceux qui y travaillent puisque j’y vais souvent et ils savent déjà que toutes ces rumeurs ne sont que des mensonges. Ces gens sont vraiment bienveillants et ne colporteront jamais de fausses informations. Ce sont les enfants qui y vivent qui m’ont fait dessiner et je suis sûr qu’ils ont tous hâte de vous connaître. Vous serez un beau cadeau. » Je profitai du contact de sa peau pour utiliser Umbra in Lucem afin de l’apaiser doucement. « Promis, on ne repartira pas de là-bas avec un enfant. » Je bougeai légèrement mon pouce contre son cou, dans une caresse discrète. J’avais de nouveau envie de l’embrasser. « Vous savez, ce n’est pas parce que je conseille de ne pas lutter contre ses envies que je suis moi-même doué pour appliquer ce conseil. En plus, parfois, mes désirs vont en contradiction avec ceux d’autrui. Je pensais bêtement que vous n’auriez pas envie de me voir sur Iyora. D’autres fois, ils vont en contradiction avec des promesses que j’ai faites. Je vous ai promis de ne plus vous toucher. Ça ne veut pas dire que je n’en meure pas d’envie. Je pense simplement que le plus sage, pour l’instant, au moins jusqu’à ce que notre situation soit plus claire, est de garder mes distances. » Je retirai mes mains d’elle. « En plus, il nous faut encore trouver le cadeau de Gustine ainsi que le vôtre. Même si vous avez besoin de sous-vêtements, je ne voudrais pas vous ôter la nostalgie de ne rien porter. » Je lui souris, une lueur espiègle dans les yeux. « Qu’est-ce qui vous ferait plaisir ? » Je la regardai soudain étrangement. « Peut-être que vous devriez profiter d’être ici pour voir votre frère… » Ce n’était pas forcément ce que je désirais mais j’étais certain que voir Priam lui plairait. « Je pourrais peut-être l’inviter à passer l’après-midi avec nous à l’orphelinat ou bien lui proposer de venir dîner avec nous ce soir ? Je saurai m’éclipser pour que vous puissiez parler tranquillement. »  

1755 mots
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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Mer 08 Jan 2020, 18:26



Dans un sursaut, elle releva la tête vers Kaahl. Le contact de ses mains sur ses bras l’avait sortie de ce monde où il n’existe rien, sinon le chaos des sentiments. Sans répit, il la happait toute entière, jusqu’à la faire disparaître derrière les barreaux de l’incontrôlable prison de ses émotions, et offrait un trône à son impuissance éclatante. Son corps bouillonnait de ce trop-plein, comme s’il peinait à le contenir et que le moindre mouvement aurait pu conduire à une explosion. Dans ses yeux humides, une lueur vacillait, maladroitement suspendue aux iris, prête à déferler, à tout engloutir, à tout détruire, prête à sombrer. La colère la secondait, en retrait. Ce n’était pas une ire dirigée contre autrui ; c’était l’une de celles que l’on porte à soi-même. Pour la faiblesse, pour l’échec, pour la honte. Celle qui n’acceptait pas, celle qui luttait, celle qui se débattait. Elle avait envie qu’il la prît dans ses bras, comme à la fin de la soirée des Elus d’Hel’dra, quand elle s’y était blottie et n’avait plus eu à penser à rien. Elle avait envie que Priam fût présent et qu’il l’enlaçât, qu’il lui dît que tout irait bien et qu’il fît en sorte que ce fût le cas – comme il le faisait toujours. Elle avait envie de ne dépendre de personne. Elle voulait être capable de se relever seule, de gérer ses ressentis d’une main de fer et de ne jamais plus faillir. Scrutant le regard de Kaahl, elle ne prononça pas un mot. Coincée dans un entre-deux émotionnel, elle était là sans vraiment l’être. Ses doigts se crispèrent sur ses côtes : progressivement, il changeait d’apparence. Lorsque la transformation fut achevée, l’Ange cilla. La surprise ne peignait pas ses traits ; c’était la curiosité qui dominait, étincelle timide dans le marasme déchaîné qui baignait ses yeux verts. Sa peau était plus mate, ce qui contrastait avec la clarté inhabituelle de ses iris. Ils s’apparentaient à deux pièces d’or sous les reflets du soleil. Un tatouage à l’encre noire serpentait sur son profil droit, jusqu’à descendre dans son cou et se perdre sous ses vêtements. Ses épais cheveux noirs avaient blanchi et paraissaient plus soyeux encore, reposant sur ses épaules avec délicatesse. L’une de ses oreilles était pointue, comme celles des Ygdraës qui avaient navigué avec l’Ange. Il était méconnaissable, bien que la majorité de ses traits persistât, et que l’expression de ses prunelles n’eût pas été altérée. Qu’est-ce qui avait motivé ce choix d’apparence atypique ? Elle détaillait les tatouages, fascinée. Dessous, la peau n’avait pas l’air parfaitement lisse, mais elle ne s’attarda pas dessus. Elle acquiesça doucement à ses paroles, à mesure que sa peur prenait conscience de ses torts. Son pouls battait rapidement sous la main du Mage Blanc, mais l’Ailée elle-même n’aurait plus su dire si ce n’était dû qu’à sa terreur, ou si le contact de sa peau contre la sienne y contribuait aussi – surtout ? La panique reculait lentement, et c’était tout ce qui importait. Elle n’osait pas le quitter des yeux, de crainte de constater qu’ils figuraient toujours dans la ligne de mire des inquisiteurs et des moqueurs. A l’écoute, elle mémorisait ce qu’il déclarait. Elle rangeait tout dans la petite boîte de la confiance, juste à côté du cœur, là où tout ce qui sommeillait pouvait la rassurer dans ses moments de vulnérabilité. Doucement, elle s’écarta du mur qui l’avait soutenue. Elle ne tremblait plus et ses mouvements paraissaient plus fermes. Peu à peu, son esprit quittait les préoccupations qui l’avaient bouleversé. Elle jeta des œillades brèves aux passants, et remarqua avec soulagement qu’on ne les scrutait plus. L’évocation de son frère, toutefois, lui fit vivement reporter son attention sur Kaahl. « Priam ? » Sa proposition la laissa muette. Durant de longues secondes, elle le dévisagea, tandis que ses émotions se bousculaient aux portes de son palpitant. Puis, elle s’avança. Près de lui, elle glissa ses bras autour de son cou et se rapprocha pour l’étreindre. Garder ses distances ? Elle avait écouté, elle n’avait jamais dit qu’elle était d’accord. Elle l’avait peut-être été ; elle ne l’était plus, et rien ne disait qu’elle ne le serait pas à nouveau dans quelques heures. La linéarité s’avérait sans doute plus reposante ; mais Laëth n’avait rien de quelqu’un de tranquille, et cet aîné dont on parlait aurait convenu sans mal qu’elle était éreintante. Une vraie girouette ; pour peu que le vent changeât de sens, elle indiquait une autre direction. « Merci. » Pour Priam. Pour l’apparence. Pour le reste. La brune ne bougea pas, la joue appuyée contre son propre bras. Elle respirait l’odeur du Mage : elle ne s’en serait pas douté, mais il y avait quelque chose de curieusement apaisant à cela. « Désolée. » souffla-t-elle contre son cou, quand une vague d’embarras dû à son attitude passée secoua son cœur. Pour quelques brefs instants, elle ferma les paupières. L’impression de pouvoir rester figée ainsi des heures durant l’enveloppa. Elle n’avait pas peur de sombrer dans les affres de la luxure ou de perdre le contrôle – peut-être parce qu’elle ne cherchait pas à tout prix à l’exercer. Pour une fois en la présence de Kaahl, elle se laissait aller à ce qu’elle avait envie de faire sans redouter les conséquences. Lorsqu’elle se détacha enfin, les yeux ouverts mais baissés, elle ramena une partie de ses cheveux derrière ses oreilles, avant de relever le menton. « Je ne voudrais pas vous l’imposer. » dit-elle avec le calme qu’elle avait recouvré. « Ne vous sentez pas obligé. » Elle lui sourit avec douceur. Malgré les circonstances nébuleuses de son apparition dans son salon, elle était son invitée. Elle n’avait pas envie d’exiger quoi que ce fût. « En fait, je pense… je pense que j’ai trouvé un moyen de le voir. Vous vous rappelez des Sources ? » Comment les oublier ? « Il y était aussi, la première fois. Et comme nous y sommes retournés… je suppose qu’on peut encore y aller. Je ne sais pas trop comment, peut-être juste en le souhaitant ou en les visualisant, mais je lui en parlerai dans ma prochaine lettre, et puis j’essaierai. » Cette idée la rendait visiblement heureuse : elle rayonnait de tendresse. Bien sûr, le voir dans la journée l’aurait d’autant plus ravie. Cependant, elle présumait que cela tiendrait plutôt du sacrifice pour le Baron. Elle n’avait pas envie de l’y pousser. Et désirait-elle vraiment que les deux hommes se croisassent ? Priam dans un château à la propreté irréprochable, entouré de Magiciens… Elle avait déjà du mal à comprendre comment il avait pu survivre à un bal. « Je ne crois pas qu’il soit prêt à vous rencontrer, de toute façon. Ou l’inverse. Vous seriez peut-être choqué par ses manières. C’est aussi un fils de Réprouvés, après tout. » exagéra-t-elle dans un sourire. L’espièglerie perçait à nouveau dans sa voix, signe qu’elle avait basculé vers un état plus canalisable. En vérité, sa curiosité la tenaillait. Elle peinait à se figurer une interaction entre son frère et le Mage. « Et puis, avec les rumeurs… Je sais que ma mentor lui a envoyé une lettre, mais nous n’avons pas reçu de réponse. Il n’avait pas l’air très ravi d’apprendre tout ça, alors… » Elle s’interrompit, peu désireuse de revenir sur ce sujet. « Enfin bref. On devrait se concentrer sur ce cadeau pour Gustine ! » L’Ange regarda autour d’elle, à la recherche d’une enseigne de couture. Au loin, elle aperçut une pancarte sur laquelle figurait une pelote de laine percée de deux longues aiguilles. « Tiens, là-bas. » Sans même y penser, elle attrapa Kaahl par la main pour l’entraîner à sa suite.

A l’intérieur de la boutique, il faisait bon. Tout un mur était consacré à la laine, rangée par type et par couleur. De ce que Laëth pouvait voir, le reste des rayons comportait des tissus de toutes les sortes et des vêtements. Les étagères qui les intéressaient présentaient de véritables camaïeux. La jeune femme cligna des yeux, surprise par autant de diversité. Cela n’avait rien d’étonnant pour peu que l’on se donnât la peine de se rappeler les tenues colorées des Magiciens, néanmoins, elle avait gardé l’habitude des quelques teintes privilégiées par les Réprouvés. « Elle a des couleurs préférées ? » s’enquit-elle en lâchant sa main pour s’avancer vers les étalages. Ses doigts glissèrent sur la surface de plusieurs pelotes. Saisie d’une idée, elle pivota vivement vers l’homme. « Peut-être celles de Boraür, si elle en éprouve une telle fascination ? » Un sourire s’accrocha à son visage. Ses iris glissèrent à nouveau sur les tissus. Une pensée la traversa, et une moue embêtée s’imprima sur ses traits. Elle n’avait pas oublié ce qu’il avait dit plus tôt. « Puisque je suis arrivée nue comme un vers, je n’ai pas d’argent sur moi. » Elle se tourna vers lui. « Je n’ai pas l’espoir que vous renonciez à me faire un cadeau, donc vous trouverez aussi quelque chose qui vous plaît, et je vous rembourserai. » Ça n’avait rien d’une demande. « Vous avez peut-être déjà une idée ? » Dans son cas, pas vraiment. Il fallait qu’elle refît faire le cuir de sa tenue d’entraînement, mais elle doutait de trouver une armurerie au sein de la capitale magicienne.

Message VI - 1523 mots
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Jeu 09 Jan 2020, 02:00



Le sort en est jeté


Mes lèvres s’entrouvrirent quelques secondes sous l’effet de la surprise. Je savais qu’elle serait heureuse mais il m’était difficile de prévoir qu’elle m’enlacerait au beau milieu de la rue. Finalement, je tendis doucement mes bras vers la taille de la jeune femme. Mes mains frôlèrent ses vêtements et finirent par se poser dans son dos. J’esquissai un sourire et fermai les yeux tout en laissant la tendresse m’envahir davantage. Je resserrai un peu mon étreinte. Je voulais qu’elle se sente bien et en sécurité. « Ne vous excusez pas. » susurrai-je en frissonnant à cause de son souffle sur ma peau. Je baissai la tête afin de loger le bas de mon visage dans ses cheveux. Peut-être était-ce ça la clef ? La laisser venir, lentement, l’accompagner et la réceptionner sans entreprendre plus que le strict nécessaire. La frôler physiquement et la toucher mentalement jusqu’à ce qu’elle se rende. Ce n’était pas difficile pour moi d’éprouver de l’affection pour elle. Lorsque ses faiblesses éclataient au grand jour, je ne pouvais faire autrement. J’aurais pu supprimer ce sentiment mais, au contraire, il me fallait l’alimenter davantage, pour qu’il soit toujours présent, pour qu’il combatte mes volontés de meurtre et de torture. Je savais que j’aurais probablement envie de l’éliminer à l’avenir. Ce qui était valable pour qu’elle reste attachée à moi, les souvenirs heureux et la tendresse, l’était également pour moi, plus encore sans doute eu égard à ma nature. Je devais l’aimer parce que c’était le seul moyen de ne pas la détruire, l’aimer avec parcimonie, certainement pas au point de tout lui avouer. Elle ne comprendrait pas. Elle me haïrait.

Quand elle se recula, j’ouvris les yeux et laissai mes mains retomber de chaque côté de mon corps. J’aimais lorsqu’elle jouait avec ses cheveux. Ses boucles virevoltaient selon ses mouvements. Parfois, elles étaient rebelles et elle devait essayer de les dompter. J’avais envie de les dompter aussi. Je me raclai la gorge, modifiant le cours de mes pensées pour les concentrer sur Priam exclusivement et la situation qui se profilait vis-à-vis de lui. Je restai silencieux lorsqu’elle expliqua pour les Sources. Une pointe excessive de possessivité m’enserra. Je n’aimais pas qu’elle parle de partager avec lui ce qu’elle pouvait partager avec moi. Objectivement, eu égard à mes activités en dehors de sa présence, je n’avais rien à dire. Subjectivement, nous étions très différents et, ce que je faisais, je ne voulais pas qu’elle le fasse. Son peuple la sauvegardait de la plupart des vices, ce qui me rassurait sans faire disparaître totalement mes penchants paranoïaques. Je savais pourtant que je ne pouvais lutter contre l’affection qu’elle portait à son frère et qu’il n’était pas un réel danger. Peut-être que si, au fond. Il n’avait pas dû apprécier les rumeurs sur sa sœur, ce qu’elle ne tarderait d’ailleurs par à confirmer ; pas plus que moi. Néanmoins, si elle l’aimait, elle ne serait pas insensible à ses dires. S’il désapprouvait ses choix, tout deviendrait bien plus difficile. En bon fils de Réprouvés, peut-être détesterait-il  le caractère de mon identité Magicienne. S’il était protecteur, sans doute me surveillerait-il. Il n’était pas exclu qu’il cherchât à me tester. Je pouvais surmonter beaucoup de choses mais j’étais irritable lorsque l’on venait mettre son nez dans mes affaires et retarder les échéances. « C’est une bonne idée. Si ça fonctionne, vous pourrez vous voir plus souvent. » S’il s’avérait qu’il se montrait hostile à mon égard, je n’aurais qu’une seule arme à ma disposition. Comme je ne pourrais pas l’éliminer, il me faudrait garder mon sang froid quoi qu’il advienne, être le plus intelligent des deux et adopter un comportement ouvert, patient tout en étant ferme. « Tant qu’il ne m’enlace pas en pleine rue, je devrais survivre. » répondis-je pour plaisanter.

Ma main dans la sienne, je la suivis. J’étais étonné par l’audace dont elle faisait preuve depuis quelques minutes. Je n’avais rien à y redire en soi mais je devais m’assurer que ces rapprochements ne fussent pas la conséquence d’une amitié naissante. Me montrer trop doux pouvait avoir des revers. Je ne pensais pas mais il me faudrait tout de même vérifier. Devant les pelotes, je réfléchis, l’admirant parfois. Ses mains sur la laine avaient un côté plaisant. Je me mis à faire de même et caressai les fils pour m’assurer de leur qualité. « Vous commencez à bien me connaître. » dis-je sans tourner les yeux vers elle au début, pris dans mon inspection. Je devais avoir une expression sérieuse. J’étais concentré sur la matière qui passait entre mes doigts. La laine pouvait aussi servir de liens. Il était difficile de s’en soustraire et ça ne coûtait rien. « Une idée ? » répétai-je en me tournant vers elle à mon tour. Bien sûr, la première chose qui me vint à l’esprit concernait cette laine et ses poignets. J’y songeais juste avant qu’elle ne pose la question, même si elle n’était pas exactement la victime que j’imaginais à ce moment-là. Je doutais qu’elle aimât et, de toute façon, il était bien trop tôt pour discuter de ce genre de jeux. Je me mis à sourire d’un sourire qui indiquait clairement que je m’apprêtais à plaisanter de nouveau. « Moi qui pensais que vous aviez enfin compris que je ne savais pas me tenir. Vous savez très bien ce que je veux, en plus. » Mes yeux dans les siens, je m’approchai un peu et laissai planer un léger suspens. Elle, nue dans mon lit. Ses mains sur moi. Ses lèvres sur moi. Son cœur. Sa raison. Notre mariage. « Une tarte aux fraises. » Je ris et me détournai pour reporter mon attention sur la laine. Après quelques minutes à tout inspecter minutieusement et à sélectionner celles que je choisissais, aux couleurs de Boraür comme la jeune femme me l’avait suggéré, je me dirigeai vers la vendeuse pour payer. Une fois que ce fut fait, je revins vers l’Ange et lui tendit une bourse. Elle était sans fond. L’argent dont elle aurait besoin apparaîtrait toujours, peu importe la somme qu’elle souhaitait obtenir. Ça ne fonctionnait que lorsque je donnais mon consentement. Fournie par la banque, elle permettait un accès illimité à mes économies. « Séparons-nous pour nos cadeaux respectifs. Essayez de ne pas me ruiner. » Elle aurait du mal. Je lui fixai un rendez-vous sur la place centrale de Cael pour que nous puissions nous retrouver facilement et partis de mon côté.

1050 mots
J'ai essayé d'écrire moins cette fois et c'était dur alors je veux un cadeau [Q] Le sort en est jeté | Kaahl 943930617

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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Jeu 09 Jan 2020, 23:20



Laëth se figea. Ses yeux allaient de l’un à l’autre des iris du Magicien, troubles. Étonnamment, elle n’avait pas rougi. Seul son bas-ventre la brûlait, ravagé par l’incendie qu’il se plaisait à déclencher de temps à autre, comme s’il n’avait pas voulu qu’elle oubliât ce qui pouvait encore les unir. Elle aurait pu souhaiter ne pas s’en rappeler ; elle n’aurait jamais réussi. Il lui faisait un effet terrible, qui enflammait son abdomen, retournait ses tripes, soulevait et plombait son estomac, embrasait ses poumons et lui laissait la gorge sèche. Les pulsions valsent avec les émotions ; les deux partenaires de danse trônent au rang des ressentis primitifs. Elles saisissent tous les êtres et leurs traces ineffaçables les poursuivent toute une vie. Sa condition d’Ange n’y changeait rien. S’ils n’avaient été tentés par aucun péché, s’ils n’avaient été que les esclaves de la raison et de la sagesse, ils n’auraient tiré aucun mérite de leur pureté. Cette entreprise n’était pas aisée. Plus le temps passait, plus les épreuves s’imposaient, plus elle le comprenait. S’en accommodait-elle ? Sans doute. Elle ne geignait pas. Elle se débattait vainement, elle s’énervait inutilement, elle se fatiguait profondément, mais elle ne se plaignait que rarement. Elle voulait prouver que, même en étant une enfant de Réprouvés, même en étant le jouet de ses émotions, elle restait capable de brandir fièrement l’étendard angélique. Elle voulait briller ; qu’on la vît, qu’on la considérât, qu’on l’aimât. Qu’on ne la négligeât pas, qu’on ne la méprisât pas, qu’on ne l’abandonnât pas. Elle ne voulait pas les yeux de la foule, simplement ceux de ceux qui comptaient. Elle voulait juste une place, celle qu’elle avait choisie. La peur la poussait à agir, encore. « C’est vrai. » souffla-t-elle, avant de reprendre d’une voix affermie : « J’avais oublié que vous étiez gourmand. » Un sourire subtil effleura ses lèvres. Sa promesse, aussi difficile à tenir pût-elle être pour lui – et pour elle –, la rassurait. La menace de se trouver prise en tenaille par son corps et une envie dévorante de le toucher, et d’être touchée par lui, ne planait plus. Le spectre de la perte de contrôle ne la hantait plus – ou presque. Moins crispée et surtout plus confiante, elle parvenait à se laisser un peu plus aller. La proie farouche disparaissait au profit d’une assurance espiègle. Les traits d’humour ne s’apparentaient plus à des attaques ou à des dangers imminents. Ce n’étaient que des taquineries, des jeux, peut-être même des marques d’affection. Comme il se détournait pour choisir des pelotes de laine, elle en profita pour l’observer. Avec cette apparence, il ne se ressemblait plus tout à fait, mais il y avait toujours quelque chose. Peut-être la façon qu’il avait de détailler les fils avec un sérieux et une méticulosité dignes de l’étude d’un livre de science. L’Ange eut un sourire aussi attendri qu’amusé, avant de revenir aux tissus colorés. Les pelotes choisies et payées, elle prit la bourse que lui tendait Kaahl. « Zut, moi qui rêvais d’acheter les énormes diamants de la boutique d’à côté… » Elle mima une moue déconfite. Puis, croisant le regard du Mage, elle s’empressa de reprendre son sérieux et de corriger, maladroite, en agitant une main devant elle : « Je plaisante. Ne faites surtout pas ça, je ne saurais absolument pas quoi en faire. »


Laëth n’avait pas l’habitude de faire les boutiques. C’était déjà arrivé, lors de voyages à Sceptelinôst, et une fois, sur les Terres du Lac Bleu. Jenna l’y avait traînée, outrageusement enthousiaste – ce qu’elle n’avait pas manqué de lui faire remarquer. Rah, t’y connais rien, c’est parce que tu viens de Lumnaar’Yuvon, y’a rien là-bas, c’est vraiment un trou ! lui avait-elle lancé – à raison. Elle ne savait plus ce qu’elle lui avait répondu. Elle avait certainement usé d’une répartie époustouflante, comme : gnagnagna. D’ordinaire, le lèche-vitrine n’était pas son activité favorite. Petite, elle courait dans les rues aux côtés de Priam. Ils s’adonnaient à des jeux qui les conduisaient à bondir sur des tonneaux, rouler sous des tables ou esquiver de justesse les cuisses musclées des commerçants, à grands renforts de cris de combat. En grandissant, elle avait toujours eu un goût plus prononcé pour les armureries ou les étals de nourriture que pour les robes, les chaussures ou les bijoux. Parmi les Réprouvés, cela paraissait normal. Elle s’était rendue compte qu’aux yeux des jeunes Magiciens, c’était un comportement inattendu. En revanche, ils comprenaient mieux son attrait pour les livres. En toute honnêteté, elle avait toujours songé que lire devait être ennuyant à mourir. Elle avait été contrainte et forcée d’ouvrir des ouvrages pour étudier la culture angélique, apprendre la langue, l’histoire, les mythes et les légendes… Sans s’y attendre, elle y avait pris goût. La lecture constituait sûrement l’un des rares moments où elle demeurait tranquille plus d’une heure. C’étaient les instants préférés de son chat, Picasso, qui avait alors tout le loisir de se lover sur son ventre et de jouir d’un repos bien mérité.

Dans les rues de Cael, l’Ange marchait d’un pas actif, tournant la tête de tous les côtés. L’animation régnait. Elle n’était pas familière des bains de foule non plus, et avait choisi d’avancer près des murs plutôt qu’au centre des artères de la capitale. Incapable de ne pas imaginer le visage fermé de son frère au milieu de tout ce monde, elle s’amusait des réflexions qu’il aurait pu faire. Qu’est-ce qu’ils ont tous à s’extasier devant des bottes ? Pourquoi elle me dévisage, elle ? Elle veut mon portrait ? La prochaine fois, je ne t’accompagnerai pas. C’est quoi ce truc ? Mais ça ne sert à rien ! Oooh regarde, de la bière ! Et du saucisson ! Aha ! Et ainsi de suite. La brune observa brièvement l’échoppe de produits alimentaires. Il faudrait qu’elle trouvât quelque chose pour Gustine, aussi. Kaahl avait dit qu’elle aimait bien cuisiner. Si elle lui offrait un livre, elle n’aurait probablement pas l’air d’une opportuniste, elle. Juste de quelqu’un de savamment renseigné par l’opportuniste en question. Elle sourit. Y aurait-il d’autres invités, ce soir ? La gouvernante avait sans doute un époux. L’Ailée se gratta machinalement la tempe en se mordillant la lèvre. Hum… des chocolats ou des pâtes de fruits, peut-être ? S’il n’était pas là, la Magicienne serait sûrement ravie de les manger à sa place. Et les enfants ? Ne serait-ce pas mieux de leur prendre quelque chose ? Il avait bien dit qu’elle serait un beau cadeau, mais à dire vrai, une fois lui avait suffi, et elle doutait grandement de l’intérêt que lui porteraient les orphelins. Embêtée, elle passa une main sur son visage. Elle aurait dû interroger le Mage Blanc avant qu’ils ne se séparassent. La devanture d’une boulangerie attira son regard. Elle ne pouvait décemment pas lui prendre juste une tarte aux fraises, quand bien même ce serait la meilleure de tout Cael. En arpentant toutes les rues commerçantes, elle trouverait bien une idée, non ?

Ses emplettes terminées, Laëth avait rejoint leur point de rendez-vous. La place centrale s’ouvrait sur le palais royal, cerné par les ambassades des différents peuples. Des sentinelles étaient postées aux portes. Debout, visage tourné vers le ciel, la jeune Ange admirait l’architecture de la demeure de la Reine. Elle savait qu’il l’avait aimée. Ça ne la dérangeait pas – et même si cela avait été le cas, elle n’aurait rien eu à en dire. En fait, elle se focalisait à peine sur les deux protagonistes de cet échange raté de sentiments. Elle se demandait comment l’amour fanait. Si c’était douloureux ou si ça soulageait. Si on pouvait vraiment ne plus éprouver de tendresse pour ceux que l’on avait aimés sincèrement. Si on finissait par les oublier. Si elle lui manquait, parfois. Du coin de l’œil, elle le vit apparaître et s’approcher d’elle. « Vous ne la voyez plus ? »

Message VII - 1323 mots
Oui, tu auras une tarte aux fraises <3
(on dirait pas comme ça, mais moi aussi je me suis
forcée à me stopper /sbam Je réduis lentement mais sûrement 8D)




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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Sam 11 Jan 2020, 23:46



Le sort en est jeté



Je levai les yeux vers le palais et restai silencieux un instant, le regard dans le vague. « Parfois si. » murmurai-je. Je ne parus pas tout de suite vouloir entrer dans les détails. La situation était bien plus complexe qu’elle n’y paraissait et je ne pouvais pas la lui expliquer. Le fait que l’Impératrice Blanche ait été remplacée par son Reflet était un secret bien gardé. Le fait qu’elle et moi fussions de mèche l’était bien plus. Quant aux instants que je passais entre ses cuisses, il valait mieux ne même pas y penser. Pourtant, à force d’y songer, justement, il m’apparaissait clairement que je me livrais à une sorte de prostitution, motivée par des desseins bien sombres. À moins que ce ne fût le contraire ? Lequel de nous deux avait le plus besoin de l’autre ? Lequel de nous deux désirait ardemment la mort de l’autre ? Plus le temps passait, plus je réfléchissais à un moyen d’en faire une arme, mon arme. Je devais me renseigner sur le degré de traîtrise dont un Reflet pouvait être capable. Je me raclai la gorge, faussement embarrassé par la situation. « Nous… » Je me ravisai. « Non rien. Ce n’est pas important. » lâchai-je, avant de revenir de nouveau sur ma position. « Excusez-moi, je ne suis pas censé en parler. » Je lui souris. « Pour être honnête dans les limites de ce que je peux vous dire, nous nous rencontrons parfois pour faire certaines choses ensemble. » Sans rien ajouté, je posai l’un des sacs que je tenais par terre pour fouiller dedans. J’en sortis une petite brioche salée au chèvre et au miel, encore tiède. Je la lui tendis. « Je me suis dit que vous auriez faim. J’adore ça. » Elle devait me prendre pour un gourmand convaincu à présent. « Promis, je ne suis pas un Déchu. Il m’arrive de ne pas penser à la nourriture. » Je ris.


Lorsque nous revînmes au château, une chanson nous accueillit. Je vérifiai que le chat n’était pas là et souris. Gustine n’était pas à l’horizon non plus. Elle avait amené Rosalie avec elle, puisque le couffin était vide. La vieille Magicienne oubliait toujours de faire cesser ses sorts. Parfois, ses goûts musicaux étaient étranges. Cette fois, c’était sensuel. Je l’avais déjà surprise en train de danser dessus avec son mari, l’un dans les bras de l’autre, à se dévorer du regard tout en se racontant leur journée respective. Je les avais laissés tranquilles, repartant sans aucun bruit. Ils s’aimaient depuis des décennies. « Gustine aime beaucoup cette chanson. » dis-je.

Je débarrassai l’Ange, posai nos sacs sur la table du salon et revins vers elle. « Hum… » Je m’approchai un peu plus et faufilai mes mains sur sa taille doucement. « Je veux juste danser. » lui dis-je. « Ce n’est pas difficile. » Je fis quelques pas pour lui donner le rythme. En réalité, ça n’avait rien à voir avec de la danse de salon. Il suffisait juste d’être l’un en face de l’autre et de tourner lentement. N’importe qui pouvait y arriver. La proximité permettait de discuter calmement, voire même de chuchoter. « Je suis content que vous soyez ici. » Il faisait jour, ce qui donnait bien moins d’intimité qu’en soirée. Pourtant, hormis les notes qui résonnaient et la voix envoûtante de la chanteuse, le château semblait désert. « Et que vous soyez habillée aussi, pour une fois. » Je lui souris, cherchant ses yeux. J’avais toujours mal à la jambe mais arrivais à faire en sorte que la douleur que je ressentais n’obstrue pas trop mes mouvements. J’aurais pu lui faire peur ou me montrer bien plus entreprenant que je n’étais alors. J’en avais envie. Ma main droite quitta sa taille pour caresser son cou. Mon pouce vint effleurer ses lèvres et, finalement, alors que ma paume prenait place sur sa peau, je le posai sous son menton. Je me penchai un peu, un mouvement qui fut interrompu par des babillages. Je m’arrêtai, restant au même endroit quelques secondes. Mon expression changea et mes lèvres s'étirèrent davantage. C'était comme une promesse. Je ne pouvais rien faire maintenant mais je ne manquerais pas de le faire plus tard, alors qu'elle n'espère pas trop m'échapper, malgré ma promesse. Je me reculai et mes yeux rejoignirent la silhouette de Gustine. Elle était debout, à côté de la porte, et ses mimiques en disaient long sur ce qu’elle pouvait penser tout bas. Je commençai à me dire que la musique n'était pas l’œuvre du hasard. Était-elle si diabolique ? Comme si la notion de gêne lui était totalement inconnue, elle regarda Rosalie et commenta. « Tu auras peut-être un petit frère ou une petite sœur plus rapidement que prévu ! » déclara-t-elle, pas assez bas pour qu’on ne l’entende pas. « Gustine ! » protestai-je en me décalant. « C’est vous qui voulez adopter un autre enfant, je n’y peux rien ! » fit-elle. Malgré son air innocent, il était certain qu’elle ne parlait pas d’adoption, plus tôt. Mon regard se mouva de nouveau sur Laëth, mes lèvres bougeant en un « Désolé » muet.

Gustine s’avança vers moi pour me confier Rosalie. Je regardai le bébé avec un bonheur soudain et lui enlevai son bonnet avec une délicatesse infinie. La Magicienne en profita pour se glisser à côté de l’Ange. « Vous me rappelez mon mari et moi lorsque nous étions jeunes. Il voulait faire les choses bien, ça oui. Mais il était un peu long à la détente. » Elle rit. « Moi je n’avais qu’une envie : qu’il m’entraîne dans les buissons avec lui. » Je clignai des yeux plusieurs fois. « Ah la la, les hommes. Mais vous savez, finalement, quand ça s’est fait, j’étais aux anges. Rien à voir avec votre peuple, bien sûr. Mais nous avions attendu si longtemps que… Je m’en rappellerai toute ma vie. » Elle paraissait rêveuse. « Mais contrairement au Baron, mon minou avait de l’expérience. » Minou était le surnom qu’elle donnait à son mari. « Avant de me connaître, c’était un sacré tombeur. L’amour l’a simplement rendu pudique et hésitant. » Elle rit, semblant bien contente d’avoir fait un tel effet à celui qui partageait sa vie. « Je suis contente de vous rencontrer enfin ! Vous me semblez être une femme de caractère. C’est bien pour Kaahl. » Elle parlait comme si je n’étais pas là. Je finis par m’asseoir avec Rosalie sur le canapé. « Enfin, il n’est pas vraiment pudique non plus. Il dort tout nu ! Une fois, alors qu’il était censé être parti tôt pour Cael, une domestique est entrée dans sa chambre. Il dormait comme un loir, la main sur le… Enfin, vous voyez. Le château entier en a parlé pendant des jours ! » J’avais envie de disparaître. Je m’étais accoudé sur le canapé et avais porté ma main sur mon front. « Pas que le château. » rectifiai, soudainement grognon. Gustine se mit à rire gentiment. « Vous n’avez pas à avoir honte, voyons. » « Gustine, vous me… Je… » Elle était sérieusement embarrassante mais semblait trop bienveillante pour que je lui en veuille vraiment. Je me demandais si elle ne cherchait pas à convaincre Laëth de m’épouser, d’une façon extrêmement maladroite. Elle ne faisait jamais ça normalement. « Je suis certain que Laëth n’est pas du tout intéressée par ce genre d’histoires en plus. Vous allez la mettre mal à l’aise. » La Magicienne ouvrit la bouche et se tourna vers la jeune femme. « Oh par Suris, je vous ai mise mal à l'aise ? » questionna-t-elle, semblant réellement inquiétée par cette possibilité.

1211 mots
La marche de la honte a commencé  [Q] Le sort en est jeté | Kaahl 943930617


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Priam et Laëth
Lun 13 Jan 2020, 00:16



« Hum… Je savais déjà que vous aviez des secrets, mais la liste s’allonge de jour en jour. » répondit-elle calmement. Sa curiosité la tenaillait, mais elle se retint de poser d’autres questions. Elle se contenta de le sonder du regard, peut-être avec la volonté illusoire de détecter un voile et de le percer à jour. Toute à sa candeur, l’Ange ne pouvait pas imaginer l’étendue de ce qu’il lui cachait. Le mensonge qu’il tissait autour d’elle s’épaississait de seconde en seconde et s’accrochait avec tant de ferveur à sa naïveté qu’elle aurait sans doute du mal à s’en défaire. Il agissait comme une araignée avec sa proie : coincée dans la toile, le moindre sursaut de rébellion lui valait une piqûre soporifique. Ses sourires sincères balayaient la plupart des doutes. Seuls les plus tenaces subsistaient, comme celui qui entourait son rapport à Jun. Cependant, elle n’avait pas envie d’y penser. Elle n’avait pas envie de se mettre en colère. Elle était bien, à ses côtés. Pire, elle envisageait le moment où elle devrait repartir avec une forme de mélancolie qu’elle n’aurait pas attendue. Elle aurait voulu pouvoir être avec lui et sur ces terres inconnues qui l’appelaient. « Oh, merci. » Laëth prit le temps de considérer la brioche quelques instants. Elle sentait bon le miel et le fromage de chèvre. Son estomac gronda, comme si l’odeur le rappelait à ses envies. Levant les yeux vers Kaahl, la brune répondit dans un demi-sourire : « Tant que vous me laissez mes ailes blanches… » Et elle effaça de son esprit l’horrible rictus narquois du Prince des Cauchemars.

***

Quoiqu’il fît chaud dans le salon, Laëth frissonnait. Si près de lui, elle se sentait un peu fébrile. Ses mains dans son dos diffusaient malgré elle une chaleur qui lui donnait l’impression de tomber malade. C’était la fièvre la moins pénible qu’elle eût eu de toute son existence. Elle berçait le cœur d’une façon inédite ; langoureusement puis vivement, l’endormant pour mieux le faire sursauter. Dans ses yeux, elle se perdait un peu. Elle se cramponnait à la réalité pour ne pas y plonger complètement. Peut-être n’en reviendrait-elle jamais ? Ses doigts dans son cou, sur ses lèvres, sur sa joue ou sur son menton la firent frémir. Retenant son souffle, elle le laissa s’approcher, exerçant même une légère pression sur ses épaules – mais sans doute était-ce simplement ses mains qui paniquaient sous le joug de l’imminence d’un baiser. Néanmoins, un son qu’elle avait entendu plus tôt la sortit de son état. Ce n’était pas la musique. Tournant la tête, elle découvrit Gustine, qui les observait d’un œil malicieux, le bébé entre les bras. Depuis combien de temps se trouvait-elle là, dans l’embrasure de la porte ? Rapidement, le teint de l’Ange n’eut plus rien à envier aux plus jolis coquelicots. On ne pouvait pas dire que Lumnaar’Yuvon était un lieu de grande intimité. Il fallait croire qu’elle s’était faite à la tranquillité qui régnait aux Jardins de Jhēn. Ou peut-être était-ce cette histoire de gamin, que l’on ne pouvait s’empêcher de lui rappeler ? Cela lui faisait un effet plus désagréable encore que tous les seaux d’eau froide que Hena aurait pu lui jeter dessus au réveil. Elle s’écarta en même temps que Kaahl, à qui elle tourna à moitié le dos, les bras croisés sur son abdomen. Elle le savait, que les vieilles Magiciennes étaient les pires. Elle le savait. Quand elle eut à peu près recouvré sa contenance, elle fit l’effort d’étendre ses bras le long de son corps et de reprendre une position plus ouverte. Elle parvint même à répondre avec un sourire timide aux excuses du Mage.

L’air qu’il adopta en récupérant l’enfant acheva de la détendre. Son sourire fin s’agrandit, plus spontané et sincère. Elle observait la petite fille avec curiosité. Elle n’avait pas souvent tenu des bambins dans ses bras. Peut-être Sól ou Mani. Elle ne s’en souvenait pas. « A-ah oui ? » fit-elle alors qu’elle posait les yeux sur Gustine. Si elle s’était attendue à ce genre de comparaisons ! Et puis, les buissons ! Ses yeux s’arrondirent d’étonnement. Un peu plus, et elle aurait pu croire que l’aïeule avait passé une partie de sa vie à Lumnaar’Yuvon. Les Magiciens étaient plutôt libérés, mais de là à faire l’amour dans des buissons ? Non, elle ne parlait probablement que d’embrassades. Ou pas. Elle n’en avait aucune idée, n’avait pas envie de le lui demander, et la suite du monologue de la vieille femme éclaira parfaitement ses interrogations. Elle anticipait même les suivantes. Les yeux de Laëth glissèrent jusqu’à Kaahl, qui avait l’air aussi surpris qu’elle. Sans expérience, lui ? Elle avait du mal à y croire. Cela dit, il n’avait peut-être pas envie de tout raconter à la gouvernante. Sa langue semblait bien volubile : il n’aurait pas été à l’abri de quelques divulgations dérangeantes. Comme elle avait fait l’expérience des rumeurs au sein de la société magicienne, elle se figurait assez bien le calvaire qu’il aurait pu endurer. Dans l’impossibilité de répondre quoi que ce fût, la jeune femme se contentait de hocher la tête ou de varier ses expressions faciales. Finalement, l’anecdote qu’elle lui fournit et l’attitude soudainement grincheuse du Baron lui arrachèrent un franc sourire – de ceux dont on retient difficilement le rire. Toutefois, à l’inquiétude soudaine de la Magicienne, elle le perdit et ressentit le besoin de répondre : « Non ! Non non, ne vous en faites pas. » Un petit peu. Un tout petit peu. Juste les deux premières minutes, qui avaient paru excessivement longues. « Vous savez, de là où je viens – chez les Réprouvés –, on raconte bien pire, et on est bien moins pudiques que le plus dévergondé des Magiciens. » Ces derniers temps, elle était un peu plus en paix avec cette part d’elle-même, cet héritage de guerriers et d’agriculteurs dont l’âme est scindée. Et puis bon, je l’ai vu plus souvent nu qu’habillé, alors évoquer ce genre de choses… Elle ouvrit la bouche mais, comme elle croisait le regard de son hôte, elle se ravisa et se contenta de pincer les lèvres, un brin amusée malgré tout. Revenant à Gustine, elle reprit : « Je suis ravie de vous rencontrer aussi. Kaahl m’a parlée de vous, et ça m’a donné envie de vous voir en chair et en os. » Elle jeta un coup d’œil vers l’intéressé, avant de retourner à son interlocutrice, le visage plus humble et mesuré. « D’ailleurs, je tenais à vous demander pardon pour mon attitude, tout à l’heure. » Gênée, elle passa son index sous son nez et le frotta délicatement. « Dans d’autres circonstances, je vous aurais saluée plus… gentiment. J’étais un peu énervée. » Juste un peu, oui. « J’espère que ça ne vous a pas blessée. Vous ne devez pas avoir ce genre de visites tous les jours, je veux dire, des gens dans des paquets, tout nus… » Laëth maîtrisait à la perfection l’art de se mettre seule dans l’embarras. Elle tira un peu sur une manche de son pull, avant de trouver une échappatoire : « Vous travaillez ici depuis longtemps ? Histoire de savoir si vous disposez de beaucoup d’anecdotes comme celle-là… » Elle adressa un sourire espiègle à Kaahl, puis regarda tour à tour les deux Magiciens.

Message VIII - 1196 mots
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Et je l'ai oublié en postant, MAIS il n'est jamais trop tard :




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