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La défunte Mitsuko a l'air moins morbide que décriée par l'ombre qui s'était faite l'hôtesse en place et lieux, comme à son habitude, se vanta de bien des talents qu'elle, je le savais, ne maîtrisait guère plus que moi, sa parole suffisant aux hommes pour la croire, j'étais tout de même bien moins impressionnable, aucun statut auquel elle pouvait prétendre ne pouvant me faire plier, à genoux face à une grandeur qui ne saurait m'atteindre.

Cependant, si je souris aux caprices qu'elle prévoyait de m'exposer dans un avenir plus ou moins proche, prenant même l'audace de m'avouer que je ne serai qu'un outil de plus pour l'élever, mon regard devint sévère lorsqu'elle se mit à dévoiler sans le dire, l'avenir qu'elle réservait aux deux coqs de l'étage supérieur.

De ce que j'avais toujours pu voir d'elle, elle restait d'un impassible parfois faux, semblant sensible lorsque cela était nécessaire, et s'il y avait une chose à laquelle il aurait été sot de se fier, c'était réellement l'expression de son visage et sa verbale qui témoignaient l'exact paradoxe de ce que son cerveau dérangeait prévoyait et pensait.

La solitude d'un homme ? La mort d'un autre ? Il ne fallait pas avoir étudié grandement la langue pour comprendre qu'elle suggérait la fin de Jun et la fracture avec un Vlad dépendant de sa personne. Cependant, j'étais comme incapable d'en comprendre les fins. Elle serait incapable de tuer son Jun et elle aimait bien trop jouer avec Vlad. Peut-être aimait-elle trop jouer avec l'un et peut-être tenait-elle trop à l'autre. Car plus elle aimait, plus elle prenait peur. Plus elle prenait peur, plus elle voulait détruire. Et s'il lui venait à l'idée de détruire, rien ni personne n'aurait été assez fou pour se mettre en travers de son chemin, même pas moi, c'est dire la teneur de la chose.

" Bien, bonne soirée à vous. Mais prenez-garde ma belle, on ne peut espérer manipuler son petit et ridicule monde, ainsi, indéfiniment. Il suffira d'une erreur, même indétectable. Tout le monde finit toujours par se faire piéger, l'on se piège souvent soi même lorsque l'on fait preuve d'autant d'intellect que vous. Le plus drôle voyez-vous, c'est que bien souvent, l'on aime se piéger, car à autant s'établir d'interdictions, à tout prévoir, tout penser savoir, l'on finit par vouloir se trouver sa propre faille, histoire de se prouver que l'on est pas morte à l'intérieur, que l'on peut encore vivre ! "

Et si Mitsuko ne pris pas garde à ses paroles, si elle continuait son chemin dans la salle, je continuais en criant plus fort encore

" Prenez-garde chère ombre, ce jour est peut-être demain, peut-être notre prochaine rencontre ! " mon sourire étant presque déformé par tant de sadisme hypothétique.

Se tournant ensuite vers Noah, je passai mon bras autour de son cou, elle qui, penchée par dessus le balcon, avoua non sans crainte, que ce monde n'était plus celui qu'elle avait connue, bien plus complexe, tant de manipulations berçant nos nuits.

" Ne vous en faites pas, ni pour elle, ni pour ses innombrables prétendants. Mitsuko est une femme qui.. sait toujours faire preuve d'une imagination non bornée pour se sortir des pires situations et désintéresser les Hommes, qui lui courent après, des obligations auxquelles elle aurait consenti un soir pour obtenir ce qu'elle voulait. Quant aux hommes, un pleurera sans verser une seule larme, l'autre.. l'autre.. je ne sais quoi vous dire, mais je suis certain qu'elle a autre chose en tête, si elle élimine ses pions les uns après les autres, ce n'est pas pour rien. Elle s’ennuierait trop si elle laisse son échiquier vide. Elle prévoit forcément autre chose, ou bien, par peur des sentiments, elle change de tactique mais j'y crois peu.. "

Je continuais ensuite non sans un rire masqué :

" Vous l'avez voulu votre reine, vous l'avez. Moi si j'aurais vu une blonde essayer de faire le grand plongeon d'une falaise, j'aurais profilé la magouille et lui aurait accroché un élastique. "

Je me détachai enfin d'elle puis jetai à nouveau un regard vers la salle de réception. On avait découvert le cadavre d'un Jun, son âme étant parti avec la faucheuse, un Vlad catatonique, des cris d'horreur par ci et là à la découverte des morts, sans compter les invités que les loups d'ombre n'avaient épargné.

Cette soirée avait été une soirée d'horreur, oui, une soirée d'Halloween plus que réussie. Je fis apparaître deux coupes d'un champagne délicieux en donnant une flûte à Noah.

" Allez, trinquons ma chère ! Trinquons à cette soirée pleine de rebondissements et à notre prochaine soirée ! Car j'ai bien ris avec vous, je tiens à le signaler tout de même ! J'espère vous revoir au plus vite ! "

Le bruit sourd du tintement des deux coupes nous fit sourire tous deux puis, après un cul-sec et une remarque de ma part pour signifier la descente facile de tavernière de l'ombre, nous jetâmes les deux flûtes par le balcon.

Quant à Jun, j'aurai tout le loisir d'en comprendre les tenants et aboutissants en temps et en heure, car je le savais, je reverrai très vite son assassin présumé qui avait tout avoué, prémédité avant même de l'avoir aperçu.