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 La foi comme seul salut [Qête solo Ϟ Barnabé-Babelda]

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Babelda
~ Rehla ~ Niveau III ~

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◈ YinYanisé(e) le : 20/04/2015
Babelda
Sam 15 Aoû 2015, 19:48


Barnabé Tilluiel avait bénéficié de ce que lui-même qualifiait de « longue et belle vie bien remplie ». Son caractère humble et tout ce qu’il y a de plus correct l’avait empêché de se vanter des exploits qu’il avait, dans une jeunesse lointaine, pu accomplir, et il avait tut les merveilles qu’il avait pu contempler. Bien qu’il garde le silence sur ces sujets, il était certain, sans l’ombre d’un doute, que ses yeux de vieillards avaient observé des secrets que ce monde renfermait, les gardant jalousement cachés. Ou tout du moins avait-il pu les contempler avant que sa vue ne se dégrade et que ses yeux ne souffrent de la cataracte. Ainsi se disait-il chanceux d’avoir été gratifié d’une telle vie, dont il gardait des souvenirs tout aussi enchanteurs qu’affreux. Mais il se sentait fatigué, lasse de cette vie de recherche, d’apprentissage sans fin, et il décida qu’il était temps de renoncer à son aventure de nomade.

Cette décision avait été précipitée par les évènements récents, qui troublaient les temps de paix qu’avaient connue les Terres du Yin et du Yang. Le danger qui régnait sur chacun des continents –y compris sur cette étrange île apparut récemment- avait inquiété son cœur de père, et il s’était vu animé d’un sentiment fort, puissant et étouffant : l’amour. L’amour paternel qu’il portait à son unique enfant. Son trésor, la seule personne qu’il était vraiment sûr d’aimer plus que toute autre chose dans ce monde. La seule qu’il pourrait échanger contre le savoir absolu qu’il essayait d’atteindre. Ce sentiment avait enflé en lui telle la gorge d’un crapaud croatant. Sous l’inquiétude, il s’était hâté de lui écrire une lettre, lui ordonnant de retourner à ses côtés. De cette manière, il pourrait garder un œil sur elle et s’assurer que rien de mauvais ne lui arriverait. Bien évidemment, rien ne pouvait lui assurer que sa force serait suffisante pour la protéger, en vue des évènements maléfiques qui se passaient. Mais on se sent toujours rassuré lorsqu’on a un contrôle sur ce que nous désirons. Et ce que désirait Barnabé, c’était de savoir sa petite fille en vie, saine et sauve.

Ainsi, lorsqu’elle était arrivée dans le désert, il s’était précipité dans ses bras pour la serrer tout contre lui, sentir son cœur battre, et la savoir vivante. Le lendemain, les deux voyageurs récupéraient leurs brics, leurs bracs, et une roulotte pour voyager sur les terres dévastées du continent naturel. Après tout, même cet endroit se voyait ravagé par les tremblements. Et de ce fait, le désert lui semblait trop dangereux pour y rester. Voici sa motivation pour retourner sur les routes aussi rapidement. Il souhaitait se rendre au plus vite dans un lieu qu’il savait sûr : les terres des magiciens. Plus particulièrement à Caelum, l’île entre ciel et terre. Un chef d’œuvre que sa reine avait elle-même battit. Une partie de sa famille était partie s’y installer, et il s’était dit que ce ne serait pas une si mauvaise idée de les rejoindre, au moins le temps que les choses se calment.

« Tu penses qu’on en a encore pour longtemps ? » La question de son enfant amusa le vieil homme. « Et bien et bien, je ne te savais pas si impatiente ! Fais attention, Javaah déteint plus sur toi que je l’aurai cru. » Cette remarque ne sembla pas ravir Babelda qui se renfrogna. « Je ne suis pas comme Javaah. » - « Oh vraiment… » La roulotte était tranquillement tirée par deux magnifiques chevaux, qui semblaient à bout de force. Et pour cause, Barnabé ne les avait pas laissé se reposer depuis qu’ils avaient repris la route, en descendant du bateau. « C’est juste que je ne me suis toujours pas remise de mon mal de mer. » En effet, elle avait le teint légèrement maladif, blafard. « Ne t’en fait pas, nous ne sommes plus loin. Nous avons déjà parcouru le duché du Iten, et celui de Eliassen. Nous allons arriver dans celui de Vallen, et de là il ne nous restera qu’une heure pour atteindre la maison de ta tante. » Acquiesçant silencieusement, Babelda vint poser sa tête sur les genoux de son père, visiblement épuisée. Le magicien commença alors à passer sa main osseuse dans la longue chevelure de sa fille, comme il l’avait si souvent fait dans son enfance. Ce geste familier sembla apaiser la Rehla. « Tu ne m’a jamais parlé de Tante Munille. » - « Ceci mon enfant, est principalement dû au fait qu’il n’y ait jamais eu de chose à dire à son sujet. » - « Vous ne vous entendiez pas ? » -« Oh nos avis ont souvent été différent et cela engageait souvent des conflits entre nous. Elle est aussi têtue que moi ! Peut-être cela a-t-il effectivement participé à notre éloignement. » Les yeux perdus dans le vide, semblant vaguement suivre la route qu’ils empruntaient, il garda le silence quelques instants, pensif. « Mais regarde, nous allons bientôt avoir une petite réunion de famille ! » Il partit dans un grand rire, camouflant derrière lui le malaise qu’il voulait taire devant sa progéniture. Il craignait quelque peu les retrouvailles avec sa vieille sœur.

Babelda, elle, ne sembla pas se douter un instant que son père lui cachait cette angoisse, et lui demanda de lui raconter une histoire. Ce qu’il fit avec plaisir. Il avait toujours aimé les contes, et avait un talent d’orateur qui avait beaucoup inspiré Javaah.

La nuit était pleine, lorsque les deux voyageurs arrivèrent finalement à destination. Babelda s’était finalement endormie, car la route avait été beaucoup plus longue que ne l’avait prédit le mage blanc. Au son de la calèche, les chevaux hennissant dans le silence de cette campagne tranquille, une femme était sortie d’une chaumière isolée, d’où s’échappait par la cheminée une fumée chaleureuse. La femme était âgée, les âges marqués sur son visage par de profondes rides et de grosses cernes. Elle était replète et trapue, ce qui lui donnait une carrure de gorille. Elle portait un vieux tablier tâché, par-dessus de chauds vêtements en laine, pour parer la fraicheur du soir. Sa chevelure aussi sèche que la paille de l’écurie, gardait sa couleur flamboyante, un roux carotte, à travers les fils blancs qui venaient entacher le feu ardent –ce n’était pourtant pas faute d’essayer de les dissimuler derrière les lotions capillaires de Dame Pointedor. Les mains sur les hanches, elle attendait que les nouveaux arrivants viennent s’arrêter près de sa maisonnée. « Bonsoir Munille. Désolé d’arriver si tardivement. » - « Bonsoir, Barnabé. Vous avez fait bon voyage ? » La voix était brusque, sans la moindre note de chaleur. Pourtant elle ne semblait pas hostile à sa famille. « Et bien la mer n’est plus aussi sûre qu’avant, et nous avons eu un peu de mal à gérer les créatures. Et les tremblements nous ont posé quelques soucis également. Un éboulement nous a forcé à rebrousser chemin. Mais nous n’avons croisé aucun bandit. » - « Hum, où te croyais-tu ? Tu n’es plus dans ton désert sauvage ! Ici, les gens savent se tenir. Et regarde-moi cette pauvre enfant ! Elle semble glacée ! Tu n’avais pas de couverture ?! Quel piètre père fais-tu ! » Avec un soupir, Barnabé descendit de la calèche, tandis que Babelda ouvrait des yeux ensommeillés sur la demeure familiale, réveillée par la voix de contralto de sa tante.

« Laisse, Viktor viendra s’occuper des chevaux et décharger tout ton bazar. Venez plutôt vous réchauffer. » Babelda ne se fit pas prier. Elle qui ne portait sous sa cape qu’une simple robe –bien que plus chaude qu’à l’accoutumée : de longues manches englobaient ses bras, un long col protégeait son cou, et les pans de robes avaient été remplacés par d’épais jupons. Ils s’engouffrèrent donc par la porte d’entrée, d’où parvenait un doux fumet de rôti et de tout autres mets succulents qui les attendaient. « Les enfants sont déjà au lit. Vous ne les verrez que demain. » - « Oui, c’est bien normal… » Barnabé esquissa un sourire, que sa sœur ignora superbement. « Ma chérie, veux-tu t’assoir ? Nous vous avons laisser de quoi diner. » -« Merci beaucoup, ma tante. » Et, comme on l’avait invité à le faire, elle se débarrassa de sa cape avant de s’installer pour engloutir son repas. Barnabé, visiblement plus réservé, mangea avec plus de retenue, n’essayant pas de relancer la conversation avec sa sœur qui était déjà occupée à éplucher une montagne de patates.

Les deux invités soupaient en silence sous le regard d’un jeune garçon, la trentaine, les cheveux aussi roux que sa mère. On aurait entendu les mouches voler, jusqu’à ce que des coups violents soient portés à la porte. Derrière, on entendait la voix paniquée, hystérique d’une femme. Monille abandonna ses féculents pour voir qui venait la déranger à cette heure tardive. Aussitôt sa porte ouverte, une femme affolée entra, les larmes sur les joues, visiblement bouleversée. Elle tenait un discours incompréhensible et Munille posa ses grosses paluches sur ses épaules pour la calmer. « Attendez, Valène. Je n’ai pas compris un traitre mot de ce que vous disiez, ressaisissez-vous bons dieux ! » Avec un effort sur humain, la nouvelle venue reprit son souffle et parvint difficilement à parler lentement, pour que tous puissent comprendre. « Je… J’ai perdue Margarette. Elle n’est pas rentrée et je ne la retrouve plus nulle part, j’ai peur qu’elle soit allé au temple d’Ilios. »

Babelda releva enfin son nez de son soupé, en sentant l’atmosphère s’alourdir. Elle avait vaguement compris que quelqu’un manquait à l’appel. « Ne vous en faites pas, nous allons la retrouver. Viktor, prends ton manteau, nous y allons, vite. » - « Nous allons venir avec vous ! » Sa déclaration ne rencontra aucune objection, aussi Barnabé se leva-t-il, tirant par sa robe Babelda qui semblait vouloir rester terminer de manger. « A quoi ressemble-t-elle ? » – « Elle a quatre ans… Elle… Elle portait un manteau rose et une robe jaune. Elle a des couettes et… » Et ce fut tout ce qu’elle parvint à dire avant de replonger dans les sanglots. « Rester ici, dans votre état, vous ne parviendriez pas à l’apercevoir même si elle se trouvait devant vous ! »

La petite troupe s’aventura de nouveau dans le froid nocturne. Armés de torches, ils fouillaient dans l’obscurité, appelant le nom de l’enfant égarée. « Et ce temple dont parlait la mère ? » - « Si tel est le cas, nous ne la retrouverons pas avant le prochain cycle lunaire. » « Pourquoi pas ? » « Parce qu’on ne peut simplement pas s’y rendre ! Vous êtes arrivés sur l’île juste à temps. Elle s’est élevée aujourd’hui, et nous n’avons aucun moyen d’atteindre le temple lorsque l’île est dans le ciel. » - « Je suis certain qu’il y a un moyen. » « Oui, mais il est bien trop dangereux. Si elle est réellement partie là-bas, le clergé la trouvera et s’occupera de la petite. Nous devrions mieux continuer les recherches ici-bas. » Comme s’il n’avait pas entendu les mises en garde de sa cadette, le magicien déclara « J’irai. Comme cela, vous pourrez rassurer sa mère en lui promettant que sa fille est sauve. » -« Tu es fou. » -« Ce n’est point la première fois que je l’entends, et ça ne sera certainement pas la dernière. » - « Je viens avec toi, père ! »
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Babelda
Dim 06 Déc 2015, 11:15

La déclaration sortie spontanément de ses lèvres, elle n’avait même pas eu besoin d’y réfléchir. Si son père décidait de s’aventurer dans des zones dangereuses, elle irait avec lui ! Car s’il éprouvait envers elle un sentiment protecteur, comme tout père pour son enfant, l’inverse était réciproque : Babelda s’inquiétait continuellement pour la santé de son vieillard de père. Contrairement à elle, il n’avait pas hérité d’une jeunesse quasi-éternelle, et les ans passés avaient usés son corps. Il serait donc bien facile de le voir attraper une vilaine grippe de laquelle il ne se relèverait jamais, ou bien de le voir chuter et se briser les os ! Non, elle ne pouvait définitivement pas le laisser partir seul dans un paysage hostile. Même si elle doutait pouvoir lui venir en aide dans cette aventure –peut être même serait-elle un fardeau pour lui, étant donné sa maladresse légendaire- elle se sentirait rassurée si elle était dans les parages pour lui prodiguer les premiers soins en cas d’accident.

Barnabé se retourna face à son enfant, l’observant dans la lueur du clair de lune. Babelda pensa qu’il allait la sermonner, la dissuader de l’accompagner et essayer de la raisonner –lui aussi devait se douter qu’elle ne ferait que le ralentir, car malgré son âge avancé, il gardait une vivacité étonnante- aussi se préparait-elle déjà à se lancer dans un long discours pour lui tenir tête. Mais à sa grande surprise, l’homme se contenta de lui répondre par un sourire satisfait, son regard bienveillant ravivé par une lueur de fierté. Comme s’il appréciait de voir ce qu’était devenue sa petite fille durant ces longs mois loin du cocon familial, qu’il se réjouissait de voir qu’elle avait gagné en assurance et en courage. La Rehla ne put s’empêcher de lui retourner son sourire, se sentant flatté par cette réaction.

Derrière la silhouette de Barnabé, on entendit un long soupir désapprobateur raisonner dans l’air. Munille, qui semblait trouver cette idée idiote, se résigna malgré tout –elle savait qu’il n’était pas nécessaire d’essayer de parlementer avec le père, il ne changerait pas d’avis. Aussi se contenta-t-elle de les mettre en garde contre les dangers qu’ils rencontreraient : « Ceux qui s’y sont aventurés n’en sont pas tous revenus. Les routes sont tortueuses et dissimulent de nombreux pièges, comme des créatures ou des attaques magiques. Peut-être même qu’il y a des bandits ! » Elle reprit son souffle avant d’ajouter d’une voix lasse : « C’est du suicide… » Barnabé s’approcha de sa sœur et lui serra les épaules. « Douterais-tu de mes capacités à nous défendre, ma fille et moi ? » La rousse répondit quelque chose que Babelda ne parvint pas à entendre, mais sa déclaration devait être hilarante, car le mage parti dans un grand rire. « Ne t’en fais pas, je suis toujours rentré à la maison, et j’ai bien l’intention d’y revenir une fois de plus ! » Mais cela ne sembla pas la rassurer car elle lança une dernière objection pour essayer de les retenir : « Il vous faudra au moins une journée de marche… Vous êtes certains de ne pas vouloir rester cette nuit et partir au petit matin ? » Cela aurait bien arrangé la brune qui s’apprêtait à accepter la proposition, mais se fit devancer par le vieillard. « Oh non, plus tôt nous partirons, plus tôt la mère pourra retrouver son enfant. » Babelda se retint de gémir, une nuit de repos n'aurait pas été du luxe.

Munille se dégagea de l’étreinte de son ainé et les informa que son premier fils irait avec eux. Puis elle s’en alla de son pas gauche jusqu’à sa demeure pour leur chercher des vêtements plus chauds à porter. Viktor s’approcha du duo. Son apparence tranchait avec la leur, mais il ressemblait à sa mère. Bien qu’il ait atteint plusieurs centimètres supplémentaires, il possédait la même carrure trapue, musclée, avec des épaules larges, et avait hérité de sa chevelure enflammée. Il dégageait une aura de force brute, sans doute le résultat de longues heures passées à travailler la terre des champs autour de leur maison. Babelda se demanda si lui aussi était un magicien –après tout, cette race était généralement plus aérienne que ce spécimen-ci. Sa race n'avait pas d'importance, il représenterait un atout majeur pour le trio, et la voyageuse se sentit plus en sécurité en le sachant membre de l'expédition.

Quelques minutes plus tard, on leur apportait des manteaux, de la nourriture et une paire de chevaux. Babelda et son père grimpèrent sur un étalon à la robe alezan. Une fois prêts, ils se mirent en route, bercés par les rayons glacés de la Déesse Lune. Bien vite, les étoiles se mirent à chanter, et semblèrent scintiller plus vivement. Babelda ferma les yeux pour apprécier leur hymne céleste, se laissant bercer par le murmure mélodieux.

Après une heure de chevauchée, les aventuriers arrivèrent au bord d’une falaise abrupte. Les parois avaient été rongées par les eaux, creusant des cavités et autres pics mortels rendus plus sinistres encore par l'obscurité. Un sentier à peine plus large semblait malgré tout se dessiner contre le mur de roche, et conduire jusqu’au pied de la muraille. Un seul pas de travers et leur voyage se terminerait sur un stalagmite, telle une punaise épinglant leur cadavre au sol. Babelda déglutit avec peine face à cette vision. Allaient-ils vraiment devoir passer par ce sentier ?

Devant le regard paniqué de sa cousine, Viktor hésita à parler mais se justifia tout de même, concrétisant les craintes de la douce et belle. « C’est le chemin le plus rapide, si nous voulons arriver au temple dans un délai respectable… Et nous allons devoir laisser les chevaux ici. » A contre cœur, la jeune femme descendit de sa monture et grimaça devant ses jambes engourdies qui semblaient peiner à supporter son propre poids –cette veste pesait un tonne ! Une fois à terre, elle aida son géniteur à descendre de leur monture, puis ils suivirent le titan qui leur faisait office de guide.

Babelda, avec sa robe volumineuse et ses petits souliers, n’était définitivement pas en tenue pour s’aventurer dans des endroits comme celui-ci, et elle regretta de ne pas avoir demandé des vêtements de rechange. Mais il était trop tard et elle se contenta donc de soulever d’une main les pans de sa robe, et de s’appuyer au mur de l’autre. Pas à pas, elle avança, se faisant des frayeurs à chaque déséquilibre qui menaçait de la faire basculer dans le vide –heureusement que Barnabé retenait sa fille d’une poigne ferme, la plaquant contre la falaise lorsque le danger devenait trop grand. Trente minutes supplémentaires furent nécessaires pour atteindre la fin du sentier. Le cœur palpitant et enfin rassurée d’avoir regagné le sol, Babelda demanda quelques minutes de repos pour se remettre de ses émotions. A contre cœur, Viktor accepta en voyant l’état désastreux dans lequel Babelda était déjà.

Essoufflée, Babelda profita de cet instant pour observer les lieux. Le chmin qui se dessinait devant eux semblait, comme l'avait prédit Munille, étroit et tortueux, sombre. Il était encadré des deux côtés par la falaise, qui semblait les piéger ici bas. Prise d'une soudaine impression d'être épiée, Babelda frissona et referma sur ses épaules les pans de la veste en fourrure. « Comment te sens-tu ? Tu veux rentrer à la maison ou nous attendre ici ? » -«  Non c’est bon, je peux venir avec vous ! » Babelda inspira un grand coup et se redressa. Il restait une longue journée de marche devant eux, et les deux hommes ne semblaient pas fatigués. Il était hors de question qu’elle se laisse ainsi devancer, et se remit donc en route, soudain plus en forme.

Le sol, encore recouvert d’eau il y a quelques heures, semblait déjà avoir séché. Mélange de roche et de boue, la terre se révélait tout aussi périlleuse que le chemin qu’ils avaient empruntés : des trous cachés sous des flaques d’eau de mer n’étaient que des pièges pour faire tomber la maladroite, et la boue semblait aspirer son pied à chacun de ses pas, menaçant de lui avaler un soulier plus d’une fois. Elle finit par tomber au sol, à plat ventre, faisant prendre un bain de gadoue à son visage et ses vêtements. Son cri raisonna à travers la nuit, alertant ses deux compagnons qui revinrent sur leurs pas pour l'aider à se relever. « Babelda ! Ca va, tu n'as rien de cassé ? » Tremblante, Babelda accepta la main qu'on lui tendait pour se redresser. « C'est bon, ca va... je vais bien... » Son intonation semblait pourtant dire le contraire. Alors que Barnabé allait répondre à sa fille, on entendit des rires s'élever de nul part.

Les trois aventuriers levèrent leurs nez pour trouver d'où provenait ces sons rendus sinistres par la situation. Finalement, Babelda aperçut des silhouettes se découper dans la pénombre d'une grotte,  puis s'avancer suffisamment dans la faible lumière nocturne. Il s'agissait d'un groupe d'hommes, tous habillés de chauds manteaux, un sourire carnassier défigurant pour la plus part leurs visage déjà ignobles aux yeux de la Rehla. « Et bien qui voilà ? » Le plus grand d'entre eux, probablement le chef de la troupe, avait parlé d'une voix forte, qui raisonna dans le canal. Viktor répondit en dégainant une longue épée, visiblement hostile à ces étrangers. « Que nous voulez vous ? » - « Oh mais trois fois rien, mon bon ami ! Nous ne sommes que de bons citoyens de Caelum, et nous sommes simplement là pour vous aider à retrouver votre chemin... » - « Nous ne sommes pas égarés, merci quand même. » - « En êtes vous certains ? Car voyez-vous, vous ne voulez pas aller plus loin dans cette direction. Je vous l'assure. »

Tandis que les deux hommes dialoguaient les complices du chef en avaient profité pour descendre de la corniche qui les abritaient, deux d'entres eux se positionnant devant le trio, et les deux autres leur barrant le chemin du retour. Ils étaient encerclés. Babelda se pressa contre son père, qui lui offrit un bras protecteur tout en posant sa main sur sa baguette, prêt à la sortir de sa poche. « Bien évidement, nous attendons une compensation pour nos services, mais comme je vous l'ai assuré... C'est trois fois rien... » Les brigands se mirent à rire et Babelda intercepta le regard de l'un d'eux se poser sur elle. Sa gorge se noua et elle se blottit d'avantage contre Barnabé. Viktor, quand à lui, semblait surveiller les deux ennemis qui s'étaient postés face à lui, dirigeant la pointe de sa lame vers ses adversaires. Car il était certain que la situation allait dégénérer en combat. « Poussez-vous et laissez-nous passer. » - « Je me vois obliger de refuser, mon brave ami. » - « Très, bien, dans ce cas, vous ne me laissez plus de choix. » Et il attaqua.

Barnabé, qui s'était tenu prêt tout ce temps, dégaina à son tour sa baguette, et la pointa en direction des deux autres voleurs. Il cria un sortilège dans leur direction, et un fil argenté s'échappa du bout de boit. Le temps qu'ils arrivent à leur hauteur, le filament avait pris de l'ampleur, et avait gonflé jusqu'à former un griffon grandeur nature, entièrement constitué de cette matière magique et luisant d'un ton bleuté. L'animal fonça sur les attaquants et, lorsqu'il les frôla, les deux corps furent projetés dans les airs comme de vulgaires poupées. Le griffon retourna alors près de son maître, tournant autour de lui pour former un périmètre de sécurité.

Barnabé et Babelda eurent ainsi le temps de rejoindre une cavité et de s'y cacher. Mais le magicien ne pouvait laisser son neveu se battre seul. S'il lui arrivait quoi que ce soit, il en serait responsable. « Ne bouge pas d'ici, je vais aider Viktor. » - « Non père ne me laissez pas seule je vous en prie, pitié ! » Les larmes montaient aux yeux de l'enfant, soudain redevenue fillette, et ses bras tremblaient de peur. Barnabé, pressé, se contenta de lui sourire -un sourire qui se voulait réconfortant mais où l'on voyait clairement percer de l'inquiétude- et de lui murmurer « Tout ira bien ». Puis, armé de son spectre lumineux, il s'en alla rejoindre le combattant pour lui prêter main forte.

Babelda s'accroupi et resta cachée dans la grotte, observant de loin le combat. Elle était effrayée, et en même temps remplie de rage. De rage envers elle même, pour ne pas pouvoir se défendre, pour être si faible et inutile ! Elle détestait rester à l'écart, sans pouvoir participer au combat. De ne pas pouvoir protéger ceux qu'elle aimait. Elle réfléchit à toute allure à ce qu'elle pourrait faire. Essayer de leur lancer un sort de spleen ? Non, mauvaise idée, si le sortilège atteignait Barnabé ou Viktor avant de toucher ses ennemis, le résultat pourrait être désastreux : elle pourrait, par mégarde, provoquer leur suicide -chacun sait que le spleen vide tous ceux qui sont touché de leur envie de combattre, de lutter, il serait bête de les voir jeter leurs armes au sol. Tomber dans l'oubli et essayer de leur lancer des flèches ? Elle n'était pas sûre de réussir à viser juste, et une flèche pourrait aller blesser ses alliés. Impuissante, elle se contenta donc de regarder les autres se battre pour elle.
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Babelda
Mar 29 Déc 2015, 16:22


Barnabé courait aussi rapidement que ses vieux membres le lui permettaient, c’est-à-dire à une allure fortement réduite. Il ignorait la douleur qui se réveillait dans ses pauvres hanches maltraitées, faisait taire sa rotule rouillée, et avançait bravement vers le cœur du combat, où Viktor tenait tête aux deux premiers assaillants –et bientôt trois, puisque le chef se rapprochait dangereusement de la zone. Toujours entouré de son animal fantastique, il se dirigeait droit vers le leader, dans l’espoir de le ralentir, mais il fut stoppé dans sa course par les mêmes brigands qu’il avait, un peu plus tôt, repoussé. Mis à part leurs vêtements salis par la boue, ils ne semblaient pas avoir subi de gros dégâts suite au choc provoqué par son bouclier.

« Allez vieillard, soit gentil et pose ton bâton. On ne voudrait pas devoir te faire de mal. » Barnabé fronça les sourcils et resserra sa prise sur sa baguette, la levant devant lui, visant l’auteur de ces mots. « Ne vous a-t-on jamais appris de ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué ? » Cette déclaration, dite d’une voix calme mais menaçante, amusa les deux diablotins. Barnabé profita de leur inattention pour lancer le griffon sur eux. L’animal galopa vers eux, avant de changer brusquement de direction et de revenir auprès du magicien. Celui-ci n’avait pas réellement eut l’intention d’attaquer de front ses adversaires, ou du moins, pas avec cette arme. De longues années d’entraînement lui avaient appris qu’il ne servait à rien d’essayer d’utiliser une tactique offensive avec elle : bien loin de lui porter secours, son bouclier choisirait alors de se retourner contre lui et l’enverrait au sol. Son griffon était là pour le protéger, en aucun cas pour faire du mal aux êtres vivants. Si sa défense avait marché plus tôt, c’était uniquement parce que les deux autres les poursuivaient.

Les deux bandits ne s’étaient pas vu projetés en l’air, mais s’étaient vivement reculés pour esquiver l’attaque. Ce geste sembla grandement les déranger, car l’un d’eux dégaina une arme –une hache qu’il avait jusque-là porté sur son dos- et le second fit apparaitre des éclairs entre ses doigts. Etait-il élémental ? Cela serait des plus étonnants, étant donné la nature conflictuelle que cette race entretenait avec les magiciens ayant amené à une surveillance de ce peuple sur les terres des mages. Cependant l’heure n’était pas aux questions, mais bien à l’action. Barnabé pourrait gérer le barbare à la hache, mais le deuxième lui donnerait plus de fil à retordre : son bouclier était incapable de parer les attaques magiques.

Les bruits métalliques dans son dos lui indiquèrent que Viktor n’en avait toujours pas terminé avec ses adversaires. Il devrait se débrouiller tout seul pour cette fois. Le barbare se lança sur lui, Barnabé le contrat en lui envoyant le griffon. Mais cette attaque laissa une ouverture pour le contrôleur de foudre, qui fit naître un éclair de ses doigts, dans la direction du vieillard, qui se jeta à terre pour éviter de se faire rôtir. Sans se retourner, il se mit à ramper pour mettre autant de distance qu’il le pouvait entre eux. Mais en vain, car déjà les attaques recommençaient : des éclairs éclataient tout près de lui, entre ses jambes, près de sa main, frôlant son flan… Sans jamais le blesser gravement toute fois –ses oreilles bourdonnantes mises à part. Comme s’ils voulaient jouer un peu avec lui avant de le tuer, leurs rires témoignant du plaisir qu’ils prenaient à le torturer.

Sa baguette toujours en main, il essaya de lancer un nouveau sortilège pour faire apparaitre son griffon, mais il était épuisé, et rien d’autre  qu’un filament cotonneux ne s’échappa de sa baguette. Une paire de bottes se posta devant lui. C’était la fin, il allait mourir ici, à vouloir trop jouer il avait fini par se bruler les ailes. Peut-être aurait-il dû écouter Munille, finalement.

Alors qu’il adressait des adieux silencieux au monde qui l’avait accueilli pendant tant d’années, il entendit un hoquet de surprise au-dessus de sa tête, en même temps qu’un liquide chaud éclaboussait sa tenue de voyageur. Puis le corps tomba à terre, la gorge béante, du sang giclant de partout. En relevant la tête, il aperçut Babelda, son arc à la main, le visage défiguré par la peur. Elle se hâta de chercher une seconde flèche dans son dos. Barnabé se remit à ramper aussi rapidement que possible, tandis qu’il entendait le hurlement de rage du second compagnon. La Rehla décocha la flèche, qui manqua sa cible. Paniquée, elle rechargea et visa juste, cette fois. Le bâton pointu alla se nicher dans la poitrine du second attaquant.  

Barnabé se redressa, tremblant, pour observer le massacre. Il n’avait jamais aimé la violence, et il était surpris que son propre enfant puisse en faire usage. Bien évidemment, cet acte lui avait permis de garder la vie. Mais il était sous le choc de voir un tel comportement venant de sa fille.

Viktor, par un habile tour d’épée, désarma le dernier adversaire encore debout, et déclara : « Vous aurez mieux fait de vous abstenir. » Barnabé cru un instant qu’il allait plonger sa lame dans le corps à terre de son ennemi. Mais le jeune homme se contenta de cracher à côté de lui. « Prend tes hommes avec toi et partez. » Et sans dire un mot, il reprit la route, de son pas lourd. On pouvait cependant voir un changement dans sa démarche. Comme s’il boitait. D’une main, il se tenait le flan. Barnabé comprit, sans trop d’efforts, qu’il avait été blessé dans la bataille. Il se précipita vers son neveu, suivi de près par sa fille. Tous deux le prirent par un bras et l’aidèrent à marcher.

Une fois qu’ils furent suffisamment éloignés, Barnabé insista pour qu’ils se reposent dans une des grottes qui parsemaient les parois des falaises. « Je peux continuer, je vous assure. » -« Et puis quoi encore, si je ne te soigne pas immédiatement, tu te videras de ton sang ! Et nous en avons assez fait pour aujourd’hui, il est temps de dormir. » Trainant à moitié le combattant derrière lui, il les guida vers une antre, et l’aida à s’installer contre un mur. « Babelda, va voir si tu peux nous trouver de quoi faire du feu. » La Rehla se redressa et s’en alla sur ses ordres. « Bon, à ton tour mon grand, enlève moi cette chemise que je vois ce que je peux faire. » Avec toute la mauvaise volonté dont il put faire preuve, le blessé releva son vêtement pour se laisser examiner. Le docteur de fortune palpa la plaie, pour essayer d’évaluer les dégâts. « Hum, ce n’est pas aussi profond que je ne me l’était imaginé. Je vais pouvoir t’arranger ça. » Il positionna sa main à quelques centimètres au-dessus de la coupure, les sourcils froncés par la concentration, et l’on vit apparaitre une douce lumière bleue, qui alla soigner les maux du jeune homme. Celui-ci ne put retenir un soupir de bien être, en même temps que la douleur disparaissait.

Une fois que le blessé fut rafistolé, Barnabé lui prescrivit une longue nuit de sommeil et lui interdit formellement de faire le moindre effort. « Je vais aider Babelda à ramasser de quoi faire du feu. Tu n’as qu’à grignoter un bout en nous attendant. » En disant cela, il désigna un sac en cuir qui contenait les dernières prévisions qu’il leur restait. Le second avait été perdu dans la bataille, tailladé par les coups d’épées. Le mage se retira et sorti de la grotte de son pas claudiquant.

Il fut accueilli par les rayons lunaires, qui éclairaient maigrement leur chemin. Levant le menton, il inspira profondément. Une forte odeur marine envahit ses narines. Même si la mer s’était retirée du canal, elle était encore maitresse de ces lieux à peine quelques heures plus tôt. Même lui avait du mal à y croire. Il rouvrit les yeux qu’il avait gardé clos, et scruta le ciel, comme s’il était à la recherche de réponses. Sans qu’il ne sache l’expliquer, il ressentait une sorte d’excitation à l’idée de rejoindre le temple d’Illios. Lorsqu’on lui avait dit que la fillette s’y trouvait, il avait su au fond de son cœur qu’il devait s’y rendre, comme s’il y était appelé… Un drôle de pressentiment qu’il ne s’expliquait toujours pas mais qui grandissait au fur et à mesure qu’il s’approchait de sa destination.

Il reporta son attention sur sa fille. Elle se tenait debout, les bras le long du corps et le visage penché vers la lune. Il l’entendait fredonner une chanson dans une langue qu’il ne comprenait pas. Il l’avait déjà vu faire cela de nombreuses fois, tout comme sa mère avant elle… Les deux femmes, même si elles maintenaient appartenir à la race des magiciens, n’en étaient de toute évidence pas. Barnabé les avaient toujours considérées comme des créatures sublimes, mystiques, envoutantes, même s’il n’était jamais parvenu à trouver ce qu’elles étaient exactement. Il profita encore quelques secondes de la douce voix de sa fille qui s’élevait dans les airs, avant de se décider à signaler sa présence, par un raclement de gorge.

Babelda fit volte-face dans un sursaut. Ses joues rosies par le froid, son manteau serré sur son corps maigre, ses membres tremblant… Elle semblait frigorifiée. Pourtant, elle ne semblait pas pressée d’allumer un feu. « Tes recherches ont été infructueuses, à ce que je vois. » Barnabé avait dans la voix une pointe de reproche, se doutant que sa fille s’était laissée distraire par ses chants plutôt que de chercher ce qu’il lui avait demandé. « Le rare bois que j’ai pu trouver était trop humide pour espérer l’utiliser. » La mer avait de toute évidence rendu les branches inutilisables, et la nuit tombante n'avait pas suffit à les sécher. Barnabé soupira, bien embêté par la situation. Le froid aurait vite fait de les doter d’une bronchite ou d’au moins un bon rhume ! De plus, la nuit semblait particulièrement fraiche. Ils devaient trouver un moyen rapide de se réchauffer s’ils ne voulaient pas tomber malade… Même s’il faisait carburer ses méninges, aucune idée ne lui parvint et il se résigna à passer la nuit dans le froid, espérant que les manteaux fournis par Munille leur suffiraient. Heureusement, la grotte les protégerait du vent. « Ne tarde pas à nous rejoindre, ma fille. »

Le vieillard laissa sa fille profiter de la lune quelques minutes et se retira. Il rejoignit son neveu qui avait déjà piqué du nez. Le combat l’avait lessivé, et après avoir grignoté un fruit dont il avait laissé traîner la peau, l’épuisement avait eu raison de lui. Barnabé laissa échapper un grognement, à mi-chemin entre le rire et la toux, avant de recouvrir l’adolescent de son manteau de fourrure, puis de laisser un long bâillement étirer ses mâchoires. Lui aussi n’allait pas tarder à rejoindre les bras de Morphée.
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Sam 09 Jan 2016, 22:43


Bebelda était, de toute évidence, chamboulée. Par quoi exactement ? Si vous regardiez autour d’elle, vous n’auriez rien trouvé d’anormal, rien qui puisse vous donner un indice sur la provenance de son malaise. La gêne de s’être fait surprendre en train de chanter avec les étoiles, communiquant avec elles ? Mais pas de quoi la mettre dans un tel état, son père l’avait déjà entendu à de nombreuses reprises, et chanter n’avait jamais été un crime. Alors pourquoi ses jambes se mettaient-elles à trembler de la sorte, ses genoux s’entrechoquant et menaçant de céder ? Pourquoi son pouls s’était anormalement accéléré, donnant un rythme saccadé et irrégulier à sa respiration ? Et pourquoi les larmes étaient-elles montées aux bords de ses yeux, menaçant de se déverser encore une fois ?

Son corps parcouru par un frisson qui n’avait pas tellement rapport à la température hivernale, et la chanteuse resserra machinalement son manteau sur elle, comme pour se sentir en sécurité derrière ce petit bout de tissu. Elle plongea son nez dans le col de fourrure, comme pour se préserver du regard omniscient des cieux, et inspira profondément. Le vêtement dégageait une forte odeur de naphtaline, sans doute à cause du temps prolongé qu’il avait passé dans la penderie de sa tante. Affaiblie par ses propres émotions qui la portaient au bord de l’apoplexie, Babelda se baissa précautionneusement pour s’accroupir au sol, s’astreignant au calme. Si elle était parvenue à cacher ses préoccupations devant son père, dès qu’il eut tourné le dos pour rentrer s’abriter sous la grotte, son sourire s’était effacé pour laisser place à une grimace de désespoir, ses yeux s’affaissant et brillant d’une lueur sombre. Et désormais, les larmes menaçaient de jaillir de ses yeux : il en était pourtant hors de question, elle ne pouvait se permettre de pleurnicher avant de retrouver le reste de sa famille. Continuant son exercice de respiration, elle tenta de se ressaisir.

Pourtant, ce n’était pas tâche aisée. Le ciel était anormalement bavard, les étoiles chantant, murmurant à ses oreilles des paroles qu’elle voulait cesser d’écouter, sans pour autant y parvenir. Ainsi, telle une musique passant en boucle dans sa tête, Babelda se laissait déstabiliser par les murmures des astres. « Cette nuit, pour l’un des tient sera le dernière. Il rejoindra nos sœurs étoiles, tandis que ses pires cauchemars se réaliseront. Dans la peur et la souffrance, sa vie s’achèvera, quand la défunte renaitra. » N’y tenant plus, Babelda plaqua rageusement ses doigts violacés par le froid contre son crâne, bouchant le passage jusqu’à son cerveau, et chuchota pour elle-même : « Taisez-vous, laissez moi tranquille. Arrêtez s’il vous plait. » Et des sanglots heurtèrent davantage sa respiration. Pourtant, le chant sembla résonner à l’intérieur même de sa tête. Elle ne maîtrisait plus rien. Une telle… communion avec les étoiles n’étais jamais parvenue au-paravent, peut-être aussi parce qu’elle n’avait jamais reçu de message la touchant aussi directement. Car ces paroles lui étaient destinées, à elle seule. Si elle ne comprenait pas avec certitude la raison de cet emballement, elle finit par se douter qu’il s’agissait là d’un test. Le peuple Rehla se devait de rester parfaitement neutre. Il se devait de garder les mises en gardes, les prémonitions qu’on leur confiait. Or, Babelda n’avait jamais été connue pour sa neutralité. L’éducation délivrée par le magicien l’avait toujours forcé à prendre parti pour le camp bénéfique. Aussi devrait-elle réussir, cette nuit, à laisser le destin se tracer, sans qu’elle n’intervienne.

Et pourtant, la malheureuse n’avait qu’une envie : faire irruption dans leur repère, et ordonner de faire demi-tour. Quelqu’un d’autre pourrait s’occuper de leur mission, d’autres mages, plus compétents, pourraient aller sauver l’enfant. Son père ne se laisserait pas facilement convaincre, mais peut être que si elle insistait assez… Toutes les possibilités pour parvenir à lui faire changer d’avis traversèrent l’esprit de la Rehla. Mais toutes étaient invraisemblables : Barnabé n’était pas le genre de personne à revenir sur ses promesses, il était plus têtu que la plus obstinée des bourriques, et si l’on voulait le faire vaciller, il fallait s’y prendre d’une main de maitre. Or, Babelda n’était pas dans un état propice à ce genre de manipulation. Sans oublier que sa tâche était justement de ne pas lui faire changer d’avis. Il s’agissait justement de voir si elle était digne des secrets que les étoiles lui racontaient. Plus elle y réfléchissait, et plus elle en était persuadé. Pourtant, par les Aetheri, ce qu’elle souhaitait éviter d’en arriver à là…

Son corps était engourdi par le froid, qui semblait la statufier dans cette position. Les ruisseaux où des larmes avaient finalement réussi à percer semblaient avoir gelé sur ses joues rougies. Son nez avait fini par dégouliner et elle dû l’essuyer d’un revers du bras. Ce geste simple lui arracha un gémissement. Ses articulations la faisaient souffrir de ne pas avoir bougé plus tôt. C’était le signal : elle devait se remettre en mouvement si elle ne souhaitait pas finir en glaçon. Les os grinçant, elle se remit sur ses jambes et, le corps contracté de spasmes incontrôlables, elle se dirigea vers leur campement de fortune, l’esprit brumeux, perdu, n’aillant aucune idée de l’attitude qu’elle devait adopter. A l’intérieur de la cavité, il ne faisait pas réellement plus chaud, mais comme l’avait prédit Barnabé, le vent ne s’abattait pas sur eux. Affaiblie, la brune alla se coucher aux côtés du corps assoupi de son géniteur. Ses épaules se soulevaient au rythme de sa respiration. Il était toujours en vie… Mais pour combien de temps ? Si l’un d’entre eux devait mourir, peut-être s’agissait-il de lui ? Peut-être les Aetheri le lui arracherait-il ? Cruels êtres au-dessus des mortels, ils pouvaient sans aucune gêne décider de le rappeler à eux, dans les cieux. Et cette idée glaçait le sang de leur messagère.

La chaleur dégagée par son voisin, et la fatigue de la journée eurent pourtant raison de ses tourments, car Babelda plongea dans le domaine de Morphée. La nuit fut agitée, ponctué de rêves tendres se transformant en cauchemars atroces, où elle revoyait sans cesse la douleur sur les traits du mage blanc, tandis que la vie le quittait. Tour à tour, des sorciers ou des esprits faucheurs venaient lui arracher le cœur ou l’âme, après avoir passé des heures à la tourmenté de mille et une façons. Le dernier cauchemar fut de trop.

Babelda se réveilla dans un sursaut. Le respiration haletante, le corps humide de sa sueur. Son père n’était plus à ses côtés, ce qui l’inquiéta encore plus. Se redressant en position assise, son corps protestant en faisant sentir des courbatures jusque dans ses orteils, Babelda chercha frénétiquement la source de son inquiétude, tournant la tête dans toutes les directions dans l’espoir d’apercevoir la silhouette du vieillard. Mais tout ce qu’elle parvint à distinguer, fut l’éclat d’un feu que l’on avait allumé,  la carrure imposante de son cousin qui s’occupait de vider un lapin, et l’ombre des sacs de provisions. « Vikotr ? » -« Hum ? » -Mon… Mon père… » La détresse dans sa voix réussi à attirer l’attention du chasseur, qui s’arrêta dans son geste pour poser son regard dur sur sa protégée. « Il est sorti se dégourdir les jambes. Ses rhumatismes n’ont pas apprécié qu’il passe une nuit à même e sol. Il va bientôt revenir. » Cette affirmation ne la rassura pas complètement, mais elle s’obligea à rester calme et sereine. Si elle paraissait trop soucieuse, elle risquerait d’attirer la curiosité du jeune homme, qui poserait sans doute des questions. Et si questions il y avait… Secret serait rompu. Aussi se contenta-t-elle de se rouler en boule le menton posé sur les genoux.

Elle flaira l’odeur aguichante d’un gibier sur le feu. Son estomac réagit en grondant. Elle posa une main pour l’apaiser : il est vrai qu’elle n’avait pas eu la force de manger, la veille. Aussi ce simple geste ne calma-t-il aucunement la faim qui sévissait. Toujours aussi taciturne, Viktor attrapa une brochette et la tendit à Babelda, qui le remercia en la recevant. Avec une retenue maitrisée, elle grignota son petit déjeuner. « J’ai utilisé ton arc, pour chasser. » -« Oh… Tu as bien fait. » Un haussement d’épaule, une nouvelle bouchée. Ce silence pesant n’améliorait pas les battements cardiaux de la jeune Rehla.

Finalement, on entendit le pas étouffé du vieillard. Il déboucha, rayonnant comme une fleure, dans leur tanière et déclara avec enthousiasme : « Bien le bonjour mes agneaux ! J’espère que vous avez passé une meilleure nuit que moi ! J’ai le dos en compote ! » L’enfant fut tellement soulagée qu’elle n’eut même pas besoin de se forcer pour faire entendre le rire qui lui chatouilla la gorge. « Peut-être devrais-tu utiliser ta magie blanche pour te soigner… » -« Oh non, je préfère garder mon énergie pour ce qui en vaut vraiment la peine ! Pas besoin de gaspiller de magie pour mes vieux os ! »

Ils finirent de déguster leur repas, Viktor s’occupant de faire carboniser tout ce qu’il mettait sur les flammes, et emballant leur surplus de nourriture pour les ranger dans leurs affaires de voyage. Puis, une fois prêts, ils sortirent tous ensemble et se mirent en route. Si la nuit avait été glaçante, la matinée se révélait bien plus clémente. Malgré une légère brise fraiche, le soleil qui les atteignait réchauffait leurs corps, ce qui semblait mettre la magicien dans une humeur particulièrement joyeuse –il ne pouvait s’arrêter de parler. Babelda, qui ne cessait de repenser aux paroles énigmatiques proférées par les étoiles –qui n’avaient pas toutes trouvé de sens à ses yeux- continuaient de tourbillonner dans ses pensées. Elle faisait un bon en hurlant à chaque fois qu’elle voyait quelque chose bouger, mais se forçait à ne pas totalement céder à la panique et prenait le temps de répondre à son père. « Dommage que nous n’ayons pu amener les chevaux jusqu’ici, ils nous auraient été d’une aide précieuse ! » Alors que Babelda allait approuver ses paroles, Viktor la devança et dit avec hargne « Ils n’auraient jamais pu descendre ce sentier. » Le ton froid, cassant qu’il utilisa, sapa l’enthousiasme du vieux monsieur. Viktor semblait visiblement agacer d’entendre sa cousine crier tous les vingt mètres. Barnabé, quand à lui, ne semblait pas étonné : il avait toujours su sa fille particulièrement peureuse.

Les aventuriers continuèrent d’avancer, néanmoins moins bruyamment depuis l’intervention de Viktor, qui avançait d’un pas soutenu, forçant les deux autres à se dépêcher. Mais la cadence était trop rapide : ils durent s’arrêter, Babelda étant aussi essoufflée qu’un mufle, les poumons en feux, et son père dans un état guère mieux que le sien. Même Viktor commençait à ressentir la fatigue. Et c’est à ce moment que le drame se produisit.

Ca commença par un ricanement sinistre, puis des bruits indistincts, comme des grognements. Viktor et Barnabé s’armèrent, respectivement d’une lourde épée et d’une baguette. Mais Babelda, elle, sut qu’elle ne devait pas lutter. Le souffle court, elle se concentra pour disparaitre. Non pas physiquement, mais elle s’effaça de l’esprit des gens autour d’elle, comme elle l’avait si souvent fait. Elle recula de quelques pas, regardant avec des yeux effrayés la scène qui continuait à se dérouler sans elle. Une silhouette sortit de l’ombre d’une falaise. Il s’agissait d’une femme. Elle semblait visiblement avoir la quarantaine. Sa chevelure dorée, presque translucide, volait au vent. Ses traits doux affichaient un sourire. Pourtant, cette personne glaça le sang de Barnabé et de sa fille.

La nouvelle arrivée était indéniablement une belle personne. Elle semblait venir avec de bonnes attentions, mais le corps des deux Tullieil se raidirent douloureusement, et le vieillard croassa un « Non, c’est impossible » emplit d’incompréhension. Babelda hoqueta de stupeur, les yeux écarquillés, et resta immobile, impossible d’esquisser un geste. Viktor, quant à lui, resta méfiant, mais baissa son arme. La jeune femme lui rappelait vaguement quelqu’un, sans qu’il puisse se souvenir de qui exactement.

Il s’agissait de Babelda. Cette femme ressemblait à Babelda. Ses cheveux avaient une teinte différente, et les années avaient marqué son visage, mais la ressemblance restait frappante. Pourtant, ce ne fut pas son nom que Barnabé prononça. « Eärel » Sa défunte épouse. Ses traits étaient tour à tour marqués par la joie, l’incompréhension, et la stupeur. Puis bientôt l’horreur. En effet, tandis que la revenante s’approchait, ses traits changeaient peu à peu, se tordant de douleur. Sa robe blanche s’imbibait progressivement de sang –son propre sang- commençant d’abord par une tâche au niveau de l’estomac qui s’étendit jusqu’au bas des hanche, puis jusqu’au bas de sa robe, pour déverser quelques gouttes sur le sol. « Barnabé… » Gémit-elle d’une voix plaintive en tendant une main tremblante vers le trio. Alors que le concerné se hâtait de la rejoindre, celle-ci s’effondra dans ses bras. De là où elle était, Babelda n’entendait pas ce que ses parents se murmuraient, aussi décida-t-elle de se rapprocher.

Les sanglots de Barnabé embrouillaient son discours, pourtant la jeune femme compris qu’il répétait « Mon amour » sans se lasser. Si la scène était touchante, Babelda resta de marbre, ne ressentant aucune joie de revoir sa mère parmi les vivants… « Dans la peur et la souffrance, sa vie s’achèvera, quand la défunte renaitra. » N’était-ce pas ce que les cieux lui avaient dit ? Et sa mère réapparaissant… Sa venue signifiait également la mort de son père –ou de Viktor. Toujours dissimulée par son don de l’oubli, elle ne se fit pas remarquer. « Pourquoi ? » Un hoquet. Sa mère semblait se noyer dans son propre sang… « Pourquoi, Barnabé ? » « Quoi, qu’y a-t-il mon amour ? » « Pourquoi m’avoir abandonné, cette nuit là ? A cause de toi… je suis morte… » Ses derniers mots n’étaient que murmures, pourtant, ils firent plus de mal que si elle les avait plantés avec un couteau. Si Barnabé n’avait pas pu secourir sa femme, s’était parce qu’il était occupé à sauver Babelda.

Alors que les trois aventuriers restaient immobiles, les actions s’enchainèrent sans que personne n’ait le temps de comprendre ce qu’il arrivait. Le visage d’Eärel perdit toute sa beauté, déformé par une figure même pas humaine : Sa bouche s’élargit jusqu’à devenir aussi grande que le visage de Barnabé. Des rangées de dents pointues et aiguisées poussèrent dans sa mâchoire, et celle qui ne ressemblait désormais plus à la défunte se jeta sur son faux mari. Celui-ci, surpris, tomba à la reverse, et lutta vainement pour tenir éloigné la créature qui l’avait trompé, et qui faisait désormais claquer ses crocs près de lui. Viktor fut le plus rapide à réagir –Babelda ayant décidé de ne pas intervenir se contenta de crier, et d’esquisser un pas vers le combat, avant de se raviser- et il attrapa d’une main de fer la femme-goule, avant de la jeter dans la direction opposée. Mais trop tard : elle avait réussi à arracher un morceau de gorge à Barnabé.  
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Ven 22 Jan 2016, 18:26


Il n'y eu aucun tunnel sombre, aucune lumière blanche et aveuglante pour l'accueillir de l'autre côté. Il ne fut pas assailli de souvenirs passés, ne se rappela pas un seul instant se sa longue vie pourtant bien remplie... En réalité, il ne se souvenait de rien. Il ne savait ni qui il était, ni ce qu'était cet endroit étrange, ni même ce qu'il faisait là, perdu dans ce non-lieu. Il restait donc là, à flotter dans le néant... Car il s'agissait encore du meilleur mot pour décrire l'endroit où il était tombé... Un "rien" le plus parfait... Comme un gouffre obscure, où ses yeux ne lui servaient pas plus qu'à un aveugle. Il avait l'impression de flotter dans le vide, son corps plus léger qu'une faé. Il n'avait ni froid, ni chaud, en fait il semblerait que les éléments extérieurs,  qui n'existaient même pas, ne pouvaient donc atteindre son corps matériel... enfin... peut être que ce corps n'était lui aussi que poussière,  qu'illusion ? Malgré toutes ces incertitudes, la peur ne parvint à aucun instant à assombrir son coeur.

Combien de temps resta-t-il ainsi, à se demander ce qu'il était, ce que le monde attendait de lui, à patienter jusqu'à ce que l'on vienne le chercher de nulle part ? Impossible de le dire avec certitude. Cela lui parut une éternité, et à la fois, moins d'une maigre seconde... Le temps, une notion si vague, si abstraite, que personne n'avait jamais réussi à comprendre avec certitude... Il lui parut un instant qu'il avait essayé, autrefois, d'appréhender cette notion complexe... Mais c'était il y a très longtemps. Une autre époque, un autre vie. Et son esprit se retrouva embrumé une fois de plus, perdant la mince étincelle de souvenir qui semblait vouloir ressurgir dans ses pensées.

Mais quelque chose vint finalement le sortir de sa quiétude rassurante. Un murmure, qui se répercuta en échos dans sa tête, puis dans le gouffre... Petit à petit, il fini par retrouver des sensations, ressentit les limites de son corps, sa tête, son ventre, ses pieds... Des fourmillements dans le bout des doigts. Puis une irritation au niveau de la gorge, qui gronda, se métamorphosa en brûlure cuisante, insupportable. Il souffrait. Non, il ne voulais pas. Il ne savait pas ce qu'il lui arrivait mais il voulait que ça stoppe, immédiatement, qu'on le laisse rester dans son néant. Mais ça ne cessait pas, au contraire. La sensation de brûlure avait envahi ses poumons. Il suffoqueait. Il lui sembla que quelque chose ou quelqu'un lui aggripait le bras, le lacérait. Puis une voix, aiguë, stridente, déplaisante, lui agressa les oreilles. "Papa s'il te plaît reste avec moi ! S'il te plaît ne t'en va pas, ne me laisse pas toute seule !" Des géremiades qui n'en finissaient plus.

Contre sa volonté,  les pièces du puzzle s'embriquèrent les unes aux autres. Les souvenirs vinrent envahir ses pensées. Cette voix... il s'agissait de son enfant... de sa fille... Babelda. Mais... pourquoi ne voulait-elle pas qu'il parte ? N'était il pas juste à ses côtés,  en train de dormir paisiblement avant qu'elle ne le sorte de sa sieste ? Non... il s'était passé quelque chose... Il y avait... Une femme... pas n'importe quelle femme : Eärel. Non, c'était impossible... elle était morte il y a bien longtemps. Et plus important que cela, elle ne possédait pas la capacité d'ouvrir sa bouche pour essayer de l'engloutir. Oui, voilà ce qu'il s'était passé... il s'était fait croquer par sa femme. Ou quoi que soit cette chose. Il prit soudainement plus conscience de sa douleur, plus vive encore qu'avant. Il voulait hurler tellement cela lui faisait mal, mais ça,  il en était incapable... Son coeur battait vite, dans sa poitrine.

Il ouvrit grand les yeux sur le monde qu'il avait quitté. La lumière lui brûla les yeux, mais il fut rassuré de constater qu'il pouvait de nouveau voir. Son nez fut de nouveau assailli des odeurs marines, ses oreilles bourdonnantes se firent plus attentives aux sanglots de sa descendante, et il pu enfin avaler une grande bouffée d'air, calmant ses poumons en feu. La douleur était insupportable et pourtant appréciée... Il s'agissait là de la preuve qu'il était bien en vie.

Il essaya de se relever, brassant des bras pour se redresser. Ses yeux, habitués à la lumière,  interceptèrent le regard incrédule de Babelda, puis celui de Viktor, accroupi à ses côtés, penché sur lui, visiblement essoufflé. Son neveu le bloqua de son bras, le forçant à rester à terre. "Ne vous brusquez pas mon oncle, vous êtes encore faible... ne forcez pas." Se laissant tomber à terre, Barnabé porta une main à son coup, désorienté. Il y trouva une nouvelle peau, au lieu d'un trou béant. "Vous n'êtes pas le seul à savoir prodiguer de bons soins..." Viktor afficha un sourire, pas peu fier de son exploit. Après tout, on ne ramenait pas un homme du pays de mort tous les jours.

"Tu étais mort... ton coeur ne battait plus..." La voix de sa fille n'était qu'un filet fluet... Avec des intonations de fillette apeurée. Des larmes plein les yeux, elle s'aggripait toujours au bras du mage,  comme pour s'assurer qu'il ne s'en irait plus. Barnabé esquissa avec difficulté un sourire, puis titilla ses cordes vocales,  un peu rouillées. Il dû s'y reprendre à trois fois avant de parvenir à croasser, d'une voix pathétique, une blague qui n'avait pas lieu d'être, comme il en avait le secret. "Il faut croire que je n'avais pas très bon goût..." Il fut pris d'une quinte de toux, avant de continuer : " Ezechiel n'a pas particulièrement lutté pour me garder auprès de lui..." Trop chamboulée pour essayer de rire avec lui, Babelda se contenta de poser sa tête et de déverser les larmes qui ne s'arrêtaient pas de couler.

Plus tard, lorsqu'il se serait quelque peu remis, que l'on aurait pris soin de lui faire boire de l'eau, de lui faire manger quelques morceaux de lapin et de laitue, que Babelda eut essuyé un nouveau tsunami de larmes, Barnabé ne put s'empêcher de poser la question, toute naturelle, qui lui brûlait les lèvres : "Qu'est ce que c'était ?" Car il était désormais persuadé qu'il ne s'agissait pas de sa défunte épouse... Bien que les deux enfants aient essayé de le lui cacher, le corps informe de la créature n'avait pas échappé à son regard. "On ne sait pas vraiment..." "Ça ressemblait à une sorte de goule, particulièrement hideuse, difforme... J'ai entendu dire qu'un des sept clans regroupait ce genre... d'abominations..." Babelda glissa un regard écoeuré vers la dépouille. Barnabé comprenait sa répugnance envers les êtres de la nuit, après tout ce qui était arrivé à leur famille... Mais le magicien était toujours peiné de voir que sa fille ne parvenait pas, malgré le temps,  à abandonner sa répugnance pour cette race entière.

Le temps passait et le soleil allait bientôt se coucher. Mais le temps pressait et ils ne pouvaient se permettre de passer plus de temps au même endroit... Ils devaient se remettre en mouvement. Cela n'enchantait guère l'enfant qui, comme un caprice, essayait de convaincre les deux hommes de se reposer encore, au moins quelques heures. Mais Viktor partageait l'avis du sage : "Non Babelda... Plus nous attendons, plus ce sera dangereux... qui sait si nous ne nous ferons pas attaquer... sans oublier que nous devons accomplir notre mission au plus vite." De mauvaise grâce, la brune les suivit en marmonnant dans la fourrure de son manteau.

A leur plus grande satisfaction, le chemin se passa sans autres reelsnaccident.  Les trois aventuriers marchèrent toute la nuit. Celle-ci, plus clémente que la précédente, fut beaucoup plus agréable. On ne pouvait pas prétendre qu'il faisait chaud, ni même que la température était douce, mais le froid n'était pas aussi agressif qu'il l'avait été la veille. Les bruits de la vie nocturne rythmaient leur avancée, et le regard scrutateur de Barnabé intercepté de nombreux animaux les entourant... quelques oiseaux, des rongeurs, et même,  aussi surprenant que cela puisse sembler, un cerfeuil. L'animal, majestueux, se tenait en haut de la falaise et semblait les toise avec curiosité.

Lorsque l'aube pointa le bout de son nez, entâchant  la noirceur de la nuit pour la remplacer par une teinte grisâtre, Barnabé sentit une drôle de sensation lui ravager les entrailles... il crut d'abord à un effet secondaire de son ex condition de macabé. Après tout, il ne pouvait pas espérer revenir de l'autre monde et être au mieux de à forme ! Il lui faudrait sans doute longtemps pour recupere toute son énergie. Il ne s'était pas encore vue mais sa peau avait remarquablement pâle, et il sentait son corps entier trembler. Mais bientôt, il identifiant ces manifestations physiques comme autre chose... Disons plutôt... Une excitation. Oui, c'était bien ça, de l'excitation, de l'angoisse, une envie irrationnelle de s'élancer dans une course folle -que son corps ne supporterait pas- pour arriver vers le temple d'Illios... Sans qu'il ne sache se l'expliquer, il se sentait de nouveau attiré par le lieu sacré... comme appelé.

Aussi ne masqua-t-il pas sa joie en apercevant les hautes pointes des tours du monument. Elles s'élevaient fièrement dans le ciel, transperçant les nuages comme des dagues meurtrière. Après tout, il avait du affronter la grande faucheuse pour arriver jusqu'ici... Tout le monde ne pouvait pas se vanter de lui avoir échappé. Mais il était à mille lieu de se soucier des épreuves précédentes -le passé c'est le passé, comme on dit. Il pointa un doigts tremblant vers le ciel qui se colorait peu à peu. "Là, nous y sommes enfin !" Il se laissa emporter par ses sentiments et se mit à trottiner, accélérant l'allure du groupe. Il serait tombé si ses accompagnateurs ne l'avaient pas rattrapé avant. Et voilà qu'il était aussi maladroit que sa fille, désormais...

Ils arrivèrent bientôt là où aurait dû se trouver l'entrée su temple. Malheureusement, un vide phénoménal,  impossible à franchir, les en séparait. Déçu, le mage s'approcha au bord du gouffre. Il se laissa tomber à genoux, l'adrénaline qui l'avait animé le quittant en même temps que l'amertume le gagnait. "Des étrangers ? Seriez-vous en retard pour le pèlerinage ?" Barnabé redressa la tête,  observant la silhouette féminine qui venait d'apparaître.
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Jeu 11 Fév 2016, 19:36


Tous les regards se tournèrent vers l’étrangère. Personne ne l’avait vu s’approcher. C’était comme si elle avait toujours été là, mais qu’elle leur apparaissait subitement à cet instant. Il était difficile de lui donner un âge. Elle semblait jeune, guère plus de la vingtaine, mais son visage exprimait une tristesse et une sagesse qui témoignaient un âge avancé. Elle était belle sans pour autant laisser une grande impression… En réalité, Babelda la regardait mais en même temps, elle ne parvenait pas réellement à la voir… Comme si ses traits s’effaçaient instantanément des mémoires. La Rehla était sûre que si elle lâchait l’inconnue des yeux, elle serait incapable de la décrire. Elle oublierait sa chevelure translucide, ses yeux bleus clairs, sa robe aussi peu colorée que le reste de sa personne… Tout en elle semblait dénué de couleur, de saveur.

De nouveau, sa voix calme et apaisante brisa le long silence. « Nous n’attendions plus aucun visiteur. Vous êtes très en retard… » Elle avait une voix enfantine, pourtant, personne n’osa la contredire et Babelda se vit même baisser la tête pour contempler ses souliers, comme si on la réprimandait. La parole de cet être surnaturel était à la fois divine et terrifiante… On ne voulait pas contrarier ni même décevoir celle qui proférait ces mots. « Excusez-nous, demoiselle. Nous avons fait un long chemin pour venir jusqu’ici… Une enfant c’est, par mégarde, introduite dans le temple. Nous sommes venus la récupérer pour la ramener auprès de sa mère… » Les yeux glacés de la jeune femme se fixèrent sur la silhouette voutée du vieux magicien. Elle semblait autant surprise que satisfaite. Il sembla à la brune, qui avait relevé un œil curieux, qu’un sourire traversa même son visage. Cela ne dura qu’une seconde, mais elle était persuadée que ses lèvres s’étaient adoucies… A moins que ce ne soit qu’un effet de son imagination ? Elle n’en était soudainement plus si certaine…

La quinquagénaire reporta son attention sur son vieux père. Lui, au moins, elle n’avait aucune difficulté à l’observer. Il semblait plus chétif que jamais. Ses mains tremblantes serraient un bâton que Viktor avait trouvé en route, et qu’il lui avait donné pour l’aider à marcher. Son dos, plus vouté qu’à l’accoutumée, semblait le faire souffrir dès qu’il essayait de se redresser. Son visage rendu pâle par les bras de la mort n’arrangeait pas son apparence, et Babelda ne parvenait à faire taire son inquiétude. Mais en cet instant, son regard déterminé la rassura légèrement. Lui ne semblait pas craindre la puissance de la créature qui leur faisait face. Après tout, il était bien plus expérimenté que ses deux descendants. Il avait vu des choses qu’eux même n’oseraient imaginer, il avait vécu des péripéties bien plus dangereuses… Alors non, il  n’avait pas peur de cette femme…

En réalité, même si la liseuse d’étoile ne pouvait le savoir, seul un futur census pouvait voir avec précision la créature qui les avait abordés. Et Barnabé, derrière ses binocles en cul de bouteille, distinguait parfaitement les traits de la servante d’Illios. Il s’agissait en réalité d’un esprit lié au temple. Elle en était la gardienne. Peu de gens pouvaient se vanter de l’avoir vu, encore moins de lui avoir parlé, tout simplement parce qu’elle n’apparaissait qu’aux yeux des plus fervents serviteurs de l’Aether. Les autres à qui elle s’était adressée l’oubliaient simplement au bout de quelques minutes. Elle parcourait les terres du Yin et du Yang à la recherche des futurs prêtres de son divin maître, s’assurant qu’il aurait toujours des croyants pour le vénérer…

Aussi, lorsqu’elle s’aperçut qu’elle n’impressionnait en rien le vieillard, elle sut qu’il était, tout comme elle, liée à ce lieu. Elle se tourna vers lui et lui adressa un mouvement de tête qu’il lui retourna. « Vous n’êtes pas venu pour Illios. » constata-t-elle. Barnabé se contenta de secouer légèrement sa caboche recouverte de cheveux blancs. « Mais vous entendez son appel, n’est-ce pas ? Vous ressentez qu’il vous appelle à Lui. » Barnabé comprit instantanément de qui elle parlait, sans qu’elle n’ait besoin d’éclairer l’identité de ce « Lui ». Elle venait d’expliciter cette étrange impression qu’il avait ressentie depuis qu’il était arrivé en terre magicienne. Il n’était pas parti s’aventurer dans cette aventure simplement pour chercher une enfant. Il était surtout là pour Illios.

Babelda, en revanche, ne comprit nullement de quoi ils dialoguaient, et son cousin semblait aussi perdu qu’elle. Elle essaya de s’avancer vers Barnabé mais ce geste attira l’attention de la créature qui la foudroya du regard, paralysant la malheureuse par ce simple contact visuel. Déglutissant avec raideur, Babelda attendit que la jeune femme la lâche du regard pour oser respirer à nouveau. « Bien… Je comprends votre motivation mais cette enfant est en parfaite sécurité là où elle se trouve. Il saura prendre soin d’elle… Mais si vous insistez pour la rejoindre… Je vous offre une opportunité de vous y rendre. Je vous jugerai moi-même, vos amis et vous, pour savoir si vous êtes digne du Grand Omniscient. » Elle laissa sa phrase en suspens, le temps que chacun comprenne l’importance de ces mots. « Nous juger ? » Ce mot semblait fort. Il laissait sous-entendre qu’un verdict non favorable pourrait s’avérer… et bien sévère, pour une simple excursion. Après tout, la créature n’avait pas tort. Les prêtres sauraient prendre soin de la fillette. Ils s’en occuperaient. Pas besoin alors de courir un risque pour elle.

« Vous avez bien entendu. Si vous passez mon test avec succès, je vous accorderai l’accès au temple. Si vous échouez… Je m’assurerai que l’on s’occupe de votre éducation, et vous ne repartirez qu’une fois que l’on aura jugé votre savoir grandi… » Babelda frémit sous son manteau, mais cela n’avait aucun lien avec la température, qui se réchauffait lentement tandis que le soleil se levait. « Et en quoi consiste ce test ? » « Vous devrez répondre à mes questions sans faire d’erreur… » C’était vague. Très vague. La connaissance absolue était quelque chose que de simples mortels ne pourraient jamais obtenir. Seul le Sin Luxinreïs pouvait prétendre posséder un tel savoir. Quand à la menace de se voir donner une correction pour augmenter sa culture… Ce n’était pas très vendeur, tout cela… Pourtant, quand Babelda se retourna vers son père, pensant lire sur son visage de l’inquiétude, elle n’y trouva que de l’assurance. « Très bien, je vous écoute. »

La mâchoire de Babelda se décrocha sans qu’elle ne puisse la retenir. Que lui prenait-il ? Oserait-il se frotter à cette dangereuse épreuve ? Et tout ça pour quoi ? Simplement revoir cette enfant ? Non, la Rehla ne pouvait laisser son père courir un tel danger. La mort avait dû lui retourner le cerveau ! « Père c’est trop risqué ! Margarette ne craint rien, ici… » Elle s’était approché, malgré le regard grognon que l’esprit posa sur elle, et attrapa le bras du vieil homme, comme pour s’assurer qu’il ne lui échapperait plus jamais. « Babelda… Ce n’est pas simplement pour ça… » Elle lut dans ses yeux qu’il ne renoncerait pas. D’une main tremblante, il lui fit lâcher sa prise. « Ne t’en fais pas, et fait-moi confiance… Je te retrouverai bientôt. » Et il déposa un baiser sur son front. Même si elle n’avait aucune envie de le laisser, elle dû se résoudre à le lâcher. « Surveille là, Viktor. Qu’elle ne fasse aucune bêtise. » La brune ne se retourna pas pour voir la réaction de son cousin mais elle devinait qu’il  avait accepté sa mission de garde du corps.

« Bien, je suis tout à vous. » La créature s’approcha d’un pas aérien, posa une main froide sur l’épaule du sage et souffla sur le visage apaisé de son disciple. Aussitôt, celui-ci disparut. « Où l’avez-vous emmené ? » questionna, inquiète, la fille du magicien. « Dans un lieu où il se débrouillera très bien… » Le sourire énigmatique que lui renvoya la prêtresse n’apaisa en rien les craintes de la fille. Se sachant impuissante, elle se contenta de tourner en rond, tel un lion en cage.

« J’en ai assez ! » s’écria Babelda, alors que plusieurs heures s’étaient écoulées. Barnabé n’étais toujours pas revenu et elle n’avait plus aucune nouvelle de lui. L’étrange créature qui leur était apparue avait disparue et elle devait lutter pour ne pas oublier le souvenir de leur rencontre. Elle devait posséder un don similaire à celui des Rehlas, et Babelda devait concentrer toutes ses pensées dessus pour être certaine de ne pas perdre sa trace dans ses pensées. « Je ne peux pas rester assise ici les bras croisés, sans rien faire ! Je ne suis même pas sûre qu’il soit encore en vie ! » Elle tremblait tellement ses nerfs étaient tendus. « Je ne supporterais pas de le perdre deux fois dans la même journée ! » Viktor la regarda, l’air neutre affiché au visage. « Et que proposes-tu de faire ? On ne peut pas rentrer à l’intérieur. Si je n’avais pas peur que ton père ne réapparaisse en mauvais état, je serais déjà en train de te ramener à la maison pour que tu arrêtes de te torturer l’esprit avec ça. » Il ne se rendit pas compte de l’impact de ses mots sur la fausse magicienne. S’il réapparaissait en mauvais état ? L’esprit fertile de l’enfant s’imaginait, de nouveau, de terribles présages… Après tout, Barnabé verrait de nouvelles nuits… Peut-être que sa survie n’était pas aussi assurée qu’elle ne l’espérait.

Toutefois, elle s’interdit de céder à la panique et se remit à faire des pas, dessinant des allers retours entre le rocher où était installé le magicien et le bord du gouffre. « Je vais l’appeler. Elle viendra et je lui demanderai de passer le test à mon tour. » Ne croyant pas la demoiselle assez audacieuse, Viktor l’encouragea dans ses idées folles en demandant « Et comment voudrais-tu réussir à la faire apparaitre ? Elle n’avait pas l’air de nous porter grande attention. Si tu veux mon avis, elle n’est venue que pour nous emprunter ton père. » Il n’avait pas tort mais Babelda ne l’écoutait déjà plus. Comment s’y prendre en effet ? Elle trouva la réponse en donnant un coup de pied rageur dans un caillou qui alla se perdre dans le gouffre. Ses yeux montèrent dans le ciel où s’élevait la bâtisse du monument, puis descendirent sur le sol ou des gros cailloux prenaient un bain de soleil. Remontèrent, redescendirent, ainsi de suite jusqu’à ce qu’elle attrape un torticolis.

Elle se baissa et du bout des doigts, attrapa un bout de roche. Elle plaça son bras en arrière afin de prendre de l’élan, puis lança de toutes ses forces son projectile, en direction du temple. « Eeeeeeeeeeeeh ! Vous là-haut ! Rendez-moi mon père ! » Elle se pencha pour se ré-armer, tandis que Viktor lâchait toutes ses affaires pour venir arrêter la folle. « Babelda, as-tu perdu l’esprit ! » s’emporta-t-il. « Veux-tu que les tous puissants te punissent pour ton affront ?! » Le magicien immobilisa la désespérée en enserrant ses bras autour des épaules, mais pas avant qu’elle ait lancé une autre pierre et continué à proférer des injures contre les enleveurs. Viktor plaqua une main sur la bouche de la jeune femme qui se débattait pour essayer de lui échapper. « Tais-toi donc, sotte ! Veux tu vraiment que ton pauvre père réapparaisse et te trouves morte ?! »

A cet instant, la silhouette familière et en même temps inconnue, de la créature se matérialisa devant eux. Si Babelda avait pensé trouver assez de courage pour affronter le monde entier, le simple regard courroucé de la gardienne suffit à lui faire perdre tout son zèle. Telle une poupée de chiffon, elle s’affala dans les bras protecteur du guerrier. Elle était de nouveau un être sans puissance, ridicule devant celle qui se trouvait en face d’elle. « Vous devriez écouter votre ami. Il n’est as prudent de s’en prendre au temple d’Illios… »

Babelda avala sa salive de travers et failli s’étouffer. Les larmes plein les yeux, elle questionna silencieusement la juge. Son père avait-il passé son épreuve avec succès ? Etait-il toujours en vie ou le lui avait-on de nouveau arraché ? Pour toute réponse, le spectre leva une main. Babelda s’imagina un éclair venant s’abattre sur sa tête pour le pêché qu’elle avait commis. Mais au lieu de cela, Barnabé apparut entre elles, une petite fille dans ses vieux bras. « Eh bien ma fille ! Je ne te savais pas si impatiente ! »
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Mer 06 Avr 2016, 19:50

Barnabé se sentit aspiré dans les airs. Ayant toujours eut, comme sa fille, le mal des transports, il préféra fermer les yeux. Il atterrit brusquement sur le sol, ses genoux claquant sur cet arrêt brutal. Il serait sans doute tombé au sol s’il n’avait pas tenu de ses deux mains la bâton que Viktor lui avait donné en guise de canne. Il rouvrit un œil derrière ses verres, puis un second. Ses yeux ébahis furent accompagnés d’une bouche ouverte béatement, d’un haussement de sourcils, et d’un « Eh bah dites donc ! On en voit pas des comme ça tous les jours ! ». Le « ça » se référait à l’immense bibliothèque dans laquelle il était apparu. Un plafond haut de plusieurs dizaine de mètres, tellement qu’il n’en voyait pas le bout. Des étagères remplies de livres meublaient les lieux sur des kilomètres de long. On aurait besoin de plusieurs vies pour achever la lecture de tous ces ouvrages… Barnabé se serait d’ailleurs bien perdu dans le feuilletage de ces livres pour le restant de sa vie –il était certain qu’il ne possédait un tel savoir- mais il avait des obligations qui l’attendaient ailleurs… « Bienvenue dans l’antre d’Illios. »

Une chaise avec un haut dossier ses dressait au centre d’une place. En face, un pupitre. Y était installée la créature qui l’avait amené en ce lieu. De sa voix douce et à la fois autoritaire, elle l’invita à prendre place dans le fauteuil qui avait été installé pour lui. Claudiquant, ses rotules rouillées grinçant, Barnabé se traina jusqu’au siège. Elle l’avait prévenu : il était l’accusé, et on le jugerait. Sur son savoir, ses connaissances. Il devrait se concentrer pour ressortir de ce lieu étrange. Grimaçant à cause de son arthrose, il s’installa comme il put sur la chaise, essayant de trouver une position confortable. Heureusement que le bois avait été recouvert d’un coussin moelleux. L’avait-on apporté à son attention ?

« Quel est votre nom complet ? » « Barnabé, Joséphin Tilluiel. » La juge utilisa une magnifique plume argentée pour inscrire son nom dans un livre gros comme dix grimoires. « Bien… Vous devrez répondre à cinq questions. Les quatre premières trouveront des réponses dans les livres de cette bibliothèque. Si vous ne connaissez pas la réponse, vous aurez le droit d’aller la chercher. Pour espérer passer à la question suivante, vous devrez me fournir la bonne réponse. » Elle marqua une pause, pour laisser le temps au magicien d’assimiler ce qu’on lui disait. « Vous aurez autant de temps que vous le désirerez. Le temps ici s’écoule beaucoup plus vite que dans le monde d’où nous venons. Aussi, trois heures ici ne représentent que quelques secondes là-bas. Pour vous aider à savoir combien de temps s’écoule pour votre fille, le sablier au fond de la bibliothèque représente une heure dans l’autre monde. » En effet, un sablier était installé au fond de la pièce. Lui aussi était démesurément grand. Le sable, d’une couleur bleue-argentée, s’écoulait à vitesse constante.

« Et la cinquième question ? » « La dernière question… Vous devrez y répondre par vos propres moyens. Vous n’aurez accès qu’à votre propre cœur. » Intrigué, Barnabé se pencha en avant, pour écouter ce que la douce avait à dire. Mais celle-ci garda le silence. Déçu de ne pas en apprendre davantage, il se renfonça au fond du siège. « Bien, quand commençons-nous ? » « Tout de suite, mon brave… La première question concerne l’histoire de votre monde. » Cette indication mis l’érudit en confiance. Il ne prétendait pas connaitre l’histoire de ce monde mais… Le temps, l’histoire, le passé l’avait toujours intrigué. Ses travaux avaient, pour la plus part, porté sur ce domaine et il n’était pas peu fier d’affirmer qu’il avait légué à son héritière cette passion. Aussi écouta-t-il sans réelle crainte la question que l’esprit lui posa. « Lorsque les Aetheri étaient connus et vénérés par tous, à l’apogée de leur puissances, des hérétiques s’élevèrent contre eux pour les renverser. Trouve-moi leurs noms, et tu accéderas à l’étape suivante. » S’il était partit confiant, voilà qu’il tombait des nues… Il n’avait pas l’ombre d’une idée. Mais il s’était engagé à apporter des réponses, et n’avait pour cela qu’une solution… S’appuyant sur sa canne, Barnabé s’enfonça dans les profondeurs de la bibliothèque.

Chercher des réponses lui prendrait des heures, voire même des jours, sans qu’il ne puisse être certain de les trouver. La créature avait pourtant affirmé que toutes les réponses dont il aurait besoin s’y trouvaient… Barnabé, entêté comme il l’était, se perdit donc corps et âme à ses recherches. Et il avait derrière lui un atout de taille pour l’aider. En effet, « l’Antre d’Illios » possédait une conscience propre, et lorsqu’il accueillait des personnes qui se montraient dignes de son savoir, il lui arrivait de donner un petit coup de pouce à ses élus : La trace. Cela permettait à la personne visée de se retrouver dans ce labyrinthe –et pour cause, la bibliothèque regroupait une copie de tous les ouvrages écrits dans le monde d’origine, en tout temps, depuis la création de l’Aether. Aussi Barnabé se vu-t-il gratifié de la Marque et cela facilita grandement ses investigations. Au lieu de la longue semaine qui aurait sans doute été nécessaire à ses recherches, il ne mit que quatre jours entiers –où, étrangement, ni le sommeil ni la faim ou la soif ne vinrent le distraire. Au fond de la grande bibliothèque, le sablier ne s’était toujours pas écoulé.

Il retourna à son point de départ, avec sous le bras un livre épais et très ancien, avec une reliure en cuir sombre et des pages en parchemins qui semblaient rester à l’intérieur du livre plus par magie qu’autre chose. La femme sans couleur semblait elle-même plongée dans une lecture passionnante. Barnabé dû se racler la gorge pour attirer son attention. « Ah, vous êtes là… Je ne vous attendais pas si tôt. » Un sourire illumina ses lèvres, comme si elle était agréablement surprise. « Alors, avez-vous trouvé ma réponse ? » « Et bien, sans vouloir m’avancer, je pense en effet avoir trouvé ce que vous me demandiez… » Barnabé ouvrit sur ses genoux l’imposant volume, à la page qu’il avait marqué en y laissant sa baguette. « Bon nombre d’hommes et de femmes ont décidé de se lever contre les dieux. Les Kashras furent leur nom, littéralement « ceux qui ignorent l’éclat du soleil »… Il me semble également, au cours de mes longues lectures, avoir trouvé des traces de Maîtres du temps. » La jeune femme opina lentement et de sa voix sans âme, enchaina sur la prochaine mission. « Puisque la connaissance du Grand Illios se porte sur tous les domaines, nous continuerons avec un peu de science. Trouve mois les ingrédients qui, pendant l’ère du grand fléau, furent nécessaire pour concocter un antidote efficace. » Une fois encore, Barnabé se retira donc dans les profondeurs des étagères.

Comma la première fois, il se laissa guider par son instinct. C’est comme s’il savait ce qu’il devait chercher. Comme s’il savait, au fond de lui, où se trouvaient les réponses à ses questions. Il lui semblait que les étagères se déplaçaient pour former un chemin déjà tout tracé. Une fois dans les allées correspondantes, il n’avait qu’à passer les doigts sur les anciennes reliures, pour se sentir envahir de sentiments puissants. Aussi il savait, d’un pressement de doigts, s’il pouvait trouver des choses intéressantes dans un livre. Il mit toute fois un temps beaucoup plus conséquent à trouver toutes les parties de cette réponses et il dû revenir plusieurs fois auprès de la créature pour obtenir son accord. Le sablier avait eut le temps de se retourner sur lui-même : une heure s’était écoulée sur les terres du Yin et du Yang. « Tu m’impressionnes, vieux magicien… Je ne me suis pas trompée en t’emmenant ici… Tu es vraiment un de ses élus. » A cette déclaration, le vieillard ne sut que répondre. En quoi était-il un élu ? Il préféra donc s’abstenir de tout commentaire et attendit l’énigme suivante. « Elle nous est commune à tous et pourtant, personne ne sait rien d’elle. Trouve-moi les origines de notre langue, celle du dialecte commun. »

Il lui fallut une semaine entière pour relier le langage commun au Quenya, la langue elfique. En effet, de nombreuses hypothèses le conduisirent sur de fausses pistes et il dut s’y reprendre maintes fois –les possibilités se réduisant peu à peu, il était forcé de finir par trouver, bien qu’il lui restait encore quelques chances avant de ne donner sa réponse que par pure élimination. « Bien, petit mage. Que suis-je ? » « Qu’êtes vous ? » « Oui. Voici ta nouvelle question. » D’un geste de la main, elle lui fit signe de s’en aller, une dernière fois, derrière les rangées de livres, avant de se remettre à ses occupations. S’aidant de sa canne de fortune, il alla de nouveau chercher des réponses.

Le bruit mat du bâton contre le sol rompait le silence de plomb qui régnait dans l’antre. Si certains auraient trouvé cette atmosphère lourde, oppressante, Barnabé lui se sentait parfaitement à son aise. Il n’avait même pas conscience du silence presque absolu. Pourtant, lorsqu’il tourna derrière une étagère, suivant comme d’habitude son instinct, il fut surpris d’apercevoir quelqu’un d’autre, tournant délicatement les pages une à une. Le vieux magicien s’approcha lentement de l’inconnu. « Moi qui pensait être seul… Vous me surprenez mon ami. » C’est à peine si l’autre l’entendit. « Hum… Vous passez également le test ? » A ce mot, l’homme retrouva un semblant d’intérêt et leva le bout du nez. « Un nouveau ? Bienvenue parmi nous. » « Nous ? » L’homme acquiesça avant de retourner dans sa lecture. « Vous êtes ici depuis longtemps ? » On ne lui répondit pas. Intrigué, Barnabé essaya de de parler à l’inconnu pour en apprendre d’avantage mais il se heurtait à un mur, il se décida donc à continuer ses recherches.

En marchant, il réfléchit à la question. Il ne pouvait nier que quelque chose de mystique se dégageait d’elle, quelque chose de mystérieux, une aura magique planant autour de sa silhouette. Il retrouvait, en quelque sorte, cette étrange impression que lui laissaient parfois sa fille et Feu sa femme. Comme si elles n’étaient personnes et pourtant, on savait qu’elles possédaient une grande puissance en elles. Cependant, cette question le laissait sans réponse, encore une fois. S’agissait-elle de la même créature que Babelda ? Peut être, ou alors quelque chose d’encore plus intriguant. En tout cas, il était certain qu’il ne s’agissait pas d’une simple magicienne… Peut être une apparition de l’Aether lui-même ?

Curieux, Barnabé se reperdit dans ses pensées. Se penchant sur plusieurs ouvrages, il trouva plusieurs extraits faisant référence à une femme pâle, translucide, propageant la parole d’Illios. Plusieurs témoignages sur une jeune fille gardienne du savoir. Parfois décrite comme un spectre, parfois comme une créature mystique, ou comme une aether ! Peut être n’avait-il pas eu tort ? Mais finalement, lorsqu’il tomba sur un dernier ouvrage, il finit par trouver la réponse. C’était un ouvrage cataloguant les créatures et apparitions peu communes qui avaient eu lieu sur les terres yinoises. « Les Sinn’s », une légende des plus intéressante. Et tout collait : l’apparence pâle, la sagesse sans fin, la douceur… Oui, il devait s’agir de cela. Tout fier de lui, il alla retrouver la femme, et lui donna sa proposition.

Un sourire satisfait. « En effet… Bien joué, magicien, mais je ne pensais pas que tu mettrais autant de temps… » En effet, cette question, parce qu’il n’avait cessé de faire des hypothèses en chemin, avait pris plus de temps que les précédentes. « Je suis bien une Sinn’s, et puisque j’ai dédié ma mort à Illios, puisque je suis mois même devenue Census, je m’occupe de ses protégés, guidant ses partisans… Te guidant par la même occasion. » Elle prit le temps de faire une petite pose, puis s’approcha lentement de son élève. « Et maintenant, la dernière question… Où se trouve Eärel ? »
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Mar 12 Avr 2016, 14:01


Barnabé regarda l’esprit comme si elle avait soudainement perdue toute forme d’intelligence. « Ma femme est morte… » se contenta-t-il de répondre, par automatisme, sur la défensive. Une expression indéchiffrable s’installa sur le visage de la demoiselle, tandis qu’elle s’approchait du mage. « Tu trouveras la réponse dans ton cœur… » Elle appuya un doigt sur sa poitrine en disant cela. En effet, la cinquième et ultime question n’aurait de réponse nulle part ailleurs qu’en lui-même, comme le lui avait expliqué la Sinn’s.

Barnabé dû s’assoir pour ne pas tomber. S’il comprenait ce qu’insinuait la prêtresse d’Illios–et ce qu’elle semblait affirmer- Eärel n’était pas morte. Sa femme était en vie ! Voilà que cette certitude était remise en cause pour la seconde fois, en seulement deux jours. Son pauvre cœur fragile allait de nouveau le lâcher ! C’était tellement… Fou ! Tellement inespéré ! Et pourtant, au fond de lui, il ne pouvait taire cet espoir vain ! Il en avait tellement envie, il savait que cela  était impossible et qu’il se faisait du mal en voulant y croire, mais malgré toutes ces années, malgré les nombreuses recherches qu’il avait mené pour la retrouver, il n’avait jamais abandonné. Jamais il n’avait vraiment abandonné l’idée qu’un jour, elle pourrait lui revenir, sous une forme ou une autre.

Les larmes lui montèrent aux yeux, et il ne les retint même pas. Il était tellement chamboulé qu’il se moquait que quelqu’un puisse le voir ainsi. La Sinn’s, quant à elle, savait probablement déjà depuis longtemps que cette question provoquerait un choc en lui, et qu’il ne pourrait rester de marbre –comment aurait-il pu, de toute manière ? Il ne prit pas la peine d’essuyer les ruisseaux salés sur ses joues. Il se contentait d’extérioriser la peine, l’incompréhension, le soulagement, le désespoir… Le ras de marée de sentiments sans queue ni tête qui le submergeaient. Un tas de questions lui venait en tête, mais il n’était pas sûr de vouloir trouver les réponses, de peur que la vérité ne le blesse encore plus que l’inconnu…

Mais non. Rester sans réponse, voilà ce qui était le plus dur. Les réponses, il pourrait les entendre, et au final, il serait libéré d’un poids. Un fardeau qui ne l’avait jamais lâché depuis plus de cinquante ans. Alors s’il avait le moyen d’obtenir des réponses… Ne devait-il pas essayer de les obtenir ? Ne le devait-il pas, pour Babelda ? La petite ne s’était jamais vraiment remise de la perte de sa mère, elle s’était toujours sentie coupable de sa disparition. Elle le niait, mais Barnabé avait remarqué la lueur sombre dans son regard lorsque l’on évoquait ce passage douloureux de leur passé. Alors oui, il devait trouver les réponses, s’il ne le faisait pas pour lui, il le ferait pour son enfant. L’ignorance n’était pas la bonne solution.

Mais avant de trouver la réponse à Sa grande question, il devait analyser les autres qui venaient noyer ses préoccupations. Il devait mettre de l’ordre dans sa tête. Que savait il de l’enlèvement de sa femme ? Posant sa tête entre ses deux mains tremblotante, il se remémora pour la millième fois cette nuit où ils avaient été attaqués, dans le désert… Le convoi avait été pris par surprise, une embuscade tendue par des vampires qui cherchaient un esclave leur ayant échappé. Tout était allé très vite. Barnabé avait d’abord essayé de protéger le vieil homme qu’ils étaient venus récupérer, résistant avec ses amis pour aider le réfugier. Mais les cris de sa fille l’alertèrent et il abandonna son combat pour porter secours à Babelda, qui se faisait attaqué par l’un de ces sauvages.

Dans tout cet affrontement, il n’avait pas eu le temps de se préoccuper d’Eärel. Le temps qu’il revienne au cœur du combat, les autres vampires étaient déjà repartis, avec l’esclave, mais aussi avec sa femme. Sans avoir laissé aucune trace derrière eux. Quant au vampire qu’ils avaient capturé, il n’avait jamais voulu donner de réponse et certains membres du groupe, désireux d’obtenir vengeance pour les pertes qu’ils avaient subi, obtinrent réparation en le sacrifiant.

Les années qu’il avait passé ensuite à la recherche de sa femme n’avaient menées à rien, toutes ses tentatives se soldant sur des échecs. Il avait pourtant réussi à obtenir des informations sur ce mystérieux comte, ce vampire déchu qui avait retenu captif le vieillard. Celui-ci avait été sa plus précieuse mine d’informations bien que cela ne lui ait jamais été suffisant pour retrouver ses traces. Les plus faibles de ses partisans le nommait simplement « Le Maître », mais d’autres membres de sa troupe l’appelaient parfois « Le Guide. » Le guide, en langage vampirique. Personne ne l’avait jamais vu mais tous en parlaient comme d’un Aether, un dieu vivant.

Ses investigations parlaient de beaucoup de choses, de beaucoup d’élus mais il était toujours compliqué de discerner le vrai du faux, les mythes des véritables témoignages. A force de se jeter corps et âmes dans chaque piste, il avait fini par perdre toute possibilité de retrouver son épouse. Cette conclusion là en avait amené une autre : s’il ne la retrouvait pas, et que les vampires l’avaient vraiment emporté avec eux… Cela signifiait sans doute qu’elle n’avait pas survécu ou qu’elle avait fini par devenir, à son tour, une esclave de cette race de la nuit. Cette dernière hypothèse ne l’enchantait absolument pas et, à vrai dire, il espérait pour sa femme qu’elle soit rendue à Ezechyel, plutôt qu’elle ne doive subir les châtiments de maîtres immoraux.

Car il était persuadé d’une chose : si Eärel était toujours en vie, et si elle avait été en pleine possession de ses moyens, elle aurait trouvé un moyen de les contacter. Un moyen de les prévenir qu’elle était toujours en vie. Avait-ce été le cas ? Avait-elle tenté de lui envoyer des signaux ? Avait-il été aveugle à ses appels en détresse ? Non, il s’en serait rendu compte. Combien de fois, en voyant une jeune femme au coin d’une rue s’était-il imaginé apercevoir son visage, et courir derrière cette demoiselle pour finalement recevoir la triste réalité en pleine figure : ce n’était pas elle.

Alors, elle était une esclave. Mais comment pourrait-il savoir où ses maîtres l’auraient amené ? Ces terres étaient bien trop vastes pour qu’il puisse le savoir, pour qu’il ne puisse ne serait-ce en avoir qu’une infime idée. Pourtant, la gardienne l’avait jugé capable de deviner cette information… A moins qu’elle ne lui ait menti tout ce temps, et qu’elle ne l’ai piégé ? Avait-il été la victime d’une machination ? Cette Sinn’s essayait-elle de garder prisonnier pour l’éternité ces personnes qu’elle amenait dans « L’antre d’Illios » ?Le magicien redressa lentement la tête vers la silhouette translucide de l’esprit. Il la toisa, la jugea tandis qu’elle inscrivait avec sa longue plume de longs paragraphe sur un grimoire. Non, Barnabé ne croyait pas en cette idée.

« Réfléchit, réfléchit ! » murmura-t-il pour lui-même. « Quelle est la dernière piste que tu ais trouvé ? » Et alors, la réponse lui tomba sur le bout du nez. La veille. Lorsqu’il s’était fait attaqué par cette hideuse créature… Il avait pensé qu’il s’agissait de sa femme. En réalité, la goule avait pris son exacte apparence, chacun de ses traits ressemblaient à ceux de sa défunte épouse –non, plus si défunte que cela, en fait. Et si cette créature avait été capable d’un tel exploit, de recopier avec une telle perfection l’apparence de sa femme, cela ne pouvait signifier que deux choses. Soit, d’une quelconque manière qu’il ne saurait expliquer autrement que par la magie, cette vampire était parvenu à… Capter un souvenir de Barnabé ou de Babelda, pour ensuite changer de corps –mais les souvenirs s’effaçant peu à peu avec le temps, il aurait été compliqué de créer quelque chose d’aussi précis, voire même impossible. Soit cette goule avait aperçu Eärel peu de temps avant leur rencontre… Et cela expliquerait pourquoi la Sinn’s lui avait posé cette question… « Elle est ici… » finit-il par répondre.

« Elle est ici ! » répéta le vieil homme, plus fort cette fois pour que sa juge puisse l’entendre. « Elle est tout près d’ici, en terre magicienne sans doute. On l’a raté de peu… » Barnabé, s’aidant de sa cane de fortune, se redressa et claudiqua jusqu’au promontoire où travaillait l’esprit. « Il faut que je la retrouve ! Il faut… Je dois aller la sauver ! Je dois le dire à ma fille ! Sa mère est vivante ! Hahaha ! Sa mère est toujours en vie ! Oui nous… nous devons absolument l’aider. » Pris d’un soudain regain d’énergie, l’homme ne tenait plus en place et, tandis qu’il s’extasiait de sa trouvaille, il faisait les cent pas devant la femme, gigotant les bras dans tous les sens. « Vous ne devez-pas. »

Cette remarque parvint à stopper net le magicien. Lentement, il tourna une tête vers la silhouette. « Que… Quoi ? Que voulez-vous dire " je ne dois pas " ? Pourquoi me l’auriez-vous dis dans ce cas ? » La demoiselle inspira longuement et referma son imposant livre, avant de se redresser de toute sa hauteur. « Le Grand Omniscient vous a permis de comprendre cette information, car il vous jugeait prêt à l’entendre… Cependant… Certaines connaissances sont parfois lourdes à garder. Celle-ci en fait partie. Je sais. » le coupa-t-il avant qu’il ne puisse riposter « que vous ne comprenez pas tout. Mais pour le moment… vous ne devez rien en dire à votre fille. Elle l’apprendra en temps et en heure, par ses propres moyens. Et lorsque ce sera le cas, vous serez là pour l’aider. Vous-même pourriez vous voir confié de mission pour l’aider, mais avant cela, ne tenez rien. » Le magicien en avait sur le cœur, cela se voyait, mais l’esprit se contenta de s’approcher. « Vous avez passé votre test avec succès. Félicitation, nouveau Census. » Elle frôla de ses doigts le front du magicien, et celui-ci fut comme porté par une légère brise.

Lorsqu’il rouvrit les yeux, il se trouvait, une fois de plus, dans un nouvel endroit. Bien qu’immense, la salle lui semblait bien étroite, après sa visite dans la bibliothèque de l’Aether. Mais il comprit bien vite qu’ils se trouvaient dans le temple d’Illios. « Vous êtes désormais, tout comme moi, serviteur d’Illios. Bienvenu, Census. » Barnabé accueilli cette nouvelle avec beaucoup moins d’entrain qu’il l’aurait habituellement fait. Les nouvelles déboussolâtes qu’il avait appris l’empêchait de se réjouir totalement. A quoi bon savoir que sa femme était envie, s’il ne pouvait lui être d’aucune aide ? Comme si elle lisait en lui, la Sinn’s lui répondit : « Certaines choses nous échappent parfois mais, croyez moi… Vous comprendrez la finalité de tous ces secrets. Soyez patient. »

La Sinn’s le quitta pour s’approcher d’un prêtre qui s’occupait de fidèles venus prier l’Aether. Barnaé en profita pour observer la bâtisse et fut émerveillé devant la splendeur des lieux. Il sentit que l’on tirait sa cape de voyage, et il se retourna pour voir qui le dérangeait. Il fut accueilli par le sourire radieux d’une fillette haute comme trois pommes, habillée d’une robe rose et d’un manteau jaune. « Bonjour, Margarette. » salua le vieil homme en s’accroupissant devant l’enfant. « Tu as fait très peur à ta maman. » commenta-t-il.

Avec un air grincheux, la jeune femme se tourna vers Barnabé. « Bien, hatons nous de retrouver votre fille. Elle commence à perdre patience et s’en prend maintenant au temple. » Barnabé soupira. Il attrapa dans ses bras la petite fille et regarda l’esprit dans es yeux. Il était prêt à retrouver sa fille.

1900 mots


Merci Kyra nastae

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La foi comme seul salut [Qête solo Ϟ Barnabé-Babelda]

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