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 | Effeuiller la marguerite | Mémoire

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Kyra Lemingway
~ Déchu ~ Niveau III ~

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◈ Parchemins usagés : 4741
◈ YinYanisé(e) le : 22/03/2016
◈ Activité : Tenancière d'un Bar à vin (rang I) ; Négociatrice (rang I) ; Brasseur (rang I) ; Reine du monde des contes à mi-temps
Kyra Lemingway
Sam 23 Mar 2024, 00:24


Effeuiller la marguerite

Catch par Claudia Gironi

« Il m'aime... »

Je papillonnai doucement des yeux, m'extirpant avec difficulté d'une sieste imprévue. Face à moi, sur un banc public, Nefi, qui m'observait d'un œil amusé et chaleureux. C'était sa présence qui m'avait réveillé. Je me frottai les yeux de mes paumes dans une dernière tentative d'éveiller pleinement mon esprit en y chassant les dernières traces de rêves, puis m'étirai longuement les bras, le dos et, surtout, la nuque. Être assise n'était pas la position la plus reposante pour dormir, et l'arbre n'était pas le plus confortable des oreillers qui existe. « Ça fait longtemps que tu es là ? » lui demandai-je en me relevant. « Je viens d'arriver. Mais je ne m'attendais pas à te trouver ainsi. Il y a mieux comme endroit pour dormir, tu ne trouves pas ? » me répondit-il en me tendant le livre que j'étais en train de lire et tombé de mes genoux lors de ma sieste je supposai. « Qu'est-ce qu'il y a ? » demandai-je finalement en passant la main sur les plis de ma robe. « Maman veut te voir. » - « Maman ? Pourquoi ? » - « Elle ne m'a rien dit. J'imagine que ce doit être important pour qu'elle veuille conserver le secret. » m'offrit-il comme seule réponse. Je fronçai des sourcils, boudeuse et un poil inquiète. J'espère que ce n'est rien de grave. « D'accord. J'y vais. » lâchai-je en m'éloignant à grande enjambée avant de déployer mes ailes une fois sortie du Jardin Public.

Retrouvant la Citadelle Blanche et, surtout, la maison, j'y cherchai immédiatement ma mère. Elle ne s'y trouvait pas. Je ne pus retenir un pincement de lèvres ennuyé. Pourquoi n'était-elle pas là où j'étais certaine de la trouver si ce qu'elle avait à me dire était si important. Peut-être ne l'était-ce pas tant finalement. Décidai-je alors de l'attendre ici plutôt que lui courir après. Ça aurait été le meilleur moyen de passer notre temps à se manquer mutuellement. Je m'installai à la table de la cuisine et rouvris le livre là où j'avais été interrompue par le sommeil — du moins, là où il me semblait avoir été interrompu. Il m'était cependant difficile de rester concentré sur l'histoire. Nefi m'avait laissé dans l'ignorance — ce n'était pas sa faute, lui-même n'avait aucune idée de ce qu'il se passait après tout — et je trépignais d'impatience de savoir enfin la raison de cette convocation. Ce n'était peut-être rien. Mais cette méconnaissance des faits excitait bien trop mon imagination. Heureusement, à peine avais-je fini, avec difficulté, la première page que je vis la silhouette de ma mère se dessiner dans l'ouverture de la porte. « Coucou maman ! » la saluai-je en allant l'enlacer. Je reçus un tendre sourire accompagné de ses bras autour de moi en retour. « Nefi m'a dit que tu voulais me voir. » - « En effet. » approuva-t-elle en s'écartant pour aller s'installer à son tour à table. Instinctivement, je la suivis et revins à ma position d'origine, puis me mis à pianoter nerveusement sur le livre encore ouvert.Un silence de quelques secondes s'installa avant qu'elle ne reprenne la parole. « Dis-moi. Tu as toujours pour objectif de devenir Ange Gardienne ? ». Il me fallut un instant avant d'enfin réussir à lui répondre. « Ou... Oui ! Évidemment ! ». Un nouveau sourire empli d'aménité se dessina sur son visage. « C'est une bonne chose. Il y a encore de nombreux Humains qui manquent de Gardiens. Beaucoup se trouvent hors de leur Capitale alors qu'ils sont surement ceux qui ont le plus besoin de notre aide. ». Je l'écoutai avec plus d'attention que jamais, m'abreuvant de chacune de ses paroles comme d'un nectar. « Grâce à Samuel, nous avons la position de certains de ces "villages". Luna et toi irez ensemble dans l'un d'eux. ». Je la dévisageai longuement. Puis un large sourire ravi étira mes lèvres. « Je veux que tu retiennes tout de même, Kyra, que rien ne garantit que tu crées un Lien dans l'immédiat. Il n'est pas à exclure non plus que ce n'est pas dans ce village que tu trouveras la personne avec laquelle tu te lieras. ». J'affirmai entendre et assimiler ses mots d'un signe de tête. Pourtant je ne pouvais me défaire de mon sourire. Je n'avais plus qu'une chose en tête : j'allais devenir Ange Gardien, quoi qu'en dise ma mère.

Le lendemain je rejoins Luna devant la grande porte de la Citadelle Blanche, toute sourire. « Tu as l'air heureuse. » me fit-elle remarquer, amusée. « Oui, je le suis. ». Je ne pouvais décemment pas répondre le contraire, mon attitude le montrait clairement. « Pas toi ? » - « Si. » répondit-elle aussi tout sourire. « Mais j'ai aussi un peu peur, je dois bien avouer. » ajouta-t-elle en baissant les yeux. « Peur ? » l'interrogeai-je donc, étonnée de ce sentiment qu'elle pouvait ressentir pour tel événement. « Bien sûr. Regarde les Anges Gardiens, leur vie est complètement bouleversée une fois liés. Tu n'as pas peur de ce changement toi ? ». Je réfléchis quelques secondes à sa question. Elle n'avait pas tout à fait tort. Pourtant je n'avais jamais réellement ressenti de la peur devant ce changement. « Non, pas vraiment. En fait, quand je vois les Anges Gardiens, leur lien avec leur Humain, je trouve surtout ça beau. ». Je marquai un temps avant de reprendre, la coupant dans son élan de réponse « J'ai envie de savoir ce que ça fait d'être lié ainsi. » - « Fais attention à cette Envie tout de même. » se moqua-t-elle en déployant ses ailes. « Je ne m'en fais pas trop. Ce n'est pas avec cette Envie-ci que je risque grand-chose. » répliquais-je tout autant moqueuse en faisant à mon tour apparaître mes plumes. Puis, dans un même mouvement, nous nous envolions loin de la cité des Anges.



J'exhalai un soupir dépité. « C'est bien dans la Forêt aux mille clochettes que nous sommes censées trouver ce village, n'est-ce pas ? ». En même temps, perchée sur un arbre, je balançai mes jambes dans le vide. Luna, assise au sol, adossée à l'arbre sur lequel je m'étais installée, opina du chef. « Et nous sommes bien certaines que l'on s'y trouve ? Nous ne nous sommes pas trompées de forêt ? ». Toujours silencieuse, elle nia d'un signe de tête avant ajouter « Il n'y a pas cinquante forêts dans lesquelles poussent des plantes dont les fleurs semblent des clochettes. ». Oui, elle ne m'apprenait rien. J'essayais seulement de trouver une justification autre que le fait qu'aucune de nous deux n'avait un sens de l'orientation fonctionnel. Je soupirai à nouveau, levant les yeux vers les profondeurs de la forêt. « Bon. Tu connais le proverbe. Il y a toujours deux solutions à un problème ! » fis-je, déterminée, à la recherche d'une solution. « Je croyais que c'était Il n'y a jamais de problèmes, que des solutions. ». Je haussai des épaules. « Ça revient au même non ? ». Un silence suivit où chacune nous plongions dans la réflexion. Enfin, un début d'idée me vint. « Nous avons des ailes, non ? Il nous suffit de survoler les alentours pour trouver la ville la plus proche, elle devrait être plus simple à voir d'en haut. Nous leur demanderons une carte et– » - « Tu parles de Dhitys ? Cette ville annexée par des Déchus ? ». Une forme de mépris fut visible dans la commissure de ses lèvres comme dans le ton employé. Je comprenais. Néanmoins, le désir de trouver ce village surpassait le dédain que je pouvais moi-même ressentir pour cette race. « Si tu as une meilleure idée, je t'écoute. » rétorquai-je donc en croisant les bras. « Nous ferions mieux de rentrer. Nous demanderons des détails sur la façon de trouver le village, ou même de voir s'il est possible qu'un adulte nous accompagne. » - « Quoi ? Rentrer ? Quelle idée ! » m'insurgeais-je, l'idée de rentrer bredouille m'étant inacceptable. Ma cousine m'observa longuement, tout comme je le fis avec elle. Un éclat de rire nous échappa alors. « On fait quoi du coup ? » demanda-t-elle une fois le fou rire passé.« On continue à chercher. » déclarai-je finalement en sautant au sol tout en posant un regard suppliant sur ma cousine. « Un dernier essai, s'il-te-plaît. » insistai-je en voyant son hésitation. Ce fut à son tour d'exhaler un soupir. « D'accord. Mais pas longtemps. On doit rentrer à la Citadelle avant le coucher du Soleil je te rappelle. » - « Oui ! Merci ! » m'exclamai-je en lui sautant dans les bras, ravie d'avoir pu lui faire changer d'avis. Je comprenais cependant mieux à présent pourquoi maman avait tenu à ce que je sois avec Luna. Ava ne s'était pas assez penchée sur mon berceau, à l'inverse de ma cousine, surtout pour ce genre de situation.

Au lieu de nous jeter à nouveau les yeux fermés dans cette chasse au trésor, nous avions décidé de faire finalement usage de magie pour nous faciliter la tâche. Ni l'une, ni l'autre n'étions vraiment douées dans ce domaine, raison pour laquelle nous n'avions pas utilisé cette compétence plus tôt, et raison pour laquelle nous n'attendions pas après elle pour nous aider. Enfin, nous... Toute la tâche revenait à Luna. C'était elle qui avait un pouvoir pouvant nous aider, pas moi. Quelque chose s'apparentant au pouvoir de localisation, sans l'être tout à fait. Nous restions sans bouger et silencieuses plusieurs minutes durant, elle les yeux fermés et l'intention concentrée sur sa magie, moi à l'observer en croisant les doigts pour que ça fonctionne. Elle rouvrit alors les yeux. Pleine d'espoir, je la fixai, impatiente, dans l'attente d'une réponse. Ce ne fut que déception cependant alors qu'elle nia sa réussite d'un signe de tête. « Mais j'ai senti autre chose. C'était petit et assez vif. Je ne sais pas ce que ça peut être mais c'est tout proche. ». Malgré la description qui n'avait rien d'humanoïde, l'espoir me revint. L'espoir mais la panique également. Je portai mon intention sur notre environnement, attentive au moins mouvement suspect. Mais il n'y avait que la nature autour de nous. Quelque chose attira tout de même mon regard. Quelque chose de petit et de vif. Une lueur qui se promenait d'arbre en fleur, et de fleur en arbre. « Qu'est-ce que c'est selon toi ? » - « Tu te souviens de ces êtres de nature qui donnent vie aux arbres dont on a parlé pendant nos études ? ». C'était il y a longtemps, mais il était difficile d'oublier ce genre de créature. « Tu crois vraiment que c'est un Lesovik ? » - « J'en ai aucune idée, non. Peut-être. ». Nous fixions ensemble la lueur bondir entre les ligneux autour de nous, les branches des arbres qu'il possédait pointant chaque fois dans une même direction. « On dirait qu'il nous indique une direction. » commentai-je en tournant le visage en la direction qu'il semblait nous montrer. « Tu le crois ? » - « On ne perd rien à le suivre de toute façon. ». Luna approuva d'un hochement de la tête. Alors, côte à côte, nous avancions vers ce que l'on espérait être le bon chemin. C'est là que nous pûmes confirmer l'hypothèse selon laquelle il était un guide, tandis qu'il nous rattrapa avant de nous devancer.

Après plusieurs minutes de marche, et nous enfonçant toujours plus dans la forêt — je le supposais du moins — , le possiblement Lesovik disparut aussi soudainement qu'il était apparu, nous livrant à nouveau à nous-mêmes sans nous laisser le moindre indice sur la route à suivre. Je me tournai vers Luna, dépitée. Mais un bruit attira notre attention avant même que l'une de nous s'exprime. C'était un bruissement, dans un bosquet tout proche. Sans prévenir, une bande de bambins surgit alors des fourrés pour nous sauter dessus. « À l'attaaaaaque ! » hurlait l'un, bâton en main. Il nous fallut un court temps pour assimiler ce qu'il se passait et réagir en déployant nos ailes pour rejoindre une épaisse branche en hauteur, hors de portée du mini-régiment. « Ah ! Mais c'est des Anges ! » clama un autre en nous pointant du doigt, tout aussi surprit que nous le fussions de leur présence. « Mamaaaan ! Y a des Anges lààààà ! » reprit-il en tournant les talons pour rejoindre, j'imaginais, sa mère. Quelques longues secondes suivirent avant qu'il ne réapparaisse en compagnie d'une jeune femme au teint pâle, presque maladif. « Bon sang, les enfants, combien de fois il faudra vous le répéter : on ne hurle pas comme ça dans la forêt. » les réprimanda-t-elle, ce à quoi une fillette protesta « Mais on défendait le village ! ». La remarque me fit sourire et je compris mieux la raison de cet assaut. La mère eut la même réaction que moi comme elle leva le visage en notre direction. « Pardon. Ce n'est pas la meilleure façon de vous accueillir. » fit-elle avec une gêne visible. « Il n'y a pas grand monde qui s'enfonce autant dans la forêt jusqu'à nous approcher. » - « Vous n'êtes pas facile à trouver en même temps. » répliqua Luna en descendant de notre perchoir. « Tant mieux. » ponctua l'Humaine comme je descendis à mon tour. « Venez. Suivez-moi. Vous avez sûrement envie de vous reposer un peu. ». Puis elle se tourna vers le groupe d'enfants. « Vous aussi vous venez. Ça suffit les bêtises. ». Et, tandis que l'on se mit à la suite de l'Humaine, je tournai le visage vers ma cousine. « Tu as bien fait d'insister. » me dit-elle en voyant que je l'observais. Oui, j'étais ravie également de m'être montrée si obstinée. Vraiment ravie.
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Kyra Lemingway
Dim 28 Avr 2024, 13:19


Effeuiller la marguerite

Catch par Claudia Gironi

« ...Un peu... »

J'étais retournée à plusieurs reprises dans le petit village isolé depuis notre première fois avec Luna. Elle n'avait pas ressenti ce quelque chose qui nous fait sentir autrement et n'était donc pas revenue, elle, ce que je pouvais comprendre, je crois. Ma mère n'avait de cesse de répéter que le Lien était quelque chose d'important, trop pour être pris à légère et initier un Lien avec un Humain sur un coup de tête. D'autant plus après avoir pris connaissance de la requête de Teodor, le chef de village, qui avait exigé que le ou la Liée soit un des enfants du groupe. Peut-être avait-ce été cela aussi qui avait rebuté Luna. J'avais l'impression qu'elle ne se sentait pas la force de porter cette responsabilité. Pas que je m'enorgueillisse de l'avoir cette force moi, au contraire j'en étais particulièrement anxieuse. Mais, si la demande m'avait étonnée, j'en comprenais totalement les justifications et étais profondément en accord avec. Ils étaient au début de leur vie, là où les adultes l'avaient déjà, pour certains, bien entamés. S'ils devaient pleurer la mort d'une personne, ils préféraient qu'il ne s'agisse pas de l'un de ces innocents. Je n'avais cependant rien pu promettre Le Lien ne dépendait pas uniquement de mon vouloir, ce serait bien plus simple sinon. D'autant que ce n'avait rien à voir que de s'approcher d'un enfant insouciant que d'un adulte raisonné. Pourtant, au fil des jours, je commençai à comprendre leur façon d'être, de penser, leurs aspirations, leurs rêves, leurs caractères. Alors je m'étais mise à réellement envisager la possibilité de réaliser le souhait du vieil homme. J'allais d'ailleurs le rejoindre, mais mon attention se dirigea plutôt sur un garçonnet, seul, assit tristement sur la terrasse suspendue de la cabane en bois construite en hauteur pour les enfants, au milieu du village. De sa hauteur, il jetait des petits cailloux en contrebas, paraissant particulièrement vexé. Je décidai de remettre à plus tard ma discussion avec le chef, peinée par l'isolement, à l'évidence imposé, du garçon, et rejoins l'arbre pour escalader la petite échelle et rejoindre le solitaire. « Hé. Tout va bien ? » m'enquis-je de son état en m'approchant. Je n'avais cependant pas envisagé le fait qu'il ne m'ait ni vu, ni entendu arriver, et son sursaut me le fit bien comprendre. Rapidement il sauta sur ses jambes et me fusilla d'un regard passablement contrit. « Hé ! T'as pas le droit d'être là ! C'est notre quartier général à nous ! » me fustigea-t-il, les poings serrés. « Va-t'en, je v– ». Il ne put conclure son sermon, trébuchant sur son petit tas de cailloux en voulant se rasseoir. Mon cœur, lui, manqua un battement en le voyant basculer en arrière et passer par-dessus le garde-corps. Il ne fallut pas une seconde supplémentaire pour que je bondisse en déployant mes ailes pour plonger sur lui. Le bras tendu, je le saisis avec force pour le coller contre moi et l'enserrer entre mes bras, protégeant fermement sa tête de mes mains derrière son crâne. Il était trop tard pour éviter la chute. Je ne pouvais que limiter la casse. Mes ailes rabattues dans mon dos, espérant qu'elles amortissent la chute — efficacité qui fut discutable — je m'écrasai au sol, un violent craquement dans le dos accompagnant un râle de douleur de ma part. Déjà un groupe s'était formé pour nous aider, commentant l'événement par des soupirs retenus ou des murmures alarmés. Je relâchai enfin l'enfant qui se releva dans la seconde pour courir, en larmes, rejoindre sa mère. « Est-ce que ça va ? » s'inquiéta l'un des villageois en voulant m'aider à me redresser. « Je crois. » lâchai-je doucement en réprimant un gémissement de douleur . Mon corps me faisait terriblement mal en vérité, ce qui n'avait rien de curieux en soi. Je ne sentais cependant plus mes ailes, et ça c'était plus inquiétant. « Je crois que je me suis cassée une aile... » admis-je alors. C'était d'autant plus un problème que j'étais incapable de me soigner moi-même. Je me tournai vers la mère et son garçon, puis souris. Il ne semblait pas blessé. C'était le plus important pour l'instant.

Assise sur un banc dans une des maisons communales du village, le regard perdu à travers la fenêtre, je sentais la douce chaleur de la magie blanche se diffuser dans mon dos et mes ailes. Papa était arrivé aux portes de la nuit, inquiet de ne pas me voir rentrer. « C'est fini. Essaie de battre des ailes, doucement. ». Je m'exécutai et fus ravie de les sentir à nouveau mobile. « Tu devrais faire plus attention. » - « Je ne l'ai pas fait exprès. » - « Évidemment. C'est d'ailleurs pour cela que l'on nomme ça un accident, parce que ce n'est pas volontaire. » répliqua-t-il, amène, en s'installant à mes côtés. Je soupirai et relevai les yeux sur lui. « On peut rester ici cette nuit ? » - « Bien sûr. Je ne comptais de toute façon pas de faire revenir à la maison dans l'immédiat. Il vaut mieux que tu te reposes avant de faire la route pour la Citadelle. ». J'opinai du chef, ravie de savoir ma demande satisfaite. « Je vais aller demander au chef du village son aval et s'ils sont en capacités de nous héberger tout de même, même si je pense qu'il n'y verra aucun inconvénient. » ajouta-t-il en se levant. Je le suivis, sans oser rétracter mes ailes cependant. Je craignais de défaire les soins qui venaient de m'être prodigué en les faisant disparaître. Cependant, avant que l'on ne quitte l'habitation, quelqu'un passa la porte. Je reconnu la mère du petit. « Bonsoir. Je ne vous dérange pas ? » - « Non, bien sûr. Vous êtes les hôtes, s'il y a quelqu'un qui doit s'inquiéter de déranger, il s'agirait plutôt de nous. ». L'Humaine, Mirjana, sourit de la remarque avant de se tourner vers moi. « Vous allez bien ? ». J'affirmai d'un hochement de la tête tandis que mon père me laissa seule avec elle. « Et Maximilien ? » - « Plus de peur que de mal. Grâce à vous. ». Je ne la vis pas venir. Elle s'approcha et m'enlaça avec force, et amour, me soufflant un « merci » empli de gratitude et de soulagement. Je me sentis rougir. Je n'avais encore jamais eu à me confronter à ce genre d'effusion de sentiment. C'était si intense que ses larmes de joie et de peurs, surement contenues jusqu'alors, m'atteignirent droit au cœur, tant que je sentis les larmes me monter aux yeux. « De rien. C'est normal. Je ne pouvais pas le laisser sans aide. » balbutiai-je sans savoir quoi faire de mes mains — devais-je l'enlacer en retour, ou était-ce trop ? Si je la repoussais, le prendrait-elle mal ? Surement, oui. — et me demandant si mes mots ne sonnaient pas trop prétentieux. « Non, ce n'est pas normal. Tout le monde n'aurait pas sauté dans le vide comme vous. » répliqua-t-elle en me libérant mais en saisissant mes mains. « Passez nous voir quand vous voulez. Vous êtes la bienvenue chez nous. Notre porte vous sera toujours grande ouverte. » déclara-t-elle ensuite en s'écartant, séchant doucement ses pleurs de l'index, avant de m'embrasser une dernière fois puis quitter les lieux avec de nouveaux remerciements. Je me sentais étrange de ce simple échange. C'était comme si je m'étais reçu un trop-plein d'amour qui ne me concernait pas, et pourtant qui m'était en partie dédiée. Une sorte de gêne chaleureuse. Ce n'était pas désagréable, loin de là. Mais c'était également... Oui, étrange.

La table avait été dressée au milieu du village, et deux assiettes avaient été ajoutées pour mon père et moi. J'allais aider au service quand je sentis quelque chose accrocher mon habit et tirer timidement dessus. Je baissai les yeux et aperçus le rouquin qui, une fois mon attention obtenue, attrapa ma manche pour me tirer à sa suite. Amusée de sa réaction, j'abandonnai le groupe pour suivre le garçonnet à l'écart, puis m'agenouillai pour me mettre à hauteur. Je retins difficilement une grimace de douleur lorsque je dus plier la cheville, et me rendis compte trop tard que ça avait dû affecter le petit. « Ça va ? » lui demandai-je, me souvenant de son visage humide de ses pleurs. « Pardon... » souffla-t-il plutôt que me répondre. « Pardon ? Pourquoi ? » - « C'est à cause de moi que t'es tombée. ». Je lui souris, attendrie par sa réaction. « Non, ce n'est pas ta faute. Je n'aurais pas dû te surprendre, et encore moins m'infiltrer dans votre base. Pas sans autorisation. » tentai-je de le rassurer et, surtout, de le déculpabiliser. Il refusa en bloc ma justification d'un signe de tête. Aussi je repris avant qu'il ne formule toute contestation « Eh puis, c'est mon rôle d'Ange Gardienne de protéger les Humains. ». Il me fixa un instant en silence avant de reprendre. « T'es l'Ange Gardienne du village ? » me demanda-t-il avec curiosité. La réflexion m'amusa. « Non, pas vraiment. En fait, je ne peux être l'Ange Gardienne que d'une seule personne. » lui expliquai-je. Alors il réfléchit. « Ça veut dire que t'es l'Ange Gardienne de moi ? » - « Non plus. ». Je le vis déçu. « Tu voudrais avoir un Ange Gardien ? ». Il me répondit en haussant des épaules, faussement désintéressé. Le mensonge était si lisible dans son attitude que je ne pus retenir un rire bref. « Tu crois que les copains ils seraient jaloux si j'avais un Ange Gardien ? » - « Assurément. Ce n'est pas une chose que tout le monde a la chance d'avoir, malheureusement. ». À nouveau il réfléchit intensément. « Tu crois tu peux faire l'Ange Gardienne avec moi ? » me demanda-t-il avec malice à présent. Je me vis contrainte de mettre aussitôt un terme à la blague que je devinai il voulait faire. « Non. Je ne peux pas faire ça, désolée. ». À peine eussè-je prononcé ces mots que je le vis afficher une mine boudeuse en croisant les bras. Je m'expliquai donc un peu mieux. « Je ne peux pas faire l'Ange Gardienne. Je ne peux que être Ange Gardienne. Le Lien qui unit un Humain et un Ange est trop sacré pour en faire une farce. ». Ça ne l'apaisa pas plus. « À table ! ». Je me tournai vers le groupe qui bavardait en riant, certains ayant pris en otage mon père pour lui faire, ce que je supposai, un interrogatoire complet de ce qu'il faisait, et de ce qu'était la vie d'un Ange au sein de la Citadelle Blanche. Je ramenai mon attention sur le rouquin et le vis pas moins boudeur que plus tôt. « Donne-moi tes mains. » l'invitai-je à s'exécuter en tendant les miennes. Après une courte seconde, il obéit et me fixa, dubitatif. « Je ne peux pas faire semblant d'être ton Ange Gardienne. Mais si tu le veux, je peux l'être réellement. ». Plus j'y pensais, plus ça me semblait évident. Il n'y avait pas de coïncidence ou de hasard dans ce monde, seulement des signes donnés par les dieux et dont on avait la charge de les déceler et les comprendre. C'était ce que répétaient souvent maman et grand-mère — surtout elle d'ailleurs. « Mais si je deviens ton Ange Gardienne, ni toi ni moi ne pourrons changer d'avis. Le Lien formé, il persiste dans le temps et ne peut ni être brisé, ni être renié. ». Ça, tous les Anges Gardiens l'avaient dit au moins une fois pour nous mettre en garde. « Mais en échange, je serais toujours là pour toi. Pour t'aider, te soutenir et, comme tout à l'heure, te protéger. ». Il y eut un court silence où je supposai il était en train d'assimiler et comprendre mes mises en garde. « Toujours, toujours ? » - « Toujours toujours. » répétai-je avec assurance.
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