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 [Q] Le battement de la vérité | Solo

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Priam et Laëth
~ Ange ~ Niveau III ~

~ Ange ~ Niveau III ~
◈ Parchemins usagés : 3866
◈ YinYanisé(e) le : 02/02/2018
◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam et Laëth
Jeu 12 Déc 2019, 17:41


L
e battement de la vérité

Solo avec Laëth



Partenaire : Solo.
Intrigue/Objectif : Les rumeurs qui courent sur Kaahl et Laëth atteignent la terre d’Iyora. La jeune femme devra endurer la pression que cela fait peser sur ses épaules, les regards de ses collègues et faire preuve de force.


Comme elle attrapait l’enveloppe et apercevait les courbes caractéristiques des lettres, Laëth sourit. Priam. « Merci. » dit-elle à l’adresse du messager. Quelques jours plus tôt, elle lui avait retourné une missive. Il avait dû la recevoir ; il était bien plus rapide qu’elle dans ses réponses. Elle ne se plaignait pas : lire ce qu’il lui envoyait lui donnait l’impression d’être près de lui, juste quelques instants. C’était apaisant. Elle déposa sa hallebarde, avec laquelle elle venait de s’entraîner, contre un poteau de bois, puis se mit à marcher doucement dans le campement. Ils étaient arrivés depuis quelques temps : les tentes avaient été dressées, de même que tout ce qui pouvait s’avérer nécessaire au sein de leur installation de fortune. L’excitation les rongeait : tous avaient envie de s’enfoncer plus amplement dans ces nouveaux territoires, où la forêt le disputait aux montagnes. Ils en avaient entendu parler, on la leur avait décrite : désormais, la volonté de découvrir cette terre par leurs propres yeux les rongeait. La jeune Ange déplia le courrier et débuta sa lecture. Dès les premières lignes, elle sut que son frère n’avait pas reçu de ses nouvelles. Cela l’interloqua, puis l’inquiéta lorsqu’elle lut que quelque chose le préoccupait. Elle fronça les sourcils et s’interrompit net dans sa marche. Que se passait-il ?

Le cœur qui détale. Les yeux écarquillés. Les mains tremblantes. Les joues rougies. Le frisson dans le dos. La sueur dans la nuque. La crampe dans l’estomac. La respiration qui balbutie. Non. Son cerveau s’était arrêté. Elle relisait les mêmes phrases sans en extraire plus de sens, sans même vraiment les comprendre. Il n’y avait plus rien ; c’était une boucle trop vide, trop pleine, qui tournoyait, tournoyait, tournoyait. C’était le refus, le déni, l’impossible, qui luttaient tous ensemble pour rationaliser et rassurer. Machinalement, elle porta une main à son ventre : ses doigts se crispèrent autour de la peau tendre. Non. Ses neurones reprirent leur routine, entraînés par l’adrénaline. Rien ne prospérait dans son utérus. Pourtant, cela n’avait aucune importance : si Priam était au courant, lui qui ne s’intéressait pas aux rumeurs et passait la majeure partie de son temps seul, la quasi-totalité des Magiciens et des Anges devait l’être aussi. Si elle était bel et bien fertile, un monstre grandissait dans ses entrailles et elle disparaîtrait, parce que sa condition jetait l’opprobre sur tout un peuple. Elle était une honte à laver, une tache à effacer, une souillure à éliminer, une histoire à brûler. Non. Tout s’ordonna ; et tout implosa. La panique, l’affolement, l’effroi, l’horreur, l’épouvante. Juchés sur leurs destriers de malheur, ils chargèrent dans un même assaut : les retranchements de l’esprit ne suffirent pas. La forteresse tomba, et Laëth se mit à courir à travers le camp. Elle ne sentait pas ses jambes ; ce n’étaient pas elles qui la portaient, mais plutôt cette terreur qui dévorait son cœur.

Elle avait ralenti sa course ; elle traînait même les pieds. Elle s’approchait lentement, comme si ne pas agir pouvait annuler tout ce qui s’était passé, tout ce qui avait été dit et transformé. Comme si ne rien faire pouvait lui permettre de reprendre le contrôle sur cette destinée qui lui filait entre les doigts. « Hena… » La mentor se retourna. « Ah, Laëth ! Je te cherch- » Elle s’interrompit en voyant son visage. Au milieu de celui-ci, rendu trop pâle par les émotions qui torpillaient son esprit, ses pupilles vibraient et des larmes menaçaient de couler. La jeune Ange lui tendit la lettre, puis plaqua ses mains sur sa figure et les remonta dans ses cheveux. Tout son corps tremblait. Elle avait vraiment du mal à respirer. La guerrière baissa les yeux sur le papier, puis releva la tête. « On m’a déjà mise au courant. » - « Je ne suis pas du tout… c-ce n’est pas… » Des mots s’arrachaient à sa bouche dans le chaos. Aucun sens ne s’en dégageait ; le capharnaüm qui régnait en elle détruisait tous ses discours. Hena la dévisageait, impassible. Elle ne voulait pas croire qu’elle mentait, mais elle devait s’en assurer, sans se laisser attendrir par son trouble. Ce n’étaient pas des bruits à prendre à la légère, pour un nombre conséquent de raisons. « Laëth. Calme-toi. » Elle chercha le regard de la novice. « On va tirer ça au clai- » - « Hena ! » La blonde pivota pour signifier à celui qui l’apostrophait que ce n’était pas le moment. D’autres regards avaient convergé vers les deux Anges – certains étaient déjà au courant. Elle n’eut le temps de rien faire : sa protégée s’effondra dans un choc sourd. « Laëth ! » Tout s’était éteint : le monde avait basculé dans la quiétude d’une nuit sans étoiles.

***

« On ne peut pas garder une femme enceinte avec nous. Ce serait de la folie. » Thadrias et Hena campaient devant la tente médicale. Il passa une main sur son front, désabusé. « On ne sait même pas si elle est vraiment enceinte ! » Il lui jeta une œillade éloquente. « Les rumeurs ne sont pas nécessairement infondées. » Elle fit un grand geste du bras, agacée. « Pas nécessairement. Les gens peuvent colporter n’importe quoi ! Il suffit qu’une personne les ait vus une fois ensemble, peut-être un peu trop proches, et ce sont toutes les commères du coin qui s’enflamment ! Peut-être que tout est parti d’une simple traînée de poudre, injustifiée… » Il avança d’un pas vers l’entrée de l’infirmerie, la détermination imprimée sur ses traits. « Il n’y a qu’un seul moyen de le savoir. » - « Tu la laisses. » gronda Hena, menaçante, en se plantant devant lui. « Je peux le faire moi-même. » - « Laisse les médecins s’en charger. Elle est suffisamment stressée comme ça, elle n’a pas besoin que tu t’imposes. » - « Pourquoi stresser si elle est toujours vierge ? Pourquoi stresser au point de s’évanouir ? Ça n’a pas de sens, Hena. Sauf si elle est enceinte… on sait que les femmes sont plus sensibles à leur environnement et aux malaises, dans ces conditions. » La mentor se redressa et fronça les sourcils. Elle darda sur le fantassin un regard assassin. « N’importe quoi. C’est parce que tout le monde l’observe de la même façon que toi, avec méfiance et mépris. Parce que cette rumeur ne va pas disparaître du jour au lendemain. Parce qu’elle doit gérer une situation qu’elle n’aurait pas pu prévoir, au beau milieu d’expéditions qui lui tiennent à cœur. Et au-delà de tout ça, et si elle l’est vraiment, je ne pense pas qu’elle ait envie d’être enceinte et de devenir mère dans les prochains mois. Surtout pas comme ça. » Un voile attendri glissa sur ses yeux, puis elle poursuivit, d’une voix plus douce : « C’est parfaitement normal que tout cela l’affecte. C’est une gamine à fleur de peau. Comment voulais-tu qu’elle réagisse ? » Le brun eut un rire sec. « Et tu veux en faire une guerrière ? J’ai hâte de voir ça. » Prête à répliquer, il ne la laissa pas le faire. « Elle a communiqué avec le Baron Paiberym. Un des messagers nous a confirmé qu’il avait fait distribuer une lettre à son nom, au Duché de Darin. » Il la toisa. « Tu le savais ? » - « Non. Je savais qu’elle avait reçu une lettre de… d’un homme qu’elle apprécie, visiblement, mais je ne savais pas que c’était lui. » Elle ne mentionna pas la bague. C’eût été encore pire. Toutefois, elle ne pouvait s’empêcher de se questionner : les on-dit ne rapportaient-ils pas la vérité ? L’anneau ne symbolisait-il pas des fiançailles ? La Recrue avait-elle réagi si vivement parce que tout devait se faire dans la précipitation, pour la sauver du déshonneur ? Elle repensa à ses traits défaits et son regard mortifié, quelques minutes plus tôt. Elle n’avait pas pu mentir. Pas comme ça, pas sur ça. « Hum. Peut-être qu’elle lui annonçait sa grossesse, et que c’est comme ça que la rumeur s’est répandue. » - « Peut-être. »

Depuis l’intérieur de la tente, Laëth entendait très distinctement leur conversation. Couchée sur la tranche et roulée en boule, elle ne bougeait pas. Des larmes silencieuses roulaient sur ses joues jusqu’à venir humidifier la toile du lit de camp. Thadrias avait raison. Elle n’avait rien d’une combattante. Elle pouvait bien lutter ; ses émotions finissaient toujours par la rattraper et la jeter dans un gouffre sans fond. Comment ferait-elle, si cela arrivait à un moment fatidique ? Sur un champ de bataille ? Devant l’ennemi à abattre ? Face à l’ami à défendre ? Elle plissa fort les paupières et ramena un peu plus ses jambes contre elle, les bras enroulés autour de l’un de ses genoux. Elle voulait que Priam fût là. Elle avait besoin de lui, de sa voix apaisante, de la chaleur de son étreinte, de l’odeur de ses vêtements. Même si elle devait endurer son sarcasme et sa colère. Ils ne tenaient pas dans le temps ; elle savait qu’ils s’évanouiraient à la minute où il saurait que le socle des rumeurs n’était qu’un nuage éthéré. Elle voulait rentrer chez elle. Elle voulait voir ses parents. Se blottir contre eux, fermer les yeux, tout oublier. Un bruissement lui parvint : quelqu’un entrait. Elle tressaillit mais demeura immobile. « Mademoiselle Belegad. » Des pas s’approchèrent. « Je suis le médecin Dellavôs. » - « Je ne suis pas enceinte. » répéta-t-elle d’une voix faible, dans laquelle transparaissait cependant une fermeté embrasée par l’ire qui l’habitait. Depuis la réception de la lettre, elle ne cessait de répéter ces cinq mots. Ils rencontraient toujours des pupilles sceptiques. Personne ne voulait la croire sur parole. Très simplement, il répondit : « Je ne vous accuse pas. » Elle l’entendit tirer un tabouret. « Allongez-vous sur le dos, s’il vous plaît. » Aucun mouvement. « Ce sont juste des formalités. Il n’y a rien à craindre, je vous le promets. » Un frisson la parcourut. Elle renifla, puis, finalement, se tourna. Du revers de sa manche, elle essuya ses pommettes mouillées. Il lui sourit. Il avait un visage rond, presque enfantin, des taches de rousseur et d’épaisses boucles cuivrées. « Je ne mens pas. » Ce n’était qu’un souffle, à peine audible. Il eut l’air embêté. « Je n’en doute pas. Mais compte tenu des circonstances, il faut vérifier. On ne peut prendre aucun risque. C’est autant pour vous que pour la bonne tenue des expéditions, vous comprenez ? » Laëth le dévisagea, silencieuse. « De quand datent vos dernières règles ? » Elle baissa les yeux, tandis qu’une vague de culpabilité nécrosait ses tripes. « … J’aurais dû les avoir durant les premiers jours des expéditions. » Mais elle avait vu Kaahl après – avant aussi, cependant elle avait perdu du sang entre temps. Personne ne le savait. Elle ne pouvait pas le dire, si ? Non. Décemment pas. Elle aurait empiré son cas. « Ce n’est pas un facteur décisif. » précisa-t-il pour la rassurer. « Il peut y avoir aménorrhée en cas de stress. » Il n’était pas obstétricien. Tous les spécialistes étaient restés sur le continent, puisqu’a priori, ils n’auraient pas dû être utiles sur les terres d’Iyora. « Je vais vous demander de soulever votre haut. Je vais juste poser mes mains sur votre ventre et essayer de trouver une trace de vie, d’accord ? » La jeune femme acquiesça lentement. Son pouls s’emballait, aussi féroce qu’apeuré. Elle attrapa la base de son vêtement et le remonta pour dégager son abdomen. Lorsque les doigts du médecin entrèrent en contact avec sa peau, il y eut cette double sensation : celle de la réalité du toucher et une autre, qui la projetait hors d’elle-même, comme si elle ne s’appartenait plus vraiment. Elle fixait le toit pentu de l’infirmerie. Il allait dire qu’il ne trouvait rien, néanmoins, elle ne parvenait pas à empêcher l’adrénaline de pulser. Des secondes, des minutes, des heures. Finalement, il articula : « Mademoiselle. Je ne peux pas être formel. Je suis désolé. Ce n’est pas ma spécialité… je pense qu’il va falloir attendre que quelqu’un vienne du continent, ou qu’on vous y ramène. » Sa mâchoire trembla, et les larmes recommencèrent leur course tyrannique. Les dents serrées, elle murmura : « Je ne partirai pas. »

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Priam et Laëth
Jeu 12 Déc 2019, 17:51


L
e battement de la vérité

Solo avec Laëth


Hena pénétra dans la tente. Dellavôs était sorti et leur avait annoncé qu’il ne pouvait pas confirmer qu’elle disait la vérité, car il n’était certain de rien. Pourquoi l’avoir fait venir, s’il n’était pas capable de mener à bien la tâche qui lui incombait ? Thadrias avait levé les yeux au ciel – au moins, il s’était retenu de faire une remarque condescendante –, cependant, il avait accepté de l’accompagner pour faire un rapport. De son côté, elle devait rester près de la Recrue. Ses yeux tombèrent immédiatement sur celle-ci, recroquevillée là où elle l’avait laissée quelques instants plus tôt. Son cœur se serra. « Laëth… » Elle s’avança sans bruit puis s’assit avec précaution sur le rebord du lit. Elle hésita, avant de tendre une main vers la joue de la jeune femme pour la caresser. Quelques mèches collaient à ses pommettes, qu’elle replaça délicatement derrière son oreille. Elles demeurèrent quelques minutes en silence. « Tout va bien se passer. » assura la mentor. Pas de réponse. C’était un mutisme buté, qu’incarnait la fixité de son regard, résolument tourné vers le pan de toile qui lui faisait face. La blonde avait pris l’habitude de ses explosions tonitruantes ; le calme qu’elle dégageait l’inquiétait plus que tous les cris qu’elle aurait pu pousser. « Laëth, s’il te plaît. » Un souffle bref du nez, une bouffée d’agacement. « Parle-moi. » - « Ça ne sert à rien de parler. Personne ne me croit. » Le ton était si tranchant que Hena réprima un mouvement de recul. « Je te crois, moi. » affirma-t-elle d’une voix emplie de bienveillance. L’Ange couchée se tourna à demi pour voir son visage. Elle chercha ses yeux. Les siens étaient rouges et gonflés des larmes qu’elle avait versées. La blonde ferma les paupières un instant, puis tendit les bras vers elle. « Viens là. » Moins d’une seconde plus tard, elle se ruait contre elle. Et des sanglots déchirèrent à nouveau son dos fatigué.

Elle avait le cœur lourd, lourd de honte et lourd de peine. Son poids descendait dans son estomac, et si elle devait accoucher de quelque chose, ce serait sans doute de cette colère qui venait affectueusement se lover dans ses ventricules fous de désespoir. La main de Hena s’était perdue dans ses cheveux. Le menton posé contre son front, la guerrière tentait de calmer les soubresauts qui agitaient la jeune Ange. Elle parlait doucement, tendre et sereine, un peu à la manière d’une mère. La scène lui rappelait les moments qu’elle avait passés à réconforter ses fils meurtris par des cauchemars ou des affaires du cœur. Ses doigts dans leurs épais cheveux, ses bras autour de leurs corps malmenés par la peur et la douleur, leur respiration contre son épaule ou son cou. « Ça va passer. » Pas tout de suite. Dans quelques temps. Mais les choses finiraient par se tasser, les rumeurs par s’étouffer. Elle ferma les yeux pour les rouvrir dès qu’elle entendit le son faible de sa voix. « Je ne veux pas rentrer, mais je ne veux pas rester ici… » - « Où est-ce que tu voudrais aller ? » Laëth inclina la tête pour cacher son visage contre la clavicule de sa mentor. « N’importe où. » Après un temps d’hésitation, elle lâcha : « Chez moi. Chez mes parents. A Lumnaar’Yuvon… avec Priam. » Une moue crispée tordit les traits de la blonde. « Laëth… » Elle se décala légèrement pour se détacher d’elle et déposa ses deux mains sur ses épaules. Elle chercha son regard vert. « C’est impossible, tu le sais. » La jeune femme hocha la tête. « Oui… » Silence. « Quand le médecin sera arrivé du continent, tout rentrera dans l’ordre. » Elle redressa légèrement le menton, et Hena vit un éclat farouche briller dans ses iris. « Ici. Pas ailleurs. » Elle passa une main sur chacune de ses joues pour en chasser les traces salées. « Je ne suis pas idiote, je sais bien qu’ils continueront à parler dans mon dos. Même si on leur fournit la preuve que je ne suis pas enceinte… certains continueront à parler comme si c’était le cas. » Elle serait toujours la risée des petits comités mesquins et un sujet de potins croustillants pour les jeunes demoiselles à la vertu intacte comme pour les hommes qui avaient déjà sacrifié leur virginité. « Ils inventeront sûrement plein d’histoires pour justifier le fait que je revienne des expéditions sans enfant dans les bras, et- » Son interlocutrice posa un doigt sur ses lèvres, les sourcils froncés. « Arrête. » Elle avait vu la lueur de la terreur gonfler ses pupilles. « Il ne sert à rien d’imaginer la suite. Tu ne peux pas la prévoir. » Laëth resta silencieuse. « Tu sais, je pense que tu devrais essayer de le contacter. » Brusquée, elle se redressa vivement. « Kaahl ? Jamais. » Le ton était catégorique. Hena cligna des yeux. « Pourquoi ? » - « Tout est de sa faute. Je n’ai jamais parlé de lui à personne, moi. » Le goût amer de la trahison imprégnait ses paroles et un lac de défiance imbibait ses prunelles. « Il n’a certainement pas voulu tout cela. Il a juste dû dire qu’il aimerait t’épouser à la ou les mauvaises personnes, c’est tout. » - « Il aurait pu se taire. » cassa la brune. « Ce n’est pas sur lui que la honte est jetée. Il s’en sort en toute impunité. C’est moi qui subis le revers de ses confidences. » - « Je reste convaincue que le mieux serait de lui parler pour savoir ce qu’il en est réellement. » - « Il n’a rien démenti. » - « Tu n’en sais rien. » - « Ah oui ? » Un rictus sarcastique plia sa bouche. Elle se sépara complètement de sa guide. « Alors pourquoi tout le monde colporte ce qui est faux ? Pourquoi ne pas clamer la vérité, plutôt ? » Tandis qu’elle se relevait, la blonde baissa la tête et souffla doucement par le nez. « Parce que ce serait moins intéressant. Personne ne s’amuse de ce qui est platonique et sans remous. » Platonique et sans remous. Si elle n’avait pas été aussi énervée, elle aurait rougi en repensant aux souvenirs qu’elle avait des Sources et du labyrinthe. « Les gens sont cons. » Et elle les détestait, tous. Surtout lui. « De toute façon, je vais couper court moi-même à ces rumeurs. Je le hais, et je ne veux plus jamais en entendre parler. » Elle contourna Hena et sortit. Dès son premier pied à l’extérieur, elle eut l’impression que tous les regards pesaient sur elle et que des messes-basses s’échangeaient loin de ses oreilles. Toute son assurance se brisa sous l’assaut de la honte, comme un miroir trop fragile éclate sous le coup d’un poing habile.

***

A la lumière enflammée de la bougie, qui projetait sur les tentures des ombres mouvantes, Hena soupira. En devenant mentor, elle n’aurait jamais imaginé se retrouver dans une telle situation. Elle avait adressé son rapport à ses supérieurs, et désormais, il ne lui restait plus qu’à répondre au frère de sa protégée. Quelques jours étaient passés depuis la réception de sa lettre. Ils avaient été chargés, tant à cause des nécessités relatives aux expéditions qu’aux retombées des révélations concernant Laëth.

Priam,


Considérant la situation, je prends la liberté de vous écrire moi-même.

Les rumeurs au sujet de Laëth et de Kaahl Paiberym ne nous sont pas parvenues uniquement par votre lettre, malheureusement. Nous sommes arrivés sur les terres d’Iyora et, comme sur les navires, les nouvelles du continent nous parviennent en masse : chaque personne du détachement est au courant. Comme vous pouvez l’imaginer, dire qu’elle ne le vit pas très bien est un euphémisme. Elle dort peu et a perdu l’appétit. Elle préfère se plonger corps et âme dans ses tâches et son entraînement. J’essaye de faire en sorte qu’elle se ménage. Je veille sur elle et la soutiens du mieux que je le peux. Je lui ai fait préparer des potions pour qu’elle puisse dormir et rester calme. Je tente d’utiliser le Sanctuaire d’Ahena dès que je suis proche d’elle et je l’incite à utiliser son contrôle des émotions – mais trouver la limite entre un état acceptable et un être dénué de ressentis est difficile, ces jours-ci.

Dès que l’on a eu connaissance de la possibilité d’une grossesse, elle a été prise en charge par un médecin, pour confirmer ou infirmer ses dires. Malheureusement, il n’est pas spécialisé dans ce domaine – on n’aurait pas imaginé devoir emmener un obstétricien pour des expéditions militaires – et n’a pas réussi à déterminer s’il y avait bel et bien un être vivant, ou rien du tout. Il est possible qu’on ait besoin de faire appel à un praticien resté sur le continent, ou qu’on doive rapatrier votre sœur… Elle n’est, évidemment, pas d’accord du tout. J’aimerais aussi qu’elle puisse rester, mais cette décision ne dépend ni d’elle ni de moi. Je suppose que nous aurons la réponse dans quelques jours.

Elle soutient qu’il ne s’est rien passé et qu’elle ne porte pas d’enfant. Comme vous l’avez écrit, il subsiste toujours cette étincelle de doute… mais personnellement, j’ai envie de la croire. Je pense même que je la crois. Je serais étonnée de la savoir si bonne manipulatrice, à dire vrai. Et je ne vois pas tellement dans quel monde un Magicien s’amuserait à supprimer de tels souvenirs ou à violer quelqu’un. Enfin, n’envisageons pas le pire, surtout quand il paraît si irrationnel. De ce que j’ai pu voir, votre sœur n’a rien d’une menteuse et je doute qu’elle s’entoure de personnes qui pourraient nuire à son propre bien.

Pour cette histoire de mariage, j’en ai parlé avec elle, bien avant de savoir qu’il s’agissait du Baron Paiberym. Elle a reçu une lettre et une bague, ce qui l’a profondément bouleversée, et j’ai appris ainsi qu’un homme s’intéressait à elle. Elle m’a dit qu’elle pensait qu’il voulait l’épouser. De son côté, les choses étaient bien plus floues. Elle a affirmé ne pas vouloir se marier à quelqu’un qu’elle ne connaît presque pas, mais je suis persuadée que c’est plus complexe et qu’elle ressent une véritable attirance, peut-être même des sentiments naissants. C’est comme beaucoup de débuts : le déni face à ce qu’on ne comprend pas, face à ce qui nous submerge, face à ce qu’elle ne peut absolument pas contrôler… Vous la connaissez mieux que moi : je n’ai pas besoin de m’étendre.

Je songe que le Baron a peut-être parlé d’elle et de sa volonté de l’épouser à des proches. Vous connaissez les Magiciens : malgré tout le respect que j’ai pour eux, force est de constater qu’il leur suffit d’un rien pour s’emballer et affabuler. Laëth semble très en colère. Elle refuse catégoriquement d’envoyer une lettre à Kaahl Paiberym. Je peux le comprendre, même si je pense que cela pourrait la rassurer ou, a minima, clarifier la situation. Elle dit qu’elle le déteste, mais je mets cela sur le compte de l’impulsivité. Si rien ne ressort dans les prochains jours, peut-être devriez-vous essayer de le contacter pour tirer le voile sur cette situation ? J’avoue être mitigée sur la question. Je n’ai pas envie de m’en mêler, mais voir Laëth dans cet état m’attriste, et j’aimerais pouvoir faire quelque chose de plus pour l’apaiser. Peut-être auriez-vous des idées ?

Dans tous les cas, rassurez-vous. Je pense pouvoir prétendre sans orgueil qu’elle est entre de bonnes mains. Si elle ne se sent pas de le faire, je vous donnerai des nouvelles dès que possible.

Avec toute mon amitié,

Hena Lilayel



Avec soin, elle plia la lettre et la glissa dans une enveloppe, qu’elle cacheta. Elle partirait dès le lendemain.

FIN

Message II - 1895 mots



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