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 ~ Lorsque le réel devient irréel ~ [ Solo ]

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Dim 08 Fév 2015, 20:12


[ Mais toujours est-il que l'amour, de douleur s'accompagne ]


Il ferme les yeux. Inspirant fortement, il brosse une mèche de cheveux, le vent fouettant son visage calme, impassible. Sa crinière violette effleure sa nuque, et brille des rayons lumineux du soleil couché, tandis qu'il déferle le ciel, ses deux ailes rachitiques d'un noir pur et sombre exposées aux regards. Seulement, une véritable tempête défonce son coeur malade, cet organe tambourinant dans sa poitrine, ne demandant qu'à en sortir, comme devenu pour le corps un fardeau à part entière. Il veux s'en délivrer, n'étant pas du genre à souffrir inutilement. Dans son poing, ses doigts éraflent toujours la surface de la peau, jusqu'à en faire une plaie, si profonde que le sang en coule. Il souhaite s'infliger le même mal, un mal proportionnel à celui que ressent son coeur. Son corps aveugle ses sens par ce biais, et il en va jusqu'à oublier la trahison qu'il ressentit un jour. Pour la première fois. Il n'est pas celui qui l'inflige, mais celui qui la subit. Les rôles sont inversés, et il ne sait comment se frotter à tel dilemme. Il envisage ensuite de se défouler sur quelqu'un. Fouillant du regard le paysage, ni de jour ni de nuit, un subtile mélange des deux, il aperçoit rapidement une jeune femme. Elle est seule, lui aussi. Il ne ressent plus aucune contrainte, aucune restriction dans sa morale. Il est enfin libre de tout jugement, de tout ce qui avait pu retenir ses crocs, ses griffes à ce jour. L'opinion de Sherry, la façon dont le regarderait Nao.. Il n'en a que faire. Il ne cherche que cet apaisement par le sang, que cet abandon dans le mal qui le réconforte. Pourquoi ? Alors que jusque là, il maudissait ceux à s'y réfugier, tout démon qui perdaient une conscience propre pour se laisser gouverner par de simples instincts bestiaux.. Or, la réponse est simple et concise : la peur. Il sombre de nouveau.. dans le péché, dans la monstruosité. Celle qu'il avait fuit avec tant d'égards, celle qui lui avait donné tout ce qu'à ce jour il chérissait. Il revient sur ses pas, sur ses valeurs. Dépouillé de ces deux êtres, il n'est plus rien. Kai lui-même le sait, mais il ne dit rien. Il ne voit rien, n'entend rien, encore moins la voix de son pauvre coeur. Il est aveugle à tout, car il est un lâche qui ne veut rien affronter. Et ça, son orgueil ne peut l'accepter. Il est au centre de tout. Au centre de leurs problèmes, tracas. Sa nature n'est au final pas compatible avec la leur ? Si, il y a moyen de l'être, mais pour ça, il lui faut évoluer, changer, accepter  la vérité au lieu de la bafouer, de la substituer par une lui étant propre. Il faut qu'il arrête de fuir, et ce chemin pour l'y mener, risque d'être semé s'embûches, voire irréalisable pour ce petit à qui il faut grandir..

Il ouvre la bouche, prêt à la croquer. Il n'est ni vampire, ni cannibale, mais il veut s'y essayer. De quelle autre raison aurait-il, lui un démon, besoin pour perpétrer le mal ? Son cerveau tourne au vinaigre, commence à s'emplir d'un poison qu'il transmet aux autres par ses paroles, par ses gestes, par son touché. Son être tout entier le respire, à plein poumons. C'est ainsi. Il ne l'avait pas voulu, les autres non plus. Arrivé à portée de son cou, il se retient. Il hésite, la jeune femme ne s'étant toujours pas rendue compte de sa présence. Il sent son odeur, et elle le répugne. Il effleure sa peau blanche, et celle-ci ne correspond point à celle qu'il veut toucher. Rien n'est la même. Rien. Et pourtant, il se refuse à croire qu'ils sont les seuls dont il a besoin. La belle se retourne, et l'inévitable arrive. Quelle sotte de l'avoir fait. Elle ne pouvait savoir que la mort l'y attendait, certes, mais perdit tout de même la vie pour un geste aussi banal.. Le démon croque la nuque, étouffe les cris, accueille les larmes d'une proie innocente, qui ne méritait pas tel massacre. Il déchire enfin la chair de son épaule, avant de s'éloigner, écoeuré. Il essuie sa bouche, laisse le corps tomber à terre, s'assurant de son trépas. Sa manche pleine de sang laisse les gouttes tomber, une par une, jusqu'à en former une flaque, par terre. Celui de la jeune vierge, se mélange au sien, jusqu'à ne faire plus qu'un. Il la regarde comme si ne rien était. Il ne ressent ni pitié, ni compassion. Il ne ressent ni peine, ni satisfaction. Il ne ressent rien. Peu soucieux, il ne veut plus rien ressentir. Être ainsi pour toujours lui va très bien. Il veut garder ce détachement, cette isolation sur lui-même. Il a raison. C'est le plus simple quand on veut s'éviter de souffrir, mais ce n'est légitime que pour ceux dont la blessure est profonde, et surtout à sens unique. Cette pratique en perd tout son sens lorsque son utilisateur est celui à provoquer une telle souffrance, un tel besoin d'enfermement. Kai était le seul fautif, et il n'arrivait pas à l'admettre. Wrath avait ouvert les yeux de la réprouvée, lui avait montré à quel point les choses ne pouvaient se prolonger sur cette route raide, étroite, car elle risquait d'en tomber à tout moment. Ce pont fragile ne tenait plus qu'à un fil, et le démon l'anéantirait sans merci, sans rien comprendre, sans reproche aucune à sa personne. Tout cela, elle le savait finalement, mais elle aussi essayait jusque là de fuir, refusait d'admettre que la faute lui incombait. Pauvre sotte elle aussi. Pauvre folle à s'attacher à un démon. L'ange n'échappait guère à la règle, étant même le premier concerné, le premier qu'on devrait blâmer. Car il était le début, mais aussi la fin de tout.

Il aperçoit un village proche dès son envol. Il s'y pose, se débarrasse des habits tachés de sang, voit un apothicaire pour quelques potions rapides, avant de rejoindre l'auberge. Une chambre simple, sobre, sans aucun détail superficiel. Il n'a besoin de rien. Il se suffit amplement. Il passe des heures à la fenêtre, à en effacer la buée, à contempler les derniers reflets de l'astre solaire. Il s'en détache la nuit tombée, ennuyé par les cris de douleur et de terreur à la découverte du cadavre, méconnaissable, aux portes de la ville. Couché, avec son bras pour oreiller, il ferme ses paupières, force son corps à s'endormir, pour ne plus en être perturbé. Le lendemain, les choses se pimentent. Quelques villageois, s'étant octroyés le rôle de milice du voisinage, cherchent le coupable avec véhémence, détermination. Pas de chance pour eux, le nombre d'étrangers à voir pénétré, et siégé en ville la veille, dépasse tous ceux du mois dernier, voire davantage. Ils n'ont aucun moyen de remonter jusqu'à lui. Kai, ne s'en souciant même pas, prend son petit déjeuner en compagnie de l'un d'entre eux, n'échangeant au final que quelques mots. Les questions qui lui sont posées sont nombreuses cependant.

~

« Hé jeune étranger ! Tu voyages seul ? Et tu es bien matinal ma parole. Je peux m'asseoir avec toi ? » Ne gaspillant pas sa salive, il le vit assis, n'y ajouta rien. Il leva la main d'un signe du doigt, visiblement pour quérir le plat du jour auprès de l'aubergiste. Il se tourna une fois de plus vers le démon, un air idiot sur le visage. « Dit, tu as entendu le chahut hier soir ? » S'attendant à ce qu'il en rajoute encore, le démon n'en fit rien, jusqu'à voir une, puis deux, pour en arriver à une dizaine de secondes d'attente, et se décider à parler. « Vu l'ampleur du truc, ça m'a même empêche de dormir » Le ton insolent ne changeait en rien, évidemment. L'homme sourit d'un air désolé, une expression de gentillesse mêlée à de l'inquiétude arborant son visage. Il attendit que les plus curieux fussent partis, et que l'endroit ait sombré dans un semblant de calme, avant de reprendre. « Sans vouloir t'alerter, nous avons trouvé, aux orées du village, le corps d'une jeune femme. En… » Le mot était difficile. Il peinait à sortir. « …lambeaux. Le meurtrier reste en fuite, bien entendu, mais étant très aimée en ces lieux, les gens ne cessent de la pleurer. Elle était.. la fiancée de mon grand-frère, d'où mon implication dans l'affaire. Il dirige par ici, et il ne calmera pas ses ardeurs tant qu'il ne trouvera pas cette canaille.. » L'homme s'adressait à lui avec tant de franchise, que le démon crut bon chercher dans son comportement, dans sa tenue, dans sa démarche, une sorte de signe, quelque chose qui lui permettrait de comprendre qu'il était là parce qu'il le suspectait, qu'il cherchait à le prendre la main dans le sac. Il devait guetter ses réactions, chercher à y déduire une preuve capable de l'inculper, sinon.. pourquoi dévoiler autant de choses à un simple inconnu ? Ne désirant pas tomber dans son piège, sans pour autant le trouver mortel, donc au final par simple orgueil, il acquiesça, d'un air 'triste'. « Toutes mes condoléances à votre frère. Et vous même je présume. J'espère que vous lui mettrez la main dessus » Il en était écoeuré par ses propres paroles. Il n'en avait rien à faire des autres, ni de leurs problèmes, ni du mal qu'il leur avait imposé. Il était le seul de qui il devait se préoccuper désormais, et ça ne changerait pas. Il remerciait, dans son esprit, néanmoins cette rencontre, pour lui avoir permis de voir la gueule animale qui se refermait sur lui, et ainsi lui échapper. L'homme, touché, crédule, lui sourit. « Merci à toi. Tu es libre de venir assister aux rites funéraires si le coeur t'en dit. Je suis certain qu'elle serait contente. » Et il prit réellement la peine de se déplacer.

~

Il arrive devant le cercueil. Ce dernier est fermé, et quoi de plus normal étant donné l'étant du corps, et les requis de la décence. Il y dépose une fleur qu'il a trouvé dans un bocal, non loin, et qu'il recueillit, nonchalamment. Son regard est froid, distant, n'y reflétant rien, et encore moins les derniers instants, les derniers mots de cette fille à qui il était venu rendre visite. * Ironie du sort * pense-t-il presque à voix haute. Vraiment. 'Elle serait contente' avait-il dit.. Sûrement oui. Contente de voir surgir devant son corps immobile, dépossédé de son âme, de la vie qu'il habitait, celui à la lui avoir volé. Voir apparaître devant ce qui ne sera plus que cendres et os délabrés, l'être macabre à l'avoir massacré outre imagination. Elle devait, probablement, crier à l'heure qu'il est. L'accabler d'injures infinies pour le mal qu'il lui avait fait. Ou alors pleurer de toutes ses larmes, aux côtés de celui qui serait devenu son mari dans quelques lunes et de qui elle portait l'enfant, le sort funeste que ce dieu, qu'elle priait tant, lui avait réservé. Le démon rie intérieurement, et empêche un rire moqueur d'éclater de l'extérieur. Ça le fait bien rire, oui, il ne peut que se l'avouer. Il est d'un culot incommensurable, qui plus est, et finalement.. il était sûrement venu pour cette raison, seule, et unique : se permettre ce petit plaisir, cette maigre satisfaction. Saluant la famille de la morte, il observe d'un œil on ne peut plus discret ce brave homme en larmes, essayant au mieux de garder sa dignité. Il le trouve pitoyable, et un sourire carnassier vint alors habiter ses traits. L'homme de l'auberge à ses côtés n'y échappe pas, et il le salue d'un hochement de la tête. Il quitte le cimetière, aussi calme que quand il y est entré. Les patrouilles se font insistantes, mais aucun regard ne se pose sur lui. Le brouhaha dans le village devient pour lui insupportable, et il cherche un endroit plus calme, libre de tout être vivant, pour s'y poser. Sortant par où il est entré, il aperçoit, d'en haut, une étendue d'eau, et se pose dans une de ses rives. Libre de tout remords, il n'a qu'à continuer de vivre, comme il l'avait fait jusque là. Rien de plus simple. Maintenant au calme, tout s'y prêtait.

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Mer 11 Fév 2015, 16:08

Les profondeurs cristallines s'ouvrent à lui, comme s'il les méritait. Or, ce n'est pas le cas. Heureusement, elles s'ouvrent à quiconque les observe, à quiconque les approche. Elles ne font aucune distinction entre les âmes bonnes ou mauvaises qui piétinent son herbe, qui plantent ses arbres, qui dévisagent ses fleuves. Ils sont unanimes, et le démon n'est en rien son destructeur. Juste, un pur visiteur. Il marche sur les rives d'un de ses cours d'eau, d'un de ses fleuves adjacents. Il le suit pour arriver à son aval, par pure curiosité. Une fois sur place, la nuit tombée, il remarque avec regret la pleine lune, et les effets superbes de cette dernière sur les cascades et leur magnificence. Elles brillent de milles éclats, d'un dégradé de couleurs chatoyantes qui apaisent les coeurs, passionnent les âmes spectatrices de cette merveille de la nature, avec qui sait.. juste une touche de magie. Le paysage, majestueux, la musique enchanteresse.. rien ne peut porter plus atteinte aux nerfs déjà fragiles du démon, et s'abritant à l'ombre d'un arbre tout proche mais assez conséquent, il attend que ce phénomène cesse. Les deux bras croisés derrière son crâne, les jambes en ciseau perdues dans un buisson, il croule dans un sommeil paisible, à croire que dans ces rares moments il en devient un autre. Un qui n'est pas lui, un qui est l'idéal ; Un qui est calme, et dont les humeurs, changeantes, ne font pas les frais de pauvres innocents ; Un dont l'esprit machiavélique, dément, n'accable pas l'être aimé, et n'ayant pas à subir de telles épreuves pour pouvoir rester à ses côtés. Dans ses rêves, il était lui. Dans ses rêves, il n'avait de crainte, ni de mal. Dans ses rêves, il tenait dans ses bras forts, le corps chétif de l'ange, et le chérissait sans retenue. Dans ses rêves, ce dernier acceptait tous ses visages, sous toutes ses coutures. Dans ses rêves, il menait une existence considérablement paisible, et Sherry y avait un rôle à jouer. Celui d'une mère, celui d'une amante, celui d'une soeur.. Elle était tout, et elle n'était rien. Un homme était à ses côtés, et peu lui importait sa présence. Dans ses rêves, il n'y avait ni ange, ni démon, ni représailles, ni engeances antagoniques qui ne peuvent que s'affronter une fois au contact l'une de l'autre.. Dans ses rêves, tout était simple, sans entourloupes, sans pièges ni mascarades. Dans ses rêves, il était heureux. Oui, simplement heureux. Il touchait le bonheur du bout des doigts, bien que celui-ci n'ait jamais été un de ses objectifs, ni de ses convoitises. Il est jaloux de cet autre là. De ce lui d'avenir, digne d'un futur, qu'il désirait tant pouvoir incarner…

Il reprend des forces avec les maigres provisions qu'il avait prévu avant son départ. Ayant subi un pénible réveil, dû aux courbatures et autres dispositions causées par ce sommeil forcé et pour le moins tortueux, il n'affiche guère de meilleure mine que la veille. Il se balade, les mains dans les poches, à l'abris des regards. Cela n'est pas tout à fait vrai.. Des yeux minuscules, des globes oculaires perfides, malins et d'une espièglerie digne de celle du démon, le détaillent minutieusement depuis les ténèbres. Ce dernier ne s'en rend pas compte, chargé d'un trop plein d'émotions fortes pour prêter la moindre attention à ce genre de détails. Mais.. le regard de qui au juste ? L'entité s'approche, douce et légère parmi les feuillages, au coeur même du tas de verdure environnant. Le démon fut alors pris au piège, emmêlé dans des filets qu'il ne risquait pas de fuir si facilement. Seule sa persévérance et son ingéniosité pourraient le sortir de là, mais l'homme n'était pas réputé pour être détenteur de ce genre d'attributs.

[ Quelques minutes plus tard.. ]

Il marche, quasi inconscient. Ses pas se succèdent, s'enchaînent, mais il ne semble pas les contrôler d'une quelconque façon. Ses yeux sont perdus dans le vide, et il a du mal à faire la part des choses. Comprenant que son cerveau, dans les vapes, ne déchiffre rien, ne discerne rien, il abandonne cette pratique, et se charge seulement de continuer. Il ne veut rien faire, comprendre. Il veut juste.. continuer. De vivre, d'exister. Ça lui suffit amplement. Il arrive à l'entrée d'une ville où longs remparts, axes larges, et bâtisses gigantesques surplombent tout le reste, où tout est démesuré. Le regard s'y perd, se prête à l'admiration. Il pénètre en son sein, et les regards effrayés, d'horreur, le persécutent. La populace est nombreuse, et pourtant les coeurs sont unis dans un unique sentiment, une même rancune. Comme capables de le suivre jusque dans la tombe, ou encore de le dévorer jusqu'à la moelle ici-même. Loin de déplaire au démon, ils sont toutefois chargés d'une agressivité qu'il ne connaît guère, et dont il ignore quel crime commis aurait pu en être l'instigateur. Sans chercher non plus à le savoir, il achève, d'une main de fer, tous ceux qui cherchent à l'achever lui. Oeil pour oeil, dent pour dent. C'est aussi simple que ça. La loi du plus fort. Cette ville en perdition n'est plus que l'ombre d'elle-même. Elle est une jungle, et eux sont les animaux. Ses bêtes égarées, ses âmes déchues, défigurées, qui se battent pour le plus haut rang, pour les meilleurs sièges afin d'observer ce massacre sordide. Ce genre de monde lui plaît bien, quoiqu'il ne peut pas forcément se plaindre de celui d'où il vient. Seulement.. celui-ci a un charme étrange, se peint des couleurs qui lui scient bien. Ici, il n'y a pas de complications, et il peut perdurer avec ses seules valeurs, sans aucune morale ou pénalité à s'infliger. Il est un lâche de toute évidence, et cette lâcheté qu'il avait reproché à Andariel, et à tant d'autres démons avant elle et qui lui avaient valu, entre autres, son expulsion des enfers, il s'y réfugiait maintenant. Il est maintenant du même bord.

Cependant, l'heure du jugement a sonné, semble être arrivée plus tôt que prévu. Intéressé par le résultat, il se laisse emporter par le courant, sans y opposer une quelconque résistance. Et on dit souvent que la bêtise d'un démon vient de ses vices et de ses penchants, car aveuglé par ces derniers, il s'adonne à la découverte de l'étendue de toute chose ( dont le plaisir, le danger, l'amusement,  et ce dans les pires situations qui soient ) quitte à y laisser plus qu'il n'est permis. Ça, ils ne le voient jamais venir, à tort. Beaucoup virent cet oubli devenir la cause de leurs malheurs, pour ne pas envisager le pire. Kai n'était pas si différent d'eux finalement, ne jurant que par l'envie, l'orgueil, et sa curiosité extrême, au péril de toute une vie d'existence et tant de choses bâties pour les voir toutes s'effondrer… Il entre dans un bâtiment de taille, tout simplement colossal pour le petit être insignifiant qu'il est. L'intérieur est orné de belles statues aux formes variées, souvent des représentations spectaculaires d'un homme et femme entrelacés, noyés dans le contact charnel l'un de l'autre, dans une passion certaine et sans nom. Leurs yeux, détournés de ceux de leur partenaire, semblent pourtant détenir une force infinie, sans les limites de la conscience. Plus bas, divers couloirs séparent l'entrée principale des chambres où juges, victimes et accusés sont emmenés. Des fleurs, indépendamment de leurs sentences, sont entreposées ça et là, et en émanent alors des effluves sucrées emplissant les couloirs de leur fragrance. La lumière est basse, presque inexistante par endroits, ce qui rend le tableau utopique quelque peu sinistre, sans pour autant en devenir menaçant. Il est d'un luxe impressionnant, et à toute épreuve, les murs d'un ton épuré, les constructions aux airs antiques, les tapisseries rouges brodés d'or, les chandeliers aux milliers de cristaux. Il demeure quelques dizaines de minutes dans une pièce, mais le temps ne lui semble pas de si courte durée. Impatient, il fait les mille pas devant sa porte de 'cellule' avant d'être mené devant les autorités pour répondre de ses crimes. Oui, car jusque là il ignorait tout du pourquoi de ces injures, d'où venaient ces gens angoissés, pleurant à grosses gouttes cet autre à les avoir quitté. Et franchement, ça ne l'intéressait pas tant que ça. Il avait juste hâte de voir un procès dont il serait non pas le bourreau, mais pour une fois celui qui est menacé par sa lame. La sentence ne serait pas douce, mais il serait sûr de lui échapper. Son charme avait fait ses preuves dans les pires moments, que ce soit par une parole convaincante, ou par une arme s'y prêtant beaucoup plus que sa bouche.

Il fait son entrée, voit cette dernière enflammer les esprits, chauffer les coeurs, envenimer les âmes. Tout ça lui plaît, il n'y a pas l'ombre d'un doute. Dans la salle, une multitude de voix se mêlent pour créer une ambiance de cacophonie assourdissante, et de chahut monstre dans lequel s'entendre penser semble un miracle hors d'accès. L'audience, dans les tribunes de fortune, se lève pour atteindre l'accusé, clamant 'au meurtre' et 'à l'assassin', lançant tout un tas de jurons et à tout va. Le marteau du justicier, du juge dont la capuche dissimulait complètement le visage, s'abat sur son socle, et fait taire la totalité. L'assistance en furie descend d'un cran. Ils étaient fin prêts à en découdre avec cette histoire. Assis, admirant les énormes structures bâties dans du bois massif, Kai entend le discours où sont énoncés tous les noms, preuves, et faits liés à l'affaire. Il ne prend pas longtemps à réaliser la terreur de son ignominie, les raisons de leur terreur, et de leur colère. À quel point, celle-ci est justifiée.. « La séance est ouverte pour le procès de M. Zayakai Sahemoth » Cette voix est aiguë, et étrangement familière. Les hostilités sont lancées. Rien ne semble sortir de l'ordinaire, mais le trouble se prépare, les épées s'agitent dans leurs fourreaux, et bientôt la salle et son esprit seront à feu et à sang. « ... » « L'accusation est prête, votre Honneur. » Personne n'acquiesce face à cette absence de parole, et le démon, pris dans sa propre bêtise, dans sa propre toile, se laisse choir, aisément. « Bien. Chargé de l'accusation, votre déclaration préliminaire je vous prie » « M. Zayakai Sahemoth, démon de la haute chassé des enfers. N'y est plus jamais retourné. A vécu une existence paisible à ce jour. Est accusé d'avoir tué une jeune femme et essayé de faire de même avec son frère. Si le premier a réussi, il n'a pas eu autant de chance avec le deuxième, où il a torturé la victime sans l'achever. Les charges sont donc : le meurtre de Ashiyah Vasariah, puis torture et tentative de meurtre de la victime, ici présente, Nahestël Vasariah, plus connu sous le nom de Nao. L'heure est donc venue pour l'accusé de paraître devant cette cour, et être jugé comme il se doit. » Le juge le salua bien bas, d'un geste de la tête. Ils laissent visiblement le temps à l'homme de réagir, de vociférer tout ce qui pourrait bien lui plaire, avant de faire signe à l'accusation de poursuivre les procédures, et la suite risquait d'être beaucoup plus effroyable qu'il ne pouvait se douter… « L'accusation appelle donc à la barre le premier témoin.. M. Nahestël » Et tout rire cesse, toute acclamation se fige. L'homme, désigné, entre, la tête baissée, et le coeur du démon, fragile, en proie aux confusions, se brise en mille morceaux sur le pavé. L'amour ressenti se tourne vers lui, et il n'a de cesse de profaner dans son esprit les paroles maudites, celles de la rancune, de la haine et du mépris. Il se haït, au plus profond. Il a tout perdu, et il le sait terriblement…

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Mer 11 Fév 2015, 16:45

Ses nerfs d'acier se figent, son corps raidit sous l'horreur qu'on lui inflige à son insu. Il est plus faible qu'il ne le laissait à croire. Ses muscles refusent tout mouvement, et son cerveau les informations qui accourent, qui fendent l'air pour lui suggérer de funestes événements, de macabres incidents dont il maudit toute prise de conscience. Ils l'affligent, l'affectent au plus haut point. « NON » Il récapitule, cherche la faute, sans pour autant comprendre où son discernement, réflexion intense l'ont déserté, et où commence son idiotie. Par tant de notes de notoriété, de paroles savamment prononcées, d'idiots charmes éloquents, il perd ses marques, d'où un tel décalage.. Il est forcé de le croire, forcé de s'y prêter, car reconnaître l'inconcevable il se l'interdit, inconsciemment. « C'est impossible. Vous me faites marcher ! C'est pas..drôle » Un rire nerveux retentit dans la salle face à ceux qui l'accusent, qui l'accablent sans compassion, plus impétueux que le pauvre démon, plus machiavéliques encore qu'il ne saurait l'être. C'est un rire de peur, un rire emprunt de douleur, relayant les larmes qui ne peuvent couler des sources sèches de ses orbites. Jamais de ces dernières ne perlent les moindres gouttes, ne s'échappe la moindre peine. L'orgueil les en empêche, et il ne peut, par ce biais, calmer son coeur, ni sa souffrance. « Vous êtes tous malades. Cinglés. C'est faux, je n'ai rien fait !! Jamais je ne lui aurait fait du mal ahaha » Ce rire est proche de la folie. Il la frôle, se retrouve à son contact, sent ses gouttes noires de jais lui caresser sa frimousse pâle. Tout perd son sens, son but, son essence, sa raison d'être, comme si avec lui tout prenait fin, son apparition ayant marqué les prémices de l'existence du démon. L'absence du créateur vient à immobiliser ses poupées. Kai est-il seulement conscient de ce fait ? De cette ampleur que l'ange a pris dans son coeur, dans son corps qui réagit avant même que ne le puisse son esprit ? Il a été le premier à repousser, à évincer l'hypothèse qu'une telle chose puisse se produire. Il avait été le premier en proie aux changements, à ressentir ces gênes, ces envies, cet émoi que Kai s'efforçait d'ignorer. Lui ne le pouvait pas, et il s'y était fait. Il se contentait de réagir comme on lui avait enseigné à présent. Et jamais, il n'aurait pu le blesser.. « Jamais je n'aurais pu le blesser... » Il le répète comme pour se rassurer. Son expression se désagrège, et l'orgueil dont il faisait preuve tantôt ne montre plus le bout de son nez. Les sourcils froncés, les lèvres pincées, les joues couvertes de rougeurs, les yeux d'où jaillit la douleur.. Il perd toute consistance, toute tenue et dignité. Plus rien ne compte, tout s'est égaré. C'est dans ses gènes, certes. Il l'avait chassé, certes. Il est démon, certes. La morale va à leur encontre, certes. Mais il refusait. Non. Hors de question. Mais qu'est-ce encore la morale pour un démon ? Doit-il seulement s'y plier ? Doit-il simplement à tout renoncer pour cette seule raison ? A-t-il seulement besoin de Nao pour exister finalement ? Qui l'a décidé ainsi ? N'avait-il donc pas son mot à dire ? Les questions continuent de se former. Les ténèbres s'installent. Il pleure intérieurement. Même si l'envie de le blesser était réelle, que souvent il l'avait blessé, il ne voulait pas le tuer. Ce mot raisonnait, faux, tellement faux. Et pourtant, les faits sont là, intacts, immuables. Le lien entre rêve et réalité ne tient plus, à deux doigts de se briser. Ces deux-là ne sont, finalement, plus si indicibles..

La victime se prépare, les clameurs se calment. Le juge dicte quelques consignes aux gardes de la cour, et chacun se mobilise comme convenu. L'individu se tourne vers la pauvre chose déboussolée, et décide de lui asséner le coup fatal, de l'abattre sur place. Mieux vaut battre le fer pendant qu'il est encore chaud. La chasse est plus aisée si la cible est faible, désarçonnée. Des dires justifiés, des paroles sages, mais mises en action, elles démolissent les murs, les dernières défenses de n'importe qui. Le démon n'y est pas exclu, et la mise en scène est de courte durée. Le visage du 'juge' de son procès, son principal ennemi, la vipère à l'avoir fait venir, le premier à vouloir l'exécuter pour ce crime dont il n'avait pas souvenir, est un qu'il ne pourra jamais oublier. Le pardessus tombe, et avec lui des boucles flamboyantes, d'une couleur précieuse qui saute aux yeux. Il détaille du regard tout autre individu se trouvant dans cette salle, allant des jurés à l'assemblée, en passant par le dirigeant de l'accusation, et celui de la défense. Ces milliers de voix qui s'acharnent sur lui, ces silhouettes qu'il avait aperçues de loin sans chercher à discerner leurs traits, s'avèrent n'être faits que d'ombres éthérées dont le visage n'est plus, dont seuls les cris de terreur, déchirants, semblent avoir été gardés. Ils n'ont plus de vie, jouent seulement le rôle qu'on leur a confié. À la place des jurés, de vagues connaissances, des gens qu'il croisa dans sa courte existence, mais des visages qu'il eut du mal à dissocier, des carcasses sur lesquelles, pour certains, il eut du mal à mettre un nom. Au tour de la boîte de l'accusation, dans laquelle, vu l'allure que prenaient les choses, il ne fut guère surpris d'y trouver le déchu. Une carrure imposante recouverte d'un maigre tissu noir, ses muscles saillants, son visage grave plus creux, sévère que d'habitude, plus mesquin, plus malin que Kai ne l'aurait cru. Il se tient droit, haut, fort, dénigrant ainsi le personnage chétif à son revers n'ayant rien à son avantage, ayant tout perdu de sa confiance sans failles qui était pourtant son seul atout, sa seule carte, son seul recours.

Traversant la salle du regard, il s'arrêta en son centre, affrontant alors avec dédain et tristesse la femme qui se trouvait en contre-jour. Ses yeux, prostrés devant la lumière éblouissante provenant de derrière elle, se plissent, cherchent à discerner son visage et son expression, et dans celle-ci il peut lire beaucoup, notamment plus qu'il ne l'aurait voulu… Il avait appris à la connaître, à lire dans  ses dessins bourrus, dans ses lettres mal formées, dans ses pensées embrouillées, comme dans un livre ouvert, et cette fois ça se retourne manifestement contre lui. Ses iris sont pleins d'un chagrin puissant, d'une stupeur et d'un mordant qu'il ne lui reconnaît pas cependant. Jamais il ne l'avait vu si divisée, si mitigée quant à ses sentiments, bien que sa main sur le manche de bois ne soit aucunement un mensonge, et que son envie de le punir soit bel et bien réelle. Le dernier regard est crucial. Il se tourne vers sa défense, vers celui qu'il espérait être l'ange, celui qui le croyait, celui qui le soutenait dans les pires moments, celui qui comprenait son coeur noir, son coeur malade, son coeur de pierre mieux que quiconque ne l'eut fait avant lui. Toutefois.. la chance n'est pas de son côté. S'approchant de lui, il lui tire l'épaule, le force à se retourner, et à sa place ne se trouve qu'une poupée, qu'un mannequin sans vie, inanimé, d'où sa non-réponse tantôt. Ses yeux s'attardent quelques instants sur le bout de tissu ambulant, déments, avant qu'un rire, semblable au précédent quoique plus démesuré, plus profond, ne se fasse entendre dans la salle. Son regard se voile, son souffle s'alourdit : il refuse de voir la vérité en face. Les injures volent, traversent les murs, les enceintes de la raison. Ils fusent de sa voix forte, aliénée jusqu'aux coeurs vides de ses interlocuteurs, « menteurs », « voyous », « sal*uds » . Il ne jure que par lui-même et ce que ses yeux peuvent voir, vocifère tout ce qui est à même de l'apaiser. Ils scindent son esprit en deux, à l'en rendre fou, à lui en faire perdre ses moyens. Cette vengeance n'est pas douce, et le fruit de son arbre est des plus empoisonnés. Il récolte les graines qu'il a semé. Des graines de douleur, d'anarchie qu'il installa soigneusement dans le coeur de ceux qu'il côtoyait au fur et à mesure, sans s'en rendre compte, mais surtout sans s'en vouloir, sans jamais s'attribuer le moindre mérite ni la moindre culpabilité. Et alors qu'il traverse ses dernières barrières, que la folie le prend, quelques souvenirs viennent à la surface. Des images floues, perdues dans les méandres de sa conscience, mais dans lesquelles on peut voir un corps ensanglanté. Ce dernier crie, acquiesce devant la force de son adversaire. Il se refuse à lui rendre des coups, même quand ils sont possibles. Il ne s'enfuit pas, une de ses ailes, estropiée, l'empêchant de voler. Il pleure, ses joues pâles étant bordées de rougeurs qu'on croirait ensanglantées au premier regard. Son corps est couvert d'hématomes, pourtant il n'abandonne pas et continue à supplier son agresseur d'arrêter, mais étrangement, pas pour son propre bien. Un énième poing s'écrase sur son visage, et il se voit heurter le mur qui se trouvait derrière. De son crâne jaillit un liquide pourpre, visqueux. Il coule sur ses tempes, vient rejoindre celui qui jaillit de ses deux lèvres, qui recouvre tout le reste. Il le prend par sa crinière blonde. Son visage est pâle. Ses yeux sont d'un bleu profond. Son identité n'est plus à faire, et le démon voit l'image de la souffrance, du martyr, clairement, dans ses souvenirs brouillés. Les choses lui reviennent, peu à peu, et il n'est alors plus, dans cette illusion, question que d'une chose : rêve ou réalité ?

Elle ouvre ses yeux pâles, noue ses lèvres rouges. Sous celles-ci un rictus se forme, et se déchire alors sa bouche sous cet élan singulier. Les jambes croisées, dans une tenue que n'importe qui jugerait peu suffisante à la couvrir, elle se délecte du spectacle dont une petite bulle la gratifie. Sur son trône d'olivier, aux branches diverses et aux senteurs exquises, naturellement enivrantes, elle jouit de ce que ses pouvoirs lui apportent, et cette fois sa victime semble à son goût. Capable de voir jusque dans ses rêves, capable de l'observer outre cette anatomie frêle qui git contre le sol, tachée de boue, elle se régale de son malheur, lui qui a osé pénétrer le territoire des fées, lui qui était sauvage, tortionnaire, bestial à la naissance. Elle émet un petit rire, voyant l'homme dans tous ses états. Elle a des goûts terriblement tordus, on le lui avait souvent répété. « Non mais.. regardez-le geindre comme un nouveau né. On aura vraiment tout vu. Qui aurait dit que les démons avaient une faiblesse si prononcée, et surtout si facile à trouver ahaha » Elle profite on ne peut plus de la scène, de fond en comble, du début à la fin. Sans crainte, sans honte, sans aucune peur d'être découverte. Le sous-estimait-elle ou avait-elle raison, dans cet embarras, de de lui laisser la clé du mystère si aisément perceptible ? « Par contre.. ça va devenir vite ennuyeux, même si l'autre blondinet rentre en scène. Bof, c'est déjà trop tard. Je veux le mener jusqu'à son point de rupture, véritablement le rendre fou. Je ne m'arrêterai pas avant d'avoir réussi hihi. Mais comment y parvenir.. » Elle laisse son dos cambré se pencher en avant, suivre le mouvement de sa chaise qu'elle penchait en arrière pour une plus vaste réflexion. Ses pieds nus sur la terre ferme caressaient les jeunes pousses encore vierges de tout contact humain outre le sien. Elle songe à haute voix. « Une protégée et son amoureux. Un ange de qui il s'est éprit.. Pitoyable, mais ça pourrait avoir ses bons côtés. Je peux très bien en tirer profit. Ça ne sera peut-être pas aussi réaliste, mais je pense qu'il n'est plus en état de différencier le vrai du faux, et quand bien même il parviendrait à comprendre l'étrangeté de la manœuvre, je le replongerais bien au fond de mes filets ahaha. Maintenant, je n'ai plus qu'à mobiliser certaines de ces ombres, les faire.. » Une pause le temps de se concentrer sur l'illusion, ainsi que d'observer les effets de cette dernière. « ..se rebeller, et causer quelques petits ennuis. AHAHAHA regardez-les se battre. Tout ça à cause de ce qu'une ombre a crié ! 'Il va l'attaquer. Il revient à la charge. Protégez l'ange' mais vous êtes tous aveugles ou quoi ? Ahahaha c'est vrai que je suis celle à les contrôler, mais les humains sont les mêmes, il n'y a rien à faire. Mais tient.. il se débrouille plutôt pas mal, quoiqu'il n'arrive pas jusqu'à son chéri, et je ferai en sorte que ce ne soit pas le cas. C'est bien, continuez mes chers. Contrairement à vous, cet homme est faible, et mortel avant tout. Il se fatiguera bien à un moment ou à un autre. Vous n'avez qu'à insister, encore et encore, vous qui n'êtes qu'illusions. Mais.. OH ils ont réussi à le transpercer. Génial. La tension monte en escale. Ça risque d'être.. » laissa-t-elle en suspens. Elle sentit, avant même de finir sa courte phrase, un frisson lui parcourir l'échine, un de ceux froids, implacables, de mauvaise augure, qui annoncent à celui sur qui il s'accable le malheur qui approche. Des yeux la regardent, la fixent, l'observent sous toutes ses coutures. Il ne peut la voir, mais il peut sentir sa présence. Ces yeux vermeils déchirants, cet aura de menace sans frontière, ces cornes pointues qui se dégagent de sa crinière sombre, ces ailes rachitiques, ces exhalaisons qu'on croit voir émaner de son maigre corps et qui pourtant recèlent une force incommensurable.. C'est là la véritable peur d'un démon. Il allait venir la guetter, la quérir dans son antre, elle pouvait en être sûre. Il la pourchasserait où qu'elle aille.

« Je relève le défi » Et le tour est joué. C'est maintenant à lui le lancé de dès.

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Ven 13 Fév 2015, 15:40

Il bouge un premier doigt, puis un second. Il essaie de retrouver la précision, l'exactitude de ses sens aiguisés, les pulsations du touché, des sensations en terme général, et dans ces dernières, il entreprend la recherche de soi, du lui qu'il avait laissé derrière. Il convoite le contrôle d'un corps dont toute blessure serait fatale, d'un cadavre dont la mort est si proche qu'on la touche du doigt, qu'on en vient à l'effleurer sans le savoir. Lui-même s'en rapproche à petit feu, pas à pas, et il le sait. La mort est si présente qu'on en vient à l'ignorer, elle et ses exhalaisons putrides, elle et sa peine immense, tellement proche qu'on ne la craint plus. Sa lame ne paralyse plus le corps, n'affole plus l'esprit. Elle assiste au dénouement de son existence éphémère dans le coeur de tous et de chacun, témoin du premier battement, tout comme son dernier sans que ne change son expression, ni le ton de sa voix.

La réalité du démon n'est plus utopique, ni démesurée, ayant reprit toutes les couleurs qui la rendaient sombre, emblématique de son reflet dans ses améthystes avides, prétentieuses. C'est l'ordre même des choses, et c'est ainsi que tout doit se dérouler. Sans accros, sans empêchements, suivant le cycle instauré par la nature. Allant à son encontre, l'homme ne peut que se détruire. Kai l'avait appris, quoique à ses dépends, comme tous les autres hommes déambulant sur ces terres. Il tend son bras comme capable de toucher le ciel, celui-ci n'ayant jamais eu l'air si proche. Ses paupières semi-ouvertes peinent encore à discerner un quelconque paysage ( bien qu'il en ait un vague souvenir ), et pour cause, ses yeux n'aperçoivent qu'une vaste étendue bleutée, ainsi que les bruits assourdissants des milliers de gouttes cristallines mourant au pied de la cascade, s'en allant avec les flots intenses de ses marées. Jamais l'homme ne s'est senti si léger, si libre de toute contrainte, tout en constatant en lui une rage perfide bouillir, une soif de vengeance grandir. Dans ses yeux la flemme s'est peut-être éteinte, mais elle a attisé à la place celle de son coeur, plus sauvage, plus dévergondée que la précédente. Les quelques secondes, mutant en des longues minutes de silence, lui ont permis de reconsidérer le litige pour lequel on avait tenté de le condamner, de se remémorer les plus cruels instants n'ayant jamais figuré dans ses pires cauchemars. Le visage de l'ange ensanglanté, ces images fausses qu'on lui avait implanté de l'agression de ce dernier.. Ses boucles dorées plaquées d'un liquide répulsif, son aile estropiée par les attaques acharnées qu'on lui avait infligé.. Ses côtés cassées, son abdomen parsemé d'hématomes, de lésions que cet autre, gangrené, lui avait asséné.. Mais cet autre n'est pas lui.

Sa rogne, sa furie, n'ont pas lieu d'être apaisées. Se flouent dans sa mémoire les paroles de la réprouvée, tandis qu'est remplacé ce visage en peine par celui malhonnête, véreux, rancunier qu'il avait aperçu dans ses rêves. Tous les bons sentiments, pureté que ses mots auraient pu lui transmettre quand réfléchis, rappelés avec calme, ont disparu au même temps que le monde illusoire dans lequel il s'est vu plongé. Cette vision l'a affecté, bien plus qu'il ne voudrait l'admettre. Il voit en cela une sorte de.. trahison. Non pas une de la chair, mais une de la mémoire. Il ne voit que son abandon, que ce rejet qu'il subit sans avoir mérité de courroux, un seul de ces propos amers qu'elle lui avait adressé. Il ne ressent aucun remord, car jamais il n'a avoué ses fautes. Leur sens des valeurs est contraire, antagonique, complètement opposé. Le 'mal' que voient les autres, pour lui n'est que banalité, et les atrocités commises ne seraient alors que des caprices tout au plus, mais en aucun cas un acte rebutant ou sordide qu'il faudrait condamner. Leurs mœurs ne s'emboîtent pas, et le rôle du démon, dans tout le sublime impact de son engeance maléfique, était de le comprendre, de s'y conformer, de changer sa manière de faire : son exécrable attitude. Seulement, tout cela, il ne le comprend pas. Il ne veut pas le comprendre, car il n'est pas fautif. Il n'est pas celui qui a mal agit, bien au contraire. Sherry l'a trahi, l'ange la suit dans cette manœuvre. Andariel l'avait prédit, et il ne cessait de ressasser ce propos. Avait-elle donc été si perspicace pour remarquer le complot qui s'approchait sans que lui ne se doute de rien ? S'était-il vu si embobiné, si endoctriné par cette longue vie paisible de seize années pour au final croire toute tromperie impossible ? Pourtant, Nao il lui fait confiance. Sa trahison est inimaginable, trop douloureuse pour être vraie, et il rejette inconsciemment la faute sur l'influence de la jeune rousse, sur l'importance de ses dires aux oreilles de l'emplumé. L'ange n'est pas fautif, tout comme lui. Les sentiments d'amour qu'il portait à la jeune femme, ces émois dont il croyait être victime sont depuis longtemps bannis, révolus, mais il semble être le seul à ne pas s'en rendre compte.. Les questions continuent d'être posées, le piège dans son coeur, l'amorce d'un affront plus grand se prépare, mais dans ses cendres, seul le visage de Sherry et de son amant est encore visible..

Prenant place debout, il chancèle légèrement avant de retrouver un équilibre lucide, et une vue quasi parfaite des environs. Les zones d'ombre restent toujours à ses yeux embrumées, mais le combat semble être possible. Dégainant la lame qu'il ne put jamais rendre à l'hybride, il l'empoigne de ses deux mains, cherchant de ses cinq sens toute présence outre la sienne. Cet air mesquin, susceptible, puéril, et farceur qu'émane d'elle, peut être senti de loin, dans tout le périmètre, et le jeune homme ne se prive pas d'en faire usage pour lui mettre le grappin dessus. Sa lame fend l'air pour venir s'écraser à l'arrière d'un arbre, en plein milieu d'un bout d'écorce dont on ne distingue rien de singulier. Sa surface s'avère hélas être une illusion, et s'y cachait alors le corps minuscule de la jeune femme. Envolée vers les branches plus hautes, hors de sa portée, elle prend une position défensive, admirant la transformation de l'homme en ce qu'il a de plus démoniaque, et seule la couleur de sa peau ne change que de peu sa pigmentation, gardant une teinte considérablement naturelle. La fée sort une dague incrustée de plusieurs cristaux ( allant des diamants aux saphirs luisants ) la poigne recouverte d'une maigre couche de tissu azur, tandis que l'arme en elle-même est plaquée d'un or brillant, massif. Un trésor pour le moins luxueux, loin de correspondre au personnage grincheux, atypique. Kai, acerbe, baisse son arme, ricanant dans son coin. « Ça aussi tu l'as eu en pillant une d'tes victimes ? T'es vraiment sans ambition, p'tit truc » Elle s'était résignée, repliée, comme un petit animal qu'on effraie et qui dans son arbre, haut perché, se croit en sécurité face aux prédateurs. Seulement, ce n'est pas tout à fait le cas, et les intentions de l'être ailé n'ont rien de si pur, de si innocent, cette dernière ne faisant qu'admirer le personnage dans la réalité, celui qu'elle manipulait jusque là à sa guise pour le plus grand déplaisir de celui-ci. « 'Truc' ? Tu as vu tes manières ? Non mais il ne manquait plus que ça. J'ai un nom vois-tu, Eurysthée. Mais tu n'auras pas le loisir de t'en servir bien longtemps » lâche la jeune femme tout en prenant forme humaine pour la grande surprise du démon, ne niant cela dit aucunement le fait que ses acquisitions soient pour la plupart des artefacts volés à tous ceux qui osaient profaner ces lieux, même dépourvus de toute intention équivoque. Elle tire profit de ses pouvoirs, de cette puissance qu'elle fut en mesure d'acquérir, le tout à son avantage, d'elle et ses divertissements douteux. Quoique Kai n'est pas le mieux placé pour lui faire la leçon..

~

« Trop polie pour être honnête. Vas-y approche, miniature » Il fait deux pas en arrière, avant de la voir accourir vers lui, se ruer pour le gratifier d'une première attaque qui risque de le surprendre. Il la pare sans problème avec le bout de sa lame, mais remarque bien vite que cette dernière est plus forte, plus acérée, plus tranchante qu'il ne l'a cru au premier abord. S'affaissant alors légèrement, prenant plus appui sur ses deux jambes, il renvoi l'assaillante, toutefois dans une position désavantagée, étant donné la force cachée qu'elle semblait receler. Sa combativité n'a rien perdu de son ardeur, mais il sait maintenant qu'il n'a pas à la prendre à la légère, et que son corps, souple, agile, léger, lui serrait d'une grande d'aide contre un plus robuste, mais pas moins mortel que le sien. La joute endiablée se poursuit alors, sans encombrement. La jeune femme continue les attaques précises, sans perdre ses moyens. Elle lui sourit même, appréciant presque les nombreuses entailles dont elle crible son corps, et les tissus ruinés dont elle se voit le vêtir. Néanmoins, Kai est loin de se laisser faire, et si elle lui inflige des dizaines de taillades, lui s'efforce de lui en causer tout autant. Le combat s'éternise, se prolonge sur la durée. L'homme commence à s'habituer à ses gestes, à comprendre le fonctionnement de ses techniques, à lire en elles comme dans un livre ouvert. Elles suivent toutes des schémas plutôt complexes, mais restent finalement parfaitement identiques dans leur exécution. Une vingtaine de minutes fut suffisante pour ce faire, et il se surprend à déjouer, à présent si bien ses moindres mouvements, jusqu'à ses attaques les plus meurtrières. Est-il devenu plus rapide pour esquiver avec un tel succès même les enchaînements qu'elle avait gardés jusque là scellés ? Non, c'est elle qui fatigue. « Y'en a pas un pour rattraper l'autre.. Apprend au moins à bien te servir de ta dague, au lieu de la valdinguer comme ça dans tous les sens » vocifère-t-il, voyant après les premières dizaines de minutes l'endurance de la jeune femme chuter dangereusement, tandis qu'elle perd ainsi, et par la même occasion, une bonne emprise sur son arme, et sur son maniement, préférant avoir recours d'habitude à ses pouvoirs plutôt qu'à ses aptitudes au corps à corps. Les blessures qu'a enduré le démon ne sont alors plus un réel handicap pour ce dernier, sa fatigue étant plus à même de l'immobiliser que ces quelques lacérations au niveau du torse, et des avant-bras. « Enf*iré ! Je ne te permets pas de me regarder ainsi ! C'est pas fini, tu m'entends ? » s'écrie-t-elle la haine dans le regard, les yeux dans le brouillard. Toutefois, en quelques minutes, Eurysthée se trouve à terre, à la merci du pédant, sa lame au travers de son épaule, celle du démon en plein milieu de son abdomen. Elle git dans sa propre marre de sang. La dénigrant du regard, il essuie le tranchant de sa lame sur un morceau de robe qu'il lui a arraché, le jetant sur son corps inerte une fois sa besogne achevée. « Un p'tit conseil.. À l'avenir, n'essaie pas de briser le coeur, ni les rêves de quelqu'un. Prends-toi à ses os. Il en a deux-cents six. T'es sûre de pas rater ton coup »

Il disparait alors dans les profondeurs de la masse sombre, parmi les zébrés d'ombre et de lumière que le couché du soleil prône à sa manière. La jeune femme hébétée, blessée, sans forces, ne peut qu'esquisser une mine défaitiste, meurtrie par l'échec cuisant et cette assurance démente dans ses yeux qu'elle n'a pas été en mesure d'anéantir. Lui tournant le dos, marchant de nouveau dans la direction du village, il arrive à l'apothicaire, surpris d'y trouver le jeune bougre plein de bonne volonté de la veille. Plein d'égratignures par lesquelles le sang jaillissait jusqu'à en faire des flaques au sol que l'homme eut à nettoyer plus tard, Kai peut cependant compter sur l'aide et la discrétion de l'individu quant à sa présence en ces lieux. Une fois au calme, il subit tout naturellement un petit interrogatoire sur la provenance de ses blessures, et Kai n'a de scrupules à lui conter une histoire à dormir debout, mais qu'étrangement la plupart pourraient croire, sur parole. Après tout.. celui à la transmettre ne serait autre que le beau-frère de la dernière victime, un homme à l'appui de tous les villageois lui conférant, par ailleurs et très dignement, une confiance absolue, presque aveugle. Quoi demander de plus.. « Je comptais partir vers l'Est, traverser les Cascades Cristallines pour rejoindre un village se situant à l'autre bout. Hélas, ayant dormi dans la forêt sans craindre ce fameux assassin - seulement intéressé aux jeunes femmes de toute beauté - je me vis également attaqué par ce dernier.. J'ai pu m'enfuir, mais.. c'était affreux. Je vois encore ses griffes m'arracher mes habits en lambeaux, avant de s'en prendre directement à ma chair.. Je.. Je ne veux plus revivre ça.. Je veux rentrer, et oublier. Seulement ça.. Merci de m'avoir soigné, et je suis désolé de te demander un tel service....mais pourrais-tu me préparer un cheval pour que le voyage soit moins.. périlleux ? Et tu devrais faire passer le mot aux villageois, comme quoi il traîne aux environs des Cascades. Je ne voudrais pas qu'il y ait plus de victimes... » Il cache de sa main tremblante à souhait ( tout pour le bien du rôle qu'il s'amusait à revêtir ) sa bouche déformée par un rictus informe, opprimant un rire fourbe, malsain. Il n'a de honte à s'amuser ainsi à profiter continuellement de ses attributs pour les tourner à son désavantage. Il se délecte de cette malice, et ne veut que la voir se propager. Il ne faut pas que l'homme se doute de quoique ce soit, d'où une telle mise en scène. Voyant les bras du paysan l'envelopper dans sa totalité et le baigner de paroles réconfortantes, il sait que le tour est joué, et que ce goût épicé dans sa bouche n'est autre que celui du succès ardent. « Je ne pourrais jamais te remercier assez pour ce que tu as fait pour moi.. Merci » Et l'aube venue, il a d'ores et déjà quitté le village. Que ce dernier choisisse d'attaquer les Cascades ou simplement de s'en tenir éloignés, cela n'est plus de sa convenance, tant qu'aucun soupçon ne pèse sur sa tête. Il aurait bien aimé admirer le chahut qu'il a causé, mais les aventures suffisent amplement pour ces quelques jours de péripéties..

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~ Lorsque le réel devient irréel ~ [ Solo ]

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