Que l'éternité pouvait être ennuyeuse... Parfois je r^vais d'avoir un anniversaire, peut-être que quelqu'un de ma famille aurait pu me le rappeler, voire me le souhaiter, mais ma famille...où était-elle maintenant. Nulle part, elle avait disparue, c'était n'importe quoi ! Je ne savais plus vraiment si j'éprouvais encore des sentiments et des émotions. Je n'étais qu'un esclave de ma condition, un esclave du monde et de la Magie avec un grand "M". Car oui, j'était fait de magie, comme tous les génies, je n'étais qu'un être de rêves, si tout le monde s'arrêtait de rêver, ma magie bleue cessait d'être utile - car appelée aussi Lien du Rêve - et je n'étais rien, je disparaissais.

Cette journée était...classique ! En effet, j'avais décidé de choisir le parc comme destination. C'était un joli endroit. Je ne le voyais pas pluvieux, car encore aujourd'hui le soleil brillait sur chaque brin d'herbe. Les enfants jouaient et riaient de tous les côtés et moi je m'efforçais de les faire trébucher gentiment, à la manière d'une fée, pour rigoler et s'amuser. J'arrivai sur un peti chemin. Plusieurs races se baladaient ici avec leurs enfants. Il y en avait qui rampaient, des béluas sûrement, d'autres qui baguenaudaient dans les airs et quelques gens qui marchaient normalement. Sur le côté - et au centre de l'allée - il y avait un magnifique parterre de fleurs. Il y avait, disposées ici et là, plusieurs indications qui interdisaient aux gens de les piétiner. Cela ne servait à rien, le jardinier le savait-il ? Plus on interdisait, plus les imbéciles désiraient. Je voyais un groupe de jeunes en train de rigoler en marchant vers les fleurs et de courir à travers le parterre magnifique pour partir, poursuivis par le jardinier. Qu'ils étaient drôle.

Je m'allongeai au pied d'un arbre, les yeux ouverts, en observant le jardinier de ce parc s'énerver seul. Il abordait pleins de gens qui avaient l'air puissants et qui se baladaient dans l'allée, mais les gens refusaient, l'envoyaient paître ou l'ignoraient, quoi de pire que l'ignorance, dans tous les sens du terme. C'est ainsi qu'il tenta d'aborder les gens et que je décidais d'aller vers lui pour voir ce qu'il voulait. J'arrivais devant lui et - sans grande surprise, étant donné qu'il avait commencé à aborder tout le monde - il m'aborda en me disant :

- Vous, monsieur, aidez-moi je vous en supplie. Je vous paierai si vous le désirez. Protégez ces fleurs, juste deux jours, je dois m'en aller dans quelques heures, lorsque le soleil sera au zénith.

- Mmmmh, pourquoi pas. Mais uniquement si vous trouvez quelqu'un d'autre. Je serai au pied de cet arbre, appelez moi si vous me trouvez de la compagnie.

Je lui souris et retournai m'asseoir dans un nuage de fumée violette, juste pour l'impressioner.

Le jardinier continuait à chercher des gens et ce fut au bout d'une petite dizaine de minutes qu'il trouva enfin une jeune fille. En fait, il l'avait plus pris pour une délinquante, mais l'avais quand même engagée, il était donc vraiment désespéré. Je pris le temps de détailler la jeune fille, lorsqu'elle marchait dans ma direction. En fait je ne pouvais pas bien la détailler, car elle possédait une immense cape qui ne laissait apparaître que deux lèvres fines. Elle s'avança vers moi en présence du jardinier qui essaya de la présenter, mais il rata lamentablement. Elle se présenta donc comme étant Lysis, intéressant, ce nom avait une consonance de fleurs, coïncidence ? Je ne croyais pas aux coïncidences, car elles n'existaient pas, il y avait toujours une cause.

Je me levai en un bond et m'inclinai en faisant apparaître sur ma tête un chapeau que je pris soin d'enlever pour la saluer. Le chapeau disparut lorsque je me relevai de ma courbette puis le jardinier tenta également de me présenter. Il pataugeait vraiment dans la semoule ce garçon. Ça devait être le genre de personnes qui n'avaient pas beaucoup de talents, mais qui savaient faire une ou deux choses très très bien, les fleurs et les jardins dans son cas. Je souris donc au jardinier et à Lysis et dis :

- Appelez moi comme vous voulez, cela n'a pas d'importance, sauf si je le désire.

Mon regard se tourna successivement vers le jardinier et vers les fleurs.

- Au fait Maître Floral, avez-vous des détails ou des conseils à nous donner pour protéger votre parterre ?

Son regard partit dans le vague quelques instants, comme pour condenser les informations puis il commença en comptant avec ses doigts.

- Ils sont cinq, oui cinq. Chaque jour ils viennent courir sur mes fleurs. Ils aiment bien venir la nuit aussi, en fait, il viennent un peu tout le temps. Ce sont des jeunes. Il y a plus d'un humain, au moins un démon et les autres je ne saurai pas dire leurs races, un Alfar peut-être. Je n'ai jamais réussi à les arrêter, mais vous, ils ne vous connaissent pas. Je reviendrai dans deux jours, lorsque le soleil pointera, si vous avez bien réussi, alors, je vous paierai.

Comme pour le tester je lui lançai un regard un peu hautain et lui dis :

- La moitié du paiement maintenant, la suite si on réussit.

- Très bien ! Marché conclu ! On se revoit dans deux jours.

Il nous glissa à chacun quelques pièces dans les mains. Il était donc sincère. Puis, il partit en courant en direction de l'extérieur du parc. J'invitai Lysis à nous diriger vers le parterre puis lui dis :

- Je ne sais pas ce que vous savez faire, mais je propose que je prenne la place d'une fleur pour les attraper. Cela vous plairait-il, Lysis ? D'ailleurs, quel est votre ethnie, êtes-vous par hasard une rehla ?

Elle mit l'argent dans une de ses poches puis tourna la tête vers moi. Je ne savais pas si c'était plus par politesse ou par intérêt, mais je n'en avais cure, elle m'écoutait dans tous les cas. Je n'aimais pas l'ignorance. C'était une des pires sortes de mépris à mon avis. Mes pires maîtres - et ceux qui recevait les pires voeux - étaient ceux qui me traitaient comme un objet ou qui ne me parlait même pas à part pour leurs voeux. Je n'étais pas une lanterne, j'étais Kazu Fuwoni, dit Dira, et j'avais des émotions et des sentiments. Elle me parla ensuite du plan à mettre en place. Elle pouvait apparemment elle aussi se transformer. Ce serait parfait. Elle fit alors quelque chose dont je n'avais pas l'habitude. Elle me dit que c'était à ma convenance, à mon désir, comme si j'avais le droit à un unique voeu. Cette formule et ce choix me fit apprécier la jeune dénommée Lysis. Elle ne me connaissait pas, peut-être que si elle savait qui j'étais, elle ne m'aurait jamais proposé cela, mais je pourrai le vérifier pendant ces deux jours. Je lui souris et me permis de choisir, pour une fois que je pouvais le faire.

- Je pense que l'idée de l'enfant est la meilleure. Ainsi vous pourrez les attaquer de l'intérieur de leur petit groupe de délinquants. En revanche, il va falloir vous montrer teigneux envers l'environnement pour vous faire remarquer, car, ce sont des enfants, ils aiment exclure les autres.

Je fis un rire poli plus que sincère pour appuyer mes dires. Ayant été dans un pensionnat, je m'étais fait beaucoup d'amis, mais pleins d'ennemis également. De plus, vu que j'étais humain à cette époque, je ne pouvais quasiment pas me défendre. J'avais appris à me battre avec mes deux Tessens, mais face à la maîtrise du feu, je faisais pâle figure. Nous arrivâmes à un banc sur lequel Lysis s'assit et m'invita à faire de même d'un geste de la main. Je le fis avec un petit sourire. Apparemment, ce n'était pas une rehla comme je l'avais pensé.

- Effectivement c'est une magnifique race. Mais cela doit être très difficile à vivre. Selon ce que j'ai appris, ils savent tout, mais ne peuvent rien dire. Cela doit être une vie horrible au quotidien...

Je levai les yeux au ciel pour regarder un vol d'oiseaux passer et partir, ils devaient vivre au jour le jour comme moi. J'étais peut-être un oiseau finalement... En tous les cas, elle avait alors enlever sa capuche pour laisser apparaître une vraie cascade de cheveux bleutés. Ses cheveux étaient ceux d'un rehla et cela me fit rire intérieurement. Lorsque je la regardai à nouveau, je tombai sur deux beaux yeux bleus avec une petite particularité. Il y avait à l'intérieur comme un souffle de vie, comme un courant aérien qui traversait son iris pour continuer éternellement dans un balai qui changeait à chaque passage. Elle avait des yeux magnifiques. Parfois ils devenaient même blancs un instant, superbe ! Elle me dit ensuite qu'elle était une élémentale d'air. Cela devait être beau de communier avec un élément, comme je communie avec la Magie. Puis elle se tente à deviner ma race. Elle avait trouvé, mais à nouveau elle émit cela comme une hypothèse, cette femme avait l'air très humble, je l'aimais bien.

- Je tiens à vous dire que vos yeux sont superbes. Ensuite, oui, je suis effectivement un génie, mais j'ai moi-même été humain avant de le devenir.

A la fin de ma phrase elle tourna la tête pour regarder le jardin. Je vis, comme elle apparemment, une jeune femme qui ne s'occupait même pas du paysage et qui lisait en fonçant dans les fleurs. D'un courant d'air, elle fit arriver le livre dans son visage pour qu'elle arrête de lire, elle était drôle. Quant à moi, je fis modifier les lettres du panneau pour écrire :

Attention où tu vas !

Elle devait se croire folle et ces petits moments de joie égayaient ma vie. sa phrase me fit d'ailleurs sourire, comme un poule sans tête, quelle image ! Elle m'interrogea ensuite sur les motifs de l'acceptation de cette mission. Je lui répondis :

- Vous savez, lorsqu'on a l'éternité pour découvrir, on prend ce qui vient. C'est pour moi comme découvrir un petit quelque chose, comme un jeu en fait. Et vous ? Ah, et si ce n'est pas trop indiscret, est-ce que vous aimez bien être une élémentale ? En tant qu'anciens humains, nous sommes presque pareils finalement.

Hrp:

Ma nouvelle jeune amie leva les yeux vers le ciel. Je suivais son regard en cherchant quelque chose à voir, mais il n'y avait rien, elle devait sûrement penser ou faire la plus belle chose du monde, rêver. C'était bien étrange, je n'avais pas envie de lui jouer des mauvais tours, mais juste de profiter du temps que je pouvais passer avec elle. Bien loin de l'amour, mais tout proche à la fois, c'était devenu une de mes seules vraies amies. Ce sentiment était bien rare, encore plus pour un génie, car enfermé dans cette cage que sont les rêves, les gens finissaient toujours par profiter de moi. C'était physiologique peut-être, je n'avais pas la réponse, mais lorsqu'un ami se croyait assez aimé pour me demander ses trois voeux d'un air hautain que prenne les nobles et les maîtres insupportable, je ne les considérais même plus comme des animaux, ils devenaient esclaves de mes souhaits et avaient en réalité la pire condition qui puisse être. J'estimais donc mille fois plus les gens qui m'appréciaient de façon désinteressé et Lysis avait l'air de le faire, en plus dans ses paroles qu'elle prononça avec un ton détaché et posé, elle me dit avoir rencontré un charmant jeune homme. Elle parlait sûrement de moi, du moins je l'espérai. Mais faisait-elle cela pour que je lui donne une récompense ? Devais-je le faire ou pas ? Non ! Je devais arrêter de penser à cela, peut-être profiter tout simplement de ce que j'étais actuellement, je ne pouvais rien y faire de toute façon et redevenir humain ne m'intéressait pas. En effet, même si j'avais été mis en cage, je pouvais m'amuser au moins maintenant. J'était peut-être triste, mais amusé tout de même. Ainsi elle finit de me répondre. Je lui dis alors :

- Oh, je comprend. En effet ce jardinier pouvait rendre coupable. En tout cas moi, j'ai rencontré une jeune fille charmante et aux yeux divins.

Je ne voulais rien d'elle et j'espérai de la réciprocité dans la nature de nos compliments. Quitte à passer deux jours avec une personne, autant l'apprécier. Je n'aimais pas souvent la compagnie, mais celle-là était très gentille. Elle posa son regard un instant sur moi, je ne la voyais pas, car je regardai toujours le vol des oiseaux, mais je le sentis me dévisager quelques instants, comme pour s'assurer que j'étais toujours là. Puis je descendis moi-même ma tête pour faire la même chose qu'elle, vérifier qu'aucun enfant n'était là. Pour l'instant tout allait bien. Elle continua alors à me parler en relevant les yeux et le chef.

Apparemment, elle préférait rester humaine. Sur ce point nos avis divergeaient, en effet je ne concevais plus une vie sans magie et juste avec un commerce. Car maintenant, j'en avais deux des commerces. Celui de mes voeux et celui que j'avais envie d'ouvrir depuis que j'étais parti du pensionnat. Je lui répondis :

- Rester humaine ? Mais pourquoi vouloir passer d'une vie avec de la puissance et les éléments de son côté à une vie de persécution et sans pouvoirs ?

Puis elle continua. Apparemment son changement avait été inversement proportionnel au mien, quoique peut-être cela allait changer un jour. Elle me posa ensuite la question sur moi. Je lui souris, peut-être mélancoliquement, puis dis :

- Je n'ai pas envie de redevenir humain, mais de là à avoir envie d'être génie c'est particulier aussi en fait. Je suis prisonnier des autres et ne peut plus rêver alors qu'avant j'étais un grand rêveur. Par conséquent les deux conditions ont leurs avantages et leurs défauts. Mais si vous deviez m'accorder un souhait, ce serait de me permettre d'être votre ami et non votre génie. Car j'ai eu beaucoup de maîtres, mais peu d'amis. Ainsi me permettez-vous de vous tutoyer et de ne pas vous considérer comme ma maîtresse ?

Je n'aimais pas trop ouvrir mon coeur, mais parfois il le fallait. J'allais enfin voir si elle était vraiment désintéressée. Sinon je la servirai, finirai ma mission et m'en irai...seul...comme avant. J'espérai qu'elle opine par la positive. Elle me demanda ensuite comment c'était passé mon changement :

- Cela ne me dérange pas du tout ma chère. J'avais trouvé, alors que je travaillais chez un viel antiquaire, une vieille lampe à l'aura violette. Je l'ai ouverte pour libérer un génie. Il m'a accordé trois voeux et j'étais alors humain. J'ai voulu une belle vie pour ma famille, de belles funérailles pour le vieux vendeur et des pouvoirs. Pour avoir des pouvoirs, il m'a transformé en génie et m'a enfermé dans cette lampe.

Je fis apparaître mon réceptacle et lui dis :

- Ceci est ma maison, c'est fou non ? Elle est très spacieuse en plus !

J'éclatai de rire et lui demandai :

- Et vous, si cela ne vous dérange pas, comment s'est passée votre transformation ?

Apparence de moi gamin:

Son histoire n'était pas facile... En effet elle avait vécu une sorte de génocide, un urbicide en quelque sorte. Cette histoire me plongea dans les méandres de mon esprit. J'avais mes propres théories en ce qui concernait les races oppressées par le destin comme je les appelais. Elles étaient actuellement pour moi au nombre de quatre. La première, et la plus évidente, était la race des orines. La deuxième, celle des génies, la troisième, celle des rehlas, la quatrième, celle des réprouvés et soudain, je me mis à penser qu'il pouvait y en avoir une cinquième. Peut-être que les élémentals non plus n'avaient absolument rien demandé à personne. Ils avaient été monsieur et madame tout le monde avant de se faire prendre dans un sort lors d'une balade en famille au volcan ardent et depuis ils ne vivaient plus entièrement. Je me doutais bien que des gens ne voulaient pas et que d'autres voulaient, mais je compris surtout qu'eux non plus n'avaient pas eu le choix. Mais qui avait réellement eu le chois de sa race en fait ? Personne, absolument personne. J'étais sur ce banc dans ce parc puis un inventaire des races commença à se faire dans ma tête. Je ne pus en écarter que certains. Les vampires, ayant dû sucer eux-mêmes du sang avant d'être transformés étaient en somme responsables de leur condition de revenants. Les déchus pouvaient avoir été piégés ou en avoir eu marre de cette vie entre sainteté, angelots et vertus cardinales, ce que je comprenais tout à fait, mais les autres, ceux qui vivaient simplement, ils n'avaient pas eu le choix. C'était comme la vie en général, homme ou femme, gentil ou méchant, beau ou laid, puissant ou faible, agile ou traînard, rien n'était laissé au hasard. Aussi je compris qu'effectivement, personne n'avait eu le choix. Les seuls qui étaient à blâmer étaient ceux qui forçaient les gens à changer, ceux qui, pour appuyer leurs convictions, brûlaient, pillaient saccageaient et ne faisaient que des horreurs sur ces belles terres. C'était eux qui créèrent les terres désolés, les terres arides et tous les panoramas chaotique du Yin et du Yang.

Tiré de ma rêverie, j'entendis Lysis nous dire qu'il était temps de mettre notre plan à exécution, elle avait entièrement raison. Ainsi, après avoir disparu et réapparu sous une forme aérienne, je me dirigeai vers le parterre pour me transformer, lorsque j'eus une idée. Je courrai vers l'élémentale et pris sa pièce en vitesse. Je lui la mis dans sa poche, me transforma ensuite en brume, puis en pièce puis je lui dis, venant de la pièce ce qui devait donner bizarre :

- Joue avec moi comme si de rien n'était. N'oublie surtout pas de les provoquer avec la pièce que je suis, je pourrai ensuite les pourrir, mais ne me vend pas, je sortirai au dernier moment ! Bonne chance !

Je souris, comme pouvait sourire une pièce, puis je vis au loin une bande de jeune. Ils étaient cinq et je pouvais clairement distinguer leurs auras faibles. Il y avait deux démons, un alfar, un sorcier et un vampire. Leur chef était le sorcier et ma magie devait surpasser la sienne de très peu. Je murmurai à Lysis :

- Les voilà. Le noiraud avec le manteau en cuir est le chef, c'est le plus dangereux et je crois que, comparé aux autres, il est vraiment dangereux. A toi de jouer !