« Violette ! Tu n'as pas le droit d'aller si loin ! ». La voix de Faust résonna dans le parc, autoritaire pour le petit garçon aux allures mignonnes qu'il était. Loin devant, Violette gambadait gaiement parmi les fleurs, tournoyant en rythme avec les pétales des fleurs de cerisier qui virevoltaient ici et là. Elle ne s'arrêta pas, faisant mine de ne pas avoir entendu, comportement qui obligea le déchu à courir pour lui attraper le poignet. Une moue boudeuse apparut sur le visage de l'enfant qui protesta. « Maieuh ! Moi ze veux zouer ! En plus Mit-suko a dit qu'elle allait revenir vite ! ». « Oui mais tu ne peux pas faire comme tu veux ! Et si il t'arrivait quelque chose ? En plus, tu es l'ancienne reine des humains ! Beaucoup de personnes te tueraient si elles savaient. ». « Maieuh ! Arrêteuh ! ». Ces mots avaient été presque chuchotés, sans grande conviction, la petite fille sachant très bien qu'il avait raison et ce malgré son jeune âge. Faust soupira avant de lui tendre la main. « Allez, ce n'est pas grave, je ne lui dirai pas. Viens, on va jouer à côté du par terre de fleur qui se trouve là bas. ». « Voui... ».

Violette prit la main de Faust qu'elle considérait presque comme son grand frère, ou son amoureux, tout dépendait du moment, se laissant traîner mollement jusqu'au lieu indiqué par le petit déchu. Une fois sur l'herbe, elle s'installa, veillant à bien étaler sa robe verte autour d'elle, imitant le geste qu'exécutait parfois Mitsuko. Fixant un instant l'une des pommes rouges qui y étaient dessinées, elle enleva une saleté qui l'avait taché avant de relever la tête vers Faust, un grand sourire sur le visage. « Diiiss ?? On zoue au prouteux ? ». « D'accord. ». Le déchu plaça ses mains afin de les taper dans celles de Violette et les deux enfants commencèrent à chanter en cœur : « Le prouteux c'est le premier qui se trompe ! Le prouteux c'est le premier qui se trompe ! Le prouteux ! » « Ah Violette t'as perdu ! C'est toi la prouteuse ! ». Les sourcils de la petite fille se froncèrent alors qu'une moue boudeuse apparaissait sur ses lèvres, bientôt suivie de protestations : « C'EST PAS VRAI ! ZE SUIS PAS UNE PROUTEUSE ! ». Tournant le dos à Faust, Violette croisa les bras sur sa poitrine, baissant la tête pour retenir des larmes de crocodile. Seulement, son regard fut attiré vers quelque chose pendant sa chute, la forçant à lever les yeux de nouveau. « Oh ! ». Un petit être se trouvait là, être que Faust vit, l'enfant se levant alors dans l'optique de l'écraser vite fait bien fait. Oui, parfois, les petits garçons pouvaient avoir de drôles d'idées. Néanmoins, heureusement pour la fée en question, le cri perçant de Violette retentit, arrêtant le geste du déchu. « Mais c'est qu'un insecte ! ». « NOOONNN C'EST UNE FEE !! LES FEES C'EST ZENTIL D'ABORD ! ». Violette se calma un instant avant de sourire à la fée, déclarant alors : « Dîtes madame, vous z'êtes la reine des fées ? ». Faust s'assit à côté de Violette, soudain interloqué. « Parce que ces petits trucs ont une reine ? ». « Mais oui débile ! ». « JE SUIS PAS DEBILE ! ». « SIIIII ! ».

Les deux enfants continuaient de se chamailler inlassablement, Faust rétorquant à chaque fois que Violette disait quelque chose, la petite fille usant d'une arme plutôt vile pour se défendre : hausser le ton. Si bien qu'en peu de temps, quelques passants commencèrent à les regarder. S'il s'agissait d'une femme avec son propre enfant, elle partait d'un air désapprobateur, sachant très bien que son petit ange jamais ne se comporterait de la sorte. Et puis, où était donc la mère de ces deux là pour oser les laisser déranger tout le monde ainsi ? Seulement, le déchu et l'humaine furent interrompu par le cri de la fée qui, bien que minime, avait su attirer leur attention. Violette ouvrit de grands yeux alors que Faust levait les yeux au ciel, exaspéré par les actes de sa sœur ou amoureuse, tout dépendait. En réalité, elle était sa sœur quand il ne l'aimait pas et son amoureuse quand il l'aimait. Selon le contexte, la terminologie était toute différente. Faust se tourna cependant vers la petite fille une fois que Thalie eut finis sa première tirade. « Tu vois ! C'est pas la reine des fées ! ». « Mais z'ai zamais dit que c'était la reine des fées ! T'es qu'un abruti d'abord ! ». « Haaan ! T'as dit un vilain mot ! Mitsuko va pas être contente ! ». « Et toi t'es qu'un rapporteur ! Et les rapporteurs ils puent des pieds ! ». « C'est même pas vrai ! ». Le petit garçon fit une mine boudeuse, donnant le loisir à la petite fille de répondre aux questions de la fée qui ne lui étaient pas passées au dessus contrairement à ce qu'elle aurait pu penser.

En réalité, Violette était tellement contente de rencontrer une fée que, même si elle avait haussé le ton pour parler avec Faust, elle avait tout de même continué à écouter les dires de cette dernière. « Moi ze m'appelle Violette, et lui c'est mon frère, Faust. Mais en fait on est pas vraiment frère et sœur parce que moi z'étais reine avant et pis comme ze pouvais plus grandir parce que mes z'obzets ils étaient cassés, ben en fait c'est Mit-suko qui m'a recueillis... ». Tout ceci dit avec un grand sourire, le déchu prenant une expression consternée. « Violette, tu n'as pas le droit de dire que tu étais reine ! ». « Mais c'était pas vraiment moi aussi rooo... ». « Tais toi maintenant, tu en as assez dit comme ça... ». Le petit déchu était quelque fois moralisateur et bien qu'il doute qu'un insecte volant avait le pouvoir de faire du mal à sa sœur, il préférait quand même se méfier et être prudent. « Elle c'est une humaine mais moi je suis un déchu. Mon papa il était annonciateur de la chute mais il a disparu. Un annonciateur de la chute c'est un roi en fait... ». « Non mais elle est pas idiote hein ! ». « Mais chut ! Tu m'embêtes ! Me coupe pas la parole ! ». Il reprit : « On attend notre mère qui ne devrait plus tarder. Et toi, qu'est ce que tu fais ici ? Tu butines les fleurs ? ». Faust avait eu cette idée en regardant une abeille se poser à quelques centimètres de la fée. Malgré son éducation au château de son père, le déchu n'avait jamais eu l'occasion d'entendre parler des fées, du moins, selon lui. Peut-être que son père ne les considérait pas réellement. De ce fait, il ne savait que penser sur la question.

« Diiiis madame la fée ! Tu peux nous montrer la poussière de fééééee !!? S'il te plaiiiiit ! ». Violette venait de profiter d'un petit silence dans la conversation pour demander cela, faisant alors tilter l'enfant qui se trouvait à ses côtés. « Ah mais attends... Tu es un Illuminae ?? C'est ça ?! J'ai vu un spectacle féerique un jour !! ». Les souvenirs resurgissaient de loin, mais, à cause de son impossibilité de grandir, Faust avait tendance à oublier de grandes parties de son existence du fait de son jeune mais aussi vieil âge. Centenaire, il ne restait dans sa tête qu'un garçon d'une dizaine d'années, ayant des capacités cognitives limitées. Finalement, à ce moment précis, il n'avait plus du tout envie de traiter Thalie d'insecte et, était même très curieux à son sujet, se rappelant que son frère, Enzel, était un Illuminae et possédait aussi de la poussière de fée. Violette, quant à elle, ne savait que penser, trouvant le déchu un peu bêta.

Positionnée contre un arbre, Mitsuko regardait la scène, un petit sourire aux lèvres. C'était elle. Le monde était ainsi fait, façonné par des coïncidences remarquables. La déesse ne se montrerait pourtant pas. Il était des choses qui devaient attendre, attendre le bon moment. Elle se contenta un instant de contempler la fée qui semblait ne point avoir beaucoup d'expérience. Captant la conversation, elle s'étonna de quelques propos tenus et échangés mais, après tout, il ne faisait sans doute pas bon de se retrouver prise en étau par Faust et Violette, les deux enfants étant bavards et, surtout, curieux. Comment aurait-elle pu leur en vouloir, elle qui l'était tout autant ? L'Æther savait que ce n'était qu'une question de temps avant que la Fée ne se révèle puisqu'il était à ses côtés. Il. Cela faisait longtemps qu'elle ne l'avait pas vu mais, après tout, certains de ses enfants n'avaient guère connu, jamais, sa venue. Edgar était différent. Ils entretenaient des rapports amicaux, bien qu'elle resta sa mère. Ce qu'elle aimait particulièrement chez le vampire, c'était sa faculté à conter les plus belles histoires des terres du Yin et du Yang. Il était cultivé et intelligent. La déesse sourit. Un vampire s'occupant de Fées, cela en aurait fait rire plus d'un. Seulement, encore une fois, Edgar était intelligent et cultivé. Il n'était pas l'un de ces monstres assoiffés de sang, du moins, il ne l'était plus. L'amour l'avait changé, la mort de cet amour également. D'ici peu, beaucoup de choses changeraient. Elle le savait. Le Conseil des Chefs aurait lieu et avec lui s'effondrerait les gouvernements des incapables. Bientôt, un nouveau Taiji atteindrait les sommets, ou, du moins, la chose était fort probable, et puisque Thalie côtoyait un autre Taiji, la déesse ne doutait pas que le futur serait plein de surprises. Elle grandirait pour atteindre, à son tour, un niveau hiérarchique élevé. Elle aussi ferait tout pour qu'Edgar fasse de sa vie une véritable aventure, pour qu'il l'instruise rapidement et pour qu'elle soit prête à épauler son fils dans ses décisions si ce dernier lui cédait une place de gardienne du jardin secret. La petite fée se révélerait-elle à la hauteur ? Seul l'avenir pourrait en décider. Néanmoins, Mitsuko pensait qu'elle réussirait.

Une fois la discussion terminée, la déesse rejoignit les deux enfants qui étaient toujours assis, aux côtés d'une fleur à présent désertée. « Dis maman, je vais devenir roi moi aussi, comme papa ? ». La jeune femme sourit, passant sa main dans les cheveux du petit déchu avant de s'accroupir devant lui. « Tu seras tout ce que tu désires mon fils. ». Elle le pensait. Les membres de la lignée Taiji avait toujours obtenu ce qu'ils désiraient, plus ou moins, mais s'ils n'avaient pas atteint les sommets, ils s'en étaient rapprochés, certains même au point de se brûler les ailes. Son père et elle étaient les seuls à être devenus Æther, mais elle ne doutait pas que la suite, le futur, serait plein de surprises. « Pourquoi la poussière de Fée c'est top secret ? ». Violette semblait songeuse en posant cette question, question à laquelle le petit déchu répondit d'un air vantard. « Ben moi j'ai déjà vu les Fées faire de la poussière de Fée d'abord ! ». Puis, il tira la langue à sa « sœur » avant de partir en courant faire le tour du parc. Mitsuko sourit devant l'air boudeur de la petite fille. « Ne t'inquiètes pas Violette, un jour tu pourras contempler un spectacle féerique. ». Le regard de l'Æther se tourna vers son fils qui attirait l'attention des passants en faisant de drôles de bruits, imitant sans aucun doute une sorte d'aigle dans sa course. Bien. « Nous allons attendre Faust puis nous rentrerons. ». La journée avait été longue pour elle, ses recherches lui ayant pris un temps certain. Elle devrait revenir demain sans doute.