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 [Évent Top-Sites] - Le siège d'Arcadia

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Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~

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◈ Parchemins usagés : 2293
◈ YinYanisé(e) le : 24/05/2014
◈ Activité : Horticultrice
Latone
Lun 01 Nov 2021, 08:51



Le siège d'Arcadia



" Duc Von Ivanova ! Le Paladin se précipita dans la chambre du Conseil. Dans une situation moins alarmante, il n'aurait même pas pu s'introduire de la sorte sans en payer le prix. À son arrivée, le ton avait haussé entre les Sages, tandis que le Duc demeurait interdit à sa place. Ils se turent en partie lorsque le messager se présenta à genoux. Ils… Les Marcheurs Ternes arrivent… Il releva la tête, son casque empêchant de lire la stupeur sur son faciès. Ils seront bientôt à nos portes ! "

On lui demanda combien ils étaient. Selon leurs dernières estimations, les rustres de Ciel-Ouvert ne comptaient que quelques milliers de combattants capables dans leurs rangs. Rien qui ne saurait ne serait-ce qu'intimider l'Ordre d'Hébé. Néanmoins, le rapport du Paladin leur glaça le sang.

Nombreux. Ils étaient trop nombreux.

Damon Von Ivanova ferma les yeux, se soustrayant à la panique ambiante du Conseil. Il y a un peu plus d'un mois, lorsque les Chevaliers ont cherché à tempérer les récentes ardeurs de la Marche, le Duc ne pensait plus entendre parler de ces conteurs à la voix mélodieuse. Or, l'intervention de son Paladin eut l'effet inverse : les chants s'étaient levés un peu partout à son insu, le fer de l'Ordre s'était émoussé par-ci par-là, engendrant une succession d'échecs et de scandales plus pénibles les uns que les autres. Son château de cartes s'envolait, à cause d'une erreur. Une satanée erreur.

Malgré tout… Il restait un espoir. Si les Marcheurs étaient venus jusqu'à eux, alors cela voulait dire que Ciel-Ouvert était affaibli. Il suffirait de repousser les forces de l'Empire naissant au Sud et de profiter du chaos pour envoyer suffisamment de chevaliers traverser l'Océan. Ces guerriers sans morale n'auront alors plus aucune échappatoire. C'était une possibilité, mais encore fallait-il jauger les renforts de la Marche Terne. Un autre Paladin entra à son tour.

" Duc Von Ivanova ! Il s'agenouilla, plus calme que son homologue mais pas moins décontenancé. Le Tribunal est vide ! Les Mord'th ont disparu ! "

Ceci, ce simple détail à lui seul, représentait la pire nouvelle possible.

" Isuzu… La voix de l'Empereur les fit tous frémir, celui-ci se levant lentement de son siège, le regard injecté par le Mal. Traîtresse… "

C'était donc ainsi qu'elle voulait jouer. Très bien. La partie commençait, alors que ses plus gros pions ne savaient même pas par où commencer pour calmer le jeu.

" Qu'ils viennent. Le Déchu s'avança vers les vitraux. Hébé les regardait avec une profonde tristesse. L'Ordre ne cédera pas. "

~~~

Nuages noircis, smog envahisseur

" Hurabis Latone ! " L'annoncée venait tout juste d'entrer dans la tente servant de conseil de guerre.

Ils étaient tous là ; ses plus précieux alliés. Marcheurs, Mord'th, Chevaliers. Se retrouver ainsi aux commandes d'une telle opération était grisant, presque autant que de Marcher sur Linos. Que ce fut le Bleu Roi ou le Duc d'Arcadia, ces deux engeances se retrouvaient dans la ligne de mire de Ciel-Ouvert. Et lorsque les Marcheurs traquaient leurs proies, ils ne cédaient jamais.

Cette Marche avait duré plus d'un mois maintenant, à partir du moment où le Paladin Engeram s'était présenté à la Vigilante. Rien que par sa voix, les Guides avaient compris une bonne partie de l'envers du décor. On pouvait mentir, mais les vibrations, elles, étaient immuables. Tout ce temps consacré à se focaliser sur Arcadia leur avait permis de rassembler suffisamment de preuves des agissements de l'Ordre. La Mère des Mord'th en personne, présente avec ses Inquisitrices aux côtés de Latone, comme promis, leur avait fourni la clé de voûte de cette corruption. Toutefois, la Kirzor n'était pas moins fière de ses camarades, autant infiltrés pour creuser d'autant plus jusqu'à la racine du Mal, que les patrouilleurs qui purent étudier les Chevaliers sur le terrain. Les faits s'empilaient dans le dossier et leurs analyses permirent de tourner les alliés de l'Ordre en leurs faveurs. Aujourd'hui, les Chevaliers étaient seuls, abandonnés ou fustiger par ceux ayant placé toute leur confiance en leur Foi. La bergerie avait fini par tomber le masque pour dévoiler ses crocs les plus acérés. Il ne restait plus qu'à ouvrir l'enclos aux loups.

" Merci à tous d'être là… Un sentiment enivrant la traversait, à l'orée d'une bataille sans précédent ; là où Latone se sentait bien plus vivante. Avons-nous des nouvelles des infiltrés ? "

Lors de son propre camouflage, la Bleue fut l'une des Marcheuses ayant dû quitter les lieux pour organiser les prochaines opérations. Cependant, tous les Marcheurs n'étaient pas rentrés, afin de pouvoir se coordonner avec les Chevaliers d'Arcadia. Le don naturel des Mord'th permirent de trier les potentiels recrus, de guider les Marcheurs vers les âmes encore sauvables. Grâce aux soutiens de ces derniers, les défenses de la citadelle seront sapées au moment de l'attaque ; si celle-ci aura bien lieu. Les Hurabis comptait tout autant sur la présence de leurs forces au-delà des remparts pour rassembler encore plus de traîtres de l'Ordre. Les soi-disant Sages d'Hébé ignoraient encore dans quel chaos ils venaient de plonger.

" Ils sont prêts. Ils n'attendent plus que le signal. " Ce dernier étant on peut plus évident.

" Nous avons toutes quitté le Tribunal. En ce moment même, les Sages doivent être en train de se réunir pour évaluer les dégâts. Quant à Damon… Il ne doit être plus que Colère. " Par curiosité, l'Orisha se demandait quel Péché animait le Duc ; le plus évident étant : l'Ambition.

" Concernant les Anges rescapés, les derniers Hihtyx nous assurent que leur sécurité est assurée durant le siège. L'exfiltration devrait se faire tout en douceur lors des hostilités. " Le meilleur moment, lorsque toute l'attention des Chevaliers sera tournée vers l'anarchie.

" Les caravanes sont en place, les Yacks ont été équipé pour la charge. Les Oklilleirro attendent notre prochain ordre. " Les pions sur la carte en place permit d'éclaircir la stratégie mise en place.

" En ce moment même, nous recevons encore des candidatures de mercenariats : des guerriers et voyageurs de tout horizon souhaitent nous soutenir sur le champ-de-bataille. Sans évoquer le soutien militaire, leurs présences ajoutent du poids à nos Voix. Le moral de l'Ordre devrait en pâtir. " Des inconnus à leurs yeux, pourtant leur aide était la bienvenue en cette journée décisive.

" Tous ceux ayant répondu favorablement à notre appel sont présents. Sans parler des alliés que nous avons au sein d'Arcadia, nous pouvons d'ores et déjà affirmer que… Ykürr releva le regard sur leur cheffe attitrée, ayant encore du mal à le croire. Nous avons une chance de remporter. "

Avant cette histoire, ils ne comptaient que quelques milliers parmi leurs rangs. Les Chants successifs à l'égard des injustices avaient fini par gonfler leurs effectifs internes ; la couturière du coin ou le boulanger sans vocation s'étaient levés pour prêter leurs Voix. Aujourd'hui, rien qu'un coup d'œil sur les plaines de Tælora investies par leurs troupes suffisait à envisager que le million fût dépassé.

" Pour une fois, je ne suis pas d'accord avec vous. Elle laissa un silence planer, tout en demeurant bien sérieuse. Nous allons gagner. C'était dit ; elle tourna autour de la table. Parce que c'est ce que nous allons écrire. Parce que c'est ce que nous allons clamer. Nous allons gagner et les prochains jours scanderont notre victoire. Nous allons gagner et les futures générations se souviendront de ce que nous sommes capables. Nous allons gagner et libérer les Voix que ces parjures osent réduire au Silence pour leurs misérables profits. Elle s'arrêta à sa place. Cette Marche n'a pas comme unique objectif de rendre Arcadia aux véritables fidèles d'Hébé : nous sommes ici pour nous faire entendre. Par cet acte, nous allons leur faire comprendre à tous qu'ils n'échapperont pas aux Fers de Ciel-Ouvert. Elle tapa du poing sur le bois. Ni à ses Chants. Ses iris bleutées cherchèrent la Mère des Mord'th. Nous prêterons nos Voix à la Justice et libérerons Hébé. " Elle acquiesça ; ils le firent tous.

Les barreaux éclipsent la lueur du jour

C'était l'heure. Lorsque la Bleue se présenta à la ligne de front et que, d'une œillade en arrière, les escouades s'étaient formées sous leurs commandements, son égocentrisme s'emballa. Évidemment que le pouvoir lui fit tourner la tête, elle avait toujours été ainsi. Néanmoins, à la différence du Duc d'Arcadia, elle ne tournera jamais cette puissance en dehors des limites. Les Marcheurs étaient libres, libres de tracer leurs propres extrémités. Ils étaient clairvoyants, sages, et les Guides sauront leur montrer la voie. Latone inspira profondément, ordonnant ses idées, se ressaisit. Le rôle de diriger lui revenait et elle n'allait pas se gêner pour faire tout ce qu'il lui avait réussi jusqu'ici : rester naturelle.

" ORDRE CORROMPU ! C'EST NOTRE DERNIER AVERTISSEMENT ! OUVREZ VOS PORTES ET RENDEZ-VOUS ! "

Sa Voix portée par le Tonohr se fit entendre jusqu'aux remparts opposées de la citadelle. Les misérables du château ne purent se soustraire à la puissance de son cri. Une accalmie morne répondit à l'injonction, les sentinelles postées sur les remparts semblant n'être que des statues de pierre, sans âme.

" Ils ne nous prennent pas au sérieux. " D'un côté, Latone était furieuse d'être ignorée de la sorte ; de l'autre, ce refus d'obtempérer lui donnait l'occasion de lancer les hostilités. De prouver leurs compétences et leurs valeurs.

" Tant pis ! Rit-elle, jaune, avant que son visage se déforma par la colère, l'ivresse du combat. Donnez la potion aux Yacks. "

Latone, et plus particulièrement toute la Marche, ne remerciera jamais assez leur ingénieuse Cicataz pour cette idée. De son côté, la Bleue eut une vive pensée pour Jun, sans qui cette opportunité n'aurait jamais pu être possible. Avoir la faveur du divin – même s'il lui cassait bien trop les pieds – penchait la balance en sa faveur. Les montures d'ordinaire plutôt lourdaudes allaient tous les surprendre grâce à cette ingestion. D'ici, l'Orisha pouvait voir leurs yeux s'éclairer d'une lueur singulière lorsque l'alchimie fit effet. Son attention se releva un peu plus, pas à pas, sur chaque ligne formée derrière elle. Ils étaient nombreux, si nombreux, sinistres comme les porteurs des chaînes. Et il n'y avait pas qu'eux : d'autres uniformes, d'autres couleurs, des emblèmes différents. Ce miasme hétérogène était donc ce qu'on appelait communément un Empire.

" Cheffe. Latone redescendit de son petit nuage pour planter son regard acéré sur le commandant des lignes du front. Auriez-vous un discours à leur partager ? "

Un discours… ? Elle avait bien plus que cela. Les archers de l'Ordre l'attendaient aussi, ce point de non-retour, ces derniers mots inspirants. Toutefois, ce ne serait point porté justice à la communauté des Chants que de l'imaginer tout bonnement se pavaner avec de vaines palabres. La Kirzor leva les yeux au ciel, implorant Hébé de l'écouter.

Tu ne seras plus seule, petite fille.

Le murmure semblant à peine soufflé, mais sa Voix se fit entendre dans l'esprit de tous.

Nous rentrons enfin à la maison.

À l'orée du temps des floraisons,

Ta détresse fait éclore notre insigne.

D'un pas lent, sa silhouette guerrière se dessina le long de la ligne de front. Au sein de celle-ci, et bien au-delà, le fredonnement des soldats se fit plus intenses. Les Marcheurs, plus particulièrement, usèrent du fer de leur équipement en guise de percussions accompagnatrices.

J'entends ton Chant, petite fille.

Et par cette Rose, je te lie !

Latone pivota vers les remparts, sa Voix d'autant plus puissante. Petit à petit, la magie ambiante du Khitarr traça de vifs rayons solaires sur leurs propres troupes, à travers les nuages gris, telle une bénédiction céleste.

Tu ne seras plus seule, petite fille.

Nous te tirerons de ce cauchemar,

La punition de tous ces... barbares !

Elle rassembla d'incommensurables efforts pour ne pas rimer avec "connards."

Que ton sourire, alors, se dessine.

Les Marcheurs levèrent la tête. Encouragés par leur Hurabis, ils feront éclater leur don avec elle.

J'entends ton Chant, petite fille.

Et par cette Épée, je te sauve !

Sa lame frotta tout le long de son fourreau et son éclat tonna les hostilités.

" QUE NOTRE VOIX BRISE CES MURS ! "

Enhardis, échauffés, les Marcheurs firent détoner leurs Tonohr avec elle. La concentration magique de leurs Voix combinées firent trembler les briques des remparts, elle destabilisa les Chevaliers trop près du front. Le hurlement concentré se poursuivit jusqu'au point de rupture : sur l'aile droite, une faiblesse repérée tantôt fut exploitée, créant alors une brèche nette et importante dans le mur. Le brouhaha de la chute des pierres fut admiré par leurs alliés, craint par leurs ennemis. Ils avaient leur première entrée, mais ils ne comptaient pas laisser les portes d'Arcadia indemnes pour autant : les Yacks dopés à la potion chargèrent à grande vitesse pour servir de béliers, d'autres profitèrent de la brèche pour semer les graines de la discorde à l'intérieur des murs. Et si ce n'étaient aux impressionnantes montures que les Chevaliers se confrontaient, les Marcheurs répondirent présents en un éclair : leurs sifflements animèrent leurs lames, virevoltant en un ballet mortel. Une seule alternative : capituler ou mourir en infidèle.

La voix des libérés déchire le voile


2286 mots ~


Explications


Holà ♫

Nous y voilà, l'ultime partie de l'évent consacré à la chute de l'Ordre d'Hébé !

Je n'ai pas grand-chose à rajouter par rapport au post initial, il suffit d'aller taper, les portes sont défoncées et il y a une énorme brèche dans les remparts 8D

Quelques infos tout de même : les troupes rassemblées par les Marcheurs attaquent par le Sud d'Arcadia, mais si vous voulez jouer une attaque par le Nord (donc par l'Océan, car Arcadia est située sur la côte Nord de Tælora) vous le pouvez. Si vous avez un peu de mal avec le vocabulaire des Marcheurs (par exemple : Hihtyx, Tonohr...), je vous invite à lire la partie "Les Chants" de la fiche (ICI), qui vous permettra d'ailleurs de visualiser comment les Marcheurs combattent lors du siège. Avec le sort "Akaris" notamment, il faut les imaginer "danser" durant leurs combats, ce qui les rend assez gracieux et imprévisibles. Pour ce qui est de la bataille en elle-même, les Marcheurs font en sorte d'incapaciter les Chevaliers si possible, sinon – pour les plus vénères – ils les éliminent purement et simplement. Ils ne tolèrent pas tout ce qui est torture et massacre pour le plaisir, faites donc attention. Aussi, des Chevaliers se retourneront contre les leurs évidemment, ce qui accentuera encore plus le chaos ambiant entre les murs.

Enfin, la conclusion de la bataille est évidente : l'Ordre d'Hébé perdra. Le cercle des Sages et l'Empereur seront arrêtés par la Marche à Narathalia, un village voisin d'Arcadia ; mais ça, c'est moi qui m'en chargerai dans mon post final, ne vous en occupez pas ♫ Vous pouvez envahir le château mais le Duc et les Sages n'y seront pas. Quoi qu'il en soit, la victoire sera sonnée lors du crépuscule. L'Ordre d'Hébé sera dissous, Arcadia reviendra à la Marche Terne, Latone sera élue Duchesse d'Arcadia et les prisonniers de guerre seront incarcérés sur place. Quant au Duc, son cas n'est pas encore défini, il sera sans doute amené à la prison de Ciel-Ouvert pour son jugement ; si les gestionnaires de race participants veulent qu'il y ait des discussions concernant le Duc, nous pourrons en parler ultérieurement ^^ Pour l'heure, baston !

Si vous avez des questions : sujet HRP ou MP ♪


Gains


Participants : Jun ; Mancinia ; Kyra ; Latone ; Laëth ; Primrose ; Kitoe ; Miles ; Astriid ; Kaahl ; Typhon ; Djinshee ; Adam

De 40 à 79 votes | 1000 mots sur un personnage, au choix : Kyra ; Primrose
De 80 à 119 votes | 1000 mots sur deux personnages, au choix : Mancinia ; Astriid

Les gains vont au personnage avec lequel vous postez.
Bien sûr, vous pouvez le faire avec plusieurs personnages, mais le barème des 2000 mots se réinstalle ♪

Pour 2000 mots minimum, ou 1000 mots avec le barème :

- 2 points de spécialité au choix
- Un Titre en rapport avec votre implication dans la bataille
- L'Épine de la Rose : Un tatouage magique d'une épée décorée d'une rose, qui permet de stocker plusieurs armes et de les faire apparaître via la marque (maximum de trois différentes ; les armes sont interchangeables). L'emplacement du tatouage est au choix.
- Un Kangela : Originaire de Linos, cette créature est une sorte de koala, avec des petites ailes à la place des oreilles, de longues pattes arrière, un pelage doux. C'est un animal intelligent capable de comprendre les humanoïdes et de les téléporter là où ils le souhaitent. Il alterne souvent marche et vol pour se déplacer. Il est très sensible aux chants et aura tendance à apprécier ceux qui maîtrisent cet art. S'il est attaqué, il partira en fumée, à jamais protégé par la divinité les ayant créés. (Illustration)
- Une part économique dont possédait l'Ordre avant sa chute (pour rappel : tissus [angora et mohair], la citrine et l'obsidienne, l'avoine, le seigle, les poires, les pivoines et les noix, les épées longues, les clous de girofle, l’ardoise, les tuiles)
- Une chaumière avec une exploitation agricole (si désirée) en périphérie de la citadelle d'Arcadia

Pour ceux ayant participé aux deux évents, un gain bonus au choix parmi les suivants (c'est cadeau !) :
- Le pouvoir de brume qui permet de changer son corps en fumée
- Le pouvoir "Corps Suprême" qui permet de changer sa propre chair en diamant, ce qui confère une résistance à toute épreuve sans impacter l'agilité

Vous avez jusqu'au 31 Décembre 2021, à 23h59 pour poster.

Enjoy ♪




By Jil ♪
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http://yinandyangpower.forumactif.com/t34266-latone#672534
Priam et Laëth
~ Ange ~ Niveau III ~

~ Ange ~ Niveau III ~
◈ Parchemins usagés : 3849
◈ YinYanisé(e) le : 02/02/2018
◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam et Laëth
Ven 05 Nov 2021, 23:21



Valhalla Board Game Cover by Barbara Gołębiewska (on deviantart.com)

Le siège d'Arcadia

Evénement | Les Réprouvés & Dastan


Notes : Les trois PNJ Thur évoqués sont trouvables ici : | Figures importantes et PNJ chez les Réprouvés |. Ce rp fonctionne en tandem avec celui de Kaahl.


Zel’Eph, Shezira et Hazaan étaient assis autour d’une table, des chopes de bière posées devant eux. « Et qu’est-ce qu’elle a dit ? » s’enquit la blonde, dont la population avait le plus souffert des crimes d’Hébé. Le Stark s’avança sur son siège pour se rapprocher de la table. Il croisa ses bras sur son bois dur. « Elle nous encourage à combattre, mais elle ne viendra pas. » Le Tyd’Saan acquiesça lentement, ingérant l’information. Zel’Eph était le plus résistant de leur trio. Malgré ses relations tumultueuses avec sa fille, il était le plus apte à entrer en contact avec elle. Hazaan ne l’avait aperçue qu’une fois, et il avait cru devenir fou. Son souvenir le hantait encore, comme un cauchemar d’enfance ancré dans la peau. « Et toi ? » s’enquit le brun. Il secoua la tête. « Je ne peux pas rester. » Les deux autres Thur opinèrent. Parfois, il disparaissait des mois durant. Nul ne savait où il se rendait. Certains racontaient qu’il s’impliquait dans ses devoirs de Zaahin, d’autres qu’il était si transi d’amour pour sa femme qu’il ne pouvait vivre trop longtemps loin d’elle. Néanmoins, le Thur Merrill s’interrogeait : autrefois, Zel’Eph était plus présent. Pourquoi se désengageait-il autant ? Depuis combien de temps n’avait-il pas organisé une attaque contre des Goled ? Depuis combien de temps les guerriers n’avaient-ils pas éprouvé dans chacun de leur muscle la puissance de ses cris de guerre ? Comme s’il entendait ses pensées, le Zaahin précisa : « Je serai avec vous, mais pas physiquement. » Il releva son regard rubis vers son homologue de Bouton d’Or. « Je te confie le commandement des armées. » - « Bien. » Shezira aurait plus facilement guidé des hommes que lui ; mais il avait une expérience du combat et une maîtrise des armements qu’elle n’aurait jamais.

Quelques jours plus tard, le bruit courait parmi les Réprouvés qu’ils allaient partir en guerre. La nouvelle égayait les cœurs. Des batailles étaient toujours l’occasion de prouver sa valeur, sa force et sa témérité. Elles condensaient l’expression la plus pure de l’identité manichéenne. Dans ce cas-ci, le combat permettrait aussi de rendre justice à ceux qui s’étaient trouvés lésés par l’Ordre d’Hébé et de montrer aux autres nations que l’armée bipolaire devait être crainte. Et comme lors de chaque bain de sang, des entrailles des ennemis jailliraient des Kiir’Sahqon. L’effervescence gagna chacun des territoires. Les soldats prirent leurs armes, les polirent et n’eurent de cesse de s’entraîner. Les fermiers abandonnèrent leurs faucilles pour des haches et mirent à profit leur musculature taillée par le travail aux champs. Les bandits troquèrent leurs bourses d’argent contre des lames affutées et s’amusèrent à l’idée de tourner leur dextérité contre Hébé. Quelques temps plus tard, l’armée réprouvée s’était entièrement réunie à Sceptelinôst. La ville grouillait de l’éclat fracassant du fer contre le fer, des rires et des cris enjoués et de la clameur de milliers d’hommes et de femmes prêts à se battre. Ils embarquèrent sur les navires, en direction du Nord de Tælora, d’où ils attaqueraient. Debout sur la proue de l’un des bateaux, Shezira et Hazaan fixaient l’horizon. Le soleil traçait une ligne écarlate au bout du monde.



Le froid. La sensation le prit au corps tel un haut-le-cœur. Le bruit. Des cris s’entrechoquaient sur des lames et des respirations haletantes montaient des râles. L’odeur. Un ballet de senteurs se déployait, empreint de fer, de feu et de sueur. Le spectacle. Les rangs d’une armée aux couleurs réprouvées, qui scandait sa puissance au rythme de chants militaires marqué par le choc des armes contre les armes, devant les portes d’une forteresse. Il reconnut les couleurs qu’elle portait : c’étaient les mêmes que celles des Chevaliers d’Hébé. Alors comme ça, on les assiégeait ? Que s’était-il passé ? Combien de temps le temple, ses condamnés et ses bains l’avaient-ils retenu ? Les Zaahin jugeaient-ils enfin qu’il devait revenir dans son monde ? Pour vaincre les ennemis de son peuple ? Un frisson le frappa, sans qu’il sût quelle en était la cause. L’ensemble, sans doute. Il se serait jeté à la suite des siens, prêt à projeter le bélier contre la porte, s’il n’avait pas effleuré un autre bras nu, et senti cet autre parfum, différent de tous ceux qui étaient présents, et qui lui faisait tourner la tête de bien des façons. Il se tourna et vit Érasme. Étaient-ils condamnés à devoir se supporter où que les Zaahin les envoyassent ? Une grimace d’agacement tordit ses traits, puis un sourire narquois fendit sa bouche. « Je crois que c’est le jour de ta mort, Prince Noir. » chuchota-t-il. Ils se trouvaient au milieu de centaines de milliers de Réprouvés. N’importe quel guerrier serait ravi de trancher son petit cou blanc. Soudain, Dastan plissa les yeux. Un drôle de sentiment s’insinuait en lui ; une sorte de possessivité malsaine, qui lui faisait souhaiter d’être le seul à pouvoir le tuer. Il serait son trophée, et pas celui d’un autre. « Ou je peux te couvrir. Je n’ai qu’à dire que tu es mon esclave. » Juste retour de bâton. « Ou plutôt mon prisonnier. » Les Bipolaires n’avaient pas d’esclaves. Ni de prisonniers, d’ailleurs, mais c’était sans doute une notion qu’ils acceptaient plus que l’idée d’asservir quelqu’un – indépendamment de sa race – et d’avoir besoin d’un domestique. « On n’est pas des chouineurs de Sorciers alors on n’a pas besoin de serviteurs, nous. » se sentit-il obligé de préciser, autant pour sauver son honneur que pour rabaisser le Mage Noir. Son regard restait fixé sur le sien. Il allait devoir se décider vite. Pour l’instant, ils passaient inaperçus parce que tous les regards convergeaient vers la porte, mais bientôt, leurs vêtements blancs si peu adaptés au climat, leur manque d’armes et la tignasse rousse du Belegad attireraient l’attention. Déjà, on entendait le bois se craqueler.




Hazaan regarda vers l’Ouest. Debout près de lui, droite comme un i, Shezira lui jeta un coup d’œil. « Tu crois qu’ils vont venir vers nous ? » Il se tourna vers elle. Au milieu du maquillage noir qui teintait la peau de ses yeux, ses iris céruléens ressortaient comme ceux d’un loup. « Non. Nous ne sommes pas ici pour cette guerre. » Elle acquiesça. « Ils le savent aussi bien que nous. Ce serait stupide de se jeter les uns sur les autres. » - « Autant sur le plan militaire que politique, oui. » - « Et puis, il paraît qu’ils sont venus avec les Magiciens. Ils aiment ce genre de statu quo. » Ce qui consistait plus en une preuve de lâcheté que d’intelligence, pour les Manichéens, dont la vision du monde séduisait inlassablement la violence. « C’est vrai. Pas de risque, alors. » - « Non. » Ils se sourirent. Ils se mentaient, et ils le savaient. Bien qu’ils eussent donné des ordres qui interdisaient aux Réprouvés de s’en prendre aux Mages Noirs, ils ne se faisaient pas d’illusion. Si ces ennemis ancestraux se retrouvaient l’un en face de l’autre, ils chercheraient à s’éliminer. Eux non plus n’étaient pas exempts de cette logique. Ils étaient vieux, et si l’âge avait pu leur apporter la sagesse, il charriait avec lui des souvenirs qui pouvaient les pousser à la folie. Ils avaient vécu des choses que l’on ne peut pas pardonner. Des affronts que seul le sang peut réparer.



Si cette odeur de peau et de sueur, de vie et de mort, qui couvrait la silhouette du Sorcier d’une fine pellicule olfactive ne l’avait pas tant atteint, Dastan aurait peut-être souri. Pour les autres, elle était masquée par le musc du parfum du Prince ; mais pour le rouquin, elle remplissait tout l’air de ses poumons. Plus il se rapprochait, moins c’était tenable. La magie des bains les poursuivait-elle donc jusqu’ici ? Il serra les dents. Il avait envie de mourir. Non. De le tuer, puis de mourir. « Mon côté angélique t’emmerde, et je crois pas que tu sois en mesure de négocier. » rétorqua-t-il, les yeux plissés. « Non. Tu vas mourir. Moi, on me protégera. » Il était connu, chez les siens. À Bouton d’Or, tout le monde se connaissait. Et puis, il avait remporté il ne savait plus trop quoi chez il ne savait plus trop qui, et de toute façon, c’était dans un rêve. Quand bien même : il était un Kiir’Sahqon, et ce simple statut lui conférait une certaine garantie de survie – toute relative chez les Bipolaires, certes, mais tout de même. « Oui, forcément. Mais lâche-moi. C’est toi, le prisonnier. » Avec probablement plus de virulence que nécessaire, il le repoussa. Alors, seulement, son regard s’attarda sur les silhouettes de l’armée. Il y avait beaucoup de Réprouvés qu’il n’avait jamais vus. Mais parmi eux se trouvaient nécessairement des visages familiers. Des amis, ses parents… En cherchant, il réfléchissait. Comment allait-il pouvoir justifier la présence d’Érasme, vraiment ? Qui croirait qu’il était son prisonnier, s’il ne portait pas de menottes, pouvait se déplacer et parler librement ? Sans compter qu’ils étaient vêtus de la même façon. Et si certains le reconnaissait ? Une vague de chaleur fit battre son cœur plus fort. Il était à peu près certain que personne de Bouton d’Or ne pourrait mettre son titre sur sa figure, mais les autres ? Vouloir le protéger relevait de la folie. Il allait être jugé pour traîtrise et tué en même temps que ce connard. « Là-bas. » dit-il en pointant du doigt un groupe. « C’est mes parents, et des amis à eux. » Il inspira, puis bloqua sa respiration. Il avait grandi. La dernière fois qu’ils l’avaient vu, il était un gamin. Désormais, il possédait les traits et la démarche d’un adolescent. Allaient-ils le reconnaître ? Alors qu’il avançait vers eux, une poigne solide se referma sur son épaule. Il leva les yeux vers l’inconnu et se figea. Des pièces d’armure noire, aux reflets bleutés, couvraient partiellement sa peau. « Priam ? » s’étrangla-t-il. « Si j’étais toi, je n’irai pas les voir. » Le regard de son frère glissa sur Érasme. Malgré lui, Dastan pâlit. « Ils vous tueraient tous les deux. » - « Je… tu… » - « Je sais qui il est. » - « C’est mon prisonnier. » tenta d’affirmer le roux, avec un aplomb sans doute surjoué. « S’il l’était, tu serais mort. » Priam sourit, mais ses yeux ne souriaient pas. Il haïssait les Sorciers. Pour des raisons culturelles et personnelles. « Freyja est là ? » s’enquit-il, l’air bravache. Il avait envie de mourir. Son frère et sa sœur. Ces deux putain d’Anges déserteurs. Il vit le brun froncer les sourcils, aussi intrigué qu’hésitant. « Oui. » finit-il par répondre. « Mais je ne suis pas certain qu’elle ait le temps de te sauver la vie, comme à l’Odon do Dur. » Le plus jeune serra le poing. Il jeta un regard en biais à Érasme. Il n’avait pas besoin de savoir ce genre de détails. Et pourquoi ne s’exprimait-il pas en Zul’Dov ? « Venez. »

Le rouquin coula un regard en direction du Sorcier. « Viens, prisonnier. » fit-il d’un ton impérieux, avant d’emboîter le pas à son aîné. Pourquoi n’avait-il rien dit de plus ? N’était-il pas surpris de le voir en présence d’Érasme ? N’avait-il pas envie de le tuer, lui aussi ? Ne les conduisait-il pas à l’écart pour les achever ? Il hésita, mais ne bifurqua pas. Priam les guida à l’écart des portes. Derrière eux, ils pouvaient toujours entendre les cris d’efforts des Réprouvés. « Je veux me battre. » - « Tu n’es pas un guerrier. » - « Toi non plus ! » Priam ne se retourna pas, et ne dit rien. « Je veux me battre ! » Ils avançaient toujours. « Priam ! » Silence. « J’y retourne.  » Le rouquin eut à peine le temps de pivoter : rapide, son frère l’avait attrapé par le poignet avant qu’il ne pût exécuter ne serait-ce qu’un pas. « Tu vas te battre. » dit-il. « Et toi aussi. » Ses yeux d’or se plantèrent sur Érasme. « Vous n’avez pas le choix. Vous ne pouvez pas rester en arrière, parce que quand ils reviendront, ils vous tueront. Vous ne pouvez pas rester comme ça en première ligne, parce que s’ils ne vous tuent pas, vous mourrez des mains des Chevaliers. Et tu ne peux pas rejoindre les tiens, ils sont trop loin. » précisa-t-il en direction du Prince. Il lâcha Dastan et contourna une colline rocheuse, à une centaine de mètres de la cité. « Laëth. » Dos à eux, elle attachait ses cheveux. Elle se retourna, et lorsqu’elle les vit, un mélange de surprise, d’agacement et d’appréhension peignit son visage. « Restez là. » leur intima Priam pour se diriger vers sa sœur.

Le roux croisa les bras. Il n’aimait pas du tout cette configuration-là. L’absence de questions de son frère, le regard de sa sœur, leur conciliabule inaudible, leur simple présence, et celle d’Érasme, dont les effluves le torturaient toujours autant : rien n’allait. Il aurait rêvé de se jeter dans la mêlée, au lieu de quoi il était coincé ici. Ses iris bruns s’arrimèrent au Prince Noir. Sa seule satisfaction, c’était qu’il devait être encore plus énervé que lui. Non seulement il se trouvait en présence d’un Réprouvé, mais en plus, deux Anges complotaient pour décider de son avenir. Deux Anges impressionnants, en fait ! Un sourire sardonique peignit ses traits. Par moment, il haïssait l’ascendant que sa fratrie avait sur lui. Actuellement, il s’en délectait. Loin d’être aussi effrayants que Val’Aimé, ils devaient tout de même faire leur désagréable petit effet à cet abruti. « Alors ? » s’enquit-il, moqueur.

Avant qu’il ne pût répondre à l’adolescent, Freyja vint vers eux. « Je vais vous fabriquer une armure. » - « Comment ? » - « Tends les bras sur les côtés. » répondit-elle. « Non. Commence sur mon prisonnier. Je n’ai pas besoin d’armure pour combattre. » - « Tu préfères mourir ? » - « Je suis l’Intouchable. » - « Ne sois pas stupide. » Sa voix claqua comme un fouet de soie. Elle avait le timbre doux mais le ton dur. Elle avait beau être la plus petite d’eux tous, elle l’inquiétait plus que Priam ou Érasme. Quoi qu’elle fût une traîtresse en pleine repentance, ses talents guerriers étaient connus. Le rouquin esquissa une moue colérique, mais s’exécuta. La magie de l’Aile d’Acier l’enveloppa : des pièces de métal gris s’ajustèrent à sa silhouette, avant de se noircir pour arborer l’aspect bleuté de celle qu’elle portait aussi. Il dut lutter pour ne pas hurler à l’hérésie. Il se raccrochait au pénible souvenir de sa propre pratique. Parfois, c’était utile. Parfois, c’était indispensable. Parfois, c’était inévitable. Il la détestait, tout de même, de lui faire subir ça. De toute manière, il détestait cette situation. Il la détestait tellement qu’il songea que, pour une fois, il se trouvait sans doute sur la même longueur d’ondes que le Prince Noir. « À ton tour. » dit-elle à ce dernier, lorsqu’elle en eut fini avec son frère. Au loin, un craquement sonore retentit et un rugissement monta jusqu’à eux. Les portes avaient cédé.




Priam observait la scène, les bras croisés. Il ne disait rien, mais de temps à autre, il jetait un regard vers la cité, d’où les crépitements des combats s’élevaient. Freyja faisait courir ses mains à quelques centimètres du corps d’Érasme, qui s’habillait peu à peu de l’armure. Dastan, près d’eux, regardait. La remarque du Sorcier l’avait à peine effleuré. Entre lui et Freyja, elle n’était pas celle qui devrait se faire du souci s’ils en venaient à se battre. Elle l’écraserait comme la queue d’un bicorne claque les mouches en plein été : le plus naturellement du monde. Pourtant, il ne sut demeurer indifférent à ses autres piques. « Qu’est-ce que tu dis ? » gronda-t-il. « Tes putains de Sorc- » À l’instant où le Prince se pencha vers son oreille, son parfum se jeta sur lui. Le roux suffoqua, tandis que la terrible sensation alliée à cette odeur se répandait en lui tel un venin. Ses doigts dans ses cheveux lui rappelèrent toutes les fois où ils s’y étaient glissés, moites et tremblants, brûlants d’un désir qu’il contenait trop souvent. Il voulut reculer, mais la douleur propagea une forte vague de chaleur dans tout son corps : dans ces souvenirs qui ne lui appartenaient pas, il aimait ressentir les élans de vigueur du Mage Noir, qui tentaient vainement de retenir ses douces rébellions. Un frémissement d’horreur le traversa. La nausée le submergea.

Et puis l’étreinte se défit, Érasme recula, et Freyja se glissa entre eux, face au Sorcier. « Ça suffit. » Elle le toisa. « Sinon, la prochaine fois, ce seront ton nez et ta bouche que je couvrirai de métal. » Dastan remarqua alors que la main qu’il avait cramponnée dans ses cheveux était couverte d’un acier qui reculait lentement pour reprendre la forme initiale de l’armure. L’avait-elle contrôlé de cette façon ? Pouvait-elle contrôler leurs mouvements à tous, rien que comme ça ? Il pâlit, puis rougit. Il haïssait la magie. « C’est valable pour toi aussi. » lui adressa-t-elle. « Je ne m’amuse pas à vous protéger pour que vous vous entretuiez. » Priam, qui s’était rapproché, les regarda tour à tour. « Mettez vos différends de côté, comme vont devoir le faire vos deux peuples aujourd’hui. » Le Réprouvé serra les poings. Peu importait. Sur le champ de bataille, son frère et sa sœur seraient trop occupés pour les surveiller. Il lui ferait payer l’humiliation que lui faisait subir sa proximité. Puis, il balancerait sa tête de chiard aux pieds de Val’Aimé.

Au cœur d’un combat, les événements se déroulent rarement comme prévus. À l’instant où il franchit le seuil des portes, en compagnie de sa fratrie et du Prince Noir, Dastan oublia les griefs qu’il avait nourris à son encontre durant tout le trajet, en silence. La guerre le happa. En moins de trente secondes, il perdit de vue son frère comme sa sœur. Plus aucun repère n’existait, sinon Érasme. Il s’en rapprocha, avec cette sensation diffuse et incompréhensible, cet instinct qui lui disait qu’il devait combattre à ses côtés, comme d’habitude ou comme autrefois. Il secoua vigoureusement la tête. Elle lui semblait lourde. Freyja avait pris soin de masquer leurs visages à l’aide d’un casque, afin que personne ne les reconnût. Dastan, afin que nul ne posât de questions sur sa présence ici ou aux côtés du brun. Érasme, pour qu’il ne mourût pas dès que le premier Bipolaire l’identifierait comme un Sorcier, ou pire, comme le fils du Grand Chaos. Ils étaient méconnaissables. « J’espère que tu vas crever, sale merde. » grogna le Manichéen entre ses dents. Puis, il tourna les talons et s’élança dans la bataille. Son cœur lui faisait mal et il ignorait pourquoi.




Le marteau de Dastan frappa. Une fois, deux fois, trois fois ; le décompte se perdit entre les hurlements et le son sourd des chocs. Son manque d’aisance guerrière rendaient ses gestes approximatifs et il manqua plus d’une fois sa cible, mais rien ne semblait pouvoir entamer sa hardiesse. C’était son deuxième combat. Le premier avait été Odon do Dur. Il espérait que l’issue de celui-ci serait plus glorieuse, et s’y employait à chaque mouvement. Pourtant, sa concentration vacillait : d’un pas à l’autre, ses pensées revenaient à Érasme. Il aurait dû le tuer dès qu’ils avaient posé un pied dans l’enceinte de la cité. Pourquoi ne l’avait-il pas aussitôt exécuté ? Pourquoi était-il parti ? Où se trouvait cet abruti de Sorcier, désormais ? Quelqu’un l’avait-il déjà massacré ? À cette question, son cœur s’emballa. Nul n’avait le droit de poser sa main sur cet avorton. S’il mourait, ce serait du bout de sa lame. Pas autrement. Fort de cette conviction, il abattit son marteau de toutes ses forces sur le crâne d’une femme.



Dans la mêlée, Shezira avait perdu Hazaan. Les troupes s’étaient divisées, scindées par l’armée de l’Ordre d’Hébé. Le Thur de Bouton d’Or ne commandait plus qu’une partie de leurs soldats ; ceux avec qui elle était restée avaient été repoussés sur le flanc ouest. Désormais, leurs lignes jouxtaient celles des Sorciers et des Magiciens. Alerte, la Perle de Sceptelinôst tenta de maintenir les combattants à l’écart des Mages. C’était peine perdue. La bataille désorganisait tout : rapidement, les Bipolaires se mêlèrent à ceux qui leur avaient tendu la main, et à ceux qui leur avaient planté un couteau en plein cœur. Suspendue dans les airs, la Thur sentit ses muscles se tendre. Sa peau se hérissa d’un frisson de haine. Elle se répéta sa conversation avec Hazaan. Maintenir le cap. « Rappelez-vous qui est l’ennemi aujourd’hui ! » cria-t-elle à pleins poumons, le poing levé. Elle descendit des cieux en piqué pour se joindre à la mêlée.

Une salve de cris, devant elle, lui fit lever le nez de son combat : au loin, elle aperçut Val’Aimé Taiji, galopant à pleine vitesse dans sa direction. Une armée de morts repoussait virulemment les Réprouvés pour qu’il pût se frayer un passage. Les sourcils froncés, elle trancha la gorge de son assaillant, avant de pivoter et de s’élever d’un coup d’ailes au-dessus des combattants. Son regard azuré suivit la trajectoire du Chancelier des Ténèbres. Droit devant lui, il y avait Hazaan. Il venait de saisir la main d’un homme, vêtu d’une armure noire aux reflets bleutés, pour l’aider à se relever. « HAZAAN ! » L’océan guerrier noya son cri. « HAZAAN ! » Il n’entendait pas. Il ne voyait pas. Il ne pouvait pas savoir. « Putain de Sorciers ! » La jeune femme s’élança en avant : en quelques battements d’ailes, elle rattrapa le Mage Noir et plongea vers lui. Au dernier moment, elle se retourna pour se laisser glisser derrière la croupe de sa monture, corps tendu au-dessus du sol et bras levés : la lame de son épée déchira les jarrets de l’animal. Dans un hennissement de douleur, la bête tomba. La Réprouvée, étendue dans l’herbe quelques pas plus loin, se redressa vivement et courut vers Val’Aimé. « Je savais qu’on ne pouvait pas vous faire confiance. » Surtout pas à lui, l’Annihilateur. Elle le connaissait suffisamment pour en avoir conscience. Elle pointa son arme vers sa tête. Ailleurs, elle l’aurait immédiatement exécuté. Ici, elle devait respecter le mot d’ordre : l’ennemi, c’était Hébé. Le menton haut, elle le défia du regard. « N’avance plus, chien, ou je te tranche la gorge. »




Elle débuta un cri, et puis son cri s’évanouit. Elle voulut avancer, et une douleur indicible la laissa estomaquée. Elle voulut se débattre, mais il n’y avait rien à combattre. C’était trop tard. La magie de Val’Aimé galopait en elle comme des centaines de rats affamés, qui dévoraient ses organes en toute impunité. Elle ne pouvait pas revenir en arrière. Elle ne pouvait pas non plus fuir en avant. Elle était coincée dans le présent, soumise au supplice des volutes noires, obligée de se sentir mourir en silence. Sa propre magie s’était essoufflée à la seconde où celle du Sorcier l’avait enlacée : son étreinte l’avait étranglée. La Perle de Sceptelinôst fondait en coulées nauséabondes ; bientôt, il ne resta d’elle qu’une lave répugnante, étalée sur le sol, prête à empoisonner la terre et à nourrir les insectes. Ils s’affairaient autour des restes dans un bourdonnement mortuaire.

La clameur qui s’était élevée autour des deux combattants reprit de plus belle, en même temps qu’une vive agitation. « Écartez-vous ! ÉCARTEZ-VOUS ! » La voix rugissante d’Hazaan laissa bientôt place à sa silhouette colossale. Le silence auréola son apparition. Les deux pieds ancrés dans l’herbe, il baissa les yeux sur ce qu’il demeurait de sa collègue. Un nuage d’insectes grouillait dessus et autour. Un nouveau grondement monta des rangs réprouvés. Achève-le ! Justice ! Tue-le ! Vengeance ! Massacrons-les ! « Restez en retrait ! » Il ne lâchait pas du regard la flaque visqueuse à laquelle Shezira avait été réduite. Toutefois, il ne manqua pas le premier soldat qui s’avança avec véhémence. Le Thur l’attrapa par la gorge et le jeta contre ses compatriotes. « J’ai dit : RESTEZ EN RETRAIT ! » aboya-t-il. Ses prunelles écumaient de colère. Il fit volte-face vers Val’Aimé. Une grimace de mépris et de haine figeait ses traits durs. Des tremblements de rage se répandaient dans ses bras. S’il avait été plus bête, il aurait connu le même sort que la blonde. Il se serait rué sur lui pour le découper. Ce n’était pas l’envie qui manquait, cependant, l’ire ne l’aveuglait pas. S’il fonçait sur le Chancelier des Ténèbres, il mourrait à son tour. Et une fois qu’il serait mort, il n’y aurait plus personne pour guider les siens, ni ici, ni à Bouton d’Or, ni à Sceptelinôst. Zel’Eph ne reviendrait jamais parfaitement. Erza ne pouvait plus assumer son rôle de la même façon qu’autrefois. Atthirari n’avait aucun droit sur les peuples qui vivaient hors de sa cité. Il serra les poings. « Qu’est-ce que vous attendez ?! Retournez vous battre contre Hébé ! » Un murmure désapprobateur ondula parmi les guerriers. À lui aussi, ça lui coûtait. « Retournez. Vous. Battre. » Ils hésitèrent peut-être une fraction de seconde, puis finirent par obtempérer. Ils rejoignirent la majorité des Bipolaires, qui n’avait pas remarqué la mort de Shezira et continuait à frapper les Chevaliers d’Hébé. Hazaan scrutait le Mage Noir. En langage commun, il articula : « Tu as eu ce que tu voulais. Réjouis-toi tant que tu le peux. » Sans se détourner de lui, il recula. Après quelques pas, il pivota, et il repartit combattre. Le trépas de la Perle de Sceptelinôst ne mettait pas un terme à la bataille. Au contraire : il ouvrait les portes de la Guerre.



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Maintenant qu'Érasme a rencontré toute la famille, ils vont pouvoir se marier <3 Edit : en fait, non, c'est mort de chez mort, oupsi /sbaf




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« Alistair. » La cuirasse de Val’Aimé Taiji lui donnait une allure ténébreuse, bien plus que les stries qui marquaient la peau de son visage. Il semblait être moulé dans le Mal lui-même, comme si Ethelba se trouvait derrière lui, à lui souffler ses viles recommandations. Son cheval, noir, avait l’allure imposante des chevaux de trait. Pourtant, il n’en était pas un. Il était fait pour le combat et le regard de l’animal semblait hanté par l’envie de tuer, à l’image de celui de son propriétaire, ce qui ne m’empêcha pas de sourire à mon homologue. « Val’Aimé. » Je savais parfaitement que si le Chancelier Elzagan me rejoignait, ce n’était pas par gaieté de cœur. Les espions de l’Eorane m’avaient rapporté quelques pensées tordues de mon ancien ami. Il n’attendait probablement que la mort de l’Empereur Noir pour se propulser, lui ou un autre de ses compatriotes aux réflexions semblables, sur le trône. En attendant, il était bien obligé de coopérer et de jouer la carte de l’alliance entre nos deux nations que le Roi Noir et la Reine Blanche semblaient appeler de leurs vœux. Je n’étais, moi-même, pas convaincu. Les Sorciers étaient des êtres fourbes et aucune histoire les comprenant en leur sein ne se terminait bien. Ils trahissaient toujours, à un moment ou à un autre. « Lhéasse n’est pas là. » dis-je, tout bas, avec un sourire narquois. Judicaël et moi-même avions à cœur d’embêter Val’Aimé à chaque fois que nous le voyions. Notre propension à le faire nous rendait peut-être cruels mais il n’y avait pas plus ignoble que le Chef des Armées Noires et Bras Droit de l’Empereur. De nombreuses contes avaient été rédigés par des Faes sur sa personne, des contes macabres dans lesquels il chevauchait les carcasses des éléphants de l’armée ténébreuse ou commandait aux morts-vivants de l’ensemble du Monde. Je devais admettre une évidence : il avait l’étoffe d’un conquérant. Il était simplement muselé par le Roi, pour le moment. J’étais sceptique, comme tout le monde, concernant la survie de l’Empereur Elias Salvatore. Une crucifixion ne pardonnait généralement pas, surtout si l’homme ne pouvait s’aider de magie. Il mourrait, lentement mais surement. Les Magiciens avaient les yeux rivés vers cet événement qui arriverait bien trop tôt à leur goût. J’étais dans la même optique. Nous savions qui nous perdrions, nous n’avions aucune idée de qui nous gagnerions.

Val’Aimé soutint mon regard un instant, avant de descendre de cheval. Il posa sa main sur mon épaule et susurra à mon oreille, d’une voix presque doucereuse. « Sois heureux que Judicaël soit toujours à tes côtés. » Si j’assumais pleinement mon homosexualité et Judicaël son naturel à aimer de tout, ce n’était pas le cas du Mage Noir. Je souris à sa menace. « Allons, je t’embête, c’est tout. » dis-je, en baissant les yeux pour admirer ses fesses. Les soldats, postés plus loin, faisaient mine de ne pas s’apercevoir de notre manège. Ils préféraient ne rien savoir, tant la magie de l’Elzagan les effrayait. Le personnage en lui-même était une légende. Ils le craignaient tous, à raison. Si je paraissais détendu en sa présence, je restais méfiant. Le sentiment devait être partagé de son côté. Nous avions eu une enfance commune mais cela ne nous protégeait pas des bassesses de l’un et de l’autre. C’était même tout le contraire. Nous nous connaissions que trop bien, une connaissance qui nous protégeait chacun en partie. Nos secrets ne restaient que dans notre cercle et maintenaient une certaine cohésion. J’espérais donc n’avoir jamais à lâcher l’armée Magicienne contre lui. Ce ne devait pas être son cas. Une telle guerre ferait des ravages et, lui, ne demandait que ça. « Nous allons devoir parler d’affaires personnelles ultérieurement. Il semblerait que quelques informations sur ma personne aient fuité à mon désavantage. Et la fuite ne peut pas provenir de n’importe qui. » Je fronçai les sourcils. « Je n’ai rien dit te concernant. » « Et Judicaël ? » J’hésitai. « Je ne parlerai pas pour lui mais ça me semble peu probable. » « Seriez-vous prêts à consommer une potion de vérité ? » Je sentais une certaine tension dans sa voix. « Moi oui. Lui je ne sais pas. » Le philtre de vérité laissait son libre-arbitre aux individus quant à la formulation d’une réponse ou non. Néanmoins, lorsqu’un mensonge était proféré, il l’indiquait. Pensif, je me dis que j’aurais dû l’employer avec Paiberym. Il me paraissait sincère mais je ne pouvais empêcher le doute de persister.  « De quoi s’agit-il ? » « Hum. Je te le dirai après la bataille. » « Et si je meurs ? » dis-je, avec le ton exagéré du drame. « Souviens-toi qu’il n’y a que moi qui ai l’autorisation de te tuer. » « Tu as dû avoir des sueurs froides dernièrement, alors. » Il sourit, chose qu'il ne faisait jamais en temps normal, d’un air malsain. « Oh ne t’inquiète pas, je compte bien aller voir ce Sorcier et lui faire regretter son acte. Tu es à moi. » Je ris. C’en était presque touchant. Dire que nous faisions mine de ne pas nous connaître, lorsque nous étions pris dans les mondanités. « Il est en prison. » « J’attendrais qu’il n’y soit plus. » affirma-t-il.

« Comment comptes-tu attaquer ? » me demanda-t-il, après quelques conversations personnelles. « Par le nord, en nous tenant relativement éloignés des lignes Réprouvés. Ils pourraient changer de cible. » Je ris. Les Mages Noirs étaient sans doute plus tentants que les Chevaliers d’Hébé à leurs yeux, surtout si peu nombreux. « Mes hommes suivront. Nous ne sommes ici que pour la fameuse alliance. » « En laquelle tu ne crois pas. » « Je n’aime pas la paix. Je trouve l’immobilisme à vomir. Il endort les passions et l’intellect. Pour le reste, j’obéis aux ordres de l’Empereur Noir. » Je souris. « Et ça me ravit. Ça fait trop longtemps que je ne t’ai pas vu te battre. Je veux savoir si tu t’es ramolli ou non, vu que ta vie m’appartient aussi. » Nous avions fait une sorte de pacte de sang, sans magie ni rien. L’adolescence ne nous avait pas épargnés de stupidité. Nous nous étions promis à l’un et à l’autre de ne mourir que sous la main de notre frère de sang. Lui et moi, liés, sous le rire du rouquin. J’avais ensuite perdu Judicaël de vue un long moment et il m’avait fallu du temps avant de le reconnaître, lorsqu’il s’était hissé en tant qu’Archimage. Je l’avais trop souvent pris pour un étranger à l’œil malin. Il m’avait avoué son identité, plus tard, lorsque nous avions consommé un désir difficilement tenable. Il avait beaucoup changé avec le temps.

Comme il ne répondait pas, je lui précisai quelque chose. « On veut éviter les morts. » « J’ai bien compris. » dit-il avec un dégoût palpable dans la voix. Il adorait torturer et assassiner. « D’ailleurs, j’ai entendu parler de ce qu’il s’était passé au Cœur-Vert. Tu cherchais vraiment le Prince Noir ? » Il soupira. « Ne me parle pas de ce jeune écervelé. Moins je croiserai sa route, plus ses chances de survie seront grandes. » Malheureusement, comme deux chemins sinueux, les routes de Val’Aimé et d’Érasme ne cesseraient jamais de s’emmêler.


« Qu’est-ce qu’on fout là ? » murmurai-je, entre mes dents, la mâchoire serrée. Un frisson glacé me saisit et la puanteur environnante s’insinua dans mes narines. L’ensemble me parut vulgaire, fait de sang et de sueur. Contrairement à Dastan, je ne l’avais jamais perdu de vue. Il était devant moi, dans sa tenue blanche de rituel. Les autres avaient, cependant, disparu. Ses cheveux roux frôlaient l’indécence, dans ce paysage naturel. Je me mis à grelotter pour une raison inconnue, en essayant de n’en rien montrer. J’étais le Prince Noir. Le Prince Noir ne pouvait avoir peur. S’il me demandait, je dirais que j’avais froid, malgré les températures élevées de Lyscenni. J’aurais pu, têtu comme j’étais, continuer à jouer le jeu de l'indifférence longtemps si mes problèmes n’étaient pas d’une importance supérieure. La déclaration du Réprouvé me fit froncer les sourcils. « … Quoi ? » Par un réflexe incontrôlé et inexplicable, je me rapprochai de lui, jusqu’à ce que nos peaux se frôlassent de nouveau et, même, se touchassent. Je me mis à regarder autour de moi. Ces corps énormes, aussi grands que larges, aux muscles anguleux et saillants, ne me disaient rien qui valût. Pourtant, la proposition qu’il me fit ne me plut pas davantage. « Plutôt crever que d’être considéré comme ton esclave. » lâchai-je, les lèvres proches de son épaule tant je baissais la tête pour que personne ne fît attention à moi. Je laissai les secousses s’exprimer tout en me convainquant qu’un froid imaginaire était le seul responsable de mon état. Je ne voulais pas l’admettre mais Dastan avait raison. S’il évoquait mon rang au milieu de ces hommes et ces femmes, ils me tueraient. Je n’avais pas le choix. Je n’avais pas le choix et ça m’irritait au plus profond de moi. Si je survivais, je me vengerais sur lui. « Ton prisonnier. » dis-je, le souffle court et la gorge sèche à cause de ce que je venais d’articuler. « Je veux bien être ton prisonnier. » J’agrippai cependant son vêtement et plongeai mes yeux dans les siens. « Mais n’en profite pas. » dis-je. Je n’étais pas en position de proférer des menaces, et j’en avais bien conscience, mais je ne savais pas être raisonnable. De plus, je ne comprenais pas son positionnement soudain. Pourquoi me sauvait-il ? Cette faiblesse de sa part m’agaça d’autant plus. « Fais attention parce que je n’ai pas de côté angélique, moi. Si tu en profites et que je survis, la prochaine fois, je ne te raterai pas. » Ou peut-être que si. J’étais trop proche de lui et cette proximité avait tendance à me faire oublier tout le reste. Je devais m’écarter. Il devrait mourir. « De toute façon, si nous restons là, nous allons mourir. » Nous n’avions pas d’armes et nous étions nus sous nos tenues légères. Un mauvais coup nous serait fatale. Quant à moi, je n'étais pas taillé pour le combat.

Contre mes volontés initiales, je me rapprochai de lui encore. « Tu connais quelqu’un ? » demandai-je. J’ignorais ce qui me serait le plus favorable. Ces chiens vivaient entre eux. Comment justifierait-il ma présence ? Je n’avais pas franchement la gueule d’un Chevalier de l’Ordre d’Hébé. Surtout, nos vêtements étaient assortis.

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Meg Myers - Desire

« C’est ça. » marmonnai-je, en suivant tout de même le roux et son frère. Les bras croisés, mon visage n’était que mauvaise foi. Mes yeux, pourtant, se posaient parfois sur des zones douteuses de l’anatomie du plus âgé. Seul le bleuté de son armure était dérangeant. Le noir qui couvrait sa peau lui allait bien, à mon plus grand regret. « Hum. » Je me mis à le haïr. Je n’ouvris pas la bouche, jamais. Ni pour le saluer, ni pour lui répondre. J’avais envie qu’il crevât. Une grimace dédaigneuse habillait ma mine renfrognée. Je sentais le Bien en lui et je voulais qu’il s’étiolât et s’érodât. Pourtant, il était trop puissant, bien plus que chez Dastan. Le Réprouvé ne cessait de bouger, alors que je demeurais le plus immobile possible. Mon silence n’était ni une affirmation ni une contradiction des propos du brun. Le désir que je ressentais me murmurait de trouer sa peau, de brûler ce qui le rendait immaculé, de l’empêcher de nuire. Il me sauvait mais je voulais qu’il pérît. J’étais impuissant. J’étais frustré, pour mille raisons, dont certaines qu’il valait mieux taire.

Mes yeux roulèrent vers le rouquin. Ma lèvre supérieure se releva en une grimace de dégoût. Le fait que je me trouvasse à la merci de ces deux Anges avait l’air de lui plaire. Le mieux que je pusse faire était de ne rien laisser paraître. Le vide. Le néant. Je n’étais pas assez doué dans l’exercice. J’enrageais. Je tremblais. Et cette femme… Je me mis soudainement à sourire, pour me raccrocher au Mal que je connaissais, et brisais mon silence, juste pour lui. « Bientôt, elle ne fera plus la maline. » dis-je. L’ombre des horreurs que j’envisageais de lui faire subir à l’instant même où je serais en mesure de les réaliser, passa dans mon regard. Les femmes, je les aimais soumises, suppliantes et ensanglantées. Intouchable, songeai-je, sans quitter les yeux verts de Freyja. J’aurais pu rire et me moquer si ma situation n’était pas aussi complexe. Et elle, était-elle intouchable ? Je ne rêvais plus que d’une chose : enfoncer mes doigts en elle et la faire hurler de douleur. Un jour. « Pourquoi est-ce que vous vous occupez de moi ? » demandai-je, soudainement. Elle n’avait aucune raison de le faire. Un sourire torve illumina mon visage lorsque je tournai les yeux vers Dastan. « Ça doit être parce qu’elle sait, elle, que si je me fais tuer, les Réprouvés vont se faire massacrer. » Je n’étais plus raisonnable mais j’avais envie d’être proche de lui. Et j’avais une armure. Lui aussi. Je m’avançai. « Minus. » susurrai-je à son oreille, avant de lui attraper ses boucles rousses, inconscient du danger plus important qui nous menaçait. Lorsque les guerriers seraient sur nous, peut-être changerais-je de cible mais, pour l’heure, je voulais le tester, l’éprouver, le sentir.

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Supreme Devices - Arise, my Love

Je me tus, lorsque l’Ange parla. Son affront resterait pourtant gravé à jamais dans ma mémoire. Sale chienne. Elle avait beau me sauver pour une raison inconnue, je n’en demeurais pas moins le Prince Noir. J’ordonnerais qu’on lui écorchât la peau du visage et que l’on plaçât ses yeux dans un bocal qui irait garnir ma collection d’organes. « Jamais nos deux peuples… » Je ravalai ma salive, mauvais et frustré. Ils étaient trop imposants, tous les deux. Cracher mon venin à la tête de l’un ou de l’autre m’était impossible, pas sans en subir les conséquences. J’avais senti l’armure. Elle nous protégeait, hein ? Connasse. Elle ne nous protégeait pas, au contraire. Elle nous contraignait. Elle avait fait de nous ses choses sous couvert de bonnes intentions. Elle était comme tous les Anges. Habillés de leurs soi-disant grands principes vertueux, ils semaient la tyrannie de leurs décisions, qu’ils appelaient « d’utilité publique ». Mais qu’en savaient-ils, de ce qui était bon ou non pour le Monde ? Que savaient-ils des desseins des Ætheri ? Je regrettais que les Démons ne les eussent pas finis. Dans le fond de mon cœur, une pensée s’installa, se marqua, comme si un fer rouge s’y était soudainement infiltré : j’allais les buter. J’allais grandir et les buter. Débarrassé de ces choses, tous les êtres se porteraient mieux. J’envoyai une œillade à Dastan. Une fois que les adultes auraient le dos tourné, je lui arracherais la tête. Ce n’était qu’une question de minutes. Je serrerais ses boucles rousses entre mes doigts et planterais ma lame dans le creux de sa gorge, ce creux si insolent. Je n’avais pas envie que l’on me protégeât. Ce que je voulais, c’était l’avoir, lui. Enfin… le voir, lui, mort.

Lorsque le combat commença, mes pensées s’évanouirent. Je n’avais jamais été placé sur un champ de bataille. Ce monde m’était étranger. Au sein de la Secte de l’Étoile Froide, j’avais été amené à tuer et à torturer. Pourtant, jamais je n’avais été qu’un pion au milieu de centaines d’autres pions. J’avais toujours joui d’une certaine supériorité, parce que j’étais le Prince Noir. Ici, il n’y avait aucun traitement de faveur. La vie de tous pouvait voler en éclat en une fraction de seconde. La mienne avec. J’hésitai à tracer la rune pour prévenir Val’Aimé. Pourtant, j’étais de nouveau avec le roux. Même si l’acier cachait nos visages, le Chancelier des Ténèbres n’aurait aucun mal à le reconnaître. Je regardai le Bipolaire. Mon corps entier était attiré par lui. J’avais envie de le massacrer à cause de cette simple constatation. « Attends ! » hurlai-je, lorsqu’il partit devant. Il ne m’entendit pas, ou fit mine de ne pas m’entendre. Je m’élançai sur ses talons, bien décidé à… à je ne savais pas quoi faire. Le planter ? Le retenir ? Lui asséner quelques paroles aussi tranchantes que les siennes ? Mais nous fûmes séparés pour de bon au moment même où le corps d’un soldat me barra le passage. Je sentis ma respiration ralentir, figée par la haine. Personne ne se placerait entre le roux et moi. Personne ne le tuerait à ma place.


Au cours du combat, mon regard remarqua une énième fois Val’Aimé. Et quelle vision. J’ignorais s’il faisait exprès de se mettre en scène ou si Ethelba prenait soin de le rendre aussi sombre et éclatant à la fois. Il avait récupéré les corps tombés lors des assauts. Ces derniers l’entouraient, obéissant à sa magie comme un esclave sert un maître. La Valse Destructrice faisait disparaître les armes et les armures de ses opposants. Ils se retrouvaient nus, sans défense, face à l’imposant cheval du Duc qui ressemblait au messager de la Mort elle-même. Il n’avait jamais été très charismatique en tant qu’homme. Pourtant, de sombres murmures faisaient de sa silhouette l’illustration même de l’épouvante. Je frissonnai, ravi malgré moi de me battre à ses côtés et d’être le témoin de ce spectacle. Il semblait jouir de la situation et s’en amuser. Sans doute ressentait-il une certaine frustration à devoir limiter la casse. Je le connaissais : il aurait tant aimé raser chaque vie et chaque bâtiment, pour ne laisser derrière lui qu’un paysage désolé, dénué de tout relief, qu’une terre brûlée, à jamais infertile.

Pourtant, je perçus un soupçon d’hésitation chez lui. Il s’arrêta un instant. « Qu’est-ce que tu fais Val’Aimé ? » murmurai-je, entre mes dents. Je le surveillais, à la base, bien plus pour la tenue de l’alliance que pour le plaisir de le contempler. Je le soupçonnais de ne pas tenir sa ligne de conduite, aux côtés des Réprouvés. Il lança son cheval vers les Bipolaires. Ma mâchoire se serra. J’ordonnai au mien de le rattraper. J’étais loin. Il avait de l’avance. Ce serait trop tard. S’il attaquait maintenant, j’aurais du mal à éviter le pire. Cependant, je remarquai qu’il n’agissait pas. Seuls les morts se démenaient pour lui, empêchant les Bipolaires de l’atteindre. Ce fut clair : il cherchait quelque chose, ou quelqu’un. Qui ? Qui avait le privilège de posséder la loyauté du Duc ? L’Empereur Noir n’était pas présent. Lhéasse non plus. Je créai devant moi de la matière, de telle sorte à repousser ceux qui se seraient dressés devant moi. Où allait-il ? Qui cherchait-il ?  

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Samuel Kim - Armin Transformation x Pieck Squad Death

Le hennissement de mon cheval retentit. Son arrière-train s’enfonça vers le sol, m’emportant d’un même temps vers le bas. La bête s’effondra, sous son propre poids et le mien, des poids qu’elle n’était plus en capacité de supporter. Le rictus qui habillait si souvent mes traits se renforça lorsque l’impact eut lieu. Je ne tombai pas. Mes lèvres tremblèrent. Les stries sur ma peau la marquèrent davantage d’un coup, sous l’emprise de la colère froide qui s’insinua dans ma poitrine. Je me levai, laissant l’animal qui tentait de se relever sans y parvenir, et me retournai pour faire face à la chose qui avait osé blesser mon cheval. Cette chose que j’allais tuer. Cette chose répugnante que la Création même devait regretter amèrement. Car, qui en ce monde pouvait apprécier un peuple composé de tant de déchets, inaptes à la magie et puants ? Des rats aux muscles saillants mais à l’intelligence sous-développée et à l’haleine fétide. Des inadaptés, des incapables. Les Réprouvés vivaient encore comme dans les Ères anciennes. Leurs mœurs révélaient un manque flagrant de sens pratique. Ils haïssaient la magie, sans en comprendre l’utilité, et priaient de faux Dieux. Pire, ils s’érigeaient eux-mêmes en Divinité, comme si leurs héros de pacotilles, de simples Mortels, pouvaient égaler la puissance de ceux qui régnaient au-dessus des Rois et des Reines. Un tel peuple, marqué par la médiocrité la plus totale, n’avait pas le droit d’exister. Le fait qu’un déchet comme cette femme eût tranché la chair de mon cheval ne me laissait pas le choix. J’allais la tuer.

Devant ses menaces, mon expression ne changea pas. L’aura qui se dégageait d’elle était réelle. Pourtant, il ne faisait aucun doute que ça ne la sauverait pas. Pour la première fois depuis longtemps, un sourire étira mes lèvres, un sourire macabre, reflet de la haine et de la mesquinerie qui me représentaient. Cette épée, tendue vers moi, était d’un risible sans nom. Que croyait-elle ? Que les armes m’effrayaient ? Elles n’étaient que matière. Je penchai légèrement la tête sur le côté, lorsque la lame disparut dans le néant. Quel dommage. « Je tiens beaucoup à ce cheval. » dis-je, sans prendre en considération ses insultes et menaces. Ce qui sortait de sa bouche ne m’importait pas. J’avais été patient, jusqu’ici. Comme le stipulait l’accord que nous avions passé avec les Magiciens, je n’avais pas cherché à tuer le moindre Réprouvé. La présence du Prince Noir au milieu d’eux m’avait poussé à rejoindre leurs rangs, pour le récupérer. J'avais offensé Ethelba en les laissant en vie. Alors que cette chienne se permît de blesser mon cheval… Je soufflai par le nez, amusé. Elle me donnait l'occasion parfaite, l'occasion rêvée. L’Empereur Noir ne serait pas ravi mais, pour une fois, les événements ne seraient pas de mon fait et Elias serait bien forcé de le reconnaître.

Mon sourire disparut et je posai une main sur le flanc de ma monture pour la soigner, tout en admirant la Perle de Sceptelinôst se briser sous le joug de l’Ezaani, un mal qui réduisait les organes à l’état de liquide. Son odeur attirait ensuite les insectes, qui raffolaient du nectar ainsi créé : une bouillie sucrée et nourrissante. Elle se ferait dévorer. Il ne resterait plus rien d’elle. Rien à exposer, rien à brûler. Mais elle n’aurait pas le temps de s’en apercevoir. Elle serait morte avant. Je me demandai si, intérieurement, elle pleurait sa beauté, flétrie à jamais. La beauté, quelle stupide préoccupation, à l’instar de celle qui poussait les Bipolaires à se battre avec des haches et des marteaux. Je captai le dernier soupçon de vie dans son regard. Sa mort ne me contenta pas. Elle n’était née que pour mourir, à mes yeux, comme tous ceux de son espèce. Alistair serait mécontent. D'autres également. En choisissant de l’éliminer, c’est la paix que j’avais tuée avec elle.

3675 mots
Fin
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Priam et Laëth
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Priam et Laëth
Lun 13 Déc 2021, 07:42



Unknown

Le siège d’Arcadia

Evénement | Laëth & co




Note : Ce message donne la réplique au message de Lucius.

Glory Oath + Blood, Robert Leslie Bennett, Generdyn – United we stand

Freyja était demeurée en retrait. De là où elle se trouvait, elle pouvait voir les navires réprouvés et le flot armé qu’ils dégueulaient sur les berges. Elle entendait distinctement l’excitation frénétique des guerriers, avides de faire couler le sang et d’en voir jaillir des Kiir’Sahqon. Elle aurait pu rester avec eux. Peu après sa rencontre avec Lucius, dans le Berceau Cristallin, le gouvernement angélique avait annoncé son intervention lors du futur siège d’Arcadia. Les Magiciens avaient rapidement répondu présents aussi, à l’instar des Sorciers et d’autres races. Avec Priam, ils s’étaient rendus à Bouton d’Or. Sans surprise, l’effervescence régnait. Les Manichéens aussi se préparaient à la guerre, avec cette ferveur toute particulière qui les animait sans cesse à l’approche des combats. Ils avaient aidé à rassembler des vivres pour le voyage, à aiguiser les armes et à en forger de nouvelles, à entraîner les plus jeunes ou les moins expérimentés, et avaient pu affronter les plus valeureux – surtout l’Aile d’Acier, car le Petit Pigeon, malgré ses apprentissages et ses conseils, cumulait encore nombre de caractéristiques du novice. Sa force et sa vivacité palliaient souvent son manque de technique, mais elles ne suffiraient pas toujours. Elle aurait aimé pouvoir le persuader de ne pas s’engager dans la bataille. Toutefois, elle n’avait pas essayé : elle savait que ce serait inutile. Elle avait fait son possible pour mettre toutes les chances de son côté : le corps de Priam était protégé par une armure faite de cet étrange métal qu’elle seule pouvait produire. Dès qu’elle serait sur le champ de bataille, elle veillerait sur lui, comme à chaque fois. Elle avait jugé préférable de se battre aux côtés des Anges, et de les aider à évacuer les rescapés de la Terre Blanche. Alors, elle les attendait, avec toute l’impatience qui l’habitait.

L’Immaculée passa ses mains dans ses cheveux pour les nouer en queue de cheval. Les bruits de pas et la voix qui résonna dans son dos la surprirent. Elle se retourna. Priam. Avec Érasme, et Dastan – que tout le monde avait cherché durant des jours. « D’où revient Dastan ? » demanda-t-elle à son frère dès qu’il fut près d’elle. « Je ne sais pas. Je n’ai pas demandé. » Dans sa cage thoracique, elle sentait son cœur s’emballer. Les paroles de Lucius bourdonnaient entre ses oreilles. « Ils étaient sur la rive, devant les murs de la cité, avec le reste de l’armée. » Le regard de Freyja coula jusqu’aux deux adolescents. Si Asha et Vrael avaient vu leur fils, ils auraient sans doute été à la fois soulagés et énervés. S’ils l’avaient vu en compagnie du Prince Noir, il aurait eu de sérieux ennuis. Ils ne l’auraient sans doute pas identifié en tant que tel, parce qu’ils ne s’intéressaient pas outre mesure à la politique extérieure, mais quelqu’un d’autre aurait pu le faire pour eux. S’il était arrivé du mal au garçon Salvatore, les Réprouvés l’auraient chèrement payé. Aucun des deux n’était en sécurité, ici ; pourtant, ils allaient devoir rester et se battre. Un cheminement similaire à celui de son aîné avait guidé ses pensées. Elle se mordit l’intérieur des joues, puis lâcha : « Je vais leur faire des armures. » Priam lui attrapa le bras. « Et par rapport à ce que t’a dit Lucius ? » Ses iris verts allèrent de l’une à l’autre des pupilles de son frère. « Ça veut dire que c’est probablement vrai. Que ses rêves ne sont pas juste des rêves… enfin, qu’ils essaient de dire quelque chose. » Il fronça les sourcils. « Il faudra que j’en parle avec Kaahl. » Il plissa les yeux, et jeta un regard par-dessus son épaule aux deux jeunes hommes. « Il lui ressemble. » lâcha-t-il. Freyja, le palpitant en furie, suivit son regard. Elle se força à esquisser un sourire à moitié amusé, à moitié agacé – un sourire qui voulait dire que cette animosité à l’égard du Mage devenait pesante, malgré toute l’affection qu’elle portait à son frère. « Il ressemble surtout à Jun Taiji, je trouve. » Comme il lui avait lâché le bras, elle coupa court à la discussion en s’avançant vers les garçons.

La bataille les dévora. L’Aile d’Acier perdit ses deux frères dans la mêlée. Elle parvint à garder un œil sur le Prince Noir durant quelques minutes, puis sa silhouette sombre disparut elle aussi. Elle se retrouva seule et songea que continuer à attendre les Anges n’aurait rien changé. Pourtant, elle avait décidé de les accompagner, pour les protéger. Belle réussite. Son épée plongea dans le ventre d’un Chevalier. Les retrouver relevait de l’impossible. Ce serait comme chercher une aiguille dans une botte de foin. En revanche, elle pouvait suivre son plan initial et essayer de rallier l’armée angélique. Elle savait par où ils devaient évacuer leurs semblables. Alors, lentement, péniblement, elle tenta de se frayer un chemin à travers la foule. En reculant après avoir occis un autre truand, elle heurta quelqu’un. Pivotant vivement, elle se retrouva nez-à-nez avec un jeune garçon aux traits familiers et aux épais cheveux bruns. « Érasm- Lucius ! » Au même instant, un rugissement semblable à une déflagration fit trembler chacun de ses os. Les Dragonniers étaient donc venus aussi. La peur frappa son cœur. Kaahl était absent, tandis que deux de ses enfants s’étaient jetés dans leur première bataille. En dépit des différends qui les séparaient, et peut-être malgré elle, l’Ange se sentait responsable de ces deux vies. Elle pensa à Dastan, aux rêves, au Destin. Si c’était le Destin, qui pourrait briser ces existences ? « Attention ! » cria-t-elle en projetant le jeune au sol. Une flèche siffla au-dessus de leurs corps empilés.




Tes enfants sont imbéciles et ingrats. Voilà ce qu’elle pourrait dire à leur père, lorsqu’elle le reverrait. « Je viens juste de te sauver la vie. » gronda-t-elle, peu à même de faire preuve de patience ou de tolérance quand c’étaient la peur et l’adrénaline qui l’assaillaient. Elle détestait les trois garçons d’avoir eu l’audace de venir jusqu’ici. Ils n’étaient que des gamins. Que croyaient-ils faire, au beau milieu d’un champ de bataille ? À la rigueur, Érasme et Dastan semblaient être parvenus jusque-là un peu par hasard – un mystère qu’il faudrait élucider plus tard – mais Lucius… À quoi avaient donc songé les adultes chargés de veiller sur lui ? N’y en avait-il pas un qui eût eu l’intelligence de se rappeler son âge ? L’attachement amplifiait sa colère et brouillait son jugement. Elle le savait. Ses engagements militaires auraient pu la conduire à vivre la même situation que lui, quelques années plus tôt. Et si on lui avait refusé le droit de combattre, elle aurait insisté. Elle se serait démenée pour faire entendre sa voix et pour être présente le jour J. Elle était celle dont l’intrépidité inquiétait ses proches ; désormais, elle dégustait leurs angoisses jusqu’au fond de ses tripes. À celle-ci se superposait un détestable sentiment de culpabilité, une impression rampante et dévorante, qui écrasa son cœur à l’instant où le jeune homme formula sa troisième question. Tandis qu’elle tentait de le maintenir tant bien que mal au sol et que son regard évaluait la situation autour d’eux, elle lança : « Rien ! » C’était partiellement vrai. Elle ne savait rien qu’elle n’eût le droit de lui dire. « Arrête de bouger ! » Elle croyait des choses, elle en avait deviné, sans disposer de la certitude du savoir. Elle tendit l’un de ses bras et du centre de sa paume naquit une carapace métallique qui isola leur flanc vulnérable du reste des combats. Enfin, ses yeux verts se raccordèrent à ceux de Lucius. « On n’a pas le temps de parler, sauf si tu as envie de mourir. » Elle se redressa, et le semi-dôme s’agrandit à mesure qu’elle se levait. « Je vais supprimer le bouclier. » Par intermittence, le son du métal ricochait contre celui-ci. « On va retourner se battre, et je vais rester près de toi. J’aimerais ne pas avoir à expliquer à ton père que son fils est mort parce qu’il a décidé de démarrer une crise existentielle en pleine bataille. » Malgré elle, la crainte créait dans sa voix des modulations agressives. Freyja détourna le regard, prête à dissoudre la barrière. Elle ne lui en voulait pas : comment aurait-elle pu, elle, dédaigner ses questionnements et toutes les émotions contradictoires qui s’y greffaient ? Elle inspira, puis pivota à nouveau vers lui. D’une voix plus douce, elle promit : « On parlera de ce qui te tracasse quand le siège sera terminé, si tu veux. » Puis, elle fit de nouveau face à la bataille, et éroda leur protection, jusqu’à ce qu’il n’en demeurât plus rien. Arme au poing, elle s’aligna entre Lucius et le reste des guerriers.




Freyja se déplaçait avec souplesse et légèreté. Elle n’avait plus rien de la jeune Recrue qu’Hena entraînait sur un navire à destination d’Iyora. Ses mouvements ne connaissaient plus de hachures hésitantes : ils étaient droits et directs. Entre les combattants et leurs coups, sa silhouette se tordait pour distribuer des frappes qu’elle espérait toujours décisives. Parfois, un manque de précision, un léger déséquilibre ou une altération due au flot de la bataille lui faisait rater sa cible. Elle redoublait d’efforts pour parvenir à toucher son adversaire. Les chocs des lames contre son armure ou sa peau lui arrachaient des grognements, des cris, des hématomes, et même des saignements. Elle s’en moquait. Fille de Réprouvés, elle avait été bâtie dans la violence et la dureté. On lui avait enseigné la victoire des coups, la gloire des hurlements et le triomphe du sang. On avait martelé son épiderme comme si on avait voulu tanner du cuir. Si cette solidité titubait parfois, au cœur d’un combat, elle ne faiblissait pas. Quand l’enjeu était de protéger les siens, son amour cadenassait ses états d’âme. Sans cesser d’avancer, elle s’évertuait à surveiller Lucius, et à chercher du regard Érasme et ses deux frères. Sa progression ne souffrait aucune autre entrave que son désir de protection. Dès qu’elle repérait un coup qui pourrait atteindre le jeune Magicien, elle s’interposait avec une intrépidité déraisonnée. Plusieurs blessures s’inscrivirent dans sa chaire à cause de la folie de sa bravoure – était-ce du courage ou seulement la peur terrible de perdre quelqu’un et de s’en trouver partiellement responsable ? La culpabilité semble parfois pire que la mort. Elle planta sa lame dans la gorge d’un Chevalier et vit la vie s’essouffler dans ses yeux.




« Lucius ! » L’adolescent ne se retourna pas. Il s’éloigna, sans poser les questions qui lui brouillaient le cœur et l’esprit. Freyja le suivit des yeux, et soupira. Son départ marquait son cœur d’une croix d’anxiété et de soulagement mêlés. Elle était heureuse de ne pas avoir à s’expliquer ; et cependant, elle comprenait que ce n’était que partie remise. Il l’interrogerait sans doute à nouveau. Et en attendant, elle devrait vivre avec ce sentiment diffus et désagréable ; celui de la tromperie, des faux-semblants et du mensonge. Le temps d’une seconde, elle souhaita avoir été trop idiote pour ne pas deviner ce que signifiait les informations que Jun avaient laissées au détour de son subconscient. Certains de leurs mystères lui échappaient encore, et elle aussi avait des questions à poser, mais des certitudes battaient le doute en brèche. La guerrière tâcha d’écarter ces pensées. Elle devait trouver Dastan, Érasme et Priam. « Alors, l’Intrépide ? » Elle pivota, surprise d’entendre cette voix. Asha se tenait devant elle, souriante, le visage éclaboussé d’un sang qu’elle avait pris plaisir à répandre. « Certains ont murmuré ce nom. » La fierté luisait dans ses prunelles. « Je t’ai vue. Tu t’es battue avec courage. » Le palpitant de Freyja se crispa sous la poigne d’une émotion qu’elle ne parvint pas à identifier. Amour ? Joie ? Colère ? Injustice ? Amertume ? Urgence ? Elle devait retrouver Dastan avant que l’un de ses parents ne l’aperçût. Cela lui éviterait quelques ennuis, au moins sur l’instant. S’il était encore vivant. Les mots sortirent, sans qu’elle sût s’ils étaient motivés par des émotions douloureuses ou la nécessité de se défaire de sa mère pour trouver son plus jeune frère. « Ravie de ne pas être l’Indésirable, aujourd’hui. » lâcha-t-elle sur un ton froid et sec. C’était toujours compliqué. Ce serait toujours compliqué. Elle recula. « Je dois trouver Priam. » Et elle s’éloigna. Quelques mètres plus loin, au milieu de la foule, elle disparut.



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Kaahl Paiberym
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◈ YinYanisé(e) le : 25/06/2015
◈ Activité : Professeur
Kaahl Paiberym
Lun 13 Déc 2021, 22:32



Le siège d'Arcadia


« Ton problème, c’est que tu manques de flexibilité. Tu es raide comme un piquet. Penses-y pendant le combat. Je garderai toujours un œil sur toi mais si tu pouvais éviter de te mettre dans des situations infernales, ça m’arrangerait. » J’avais hoché la tête d’un air sérieux. Nous n’étions pas nombreux à avoir décidé de faire le déplacement jusqu’à Arcadia. D’après les stratèges dans le domaine guerrier, il y avait peu de chances pour que le siège se soldât par un échec des envahisseurs. La réputation d’Hébé était devenue rapidement problématique et si le premier assaut s’avérait ne pas suffire, il ne faisait aucun doute qu’Arcadia tomberait au deuxième. Nous voulions néanmoins marquer le coup : personne ne s’en prenait aux dragons sans en payer le prix. Puisque la bataille avait été organisée de façon telle à ne pas tuer et détruire plus que nécessaire, la présence des bêtes avec lesquelles nous vivions chaque jour ne servait qu’à une chose : nous assurer l’aller et le retour. Aucune n’attaquerait et tout se réglerait à échelle humaine. J’étais impatient, convaincu de me battre pour la Justice et le Bien.

Avant notre départ, je m’étais regardé longuement dans la glace de la chambre que j’occupais, perturbé par mon propre reflet. Je vivais en collocation avec deux autres jeunes hommes. L’un d’eux ramenait souvent une fille le soir, jamais la même. Parfois, j’étais obligé d’enfouir mon visage dans mon oreiller pour tenter de ne pas entendre les gémissements féminins qui s’élevaient crescendo. D’autres fois, je ne le faisais pas. J’écoutais, simplement, n’arrivant pas à trouver le sommeil. Il me semblait que chaque femme ne réagissait pas de la même manière. Certaines criaient beaucoup, si bien que ça me semblait faux. C’était arrivé, à plusieurs reprises, que mon deuxième colloque frappât pour me rejoindre, comme s’il avait compris que, moi aussi, j’étais éveillé. Alors, pendant que les deux autres s’activaient, nous parlions de choses et d’autres. De temps en temps, il se moquait d’eux, en prenant des pauses suggestives ou en faisant des bruits de coït exagérés qui me faisaient rire. Une fois, parce qu’il avait crié trop fort, en articulant des « Oh oui ! Oh oui ! OH OUI ! », notre colocataire était sorti de sa chambre, à poil, et nous avait balancer son oreiller dessus. Sa mine n’avait rien eu de furieuse. Au contraire, il semblait ravi de constater que toute la maisonnée l’entendait. Cela dit, lorsque je restais seul, à écouter les sons, l’envie finissait toujours par me saisir, sauf lorsque j’étais d’humeur bien trop dépressive. J’aurais pu draguer les filles, moi aussi, mais je n’étais pas certain de pouvoir enchaîner les conquêtes. En plus, même si ce n’était pas très clair, il me semblait quand même avoir un semblant de relation avec la Princesse Noire, Eméliana Salvatore. Parfois, je me disais qu’elle me faisait tourner en bourrique ou que je m’imaginais des choses. D’autres fois, j’espérais sans oublier que c'était peut-être en vain.

Finalement, juste avant d’y aller, je changeai subitement de position sur la question et frappai à la porte de la chambre du coureur de jupon. « Oui ? » « Tu m’apprendras ? Avec les filles, je veux dire. Quand je rentrerai. » Ma remarque le fit rire. « Si tu rentres un jour. » m’envoya-t-il, pour plaisanter. « Quand je rentrerai. » répétai-je, un sourire amusé arquant mes lèvres. « Si tu veux. Mais je croyais que t’attendais la bonne ? » Oui, peut-être. Cependant, la colère que je ressentais à l’égard de mon père me rongeait tellement que le désir tenace d’enfreindre chacun des préceptes qu’il m’avait inculqués avait commencé à germer et à s’étendre. Certains auraient appelé mon état la crise d’adolescence, d’autres la bêtise. « Je crois que ça n’existe pas… Et puis, comment je saurai que c’est la bonne si je n’en ai pas connu d’autres avant ? » « Bon point. C’est ce que je me serais dit si j’avais eu l’intention d’avoir une copine un jour. » Il me regarda, et ajouta : « Mais tu risques de te faire briser le cœur un milliard de fois. Je suis sûr que t’es du genre à t’attacher après avoir couché. » « J’en sais rien. » répondis-je, avec honnêteté.


Sur le champ de bataille, mes histoires de cœur disparurent de mon esprit, au profit de l’instant présent. Pris dans l’action, mon cerveau reçut de plein fouet l’adrénaline nécessaire au fonctionnement de mes muscles. Je me sentais comme transporté. La peur me tiraillait l’estomac mais c’était aussi elle qui me permettait de bouger. Je m’en sortais convenablement mais cela était surtout dû au fait que j’étais très bien entouré, un élément qui ne tarda pas à me faire défaut. Dans le feu des coups d’épée et des colorations magiques que subissaient le champ de bataille, je perdis de vue rapidement tous mes mentors et protecteurs. Seul, je me rappelai cette phrase que l’on m’avait dit avant de partir, à propos de mon manque de dextérité. Je le sentais, à présent. Mes muscles avaient du mal à bouger rapidement. J’hésitais à de trop nombreuses reprises. Je n’arrivais pas à avoir une vision générale de l’endroit et des mouvements des guerriers. Tôt ou tard, j’allais me prendre un coup. Je fixai mes arrières un instant et tournai la tête pour regarder devant moi. « » Laëth. Avait-elle dit… Érasme ? Je sentis mon cœur se soulever dans ma poitrine, douloureux et avide de réponses. Pourquoi m’avait-elle confondu avec lui ? Je la fixai, choqué. Lui avait-elle déjà parlé ? Était-il ici ?

J’eus à peine le temps d’entendre sa voix m’avertir que je sentis le corps de l’Aile d’Acier me plaquer au sol. Je lâchai un cri qui se tut une fois au sol. Ma colère s’intensifia, mêlée à la peur et à quelque chose d’autre. « Quoi ? Tu me prends pour mon père maintenant, c’est ça ? Après Érasme ? » J’eus mal au ventre tout de suite après ces paroles. « Qu’est-ce que tu sais que j’ignore ? » criai-je, en essayant de sortir de sous elle. Elle avait beaucoup plus de force que moi. Ses entraînements guerriers avaient modelé sa silhouette. Pris en flagrant délit de révolte puérile, je tentai de ne pas la regarder véritablement. C’était la première fois que je parlais comme ça à quelqu’un et, si je regrettais déjà, j'étais aussi incapable de formuler des excuses. L’air ne voulait plus passer entre mes lèvres. Je voulais juste m’enfuir.


« Non ! Je ne veux pas mourir ! » dis-je, d’un ton agacé. Culpabilité et rébellion se battaient pour avoir l’ascendance. La vraie ascendance était détenue par la jeune femme mais je n’arrivais pas à cesser mes enfantillages. L’homme en moi avait besoin de la confronter, de lui dire qu’il n’était plus un enfant et qu’il en avait assez de ne rien comprendre à ce qu’il lui arrivait. Cet homme, je ne pouvais lutter contre. L’enfant voulait être protégé par Laëth. L’enfant voulait lui ouvrir ses bras et se perdre à l’intérieur, dans des câlins innocents remplis d’un amour inconditionnel. Mais l’homme, lui, ne voyait pas les choses de cette manière. Il enrageait d’être impuissant. Il enrageait de devoir être mis en sureté. Parce que ce n’était pas son rôle. J’étais né pour protéger autrui, pas pour fuir devant l’adversité ou me positionner derrière de plus valeureux que moi. L’homme que je devenais le savait. Je le savais. C’était la raison pour laquelle les mots de l’Ange me touchaient et m’irritaient. Je ne répliquai pas plus parce que je ne m’en sentis pas le courage. Elle possédait une prestance et une force que je n’avais pas. Si rébellion de ma part il y avait, elle se faisait forcément à demi-mot ou à grands cris et à regards fuyants. Je ne pouvais pas regarder les conséquences de mes audaces. Plus elle parlait de mon père, plus la tension que je ressentais grimpait en flèche. J’aurais été plus revêche et courageux, je lui aurais balancé que mon père devait bien se ficher de mon sort. La preuve : il n’était pas là. Et il n’était pas là pour se battre à ses côtés non plus.

Alors que le ton de l’Ange se radoucissait, mes émotions ne firent que se cristalliser autour d’un sentiment complexe et révolutionnaire. Je ne voulais pas qu’elle me protégeât. Je voulais combattre seul, sans elle. Je n’avais pourtant pas encore l’âme d’un guerrier. Les entraînements qui m’avaient été donnés ne suffisaient pas. Plus je m’énervais, plus mes mains tremblaient. Plus j’enrageais, plus je devenais aveugle à ce qu’il se passait autour de moi. Mes pensées s’étaient comme accélérées. Pourquoi m’avait-elle confondu avec Érasme ? Pourquoi est-ce qu’elle le connaissait ? D’où ? Qu’avait-elle à voir avec la Couronne Noire ? Pourquoi avait-elle préféré m’appeler Érasme plutôt que Lucius ? Me confondre avec lui ? Au fond de moi, je sus qu’il était là. C’était forcé. Je le sentais, comme une évidence de plus en plus flagrante. J’en voulais à Laëth d’avoir prononcé son nom et elle avait beau se démener pour m’éviter de périr sous les coups d’un soldat quelconque, je demeurais hermétique à cette volonté maladive de me protéger. Je ne voulais pas d’elle. Pas comme ça.

Après un temps, alors que la sueur s’accrochait à ma peau comme la rosée à l’herbe, je décidai que je ne voulais plus rester avec elle. J’allais trouver Érasme et en finir. Mes pensées, noires, semblaient vouloir prendre la main. Ce que je ressentais à l’égard du Sorcier, à cet instant, c’était de la haine. L’impression incontrôlable qu’il allait finir par m’arracher tout ce que j’aimais ne pouvait être combattue. Il fallait que je le trouvasse, pour le tuer.

Je ne me retournai pas lorsque j’entendis Laëth crier mon nom. Non, Laëth, je ne resterais pas avec toi. Pas comme ça. Pas dans cette position-là. Tant pis pour mes interrogations. J’étais certain qu’Érasme pourrait me répondre en partie si je le trouvais. J’enroulai mon gant autour de ma main et mon avant-bras et me mis à courir, paume vers le ciel. Azur sentait mes besoins et je ressentais également les siens. La connexion n’était jamais rompue et, plus le temps passait, plus Mavkae et moi arrivions à établir un lien. Le dragon était encore dans son œuf mais je le sentais vivre à travers moi. L’ombre d’Azur ne tarda pas à me surplomber. Son souffle, comme un essaim d’abeilles, se répercuta sur mon armure. J’attrapai le matériel qui permettait de monter sur la bête et me hissai à la force de mes bras jusqu’à son dos. J’étais encore débutant. Le vol n’était pas ma spécialité et, à l’allée, c’était un autre Dragonnier qui avait guidé Azur, tout en me montrant le procédé et en m’expliquant. Je marchais pourtant bien plus à l’instinct, au lien. Ce que j’avais dans la tête, le dragon pouvait le sentir. La technique était indispensable mais elle n’était pas suffisante.

Nous prîmes de l’altitude. L’objectif était simplement de repérer le Prince Noir, un objectif impossible tant la masse des soldats était importante. Voir la guerre des hauteurs calma mes émotions envers Laëth. Les corps tombaient, inévitablement. Même si la recherche de la vie primait, lancer plusieurs armées contre un ennemi commun comportait des risques et, forcément, la mort. Sans même l’envisager elle, les blessures pleuvaient. Des mollets endommagés faisaient plier la silhouette qu’ils aidaient à porter auparavant. Depuis les cieux, j’avais l’impression qu’ils étaient tous des quilles ensanglantées, n’attendant que de tomber dans un bruit métallique. L’horreur teinta mes iris, marqua mon cœur. La guerre n’était pas bonne, quelle qu’elle fût, pour n’importe quelle cause qu’elle fût. Avec plus d’intelligence, j’aurais compris que les descendants de ceux qui perdraient leurs parents aujourd’hui voueraient une haine farouche à l’envahisseur. Les survivants nourriraient cette haine par le biais de leur tristesse, comme je le faisais moi-même parfois. Je n’étais plus sûr de vouloir me battre, de vouloir trouver Érasme et de l’anéantir. Pourtant, je sentais que c’était une erreur. Plus je le laisserais vivre, plus il deviendrait dangereux. C’était ma seule certitude, une certitude au-delà des mots et de la raison.

« Paiberym ! Qu’est-ce que tu fous là ? » La voix était autoritaire, tranchante. Mon regard remonta vers le Dragonnier. « J’essaye de trouver mon frère ! » dis-je, sans réfléchir. « Quel frère ? » C’est à ce moment-là que je compris. Je me mis à bredouiller. « Euh c’est… je… En fait… » « Bon peu importe ! Tu n’arriveras pas à le retrouver d’ici ! » Alors qu’il allait continuer, quelque chose attira son attention. « Mais qu’est-ce qu'il se passe… » Je suivis son regard. La silhouette d’un homme me fit frissonner. Je portai ma main en visière pour mieux voir et ce que je vis me rendit fou. L’aveuglement qui s’en suivit dirigea mon dragon vers Val’Aimé Taiji. Il fallait que quelqu’un arrêtât ce Sorcier. Il devait payer. Il n’y avait pas d’autres moyens. Pas d’autres choix. Personne ou presque ne semblait avoir vu mais mes yeux n’avaient pas pu me trahir, malgré la hauteur. Elle… Elle n’existait juste plus. La colère, au creux de mon ventre, mouillait mes prunelles des larmes de l’injustice. C’est lui, que j’allais tuer ! J’étais incapable de réfléchir à la réalité, au fait que jamais je n’y arriverais. Et, heureusement, le Dragonnier m’arrêta avant que quiconque ne me vît. Sa magie m’engloba et je me retrouvai propulsé loin du champ de bataille, complètement nu, dans un chalet entouré de neige. Azur n’était plus avec moi. Je me mis à crier de rage.  

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Lun 20 Déc 2021, 23:22

Djinshee
Le siège d'Arcadia
-Tu pars... ?

C’était donc pour ça qu’elle leur avait demandé de passer, lui et Elh… Valkäjh la dévisagea. Djinshee avait repris ses armes et s’était munie d’un sac de voyage. Si le premier équipement était d’ordre courant, ce n’était pas le cas du second. Qu’elle s’encombre d’affaires ne voulait dire qu’une seule chose : elle quittait l’archipel.

-Oui.

Elle leur avait parlé du projet de siège la veille au soir. Valkäjh était surpris de découvrir qu’il lui avait à peine fallu la nuit pour décider de s’y rendre. Même s’il n’aurait pas dû être surpris. Djinshee était impulsive et il savait qu’elle avait besoin de cette revanche. Ils avaient tous plus ou moins été affectés par les actes de l'Ordre, mais elle faisait partie de ceux qui avaient besoin de bouger, de partir et de mettre fin à cet Empire qui prétendait servir la justice.

Il allait sans dire qu'avec le temps, la Lyrienne avait une vision particulière de la justice. Elle ne l'appliquait pas à la lettre. Elle se plaisait d'ailleurs personnellement à la contourner. En revanche, quand il s'agissait de se faire avoir, ça n'était plus la même chose. Malgré l'entrainement, Djinshee ne pouvait pas se défaire complètement de sa nature. Son impulsivité la poussait à répliquer, de préférence d'une manière pire. Elle avait envie d’incendier ceux qui avaient seulement tenté de le faire, elle et beaucoup d'autre. Elle avait envie de changer ça. Et de se battre.

Djinshee partait toujours en avance, parce qu'il lui fallait du temps pour se remettre de ses voyages. C’était l’histoire d’un jour ou deux. En effet, les trajets en bateau étaient le pire fléau auquel elle pouvait faire face : malgré l’œuvre du temps et de l’expérience, force était de constater que ce moyen de transport épouvantable la rendrait toujours malade. Le comble, c’était qu’au bout des plus longs périples, elle était très souvent prise du fameux mal de terre, qui doublait la durée de son calvaire. De toute évidence, c’était dans ses gênes. Djinshee aurait aimé avoir le pouvoir de se téléporter. Cela aurait facilité sa vie de tant de manières. Mais non, la vie préférait se foutre d'elle en lui imposant le voyage par la voie de l'eau. Quant aux ailes dont elle pouvait se pourvoir, elle ne se sentait pas d'effectuer un tel trajet ainsi. Si ce n'était pas impossible physiquement, c'était tout au moins extrêmement difficile, sans ajouter le fait qu'elle ne connaissait rien à la dynamique de l'air et la science des vents. La Lyrienne préférait s'épargner d'une mort inutile et assurément ridicule, quitte à souffrir un peu.

De cette soudaine décision, Elh n’était pas aussi surprise que l’homme. Djinshee lui avait proposé de l'accompagner, mais celle-ci avait refusé. Djinshee s'était douté de sa réponse, même si elle regrettait. Son amie, qui avait directement été accusée à tort, aurait dû être encore plus furieuse qu'elle. A sa place, elle l'aurait été.

-D'accord. Il ne pouvait rien faire pour la résonner ou l’empêcher d’y aller, même s’il craignait que tout cela soit déraisonné. La limiter aurait été contre-productif. Dans ce cas, fais attention à toi. Et reviens nous vivante.

-Je n'ai pas l'intention de mourir.

"On ne plaisante pas." Signa Elh. La jeune femme aurait préféré que cette histoire ne prenne pas une telle ampleur. D'un autre côté, elle comprenait. Djinshee était terriblement rancunière. Elle grognerait tant que les comptes ne seraient pas rendus. Avant qu’elle ne prenne la route, Elh ouvrit ses bras pour l’étreindre. Elle savait que la rousse n’aimait pas les câlins, mais elle insistait. Djinshee ne l’écarta pas. Parce qu’avec Elh, c’était différent. C’était son amie et un peu sa fille aussi.

***

-Ils vous ont fait quoi à vous ?

Ils marchaient côte à côte. Ils ne se connaissaient pas, ne s’étaient même pas présentés et ça n’avait pas paru nécessaire. Ce qui les rassemblait, c’était leur ennemi commun. Ils allaient se battre contre lui ensemble, et après la bataille, ils passeraient tous à autre chose – il était hors de question que l’Ordre sorte vainqueur de ce siège. Pour ceux qui ne mourraient pas, ils reviendraient à leur vie normale et ne se reverraient plus jamais.

-Ils ont laissé filer un meurtrier qui a tué deux enfants au village. L’homme qui avait pris la parole était vieux, mais l’on ne pouvait douter de sa forme physique : il s’était déjà battu par le passé. La colère qui émanait de son discours suffisait à oublier son âge avancé. Contre un pot de vin. Ils ont prétendu qu'il avait été accusé à tort et qu’il n’y avait aucune preuve contre lui. Foutaises. Curieusement, quand l’Ordre est parti, ce salaud a déménagé. Il a bien fait : autrement, on lui serait retombé dessus et il ne s’en serait pas sorti vivant, je peux vous le garantir.

-Wow... Le jeune soldat n’était pas indifférent à l’histoire qu’il venait d’entendre. Il était mieux équipé que le vieux, mais sa naïveté et son physique svelte faisait davantage douter de sa réussite que le grand-père. Il se tourna vers Djinshee. Et vous ?

Elle n’avait pas dit un mot depuis le début. Elle était juste à côté d’eux par la force des choses, parce qu’ils avançaient en groupe. Elle n’avait pas l’intention de sympathiser avec qui que ce fut.

-Ils ont accusé à tort mon amie alors qu'ils étaient eux-mêmes les auteurs des délits.

Cela éleva quelques rires autours d'eux. La confrontation des deux situations était effectivement assez ironique.

-Décidément, ils ne savent plus où donner de la tête. Déclara le vieux, encore plus en rogne.

-Cet Empire n’est rien d’autre qu’une vaste blague en fait. Compléta le jeune, comme s’il venait de comprendre ce pour quoi il était sur le point de se battre.

Djinshee ne donnait pas cher de sa peau. Elle se demandait ce qu’il foutait là, mais elle n’avait pas l’intention de poser la question, de peur qu’il ne se lâche et cherche à sympathiser avec elle. La Lyrienne ne voulait pas d’un boulet. Elle faisait partie d’un groupe, mais son implication dans la bataille était plus personnelle. La justice qu’elle servait avait toujours été la sienne et celle de ses proches. Les convictions des autres lui importaient peu. Si ça allait dans son sens, c’était tant mieux. Autrement, ils n’avaient qu’à aller se faire voir.

-Cette vermine ne perd rien pour attendre.

Néanmoins, elle était contente de ne pas être seule à se révolter. Autrement, non, elle ne serait pas venue toute seule se battre contre l’Ordre entier. Quoique… Elle aurait peut-être cherché à en tuer un ou deux. Mais cela lui aurait coûté plus d’ennuis qu’autre chose.

-N’hésitez pas à foutre le feu où vous le pouvez.

***

Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas senti ça. Pas à une telle intensité en tous cas. L'odeur de la guerre. Du sang. De la sueur. Le tintement du métal. Les cris de rage ; de peur ; les râles et les gémissements de mort et de douleur. A ce stade, elle ne savait pas encore si elle ressentait du plaisir. Ce dont elle était sûre, c'était que ça la stimulait. Elle était déjà assourdie par tout ce qui se passait autour d'elle. Le début des hostilités avait éclaté depuis quelques minutes, mais elle courait encore, car elle était à peine arrivée au niveau du mur éventré. Mais ça se sentait déjà, que ça allait être le chaos. La rage bouillonnait en elle, une envie de destruction massive comme elle pouvait le ressentir lors d'un gros coup de colère. Mais celle-ci était mêlée à l'excitation de l'abattre comme il se devait, sans que cela n'ait de conséquences négatives sur elle. Elle pourrait abattre sa rage de toutes ses forces, et ça serait bien. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas tué comme ça, sur un champ de bataille. Elle avait oublié l'ivresse, cette furie générale qui enhardissait les troupes. En fait si, elle aimait ça. Elle avait oublié.

Premier adversaire. Il chargeait et elle aussi. Epée brandie des deux côtés. Djinshee choisit d'y aller à fond. Pour entrer officiellement dans la bataille, elle voulait que ce soit physique, réel. Pas de magie. Elle voulait le choc. Elle l'eut. Les deux lames s'entrechoquèrent violemment, créant aussitôt quelques étincelles. Grisant. Dans un geste souple, son épée effectua une rotation pour attaquer le soldat de l'autre côté. Parade. Pas étonnant. Elle réitéra, en effectuant un pas en avant. Bloqué. Alors qu'elle écartait de nouveau son arme pour une nouvelle fois viser son autre bord, elle leva plutôt le bras pour l'abattre sur sa tête. Profitant de l'effet de surprise, elle s'avança encore et lui envoya un coup de pied dans le ventre. Les gravas par terre firent perdre l'équilibre au garçon, qui tomba à la renverse. Djinshee écrasa sa main armée, puis l'acheva sans sommation. Un peu plus calme, elle reprit son avancée. Confrontée à de nouveaux adversaires, elle prenait le temps nécessaire pour les battre sans magie, jusqu'à ce que l'un d'eux ne soit plus costaud qu'elle. Alors qu'il la mettait à terre et s'apprêtait à l'embrocher, elle fit voler un pavé qu'elle expédia droit dans sa tempe. Le sang gicla sur son visage. Elle se recula avant que l'immense masse inerte ne lui tombe dessus.

Un peu sonnée, la Lyrienne observa le champ de bataille autour d’elle. C’était chaotique. Elle reconnaissait les Marcheurs par leur manière de combattre, pour le moins singulière. Hypnotisant et efficace. Tout comme leurs chants, qui avaient sonné le début des combats plus tôt. Djinshee n’y avait pas participé, mais s’était surprise à l’écouter attentivement. Elle n’avait pas d’affinités avec la musique, ni l’art en général. Néanmoins, le nombre de voix qui s’étaient élevées ne l’avait pas laissée indifférente. C’était réellement impressionnant, en fait. Elle les enviait.

Djinshee attrapa le prochain adversaire qui venait par le col. L'idiot lui tournait le dos. Elle passa sa lame sous son cou.

-Je suis avec vous ! Je suis avec vous !

Un juron siffla entre ses dents serrées. Putain. Elle n'avait pas le temps de réfléchir qu'on l'attaquait de dos. Djinshee jeta le combattant par terre et fit volte-face pour parer le coup, qui aurait pu lui être fatal. Si elle épargnait le premier, elle voulait le garder à l'œil. Un pas de travers et elle le tuerait. Djinshee détestait les menteurs. Vite, la Lyrienne pivota sur le côté pour se soustraire à la pression. Le rapport de force était en sa défaveur. Renforçant sa prise sur son arme, elle se remit en garde. Un coup sur le côté, en plein dans la tête, lui fit perdre sa position. Un filet de sang jaillit de sa bouche. Elle venait de se mordre la joue. Sonnée, elle peina à se réorienter. Se sentir soudainement aussi faible l’énerva. Son corps s'enflamma. C'était le temps de se remettre d'aplomb. Sous son élément, elle était vulnérable : il suffisait d'un seau d'eau pour mettre fin à ses jours. C’était pourquoi elle devait faire vite. Sa silhouette se délita, les mèches avides coururent sur le sol pour reprendre forme quelques mètres plus loin.

D’un simple levé de doigt, le feu d’une torche qui jonchait à ses pieds s’emballa. Puis les langues incandescentes se disséminèrent. Elles se déplaçaient, via la poussière qu’elles consumaient, les débris, et bien entendu la magie de leur maitresse, qui s’appliquait à rendre leur expansion rapide. Ainsi, en à peine quelques secondes, le feu encercla plusieurs ennemis. Puis il sauta sur le tissu d’une bannière, posé contre un mur de rempart. Puis sur une porte en bois qui donnait sûrement sur une réserve de nourriture ou d’équipements. Son gros adversaire neutralisé au cœur du brasier, Djinshee continua. Elle aimait voir son élément engendrer encore plus de chaos qu’il n’y en avait déjà. Sur son chemin, la femme éventra une combattante, puis décapita son voisin. En même temps, elle prenait soin de faire brûler tout ce qu’il y avait de combustible. L’odeur de fumée commençait à envahir l’atmosphère, de plus en plus étouffante.

Soudain, Djinshee sentit une présence derrière elle. D’un coup, elle fit un pas sur le côté pour éviter l’épée lourde. Une seconde plus tard, celle-ci se serait abattue sur son crâne. Son agilité accrue par sa magie venait de la sauver d’une mort certaine, ou au mieux, d’un bras en moins. Dans son même mouvement de pivot, Djinshee planta son poignard dans les côtes de son agresseur. C’était un colosse. Le métal transperça l’épaisse cuirasse, toucha très probablement la chair vu le grognement que l’attaque induisit. Elle se fit la réflexion qu’il faisait plus humide tout à coup. Son regard balaya rapidement les alentours et lorsqu’elle comprit, son poil de hérissa. Pour en finir rapidement, Djinshee plaqua sa paume aussi brûlante que du fer rouge sur le visage de son adversaire. Cinq secondes étaient suffisantes pour le dévisager et lui faire perdre connaissance. Lorsque ce fut fait, les poings serrés, la Lyrienne se dirigea vers sa rivale. Effectivement, à une vingtaine de mètres, une autre femme de l’Ordre s’occupait d’éteindre le résultat de son œuvre. De ses mains sortaient de l’eau qui noyaient ses flammes. Elles mourraient ridiculement. C’était humiliant. Furieuse, Djinshee évitait les assauts qui lui étaient destinés. Tout ce qui l’importait, c’était de mettre cette salope hors d’état de nuire. On ne tuait pas son Feu. Aussi discrète que possible, la rousse s’enquit d’avancer vite sans jamais entrer dans le champ de vision de l’insolente. Elle ne voulait pas de confrontation longue, juste de quoi la faire taire et qu’elle cesse de l’emmerder. Autrement, ce serait prendre le risque de ne pas faire le poids. Arrivée à son niveau, Djinshee lui asséna un coup de pommeau dans la nuque. Comme une poupée de chiffon, la Lyrienne d’Eau s’effondra. Elle n’y était pas allée de main morte. Djinshee n’avait aucune idée de l’état de sa victime, si elle l’avait tuée ou seulement fait perdre conscience. Elle s’en fichait. Maintenant, le combat pouvait reprendre. Le corps bouillant, elle s’enquit de refoutre le feu là où il avait été supprimé.



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Miles Köerta
~ Orisha ~ Niveau III ~

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Miles Köerta
Jeu 23 Déc 2021, 23:40



« Tu ne seras plus seule, petite fille. »

Malgré la distance qui nous séparait du gros des armées, nous perçûmes avec une netteté terrifiante le souffle de son inflexion. L’éclat de sa Voix fendit le ciel, combla l’espace qui nous éloignait les uns des autres, le phénomène nous surprenant du même fait. Une interrogation éphémère traversa nos esprits à cet instant précis – la raison d’un tel Chant? – mais nous repoussâmes à plus tard notre questionnement, puisqu’il était nécessaire que nous nous concentrions sur notre mission, droit devant. À notre instar, notre cible était parfaitement immobile, camouflée par la flore qui courrait follement sur les pierres de la muraille. Les plantes étaient nombreuses et envahissantes dans ce secteur; leur feuillage abondant et épais; le branchage compact et serré. Sur plus du quart de la fortification qui encerclait la Citadelle, en réalité, il avait été remarqué que la jungle, précédemment domptée et repoussée par les Chevaliers lors de leur établissement dans la contrée, avait rapidement repris ses droits sur la civilisation. Aujourd’hui, elle s’était appropriée de nombreuses façades extérieures et intérieures du rempart, ses bras de lianes et de pousses grimpantes s’étant étendus pour enlacer une importante portion des murs de la capitale. Si les Paladins d’Arcadia avaient voulu éloigner de nouveau cette présence encombrante, ils n’en firent pourtant rien en finalité, voyant en cette invasion floristique insoupçonnée une intéressante opportunité à exploiter.

De fait, depuis l’intérieur de la Citadelle, il était aujourd’hui possible de compter trois ouvertures, creusées à même dans le roc de la muraille, qui donnaient directement accès à un réseau de passages souterrains. Vous l’aurez compris, il s’agissait de sorties de secours. Réfléchi et travaillé grâce aux efforts de la plupart des Chevaliers, ce réseau avait été élaboré afin de servir de couloirs de fuite, ainsi que d’abris, à la population civile. Ainsi, advenant le cas où les portes de la cité tomberaient et que leurs défenses principales, parées d’épées et d’armures étincelantes, trépasseraient, les citoyens de la capitale auraient un moyen de fuir les affrontements sans devoir braver les dangers sur pattes et à plumes de Lyscenni. Pour y être descendu à quelques reprises au cours de notre infiltration, nous savions que les souterrains étaient suffisamment larges pour laisser passer deux montures galopant côte-à-côte, et suffisamment hautes pour permettre à des cavaliers de s’y infiltrer en se recourbant légèrement. Leur envergure avait été pensé de sorte à pouvoir faire traverser le plus grand nombre en même temps, et le plus rapidement. Pourtant, malgré leur impressionnante dimension, les ouvertures de ces passages étaient quasiment invisibles à l’œil nu, soigneusement scellées par une Magie qui semblait avoir doublé et consolidé la présence végétale en ces lieux précis.

L’Ordre avait accompli sa tâche avec brio pour prévenir toutes éventuelles intrusions. En revanche, leurs tours de passe-passe n’avaient pas facilité notre mission. Pendant des semaines, plusieurs Marcheurs infiltrés, dont j'avais fait partie, avaient passé leurs journées à ratisser l’aire de la cité, à la recherche de potentielles pièces et passages secrets dans lesquels nous supposions trouver des preuves de leur culpabilité. C’est ainsi que nous étions tombés, une nuit, sur ces fameuses entrées. Percées à jour, leurs ruses n’avaient désormais plus de secrets et nous avions doublé d’efforts pour fouiller méticuleusement chaque recoin du berceau de l’Empire, confirmant, un peu plus tard, la localisation d’autres passages ainsi que de l’existence du réseau souterrain. Depuis, chaque jour, sans exception, avait été consacré à la surveillance de ces couloirs. Des équipes, en toute discrétion, avaient montées la garde devant les entrées, rapportant à la Marche toute activité qui serait survenue à l’intérieur comme à l’extérieur des passages. De jour et de nuit, des regards avaient été posés sur ces accès secrets et si tout avait été relativement calme au cours du mois passé, ces derniers jours avaient été extrêmement mouvementés, la circulation à l’intérieur des galeries étant de plus en plus fréquente et animée. Les vigilants nous avaient alors communiqués plusieurs observations : des groupes de Paladins descendaient dans les souterrains avec une quantité importante de denrées, d’autres traversaient les passages en tirant des caisses remplies d’un attirail imposant, et plus les jours passaient, plus nerveux étaient apparus les Chevaliers que les espions croisaient. Ce n’était guère surprenant, considérant que l’étau s’était brusquement refermé autour de l’Ordre dès que leurs alliés, un par un, se retournait contre leurs actions. Par conséquent, il ne nous avait pas été difficile de comprendre ce que tout ce travail et ces voyages engageaient réellement : le Conseil des Treize planifiait de fuir, dans l’ombre, la Citadelle d’Arcadia… Espéraient-ils vraiment échapper ainsi à leur sentence?

L’interrogation était fondée, au vue de ce que nous avions été témoins. Cependant, malgré le grondement de plus en plus effervescent de la mélodie devant les portes du château, aucune âme ne s’était encore manifestée aux portes du réseau souterrain. Dans les rues avoisinantes, le silence était étrangement singulier, mais avec les Voix qui résonnaient à l’horizon, nous savions qu’il ne s’agissait plus que d’une question de minutes, voire de secondes, avant qu’ils fassent leur grande apparition. Nous savions qu’ils projetaient de s’éclipser avant le choc des armées ou pendant le chaos des affrontements. Cela étant dit, quelques zones d’ombre couvraient encore leurs véritables intentions – peut-être même avaient-ils tout simplement changé de plan – et cette incertitude, qui grandissait plus leur absence se remarquait, commençait à nous tracasser.

Au total, il existait quatre passages vers l’extérieur de la Citadelle, mais seulement deux étaient actuellement surveillés par les membres de la Marche. Les portes principales, au sud, étaient condamnées de par la présence des opposants de l’Ordre, tandis que l’un des couloirs de fuite – celui menant vers la grandeur des mers – n’avait plus été une option pour les Chevaliers dès qu’ils avaient aperçu les navires s’amarrer sur les plages du nord. Ils ne leur restaient plus que deux possibilités : fuir vers l’est en traversant les bras du fleuve Talvra pour rejoindre les régions de Disima, voire de l’inhospitalière Dœrelda, ou fuir vers l’ouest en longeant la lisière de la jungle et le sommet des falaises, qui surplombaient l’agitation des flots, dans l’optique de s’évader du continent depuis le dévasté Port Dirælla. Toutefois, justement en raison des récents événements qui s’étaient produits au Port, nous soupçonnions les Paladins de vouloir partir vers l’est. Là-bas, nous avions été mis au courant de l’existence d’un lieu sacré, d’un refuge qui avait été foulé maintes et maintes fois par les fidèles d’Hébé. Nos sources nous avaient confirmé que si le Conseil souhaitait vraiment s’évader, qu’il serait susceptible de faire escale dans ce village reculé afin de se ressourcer pour mieux s’enfoncer dans les terres de Tælora. Malgré tout, rien n’était trop sûr et nous n’avions pas le luxe de mettre tous nos œufs dans le même panier : c’est pourquoi nous avions fini par scinder les effectifs des éclaireurs en deux équipes suffisamment substantielles pour accomplir la poursuite du Conseil.

Nous restions ainsi sur nos gardes, l’oreille tendue, vigilants, et malgré notre apparente impassibilité, entendre la frénésie du Chant ne faisait qu’aviver la flamme qui brûlait déjà ardemment au fond de nos poitrines. Des trépignements commençaient à remonter le long de nos membres, mais nous les refreinions du mieux, impatients. Il n’était pas encore l’heure d’agir; il nous fallait attendre encore leur arrivée; et les équipes à l’ouest n’avaient, eux aussi, rien déclaré pour le moment… Décidément, le Conseil des Treize se laissait désirer plus que de rai… son? Brusquement, nos oreilles se redressèrent et quelques pupilles se rétrécirent afin d’acérer leur vision. Nous pouvions l’entendre désormais : le martèlement de leur course. Ils se rapprochaient de plus en plus vite, la nervosité se sentant dans la démarche précipitée de leurs pas. Encouragé par le soulagement qui m’envahit, un sourire se mit à danser à la surface de mon visage, tandis que l’annonce était aussitôt transmise entre les différents acteurs de la mission. Personnellement, mes pensées convergèrent, quant à elles, vers une seule et unique personne. Ils s’enfuient vraiment, ces connards. Si l’attente avait perdurée, j’aurais commencé à penser qu’une paire de couilles leur avait soudainement poussé.

À hauteur du sol ou à hauteur des toits, dissimulées derrière les ombres et les bâtiments de la capitale, une vingtaine de paires d’yeux s’étaient braquées sur l’avenue d’où remontait les bruits, comptant les secondes avant que le Conseil des Treize surgisse au coin de l’allée. C’est alors que, devant nous, les plantes accrochées aux murs s’écartèrent à une vitesse prodigieuse, libérant le chemin dissimulé pour laisser passer plus d’une quarantaine d’hommes et de femmes à pied. Dans un fracas retentissant, et malgré les Voix qui continuaient de percer l’air de leurs Échos consonants, ils partirent à toute vitesse à l’intérieur des galeries, leur course étant carburé par la Magie. Immédiatement, nous nous soulevâmes et, aussi silencieux que des ombres, nous nous mîmes en chasse, traversant rapidement l’ouverture qui se refermait derrière le branchage. C’est dommage, chuchotais-je dans son subconscient, renforçant chacun de mes sens dans le même temps. Ils n’ont pas voulu rester jusqu’à la fin de la chanson.



Une poursuite effrénée s’était engagée au cœur des galeries. Notre petite troupe, menée par les traqueurs de la Marche, n’avait pas attendu une seconde pour envahir le souterrain, pourchassant à bonne distance les fugitifs de l’Ordre. Nous ne voulions pas qu’ils remarquent notre présence, les laissant ainsi prendre une certaine avance. Pourtant, à aucun moment, et malgré la complexité du réseau qui aurait pu, plus d’une fois, nous mener sur une mauvaise route, nous ne les perdîmes « de vue ». Bouche entrouverte, nez redressé, les traqueurs comme moi s’abandonnaient à la puissance des effluves environnants; nous les laissions nous pénétrer intégralement. Chaque odeur qui s’accrochait à nos narines était ainsi méthodiquement analysée et mémorisée dans nos esprits, le bouquet olfactif résultant nous dessinant un trajet clair et précis à travers les tunnels obscurs des galeries. Nous n’avions alors pas besoin de voir où l’on posait les pieds pour progresser : il suffisait à notre odorat de nous guider et… de nous avertir de toutes tromperies au cours de la traversée. Brusquement, je m’arrêtais, d’autres traqueurs faisant de même, à mes côtés.

« Que se passe-t-il? Dans notre dos, un très faible écho nous interpella, dès lors que l’on remarqua notre arrêt en tête de file. Avez-vous perdu leurs traces? »

Sans prêter attention à ses propos, je me concentrais plutôt à dissocier les différentes odeurs du bouquet, qui s’était lui-même soudainement divisé : les Chevaliers en fuite avaient décidé de se séparer, en trois équipes. Un instant, mon nez se fronça et un grondement roula dans le fond de ma gorge. Nous avaient-ils repéré? Non… Peut-être pas. Pas de conclusion hâtive. Cependant, s’ils avaient choisi de se séparer, soit ils désiraient semer tous éventuels poursuivants en les engageant sur de fausses pistes – ce qui ne voulaient pas nécessairement dire qu’ils étaient au courant de notre présence – soit, ils s’étaient parés à nous embusquer, conscients de la chasse dont ils étaient victimes. Incités par mes compagnons, je fis balancer ma queue de droite à gauche dans mon dos, faisant signe au reste du groupe d’attendre un moment, et de rester silencieux. Nous devions étudier le comportement des fugitifs. Les veines à mes tempes étaient désormais visibles et mes oreilles, fièrement dressées au-dessus de mon crâne, écoutaient chaque son des environs. Cinq secondes passèrent, huit secondes, dix secondes… Et je me permis d’émettre un bref sifflement. Reprenant notre accélération, nous nous élançâmes comme des flèches dans les corridors, les trois groupes devant nous ayant chacun repris sa course. Ils ne nous attendaient pas pour se jeter à notre gorge, ni ne réalisaient de détours bien compliqués au milieu du dédale pour s’engager sur une nouvelle trajectoire complètement impensée. Au contraire, ils finirent même par se retrouver et repartir sur un chemin commun, toujours droit vers l’est. Il semblerait que mes inquiétudes n’étaient pas fondées : le Conseil des Treize et leurs alliés n’avaient aucunement conscience qu’ils étaient déjà traqués. De ce fait, ils courraient et courraient sans relâche, ignorant ce qui les attendaient à la surface : ils croyaient partir pour se réfugier à l’intérieur d’un abri, mais ils tomberaient directement sur notre nid. Je te le confirme, Latone: ils se dirigent droit vers Narathalia.




Lorsqu’ils comprirent ce qui se tramait, ils voulurent reculer prudemment, cherchant déjà à retourner dans l’ombre des souterrains. Seulement, cela ne leur pris que quelques secondes avant de percevoir le bruit de nos pas dans leur dos. Yeux écarquillés, airs interdits, ils refirent volte-face en direction de Latone et de ses hommes, sentant progressivement l’étau les étouffer de nouveau. À notre tour, nous nous arrêtâmes enfin, bloquant l’ouverture du réseau secret, tandis que les derniers Marcheurs émergeaient des bois, derrière la haute silhouette de l’Hurabis. Il était désormais temps pour le Conseil de faire face à la justice, de faire face aux conséquences de leurs actes; de nous faire face. Si, au début, leurs principes et bonne volonté avaient réussi à les propulser au-delà de tous horizons, aujourd’hui, l’Ordre chutait. Incessamment. Violemment. Leur arrogance et soudain mépris de la justice les entraînaient dans une descente infernale. Encore maintenant, les Chevaliers et leurs grands chefs ne voulaient rien entendre, contrant les arguments de l’Éclat avec ce sourire viscéral et irrévérencieux au visage. Ils étaient aussi sourds qu’aveugles; aussi nerveux que désespérés, et dans cette vaine tentative à garder la face devant leurs ennemis et anciens alliés, leurs épées quittèrent le confort de leur fourreau. Devant cet arbre six fois centenaires, qui avait retenu pendant des années leurs rêves et convictions à son feuillage, les Chevaliers déchus décidèrent aujourd’hui de contempler l’Arbre d’Hébé droit dans les yeux. Mâchoire contractée, armes aux poings, parés, ils ne détournèrent le regard qu’une fois le cri de guerre poussé à plein poumons au cœur du village.

Dès l’instant où le fer s’entrechoqua au fer et que le chaos gonflait dans la place centrale, je m’étais discrètement éclipsé des combattants au corps-à-corps pour me fondre dans le décor. Avec d’autres acolytes, nous nous perchâmes aux toits et aux arbres environnants, armant nos arcs et nos arbalètes, prêts à soutenir à distance nos guerriers. Sous mes yeux, les Chevaliers s’étaient transformés en créatures assoiffées de sang et de chair. L’humanité de leurs traits s’était décomposée, ne laissant plus que la trace de la misère et de la détresse animales sur leur faciès… Encochant une première flèche à la corde de mon arc, je visais dans ma ligne de mire l’une de ces bêtes, relâchant sur une centaine de mètres le projectile. Il fila, siffla par-dessus la tête des combattants avant de plonger profondément dans la cuisse de ma proie. Son cri, frappé par la douleur qui explosa dans sa jambe, alerta soudainement l’un des hommes de la Marche, qui le remarqua enfin : l’ennemi avait voulu profiter qu’il combatte un autre Chevalier pour se glisser dans son angle mort, bien décidé à le faire tomber. Seulement, il était celui qui se retrouvait désormais au sol, l’estoc d’un coup s’enfonçant dans son épaule, l’immobilisant aussitôt. Discrètement, j’exhalais un sifflement, admiratif du tranchant de la flèche que j’avais tiré. Offertes par l’ancien Hǫfðingi avec son quatuor de crustacés – que l’on avait fini par amener chez Asche – c’était la première fois que je les utilisais en situation de véritable combat. Reprenant la pose, ma mire se focalisa sur une nouvelle proie qui tentait de nous faire un coup bas. La corde se relâcha à grande vitesse, la flèche transperçant intégralement la main de la Chevalière qui, soudain, fit tomber son épée, hébétée. Le sang s’évada à profusion de la perforation, maculant son armure et ses yeux, qui ne virent que le rouge de sa main. Immédiatement, son adversaire exploita la faiblesse de son opposante, plaquant cruellement un pied contre son genou, qui flancha. Dans une terrible chute, la combattante s’écrasa par terre, le souffle coupé par la douleur qui la faisait suffoquer. La bataille était terminée pour elle.

Satisfait, je baissais mon arc, escaladant une nouvelle hauteur pour me fondre aux abris offerts par l’environnement. Sautant de toits en toits, d’arbres en arbres, dès que l’une de mes flèches faisait tomber un ennemi, je me déplaçais rapidement pour prévenir tout antagoniste de trouver ma véritable position. Je ne possédais pas le sifflement meurtrier des Striomas pour espérer pouvoir me battre sans user de mes mains, alors dans ces circonstances, je comblais cette vulnérabilité par mon extrême agilité. Il m’était nécessaire de bouger, de filer et de me cacher, afin de soutenir au mieux chacun de mes alliés. Bien souvent, une visée suffisait à blesser et désarçonner un adversaire tenace, la surprise qui précédait l’insufflation de l’intense douleur étant relativement efficace pour que mes compagnons puissent reprendre le dessus sur leur combat, alors que d’autres fois, mes tirs faisaient simplement mouche, mettant hors-jeux les proies les plus violentes et désespérées. Peu importe la distance que je m’imposais, dès qu’une proie tombait dans ma ligne de mire, sa danse se terminait d’une manière ou d’une autre. Je soulevais mon arc, l’armais d’une flèche, et décochais prestement. La proie trébuchait et s’allongeait; elle s’étonnait et jurait; parfois, elle criait et pressait ses doigts à l’endroit où elle était touchée. Je finissais par me redresser et contemplais silencieusement le moment où tout s’arrêtait pour elle. Des fois, envahie par cette seule volonté de vivre, la proie luttait malgré la souffrance et la peur soudaine qui aurait dû la paralyser. Dans ces cas-là, si personne n’était en vue pour s’en occuper, je me permettais d’intervenir.

« Où croyez-vous partir comme ça? »

Dans un hurlement strident, enragé, la blessée se releva promptement et poussa son poing jusqu’à mon visage. Sur le qui-vive, je sautais dans les airs pour éviter son assaut, atterrissant de tout mon poids sur son épaule, qui me servit d’étrange appui. Sans lui laisser le temps de contrattaquer, je m’aidais de son corps pour me propulser loin d’elle, la repoussant du même fait en direction du plancher des vaches. La femme perdit l’équilibre et le derrière de son crâne se fracassa violemment contre le sol. Sonnée, sa tête dodelina un instant sur le côté, mais elle reprit rapidement conscience, s’armant d’une dague qu’elle tira de toutes ses forces dans ma direction. Je l’évitais en me décalant sur le côté, filant droit sur elle, mon pied s’enfonçant dans le creux de son visage, dans le creux de sa bouche. Dans un bruit de cassure, elle retomba. Tout son corps se mit à trembler, emporté et déchaîné, un nouveau cri s’arrachant à ses lèvres.

« Vous ne vous battez pas auprès de vos camarades? Lui posais-je curieusement, désormais posté au-dessus de son visage, la fixant intensément. Quel leader vous faîtes, Grande Sage. »

Furieuse, ensanglantée, le nez cassé, la femme fit apparaître une seconde lame dans le creux de sa main et la balança devant soi. Ma gorge était visée, mais d’un geste, j’arrêtais son poing, m’armant de la dureté de mon coude pour le planter férocement dans son avant-bras. On entendit un craquement, et la jeune femme prit une grande inspiration avant de me cracher au visage. Une mucosité gluante et pourpre s’écrasa contre ma joue. Naturellement, mes paupières papillonnèrent une seconde et je finis simplement par essuyer la salive du revers de la main. Sans mot, je lui offris un sourire, renforçant ma prise autour de son poignet et avec une violente résistance, ses bras se rapprochèrent l’un de l’autre, jusqu’à se joindre, se coincer, l’union assurée par des menottes inviolables. La fugitive voulut rapidement s’en débarrasser, mais les bracelets en fer enserraient de plus en plus ses poignets, au point où une grimace, précédée d’une jérémiade étouffée, défigura son faciès.

« Si vous ne voulez pas que vos poignets se brisent, je vous conseille fortement de rester tranquille. Posant, cette fois, une main à sa bouche pour m’éviter une nouvelle jetée de bave, j’en appelais mes pouvoirs pour que le Métal apparaisse et se façonne selon ma volonté, engendrant depuis ma paume un cerceau de fer qui lui fit tout le tour de la tête, à la manière d’un bâillon rustique et indélicat. Nous ne vous tuerons pas. Pas pour le moment, alors vous pouvez avoir l’esprit tranquille. M’accroupissant à sa hauteur, genoux pliés, je continuais de la gratifier de cet éternel sourire; tendresse factice, il était pourtant aussi doux et sucré que le miel étendu sur la première tartine du matin. La Mort serait simplement une fuite trop facile, une nouvelle évasion, après tout ce que vous avez commis. Parfois, il y avait des sentences pires que le trépas. D’ici là, Grande Sage. Je braquais le sanglant de mes iris dans la noirceur des siens, le changement de mon visage lui faisant écarquiller les yeux, en grand; mon sourire la frigorifiant. Restez avec moi. Nous pourrons contempler ensemble la fin de cette mascarade. »

Vivement, elle se recula, perdant de nouveau l’équilibre, mais mon visage avait repris son air avenant et souriant d’Eversha lorsqu’elle remonta ses yeux dans ma direction. Sur mon crâne, mes oreilles bougeaient allégrement au gré de mon contentement.


3 527 mots (Sans les paroles reprises du post de Latone)




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Isiode et Isley
Mar 28 Déc 2021, 20:16



Les armées s’étaient avancées aux pas réguliers de leurs soldats et cavaliers, et la Citadelle, hérissée par les armes des Chevaliers, fût rapidement encerclée. Il nous était possible d’apercevoir des Dragons à l’horizon, planant à bonne distance au-dessus des plaines et de la cité, aussi bien que des vaisseaux de guerre qui se mouillaient sur les rives du nord, déchargeant encore et toujours plus d’effectifs militaires sur la contrée. Pourtant, la véritable impulsion qui nous fit comprendre que les hostilités étaient lancées fût cette mélodie de guerre, de libération, qui s’étendait progressivement à tout le futur champ de bataille. Le Chant initié par la Marche Terne était repris par les soldats au sol et en mer, enhardissant leur fièvre et leur courage pour les prochains combats; alertant l’ennemi de notre prochaine intention, celle de sauver la mémoire de cette petite fille dont les promesses et l’espoir insufflée n’avaient plus été que déceptions et excuses corrompues aux lèvres de l’Ordre d’Hébé. On tapait sur ces boucliers pour donner un nouveau rythme à la chanson, on enivrait l’air de cris ou joignait sa voix à la toile bourdonnante des autres inflexions. Malgré cette frénésie de plus en plus emportée pour redorer les souvenirs de cette idole bafouée, le Consul n’anima sa voix que pour donner les directives à ses collègues et officiers, parés à l’affrontement qui ne serait tardé à s’enflammer. Deux Imperator se tenaient à ses flancs, eux-mêmes accompagnés par quelques Imperio qui avaient quitté leur territoire d’affectation pour prêter main-forte à l’effort de guerre. Chacun d’eux seraient responsables d’une division, soit pour combattre directement sur terre, en compagnie des guerriers et mercenaires d’autres nations, soit pour créer la confusion au sein du fort ennemi, en attaquant directement depuis le firmament, soit pour aider à l’évacuation civile de la population de la capitale et des réfugiés angéliques. De toutes ces missions, le regard de Clive Galathiel se portait inévitablement sur ces compatriotes, enfermés au cœur de cette forteresse dont l’accès avait été maintes et maintes fois refusé aux Ailes Blanches par les Chevaliers. Plusieurs hypothèses avaient été soulevées parmi les Olori concernant une telle réaction de la part du Conseil d’Arcadia, mais aujourd’hui, en toute franchise, ces conjectures passaient par-dessus la tête du Consul de la Nith-Haiah. Que les Paladins aient volontairement refusé le rapatriement de leurs consœurs et confrères pour prévenir toute riposte du parti angélique; parce qu’ils leur avaient causé préjudice ou parce qu’ils n’étaient plus devenus que les pantins de quelques diables ne lui importaient plus vraiment. Tout ce que le brun visait était leur évacuation sécuritaire et immédiate jusque dans leurs navires. Il n’était pas difficile de comprendre que la déception et la frustration de ses collègues Hesalà et Galadhras, responsables des pourparlers auprès de l’Ordre avant l’expansion des inimitiés, résonnaient fortement au fond de sa poitrine. Néanmoins, aujourd’hui, ils allaient sortir les leurs de cette prison et les ramener à leur véritable maison.

« QUE NOTRE VOIX BRISE CES MURS! »

Brusquement, le Chant se transforma en un soudain cri assourdissant, qui s’écrasa violemment sur les murs des remparts d’Arcadia. Un premier souffle voulut balayer la fortification, mais cette dernière tint bon malgré les nombreuses secousses qui la prirent d’assaut. Cette vision ne découragea pas les Marcheurs du Voile Blanc pour autant, bien au contraire. Ils gonflèrent leurs poumons d’une détermination renouvelée, hurlant un second rugissement en direction de la muraille, qui oscilla dangereusement sur l’équilibre de ses fondations. Des pierres se mirent à dégringoler des façades, affaiblissant la défense de plus en plus précaire, et des jurons criés de la part des Chevaliers commençaient à s’élever au-dessus des éclats guerriers. La panique gagnait peu à peu leurs ennemis et l’Olori Galathiel, suspendu entre ciel et terre à moins de cinq mètres du sol, porta une brève œillade sur son armée et ses officiers. Au prochain coup de Tonohr, ils initieraient leurs propres mouvements : les portes d’Arcadia s’effritaient déjà bien assez vite sous leurs yeux.

« Commencez à déployer les portails de téléportation, s’exclama-t-il dans un commandement ferme. Et préparez les équipes d’évacuation pour qu’ils rejoignent rapidement l’intérieur de la Citadelle depuis les airs. Les infiltrés de la Marche Terne devraient déjà être sur place, en train de faire de même. »



Le plan d’évacuation avait été soigneusement élaborée en collaboration avec l’organisation du Voile Blanc pour que leurs infiltrés puissent assurer le bon accomplissement de celui-ci entre les quatre murs de la forteresse. Tout avait été mis en place pour s’assurer que les civils et les Anges rescapés puissent sortir de la cité fortifiée en toute sécurité, et ce, dans les délais les plus brefs, car même si les corridors de fuite se situaient à bonne distance du baiser incisif des armes, l’onde de choc engendré par les affrontements ne tarderait à atteindre notre position. Puis, nous savions qu’une fois l’Ordre prit en tenaille, qu’il reculerait lentement mais sûrement jusqu’aux aires les plus calmes, là où nous nous tenions actuellement. Les Chevaliers se disperseraient, fuiraient certainement en abandonnant les armes pour sauver leur peau – si ce n’était pas déjà fait pour certains – et les imprévus de la guerre pourraient en amener plusieurs sur notre chemin. À ce moment-là, personne ne pourrait se prévenir des actes des désespérés. Ainsi, nous ne pouvions perdre de temps : chaque minute nous était précieuse.

« S’il-vous-plaît, ne vous bousculez pas et restez calmes!

- Chacun d’entre vous pourra traverser un portail. Ne vous énervez pas! »

Joints à mes efforts, Travis essayait de faire entendre sa voix au-delà du rugissement des combats, indiquant aux civils et aux Anges rescapés de ne pas s’impatienter. Si les Marcheurs infiltrés leur avaient déjà échangé quelques mots à ce sujet, il était pourtant clair qu’une fois la réalité rattrapée, plusieurs les avaient oubliés, et cédaient petit à petit à la frayeur qu’instaurait la guerre tout autour de nous. La panique gagnait l’esprit tandis que l’angoisse envahissait les cœurs, couvrant la lucidité des plus anxieux qui ne souhaitaient qu’une seule chose désormais : sortir de cette zone. À travers les exclamations, cependant, nous pûmes entendre certaines d’entre elles commencer à s’indigner et pleurer. Un enfant que l’on aurait perdu de vue, un père qui serait parti, avant le rassemblement, pour récupérer un trésor incommensurable et qui ne serait pas encore revenu, malgré qu’on l’ait matraqué d’incitations pour ne pas y retourner… Nous avions des disparus et bientôt, quelques personnes ne voulurent plus progresser dans la file pour sortir d’Arcadia, tant qu’ils ne s’assuraient pas du bien-porté de l’être chéri.

« Soldat Yüerell! Je me retournais prestement, ayant reconnu la voix de mon Capitaine parmi tout ce vacarme tonitruant. Vous nous accompagnez. Nous allons ratisser les quartiers pour nous assurer que personne n’a été laissée en arrière.

- Entendu, Capitaine Endeover! »

Automatiquement, j’hochais de la tête, m’avançant aussitôt dans sa direction pour les rejoindre, lui ainsi que les autres Soldats et Marcheurs qui l’accompagnaient. En traversant les quelques mètres me séparant de leur groupe, je passais juste devant mon frère, qui discutait avec un homme aux cheveux sel et poivre. Je ne perçus les tenants et aboutissants de leur conversation, mais Isiode conservait son éternel expression de neutralité.

« Soldat Wahlker, vous continuerez d’aider les civils sur place avec les autres.

- Compris, Capitaine! » Déclara le blond en reportant aussitôt son regard sur les civils qui s’avançaient, pas après pas, pour atteindre les portails de téléportation.

Reportant son attention sur nos épaules, le Capitaine Endeover poursuivit :

« Nous serons plus rapides si nous nous déplaçons en petites unités à travers les quartiers. Étant donné que le gros des forces de l’Ordre d’Hébé combat actuellement nos alliés au sud et au nord d’Arcadia, nous devrions techniquement pouvoir nous déplacer à travers la ville sans rencontrer de résistance trop hostile. Mais ne baissez pas votre garde. Le danger se cachait partout, de cela, nous étions parfaitement au courant. Séparez-vous! Nous nous rejoindrons ici même une fois nos fouilles terminées. »



Me propulsant à toute allure au-dessus de la cité, mon vol nous extirpant rapidement de l’étroitesse des ruelles pour nous mêler aux hauteurs des toitures, je serrais au creux de mes bras le corps frissonnant de la jeune femme que mon groupe venait de secourir des décombres. Prisonnière de sa maison, qui avait cédé à la pluie des débris qui avaient explosé en raison des assauts, nous l’avions rapidement dégagé des ruines, notant l’effusion inarrêtable de sang qui s’échappait de ses blessures : elle avait besoin de soins immédiats. Si nous lui avions procuré les premiers soins, il était impératif qu’elle soit prise en charge par des spécialistes et, sans plus attendre, je m’étais porté volontaire pour la ramener le plus vite possible jusqu’aux portails. De là-bas, je pourrais nous faire traverser plusieurs kilomètres pour l’amener auprès des soigneurs angéliques et magiciens qui, en retrait, servaient l’effort de guerre pour guérir les blessés.

« Vous serez rapidement entre de bonnes mains », lui promis-je dans un chuchotement évasif, libérant continuellement ma Magie pour apaiser ses souffrances les plus intenables.

Seulement, une fois à proximité, je nous arrêtais soudainement à l’entente de cris affolés. En tendant l’oreille, je notais brusquement que l’épouvante provenait de la direction où se situait les portails et la majorité des civils de la cité.

« Que se… passe-t-il? »

La voix de la jeune femme était chevrotante et si faible, que je me demandais si ses lèvres avaient véritablement bougé à cet instant. Sans lui porter de regard, cependant, je repris mon envol en toute hâte.

« Ce n’est rien. Mes bras se raffermirent pour encadrer ses épaules, pour lui insuffler un peu de réconfort dans ce chaos perpétuel. Je vais vous amener à nos soigneurs », lui promis-je en reprenant une certaine accélération, le cœur palpitant.

Plus nous nous rapprochâmes de l’épicentre de l’affolement, plus cette dernière vibrait au creux de nos tympans. C’est alors que, depuis les airs, je l’aperçus, le guerrier à l’armure d’azur. Dans ses bras reposait un homme à la chevelure courte, claire, et devant eux, trois individus avaient été plaqués au sol, ensanglantés, par des hommes soit de la Nith-Haiah, soit de la Marche Terne. Nous poussant dans les airs par un nouveau battement d’ailes frénétique, je nous dirigeais droit vers le cercle qui s’était formé autour des principaux protagonistes, les réfugiés et civils d’Arcadia contemplant la scène, visiblement sous le choc. Que les Ætheri soient loués, personne ne semblait avoir été blessée. Malgré tout, la présence de ce guerrier ne me plaisait pas le moins du monde. Une prestance écrasante émanait de son être ainsi qu’une aura, qui me frigorifia dès que je vins me poster à proximité. L’air qui enveloppait sa personne était glaciale, de la même nature que l’air de l’hiver éternel que l’on pouvait rencontrer dans les Montagnes de l’Edelweiss enneigées ou dans le Berceau Cristallin du Continent Dévasté. Que s’était-il passé alors que nous nous étions éclipsés? Pourquoi nos soldats maintenaient au sol ces gens? Est-ce que des Chevaliers de l’Ordre avaient déjà percés les lignes alliées pour se perdre en ville et se rendre jusqu’à notre hauteur?

« Travis! Dans la foule, je reconnus le Soldat Wahlker, qui leva ses yeux dans ma direction, aussi perturbé que les autres par ce qu’ils avaient été témoins. Qu’est-ce que c’est que ça? Qui sont-ils? »

Le blond écarta ses lèvres pour me répondre, mais son regard s’arrêta brusquement sur la jeune femme que je tenais dans mes bras. Sa respiration était sifflante et une expression affligée défigurait les lignes de son faciès; elle était en douleur.

« Elle doit absolument rencontrer un soignant! »

Je sursautais, reportant mon attention sur la blessée. Il avait absolument raison. Je devais passer par ces portails pour rejoindre les médecins au plus vite. Puis, il semblerait que les choses aient été prises en main ici… pas vrai? Reprenant contenance, je réorganisais mes pensées afin de converger toutes mes priorités sur la demoiselle.

« J’y vais, soufflais-je gravement en ajustant ma prise autour du corps de la jeune femme. Est-ce que tout ira bien? »

Travis acquiesça d’un signe de tête, tout aussi sévèrement, jetant néanmoins un coup d’œil par-dessus son épaule, ses iris bleutées dévisageant le guerrier à l’armure d’azur.

« L’affaire est déjà réglée. Et tu peux remercier ton frère pour cela. »

Je me figeais brièvement, tournant un œil, plissé, en direction du Soldat. Cependant, ce dernier me poussa vers l'avant, m’incitant à me diriger droit vers les portails.

« Nous devons reprendre l’évacuation. Nous n’avons pas le temps d’attendre et cette femme, encore moins que nous. Vas-y. Je t’expliquerai tout une fois qu’on en aura terminé ici. »


2 112 mots (Sans les paroles reprises du post de Latone)



It's a little price to pay for salvation
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Mancinia Leenhardt
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Mancinia Leenhardt
Mar 28 Déc 2021, 22:20


Illustration - Shenpei Wu

Le Siège d'Arcadia


Mancinia était assise sur l'un des rochers bordant Arcadia, vers le nord-ouest. De ce côté, les Plaines Sifflantes étaient surélevées, donnant une vue imprenable sur la Citadelle et sur ce qu'il s'y produisait en ce moment même. Elle voyait des masses informes, laissant plus ou moins deviner les puissances en présence. Un charmant programme se dessinait devant ses yeux, ravivant un peu la flamme de toutes ces batailles auxquelles l'Humaine avait pris part par le passé, mais cela dit, elle allait devoir réfréner ses pulsions de guerrière. L'Imprévisible inspirait profondément l'air ambiant, comme si elle respirait pour la première fois de la journée.

On est vraiment obligés de rester là ?

Assis à ses côtés, sa lance contre son épaule et piquant la terre, Shapûr maugréait quelque peu, ce qui ne lui changeait pas vraiment des habitudes.

Nous nous occuperons des blessés, mais nous devons aussi assurer notre défense et surveiller les alentours, pour arrêter ceux qui tenteraient de s'barrer.
Ouais, on sert à rien, merci de le confirmer.

Mancinia serrait quelque peu les dents, contrariée de ne pas lui répondre quelque chose de cinglant tant ce qu'avait dit son compagnon était criant de vérité. Ils étaient éloignés de tout à cause du Ma'Ahid qu'ils dégageaient. Ah, qu'ils étaient forts pour rouler des biceps et se vanter de leur puissance, mais sans leur Magie, ces petits combattants semblaient confus et totalement inutiles. Si ça n'avait pas été l'Empire qui leur avait gentiment demandé pour ne pas interférer avec leur petite surprise, elle aurait sûrement utilisé son je m'en foutisme légendaire pour aller combattre.

Autant combattre avec les Réprouvés ... Ils ne chialent pas pour rien.
Ne dis pas ça. Servir et protéger, c'est aussi le devoir de l'armée.

Shapûr la regardait en biais, petit sourire moqueur aux lèvres. Il n'avait pas besoin de parler pour qu'elle comprenne où il voulait en venir ; elle allait se mettre à parler comme Neah. Elle se renfrognait.

Et si tu n'es pas content, il ne fallait pas venir.
Attention Leenhardt, j'ai encore de quoi te botter l'cul.

Il avait dit cela avec un sourire en coin, mais il était conscient que ce n'était pas vrai. À une époque, Shapûr la dominait largement dans tous les domaines de la guerre, mais les batailles et les entraînements qu'elle s'imposait personnellement l'avaient transfigurée en quelque chose de monstrueux. À l'instar du Capitaine Katzuta ou d'autres grands noms de cette génération, elle était puissante, mais à l'inverse de tous ces excellents combattants, Mancinia n'avait plus de réels endroits où exprimer ses muscles. Elle n'avait pas pris part à la campagne des Evershas contre les Vampires, car des obligations la retenaient ailleurs et elle s'était construit l'image de la vertueuse Marquise Leenhardt, auprès des Anges et des Magiciens. Celle qui vous sourit, mais qui arriverait à vous arracher la carotide avec les dents, ceci dit.

Ça faisait longtemps que j'avais pas vu ça, ça m'rendrait presque nostalgique.
Ouais, tu parles comme un vieux ...
Est-ce qu'on est vieux ?
Un peu.

Si elle n'avait pas eu ces dix années de sommeil, Mancinia aurait célébrée son quarantième anniversaire en portant le poids des ans au travers des rides et des cheveux blancs naissants, mais ce n'était pas le cas. Ses traits n'étaient pas devenus durs et sa beauté restait la même. Physiquement, de nombreux Enfants de Sympan ne bougeaient plus, conséquence d'un Acte Divin. Heureusement que le Dieu-Roi avait eu cette brillante idée, ou elle aurait eu du mal à expliquer la raison de son état fixe sur la question car elle, elle savait que son Don en était la cause. La Fille du Soleil l'avait remarqué, fait des essais. Il semblait répondre à un parfait équilibre avec son Ma'Ahid, rendant son exploitation complexe et épuisante si elle n'y prenait pas garde. Une chance, un miracle, une malédiction, peu importait ... Elle en userait pour le Bien.

Il n'était pas question que j'manque ça, t'façon.

En tant que Réserviste, il s'était porté volontaire lorsqu'un recrutement avait été opéré parmi la population, dès que la Marche avait réuni tout ce qu'il fallait pour abattre l'Ordre. Point de ralliement ; Alaithiad. De la Cité, ils avaient traversé Lyscenni, une marche longue vers Arcadia, en évitant les créatures rôdant dans ses forêts à l'aide de guides qui s'étaient expérimentés avec le temps. Les uns et les autres avaient pris plusieurs villages des alentours, essayant de les occuper pour éviter toute retraite, ou une prise à revers. Qu'ils soient vides ou que la population se rende, cela avait été inévitable. Il y avait eu des combats, mais les pertes étaient minimes ; le but n'était pas de s'entretuer, simplement de rétablir la Justice.

C'est incroyable de voir des Sorciers avec les Magiciens.
Obligé, ils se tapent sur la gueule avant la fin.
Tu ne crois pas en la Conciliation d'Hel'dra ? ricana-t-elle avec amusement.
C'est pas parce que tes deux moutards sont ces Élus que j'y crois.

Difficile de croire en une certaine Conciliation lorsqu'on voyait surtout le Chaos gagner de l'ampleur au fil des années, l'Ordre d'Hébé était l'incarnation même d'un Bien corrompu se pliant doucement au Mal ... Il demeurait heureusement encore quelques courageux irréductibles au Bien dont le coeur battait en rythme avec la Justice.

En un mois, tu as fait tout cela, Latone ...
T'as dit un truc ?
Non, rien.

Dans un léger sourire, Mancinia se sentait aussi impressionnée qu'envieuse à l'égard de la Marcheuse et aux doux souvenirs d'une époque plus que révolue.

Woah ... on entend tout d'ici.
S'ils ne se sont pas rendus, ils ne le feront jamais ...

Si Mancinia ne voyait pas Latone, elle l'entendait très bien. Le son de sa Voix était porté jusqu'à eux, dans un Chant mélodieux, entraînant une panoplie d'émotions intenses. Elle ne faisait pas attention qu'elle pleurait malgré elle jusqu'au moment où les remparts chutèrent ...



S'ils étaient présents en cet instant qui se voulait Historique, c'est parce que Mancinia l'avait choisi, plus que d'en avoir eu l'ordre. Il était évident que les Humains soutiendraient la Marche Terne, mais l'aspect militaire, dans le cadre de ce siège, était à écarter, étant donné les liens étroits de l'Empire avec la Magie. Néanmoins, sur bien des aspects, cela permettait à l'Humaine de faire un premier tri quant à sa nouvelle fonction. Quelque chose qui n'était pas encore vraiment connu ... pas même chez les siens.

La Reine Scylla l'avait convoquée. Et Mancinia n'aurait pas eu l'audace de la faire attendre. Elle travaillait en extérieur lorsque l'ordre était arrivé et sa tenue n'était pas très conventionnelle pour un entretien avec sa Souveraine, mais ce n'était pas sur ce genre de détails sur lequel on s'arrêtait lorsqu'on était soumis au mot urgent. Peu importait ses cheveux en bataille, ses habits sales et sa peau meurtrie par un Soleil mordant. Quand on la fit entrée dans le bureau, l'Imprévisible avait eu la surprise de constater que la Reine n'était pas seule, les Mahestan Vosgien, Sahar et Valphreze étaient en sa compagnie. Même si elle s'inclinait respectueusement et ne démontrait rien quant à son trouble, son coeur était en roue libre et son esprit essayait d'aller vite pour comprendre la raison de sa présence. Mancinia ne doutait pas de la qualité de son travail en compagnie de chacun d'entre eux, s'il y avait eu des tracas, ça n'avait jamais été digne d'une réprimande aussi royale. Du moins, le pensait-elle.

Matasif Leenhardt, débuta-t-elle en guise de salutations. Avancez.

Qu'est-ce qu'il se passait ici ? Sa nervosité avait grimpé d'un cran, mais elle s'exécutait tandis que la Sūrakan se redressait de son siège en contournant le meuble pour venir se mettre devant elle. Il y avait une différence de classe très nette.

Mettez votre genou au sol.
Majesté ... ?

Sa voix trahissait son incompréhension. Est-ce que l'astre solaire ne lui avait pas ravagé le cerveau et s'était-elle mise à délirer ? Le regard de sa Reine ne lui permettait pas de discuter sur cet ordre. Elle mit genou à terre, le regard baissé vers le sol. Elle avait l'impression d'être revenue en arrière, lors de son adoubement comme Chevalière d'Arkas.

Matasif Mancinia Leenhardt. Moi, Scylla Taiji, Sūrakan nin Hashri, demande sur votre Vie et votre Honneur, de Servir et Défendre la Cause des Humains au travers des Terres du Yin et du Yang. Jurez-vous ?
Je le Jure.

C'était mécanique. Elle n'avait pas besoin de comprendre. Que ce soit comme Joaillière ou comme guerrière, elle aimait les Enfants de Sympan plus que tout. Si au départ, son ambition était de détenir un commerce florissant, les années et les catastrophes secouant le monde, sa volonté dévorante s'était retrouvée rehaussée au point de vouloir prendre le trône. Un jour, elle serait à la place de cette Reine qu'elle estimait et qui faisait poser sur chacune de ses épaules la lame froide qui se trouvait sur son côté quelques instants auparavant.

Par ce geste ... Je vous nomme Commandante de la Légion des Spartiates.

La Légion ... ! Son coeur avait raté un battement, tandis que résonnait à ses oreilles le rire de Parvaneh en voyant sa mise choquée, les yeux écarquillés en observant les aspérités de la pierre.

Le nom d'Iskandar retrouve ainsi sa véritable place.
Relevez-vous.

Mancinia avait suivi l'ordre, toute émotionné intérieurement, même si seulement ses yeux trahissaient ses sentiments.

Je suis conscience qu'il s'agit d'une nomination assez sommaire. Je vous promets une cérémonie plus resplendissante à l'avenir.
Non, ce n'est pas ce que je ... Mais ... Pourquoi moi, Majesté ?
N'était-ce pas ce que vous vouliez lors de notre précédente réunion ? demanda Navier. Certes, vous ne pensiez pas obtenir cette place, mais il est de notoriété publique que la Légion ait toujours été indépendante de l'Armée et ne dépendait que du Souverain.
Nos meilleurs combattants, de carrière ou de renom, réuni au sein d'un même corps militaire, oh oh oh, reprit Valphreze. Vous avez été choisie comme Ambassadrice, mais cela ne se limite pas à une table des négociations ... Cela se dispute sur tous les fronts.
Vous êtes aussi celle qui a un contact plus que privilégié avec la Nith-Haiah.

Neah ! pensa-t-elle directement. Décidément, sa carrière lui permettait de briller. Un sourire ravi apparu sur ses lèvres, elle adorait ça, elle adorait son couple ! Ils s'entraidaient pour briller l'un et l'autre, elle ne pouvait pas rêver meilleur compagnon, même dans ses rêves les plus fous. Mancinia serrait le poing, ayant repris le contrôle de son esprit après la vive surprise.

Nous ne pouvons pas mobiliser notre armée dans le cadre de cette affaire et nous ne pourrons jamais le faire sans être attaqué directement, au risque d'être des poids pour nos alliés. Toutefois, s'ils sont attaqués et insultés, qui pourrait bien nous représenter sur un champ de bataille ?

Être continuellement les aidés plutôt que ceux qui viennent en aide. Le meilleur moyen de retourner dans l'ombre, d'être méprisé à nouveau et de se mettre en danger. Ils ne pouvaient plus se le permettre. Scylla lui sourit fièrement.

Iksandar Leenhardt, si la Marche Terne a besoin de soutien, vous marcherez avec eux.
À vos ordres, Sūrakan.

Elle s'inclinait respectueusement, reconnaissante.

Nous garderons cette reconstitution secrète le temps que vous accomplissiez votre recrutement. Ce n'est pas une urgence immédiate, mais soyez vive et attentive dans vos choix. Lorsque ce sera fait, nous nominerons vos Capitaines à vos côtés, ainsi que vos Soldats, de manière officielle. Cela donnera une source de motivation à toutes les nouvelles recrues.

Mancinia serait également ses yeux et ses oreilles durant ce temps. Celui de voir s'il n'y avait pas de corruption ou de mensonges au sein de ses collègues gradés, en doutant fortement, ceci dit. À tout hasard, elle avait bien un nom sur sa liste qu'elle voulait à ses côtés et qui avait fait ses preuves ; Maximilien. C'était l'évidence, elle le voulait. L'Imprévisible donnerait cette opportunité à l'Obstiné. Ce serait son choix de venir la rejoindre, ou non.

Ah, une dernière chose ... Vous pouvez le dire au Capitaine Katzuta. J'imagine que vous n'entretenez pas les secrets entre vous, n'est-ce pas ?

Mancinia rendit son sourire à sa Reine. C'est sûr que quand il allait le savoir ...



Qu'est-ce que vous avez fait ?!
Je l'ai opéré !
Ce n'était pas une opération, Leenhardt !

Quelques oreilles curieuses écoutaient la conversation alors que d'autres la subissait, un peu gêné. Ils avaient beau s'être éloignés, les éclats de voix des deux médecins étaient assez hautes pour les entendre. Mancinia bouillonnait de rage devant ces accusations injustifiées, surtout qu'avec le relâchement de l'adrénaline provoqué par la bataille et la fatigue exacerbée qu'était la sienne après une lourde opération, une envie soudaine d'étrangler Greyam la saisi. Il avait beau être son superviseur dans son apprentissage médical, cela ne changeait rien au fait qu'elle n'appréciait pas d'être ainsi rabaissée alors qu'une vie avait été sauvée. Étudiante, certes, mais elle n'était pas n'importe qui non plus, merde ! Korthiad, de son côté, avait croisé les bras en les laissant se disputer. Lui non plus, ne savait pas quoi en penser.

Et que vouliez-vous que je fasse d'autre ?! Je l'ai sauvé, oui ou merde ?! Je ne vais pas tolérer de me faire disputer pour avoir secouru quelqu'un au lieu de le laisser crever pour satisfaire votre ego !
L'ego n'a rien à voir là-dedans, bon sang !
Alors pourquoi vous me criez dessus ?!

Il y eu un moment de relâchement, ou chacun des deux reprit son souffle. Crier faisait du bien, finalement.

Je n'arrivais même pas à vous suivre, soupira Greyam en portant sa main sur son visage. Je n'arrivais pas à vous suivre, Leenhardt. Où avez-vous apprit tout ça ?
Je l'ai seulement opéré.

Elle ne savait pas quoi répondre de plus. Sur le moment, tout lui avait paru être d'une logique implacable, comme si cette situation avait été normale et même vécue dans le passé. Comme si quelqu'un lui soufflait la marche à suivre en ignorant les protestations de toute son équipe devant sa prise en main. Elle avait pris la tête de l'opération alors qu'elle ne le pouvait pas, mais les faits étaient là ; elle avait sauvé cet homme. Ensemble, sous ses directives, ses collègues et elle avait permis à ce Marcheur de survivre. Elle n'avait pas failli à son devoir de Première Ligne. Elle n'avait pas contraint Neah a devoir des excuses pour avoir surestimer ses capacités.

... Mancinia, débutait Korthiad comme pour mettre un terme à cette conversation. Vous êtes une faiseuse de miracles.
Docteur ... !

Ce dernier levait la main, demandant à ce qu'on ne l'interrompe pas.

Ce n'est pas la première fois que cela arrive et ce ne sera pas la dernière. Je vous presse de plus en plus pour passer votre examen à la Soranos, mais par Ayurvéda, faites-le. Vous êtes un génie.
... C'est exagéré, soupira-t-elle.
Pourtant, vous seule avez été capable de sauver la vie de cet homme. Vous avez des talents invraisemblables, vous savez ? Je prie de toute mon âme que vous les utiliser à bon escient. Maintenant, cessez cette dispute, nous avons encore du travail ...



Mancinia parcourait les allées assombries au centre du campement où ils s'étaient établis, s'éclairant à l'aide d'une lampe à huile, tout en réalisant la tourner des malades. Il y avait bien des torches allumées, mais la Fille du Soleil devait également se déplacer en dehors des sentiers, puisque de nombreux blessés ne restaient pas tranquilles et allaient ... Faire un tour. Ces idiots ! Elle devait ensuite aller les chercher pour s'assurer que les plaies ne soient pas infectées et que les médicaments étaient pris. S'occuper d'eux avec une conversation était également un excellent moyen de voir que oui, la Marche avait réussi son coup de maître et mis Arcadia à genoux. Si l'ivresse de la victoire avait gagné les plus chanceux, d'autres s'en sortaient avec des blessures allant de l'estafilade à la fracture. D'autres avaient des blessures graves. Mancinia n'avait vraiment pas dormi, mais il était important d'apporter un soutien moral aux blessés. On pourrait croire qu'il n'y en avait qu'un ou deux, des Humains, éventuellement un soldat allié qui n'avait pas vu d'autres opportunités, mais l'Ordre d'Hébé, désormais en ruines, avait voulu emporter pas mal de monde dans la Mort, avec des pièges retors et répugnants. Les Marcheurs en avaient fait les frais. Pas tous, mais certains. En soi, la magie des soigneurs avaient réalisés des miracles, mais Mancinia avait eu l'occasion de voir les limites de celle-ci, pire, avec des enchantements noirs, la magie de soin pouvait devenir quasiment inefficace, voire inopérante !

L'Ordre n'avait pas que des petits soldats sans envergure, certains d'entre eux avaient ainsi piégé les couloirs, les portes, voire des endroits stratégiques. Si certains avaient été neutralisés, d'autres n'avaient pas été vu à temps, mais la puissance contenue dans se pièges amoindrissaient les effets de la magie. Une seule solution dans ce cas précis, Neah l'ayant bien souligner ; les Humains. Ils étaient les seuls à être en mesure d'anéantir ces violents poisons dans le corps des victimes. Quelques médecins angéliques étaient restés en arrière, avec eux, pour soutenir la guérison des blessés. Ils avaient néanmoins eu ce cas particulier entre les mains. Un Marcheur. Un Réprouvé. Ce second détail l'avait d'autant plus surprise que c'était la Canine Blanche qui le lui avait amené. Pourquoi ne pas le laisser-là, ou le ramener chez les siens ? Elle connaissait son mépris pour les Bipolaires, mais aussi, mieux que quiconque, la gifle que lui avait procuré ses souvenirs. Sans doute était-ce la cause de son trouble. Il était reparti presque aussitôt, mais son coeur avait été soulagé et revigorer de le voir, autant dire que sa présence l'avait remis au travail avec dix mille fois plus de volonté. Quant à son patient, eh bien, il était dans un sale état. Contaminé d'une magie dévoreuse, leur Ma'Ahid avait réussi à restreindre sa progression dans l'organisme. Restait ensuite l'énorme problème qu'avait causé la lame ayant transpercé son armure, heurtant son abdomen et transperçant son foie.

Ce n'était rien de bien cruel pour un médecin militaire usant de Kan'Ghar, ça l'était plus lorsque la magie de soin empirait littéralement la blessure. De plus, des éclats de la lame brisée s'étaient enchevêtrées dans ses chairs et dans ses plaies, augmentant la perte de sang. Un enfer. Il n'avait aucune chance sans une réelle opération, mais elle s'avérait rapidement complexe sans matériel et sans une connaissance adéquate. Ses collègues avaient été dépassés, mais elle avait repris les choses en main. Si ce gars était encore en vie, c'était grâce à eux. Le Ma'Ahid avait neutralisé le mauvais sort, ses aptitudes avaient permis d'enlever les éclats au niveau de son abdomen avec l'aide de Greyam et de refermer la plaie avec l'Ange venu les aider ... Ceci dit, c'est son sang-froid avait évité les dégâts les plus lourds, au niveau de son coeur. Car c'était sur ce dernier point que c'était concentré le problème et la méconnaissance de ses paires. Arrivé dans un état de choc après une perte de sang majeure, la tension du Réprouvé demeurait terriblement basse et son organe battait de plus en plus lentement. Affaibli, il avait convulsé subitement ; une chose comparable à son Mal Sacré, mais n'avait heureusement pas une source hémorragique, puisque le gonflement de la jugulaire ne correspondait pas. Ses collègues avaient été dépassés en ne comprenant pas d'où venait la source, mais elle, curieusement, avait ressenti d'instinct ce qu'il fallait faire.

Une péricardite.

Mancinia avait saisi une aiguille de gros diamètre, sous le regard effaré des autres, pour la lui planter dans le coeur et drainer le sang qui s'accumulait, cela lui avait permis de résoudre la tamponnade cardiaque. Pour le reste, elle avait ouvert pour réparer le problème, ou c'était la mort assurée. Ce genre de chirurgie ne demandait pas beaucoup de temps si l'on avait les gestes techniques et la précision nécessaire, tout en écartant les complications éventuelles. Elle savait n'avoir que dix minutes pour éviter de nouvelles convulsions. Son second improvisé avait épongé le sang pour une meilleure visibilité. Et elle avait opérée. Pendant plusieurs heures, en essayant de limité la perte de sang. Et ils avaient réussis. Ce souvenir la laissait soulagée tandis qu'elle pénétrait dans la tente pour voir comment ce portait ce miraculé. Étendu sur son lit de fortune le plus confortablement possible, sonné encore de tout ce qu'ils avaient entrepris à son encontre, le Marcheur mettrait du temps à se remettre de cette bataille. Ses yeux ouverts, un peu hagards et délurés, il observait l'Humaine qui posait sa lampe sur le sol et qui prit un tabouret pour s'asseoir à ses côtés.

Comment vous vous sentez ?
Je vais bien, répondit-il d'une voix pâteuse.
Vous ne ressentez pas d'essoufflements ou de vertiges ?
Pas que je sache.
C'est une bonne chose ... Passons aux autres symptômes !
... C'est obligé ?
Ou vous ne sortez pas d'ici.

Il jura, maugréa, mais cela ne l'impressionnait pas. Mancinia gardait son sourire, qui avait quelque chose de presque effrayant avec la flamme vacillante de la lampe en contrebas, lui donnant un air presque macabre.

Impitoyable ces Humains, lâcha-t-il.

3552 mots
Péricardite - inflammation de la membrane entourant le coeur, l'accumulation du sang y produit une diminution du rythme cardiaque.
Tamponnade Cardiaque - compression du coeur due à l'accumulation de liquide créant une pression empêchant ce dernier de se remplir correctement. Cela entraîne une chute importante de la pression sanguine, qui peut être mortelle.



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Isiode et Isley
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Isiode et Isley
Mer 29 Déc 2021, 06:03



Dans mon dos, j’entendis avec une distinction claire la voix d’Isley parmi tous les murmures qui s’éparpillaient dans le rassemblement. Il était revenu? En me retournant, je m’aperçus qu’il posait des questions à un autre Soldat, ce dernier l’incitant pourtant à partir vers les portails. Dans les bras de l’instructeur, une jeune femme reposait en sueur, visiblement mal en point et s’il opposa quelque résistance à la poigne de son homologue, Isley finit par esquisser de lui-même les quelques pas qui le séparaient du support de téléportation, sans oublier de porter une œillade dans son dos, intrigué. Dans cette fraction de seconde, nos regards se croisèrent et nous nous dévisageâmes de loin, silencieux. Pourtant, ce simple échange suffit à ce que nous nous comprîmes sur-le-champ, mon Aisuru traversant le portail avec la jeune femme, tandis que je reportais mon attention sur le guerrier à l’armure d’azur. Il n’y avait plus à s’inquiéter de quoi que ce soit : malgré la configuration quelque peu troublante, la situation avait rapidement été prise en charge et les perpétrateurs de l’agitation se trouvaient désormais sous le poids des Marcheurs, appréhendés, leurs mouvements restreints par des menottes qui leur avaient été glissés aux poignets. On les obligea à se relever et si deux d’entre eux obtempérèrent, les dents serrées, le troisième faillit tomber tête première sur le pavé, son équilibre vacillant dangereusement en raison de la vilaine blessure qu’il avait à la jambe. Dès que les détracteurs furent éloignés de la foule, quelques secondes suffirent pour arracher cette dernière à sa paralysie générale. Les Soldats et les Marcheurs reprenaient leurs directives alors que les civils progressaient vers les portails pour compléter le plus rapidement possible l’évacuation. Cela étant dit, quelques militaires entouraient toujours le guerrier à l’armure d’azur. Deux d’entre eux se détachèrent pour aller récupérer quelque chose aux pieds de celui-ci, et ce n’est qu’au moment où ils la prirent en main – « cette chose » – que nous pûmes la revoir dans notre champ de vision. Le cadavre de la jeune femme, instigatrice de cette soudaine frénésie anarchique, se fit traîner un peu plus loin, à l’écart, et de là, un Soldat s’occupa de la brûler jusqu’aux os. Malgré cela, mon regard ne pouvait se détacher du guerrier à l’armure d’azur, de ses épaulières au sommet hérissé, de son dos finement dissimulé par la cape délicate qui descendait depuis ses omoplates.

« Isiode? »

Mon Aisuru était parfaitement immobile, me tournant le dos. Je pris une grande inspiration, l’appelant de nouveau. L’exclamation qui pinça mes cordes vocales en étonna quelques-uns dans mes environs, les arrachant à leur concentration du moment, mais bien rapidement, la majorité se détourna de la scène, continuant d’avancer. En revanche, le concerné ne réagissait pas le moins du monde, comparativement au reste du groupe, certains regards le dévisageant toujours depuis leur position, fascinés et interdits. Droit comme un jalon, silencieux comme une sépulture, il était figé dans cet état statique que nous lui connaissions depuis quelques minutes déjà, et s’il ne s’était agi de l’étreinte qu’il venait de raffermir autour des épaules de l’Immaculé qu’il protégeait au creux de ses bras, nous aurions facilement pu supposer qu’il nous ignorât volontairement ou qu’il ne nous entendît pas.

« Reprends tes esprits! »

Malgré mes appels répétés, il restait pétrifié. Poings serrés, j’initiais ma marche jusqu’à sa hauteur, résolu à le tirer dans notre réalité. Si les combats étaient encore à bonne distance de notre position actuelle, nous ne pouvions abandonner notre vigilance pour autant : ce qui s’était produit venait de nous le rappeler brusquement. D’autres Chevaliers se cachaient peut-être encore dans l’ombre, prêts à profiter de chaque occasion à leur disposition pour fuir les flammes qui se nourrissaient de leur Citadelle. Nous devions bouger, nous devions mener ces gens hors des remparts, vers une nouvelle liberté, plus sûre et assurée. Notre devoir était de les protéger de tous les dangers et nous n’avions pas le luxe de nous arrêter, de nous exposer ainsi : nous devions quitter ces murs le plus rapidement possible. Une poignée de mètres me séparait encore de l’Immaculé. Je soufflais son nom une fois de plus à travers les détonations et la clameur de la bataille, mais à ce moment précis, au contraire de toutes mes autres tentatives, sa tête se tourna lentement dans ma direction. Il se réveillait enfin. Pourtant, je n’arrivais pas à ressentir une quelconque joie ou soulagement à ce constat : les circonstances étaient bien trop particulières pour que je me sente véritablement rassurée de sa condition.

« Est-ce que tu m’entends maintenant? » Le questionnais-je d’une voix plus posée.

Envahi par un céruléen singulier et éblouissant, qui noyait l’intégralité de ses yeux, de leurs pupilles sombres jusqu’à leur blanc, son regard plongea dans le mien presque instantanément, soutenu et oppressant. Il me tirait vers lui, inexorablement, et sans m’en rendre compte, je repris le pas que j’avais inconsciemment stoppé, avalant les quelques mètres qui me séparaient toujours de lui. Dans un mouvement, il pivota, fit volte-face, le poids de son regard écrasant mes épaules plus lourdement encore. C’était comme s’il prenait petit à petit conscience de notre présence après tout ce temps et, en l’étudiant de plus près, je ne pus empêcher de remarquer certains détails troublants. Sa respiration était bruyante, hachée, écourtée par le casque qui lui recouvrait l’ensemble du crâne et pourtant, il m’était possible de voir son souffle se condenser à la frontière de son heaume. Un frisson escalada ma colonne vertébrale. Alors cette brise soudaine qui nous avait traversé et qui continuait de courir sur notre épiderme provenait véritablement de lui. En m’attardant plus consciencieusement sur son allure, je me fis surtout la réflexion que tout ceci était due à sa transformation. Tout son corps était prisonnier de cette cuirasse dont la matière rappelait vaguement celle de la glace et du givre, son visage masqué ne laissant aucun espace pour observer ses traits, à l’exception de ses deux prunelles qui reluisaient d’un reflet azurin luminescent. Luttant pour déglutir, je tendis ma main jusqu’à son coude dans l’espoir appréhensif de lui tirer quelques mots de la gorge, mais au lieu de paroles, je n’obtiens que le corps endormi de l’Ange qu’il tenait dans ses bras. Isiode me tendait le réfugié et, désormais cloué dans cette position, il attendait et attendait. Que je le transporte à mon tour? Si mon Aisuru ne me partagea aucun mot, je sus instinctivement ce qu’il voulait. Dubitative, je finis par prendre l’Aile Blanche contre ma poitrine, m’assurant qu’il se portait bien. Cependant, dès qu’il fût soustrait de sa charge, Isiode se mit à osciller dangereusement. Des fissures claires et tranchantes pénétraient la protection inviolable de son armure, fracturant ses défenses; son haubert de glace. Et dans une soudaine rupture, l’armure éclata, libérant raies de lumière bleutées et cristaux de givre fracturés, avant de s’évaporer; dans une soudaine rupture, le pied d’Isiode perdit toute stabilité, entraînant la chute de son corps jusqu’au sol; et dans une soudaine rupture, la sentinelle de Glace tomba à genoux devant moi, l’œil médusé, égaré, comme s’il venait de s’éveiller d’un mauvais rêve.

« Re…? »

Mais sa voix se trancha sèchement au fond de sa gorge, ses yeux virant dans leur orbite, comme s’il perdait connaissance. Vite, un Soldat accouru à ses côtés pour le soutenir.

« Ça… va. Une expiration, et presque immédiatement, Isiode voulut se détacher du Soldat qui le supportait. Je vais bien.

- Capitaine Yüerell, vous vous êtes évanoui.

- Ce n’est rien. J’ai seulement… un mal de crâne horrible. La contraction de sa mâchoire distordait effectivement son visage. Qu’est-ce qui s’est passé? »

Les guerriers présents et moi-même écarquillâmes les yeux à cette question. Était-il sérieux?

« Isiode, tu… L’acuité de son regard se braqua dans ma direction, déviant un instant sur le minois du jeune homme qui dormait toujours dans mes bras. Tu t’es transformé.

- Je… crois qu’il s’agissait de la Forme Angélique. Le Soldat qui le maintenait toujours par l’épaule pointa vaguement le pendentif qui se balançait à son cou. La pierre de votre collier, s’agit-il d’une Omije? Mon Aisuru acquiesça après une hésitation, perdant le bleu de ses yeux sur la surface de la pierre. Elle s’est mise à briller. Une observation somme toute singulière, puisque tout le monde était simplement surpris par la soudaine transformation du Capitaine. Mais vous n’avez pas été annoncé comme un Élu d’Hel’dra… Comment est-ce possible? Ce ne serait pas uniquement les Élus qui l’éveilleraient, dans ce cas? »

Isiode mit brusquement fin à son monologue en soulevant sa main. Puis, doucement, il ancra son regard sur mon visage, insistant.

« Peux-tu m’expliquer ce qui est arrivé, Muramasa? Tout ce que j’ai en tête est si… vague. »

Lentement, j’acquiesçais d’un hochement de la tête.



Mes pouvoirs m’avaient alarmés. Étendus à leur maximum pour des besoins de sécurité, j’avais pu ressentir les sentiments de tous ceux et celles se trouvant à proximité. Il s’agissait d’une véritable tempête émotionnelle, qui avait mêlé l’anxiété et l’émoi, la hâte et l’agacement de chacun des civils présents. Si je n’avais possédé ma force et ma capacité à me détacher de toute sensibilité, aucun doute que j’aurais rapidement été submergé par ce chaos sentimental. Quoi qu’il en soit, il était évident que chacun ici avait envie de partir de cet endroit avant que nous nous trouvions entre deux feux impitoyables. Malgré cela, j’éprouvais un sentiment particulier depuis un certain temps, poignant et violent; un sentiment de pure terreur.

« Excusez-moi? Puis-je m’entretenir avec vous un instant? »

Je m’étais rapproché de l’émetteur d’un tel effroi, le jeune homme aux cheveux blonds remontant tranquillement ses grands yeux dans ma direction. Ses pupilles tremblaient et, furieusement, les battements de son cœur s’étaient accélérés.

« Est-ce que vous allez bien? »

Cela prit un certain temps, mais il avait fini par acquiescer d’un léger signe du menton.

« Tout va bien. Je suis un peu nerveux, c’est tout. J’ai hâte de partir d’Arcadia. »

De cela, il avait paru extrêmement sincère et pourtant, ce n’était pas que de nervosité qu’il avait tremblé : quelque chose l’épouvantait vraiment.

« … Madame? Une demoiselle, aux longs cheveux bruns, se tenait à ses côtés, l’expression de son propre faciès n’étant que nerfs et nœuds. Pouvez-vous sortir de la file? Elle n’avait pas bougé, avait hésité, balbutiant une excuse d’une faible voix tout en se serrant au blondinet. C’est un ordre, avais-je poursuivis calmement. Maintenant. »

Et à partir de cet instant, tout était allé très vite. La jeune femme avait reculé d’un pas, entraînant le blond dans son sillage avant de coincer son cou entre elle et sa lame. Aussitôt, nous nous sommes mis en garde, l’inconnue criant qu’elle partirait de ce trou, qu’elle n’avait jamais signé pour être ainsi jeté dans la gueule du loup. En comprenant l’issue désespéré de ce conflit pour l’Ordre, la Chevalière n’avait plus voulu que sauver sa propre chair.

« Vous ne pouvez jeter la pierre que sur vous-mêmes. Cela n’a rien à voir avec ces gens. Lâchez-le.

- Pas tant que je n’aurais pas recouvert ma liberté. »

Vous ne la méritez pas de toute façon. C’est ce qui avait brûlé ma langue; c’est ce que je m’étais retenu de dire, esquissant un pas dans leur direction.

« Ne bougez pas! Ne bougez pas! Sa poigne s'était consolidée autour du manche de son arme, alors qu’elle reculait rapidement jusqu’à l’un des portails. Si quelqu’un fait quoi que ce soit, je lui tranche la gorge instantanément.

- Lâchez-le.

- Je dois partir d’ici! »

Je m’étais répété, la jeune femme restant sourde à mes propos, sa dague tâtant dangereusement la pomme d’Adam de son otage. Le jeune homme avait voulu se défaire de son emprise, mais son opposante était restée plus forte que lui, marquant sa chair d’un avertissement criant : une ligne rouge et fine était apparue sous le fil de la lame. L’Ange prisonnier avait tremblé de tout son être, ses yeux s’humidifiant, ses doigts accrochés aux poignets de son assaillante avec désespoir.

« Libérez-le. Ces gens ont suffisamment subi durant cette vie. Ils n’ont pas besoin de tout cela.

- Moi aussi! Je n’ai rien fait pour mériter que l’on me laisse crever comme une chienne dans cet enfer! Où sont nos graaaands pontes quand ont à besoin d’eux, hein? Bordel! Il n’est pas question que j’meure ici! Alors, vous allez sagement me laisser partir! »

Un battement; un sursaut explosif, inopiné, dans ma cage thoracique, alors que mon regard s'était acéré, s'était assombri.

« La laisseras-tu vraiment blesser l’un des tiens? Avais-je soudainement entendu à mon oreille, la voix du Dévoué s’amplifiant à l’intérieur de mon crâne. Tu t’es promis de les protéger, et voilà le résultat. C’est pitoyable, vraiment. »

J’avais clos mes paupières un instant, posant une œillade sinistre dans sa direction. La température autour de moi avait chuté et mes yeux, de plus en plus bleus et brillants, s’accrochaient à son visage, tels des rapaces affamés. N’importe qui, qui se serait perdu dans le céruléen de mon regard à ce moment précis, aurait eu la même impression : durant ce contact, il lui avait semblé que j’allais la décapiter. Tout son corps s’était immobilisé, un froid glacial et virulent pénétrant sa chair jusqu’à ses os. Elle avait voulu reculer d’un dernier pas, mais suspendue son geste dès lors que mes lèvres s’étaient écartées :

« Vous ne partirez nulle part. C’était une promesse. Vous resterez ici, dans cet enfer, telle est la véritable place pour une personne de votre espèce. »



« … Ensuite, cette armure t’a complètement enveloppée, de la tête jusqu’aux pieds. Une Lame Fantôme s’est créée à la hauteur de sa main et la trancher. Tu ne semblais répondre que par l’instinct. On avait beau crier ton nom, tu n’écoutais pas, tu n’entendais pas. De fait, tu as aussitôt foncé vers l’otage pour le rattraper et le protéger, matérialisant une nouvelle Lame dans la foulée. En désignant les cendres du cadavre brûlé, Muramasa renchérit : Tu l’as transpercé avec ton invocation. Droit dans le cœur. Par la suite, tu as tourné la tête en direction de la foule. Personne n’a osé bouger jusqu’à ce que, de nulle part, apparaissent de nouvelles Lames Fantômes. Elles sont tombées sur ces trois autres Chevaliers qui se sont mêlés à la population civile pour s’enfuir. Ils ont été blessés, suffisamment pour les handicaper, mais pas pour les tuer. Ren émit une pause, sentant alors un tremblement incontrôlé se répercuter contre elle, le jeune homme dans ses bras prit de soubresauts violents. Et lui s’est évanoui pendant ce temps-là… »



Lentement, il sentit une force le tirer hors de son subconscient. Pourtant, si les premières secondes, il ne voulut se subjuguer à cet appel silencieux, indifférent à tout ce qui l’entourait, le jeune homme finit par battre des paupières. Lourdes, il avait l’impression de soulever une montagne de pierres à chaque clignement d’yeux. Cependant, dès que la lumière du ciel frappa sa rétine, il recouvrit de nouveau ses pupilles, une grimace douloureuse remodelant la douceur de son faciès.

« Ne bougez pas, s’il-vous-plaît. La voix était avenante au creux de ses oreilles. Vous avez eu un sacré choc. Essayez d’y aller doucement. »

Hagard, l’Ange n’avait pas la force d’acquiescer de vive voix, mais il parvint néanmoins à expirer une longue respiration, certaines réflexions alimentant la curiosité de son esprit.

« Où sommes-nous…? »

Il sursauta légèrement. Était-ce véritablement sa voix? Son timbre était bien plus rauque que d’accoutumé, comme si des gravelas lui avaient été enfoncés dans la gorge pendant sa perte de conscience.

« En sécurité, avec l’Armée angélique.

- Nous sommes sortis d’Arcadia?

- Oui. Et nous sommes loin des combats. Vous n’avez pas à vous en faire. Vous êtes sous notre protection maintenant. »

Le blond hocha lentement de la tête, forçant ses paupières à s’ouvrir de nouveau. Dans la brume colorée qui apparut devant ses yeux, l’Immaculé parvint à distinguer deux silhouettes aux contours incertains, mais plus les secondes défilaient, plus les formes et les sons autour de lui se concrétisaient. Il reconnut alors l’un des deux visages qui se tenaient au-dessus de lui et quelques mots s’échappèrent involontairement de la barrière de ses lèvres, surpris.

« Vous êtes…! »

Mais l’Ange aux cheveux blancs ne le laissa poursuivre, freinant sa verve par un sourire rassurant et une main bienveillante sur son épaule.

« Comment vous sentez-vous? »

Pantois, le jeune homme souleva l’une de ses mains jusqu’à son cou. La lacération que son assaillante lui avait laissée n’était plus.

« Je ne sens pratiquement plus rien. Mais j’ai un peu mal à la gorge.

- Vous ne devriez plus être en douleur, mais vous ressentirez inévitablement quelques incommodités en parlant, lui partagea la femme aux côtés de son gardien.

- Merci infiniment, Faith, de t’être assurée de son état.

- Ce n’est pas la peine de me remercier. »

Vaguement, le visage du rescapé se porta sur le faciès de la jeune femme qui se tenait à la droite de mon frère. Elle se permit une œillade dans sa direction, le couvant d’un sourire charmant et réconfortant. S’il lui répondit par un rictus légèrement distordu, il finit par reposer son regard sur les épaules de son gardien, sa voix, hachée par l’épuisement, tirant quelques paroles de sa gorge serrée :

« Je vous serais à tout jamais reconnaissant. Merci beaucoup. Vous êtes celui qui est venu me sauver. Je m’en souviens.

- Ce n’était pas moi. Portant l’océan de ses mirettes droit devant lui, le soldat lui indiqua une direction, le regard du réfugié suivant naturellement le bout de son index. Mon frère est celui qui vous a protégé de cette Chevalière. »

Doucement, ses yeux s’arrêtèrent sur moi. Je sentis son regard couler sur ma nuque, descendre dans mon dos, jusqu’à ce que je porte moi-même une œillade par-dessus mon épaule. Instantanément, il eut contact entre nos prunelles.

« Nous avons évacué la population civile et, maintenant, est-ce que tu penses sincèrement pouvoir rejoindre les combats? »

Détachant mon regard du sien afin de le plonger dans les iris claires du Capitaine Endeover, j’opinais d’un signe de tête, résolu. Hayden, quant à lui, étudia mon expression avec minutie.

« Il va bien désormais, je peux vous le garantir. »

Vifs, nos yeux tombèrent sur le faciès de la rousse, qui m’auscultait en biais.

« Vous ne dîtes pas cela seulement parce qu’il le souhaite, j'ose espérer.

- Si ma tâche est de répondre aux souhaits de mon Aisuru, mon intérêt reste tout de même de m’assurer de son bien-être. Jamais, je ne l’entraînerais, en toute connaissance de cause, dans une situation qui risquerait de le nuire. »

Le Capitaine Endeover admira l’Orine avant de laisser filtrer un sourire sur son faciès.

« Très bien, si vous le dîtes, mademoiselle Muramasa. Il reporta son visage dans ma direction. Nous reparlerons de ce qui s’est produit, après la bataille, avec les officiers. Une fois de plus, j’acquiesçais en silence. Dire que tu viens d’éveiller la Forme Angélique, c’est… »

Les mots lui manquassent durant un bref moment, mais au lieu d’abonder la conversation en ce sens, je le ramenais aussitôt sur le sujet principal.

« La bataille n’est pas encore terminée, Capitaine. J’offris un dernier regard en direction de Ren, de mon frère et de l’homme que j’avais protégé. Allons-y. »


3 210 mots



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Priam et Laëth
Jeu 30 Déc 2021, 12:58




Le siège d’Arcadia

Evénement | Priam & co




Note : Ce message donne la réplique (mais juste une fois, normalement) à celui d'Adam (deux fois, héhé).

Christian Reindl & Lucie Paradis – Gefion

Le roulis des vagues murmurait contre la coque. Les souvenirs de navire étaient rarement agréables pour Freyja. Comme pour y échapper, ses pensées retournaient inlassablement les mêmes problèmes. Accoudée au bastingage, elle fixait l’horizon. Son frère se tenait près d’elle, les mains posées sur la rambarde de bois, le buste droit et le regard lointain. « Tu te rappelles de Lucius ? » Il tourna la tête vers elle, puis acquiesça. L’enfant était venu manger chez eux, en même temps que son père et que sa sœur, Hélène. « Je l’ai retrouvé, au Berceau Cristallin. Il m’a parlé de Dastan. » L’Ange fronça les sourcils. « De Dastan ? Ils se connaissent ? » Elle haussa les épaules. « Il n’a pas prononcé son nom, mais il m’a dit… Il a mentionné des rêves, et il m’a dit que dans ceux-ci, il y avait une personne qu’il aimait, qui lui faisait penser à l’orange et à l’odeur du blé, et qu’il savait liée à moi. » Priam sonda les prunelles de sa sœur. « L’orange comme les cheveux de Dastan, l’odeur du blé comme à Lumnaar’Yuvon, lié à moi parce qu’il est mon frère. » Il demeura muet. Il aurait pu rétorquer qu’il pouvait s’agir de n’importe qui, ou qu’il s’agissait d’un hasard, mais il aurait fait preuve d’une mauvaise foi sans borne. Comme sa cadette, et sans pouvoir l’expliquer, il n’ignorait rien du pouvoir de certains songes. Il demanda, de façon plus rhétorique qu’autre chose : « Pourquoi rêverait-il de lui ? » - « Je ne sais pas. Il m’a aussi parlé d’Érasme Salvatore. » - « Le Prince Noir ? » Elle opina. « Un Magicien, un Réprouvé et un Sorcier ? » Laëth baissa la tête et soupira. « Pas seulement. Il y avait deux filles, aussi. Eméliana Salvatore, et Astriid. C’est une Ygdraë. » La fratrie s’exprimait à voix basse, peu désireuse que les Réprouvés entendissent leur conversation. « D’après ce que j’ai compris, Lucius a déjà rencontré les deux filles, ainsi qu’Érasme. Un peu avant le bal de Lagherta, je crois. » Priam la scrutait. Son cerveau s’affairait à déterrer des informations et cherchait à créer des connexions. « Eméliana et Astriid sont rousses, elles aussi. Mais je ne crois pas que le garçon qu’il perçoit en rêve soit juste une manifestation des deux. Je crois vraiment que c’est Dastan. » - « Et quel est le rôle de Dastan, dans ces rêves ? » - « Je ne sais pas. Lucius m’a simplement dit qu’il avait l’impression de l’avoir volé à Érasme, et qu’il lui en voulait pour cette raison. » Elle se redressa et posa à nouveau son regard sur son frère. « Je ne sais pas ce que ça veut dire. Mais je ne suis pas certaine que ce soit un simple rêve. » Elle inspira. « La dernière personne que j’ai vue dans un rêve avant de la rencontrer, c’était Adam. » Priam arqua un sourcil.



Quand il se retrouva face à Dastan et Érasme, les confessions de sa sœur lui revinrent avec force. Ses dernières réserves s’évanouirent. Les deux garçons se connaissaient. La gêne de son frère ne fit que confirmer tous ses soupçons. C’était semblable à l’assemblage d’une chaîne. Les maillons se soudaient les uns aux autres, soumis à une mécanique infernale, à laquelle ils ne pouvaient se soustraire : à termes, ils étaient si bien liés que l’ouvrage ne pouvait être détruit. Une sensation de fatalité flotta dans son estomac, désagréable. Quels desseins destinait-on au Prince Noir et à un Réprouvé de Bouton d’Or ? Quel futur pouvait réunir deux ennemis ancestraux, sinon une inimitié constante et une distance toujours plus importante ? De quelle façon un Magicien et une Ygdraë pouvaient-ils s’y retrouver mêlés ? Où se situait le point de convergence ? Une autre personne les liait-elle ? Qui ? Dastan ne sortait jamais de Lumnaar’Yuvon. Il fronça le nez. A priori. Il avait disparu depuis quelques temps déjà – et si tout le monde croyait qu’il sillonnait les Terres de Lumnaar’Yuvon, visiblement, on se trompait. Qui pouvait-il connaître qui fût lié aux quatre autres ?

Malgré sa stricte déontologie, Priam céda. Tandis que sa sœur créait des armures aux deux adolescents, il sonda l’esprit de son frère. Celui-ci ne recelait pas de réponses à toutes ses questions, mais ses souvenirs apportaient des éléments de compréhension intrigants. Il se rappelait les murs de ce lieu où il était apparu sans être lui-même. Il se rappelait y avoir croisé Dastan et Érasme. Il ne pensait pas qu’ils y étaient restés, ni qu’ils s’étaient revus ensuite. L’Aile Blanche quitta l’esprit du Réprouvé et inspira profondément. Il toisa Érasme. Il aurait pu violer ses pensées, afin de mieux comprendre ce qui le reliait à Lucius et à Eméliana, mais il s’abstint. Il ignorait jusqu’à quel point la couronne sorcière le protégeait.




La guerre déchire. La guerre sépare. La guerre éloigne. La haine s’écartèle pour dévoiler toutes ses plaies purulentes, ses colères dévorantes et ses ressentiments suintant. L’amour s’étiole et s’arrache ; il danse comme un fou emporté par la tempête du ciel et ses débris s’égrainent au rythme frappé par la haine. En quelques secondes, la violence de la bataille emporta Laëth, Érasme et bientôt Dastan. Priam s’inquiétait pour sa sœur sans perdre de vue qu’elle avait plus de chances de s’en sortir que tous les autres : au combat, elle était la plus aguerrie d’entre eux. Il ne lui apporterait rien, sinon de la distraction et du souci. Le sort du Prince Noir lui importait peu. S’il mourait sur le champ de bataille, les Sorciers se questionneraient sur les raisons de sa présence, mais il était si bien mêlé à leurs rangs qu’ils pourraient croire qu’il s’y était infiltré de son propre chef. Il n’y aurait rien à prouver contre les Réprouvés. Et sa disparition serait sans doute un grand soulagement pour le futur, celui de tous comme celui de Dastan. La vie du rouquin méritait d’être protégée. Dans l’esprit de Priam, c’était le devoir d’un frère à un autre. C’était l’amour qui s’agglomérait, malgré la tempête.

Une sensation le pourfendit de part en part. Estomaqué, il eut un flash. Deux grands yeux jaunes qui dardaient sur lui des rayons perçants. Une sauvagerie hurlante. Un instinct virulent, ancestral, impitoyable. Le désir de protection ; et le monde, qui tout à coup, change. Sa peau et ses cheveux disparurent au profit d’une épaisse fourrure sombre. Sous le soleil d’Arcadia, ses crocs luisirent d’une lueur macabre. Ses sens l’assaillirent, et la bête fila entre les soldats, à la recherche de cette tête rousse qui ne devait pas mourir.




Les mâchoires du loup claquaient dans l’air, quand elles ne se refermaient pas sur un amas d’os à briser. Ses larges pattes pourvues de griffes lacéraient sans relâche et le portaient à travers le chaos environnant. Dans son élément, il bondissait et serpentait entre cette épaisse forêt de combattants et de cadavres. Sur sa droite, un mouvement attira son attention : une foule hétéroclite de guerriers s’amassait autour d’un point. La bête bifurqua brusquement et courut vers l’épicentre du mouvement. S’agissait-il de Dastan ? Il se faufila entre les soldats, en bousculant certains au passage. Lorsqu’il parvint près de leur cible, il constata aisément qu’il ne s’agissait pas de l’adolescent.

Son regard jaune croisa celui de l’Humain. Sous l’effet d’une sensation indéfinissable, ses poils se hérissèrent en une crête au-dessus de son dos, et ses babines se retroussèrent pour laisser entendre un grondement grave et profond. Il n’allait pas à l’encontre de l’homme étalé au sol, au contraire. Le canidé se rua sur l’une des femmes qui essayaient d’attenter à la vie de l’individu : il sauta et lui broya la gorge. À un homme qui s’élançait vers sa proie, il arracha un bras. Il priva les suivants de jambes, de têtes, de lambeaux de chair déchirés, de vie et de paix ; il abattait sur eux sa sentence à la manière de tout loup qui défend les siens – avec violence, hargne et détermination. Peu importait le carnage tant que la sécurité était garantie.

Bientôt, face aux babines dégoulinantes de sang de la bête, ceux qui avaient encore quelques griefs contre l’Humain s’éloignèrent. Certain d’être tranquille au moins quelques secondes, le loup pivota vers son protégé et revint vers lui, boiteux – sa hanche avait été touchée plus profondément que le reste de son corps, et saignait. Il s’arrêta devant le brun, toujours assis, et plongea ses yeux dorés dans les siens. Il s’exprimait à la manière des bêtes : seul le silence retranscrivit les émotions qui le traversaient une à une, avec la douceur d’un lointain murmure chantant. C’était bien un chuchotement oublié, mélodique et mélancolique. Un ailleurs qui ne lui appartenait pas et qui pourtant n’était qu’à eux. Délicatement, le loup posa son museau humide sur la joue de l’homme, et la lécha.




Il y avait quelque chose d’important, à propos de cet homme. Le loup le percevait, sans être capable d’identifier cet élément – Priam n’en aurait pas su plus. Il ne l’aurait pas reconnu. Il n’était pas habitué à lui comme sa sœur l’était : il y était habitué d’une autre façon, plus profonde et poussiéreuse. Une façon oubliée et toujours éphémère ; incompréhensible parce qu’elle ne lui appartenait pas véritablement. Les mains du brun glissées dans sa fourrure lui arrachèrent des frissons. Il sentait les endroits où elles se frayaient un chemin sans difficulté, tout comme les zones où l’humidité du sang accrochait leur peau lisse. Cet inconnu n’était pas un guerrier. Aucun doute ne pouvait subsister à ce sujet. C’était quelqu’un à protéger. La bête laissa l’homme poser son nez sur le sien. Elle sentit ses odeurs avec force ; celle de ses vêtements, mais aussi de sa peau et même de sa bouche. Le parfum ferreux du sang ne parvenait pas à étouffer toutes les brèches de vie qui pourfendaient le champ de morts.

Le loup regarda la bague au doigt du brun, puis reporta ses iris jaunes sur lui. Comprenait-il ? Ses prunelles brillaient d’une intelligence vive, intense, presque humaine – mais l’homme derrière la bête avait-il encore conscience de son existence ? Se rejoignaient-ils quelque part ? Savait-il le rôle qu’endossait ce bijou ? Il scruta les yeux de son protégé, puis s’avança encore et vint caler sa large tête dans son cou. Il y émit un grognement de contentement, les paupières fermées. Durant quelques secondes, il demeura ainsi, dans ce lieu où rien n’existait sinon leur étreinte. Puis, il recula, laissant une large traînée rouge sur la peau de l’homme. Il le scruta une dernière fois, avant de faire demi-tour et de s’éloigner à grandes foulées. Il n’avait pas oublié ce garçon roux.




Ses cheveux avaient la couleur du sang. La peau de l’adolescent en était si bien imbibée que le loup n’aurait presque pas su dire si sa tignasse en était trempée ou s’il s’agissait bien de sa teinte naturelle. Ou peut-être lui rappelait-il les flammes ? Son corps tourbillonnait et projetait des gouttes sombres autour de lui, comme des cendres crachées par un feu. Il bougeait de façon erratique, même pour ce chaos dans lequel il évoluait. Lui non plus n’était pas un guerrier aguerri. Il le serait sans doute un jour, mais pas tout de suite. Peut-être deviendrait-il un brasier ou même un incendie ; il ne ressemblait pour l’instant qu’à un feu follet – vif, turbulent, éphémère. À l’instant où cette pensée frappait le loup, l’enfant disparut. L’animal jappa et bondit vers l’ancien emplacement de son second protégé. Son odeur imprégnait encore l’air, mais ne se dirigeait dans aucune direction. La bête scruta les alentours. Rien.

Puis, une douleur fulgurante lui perça l’abdomen. Une série de couinements de souffrance fit trembler sa mâchoire. Il tituba, le sol se déroba sous ses pattes massives, et il tomba dans un bruit sourd. Haletant, la gueule béante, il fixait un point devant lui, quelque chose de flou et d’inaccessible. Son palpitant tambourinait, comme s’il cherchait à s’échapper de cette enveloppe qui le maintenait prisonnier d’instants d’agonie. La douleur lui vrillait les tripes, jusqu’à un point où elle fut si aiguë qu’il sombra dans l’inconscience. Son corps retrouva la forme de celui d’un homme, toujours vêtu de cette armure sombre. Une plaie purulente, piquetée de magie noire, marquait son ventre. Son visage était pâle comme la mort et paisible comme le sommeil. À son tour, il disparut.



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Adam Pendragon
Jeu 30 Déc 2021, 19:52



[Évent Top-Sites] - Le siège d'Arcadia 8au1

Le siège d'Arcadia


Je laissai ma tête tomber en arrière. Le mur la stoppa, dur et droit, comme la conversation qui se tenait dans la pièce. Pas de sexe, juste des militaires en pleine discussion sur ce qu’il convenait de faire ou non. Depuis ce qu’il s’était passé au Cœur Vert, les rumeurs n’avaient cessé de monter.

« Adam, vous pourriez participer davantage. Après tout, c’est vous qui avez discuté avec le Sorcier. »

Le Sorcier. Certains préféraient ne pas prononcer son nom, comme si le faire aurait suffi à l’invoquer.

« D’ailleurs, toujours pas de problèmes de santé ?
— Non. »

Je m’étais tellement masturbé en pensant à Val’Aimé Taiji que sa simple mention suffisait à m’arracher une érection. Elle était cependant douloureuse mentalement. L’avantage restait qu’il ne m’effrayait plus tant que ça. Le désavantage c’est que ce n’était pas une bonne chose. N’importe quel abruti sait que mettre sa main dans le feu brûle. Avec mon procédé, j’étais en train d’oublier que le Chancelier était on ne peut plus contagieux.

Depuis des jours, je voyais des médecins. C’était une obligation. J’aurais pu garder les menaces à peine voilées du Mage Noir pour moi mais j’avais préféré être précis dans mon rapport, sans rien omettre, même mes propres sous-entendus douteux. Puisque la situation était périlleuse, personne ne m’en avait voulu de l’avoir gérée de cette façon. A vrai dire, à part les Déchus incultes et inexpérimentés, tous savaient à quoi s’attendre. Me reprocher de coucher avec les agents diplomatiques des autres races aurait été faire preuve d’une mauvaise foi absolue. Quand j’étais envoyé quelque part, le sous-texte comportait des mentions interdites aux plus jeunes. La diplomatie et le sexe : un vaste sujet.

« Et qu’en pensez-vous ?
— De qui ? »

Un sourire passa sur les lèvres de l’un des Déchus. Il avait compris que je faisais exprès, juste pour exaspérer la jeune femme qui tentait vainement d’entrer en communication avec moi.

« Mais enfin ! »

Elle ne faisait pas partie de l’armée non plus. Elle était là en tant qu’experte sur le sujet des Mages Noirs et plus particulièrement sur le Chancelier qui nous intéressait. Elle avait dû lire toutes les biographies à propos de Val’Aimé, peut-être même des autobiographies s’il en existait, mais ne l’avait jamais rencontré.

« Il n’est pas spécialement séduisant si vous voulez mon avis. »

Parce qu’il était évident qu’elle devait avoir quelques fantasmes inavouables le concernant. On ne passe pas des années à étudier un homme sans que ça n’éveille quelques pulsions à un moment ou à un autre.

Elle ne se laissa pourtant pas démonter.

« Ce n’est pas le sujet.
— Je pense, au contraire, que ça peut entrer dans le sujet. Sans mauvais jeu de mots. »

Je me redressai. Le plafond fit place à la table basse autour de laquelle nous étions agglutinés.

« Ce n’est pas un homme facile à faire céder. Ce n’est pas en le pervertissant d’une façon ou d’une autre que nous arriverons à quoi que ce soit avec lui. »

Pour le coup, diplomatie et sexe semblaient totalement incompatibles.

« Ce n’est pas un diplomate. On ne peut pas discuter avec lui, repris-je.
— Pourtant vous avez réussi.
— Non. Il est parti de son plein gré.
— Parce que vous lui avez parlé.
— Je ne crois pas. Si ça n’avait tenu qu’à lui, je pense qu’il aurait préféré détruire le Cœur-Vert. Val’Aimé obéit à l’Empereur Noir et à personne d’autre. Il ne s’obéit même pas à lui-même. C’est une sorte de chien, même s’il ne faut pas oublier qu’il peut mordre s’il perçoit la moindre occasion de faire du mal en étant dans son droit. Si je l’avais attaqué sérieusement, il aurait répliqué, mais tant que l’Empereur Noir ne lui donne pas l’ordre de détruire, il ne le fera pas. À contre cœur, mais il ne le fera pas. C’est ce que je pense. »

Il y eut un silence avant qu’une question ne soit posée.

« Donc, vous ne pensez pas que ça peut dégénérer à Arcadia ? »

Ce n’était pas si simple. La situation était complexe. Le fait que les Sorciers et Réprouvés se trouvent sur un même champ de bataille pouvait forcément dégénérer.

« Je pense… Après, je ne suis pas expert en stratégie. Les Réprouvés sont imprévisibles mais ils n’ont pas la puissance magique des Sorciers. Surtout que les deux peuples ne sont pas là pour se battre entre eux mais pour le siège.
— C’est d’ailleurs risible que tout le monde veuille se battre maintenant alors que l’on connait le manque de réactions du début de l’Ère.
— C’est sûr, répliqua un autre Déchu.
— Qu’importe. Le souci, je dirais, c’est que plus il y a de peuples là-bas et plus ça risque de créer des conflits. C’est la raison pour laquelle je ne suis pas pour y aller. »

Néanmoins, je ne faisais pas l’unanimité. Nous n’allions pas envoyer un régiment mais le commandement désirait que nous surveillions les Sorciers. Depuis le Cœur-Vert, beaucoup murmuraient que la situation puait. Certains soupçons pesaient sur les Mages Noirs, notamment d’être à l’origine de la corruption d’Hébé. Je n’étais pas d’accord, surtout parce que je savais que ce n’était pas le cas. Le savais-je réellement ? En étais-je sûr ? Je préférais ne pas y songer.

« Surtout qu’Arcadia n’est pas Avalon. Ça ne nous regarde pas. Nous risquons juste de nous attirer des ennuis, d'autant plus si ça dégénère entre Réprouvés et Sorciers.
— Pour l’instant, ça ne nous regarde pas. Mais si les Mages Noirs sont de nouveau dans une optique de destruction, rien ne garantit que nous soyons épargnés longtemps. »

Je soupirai et reposai ma tête sur le mur.

« Oui, peut-être. Mais ce serait illogique.
— Les Sorciers ont leur propre logique. Ils sont fourbes. Tout le monde le sait. Ce n’est pas parce que le Roi est vieux et semble raisonnable qu’il l’est vraiment. Il pourrait très bien endormir la vigilance de tous et attaquer en traître. Ça s’est déjà vu, des Rois qui préparaient tranquillement leur coup avant de lancer des opérations éclaires.
— Oui, sans doute.
— Vous ne semblez pas d’accord. Vous avez des renseignements que nous n’avons pas concernant les Sorciers ? »

Je souris.

« Pas de source sûre, non. »

Parce que Kaahl n’en était malheureusement pas une ou, du moins, faute de mieux, je ne pouvais pas le considérer comme telle. Je le voulais, mais je ne le pouvais pas.

**

Je détestais la guerre. Les champs de bataille me rendaient malade. Surtout, je n’étais absolument pas fait pour ça. J’aimais discuter et baiser, parfois les deux en même temps, pas frapper les autres en poussant des cris de gorilles.

« Restez près de nous.
— Ouais. »

C’est ça. La théorie était bien belle mais je n’allais pas survivre, entouré d’une dizaine de Déchus au beau milieu de cet endroit. À tous les coups, nous allions finir par être séparés, pensai-je. Je maudis ma lucidité plusieurs longues minutes plus tard, lorsque je me retrouvai seul. L’objectif était simplement de se déplacer dans la masse afin de garder en visuel Val’Aimé Taiji. Néanmoins, l’homme était introuvable depuis notre position et les mouvements enragés des guerriers avaient fait le reste.

« J’avais dit que je ne voulais pas venir. » pestai-je, en essayant de me repérer dans la foule.

La situation en aurait presque été comique depuis l’extérieur. Je soupirai, constatant que ma vie avait été d’une insolence rare. À chaque fois, j’avais échappé aux guerres. Professeur à Basphel, je m’étais toujours trouvé à l’abri du danger. À présent que j’étais en plein dedans, j’avais juste envie de mourir. Les choses restaient pourtant étrangement abstraites. Du moins, elles le furent jusqu’à ce que je me prenne un javelot en plein dans l’aile. L’élan de l’arme me propulsa en arrière et me cloua par terre dans un bruit sourd et un râle rauque.

« Saloperie d’Ange ! »

Ce n’était pas un Ange qui m’avait touché mais j’étais en train de maudire Freyja de ne pas m’avoir réellement appris à me battre. Elle ne méritait que…

Entre la douleur et la perspective de la faire chier, le choix fut vite fait. Juste un peu. Ensuite, lorsque je serais sûr qu’elle aurait compris le message, je l’enlèverais, avant de me faire découper pour de bon. Je fis apparaître la Bague des Humains et la mis à mon doigt. Grossière erreur. Si mon aile et sa blessure disparurent, mon Ma’Ahid prit le relai, attirant à moi une floppée de guerriers mécontents de ne plus pouvoir utiliser leurs pouvoirs. Ce qui ne dérangeait pas les Réprouvés en dérangeait d’autres.

Je ris, un rire légèrement nerveux.

« J’espère que t’es bien en train de t’inquiéter pour moi. » dis-je au vide, en essayant d’éviter une attaque en roulant sur le côté à la manière d'un tonneau de bière.

D’autres n’allaient pas tarder à arriver et je n’avais pas de magie. Tout ça pour agacer une Ange. Vraiment, parfois, j’étais con.

**

Mon élan de connerie se dissipa lorsque mon regard croisa les yeux dorés d’un animal. Au lieu de reculer, mon corps resta immobile. Mes yeux se plissèrent, comme pour mieux le voir et, petit à petit, une chaleur diffuse s’installa dans ma poitrine. Les grognements résonnèrent en moi. Un frisson me parcourut mais pas de peur. C’était différent, comme une nostalgie ravivée par les sons graves qui marquaient mon ouïe comme un burin l’aurait fait sur une surface en bois.

Je me redressai légèrement lorsque le loup attaqua. Il était bien plus imposant que ses semblables. Je n’étais pas un fin connaisseur en canidés mais celui-ci avait l’air particulier. Je le sentais particulier. Pour moi.

L’odeur du sang monta en même temps que les grognements. La dextérité de l’animal était bien plus élevée que celles des guerriers qui m’entouraient mais ils étaient bien plus nombreux. Spectateur, je tressaillis plusieurs fois face aux mouvements de l’ensemble, surtout lorsqu’une arme coupait la chair du loup ou le manquait de peu. Sa hanche fut touchée et une forme de haine s’enroula dans ma poitrine. Je restai pourtant par terre. Je n’aurais fait que le gêner.

Quand il vint vers moi, je m’assis pour de bon et le fixai. Qui était-ce ? Pas Freyja, en tout cas.

« Ça devrait être toi mon Ange Gardien. » dis-je, après avoir senti le contact doux de sa langue sur ma joue.

L’Ange n’aurait jamais fait ça.

Je ne réfléchis pas davantage au fait que le loup pourrait être un Ange lui-même. Je n’étais pas encore habitué à la précision du système, au fait que chaque Ange gardait sa magie en ma présence. Je le pris pour un vrai loup ou un Eversha, coincé sous sa forme animale par la faute de mon Ma’Ahid. Et il avait ces yeux noisette et éclatants...

Sans me méfier, je passai mes mains dans son pelage. La zone était soit douce, soit gluante de sang. Ça n’arrêta pas mes doigts. Je lui souris et approchai mon nez de son museau pour le poser dessus.

« Tu me rappelles un peu mon… »

Je parlais que très rarement de Kaahl à quelqu’un. Peut-être même était-ce la première fois. Je ne savais donc pas exactement comment le nommer. Mon quoi ?

« Disons que tu me rappelles un peu l’homme que j’aime. »

La formule était plus juste. Faute de statut officiel, seuls les sentiments avaient une place. Je lui souris encore.

« Merci beaucoup. »  

Je l’avais dit en murmurant, avant de poser un regard sur sa hanche. J’essayai d’enlever la Bague mais elle se fit capricieuse. Je grimaçai.

« J’aimerais pouvoir te soigner mais je suis bloqué comme ça. »

C’était comme si la guerre n’existait plus vraiment autour de nous. Je me sentais calme et confiant, avec lui. Ou elle, je n’en savais rien. Ça n’avait pas d’importance.

**

Lorsque je réussis à enlever la Bague, le loup était déjà loin. Mes ailes réapparurent, dont celle blessée. Je grimaçai avant de soigner ma blessure. Bon. Je ne savais pas me battre, d’accord, mais je savais utiliser la magie. Je me relevai donc, bien déterminé à retrouver ce loup. Peut-être qu’en tant que Déchu, je pourrais voir sa forme humaine, ou constater qu’il était réellement un animal.

« Toi ! Tu n’aurais pas vu un loup par hasard ? »

Je le demandai systématiquement une trentaine de fois. Les guerriers se perdaient à mon passage, soit que leur vision ait été coupée soit que leur corps leur semble, soudainement, dénué de toute existence. J’utilisais ma magie comme un bouclier. Je n’attaquais personne mais je faisais en sorte que personne ne m’attaque non plus. Et quand, par miracle, la magie réussissait à se frayer un chemin vers moi, je la renvoyais directement vers l’expéditeur.

Mes recherches prirent fin lorsque je me rapprochai de la cible de base. Val’Aimé. Mon corps devint invisible et je pris mon envol, afin de l’avoir en visuel sans être gêné par les guerriers à terre. Plusieurs hommes et femmes volaient mais ils étaient moins nombreux. Ce que je vis par la suite me plongea dans le silence. Je ne pensais plus à embêter Laëth ou à chercher le loup. Je pensais à l’avenir et à ce qu’il risquait d’arriver.

Je regardai autour de moi. Le commandement Réprouvé avait rapidement rappelé ses guerriers. Les Sorciers n’allaient pas attaquer davantage. L’incident semblait déjà oublié, comme s’il n’avait jamais existé. Pourtant, je savais que si. Je savais que ça allait probablement dégénérer.

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Mancinia Leenhardt
~ Humain ~ Niveau IV ~

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◈ Parchemins usagés : 11258
◈ YinYanisé(e) le : 01/05/2015
◈ Âme(s) Soeur(s) : Neah Katzuta | Ange | Compagnon
◈ Activité : Joaillière [Rang IV] | Médecin [Rang III] | Éleveuse de Vaches [Rang I] | Investisseur [Rang II]
Mancinia Leenhardt
Ven 31 Déc 2021, 19:30


Illustration - Matt Rhodes

Le Siège d'Arcadia



D'une droiture si stricte que personne n'avait envie de lui adresser la parole, son aura écrasante donnait l'impression qu'il aurait tué celui qui en aurait eu l'audace ... autant dire que la Canine Blanche en imposait, d'autant plus dans son armure et avec une concentration comme seul un assaut de cet envergure pouvait lui procurer. Il s'était agenouillé au-dessus d'un toit surélevé, casque enlevé et ailes déployés. Observant les évacuations et les combats aux alentours, ce dernier avait une allure d'insolence insaisissable et une mise en danger pour sa vie qui aurait fait hurler n'importe quel instructeur de la Nith-Haiah. Son aura et ses traits caractéristiques le désignant comme Neah Katzuta devaient attirer tous les regards aux alentours. Son immobilité était l'opportunité idéale pour les archers et l'arbalétrier qui maugréaient sur son arrogance en l'ayant dans leur viseur. Prêts à tirer simultanément, ils clignaient des yeux, mais en un instant, leur cible avait disparue. Papillonnant des paupières, ils restaient cois. Où ?

Je suis là.

Sa voix avait claqué dans leurs dos, résonnant dans la pièce déserte ne laissant qu'un silence glacial retombé suite à sa déclaration. Ils n'étaient pas bien, ainsi immobiles devant l'ouverture.

Posez vos armes ou combattez, mais décidez-vous.

Ils n'arrivaient plus à respirer, tant ils avaient l'impression qu'une seule parole allaient les tuer à la place exacte où ils se tenaient.

Je n'ai pas la journée.

Il n'avait surtout pas la patience d'écouter les plaintes de ces Chevaliers qui avaient martyrisés les siens.



Attiré tous les archers embusqué des environs était son but, dégageant ainsi les cieux pour ses collègues. ​Il était une cible bien plus séduisante qu'un modeste ailé pour quiconque voulait que son nom retentisse longtemps. Enfin, longtemps. Une imprévisible enragée aurait pourchassé le responsable de sa mort jusqu'aux Enfers pour avoir sa peau. Puis, elle aurait sûrement menacé Ezechyel en personne pour avoir l'insigne honneur de venir lui botter le cul personnellement. Il eu un rictus amusé. Aucun doute que les Chevaliers qui s'engageaient à vouloir maintenir le contrôle de l'espace aérien autour d'Arcadia n'avaient pas la crainte de voir le Messager des Cieux les renvoyer directement chez les Aetheri corrompus qu'ils devaient vénérer en secret. Néanmoins, ce rôle d'appui allait se conclure dans peu de temps ; l'Ordre d'Hébé s'était écroulé sous l'ingéniosité de la Marche Terne. Si les Chevaliers combattaient encore, une majeure partie se rendaient ou tentaient de fuir par divers moyens, essayant de se soustraire à la Justice qu'ils avaient trahis. C'est à ce moment précis qu'ils devaient être les plus vigilants, car des bêtes acculées pouvaient avoir recours aux pires monstruosités ... Il repliait son aile droite devant son visage, où la flèche vint se briser en deux à l'impact, ce qui le fit soupirer tandis que l'Oiseau Doré craquait sa nuque. Encore un. Et allez !



Neah se sentait intérieurement frustré de cette situation abracadabrante. L'Ordre d'Hébé avait toujours été un Empire de Bien et de Justice, même s'il avait favorisé son chemin en solitaire comparativement aux Anges et aux Magiciens, mais leur écart dans le Mal le rendait vraiment furieux.

Gé mwal ... !
Debout.

Il ne lui avait laissé aucune chance, ayant une vue dégagée sur la provenance des projectiles, le Capitaine se téléportait au plus près des assaillants, les déroutant et les cognant, de temps à autre, selon leur docilité en sa présence. Elle ne l'avait pas été. Sincèrement, il aurait bien eu envie de tous les tuer, mais c'était bien plus agréable de les imaginer croupir dans les geôles de Ciel-Ouvert, subissant eux-mêmes ce qu'ils avaient commis à l'encontre de son peuple. Les salopards ... Ils allaient voir. La Chevalière n'étant pas encline à l'écouter, demeurant à genoux au sol en tenant son visage, Neah lui empoignait les cheveux pour la traîner derrière lui. Elle eu un gémissement de douleur, ne sachant plus si c'était son nez ensanglanté ou ses cheveux tirés à l'extrême sur son cuir chevelu qui lui faisait mal, les deux, sans doute.

Ça va ?
... Non, ça va pas, non.

Ce n'était pas étonnant, elle n'avait absolument pas loupé les deux Marcheurs. L'un était mort, l'autre avait une profonde estafilade au bras, saignant assez abondement. Ce dernier avait du mal à la soigner, malgré la magie qu'il déployait, alors Neah déployait la sienne en soutien en s'agenouillant et en mettant sa main à quelques centimètres de la plaie. Il vit le remerciement et le soulagement dans le regard de son partenaire improvisé.

C'est mieux, pfiou.
Désolé pour votre ami.
... Merci.

Désormais debout, le Marcheur regardait la Chevalière, allongé au sol qui essayait de retrouver une respiration malgré la fracture. Son regard vrilla au noir, levant son pied pour le coller avec violence contre l'armure recourant son abdomen. Il avait été généreux, sur ce coup.

Connasse ! l'invectiva-t-il en lui crachant dessus.
Je ne pense pas qu'ils reste des archers, poursuivit l'Ange sur le ton de la conversation. Les endroits les plus hauts sont à vous et les risques sont réduits.
Ouais, on a été couvert ... J'pensais qu'on avait la voie libre, mais non.

Il eu un rire nerveux, puis se retournait vers le corps ensanglanté de son compagnon.

Putain, Iten ...

De ce qu'il voyait, elle l'avait atteint à la gorge, avant de s'en prendre à l'autre qui était tombé. Le croyant mort, elle l'avait visée. Erreur stratégique. Les larmes seraient pour plus tard.

Merci ... de m'avoir aidé.
C'est la moindre des choses.
Elle n'a rien pu faire contre vous ... à la hauteur de votre réputation, hein.

Il ne réagit pas. Ses ennemis devaient être idiots de le croire désinvolte, sa magie ne manquerait pas de contrer une autre en générant un bouclier, ou ​de manier les vents à sa guise, peut-être moins qu'un Lyrienn, mais assez pour détourner les flèches de son crâne. Et il ne parlait même pas de ses ailes, si particulières ... C'était tout ce qu'il était. Insaisissable.

Je le ramène ... Occupez-vous d'elle.
Je peux vous téléporter derrière la ligne de front.
... J'veux pas vous vexer, mais je ne suis pas très à l'aise à l'idée.
Aucun problème. Voyons si vos collègues ou les miens ont besoin d'un coup de main au retour.

Le Marcheur acquiesçait, puis regardait encore la Chevalière gémissante.

Ta gueule.

Il mis correctement le corps sans vie sur son dos.

Souffre en silence.

Comment ne pas comprendre ce mépris ? Neah se souvenait de Mademoiselle Kölaïe, de ses ailes noircies de magie et de la hargne dans ses paroles. D'avoir écouté toutes les violences physiques et les abus d'un seul et unique Chevalier, qui, de temps en temps, la passait à quelques amis. Quel courage que de témoigner de ces horreurs, malgré son épuisement. Cette personne en qui elle avait accordé sa confiance l'avait trahie, quelques semaines après être revenue de l'Enfer qu'avait été la Terre Blanche. S'il entendait le nom de ce connard, s'il tombait sur lui ... lui non plus ne s'en sortirait pas indemne. Il observait la blessée qui compris bien que si elle ne se redressait pas tout de suite, elle serait traînée tout du long, avec de la volonté, elle se redressait. Tsss ... Quel dommage qu'une telle force se soit corrompue ainsi.

On devrait tomber sur les autres par-là.
Vous croyez ?
Hé, on avait prévu des couloirs exprès ... On s'est juste éloigné pour s'assurer de n'oublier personne.

Il marquait une pause.

Vous savez ce que c'est ... les gens ont peur.
Oui, la confusion règne. D'ailleurs, vous savez savoir qui je suis, mais pas moi.
Cédric. Ravi de vous rencontrer malgré les circonstances.
De même.
Ah, les voilà ! HÉ OH !

Neah voyait le corps de sa captive se crisper.

Ne faites pas l'idiote, lui souffla-t-il en guise d'avertissement.
O ... Oui.

Le Marcheur, lui, discutait avec ses acolytes.

Merde ...
J'ai rien pu faire.
Au moins, t'as eu de la chance.

Ce dernier observait Neah en le disant, mais il avait bien compris où ils voulaient en venir.

Je la ramène.
On est pas obligés de tous les faire prisonniers.

Ah, non ... Ils n'allaient tout de même pas l'obliger à la défendre ?

Laisse, sinon on va s'faire allumer.
Ouais, si ça s'trouve, elle a fait confiance à la mauvaise personne. Y'en a eu pas mal des comme ça.

On ne pouvait guère accordé de confiance à un Déchu. Ça prenait la tête d'un Ordre et ça le corrompait jusqu'à la moëlle au point de générer des situations aussi calamiteuses. Quelle race de merde, sérieux. S'il n'était pas ravi d'être un simple appui, dans les circonstances actuelles, comme lors des combats sur la Terre Blanche, il ne devait pas être arrogant et absolument réussir pour le bien des Anges captifs. Il comprenait que les Marcheurs eussent envie d'éclater ceux qui les avaient insultés et conduit à ce chaos, en plus de mentir à l'univers tout entier, mais il avait la même envie. Si un haut gradé tombait sur lui, la Canine Blanche espérait que la Marche ne lui en veille pas si un ou deux membres lui manquait.

Y'a plus rien dans ce secteur, on devrait rebrousser chemin et repartir vers l'est.
Non ...
Qu'est-ce qu'elle dit cette pouffiasse ?
Pas ... Allez pas ...
Dis-moi ce que tu sais, ou tu vas me le dire par d'autres moyens.

Les Marcheurs n'étaient pas prêts à voir un Ange aussi énervé, ne sachant même plus où se mettre. La Chevalière non plus, son courage ayant fondu comme neige au soleil.

Piège ... Y'a ... Y'a des pièges ... Ils ... Une explosion.
Elle est sérieuse ?!
On doit absolument les pr ... !

Chÿsam, où es-tu ?
Je suis au même endroit où vous m'avez laissé.


Il y avait dans sa voie une once de reproche, mais Neah n'en tint pas compte vu leur longue amitié. À la Nith-Haiah, on ne se déplaçait jamais seul. Jamais.

Il y a des pièges dans les rues, vers l'est. Dis aux autres de ne pas les traversées.
Entendu.
Je leur amène une Chevalière qui détient des informations, enfin, plus ou mois.
Du genre plus, ou du genre moins ?
Du genre paniquée.


Nous devrions avancer, conclu-t-il.

Elle semblait soulager de ne pas se rendre là-bas, plus que de s'être retrouvé en face de lui.

Il n'y a que des pièges ?

Elle était terrorisée. Son regard à lui en disait long sur son envie de en pas se répéter.

Des sorts ... incendiaires.

En d'autres termes ... Boum.

Les connards !
Ça nous pisse dessus avant d'nous faire croire qu'il pleut, mais en plus, ça n'sait même pas s'battre !

Vraiment sans pitié. L'Ange senti son corps se crispé doucement, ressentant une drôle de sensation au niveau de la poitrine, n'étant pas dû à ses sentiments personnels, au contraire. Il s'agissait de ceux de Mancinia s'entrechoquant aux siens. Aaah ... Il avait vraiment la meilleure Humaine. À nouveau déconcerté de ne pouvoir être en première ligne au combat, elle avait choisi d'assurer sa Première Ligne pour les blessés. Officiellement, pour les plus légers, pour que les plus puissants manipulateurs de magie se chargent des plus lourds. ​Peut-être qu'ils ne seraient pas utiles, mais au moins, ils étaient là.

Mancinia.

Il se souvenait encore de comment elle était revenue à la maison avant de quasiment se mettre à hurler de bonheur entre ses mains, sans avoir remarqué sa présence. Elle n'avait pas paru le moins du monde embarrassée en le constatant, avant de se précipiter dans ses bras pour l'embrasser joyeusement. Une bonne nouvelle ? Oui. La Reine l'avait nommée Commandante de la Légion des Spartiates et son Humaine avait eu le ricochet de la nouvelle. Elle, qui estimait que son titre de Matasif devenait désuet maintenant que la Guerre des Dieux était loin derrière eux, voyait revenir sur le devant de la scène pour tous ceux qui l'estimait encore comme combattante. Un moyen de la mettre aussi en opposition avec Maximilien Eraël, qui risquait de devenir un sérieux adversaire à son ascension politique. L'Imprévisible lui avait transmis dans la bonne humeur en clamant qu'ils combattraient ensemble s'ils devaient se retrouver sur un même champ de bataille. Cette perspective le réjouissait autant qu'elle lui faisait peur, mais fort heureusement, le Siège d'Arcadia laissait sa fiancée en retrait. Commandante Leenhardt. La Kaaezi avait toujours été, de par son rang et sa réputation, une commandante honorifique, mais ce titre prenait une dimension plus ancrée. Pour moi, tu resteras toujours Mancinia. ​Inconsciemment, il la cherchait vers l'emplacement où ils se trouvaient, mais sa vue n'était pas aussi extensible qu'escompté et le mur ceinturant la Cité le bloquait. Idiot. Ce n'était pas le moment.

Mais ?!
Ils sortent d'où ceux-là !
Haaaaaaaa !

D'une maîtrise époustouflante sur le métal, les pics à peine créées se figèrent dans les bras et les jambes des assaillants.

Mais !
Nous n'avons pas de temps à perdre. Prenez-là et continuez. Je couvre vos arrières.
Vous déconnez ?! On va s'battre !
Non. Vous devez prévenir vos compagnons de la présence de ces pièges.

Couvrir les arrières des plus faibles, c'était vraiment le moment où il appréciait user de toute la puissance qu'il avait emmagasiné ces dernières années. C'est parce qu'il avait été faible qu'Ace était mort. C'est parce qu'il avait été faible qu'il avait perdus tant d'amis. C'est parce qu'il avait été faible que d'autres Soldats étaient morts pour lui. C'est parce qu'il avait été faible que Mancinia l'avait rejeté pendant longtemps ... Il sentit la présence colossale de l'homme à ses côtés. Son expression condescendante et son aura bestiale. Un Réprouvé.

J'reste là.
Moi aussi, s'il en reste, on doit s'en assurer.
Bon, allons-y.

Après avoir remis Iten aux autres, qui avaient disparus entre temps, l'Ange, le Réprouvé et l'Orisha s'engageaient dans la rue, alliant prudence et vitesse pour déboucher sur ... un cul de sac.

D'où ils débarquaient ? demanda Cédric devant ce constat.
J't'assures qu'il y avait plus rien. Et s'ils nous ont entendus, bah, pourquoi être sortis tout d'suite ?
Oui, mais ils devaient bien venir de quelque part.

Cet instant d'incompréhension avait été balayé par la réalité.

Ne nous attardons pas, c'est peut-être un piège.

Ils n'avaient pas fait quelques mètres qu'une troupe de Chevaliers déboulait sur leur gauche, cherchant visiblement à fuir les combats. Leurs regards croisèrent celui de la Canine Blanche et leurs armes tombèrent au sol instantanément, dans un tintement métallique amorti par la boue.

... On se rend ! déclara l'un d'entre eux, les mains relevées.

Les Marcheurs présents ne savaient même pas quoi en penser tellement c'était absurde, mais en même temps, qui avait envie de se mesurer à lui ? Il fallait être ivre ... ou fou.

Y'a un truc, là, commenta le Réprouvé en passant sa main dans sa barbe.
Dites-nous d'où vous venez.

Pourquoi s'enfuir ? Neah avait une autre idée. Soudaine.

Vous ne vous battez pas avec le Duc ? demanda-t-il.

Ce n'était pas dans ses prérogatives de le prendre en chasse, mais dans l'ardeur de la bataille, il se moquait bien de l'attraper et de laisser l'honneur à quelqu'un d'autre, tant qu'il payait. Les Chevaliers se regardèrent.

Il est ... Par ... Parti.
Ah, ce sale couard de mes couilles !
Tsss, même pas le cran d'assumer ses crimes !

Évidemment. Un connard doublé d'un pleutre. Un très bon Déchu.

Il doit y avoir des souterrains pour permettre aux Chevaliers de s'abriter des yeux indiscrets. Ils doivent sûrement attendre le bon moment.
... Je ne pensais pas à ça.
Même quand on sait, c'est toujours surprenant, hein ?

Il avait un sourire, presque sinistre.

Vous allez nous suivre. Si vous tentez de vous défiler, je vous abats, c'est clair ?

Son silence était une bonne réponse. Soudainement, l'Ange s'arrêtait au bout de trois pas et le Marcheur manquât de lui rentrer dedans.

Capitaine ?
J'entends ...

Son ouïe avait capté un bourdonnement souterrain. Rapide. Et ... L'instant de comprendre, il avait abattu ses mains sur le torse de l'Orisha, saisissant le bras d'un Chevalier pour les pousser au sol alors que l'explosion retentit brutalement. Trois maisons et une partie de la rue avait littéralement été englouties dans un gouffre béant, fumant et chaud ... Il dénombrait au moins deux tués sur le coup et le groupe avait été séparé par un brusque incendie qui commençait à se rependre dans les environs. Le Réprouvé et l'autre Chevalier était pris au piège.

Vous inquiétez pas pour nous, on va trouver un autre chemin !

Lequel ? Il n'y en avait pas et ils en étaient bien conscient. Neah prit une longue inspiration.

Ne bougez pas !
Où voulez-vous qu'ils aillent ? ... Mais !

Tendant les bras devant lui, le Capitaine se concentrait sur le mur incandescent et irradiant de chaleur qui gagnait du terrain sans l'inquiéter pour autant, écartant doucement les flammes de sa magie pour laisser un passage, tout en se focalisant sur l'air pour créer un bouclier aérien et empêcher que leurs vêtements ne prennent feu. Ils étaient tellement pantois.

... Mais.
Dépêchez-vous !

Il n'avait même pas besoin d'hausser la voix qu'on obéit à ses ordres, parce que son maintien n'était ni stable ni très long et ils durent se laisser rouler pour être sûr de n'avoir aucun problème.

M ... Merci, dit le Chevalier, sous le choc.
Ne me remercie pas encore, dit-il en tendant son bras pour l'aider à se relever.
... Moi j'dis ... On va tous boire une bière après cette merde.
Ça ira ?

Venait-il te tendre sa main vers un Réprouvé ? Oui. Lui-même se disait que la journée était formidable.

... Bon, conclu ce dernier.

Le Bipolaire saisi le bras de l'Aile Blanche. C'était une sorte de trêve très curieuse pour le Capitaine, qui méprisait ces engeances, sans doute essayait-il de le voir autrement. Comme un Marcheur. Debout, ce dernier se crispait brutalement.

J'me sens pas très bi ...

Il se penchait aussitôt pour vomir, ce qui étonnât les hommes présents.

Freün, qu'est-ce que t'a ?
C'est rien, c'est une petite coupure.
Tu te fou de ma gueule ?! D'où vient cette blessure ?

Une blessure au niveau de son abdomen qu'il avait tenté de dissimuler. Elle n'avait pas l'air grave de prime abord, mais ... Tsss, ces Réprouvés ! Ils allaient tous mourir stupidement sur un champ de bataille, un jour. Il l'aurait bien laissé dans cet état, mais ce n'était pas le moment de songer à ses états d'âme. Une perte de sang et une poussée d'adrénaline n'étaient pas un excellent combo. En voulant l'aider comme avec Cédric, l'Ange remarquait rapidement que la plaie empirait. Curieusement, il en comprit la raison après avoir vu des effets similaires en d'autres lieux. Sa blessure n'était pas guérissable de cette manière, pour la simple et bonne raison que le corps n'encaissait pas un afflux magique important après la dose démesuré qu'il avait dû se prendre et comme les Bipolaires n'étaient pas connus pour leur maîtrise de la magie ... Heureusement, la présence du Ma'Ahid devrait le décontaminé.

Je m'en occupe. Suivez la rue, vous tomberez sur le reste de nos troupes ...
Mais.
Je m'en occupe, réitéra-t-il. Soyez prudent avec les deux prisonniers.

Puis, devant les yeux de l'Orisha, il disparu.



Mancinia !

L'Humaine avait sursauté devant sa brusquerie, ne s'étant pas attendue à le voir surgir ainsi devant elle par pur instinct, mais réagit surtout à l'homme que son compagnon soutenait et qui commençait visiblement à délirer.

Il est blessé.
Qu'est-ce qu'il a ? demanda-t-elle, avant de se retourner vers son collègue. Docteur, on a un patient !
Je crois qu'il a subi un empoisonnement et il a caché sa plaie longtemps.
On va l'allonger par là.

Ni une ni deux, elle l'avait prit, nullement décontenancé par le poids de son nouveau patient. Neah portait sa main sur son front, se rendant compte de la sueur maculant son faciès. C'est qu'il bossait dur, mine de rien. Il était ravi de voir le dévouement de sa fiancée ... de la voir tout court. Néanmoins, il ne pouvait pas rester ici, il avait encore du travail. Observant son dos quelques instants de son regard bienveillant, il se téléportait à nouveau directement auprès des membres de sa cohorte, pour les voir avec des mines effarées.

Qu'est-ce que vous avez ?

Il soupirait devant les chuchotements des alentours.

Qu'est-ce qu'il s'est passé cette fois ?



Ils ont réussis à le trouver, stoppant ainsi nette sa fuite. Chÿsam avait le don de lui transmettre de bonnes nouvelles. Le Duc d'un Empire ... Tu parles. Un lâche qui avait fuit la queue entre les jambes, oui.

... Il faudrait que je la remercie, à un moment, pensa-t-il tout haut.

Pourtant, il n'était pas insensible à ce malheur qui s'était passé sous leur nez à tous.

Ah ! ... On vous demande pour une réunion.
Oui, j'arrive.

Le Capitaine savait de quoi il en retournait, mais il observait un instant la carte devant lui. Arcadia était désormais tombée et c'était une victoire pour la Justice. D'un mouvement des pouces, il se redressait en prenant sa veste pour se rendre à une de ces réunions qui n'en finissaient plus. Cette fois, ils avaient encore remportés la bataille, mais combien d'autres auraient encore lieues ?

Neah allait devenir encore plus puissant.

Si puissant que le Mal courberait l'échine devant lui.

3565 mots | Merci Léto pour ces événements incroyables nastae Une bonne année 2022 à la Marche !
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Latone
Sam 01 Jan 2022, 10:59



Le siège d'Arcadia


Au gré d'une énième charge, la force incommensurable du yack – dopé par les bons soins de leur talentueuse alchimiste – parvint à enfoncer l'ultime porte. Les Paladins derrière, censés les retenir, tombèrent à la renverse sous l'impact. Juste à temps, l'Hurabis Blarorkh s'empara de la bride de l'animal avant qu'il ne fît un carnage à l'intérieur. Leurs yacks n'étaient pas censés broyer qui que ce soit, mais leurs charges pouvaient être mortels pour les casseroles ambulantes leur servant d'adversaires. D'une brève œillade à son frère d'arme, l'Orisha craignait bien plus une bavure de sa part que de la bête surmenée. L'Hurabis Narn pénétrait dans la salle du Conseil des Treize, sa massue démesurée sur l'épaule. Il renifla, le Lynx en lui feulant de plus belle. Ses iris bestiales voguèrent aux quatre coins de la pièce, ne se pausant que peu sur les quelques Paladins encore debout ou conscients. Tout ce menu fretin ne l'intéressait pas ; et le manque d'effluves spécifiques dans cette pièce commença à le faire grogner.

Sans prêter plus d'attention à la montée de rage de son collègue Eversha, Blarorkh relâcha le yack calmé et chopa par le cou le premier soldat sur son passage. Grâce à son Troisième Œil perçant, point besoin de faire tomber le casque.

" Où est le Duc ? "

Il resserra son emprise sur la chair quelques secondes afin de lui faire réfléchir à plusieurs fois sur sa réponse. Depuis la brèche dans les remparts et que les portes principales furent défoncées, les Striomas et Hurabis s'étaient frayés un chemin jusqu'au château, là où devaient se trouver les Sages et, surtout, le Duc d'Arcadia. En théorie.

" Vous ne le trouverez jamais ! "

Prévisible. Ainsi donc, leurs intuitions portèrent leurs fruits, malgré la déception grandissante de Narn ; lui qui espérait tant tomber sur Damon Von Ivanova avant Latone. Ces scélérats ne se trouvaient ni sur le champ-de-bataille, ni barricadés dans leur citadelle. Dans ce cas, il ne restait qu'une seule possibilité : celle que quelques Marcheurs, dont la Bleue, avaient parié. Des sifflements s'élevèrent dans le couloir puis se dissipèrent lorsque les pas des Striomas foulèrent la salle de réunion.

" Continuez d'envahir le château : le Duc ne doit pas être parti bien loin. "

Ce n'était bien évidemment qu'une feinte. Mais tant que les Marcheurs continueront d'entretenir l'ignorance, leurs proies ne se douteront pas de leur petite surprise.

~~~


Je te le confirme, Latone : ils se dirigent droit vers Narathalia. Comment ne pas retenir un sourire de fierté ? Le plan initial était gorgé de failles et de paris risqués, mais de là à penser que la lâcheté les aurait pris dès le gong de guerre… Lorsque Latone avait évoqué cette idée, la Mère des Mord'th ne l'avait pas contredite, comme si le Duc s'avérait si prévisible. Tôt ou tard, la corruption de l'Ordre aurait été mise en lumière, même sans l'initiative de la Marche Terne. En prévision d'une telle catastrophe, les Chevaliers avaient donc bel et bien soumis un plan de secours afin de préserver la tête des plus Grands. L'existence de ces souterrains fut l'élément primordial qui germa ce scénario dans sa caboche. Autrefois, en tant qu'Esprit enragé, elle ne voyait les mortels que comme des trouillards se raccrochant à la Vie, elle pensait les comprendre, aussi limpide que dans un livre. Mais en tant que leur semblable, il lui fut bien plus simple de se retrouver dans les pensées de Damon. Avec un peu plus de temps, la Kirzor aurait pu se plonger dans le monde des Échos afin d'obtenir un coup d'avance… Enfin, grâce à l'effort combiné de leurs pisteurs, ils se tenaient bel et bien là, face aux fuyards.

Malgré sa taille, la silhouette de Latone laissa entrevoir la grandeur de l'Arbre Hébé. C'était ce reliquat de la fille de Déiopéa qu'espéraient admirer les Sages dès leur sortie. Et pourtant, en quelques cliquetis métalliques, les hauts dignitaires de l'Ordre se firent encercler à l'entrée du tunnel. L'Orisha ne pouvait pas les voir d'ici, mais puisque les Paladins rechignaient à l'idée d'opérer un demi-tour, ce devaient être que les souterrains avaient bel et bien été sécurisé par les Marcheurs. Ils étaient tous là, tous les Sages et le Duc en personne, à portée de main. Leur garde rapprochée se montrait garnie et point résignée à laisser leurs maîtres être approcher. Latone avait enjoint le maximum de Marcheurs à l'accompagner ; pas trop pour ne pas éveiller les soupçons sur le champ-de-bataille, mais pas assez pour leur faire baisser les armes. Des renforts arriveront sans aucun doute maintenant que les Hihtyx étaient parties répandre la nouvelle. Mais dans combien de temps ?

" Au-delà de votre impertinence… Le Duc écarta un Sage afin de se dévoiler un peu plus aux yeux des Marcheurs. Les flèches braquées sur lui ne l'incommodaient point. Je dois reconnaître que nous retrouver ici vous a fait gagner mon respect. "

Latone croisa les bras. Elle se tenait en première ligne, confiante. La voix de Damon l'intriguait : malgré qu'il fût dans de beaux draps, il démontrait un calme olympien. Un Empereur était-il si puissant que ça ?

" Arcadia est un gruyère. Je le sais car je suis déjà venue à votre insu. Elle passa son avant-bras sur sa lèvre ensanglantée. Avec ce substitut, elle pourrait tellement le narguer, mais les mots suffisaient. Cessons immédiatement cette bataille : rendez-vous, vous avez perdu sur tous les fronts. "

" Ne vous méprenez pas : glaner mon respect ne vous protégera pas de mon courroux. Il tapota l'épaule de deux Sages, les inspirant au passage. Vous êtes comme l'épine de la rose… Il inspira, Latone ressentit une concentration magique. Je vais devoir vous détruire. "

Le Déchu tendit la main et un diamant étincelant apparut au creux de sa paume. Ce joyau resplendit de mille feux et invoqua les mystiques courbes d'une créature. Latone fit un signe de retenir la première salve de flèches, les boucliers déjà dressés du côté des Chevaliers. Elle voulait voir de ses propres yeux ce qu'avait décrit Dame Isuzu comme la Duchesse d'Arcadia en personne. Sous leurs yeux ébahis, Sharlaine, la Reine de Diamant, se dressa comme la figure protectrice de l'Empereur. La plus puissante des Thémys allait être la lame de son élu. La Hurabis garda son sang-froid, ses précédents combats lui ayant épargné de grosses difficultés pour ce duel en particulier. Alors que Sharlaine se métamorphosa en une imposante faux, Latone fit tournoyer sa pertuisane dans sa main et, de ce geste, tonna le début des hostilités.

Sur le papier, le but était simplissime : épargner le Duc et les Sages pour les ramener à Ciel-Ouvert. Dans les faits, c'était la première fois que Latone se confrontait à un être aussi puissant. Mis à part Ezechyel bien sûr, toutes les antiques menaces firent pâle figure face à Damon Von Ivanova. Le chef des Corbacs Pourpres, Hans du Temple des Esprits, l'Usurpatrice des Ailes de Dothasi, tous ne lui donneront pas autant de fil à retordre que le Duc d'Arcadia. En un instant, les Chevaliers et Marcheurs se dispatchèrent et l'heure de la bataille sonna. D'un élan calculé, la Bleue coupa court à l'avancée de Damon en contrant l'attaque de ce dernier. Le choc des lames la fit plier et l'obligea à contracter ses muscles pour encaisser le choc. Elle serra les dents et repoussa de toutes ses forces. Ses iris bleutées s'abattirent sur le Déchu : il ne sera en définitive pas une proie facile. À peine cette réflexion émise que la faux revint à la charge, elle bloqua au dernier moment avec le manche de sa hallebarde et sentit son corps décoller du sol. Projetée quelques mètres plus loin, elle reprit son équilibre en plantant la lame de la lance dans le sol. Se sachant en position vulnérable, Latone vola l'initiative en s'emparant de l'un de ses chakrams et le lança en direction du Duc, celui-ci dévia le projectile avec aisance malgré la surprise. Alors que la main libre de Latone porta assistance à l'autre pour retirer la pertuisane de la terre, un sourire narquois trôna sur son visage. Derrière toi ! Damon écarquilla les yeux lorsque Sharlaine l'avertit du danger : le chakram revenait à toute vitesse. L'excès de confiance de l'Éclat s'émietta sous l'esquive de l'Ailé d'Ébène. L'Atrum s'arrêta à hauteur de sa propriétaire, celle-ci se redressant et jetant son autre chakram en l'air. Les deux tambourins métamorphosés en armes mortelles semblaient léviter au-dessus d'elle ; ceci n'était pas dû à l'Akaris, mais à ses Sereëkim. La Kehaä ne les maîtrisait pas autant qu'espérer, toutefois une paire de bras supplémentaires – d'autant plus invisibles pour les étrangers – ne serait pas de luxe.

Pour les autres combattants, il était difficile d'ignorer l'affrontement de titans qui se tenait loin d'eux. Si l'un des chefs tombaient, le moral en pâtirait pour le camp affilié. Les Marcheurs et les Paladins restaient lucides sur la situation et encourageaient silencieusement leurs champions. De rares fois, un Chevalier osait porter un estoc en direction de Latone, mais chaque impertinent recevait une flèche avant de pouvoir la gêner ; certains Marcheurs voulurent soutenir la Hurabis en tentant d'immobiliser le Duc, sauf que celui-ci faisait preuve d'une incroyable dextérité, ou un Sage s'interposait pour punir les audacieux. Sang et cris résonnaient tout autour de ces deux monstres, sans que cette folie ne les atteignît : tout ce qui comptait fut l'ascendance sur l'autre. Damon chercha à balayer Latone du tranchant de sa faux, l'Orisha sauta pour l'éviter et, une fois un pied à terre, se propulsa en avant pour viser sa cuirasse. Le Déchu se dégagea et fit revenir le contondant de son arme, Latone encaissa volontairement le coup pour garder sa proximité et releva l'apex de son manche pour frapper le menton. Damon bascula en arrière mais point autant qu'elle ne l'espérait : l'extrémité inoffensive semblait avoir heurté une surface diablement solide. Consolidant sa défense, la Bleue comprit ce phénomène en apercevant la peau en diamant de son ennemi. La Mère l'avait prévenue que cette protection faisait partie de ses principaux atouts, le rendant quasi intuable… fort heureusement, l'éliminer n'était pas dans ses plans. Puisqu'il était aussi solide que le diamant, alors elle frappera encore plus fort. Tenu à distance, ses chakrams voltigèrent autour du Duc pour lui permettre de découvrir l'angle d'attaque parfait. Lorsqu'elle vit rouge, Latone tenta le tout pour le tout et lança sa pertuisane de toutes ses forces. Alors qu'elle pensait voir la lame creuser le plastron, la silhouette de l'impur se volatilisa en fumée. Latone fut scandalisée par ce qu'il venait d'arriver et ne comprit que trop tard que le Duc se trouvait, à présent, dans son angle mort, son attaque déjà amorcée. Pour autant, la Fille des Chants eut le temps de se retourner et d'observer son adversaire, arrêté dans son élan par une lame lumineuse semblant sortir du sol. Latone souffla intérieurement : son pendentif des Crocs Blancs s'était illuminé et l'avait protégée in extremis. Maintenant était sa chance ! Elle siffla, l'Akaris s'activa au même moment où le Duc se dégagea de la lame qui se brisa. Latone pivota et attrapa sa pertuisane au vol, elle accompagna la force cinétique pour la diriger droit sur la lame de la faux. Cette dernière subit l'impact et de sérieuses fissures prirent forme à son endroit.

Au cri de souffrance de sa Thémys, Damon battit en retraite avec un simple battement de ses ailes noires. L'idée de prendre la tangente par les cieux l'avait bien évidemment traversé, mais malgré ses sombres principes, il restait attaché à l'Ordre qu'il avait établi. Il ne repartira pas d'ici sans la tête de cette Kehaä et de tous ses semblables. Enhardi par les pleurs de sa compagne d'arme, Von Ivanova chargea à toute vitesse sur la Marcheuse qui para l'assaut. Elle laissa ses Sereëkim libres de resserrer les chakrams sur lui dans la foulée, une attaque combinée bien qu'hasardeuse. Toutefois, Latone ne s'attendit pas à la soudaine retraite du Duc, tout en faisant tournoyer la faux devant lui. Pour les inertes au Monde Invisible, seuls les Atrums tombaient raides au sol, le lien supposé magique entre ces armes et la Hurabis détruit par l'attaque de l'élu d'Hébé. Mais pour Latone, étant donné son expression horrifiée, le résultat fut bien pire : cette saleté de Déchu venait de lui sectionner ses bras invisibles ! Elle se releva, recula, et retint tant bien que mal de hurler à l'agonie. À la place, ce furent surtout des injures à répétitions qui franchirent ses lèvres, saupoudrées d'une ou deux gerbes sanguinolentes. Damon ne comprenait pas bien ce qu'il avait réussi à lui provoquer, mais c'était un avantage non négligeable pour sa survie. De deux coups de pied, il dégagea les chakrams sur son passage. Il profita de cette accalmie pour souffler à son tour et préparer sa prochaine attaque. Latone forma du mieux qu'elle pût sa garde, néanmoins l'adrénaline ne suffisait pas à diluer son traumatisme. L'espace d'un instant, elle hésita à user de son Velthar. Ce ne serait pourtant que trahison. À la place, ce fut un Tonohr somme toute classique qui s'échappa de sa bouche et repoussa le Duc. Sans plus attendre, la Marcheuse enchaîna les assauts afin de briser cette Thémys. Au détour d'un balayage, elle planta la lame de sa pertuisane dans le sol et tournoya autour du manche pour donner un gros coup de botte sur le gantelet du Duc. Il vacilla et elle retira d'un coup sec sa lance pour frapper de l'autre côté. Il encaissa et accola le manche de la faux contre celui de son ennemie. Le bras-de-fer sembla donner petit à petit raison au chevalier, la montagnarde perdant peu à peu ses forces. Cette dernière serra les dents et s'en remit à son instinct : de singuliers murmures s'extirpèrent de sa Voix et allèrent se glisser sur la lame de la faux. Ressentant un danger imminent, Damon chercha à la trancher en deux, Latone réussit à prendre ses distances grâce à un Chant sifflé sur son propre corps, lévitant en dehors de la trajectoire puis à quelques pas de la menace. L'Empereur reprit position face à elle et resserra son emprise sur son arme. Un voile inconnu semblait l'envelopper, sans qu'il ne pût faire le rapprochement avec un quelconque sort connu.

" Que lui as-tu fait ?! "

Sharlaine ne réagissait pas, ce qui était anormal. Tout ce qu'il avait pu percevoir de ces murmures fut : "Aidez-moi". Latone reprit son souffle et attendit le moment propice, attentive. C'était un Hihtyx, adressé à nul autre que la Reine de Diamant. Soudain, certaine de son coup, la Bleue chargea, préparant un coup contondant. Le Déchu vit cette initiative à des kilomètres et dressa tout bonnement une garde solide. Cependant, au dernier moment, la faux entre ses mains se liquéfia et la Thémys de Diamant prit son envol au-dessus de son tendre allié, ses traits trahissant un air désolé. Surpris par la trahison de sa compagne, Damon prit l'attaque de Latone de plein fouet, puis les suivantes afin de le sonner au maximum. Au cours d'une ultime ruade, la Hurabis parvint à mettre le maître de l'Ordre à genoux. Blessé sur tous les plans, Damon releva avec difficulté les yeux sur Sharlaine, celle-ci se tenant aux côtés de Latone.

" Pourquoi… ? " La Thémys se montrait incapable de soutenir les yeux assassins de son partenaire.

" C'était le plus… – elle croisa l'œillade de la Bleue – juste. " La Marcheuse acquiesça doucement, satisfaite de la tournure du duel. Elle se raccrochait fermement à sa pertuisane, ayant du mal à se tenir droite.

Damon rit. Ils se tenaient tout près de l'Arbre sacré.

" Déiopéa… chérit ses enfants… comme elle l'a fait… avec Hébé… "

" Si la Déesse tenait vraiment à vous, elle m'aurait arrêtée. Latone garda un silence religieux sous les branches bénies, les rubans dansant sous la fureur des combats. Elle ne le fera pas. La jeune femme gémit tout bas et força son corps à reprendre contenance, sa lance bien en main. Damon Von Ivanova, au nom de la Marche Terne, et de tous les états venus nous prêter main forte, je vous condamne à la sentence de Ciel-Ouvert. Elle leva sa lame et la dirigea vers lui. Vous et vos semblables serez enfermés à Verillon. "

Le Duc fut vaincu. Les Sages furent vaincus. L'Ordre d'Hébé avait perdu cette bataille. Mais qu'en était-il au front, que ce fut au Sud, au Nord, même à l'Ouest, entre les murs de la citadelle ? Ces interrogations la traversèrent alors que le Conseil se faisait enchaîner et qu'on lui prodigua les premiers soins. Ils ne pourront rien faire pour ses Sereëkim ; mais ça, ce sera une autre histoire. Un Paladin s'avança, elle le reconnut : l'un des généraux alliés à la Mère des Mord'th.

" Madame… Arcadia est tombé. La nouvelle réchauffa les cœurs présents. L'Ordre est entre vos mains. "

Latone papillonna des yeux, fatiguée, en sang. N'ayant qu'une foutue envie : dormir au pied de ce magnifique arbre. Une lueur propre à l'Éclat rendit hommage au sacré, le soleil transperça le grisé céleste pour les bénir.

" L'Ordre n'est plus. Elle sourit nerveusement, entraînée par un nouveau flot qu'elle ne contrôlait pas ; mais qu'elle avait tant désiré. Hébé peut retrouver le repos au sein de la Marche. "

Une Championne était née.


3050 mots ~ (sans les mots de Miles)

FIN
Merci pour vos participations <3
On leur a bien éclaté la tronche



By Jil ♪
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