Il avait relevé ses cheveux en un chignon approximatif. Il aurait pu faire des galipettes dans l’herbe que ses pirouettes n’auraient pas changé l’état de ses cheveux. Curieusement, sa coiffure avait de jolies formes. C’était un désordre ordonné, comme s’il avait passé des heures à obtenir ce résultat faussement négligé. « Alors… » souffla-t-il, comme s’il parlait à quelqu’un. À vrai dire, il y avait toujours quelqu’un. Les Esprits trainaient par ci par là et l’observaient d’un œil curieux. Les Sorciers des temps jadis, lorsqu’il était encore Empereur Noir, ne devaient pas le remettre. Il avait laissé pousser ses cheveux depuis et adopté un style qui contrastait avec la tenue formelle et stricte des Mages Noirs. Lui ? Façonner le chaos ? Voyons… On ne peut pas faire ce genre de choses avec un tablier accroché autour du cou. Derrière le tissu, ses tatouages ressortaient. Son corps était moins garni que lorsqu’il se rendait chez les Chamans. À ces occasions, il ne lui restait plus un centimètre carré de peau vierge. C’était parfait, parce qu’on pouvait difficilement l’identifier au milieu des orgies. Il trouvait ça toujours très drôle, de chercher à qui appartenait quel morceau de chair. Jadis, il avait eu quelques surprises. À ces souvenirs épars, il sourit, avant de jeter son couteau en l’air et de le rattraper par le manche. Il coupa les radis avec la rapidité des grands-chefs et la précision d’un chirurgien. Il avait été médecin mais avait toujours préféré manier le couteau que le scalpel. Couper des légumes était plus plaisant que couper des individus, même pour les soigner. Quand il eut fini de couper les ingrédients qui se cuisaient, dont des champignons typiques des Terre d’Émeraude, il versa le tout dans une grande poêle. L'ensemble crépita délicieusement. Il se tourna pour vérifier la cuisson du riz, avant de partir continuer son repassage en se servant de sa magie. Il aimait particulièrement les sous-vêtements de la Déchue. Il ne devait pas être le seul. C’était d’ailleurs quelque chose qu’il avait toujours aimé chez sa deuxième femme : son amour pour les dessous. Lily-Lune possédait une pièce remplie de dentelles, de soie et même de cuir. Dommage qu’elle ne les eût pas portés qu’en sa compagnie.
L’appartement était modeste mais il avait reconnu la patte artistique de certains tableaux. Ça lui avait donné envie d’en faire un. Sur le côté, le Khami qui le suivait tout le temps le regardait s’activer. Il faisait le ménage, rangeait, cuisinait. Cela faisait plusieurs heures. Il avait préparé des petites boîtes repas pour une bonne semaine et mis des petits mots sur chacune, visant à encourager la Luxurieuse dans ses journées. Certains - surtout des Réprouvés un peu limités - diraient que sa virilité en prenait un coup mais, curieusement, ça ne l’avait jamais vraiment intéressé. Il aimait quand les choses étaient propres et sentaient bons. Il adorait manger équilibré et prendre du temps pour concocter des plats qu’il savait délicieux. Puisqu’il avait décidé de faire d’Oriane sa Maîtresse, il avait aussi désiré prendre soin d’elle. Parfois, il se perdait un peu dans le Temps et l’oubliait entre deux tâches divines mais il se rappelait toujours ses obligations à un moment ou à un autre. Il n’avait pas encore eu l’occasion d’officier en sa présence. Il préférait ne pas regarder ce qu’elle lui demanderait de faire. Ce serait la surprise. En attendant, il allait refaire un peu la décoration de sa chambre et dessiner directement sur le mur en face de son lit. Il n’avait pas de modèle mais n’avait qu’à réfléchir pour s’en trouver un. Il n’y avait pas à chercher bien loin, même si d’autres diraient que c’était peut-être faire preuve d’orgueil que de penser que la Déchue se touchait en pensant à lui. Ou pas. De toute façon, rien ne disait qu’il était le modèle de son chef d’œuvre. Il laissa volontairement le visage se perdre au-dessus du plafond. Elle pourrait imaginer qui elle désirait. Un homme, forcément, mais après…
Une fois qu’il eut fini, il se recula un peu et se mit à rire. Il lui rajouta une glace dans la main après une légère réflexion. Il fallait toujours mettre une touche de gourmandise : ça éveillait les sens. « Parfait. Je crois qu’on a fini notre mission. » souffla-t-il à l’adresse du Khami. Celui-ci, sur le lit, posa sa tasse de thé et créa un mochi entre ses petites mains qu’il déposa à côté, sur la couverture. Tout était prêt : l’appartement était rangé, sentait bon, les vêtements d’Oriane avaient été repassés et pliés avec soin, ses repas préparés pour quelques jours et, en prime, elle avait cette nouvelle peinture très réaliste dans sa chambre. Il lui écrivit un mot, le glissa sous son oreiller et s’éclipsa. Il disait « Je me suis dit que vous aimiez les glaces mais si j’en avais dessiné une toute seule, elle serait tombée du mur. Il m’a donc fallu rajouter un porteur. Pour éviter qu’il ne la mange, je ne lui ai pas fait de bouche. »
Kyra Lemingway ~ Déchu ~ Niveau III ~ ◈ Parchemins usagés : 4742 ◈ YinYanisé(e) le : 22/03/2016◈ Activité : Tenancière d'un Bar à vin (rang I) ; Négociatrice (rang I) ; Brasseur (rang I) ; Reine du monde des contes à mi-temps
Avec un soupir fatigué, la Déchue enfonça la clé dans la serrure de l'entrée et la fit tourner sans ménagement dans l'encoche. Au "clic" d'ouverture, elle ramena rapidement le trousseau à son sac tout en poussant la porte avant de vivement cesser le mouvement, les yeux grands ouverts et la mine déconfite. On était entré chez elle. Pendant son absence. À première vue, rien ne semblait avoir été dérangé. Mais c'était ici chez elle. Elle sentait que quelque chose n'était pas comme quand elle avait quitté les lieux plus tôt, dans la mâtinée. Balayant la pièce du regard, les Artifices de Lucifer aidant, les micros-détails seulement perçus jusqu'alors lui sautèrent enfin aux yeux. La première étant l'odeur. Une odeur de propre. Non pas que l'appartement fut dans un état insalubre jusqu'à présent. Mais elle avait l'impression de se trouver dans une toute nouvelle habitation, un bâtiment juste construit et encore inhabité. C'était comme si, du sol au plafond, il avait été passé au lavoir. Bref, récuré comme jamais. Son cœur qui jusque là s'était mit à battre à une cadence plus élevé, ralenti pour un rythme plus soutenu. Elle ignorait qui était l'inconnu qui avait joué la Fae du logis chez elle. Toujours est-il qu'elle supposait qu'un malfaiteur ne prendrait pas cette peine.
S'avançant à pas de loup malgré tout, Oriane referma en douceur la porte derrière elle comme elle tendit l'oreille. Pas un bruit. « Il y a quelqu'un ? ». Question idiote, et elle s'en rendait bien compte une fois qu'elle l'eût posée. Comme si une personne s'invitant en toute discrétion chez quelqu'un sans l'accord de celle-ci allait y répondre ouvertement. Alors elle continua son inspection, détaillant chaque recoin de son appartement investi, jusqu'à ce que son regard ne s'attarde sur une pile de boîtes sur le plan de travail de la cuisine. Elle s'en approcha. Puis, avec méfiance, elle souleva le couvercle de l'une d'elle avant de totalement l'en découvrir une fois son contenu connu. De la nourriture. Elle réitéra l'opération avec une seconde. Même contenu, différent plat cependant. Elle arqua un sourcil. C'est que ça avait l'air appétissant en plus. « Où est-ce que je vais pouvoir stocker ça ? » se fit-elle à elle même en refermant les boîtes. Car en fait, le problème relevait moins du stockage que de la conservation. Et il était bien hors de question qu'elle jette ça. La méfiance finissant par se muer en curiosité, elle se saisit de l'un des petits papiers, un sourire se dessinant en lisant les quelques lignes inscrites.
Délaissant le message où elle l'avait récupéré, elle fit de même avec la potentielle présence. Elle se moquait bien qu'il soit encore chez elle à présent, il pouvait même rester tant qu'il voulait si c'était pour l'envahir ainsi. Accrochant son sac à une chaise, elle jeta un regard amusé au linge plié sur la table. Tout y était passé. Elle n'avait pas la volonté de prendre ce temps. Ou bien elle y consacrait une journée pour une action. D'un pas décidé elle s'avança dans le couloir, commençant à se dévêtir sur le chemin. C'est sur son lit que les vêtements atterrirent négligemment tandis qu'elle s'apprêtait à quitter la chambre pour la salle d'eau. Toutefois, s'arrêta-t-elle sur le pas de la porte, le coin de son regard captant quelque chose n'étant pas là auparavant. Elle tourna sur elle-même, et découvrit que l'on avait repeint tout un pan de son mur de chambre. Alors elle s'avança de quelques pas vers l'œuvre picturale, sa bouche formant un « Oh » inaudible avant de se refermer en un sourire coquin. « Hum. ». Son index passant de ses lèvres à son décolleté, elle songea que, à présent, elle ne pourrait plus inviter tout le monde dans sa chambre. Finalement, cet invité surprise s'était avéré un peu plus envahissant qu'elle ne l'avait imaginé de prime abord.
gotheim pour 
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