L’homme s’arrêta un instant pour observer ce qu’il se passait devant lui. « Pourquoi sommes-nous venu ici, déjà ? » demanda-t-il à la jeune femme à ses côtés. Celle-ci se retint de soupirer et afficha un sourire pour s’astreindre au calme. Cette question, il la lui avait posé des dizaines de fois depuis qu’elle avait annoncé leur départ, or la patience n’était pas l’une de ses qualités naturelles. Heureusement que les alphas de sa meute lui avaient rappelé à quel point ce nouvel individu pourrait se révéler important. Si ça n’avait pas été le cas, elle l’aurait depuis longtemps abandonné dans un bout de forêt, le laissant seul face à son destin. Peut-être aurait-il survécut, peut-être pas… Le résultat lui importait peu, elle voulait simplement qu’il lui fiche la paix. Elle ne comprenait toujours pas pourquoi on le lui avait mis sur le dos et si son besoin de respecter la hiérarchie ne s’était pas fait ressentir, elle se serait depuis longtemps débarrassée de cet énergumène. « Nous sommes là pour les aider. » résuma-t-elle simplement, dans l’espoir que cette simple réponse lui suffise. Bien évidemment, c’était mal connaître le renard qui détestait ne pas comprendre les choses en profondeur, malgré ses difficultés pour assimiler des sujets aussi simples que celui d’entraide. Parfois, la louve se demandait s’il était réellement un Eversha, et pas une espèce de créature surnaturelle sortie de nulle part. Peut-être que son instinct était tout simplement défectueux. En tout cas, il avait la mauvaise habitude de poser trop de questions, un peu à la manière d’un gamin. Malheureusement, sa surveillante détestait les mioches. « Ils ne peuvent pas se débrouiller tout seul ? » « Ils ont essayé… Mais ça ne s’est pas passé comme ils l’avaient espéré. » « Et en quoi cela nous concerne ? Ce n’est pas nous qui avons échoué dans notre mission. Alors pourquoi devrions-nous les laisser venir sur notre territoire ? » Voilà donc le vrai problème. Le blond ne supportait pas l’idée que des intrus puissent venir chez lui, sur ses terres. Quelle ironie, lui qui s’était retrouvé à errer sur leur territoire. Eva se pinça l’arête du nez pour ne pas céder à l’agacement avant de s’arrêter et de se tourner face à son protéger. Visiblement, elle ne pourrait pas se contenter de quelques paroles en l’air, si elle espérait le voir faire son travail correctement, elle devrait réussir à lui faire comprendre la situation, ce qui n’était pas une mince affaire : il pouvait se montrer tellement têtu lorsqu’il s’y mettait. « Tu te souviens de ce que je t’ai expliqué la dernière fois ? Que des buveurs de sangs sont venus voler nos terres, s’approprier notre territoire. Et pas n’importe lequel, Durenrisda était un point stratégique, l’une des seules parcelles cultivables du marais… Alors forcément, nous avons voulu le récupérer mais nous n’avons pas réussi. Maintenant, les Vampires se vengent et détruisent les villages que nous avons battit ici, sous prétexte qu’ils suspectent d’autres complots… Mais tout le monde sait que ce n’est qu’une excuse pour pouvoir planter leurs sales crocs dans nos coups ! » grogna la brune. Au fur et à mesure de ses paroles, elle avait serré les poings à tel point que la trace de ses ongles s’était douloureusement imprimée dans sa paume, témoignage de sa colère et de sa frustration. Même si elle pestait contre ces envahisseurs, la triste vérité était qu’elle ne pouvait rien faire face à cette situation, elle était tout bonnement impuissante. « Peut-être que Phœbe ne veut tout simplement pas que l’on récupère cette terre. Peut-être qu’elle nous réserve quelque chose de meilleur et dans ce cas, les idiots qui les ont attaqués ne méritent pas de recevoir notre attention. » La louve laissa son soupir lui échapper, déclenchant un froncement de sourcils sur le visage du blond. « Phoebe aime ses enfants et si je suis certaine d’une chose, c’est qu’elle ne les laisserait pas se faire tuer ainsi. Non, si notre Mère est impliquée ici, c’est pour nous tester, pour que l’on puisse lui prouver que l’on est capable de s’entraider dans les temps de besoin ! » « Je ne sais pas… La reine n’a pas l’air de voir les choses comme ça. » Eva sentit son corps se raidir. L’inaction de leur souveraine ne lui avait nullement échappé, et elle avait pris ce silence comme une trahison. Elle ne parvenait pas à comprendre comment leur cheffe pouvait rester en retrait dans un tel moment, alors aue des centaines des leurs périssaient sous les attaques de leurs opposants. Néanmoins, elle était encore une fois impuissante et crier haut et fort son mécontentement ne lui apporterait rien de bon. Les idiots qui s’y risquaient finissaient rarement en bon état. « Notre reine est sans doute très occupée avec d’autres soucis. » élucida-t-elle avec un haussement d’épaule qu’elle voulait désinvolte. « Pourtant, c’est elle la représentante de la volonté de Phoebe, non ? Alors si -» « Bon, ça suffit, va aider ces gens à préparer leurs affaires ! » ordonna la jeune femme avant de tourner les talons. Osiris l’observa s’éloigner d’elle sans rien ajouter, quelque peu contrarié qu’elle ne l’qi pas laissé continuer à s’exprimer. Il n’était toujours pas convaincu mais, d’un côté, avait-t-il vraiment le choix ? Non. Il était encore trop faible s’opposer à elle et même si cela le dérangeait, il n’avait d’autre choix que de ses plier à ses décisions. Avec un soupire, il s’approcha de l’une des huttes pour aider ses habitants à rassembler leurs maigres possessions.

910 mots

“Maintenant, tais-toi ! C’est à mon tour … Tu as déjà bien trop parlé ! »

*********

Un nouveau commandant était arrivé au campement. Et tout le monde s’accordait à dire qu’il n’avait pas l’air commode. Au fil des jours, nous nous étions rendus compte que, non seulement, il n’était pas très amical, mais qu’il avait un sérieux penchant pour l’ordre et pour nous faire travailler dès que les lueurs du soleil avaient disparues jusqu’à leur retour le lendemain matin. Nombreux étaient les vampires qui grognaient de mécontentement face à ce traitement à la limite de l’esclavagisme. Mais tous, nous savions que nous devions mettre les bouchées doubles pour avancer dans l’établissement de notre campement, afin d’être suffisamment bien installés avant une prochaine attaque des résistants … Surtout que nos soldats étaient pour la plupart partis assurer la sécurité des chargements de matériels ou s’assurer que les plus proches villages Evershas ne nous apporteraient pas de mauvaises surprises …

Cette nuit-là, l’humeur générale n’était pas spécialement au beau fixe … La plupart avaient faim, et moi la première ! Je n’avais toujours pas correctement appris à chasser, et j’attendais généralement qu’un de mes comparasse ramène un corps – souvent presque exsangue – pour me jeter dessus afin d’en boire les quelques dernières gouttes. Cette fois, cela faisait plusieurs jours – du moins il me semblait – que je n’avais pas pu me repaître et je sentais la folie m’embrumer le cerveau. J’avais de nombreuses absences qui me confortaient dans ma solitude et mon manque face à mon ancienne vie humaine. Pour la peine ont m’avait assignée à la surveillance des abords du camp en compagnie d’un autre vampire, bien plus expérimenté que moi, qui me servait, en quelque sorte, de chaperon, ce soir-là. En effet, j’étais tellement sous l’emprise de la Soif, que l’on ne pouvait pas compter sur moi pour planter des piquets ou même utiliser ma force fragile pour monter des palissades. Le mieux pour moi, était d’être affectée à la ronde afin d’utiliser ma soif de sang comme détecteur d’ennemis potentiels. Plusieurs fois, j’étais partie sur un coup de tête vers une odeur que je croyais celle du sang, mais qui se révéla plus tard n’être que le fumet des fèces de certains animaux … Mon compagnon vampire avait eu du mal à me garder sur le qui-vive, tout en essayant de me garder saine d’esprit. Pour finir, il avait décider de partir en chasse pour me trouver de quoi me restaurer. Quand il m’avait rapporté une biche fraîchement tuée, j’en avais eu des haut-le-cœur. Il m’était impensable de m’imaginer devoir aspirer son sang … mais dès que le vampire avait posé la bête sur le sol, ma nature vampire avait pris le dessus, et je m'étais littéralement jetée sur le cou de la dépouille. Une fois repue, je m’étais essuyé du mieux que je pouvais, mais du sang était resté sur mes mains et habits. Je n’avais pas encore trouvé la parade pour me nourrir convenablement et proprement … J’avais jeté un œil à la biche et j’avais demandé, inquiète, à mon nouveau compagnon, si j’allais un jour prendre plaisir à tuer un être vivant. Je ne savais pas ce qui m’avait le plus angoissée : que j’espérais qu’il me dise que je m’y ferrai et que j’aimerai ça ; ou que j’avais osé poser cette question, sachant pertinemment qu’il ne m’était, à ce moment, pas possible d’ôter la vie. Mon ancienne vie était encore trop présente en moi et j’avais encore du mal à me faire à ma vie vampirique. Sans parler que je ne pouvais même plus profiter des rayons du soleil …

Cette nuit-là, mon compagnon essaya de me rassurer avec ses mots à lui, ayant lui-même oublié ce que c’était que d’être nouvellement transformée. Pour finir, il m'avait raconté les derniers ragots du campement : certains s'amusaient à dire qu’à force de travailler aussi dur, une mutinerie allait se profiler ; d’autres disaient que l’épuisement général des vampires seraient une aubaine pour les Evershas rebelles ; et d’autres répondaient qu’ils avaient entendu dire que le commandant avait trouvé une parade et que bientôt nous pourrions travailler jour et nuit. Ainsi nous finirions l’établissement du camp dans les temps, sans avoir besoin de nous épuiser et nous serions à même de refouler les possibles résistants à grands coups de canines.

A l’écoute de toutes ces nouvelles, je ne savais plus quoi en penser. Serait-il possible qu’il y ait une mutinerie ici ? La plupart étaient des soldats à la solde du commandant et même si certains étaient fatigués – comme tout le monde ici – je doutais qu’ils puissent s’évertuer à former une rébellion. Les autres étaient des bâtisseurs … pourtant j’imaginais mal qu’ils puissent aussi se retourner contre le nouveau commandant car ils souhaitaient, comme chacun d’entre nous, rester sur cette terre nouvellement acquise et, selon moi, seuls les soldats et le commandant pouvaient nous garantir cela.

Quant à la possibilité de pouvoir profiter de la lumière du jour, j’avais espéré que cette nouvelle était réellement fondée ! Cela aurait pu m’aider à affronter ma nouvelle vie en gardant cette faculté de bénéficier des bienfaits du soleil … Mon cœur s’était serré en pensant que cela ne pouvait être vrai, et que j’allais sûrement être déçue. Et lorsque mon compagnon m'avait dit qu’il ne croyait à rien de tout cela : que ce soit de la rébellion ou de la possibilité d’être en plein jour, j'avais sus que je ne devrais m’attendre à rien. Il avait sûrement raison. Après tout, il était plus expérimenté que moi et avaient vu des choses que moi-même, durant ma vie humaine, je n’avais pas osé penser …

Pourtant, lorsque je me suis rendue dans ma tente pour passer la journée, j’avais une grosse baisse de moral. J’avais été assez bête pour croire à ses sornettes et avais espéré avoir ce nouveau pouvoir. Ainsi, j’aurais peut-être pu essayer de rentrer chez moi, chez mes parents, et retrouver mon frère … Peut-être qu'avec cette faculté, j’aurais pu me faire suffisamment confiance pour rester moi-même et retrouver un tant soit peu cette humanité que me manquait tant. Le fait de devoir vivre la nuit me rendait folle ! Ça et le fait de devoir me nourrir de sang … J’avais tellement perdu … Comment allais-je faire pour revoir ma famille ? Je n’allais peut-être jamais y réussir … et cela me rendait terriblement triste …

Cette nuit-là, je n’avais pas réussi à me reposer. Ma tête était parcouru de nombreux souvenirs, tous plus mélancoliques les uns que les autres. Je n’arrivais pas à oublier mon ancienne vie et j’avais l’impression d’avoir été volée. Pourtant je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même. J’avais voler trop près du danger, et je m’étais brûlée les ailes. Je devais en payer le prix à présent. Je savais que plus jamais ma vie ne serait la même … même si j’avais du mal à l’accepter. Et cette histoire de pouvoir retourner à la lumière du jour n’avait pas aider à atténuer mon accablement. Peut-être que la seule solution à ce problème était d’aller parler au commandant en personne afin de savoir s’il pouvait ou non me permettre de revoir le soleil sans me tuer sur le champ ? Mais peut-être qu’il était suffisamment préoccupé par l’avancée du campement et par contrer les attaques des Evershas pour m’accorder audience … Si cela se trouve il se mettra dans une rage folle et ce sera lui qui me tuera sur le champ ? … Mieux valait ruminer toute seule encore quelques temps … J’allais bien réussir à apprécier cette vie non ? D’autres avaient bien réussi ? Pourquoi pas moi ?

*********

« Je ne suis plus triste à présent. J’ai découvert beaucoup de choses depuis cette nuit-là. Et même si le soleil reste toujours un obstacle pour moi, je dois avouer que j’ai trouvé une raison de continuer ma vie. La vie vampirique n’est pas aussi terrible que je me l’imaginais … Peut-être que comme me l’avait dit mon compagnon de cette nuit, je m’y étais faite. Je n’en sais rien. A vrai dire, j’ai l’impression que ma vie humaine n’existe plus, comme si c’était une autre personne qui avait vécu cette vie. Peut-être que c’était le cas après tout ? »

1397 mots.
Je suis hors time, mais j'avais vraiment envie de le faire celui-là <3