Depuis que Galatea avait retrouvé la splendeur de son Château et le luxe d'une existence délicieuse, elle pouvait à nouveau se permettre de faire preuve d'une bonté calculée. En grande bienfaitrice, elle offrit le gite, le couvert et les soins à tous ceux qui le demanderaient. Belle, qui ne voulait pas être inutile, se proposa pour aider les malades. Accroupie près d'un petit garçon aux cheveux roux, elle enroulait maladroitement son bras blessé dans de larges bandes blanches. « Comment t'appelles-tu ? » - « Will. » - « Où sont tes parents ? » Le petit baissa la tête. « Je sais pas. » - « Quand les as-tu vu pour la dernière fois ? » - « Je ne m'en souviens plus. C'était il y a trop longtemps. On était encore à Earudien. » - « Est-ce que tu as de la famille ? » - « Non, je n'avais que papa et maman. Je suis venu ici tout seul, en suivant des gens. » Belle eut mal au cœur. Elle se força à sourire et ébouriffa les cheveux de l'enfant. « Que comptes-tu faire ? » - « Je … Retourner chez moi, je crois. Peut-être que papa et maman sont rentrés et qu'ils me cherchent. » Will était si jeune. Il ne devait pas avoir plus de dix ans. Les Elfes étaient débrouillards mais un garçon aussi timide et fragile ne pourrait pas traverser les Montagnes et les Forêts sans risquer de se faire détrousser par les brigands qui rôdaient en masse. « Tu devrais rester ici, Will. C'est trop dangereux. » Il secoua la tête. « Je dois savoir. » - « Je sais mais nous pourrions agir autrement. Que dirai-tu d'envoyer une missive à Earudien pour s'enquérir de la situation, de la présence de tes parents ? Ce serait moins risqué. » - « Ce n'est pas une mauvaise idée. Tu crois que ça va marcher ? » - « Nous pouvons essayer. Si nous n'obtenons aucune réponse, je ne te retiendrai évidemment pas. » Le petit sourit. « Comment tu t'appelles ? » - « Belle. » - « Oh ! C'est un joli prénom et il te va très bien. » - « Merci, tu es adorable. As-tu faim ? Je crois qu'Angelus a ramené du chocolat, acheté à un revendeur ondin. » - « Du chocolat ? Oh oui ! » Elle lui prit la main pour l'emmener au cuisine, où il fut reçu comme un roi par les cuisinières.

Belle ne mit guère plus d'une journée à s'habituer à la présence du petit Will. Elle espérait même ne pas obtenir de réponse de la Cité elfique, de parvenir à lui mentir pour qu'il reste près d'elle, qu'il devienne son fils. Angelus, de temps à autre, la contemplait avec un air de reproche. Elle lui souriait simplement en haussant les épaules. Elle voulait profiter de cette situation. Puis une lettre arriva. « Belle ! Belle ! Je ne sais pas lire ! Belle ! Vite ! Lis ce qui est écrit ! » L'Elfe arriva, victorieux. Il brandissait une enveloppe ouverte qu'il secouait frénétiquement. Il sauta sur les genoux de la Déchue, assise sur un banc à lire. « Attention Will. Fais moi voir ça … » Elle déplia la lettre et la parcourut des yeux. « Alors ? Belle ! Qu'est-ce qu'elle dit ? » - « Ils ne savent pas où peuvent être tes parents. » - « Ils ne sont pas morts, n'est-ce pas ? » - « On n'a pas retrouvé leur … Enfin il n'y a aucune certitude. Celui qui nous a répondu souligne toutefois qu'il a retrouvé une cousine, qui pourrait s'occuper de toi. » - « Une cousine ? Je n'ai pas de cousine moi. » - « Elle serait la fille du ton oncle. Le frère de ta mère. » - « Je ne l'ai jamais rencontré moi. » - « Ce sont les histoires de famille. Peut-être ne s'entendaient-ils plus ? » - « Je veux pas y aller ! Je la connais pas ! » La Déchue se mordit les lèvres, embarrassée. « Will, je ne crois pas avoir le choix. Tu as une famille, je ne peux pas t'arracher à elle. » - « Je veux pas ! » La jeune femme accorda un regard implorant à Angelus, planté dans l'encadrement de la porte, les bras croisés, à contempler la scène avec cynisme. Le Vampire s'approcha d'un pas de velours. « Quelques Elfes sont guéris et comptent repartir dès demain matin. Tu iras avec eux. » Will dévisagea la créature de la nuit sans rien dire, hébété. Il était plus délicat de contredire un homme comme Angel qu'une femme comme Belle. Il pleura tout bas mais ne répondit pas.  

Belle devenait davantage déterminée de jour en jour. Une liste se dressait lentement dans son esprit, une liste qu'elle érigeait peu à peu, avec les objectifs qu'elle voulait atteindre.                      

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