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 Rien n'est plus vivant qu'un souvenir ~ [PV Naram]

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Mer 07 Nov 2012, 00:21



Un souvenir. Invisible, à la fois si puissant et si fragile, il pourrait bâtir des montagnes mais aussi tout détruire ou alors lui-même s’effondrer, s’envoler si loin qu’il n’en resterait que le plus faible des échos. Et pourtant, quoi que l’on fasse, il en subsistera toujours une trace immuable, aussi perdue soit-elle dans les méandres d’un esprit égaré. Le souvenir est le passé mais aussi le présent tout comme l’avenir car c’est lui et lui seul qui fait naître l’espoir, l’espoir qui n’est rien d’autre qu’une mémoire qui désire.
Mais qu’est-ce qu’un souvenir après tout ? Une image, un son, un sentiment… Alors pourquoi s’y attacher ? A quoi bon se lier à ces pensées qui ne sont synonymes que de remords et de chagrin ?
Peut-être parce qu’en fin de compte, rien n’est plus vivant qu’un souvenir.

~*~

Quelques heures, un jour, deux jours, une semaine, peut-être quelques mois ou même des années… Elena regardait au loin se demandant un instant combien de temps s’était écoulé depuis son arrivée dans ces montagnes enneigées. Mais cette pensée quitta rapidement son esprit, son attention ayant été accaparée par la vision qui s’offrait à elle, ses yeux s’arrêtant sur le moindre, le plus infime détail de cette vue, pour l’analyser aussi bien que ses sens, aussi éveillés que jamais, le lui permettaient. A nouveau, elle n’avait pas conscience du temps qu’elle avait pu passer, assise sur ce rocher enneigé, toute notion de durée l’ayant définitivement abandonnée. Ce n’était pas plus mal au fond, le temps n’était plus une chose essentielle à ses yeux, elle ne se sentait pas vieillir, si ce n’était qu’elle voyait certaines de ses capacités se développer peu à peu.

Pas un animal, pas même un insecte ne venait troubler ce silence si doux et apaisant qui s’était installé, le froid des sommets étant, même si l’ange déchue ne le ressentait pas, certainement un obstacle pour tout être vivant voulant s’aventurer en ces lieux. Une légère brise vint cependant lui tenir compagnie, dégageant sa longue chevelure de son visage toujours aussi pâle et glacé, quoi que, peut-être plus doux qu’auparavant. Les plus fines branches d’arbres tremblèrent, comme pour se débarrasser de la neige qui les recouvrait, lui laissant la liberté de rejoindre ce manteau d’un blanc si pur qui englobait la terre. Il ne neigeait pas, même si le ciel était nuageux, arborant une couleur d’un gris pâle, ne permettant pas à un seul rayon de soleil de s’aventurer en ces lieux. A vrai dire, cela convenait parfaitement à la jeune femme, elle ne portait guère d’affection à sa lumière qu’elle jugeait bien trop vive ainsi qu’à sa chaleur qui n’avait rien à faire dans un endroit pareil.

Détachant peu à peu son attention d’un arbre particulier dont elle jugeait l’allure bien différente de celle des autres, elle se leva enfin, s’avançant vers un autre rocher, un tant soit peu plus grand, sa légère robe noire glissant sur le sol avec douceur. Elle porta ses doigts longs et fins au-dessus de la neige qui recouvrait la pierre, puis commença à faire quelques mouvements délicats. Des flocons s’élevèrent dans les airs. Un léger sourire vint s’afficher sur le visage d’Elena. Amusée, elle les regroupa peu à peu, leur donnant différentes allures, les laissant s’entremêler entre eux comme s’ils dansaient. Elle sentait la faiblesse de ses pouvoirs, qui lui était pourtant étrangère il n’y a peut-être pas si longtemps, mais cela n’avait plus de grande importance à ses yeux, elle n’en avait pas réellement besoin, peut-être même, n’en eut elle jamais besoin.
S’il fallait revenir sur les raisons de ce changement si brutal, il n’y aurait plus grand-chose à en dire. La déchue savait qu’elle avait dû utiliser tant de puissance pour effacer ses souvenirs, car, il faut bien le dire, ils étaient devenus bien plus forts que son esprit lui-même, qu’aujourd’hui, ils étaient réduits quasiment à néant. Elle ne le regrettait pas, bien au contraire. Tout cela avait quitté ses pensées pour de bon, ne laissant qu’un sentiment étrange que l’on définirait peut être comme le bien-être. Il restait toutefois un léger écho, qui venait s’installer parfois dans sa tête, parcourant son esprit, mais ce n’était rien d’autre qu’une douce et agréable mélodie qu’elle avait dû entendre il y a bien des années. Peut-être la jeune femme était-elle heureuse, peut-être pas, elle ne le savait pas réellement, le bonheur lui étant un étranger. Il n’y avait plus que ce sentiment d’apaisement qui sillonnait tout son être, elle n’avait plus besoin de rien, ni de personne. Tout allait si bien.

Son sourire s’effaça rapidement, laissant de nouveau place au néant sur son visage, tandis qu’elle continuait à faire danser ces flocons de neige, ignorant que quelqu’un approchait. Ignorant aussi que ce quelqu’un allait bouleverser ce monde si paisible, ce mensonge dans lequel elle s’était enfermée.
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Sam 10 Nov 2012, 16:26

    Spoiler:

    Des années entières s'étaient écoulées depuis le retour du génie des enfers où il était emprisonné. Des années, qu'il avait commencé un nouveau voyage, rencontré de nouvelles personnes, filé de nouvelles intrigues et vécu, ô oui, il a vécu. Il se souvient cependant d'une rencontre comme aucune autre, une rencontre anodine sur un navire marchand à travers les océans. Cette rencontre, c'était celle d'Elena, un ange qui avait déjà connu la déchéance mais peut-être jamais celle que concevait Naram, une déchéance impunie. De cette rencontre naquit un bien étrange lien, allant en douceur dans des sens inattendus, jusqu’à atteindre l’apogée de n’anormal, au plein milieu d’un rêve à la porte des songes ; la seule fois de sa vie où Naram n’a pas réussi à maintenir un rêve en place, celui-ci s’effondrant, il se le rappelait encore aujourd’hui avec force et conviction, se rappelant son échec, il a emmené Elena loin, si loin dans ces rêves confus mais l’a perdu en route, le rêve détruit, ils furent perdus on ne savait où, le monde chimérique possédant sa propre carte et ses propres règles.

    Lorsqu’il se réveilla, immédiatement, il chercha à la retrouver, elle ne devait pas être loin. Vu qu’il ne rêvait normalement pas, incapable de s’endormir par sa condition de génie, il prit dès le lendemain le chemin inconnu du monde de la réelle et matérialisée porte des songes, en terres inconnues. Le seul endroit où les génies pouvaient rêver. Beaucoup pense que Naram n’aurait jamais dû faire ce voyage-ci, car si les sages avaient autrefois condamné l’entrée des abysses abritant la porte des songes, ce n’était pas pour rien, qui s’y rendait physiquement se perdrait à coup sûr, mentalement. Et bien que le génie avait toute connaissance de ses interdits aussi vieux qu’il l’était, il ne pouvait se résoudre à laisser Elena s’en aller, peut-être était-elle encore dans les limbes du rêve ? Le cas échéant, même au réveil, son esprit serait toujours en proie au doute, à savoir si elle vivait vraiment ou dormait à chaque instant de sa vie. Il connaissait les dangers de la perdition onirique, mais il avait joué ce jeu avec Elena, avec Mitsuko bien plus tard mais en tant qu’aether en devenir, esprit de la mort sur le présent passé, il savait qu’elle ne perdrait pas le fil, aussi a-t-il manqué de prudence concernant la belle ange déchue. Et lorsqu’il se rendit à la porte des songes, gravant les parois rocheuses inaccessibles à l’homme simple à seule force de sa rage, lorsqu’il entrevit cet immense arche de pierre à perte de vue où toutes les âmes de ce monde volaient sous forme d’orbe de lumière, lorsqu’il les a vus léviter dans l’étrange voile épais et lumineux qui délimitait ce monde inexplicable, il sut que s’il y rentrait physiquement, il ne serait plus jamais le même, se perdant sûrement à jamais. Mais que pouvait-il faire, c’était le seul moyen pour lui d’infiltrer les rêves, tous les rêves, jusqu’au jour où il retrouverait Elena.

    Et toutes ces tentatives furent vaines. Il y resta des heures entières, plusieurs jours d’abord, puis s’en alla, résigné, avant de recommencer le mois suivant et ceci, pendant des années, sans en parler à qui que ce soit, personne ne comprendrait. Pendant des années maintenant, il la cherchait, sans jamais pouvoir ne trouver un seul indice, elle ne rêvait plus, il songeait à sa mort sans l’expliciter, il voulait croire qu’un jour, elle rêverait à nouveau et qu’il la trouverait. Ce que le génie ignorait pourtant, c’est qu’avec le rêve, l’on ne trouve que ce que l’on cherche plus et ne trouvons jamais ce que l’on désire, une sorte de paradoxe à l’image que l’on donne habituellement à la notion de rêve, une chose née du désir entier d’un Homme. Et ce ne fut que lorsque le génie avait perdu tout espoir en ses rêves, lorsque Mitsuko commit l’impensable, oublier son génie, alors ce dernier perdit espoir en l’Homme, sûrement à jamais car cette dernière représentait le dernier rempart à ce qu’il y avait de meilleur en l’humanité. Ceci rompu, plus rien n’était vrai à ses yeux, le monde n’était qu’un rêve comme un autre, un cauchemar plus littéraire que réellement viable, et ce fut pourtant ce désespoir qui le guida à elle, à Elena.

    Ce rêve-ci fut peu de temps après son ascension au trône. Une nuit qu’il passa à la porte des songes dans l’espoir de retrouver Mitsuko, de pouvoir infiltrer son rêve, ne sachant pas encore qu’il ne trouverait que ce en quoi il n’aspirait plus, il fut projeté dans un étrange rêve, un rêve qu’il connaissait pourtant bien, un rêve qu’il avait pourtant presque oublié. Il se retrouva au bord d’une plage là où le rêve s’était effondré, là où un immense tsunami avait tout ravagé, ne laissant que le néant happer les deux êtres qui s’y étaient amusé. Il se retrouva là sans l’expliquer. Et dès l’instant où il fit le long de la plage remplie de débris encore fumant d’une épaisse fumée noire, comme si cela ne faisait qu’une minute depuis toutes ces années, il pensa à elle, si fort. Il pria à on ne savait quel dieu que ceci n’était vrai mais après tout, à présent, vérité et mensonge ne formait plus qu’un et ce rêve-ci était autant vrai que la triste réalité auquel croyait encore tous ces individus. Il parcourut ce rêve si longtemps, si peu dans la réalité, mais ici tout passait plus lentement et il y resta sûrement des mois entiers. Marchant, sans répit à travers les faibles lueurs du ciel encore fissuré par l’effondrement. Mais lorsqu’il dépassé une certaine limite, il fut comme transporté encore plus loin dans un endroit qui ressemblait à s’y méprendre à la montagne de l’edelweiss. Et sans se le dire, il savait qu’elle était là, il la sentait, de nouveau. Elle était encore plongée dans ce rêve, depuis tout ce temps. Il en frissonna, il était entièrement coupable de toute cette histoire.

    Arrivant à une sorte de veille caverne où l’on aurait habituellement pensé trouver ourse ou prédateur plus animal, il la savait ici. Marchant à travers la tempête de neige, il s’aventurait où Elena devait être. Le génie en était d’ailleurs certain, Elena devait croire être réellement à la montagne de l’edelweiss, aussi il devrait lui faire comprendre que depuis toutes ces années, son âme s’était perdue dans les limbes.

    « Elena. » dit-il à haute voix, plus fort que le sifflement de la tempête, s’avançant vers elle, comme un vieux rêve qui refaisait surface, attendant de pouvoir la revoir, de revoir son visage, son corps si pâle, il s’en souvenait avec tant d’exactitude qu’il avait du mal à croire ceci possible.

    « Elena. Je t’ai enfin retrouvé. Après tout ce temps, tu étais ici. Simplement, ici. J'ose à peine à y croire. » Dégageant la capuche qui le protégeait du froid, laissant ses cheveux en bataille du bleu océanique habituel habiller son visage, son regard perçant l’horizon et la neige qui les agressait par sa violence. Car ainsi, elle ne pourrait que le reconnaître, il le fallait.
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Lun 12 Nov 2012, 20:48

    Tandis qu’une légère brise vint caresser le visage d’Elena, cette si vieille mélodie enfouie dans ses souvenirs refit surface, peu à peu, mais ne se traduisant là que par quelques douces notes de musique, se baladant de part et d’autre dans son esprit. Et tandis que son volume augmentait lentement, le vent s’intensifiait, faisant virevolter les flocons de neige qui s’étaient mis à tomber, prenant une allure menaçante, comme pour prévenir d’un danger, d’une intrusion, quelque chose qui ne devait pas être là. Mais réflexion faite, cette idée était ridicule, personne ne pouvait venir troubler ce lieu, il y faisait bien trop froid, nul ne l’aurait supporté et puis… le temps ne pouvait être en rien un présage. Pourtant, la jeune femme ressentit comme une intrusion dans son esprit, chose qui ne s’était pas produite depuis bien longtemps. Une légère sensation de crainte vint s’installer en elle, comme si son monde était sur le point d’être bousculé, comme si son propre esprit était en train de la trahir. Quelque chose n’allait pas. Pourtant, elle ne bougea pas, se contentant de fermer ses paupières, son corps figé tel une statue de glace, seule sa main présentait encore un signe d’activité, continuant à faire tourbillonner ces quelques flocons dont les mouvements devenaient de plus en plus désordonnés, comme si elle en perdait, petit à petit, le contrôle. Finalement, ils tombèrent un à un, jusqu’à devenir à nouveau inertes lorsqu’une voix se fit entendre derrière elle, une voix puissante, résonnant tel un écho à la fois doux et terrifiant.

    « -Elena. »

    La main de la jeune femme trembla tandis qu’elle l’abaissait avec lenteur. Elle ne put réellement se décrire ce qu’elle ressentit à ce moment précis. Un flot d’émotions la submergea sans qu’elle ne put les comprendre, et pour la première fois depuis très longtemps elle sentit son cœur battre derrière sa poitrine, elle qui pourtant doutait même parfois de son existence.

    « -Elena. Je t’ai enfin retrouvé. Après tout ce temps, tu étais ici. Simplement, ici. J'ose à peine à y croire. »

    Elle l’entendit avancer de quelques pas, sentant sa présence, une présence si rassurante qu’elle avait connu autre fois. Mais n’était-elle pas censée avoir oublié ? Elle resta figée un moment, incapable de faire le moindre mouvement, un sentiment de peur, qui devait lui être pourtant si étranger, la submergeant de toutes parts. Puis elle finit par se décider à bouger, se retournant doucement vers celui qui avait prononcé ces paroles. Ce visage, ces yeux bleus si profonds qui avaient pour habitude de la regarder comme s’ils n’avaient pour but que de sonder son âme. Ses cheveux reflétant les mystères de cet océan si vaste, son océan. Cette main si rassurante dont le contact était comme un souvenir lointain, irréel. Et alors que tout son être, toute son âme se déchaînait à l’image de cette tempête, devenant de plus en plus intense à chaque seconde, la déchue demeura impassible, son visage glacial ne traduisant pas la moindre émotion, même s’il y avait toutefois cette lueur indescriptible dans ses yeux, tandis qu’elle fixait l’homme qui lui faisait face.

    « -Naram. » se surprit-elle à dire dans un souffle glacial, d’une voix si peu audible que seuls les deux êtres pouvaient prétendre à entendre.

    Non, c’était impossible, elle ne pouvait se souvenir, elle s’en était pourtant si bien assurée. Tout cela n’était plus à elle, ces pensées ne lui appartenaient plus depuis qu’elle avait décidé de les noyer à jamais. Pourtant, elle ne put empêcher un flot d’images venir bercer son esprit, le bateau, sa main prise dans la sienne comme pour dire que tout allait bien, la plage, les rochers, ces vagues s’intensifiant jusqu’à détruire un rêve qu’ils étaient parvenus tous deux à créer. Un si beau rêve pourtant, mais un rêve qui n'existait plus que dans leurs mémoires réunies, un rêve perdu. Que s’était-il passé ensuite ? Comment avait-il pu venir jusqu’ici ? Personne ne le pouvait, c’était comme si… cet endroit était un monde qui n’appartenait qu’à Elena, nul ne pouvait s’y introduire, elle était seule, elle avait décidé de l’être, il le fallait. Il ne pouvait être là. Etait-ce l'esprit de la déchue qui lui jouait encore des tours ? Manipulant ses sens, créant cette illusion qui pourtant semblait si parfaite, si réelle... Non il ne le fallait pas, cela n'avait plus lieu d'être, ce n'étaient plus que des bribes de souvenirs qui n'avaient plus leur place en ce monde dans lequel se trouvait à présent Elena.

    « -Pourquoi es-tu ici ? »

    Il y avait tellement de questions sans réponses et pourtant, ce fut la seule que la déchue put poser, même si elle n’était pas réellement à la hauteur de la situation. Au loin, une avalanche tomba, la neige dévalant le flanc de la montagne d’une puissance inégalable, écrasant tout sur son passage, allant même jusqu’à renverser certains arbres de par sa force si irréelle tandis que la tempête faisait rage autour d’eux, si violente, presque angoissante.

    « -Ne crains tu pas le froid ? » demanda-t-elle enfin, d’une voix faible et qui pourtant, en aurait fait frissonner plus d’un.

    Le vent redoubla de puissance, comme pour les intimider. On aurait pu même croire qu’il puisse faire s’envoler la jeunne femme, de par sa silhouette qui paraissait plus frêle que jamais mais il n’en fut rien, comme si elle était immunisée contre les éléments qui ne cessaient de se déchaîner, à l'image de son esprit qui se perdait à nouveau, se replongeant dans des lieux où il ne devait plus avoir sa place. Ces pensées, ces souvenirs ne devaient plus exister, parce qu'elle en avait décidé ainsi. Parce que c'était juste plus simple.
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Sam 29 Déc 2012, 15:04

    Ce royaume de l’hiver était d’une beauté déconcertante lorsque dans ce souvenir si vivant, nous étions deux êtres pleinement existants. Il fallait bien comprendre cet instant, nous étions tous deux dans ce rêve mais si je pouvais m’en extirper, Elena y était emprisonnée depuis des lustres. Je n’étais pas doué pour mesurer le temps qui passait mais s’il fallait se remémorer le rêve qui s’était effondré, alors bien des décennies étaient assurément passées sans qu’on ne puisse à présent les rattraper. Les flocons menaient leur somptueux ballet de glace sous la mesure orchestrée par l’ange déchue qui rythmait la colère de ce qui tombait de nature douce sur nos têtes.

    Mes cheveux étaient déjà recouverts d’un léger nuage de neige et mon visage s’accordait à l’ambiance puisque de nature pâle, il était caméléon à ce royaume de l’hiver. Bien des questions animaient cette femme, peu étaient posées mais tant étaient pensées. Cependant, je ne me rapprochai que peu, avec surprise, mes pas se faisaient silencieux dans ce berceau d’ivoire.

    « Qu’importe le pourquoi puisque je suis là. J’ai cherché une lueur qui me mènerait à toi pendant toutes ces années sans qu’un chemin ne se dessine. Et un jour, mon souhait fut réalisé, j’ai suivi le chemin d’un rêve abandonné par ses concepteurs. Notre création, à tous les deux. Je ne crains nulle température, nulle tempête, nul zéphyr. Je ne crains que ce souvenir, si vivant. Je ne crains que ce que je ne peux sauver. Dans la fente du néant, tu fus appelée et je ne pouvais m’y résoudre. Est-ce si simple de concevoir ma venue ? Ton retour ? Quelle douce berceuse que ta voix, je conçois à présent mais tu dois t’y résoudre : te voilà emprisonnée entre les quatre murs infinis mais indélébiles des limbes irréelles. Ton corps est introuvable mais ton âme est ici. »

    Observant en relevant la tête qu’une avalanche nous menaçait, je n’en remarquai que la vitesse sans consentir à la destruction qu’elle menait, détruisant toute vie sur son passage.

    « Tu contrôles tout ce qui est ici. Tout ce que tu vois n’est que le flot perturbé de ta pensée. Alors voilà comment résoudre le virus de ce rêve que je suis, par ton inconscient, tu détruits d’une vague de glace mon existence. Penses-tu réellement que cela suffira pour te replonger dans tes habitudes chimériques ? Je suis là à présent, et je ne repartirai pas. »

    Levant les bras comme un prêtre, la neige déferla sur ce monde toute sa solitude mais lorsqu’elle vint résoudre les deux jeunes gens, elle fit grâce à nos âmes, passant au-dessus de nous et sur les côtés mais rien ne vint nous atteindre.

    « Roi du rêve suis-je ainsi nommé. Je contrôle ce que tu vis. Cesse de refuser car telle femme ne saura me résoudre à abandonner. Je suis ici pour toi, Elena. Pour te ramener à la réalité. Et tu dois me suivre, tu ne peux décemment demeurer ici pour l’éternité, c’est une solution certes tentante mais invraisemblable. Ici, tu ne vis pas, tu te morfonds. Tu te caches, tu te protèges là où tu ne laisses aucune vie s’accroitre dans ce givre dévorant. Pourquoi tout ce mal ? N’es-tu pas déchue ? N’as-tu pas ta liberté d’action et de penser ? Que te faut-il de plus qu’un rêve t’apportera et que la réalité te privera ? Qu’importe ce que tu désireras, je n’y serai pas en tout cas. »
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Dim 06 Jan 2013, 01:29

    La musique s’intensifiait. Encore et encore. Cette mélodie si douce et apaisante était d’une beauté inexprimable, une beauté qui ne pouvait exister dans ce monde. Elle semblait à la fois réconfortante et terrifiante, terrifiante car ce à quoi elle était rattachée ne devait en aucun cas refaire surface. Pourtant elle continuait son avancée, comme se battant contre les réticences de celle à qui elle appartenait, luttant avec ardeur pour faire ressurgir ce qu’il y avait de plus profondément enfoui dans les méandres de son esprit. Quel était donc ce monde qui avait osé prétendre à la perfection et qui se retrouvait à présent victime de lui-même ?

    Naram se mit à parler, sa voix était à la fois la plus douce des musiques et le pire des châtiments. Pourquoi voulait-il tant lui faire ce mal ? Ne comprenait-il pas que le souvenir même de sa personne ne devait plus exister ? Ses paroles n’avaient pas plus de sens que sa présence. Peut être lui-même était-il devenu fou, peut-être avait-il fini lui-même par se perdre dans ces limites fragiles et capricieuses de la réalité. Elena entendit son cœur battre mais elle ne le sentait pas, il était bien trop loin, plus loin que l’on ne pouvait l’imaginer. Quelque part, elle savait. Il y avait cette partie d’elle, une infime partie d’elle, dans les tréfonds de son âme qui savait. Mais il ne le fallait pas. Elle ne voulait pas.

    Tandis que le génie empêchait l’avalanche de se briser sur eux, le vent se calma quelque peu, les flocons de neige tombant des cieux se firent plus rares. Une légère lueur de tristesse se dessina dans les yeux d’Elena, à peine visible. Son esprit s’était calmé, laissant de nouveau place à ce néant auquel elle s’était accommodée depuis bien longtemps. Elle sembla pourtant fatiguée, comme si elle devait se battre ardemment pour maintenir ce vide qui l’habitait, pour qu’il ne soit pas à nouveau submergé par ces souvenirs si lourds et oppressants, comme si tout cela n’avait toujours été qu’un combat perpétuel contre sa propre personne. La musique s’arrêta, enfin, comme pour marquer pour un instant la fin des tourments de la jeune femme.

    « N’es-tu pas déchue ? »
    Une douleur vive la saisit en pleine poitrine tandis qu’elle revoyait ses propres mains si blanches, souillées par le sang, le sang qui avait marqué le début de sa déchéance. Non pas encore, elle ne pouvait le revivre, c’était trop dur. Comment parvenait il à faire resurgir ces souvenirs qu’elle s’était pourtant si bien assurée de cacher d’elle-même ? Il fallait en finir, au plus vite, il fallait qu’il s’en aille.

    « -Tu te trompes, tout ceci est la réalité, ma réalité, je ne la quitterai pas. Je n’appartiens plus à ton monde, je me demande même s’il fut un temps où je lui ai réellement appartenu et si cela fut cas, j’y ai apporté bien plus de peine qu’il n’en fallait. Je ne sais si tu es vraiment là ou si c’est là la vengeance de mon esprit que j’ai fait sombrer dans la démence. Dans tous les cas tu n’es plus qu’un reflet, le reflet d’un passé qui n’existe plus que dans des souvenirs embrumés qui n’ont plus lieu d’être. Quant à ma liberté, elle n’est pas celle que tu prétends connaître. C’est ainsi que je suis libre, peu importe que tu le comprennes ou non. »

    Le flot de souvenirs ressurgit, la jeune femme se sentit faible, sa respiration provoquait en elle une douleur inexplicable, une douleur qui ne pouvait être physique, auquel cas cela aurait été bien plus supportable.

    « -N’as-tu donc aucun scrupule à mon égard ?» demanda-t-elle d’une voix si peu audible qu’elle ne prit pas la peine de se demander s’il l’avait entendue ou non. Après tout, cela n’avait plus d’importance.

    Elena ferma les paupières, comme espérant que cela allait tout effacer. Cela aurait été tellement plus facile. Juste fermer les yeux et oublier à nouveau, oublier à jamais.

    « -Pars Naram, je t’en prie pars et ne reviens pas.»

    Pourtant son seul désir à cet instant était de se retrouver à nouveau près de lui, effleurer son visage ne serait-ce qu’une fois de plus, le laisser prendre sa main tandis qu’il lui murmure que tout ira bien mais elle ne le pouvait pas. Elle ne pouvait le faire, elle ne pouvait l’entraîner dans sa folie, il ne le méritait pas. Ses yeux restèrent fermés, elle ne pouvait se résoudre à le regarder à nouveau car cela ne faisait que lui rappeler cette si douloureuse sensation que d’être en vie.

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Dim 20 Jan 2013, 19:55

    « Des scrupules ? Jamais. Je ne regrette que mes jours où je n’ai pas été assez mauvais. Et jamais la pitié ne m’habite, tu devras t’y habituer car je ne compte ni te plaindre, ni m’apitoyer sur un sort que tu as amplement mérité, que tu t’es infligée pour fuir, lâche de tes crimes, tu as la carrure pour porter mes scrupules, alors moi je porte sur mon dos tes crimes et nous sommes tous deux un éternel équilibre. » Dit-il en s’approchant d’elle à pas de velours, de petits bruits sourds dans la neige aux indélicates sonorités.

    « Que ce soit ce monde ou un autre, je demeure un reflet, celui-là n’est pas distinct, il n’a rien de particulier. » et alors qu’il faisait un tour sur lui-même pour admirer le paysage de glace, il continua : « A s’y méprendre, on y ferait presque aucune différence. Au détail près que tu es loin de moi. » et il fit un autre pas vers là, comme un chasseur domestiquerait sa proie ou un enfant s’approchant d’une colombe avec la peur qu’elle s’en aille.

    « Te rappelles-tu de ce jour où je n’étais que le fruit de la haine, où je ne voulais que tuer ceux qui s’étaient joués de moi. Te rappelles-tu de tes mots ma belle ? » et pointant son regard sur une ombre à côté d’Elena, ce fut un clone fantomatique de cette dernière qui se forma avec les flocons tombant ici et là, reformulant avec exactitude son visage et ses formes, les lèvres imaginaires se mirent alors à se mouvoir pour prononcer le discourt qu’elle avait tenu au génie à ce moment précis :

    « Le monde dans lequel nous vivons est tellement corrompu qu’il en devient honteux d’en faire partie, nous ne sommes entourés que de lâches et de traîtres, de créatures assoiffées sang tout comme de pouvoir. Croyez-moi, quoi que vous puissiez penser aujourd’hui, ce n’est que la haine qui vous aveugle. Vous avez tord de ne pas me demander ma compassion, vous avez traversé des épreuves que peu oseraient ne serait-ce qu’imaginer et le destin qui vous a été confié n’est sûrement pas des moindres. Mais en vous abandonnant à cette idée de vengeance, le sentiment sera jouissif au début, certes, mais cette rancœur finira par vous ronger de l’intérieur jusqu’à ce qu’elle ne vous mène à votre propre perte. Je sais, vous avez mal et vous ignorez comment venir à bout de cette douleur qui vous détruit jour à jour si ce n’est qu’en exprimant votre fureur. Vous savez, il y a bien d’autres moyens de réclamer justice que de mettre toutes ces terres à feu et à sang. » Puis le fantôme se dissipa pour rejoindre le lit de poudre sous leurs pieds.

    « Tu avais raison. Ce monde est composé de lâches, et ta haine te dévore, oui, elle te détruit. Elle ne t’apporte que plus de sang. Tu te penses libre mais ta prison est ici, me voilà dans ta cellule moi aussi. Et je refuse de rejoindre à nouveau une réalité où tu n’es pas. » Finissant sa phrase sans la regarder à présent. S’asseyant sur un tronc d’arbre non loin, le ton de sa voix recommença à raisonner.

    « Ne m’oblige pas à te convaincre. Je doute de tout argument veillant à vanter les qualités d’une réalité où je me sens si seul et si mal. Mais tout rêve est né d’une réalité encrée, d’un souvenir que l’on reconstruit, tout création possède son inspiration. Et tu m’inspires plus que je ne le voudrai. Mais le goût me manque, les odeurs printanières ne sont que brise sans saveur, tout toucher n’est que brute roche, la lumière m’aveugle et l’ombre me rassure, le brouhaha humain me rend dingue à en crever. Oui ce monde me tue à petit feu mais il m’inspire, cette souffrance est nécessaire. Et toi tu as compris tout ça, bien avant tout le monde, tu l’as compris comme moi. Tu ne peux pas rester ici. Je ne veux pas que tu restes ici. S’il te reste un tant soit peu d’amour pour moi, ne serait-ce qu’une bride infime et invisible, alors fais-toi violence et ne te résous pas aux chaines de la solitude. J’ai vécu en ton absence, assez pour te tenir éveillé une décennie nouvelle mais il suffit, tu dois te résoudre à vivre. Le sang sur tes mains n’est qu’un souvenir, une donnée interchangeable que je peux supprimer à jamais de ta mémoire à ton humble souhait. Mais quel intérêt car il s’agit là d’une partie de toi-même, un fragment indélébile qui te définit. »

    Il se releva ensuite, mettant ses deux mains sur les épaules de l’ange déchue à chaque extrémité avant de plonger son curieux regard dans le sien.

    « Tu es resplendissante Elena, une femme magnifique comme j’en ai peu vu dans ma vie ; nos jeux oniriques étaient... fantastiques. Mais je ne connais pas cette femme devant moi, je ne connais pas cette femme qui refuse et s’enfuit. Je n’ai devant moi qu’un vase cassé, jeté d’une montagne enneigée et dont les restes sont dispersés aux quatre vents comme une urne funéraire. » Son sourire s’allongea, collant son nez au sien, les regards toujours entremêlés.

    « Mais tu n’es pas morte, j’ai ton souvenir dans un coin de ma tête comme une veille histoire à laquelle on repense en riant et qui laisse immédiatement place à une mélancolie ténébreuse où la joie est écrasée par la tristesse de ne pouvoir revivre pareil moment. Mais nous pouvons revivre tout ça, tous les deux. Tout l’espoir d’un monde est à la portée de tes lèvres, tu ne peux décemment me refuser mes souhaits. Je suis un génie qui prie pour un monde meilleur, c’est tout de même rare. Et je prie pour que ce monde y gagne en t’y retrouvant, cette Elena aux ongles acérés qui me griffaient la peau, me cicatrisant avec extase, lorsque je te manquai de respect, cette lionne qui me tenait tête, elle n’est pas morte, non, elle est au bout de ce tunnel. »
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Mar 22 Jan 2013, 00:50

    Gardant les paupières fermées, Elena écoutait pourtant les paroles du génie avec attention, même si elle aurait préféré les laisser s’enfuir dans le vent car elles permettaient aux souvenirs qu’elle aurait tant aimé garder sous clé, de revenir la hanter de nouveau. Elle l’entendit s’approcher, prudemment toutefois, elle frissonna. Lorsqu’il voulut lui remémorer les paroles qu’elle avait elle-même prononcées, la jeune femme finit par ouvrir les yeux, lentement, voyant son propre visage sortir de la brume et entamer ce monologue dont elle avait été autrefois l’auteur. Ce fantôme du passé, son fantôme, il semblait si loin à présent. Mais elle s’en souvenait, comme de tout un tas d’autres choses, les souvenirs revenant submerger son âme peu à peu, dissipant cette magie dont elle s’était servie pour les cacher d’elle-même. Elle pensait toujours ce qu’elle avait dit mais ce n’était pas suffisant, cela ne pourrait jamais l’être. Après tout, même si elle aurait tout donné pour qu’il en soit autrement ses actes avaient été étrangers à ces convictions qu’elle avait l’habitude d’exprimer avec tant d’ardeur. Oui, ce n’étaient que de simples convictions qu’elle n’avait jamais pu matérialiser, même si elle l'avait voulu du plus profond de son être.

    Naram reprit rapidement son discours à la fin duquel il s’approcha de la déchue, posant ses mains sur ses épaules. Elle resta immobile, le laissant faire tandis qu’il terminait son monologue, mais sans pour autant s’infliger cette peine qu’aurait été le croisement de son regard.

    « -Si tu ne souhaites pas rejoindre une réalité où je ne suis pas alors reste dans celle-ci. Une réalité qui serait nôtre, qui nous appartiendrait, seulement à nous et à personne d’autre. » Murmura-t-elle en levant les yeux vers les siens, laissant enfin se joindre leurs regards.

    C’était comme si tout le reste n’avait plus de sens, tout avait disparu, ils étaient seulement là tous deux, plus rien n’existait, plus rien n’avait le droit d’exister. Elle leva la main doucement, comme pour enfin effleurer son visage de ses longs doigts pâles empreints de froideur mais elle finit par réaliser l’absurdité de ses paroles. Ce monde était le sien, le génie ne devait pas en faire partie, aussi beau que puisse paraître un tel rêve. Ainsi, elle s’éloigna de lui, reculant de quelques pas, même si elle s’en voulut à l’instant même où elle quitta son contact dont il ne lui restait à nouveau, plus qu’un souvenir.

    « -Tu sais ce n’est pas tant pour moi que j’ai préféré m’isoler de ce monde pour lequel tu sembles avoir tant d’aversion tout en le chérissant. Je ne suis pas faite pour ce monde, je ne l’ai jamais été et je ne le serai jamais. Après tout qu’ai-je à y apporter mis à part un fléau dont beaucoup se passeraient avec joie ? Tu penses que je suis lâche et je ne puis te contredire là-dessus, il y a bel et bien cette part de faiblesse dans mon comportement mais c’est si loin d’être ma seule motivation. Tu prétends me connaître si bien mais comment peux-tu imaginer ne serait-ce qu’un seul instant que j’aie si peu de courage ? Malgré ses infamies, j’aime ce monde, oui je le porte dans mon cœur et c’est bien la principale raison qui fait que je me refuse à y amener ma présence. Dans ce monde je ne suis que malheur, désespoir et destruction et je ne sais comment l’en protéger. Je ne peux pas le protéger de moi-même. »

    La jeune femme regarda Naram comme si elle lui en voulait d’être là, de lui parler, d’oser l’approcher.

    « -Pourquoi fais-tu cela ? Comment un être tel que toi peut être assez fou pour persister à essayer de sauver ce que l’on ne peut sauver ? »

    Elena se détourna du génie, s’éloignant encore de lui.

    « -Pourquoi ? »

    Le ton de la jeune femme s’était élevé, montrant enfin la splendeur de cette colère dont elle se laissait être victime en cet instant précis. Elle s’était de nouveau tournée vers lui, le laissant découvrir cette froide haine qui s’était dessinée sur son visage. Ses yeux si pâles avaient goûté à ces ténèbres dont le souvenir lui revenait peu à peu.

    « -Un vase cassé, c’est exactement ce que je suis, un vase que tu ne peux réparer et j’imagine que là doit être l’objet de ta frustration. Tu me vois comme quelque chose d’inachevé, quelque chose que tu ne parviens à raccommoder. Je m’excuse d’avoir pu ainsi blesser l’orgueil du puissant génie que tu es. Ravale ta fierté et abandonne, je ne fais pas partie de ton devoir, tu n’as pas à me secourir, je n’en ai pas besoin. C’est bel et bien ton monde que tu devrais secourir en me gardant d’y retourner, au lieu de courir après un songe, un rêve lointain qui n’a plus lieu d’exister. Ton envie de me faire revenir n’est, en fin de compte que pur égoïsme, celui d’un homme au désir inassouvi.»

    Le vent s’éleva de nouveau, menaçant comme le regard de la déchue.

    « -Cesse de prétendre me connaître, ce n’est pas le cas, cela n’a jamais été le cas. Tu ne sais pas qui je suis et je te souhaite de tout cœur de ne jamais y parvenir. Cesse de vouloir me sauver, en fin de compte cela ne t’apportera rien de plus que remords et désolation, ce sont là les seules choses que ton monde aura gardé de moi. »

    Elle finit par baisser le ton, laissant sa colère se calmer quelque peu.

    « -Tu aurais dû me laisser sur ce bateau », dit-elle simplement, laissant le silence s’installer pendant un instant, juste avant de reprendre.

    « -Tu es sans doute l’être le plus insensé qu’il m’ait été donné de rencontrer. Si je viens avec toi, je peux t’assurer que je causerai bien plus de malheur que tu ne puisses l’imaginer et tu finiras par regretter cette quête que tu t’étais entêté à accomplir. Qui pourrait être assez dément pour souhaiter une telle chose ? Le regret est le premier pas vers la folie et je ne souhaite pas que tu y succombes. Toi qui penses tout savoir, tu ignores tout de ce dans quoi tu t’es embarqué et le seul conseil que je puisse te donner est de fuir. Fuis moi Naram, pendant qu’il en est encore temps. Fuis moi et crois bien que je ne te suivrai pas. »

    Elena ferma de nouveau les yeux, juste un instant, poussant un soupir qui fit s’installer une nouvelle vague de froid.

    « -J’ai été damnée, damnée pour quelque chose que j’ose à peine croire avoir commis. C’est simplement comme si je n’étais pas maître de mes actes, comme si je n’avais été, au cours de ces dernières années, qu’une marionnette animée par les ténèbres. Je commence à me demander si ces mêmes ténèbres ne viennent pas de moi, peut-être suis-je simplement enfant du mal, destinée au chaos et à la destruction. Ainsi, si c’est le cas, je ne peux te suivre, c’est un risque je ne puis me permettre de prendre. C’est en restant loin de la vie que je lui permets de fleurir car je ne suis plus là pour la toucher de mes mains destructrices, empreintes de l’enfer. Tu ne regrettes que tes jours où tu n’as pas été assez mauvais ? Et bien moi je regrette ceux où je l’ai été, oh oui, si seulement je pouvais les effacer, non seulement de ma mémoire mais de celle de tous, effacer tout ce malheur que j’ai causé sans pourtant avoir eu l’impression d’en être l’auteur. Mais je ne le puis. La seule chose que je peux faire pour racheter un tant soit peu ces erreurs est de m’éloigner, de fuir ce monde en le mettant à l’abri de cette haine que je me déteste ressentir. Tu sais j’ai cherché, des années durant j’ai cherché à comprendre comment j’avais pu me conduire ainsi, espérant un jour découvrir que cela n’avait pas été moi, que je n’étais pas celle qui avait tant détruit. A présent, la seule explication qui me semble possible est celle qui me rend coupable de mes crimes. »

    La jeune femme fit une pause, s’avançant vers un rocher, faisant de nouveau voler quelques flocons de neige, les laissant s’entremêler dans une danse douce et délicate.

    « -Certes, en m’enfuyant j’ai voulu oublier, j’ai essayé d’oublier parce que je ne pouvais plus endurer ce châtiment que je mérite pourtant. Mais en te revoyant, ce flot de souvenirs ne fait que me confirmer que je suis condamnée à vivre dans la douleur, car c’est ainsi que je paye pour mes fautes. Mais en restant ici, bien que rongée par cette incommensurable blessure qui ne cicatrisera sans doute jamais, je me garde de reproduire ce pour quoi je dois à présent endurer cette torture. L’ironie du sort veut que cette souffrance me brûle lentement sans pour autant jamais m’achever. Mais sache-le, bien que ton souvenir la ravive d’autant plus et poignarde mon âme de toutes parts, je ne peux que le chérir, le garder jalousement au plus profond de moi car nous sommes les seuls à en détenir la clé. Cette image m’est si précieuse qu’elle vaut certainement le sacrifice qu’est celui de se soumettre une vie faite de douleur. »
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Ven 01 Fév 2013, 02:02

    Le génie écouta plus ou moins sagement ses paroles, les buvant à juste mesure entre ce qui le déconcertait et ce qui le rassurait. Lorsqu’elle vint effleurer son visage de ses doigts fins, il les embrassa brièvement avant qu’elle ne les retire et s’éloigne à nouveau, elle n’avait définitivement pas prévu de s’abandonner à tout ce quoi Naram aspirait pour elle. Elle lui parla de peine, de haine, de rédemption par la souffrance, d’isolement voir d’enfermement pour le bien être d’un monde dont elle ne connaissait pourtant rien, la faute à son amnésie pour laquelle elle luttait, se faisant le fardeau de tous ses maux, comme si elle était responsable du pire et dont l’absence avait permis le meilleur, mais elle se trompait tellement, se méprenait sur toute la ligne à telle point que le génie en aurait presque pu perdre son sang-froid mais il n’en était pas à là, non, car il se l’était promis, il la ramènerait

    « Et puis quoi ? Alors je t’abandonne, là ? Je suis sûrement insensé, peut-être suis-je obstiné, idiot et sûrement ferai-je mieux d’écouter les conseils d’autrui mais voilà, j’en suis incapable et lorsque je désire, alors j’entreprends. Moi tu sais dans le fond, je m’en fiche de ce que tu as fait, de ce que le monde perdrait ou gagnerait. Je sais simplement ce que j’ai perdu après ce rêve où tout a sombré dans le néant et je sais que je ne veux plus te perdre. Trouve cela désolant, égoïste ou fleur bleu si ça te chante mais c’est ici la raison de ma venue et de ma persistance. Tu pourras te mettre en colère, te mettre à me frapper, me hurler dessus, me déchirer la peau, je resterai. Car mon orgueil et ma fierté ne sont que piètres poutres lorsque le pilier de mon amour s’effondre et se meurt de ton absence. » Il détournait son regard, plus froid soudainement, lorsqu’il parlait de sentiment, alors ceux-ci quittaient sa douce et rogue voix.

    « Des millénaires que je cherche ma place dans ce monde et toi tu pensais la trouver en claquant des doigts, comme si c’était si simple. Si je t’ai sauvé de ce bateau c’est parce que je t’ai vu, toi parmi toutes celles qui me faisaient la cour, sûrement parce que toi tu ne me la faisais pas. Tu ne m’avais même pas regardé, ton ignorance m’a fasciné. Comment pourrai-je regretter de te ramener à la réalité ? Ce monde a tellement changé, ô si tu le verrais, crois-moi que tu te penserais une goutte d’eau dans cet océan criminel dont il est victime. Les anges déchus entrent en guerre, toutes les races deviennent folles, le monde tourne à la dérision, le spectacle semble-t-il a duré trop longtemps. Et que sommes-nous, nous deux dans tout ça ? Rien, absolument rien ma douce, juste deux gouttes dans l’infini. Alors cesse tes sacrifices, tes fardeaux et toutes tes punitions, le monde se fiche de comment tu te portes, il tourne sans toi, sans moi. Les Hommes naissent, s’aiment et se tuent, ainsi va la vie. C’est la belle incohérence de notre nature et tu ne peux la nier car elle t’habite. Mais si tu restes là, tu ne sauras jamais rien de ce qu’il t’est arrivé, tout ce qu’il te reste à découvrir, ne serait-ce que me découvrir, moi, tu ne peux me renier comme je ne peux t’abandonner. » il ne lui laisserait plus le choix. Il s’approcha d’elle, elle lui tournait le dos mais il l’enlaça tout de même par la taille, posant son front sur sa nuque, son souffle était brûlant et ses mains faisaient le tour de sa taille comme s’il voulait la protéger du mal.

    « Viens avec moi. J’ai construits une île dans le ciel, à l’abri du mal, tu y habiteras avec moi, tu pourras te ressourcer, tu auras le temps de réfléchir et de répondre à tes questions, je t’y aiderai à n’en plus douter. Tu auras un toit, je te présenterai ma fille adoptive, mes amis génies aussi dérangés que je le suis, je te présenterai mon chez moi où tu te coucheras et ne seras jamais seule parce que tu ne mérites pas la solitude. » Lui chuchotait-il dans le cou comme un secret qu’il fallait soigneusement garder.

    « Que puis-je faire pour te convaincre ? Tu sais, je ne suis pas doué pour les relations humaines, je ne sais que simuler et jouer la comédie. Mais tu me demandes d’être honnête et je peine avec mes mots. Pourtant, tu ne peux en douter, je suis le plus honnête des hommes lorsque je te parle, je n’ai jamais su te mentir alors pourquoi cela changerait. Et si tu l’as oublié, je suis toujours ton génie, tu n’as fait qu’un vœu sur les trois qui nous lie encore, mais ces vœux ne pourront s’exaucer que dans la réalité et je veux que tu les fasses. Tu vois, tu as encore des choses à faire dans ce monde que tu sembles immuniser inutilement de ta présence pourtant c’est de toi dont il aurait besoin à l’heure actuelle, et sûrement que moi aussi, j’aurais un peu besoin de toi, tu vois. » Et il sourit, il savait qu’elle ne voyait pas son visage mais elle sentirait son sourire grandir.
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Dim 21 Juil 2013, 22:15


    Elena crut un instant que ses paroles avaient pu avoir un véritable impact sur le génie, qu’il allait enfin se décider à l’abandonner, à s’en aller pour toujours, la laissant seule avec elle-même pour l’éternité. Même si sa raison la poussait à vouloir qu’il en fut ainsi, cette idée lui faisait peur plus que tout. Elle s’imagina se retourner mais n’avoir plus pour seule vision que le doux paysage des sommets enneigés et ne plus jamais pouvoir faire face à ce visage qu’elle chérissait tant. Cette idée la terrifia. Mais elle n’avait pas le droit de souhaiter sa présence auprès d’elle, c’était égoïste.  Elle sentit une vague de faiblesse l’envahir, les flocons qu’elle faisait danser retombèrent, tout comme sa main. Etait-ce si égoïste que cela au fond ? Après tout, elle n’avait jamais su ce qu’elle avait pu réellement accomplir dans le passée ni quelles en avaient été les raisons. Peut-être ne représentait-elle pas un si grand danger qu’elle se l’imaginait, peut-être avait-elle eu tort de laisser son propre espoir mourir dans les sombres abîmes de son âme si tourmentée.

    Elle chassa rapidement cette idée de son esprit. Non, il devait partir, il ne pouvait s’obstiner à la secourir. Peut-être était-il vraiment parti, qui sait. Rien que cette idée fut comme un poignard aiguisé s’enfonçant dans la poitrine de la déchue, déchirant son cœur de toutes parts. Soudain, elle l’entendit s’adresser à elle à nouveau. Elle se détesta alors d’éprouver le soulagement de sa présence.  Il n’était pas parti et sa voix était comme une douce mélodie par laquelle la jeune femme se laissa bercer même si ses paroles n’étaient pas celles qu’elle souhaitait entendre. Pourquoi était-ce si difficile pour lui de la laisser ?  Il avait raison en un sens, elle voulait découvrir ce qui lui était arrivé, essayer enfin de trouver un sens à ces absurdités mais quel pouvait en être le prix ? Elle refusait de sacrifier encore ne fusse qu’une seule vie pour une vérité qui, en fin de compte, pourrait être bien loin de celle qu’elle espérait entendre.

    Alors qu’elle se perdait peu à peu dans ses pensées, elle sentit Naram approcher, bien plus près d’elle qu’elle ne l’aurait autorisé, puis passer ses mains autour de sa taille. Elle trembla alors qu’il laissait reposer sa tête contre sa nuque. Elle sentit son souffle chaud se déposer sur sa peau, tandis qu’elle fermait les yeux, s’abandonnant aux bras du génie. Elle eut l’impression, à cet instant précis, de se consumer, comme si un feu puissant la brûlait de l’intérieur. Elle voulut que ce moment dure une éternité et tandis qu’il se mettait à parler de ses projets, de sa demeure dans le ciel, elle oublia alors toutes les raisons qui l’avaient poussée à se réfugier dans ce lieu isolé, perdue dans un rêve où elle n’avait pas sa place. Tout cela lui parût si ridicule, si vide de sens tout à coup.

    Il poursuivit, tentant de la convaincre par tous les moyens, et lorsqu’il mit fin à son monologue, Elena le sentit sourire. Il semblait si détaché de tous ces problèmes qui la tourmentaient, tout paraissait si merveilleux tout à coup, si facile. La jeune femme posa ses mains froides sur les bras du génie, comme pour renforcer son étreinte, profitant encore de son contact dont elle ne voulait jamais se défaire.

    « -Les choses paraissent si simples lorsque c'est toi qui les dépeins. » murmura-t-elle.

    Non elle ne pouvait pas, il fallait qu’elle s’éloigne de lui, il fallait qu’elle s’enfuie, le plus loin possible de ces bras qu’il lui était si difficile de quitter. Elle essaya de faire un mouvement pour s’en dégager bras mais n’y parvint pas, parce qu’elle manquait de volonté en cet instant ou peut-être parce qu’il la serrait trop fort, elle ne le savait pas.  

    « -Comme tu le dis si bien, tu es venu me trouver parce que tu as été fasciné par ma froideur, sûrement aussi parce que tu t’es senti blessé dans ton orgueil du fait que je n’essaye pas d’attirer ton attention comme toutes ces pauvres jeunes filles en quête du grand amour, aussi sottes les unes que les autres. Je ne suis rien d’autre pour toi qu’un objet curieux que tu souhaites étudier parce que tu n’en comprends pas le fonctionnement. »

    Son ton avait quelque peu changé, il était à présent bien moins doux avec une légère pointe d’agressivité, quoi que, à peine perceptible.  Elle essaya de se dégager à nouveau mais en vain.

    « -Tu ne te rends pas compte que tes désirs sont insensés et n’ont pas lieu d’être. Si je partais avec toi, me promettrais-tu de m’empêcher de commettre à nouveau l’irréparable ? Tu n’as aucune idée de ce dans quoi tu t’engagerais en faisant cela, moi-même je n’en ai pas conscience. S’il m’arrivait de reproduire quelque chose de semblable à mes actes passés, cela me tuerait... » dit-elle d’une voix plus silencieuse, à nouveau.

    Un air triste s’était installé sur le visage de la déchue, faisant s’envoler cette impassibilité qui lui était propre.

    « -Tu as un talent incontestable pour faire de beaux discours mais crois-tu réellement que nous puissions mener une vie si douce et paisible avec ce qu’il se passe autour de nous ? Tu n’as pas le droit me servir ce rêve sur un plateau d’argent alors que tu n’en as pas le contrôle, je dirais presque que c’est cruel. »

    La jeune femme ferma les yeux et finit enfin par repousser les bras qui l’enlaçaient, s’éloignant de Naram de quelques pas mais elle ne garda pas le dos tourné, décidant de lui faire enfin face. Sa gorge était serrée, ses yeux se seraient certainement remplis de larmes si elle avait su pleurer. Mais il n’en fut rien. Elle préserva le silence un instant, se remettant doucement de ce flot d’émotions par lequel elle n’avait pas l’habitude de se laisser envahir.

    « -Quel était donc ce vœu ? N’en as-tu vraiment aucun souvenir ? »

    Ne lui laissant pas le temps de répondre, elle reprit.

    « -Je pourrais en formuler un nouveau à présent, souhaiter que tu t’en ailles et que tu ne reviennes jamais. » dit-elle dans un murmure.

    Ces paroles lui déchirèrent le cœur. Elle recula à nouveau de quelques pas, s’appuyant sur la falaise, détournant un instant son regard de celui de Naram. Elle ne se rappelait pas de s’être déjà sentie aussi faible. Il lui suffisait de quelques mots et il partirait pour de bon, qu’il le veuille ou non. Après tout, pouvait-il choisir de ne pas répondre à un vœu ? Elle l’ignorait, à vrai dire elle n’avait que peu de connaissances sur les génies, du moins d’après le peu de souvenirs qu’elle avait. Dans tous les cas, ce n’étaient certes que quelques mots insignifiants mais elle-même n’était pas sûre d’avoir la force de les prononcer. La jeune femme regarda Naram à nouveau, les yeux visiblement empreints de mélancolie.

    « -Je me souviens d’une époque où les choses étaient réellement plus simples, où il n’y avait pas de prix à payer pour le bonheur et où la vie n’était rien d’autre que paix et insouciance. Où sont passés ces temps-là, Naram, le sais-tu ? »

    La main de la déchue qui la maintenait debout grâce à la falaise trembla quelque peu.

    « -Après tout, ce n’était peut-être rien d’autre qu’une illusion de plus, à l’heure qu’il est, il me devient de plus en plus difficile de démêler le vrai du faux. »

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Dim 22 Sep 2013, 18:33


La danse des ombres que nous menions tous deux était délectable, frustrante, en tout point délicate car Elena comme la poupée de porcelaine qui n’a nul sentiment en son regard, de sa fragilité, nécessite la prudence. La passion des mots animait ceux qui souffraient de la présence d’un être qu’ils n’espéraient revoir rôder de sitôt, j’étais ce vent impétueux qui s’efface mais jamais ne cesse d’exister, par-delà le monde des rêves, qui pouvait me résoudre à l’extinction, une femme, ni même le diable, car de tous les monstres en mon cœur, l’intangible effrayait mon âme. Un frisson parcourait les corps de glace lorsque les yeux se fusillaient, se rencontrant et se détachant, s’envoyant les étincelles d’un jeu bien mystérieux. « Je peux te promettre. Les mots ne peuvent tenir le monde en apesanteur tu sais. Tu ne sais qui je suis, ce que j’ai fait mais qu’importe les démons qui dorment en nous, nous sommes tous deux enfants des terres déchues, qu’es-tu que je ne suis ? D’un secret d’ébène, un baiser sur ta peau pâle et je vole les couleurs à la vie. Nous avons tous nos fardeaux, nous fuyons sans cesse mais jamais le temps pardonne aux immortels. Alors tu peux rester là, oui. Ou tu peux te dégager de ta prison, je peux briser tes barreaux et nous pouvons nous en aller. Je ne peux te promettre les fleurs en ce monde aride, je ne suis qu’un génie, un démon de ces temps anciens, qu’ai-je à apporter au salut ? Tu ne peux rien de plus pour ce qui ne peut être sauvé. De la réalité au mensonge, il n’y a qu’un pas que je traverse sans cesse car à mes yeux, l’un ne vaut pas plus que l’autre mais ne s’apprécie pas sans son équivalent. Comprends-tu que la mesure d’un rêve est fondée sur la base de notre univers ? On peut se rebeller contre les lois de la physique, contre les dictats de notre humanité, on peut refouler tout ce que l’on connait pour un monde imaginaire mais regarde autour de toi. Il n’y a qu’une montagne, vide de vie et de sens ici, tu es reine du néant car ton existence s’est enfuie dans ces sables du désespoir, retranchée, tu m’évites mais je serai derrière ton épaule. Roi de mon espèce, je contraints sans être contraint, j’exige sans que l’on n’ose souhaiter. »

Difficilement appréciable, la distance entre les deux êtres se confondait, loin ou proche, j’étais là où je le voulais et où elle ne le désirait. Je n’étais pas celui qu’elle voulait mais celui que j’étais. « Je les entends dire souvent que je suis le prince des rêves. A tort ou à raison, il faut bien admettre que la porte des songes est mon royaume et jamais on ne saura surpasser l’imaginaire qui bat dans ma poitrine. Sais-tu pourquoi ? Car je n’ai nul domicile, nulle famille, nulle existence dans cette réalité que je hante. La simplicité est la complexité, elles s’appartiennent, tout comme la paix et le repos d’une âme ou comme tu le souhaites, l’insouciance. Il ne tient qu’à toi de te soucier d’une société qui n’en a rien à faire que tu sois heureuse ou que tu crèves seule. L’insouciance c’est méconnaitre le monde lorsque l’on est enfant ou être ce fou, aveugle des comportements sociaux lorsqu’on est adule. Je connais les codes mais je les ignore, je les modifie, je joue avec ce qui nous régit car crois-le, les dieux ne se gênent pas, nous pantins, ils nous crachent dessus. Et toi, toi… tu veux rester dans ton château de glace sans nulle méfiance qu’un ennemi ne vienne en détruire les fondations ? J’assaillirai ton cœur et ton âme s’il le faut Elena. Le bonheur est une utopie qui appartient au rêve et qui doit y rester pour qu’il ne soit jamais souillé. Pour moi ces illusions sont bien solides, mais pour toi, je me le demande. En quoi peux-tu encore croire ? De quoi rêves-tu ? Cette montagne, c’est donc tout ce que tu peux faire. Le monde doit-il craindre le vide à t’entendre ? Moi je n’entends que ta complainte et elle me désole. »

Inspirant un long instant, paupières closes, je fis un sourire à la belle avant de m’approcher près de la falaise, ce pic montagneux qui nous séparait du vide incommensurable par lequel il semblait qu’on entendait battre le cœur du monde ou peut-être était celui de l’ange déchue. « Où sont tes belles ailes qui chérissaient la nuit ? Ta liberté, ton indépendance, ta fougue et ta joie ? Nos temps contemporains n’incarnent plus tout cela mais toi, si. Prends ton envole, il suffit de se jeter, corps et âme, de se faire happer par ce monde qui n’a jamais existé, de sauter vers ce qui n’est pas, de renoncer à tes chaines et crois-le, je sauterai avec toi. Entends-tu l'appel des abysses ? »
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Rien n'est plus vivant qu'un souvenir ~ [PV Naram]

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