Autour d'un Thé

— Bonjour, Marquise !

Eledhwen s'était redressée avec une maîtrise qui laissait Mancinia admirative. La grâce de l'Ygdraë ne cessait de l'impressionner depuis qu'elles avaient décidées de se revoir durant leur séjour sur l'île enneigée, elles nouaient des liens volontiers. L'Humaine pour apprendre quelques notions importantes du peuple sylvestre et l'Ygdraë pour avoir un retour à remettre aux autorités. Si elle était consciente d'avoir quelques bonnes cartes en raison de sa réputation, la Fille du Soleil voulait tout de même se montrer sur un bon endroit.

— Comment va notre petit bout ?
— Elle est énergique !
— A qui le dites vous !

Elles rirent, avant de s'asseoir et de commander du thé et quelques pâtisseries. Eledhwen avait connu les affres d'une soirée, d'une nuit et d'une matinée tourmentée par les cris de l'enfant, mesurant l'attachement qu'elle portait au couple qu'incarnait l'Ange et l'Humaine. Ils étaient fiancés, mais non-mariés, ce qui la surprenait assez. Ce n'était pas un engagement récent, qui plus est. Consciente que les Enfants de Sympan étaient relativement éphémère dans le temps, ce choix de vie l'intriguait assez. Mais l'Ygdraë avait rapidement compris que les éloignements avaient eu raison de leur volonté de mariage, notamment suite aux actions angéliques sur la Terre Blanche et les récents bouleversements qu'avait connu les terres du Yin et du Yang. Il était évident que malgré l'extermination des Vils, le Chaos demeurait dans sa meilleure phase avec le couronnement d'un nouveau monarque qui avait oeuvré en compagnie des Anges. Autant dire qu'il y avait eu des remous entre eux, peut-être ? Est-ce que leur couple était aussi solide que cela ?

— Avez-vous convenu d'un nom ?
— Eh bien, nous songions à Sif.
— C'est ... original !

Ce n'était pas un prénom courant, mais il y avait une bonne connotation venu des leurs. Mancinia semblait mettre un point d'honneur à ne pas écarter cet enfant des siens, tout en l'intégrant aux moeurs des deux peuples d'où étaient issus ses parents. C'était une bonne chose.

— Et vos enfants, Eledhwen ? Je vous embête toujours avec mes petits sans me soucier de votre propre famille !
— Oh, nous en avons douze.

Son ton était léger, presque dit sur le ton de la banalité. Douze ? Certes, les Humains avaient parfois un nombre conséquent d'héritiers, mais elle n'avait pas souvenir que les Ygdraë avaient autant de soucis de natalité de leur côté. Peut-être était-ce dû à leur exceptionnel longévité ?

— Je suis venu en voyage de repos avec mon époux, nous sommes très prit par nos fonctions, vous connaissez cela aussi bien que moi. Notre cadet à seulement quinze ans, il se nomme Branthalas, mais il se démarque aussi bien que notre autre fils, Bronthion. Il aime la cuisine et se destine à cette pratique à l'avenir, nous essayons de l'encourager au mieux dans la voix qu'il souhaite suivre, bien entendu, c'est notre rôle en tant que parents. Ensuite ...

C'était une erreur que de lancer une mère sur l'état de sa descendance, surtout aussi vaste. Seulement, cela plaisait assez à Mancinia d'entendre parler des réussites de personnes adultes, les siens étant encore très petits.

— Si vous avez des questions, n'hésitez pas, reprit-elle en buvant son thé.

Mancinia reposait sa tasse dans sa coupe, l'observant distraitement avant de relever son regard vers son interlocutrice.

— J'en aurais une, admit-elle. Auriez-vous entendu parler d'Astriid Cëlwùn ?
— Oui, bien entendu. Elle est ressortie victorieuse d'une épreuve de la Coupe des Nations relativement lourde et dangereuse malgré son jeune âge. Pourquoi cette question ?
— Nous avons fait sa rencontre, à Avalon. C'est une personne qui m'a fait forte impression.

Elle avait ce petit quelque chose de pétillant que l'on n'oubliait pas. Mancinia était aussi consciente que ses propos aurait un impact plus large. Elle l'avait mesurée avec le Baron Paiberym, mais il n'était pas question de reproduire la même erreur. Ceux-ci, elle l'espérait, seraient positifs envers la jeune Ygdraë. Ce n'était pas tous les jours qu'on avait l'appréciation d'une Marquise des Magiciens, mais qui était également une Humaine.

— Nous pensions lui proposer d'être la marraine de Sif. Comme nous vous l'avons dit, nous souhaiterions avoir un Ygdraë pour prendre en charge une partie de son éducation et il est dans nos coutumes de trouver des parrains, ou des marraines, pour nous suppléer en cas de besoin.

Eledhwen semblait plongée dans une vaste réflexion.

— Je vois. Ce serait ... un honneur immense pour n'importe qui. Elle est néanmoins très jeune pour une telle tâche.
— Oh, elle sera plus âgée et expérimenté lorsque Sif en aura besoin.

Le regard de l'Humaine s'illuminait brutalement.

— Excusez-moi.

Elle se redressait, se dirigeant d'un pas précipiter vers Neah. Elle tendit les bras pour saisir sa nouvelle enfant dans ceux-ci, revenue d'une promenade avec son père dont elle gratifiait d'un baiser. L'Ygdraë comprit. Oui, leur couple était solide. Et l'enfant qui riait et appréciait les embrassades et autres câlins de sa mère d'adoption était véritablement aimée. Ils feraient tout pour la rendre heureuse au même titre que leurs autres enfants. L'Ange, qui avait l'air plus réservé, semblait être tout aussi aimant que sa Protégée. Il y avait quelque chose entre eux de bien plus profond qu'un simple Amour.

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