Musique

Le temps se figea juste avant qu’il n’arrive. Il n’avait pas envie de provoquer la panique. Cela ferait sans doute mauvais genre que miss grossesse fulgurante se fasse enlever devant tout le monde par Jun Taiji, fléau de l’humanité – il en riait, en fait, mais c’était comme cela que l’avait appelé une femme qu’il avait croisé plus tôt, avant d’essayer de lui cracher dessus. Il avait envoyé le crachat se perdre sur la face de l’enfant de celle-ci qui s’était mis à pleurer, à cause de la bave ou du regard noir qu’il lui avait lancé ; il ne savait pas trop. Il était le fléau de l’humanité après tout, c’était la moindre des choses. Il apparut donc dans le campement angélique avec un petit sourire étrange sur les lèvres. Il paraissait mi-amusé, mi-agacé, empli de cynisme, de sarcasme et d’ironie ; un curieux mélange, plutôt explosif.

Il avait figé tout le monde sauf celle qu’il était venu chercher. D’un pas tranquille, il avança, se frayant un chemin entre le mobilier extérieur et les Anges immobiles. Il avait tout son temps et, à vrai dire, ça lui plaisait bien d’imaginer la réaction de Laëth. Sans doute avait-elle pensé à une blague au début, puisqu’elle était seule avec cet Ange, Adriel. Elle devait commencer à se rendre compte que ce n’était pas normal et qu’elle ne pouvait interférer avec son environnement. Il finit par l’avoir en visuel. Il s’arrêta quelques secondes, juste pour la regarder et esquisser un sourire en coin, avant de reprendre sa route, s’approchant petit à petit. Il fit une nouvelle pause lorsqu’il se trouva à hauteur de celui qui maîtrisait le métal. Il pencha la tête sur le côté, comme s’il cherchait quelque chose de particulier, peut-être caché derrière l’oreille de l’Ange. « Hum. » fit-il remarqué, comme si son « Hum » était lourd de signification. Sans vraiment changer de position, ses yeux se déplacèrent pour se porter sur la jeune femme. « J’espère que vous vous souvenez de moi. » dit-il, en faisant quelques pas pour la rejoindre. Il savait que oui. Il savait aussi qu’un tableau très explicite de leur dernière rencontre se trouvait en possession de la Dame Rouge. Il aurait pu le détruire mais, à vrai dire, ça l’amusait. Pour une fois que les manigances de cette harpie lui plaisaient, il n’allait pas intervenir. Il était plus habillé que dans le labyrinthe. « C’est intéressant, je trouve, que vous ne fassiez vraiment pas le lien. » Qu’on ne remarque pas que Devaraj était son fils, ça pouvait se comprendre aisément. Il avait beaucoup pris de sa mère. Djoulhya… c’était une femme. Ce n’était pas si flagrant. En revanche, Kaahl lui ressemblait, beaucoup. « J’imagine que ça viendra. On ne peut pas tous être rapide à la compréhension. » Son sourire s’agrandit. C’était gratuit et pas très gentil. Ses yeux se firent pétillants et taquins et il s’avança davantage. « Et maintenant ? » demanda-t-il, comme si le ça viendra devait se produire plus tôt que sa phrase ne le laissait croire. Ça l’agaçait d’attendre qu’elle comprenne. Il était vraiment très proche d’elle. Il aurait pu l’embrasser en une demi-seconde, ou la tuer… ou faire n’importe quoi d’autre. Il soupira. Il s’était promis de ne plus toucher aux – difficile de savoir quoi exactement – de ses enfants. « Laissez tomber. » conclut-il.

« Cet Ange, là-bas, j’espère que vous n’avez pas l’intention d’en tomber amoureuse parce que… » Hum non. Vraiment, il devait arrêter de faire ça. « Peu importe ! Je n’étais pas venu pour ça. » Il fourra son index sous le menton de Laëth pour avoir toute son attention ; même s’il l’avait déjà. « Voyez-moi comme une sorte de facteur indépendant. Je décide de livrer certains paquets à certaines personnes sans qu’elles n’aient rien demandé, de temps en temps. Et hum… Vous êtes le paquet. Le prenez pas mal, ce n’est pas contre vous. » fit-il tout en initiant un mouvement visant à l’attraper par la taille. Il se ravisa et reprit une position normale. « Attendez… Ce serait mieux si… » Il claqua des doigts – plus pour la forme que pour le fond – et sourit, un air mutin sur le visage. Les vêtements de l’Ailée s’étaient vaporisés. Il la regarda deux secondes et ricana comme un enfant qui vient de faire une mauvaise farce. « Je pense qu’il vous donnera de quoi vous vêtir. De toute façon, ce n’est pas comme s’il ne vous avait jamais vue nue mais je trouve ça plus... croustillant, ainsi. » Il l’attrapa de nouveau et la hissa sur son épaule droite avec le même soin qu’il aurait accordé à un sac de patates. Elle avait grandi chez les Réprouvés, ça ne devrait pas trop la déranger. L’une de ses mains se plaça sur le haut de sa cuisse pour la maintenir. « Restez sage, sinon je serai obligé de vous calmer à ma façon et vous n’aimerez vraiment pas. » lui souffla-t-il. C'était des menaces en l'air mais ça lui plaisait d'en formuler parfois. Si elle s'agitait, il l'immobiliserait et fin de l'histoire. Il créa un grand paquet vert et rouge avant de balancer la jeune femme dedans. Un chaton prit place à ses côtés, une fois qu’il fut sûr qu’elle n’allait pas l’écrabouiller par un geste maladroit. Il ferma le couvercle et fit disparaître le tout. Il ne savait plus vraiment autour du cou de quel « animal » il avait fait apparaître un ruban rouge… Il haussa les épaules. Peu importait.

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