Nastaé s'était fait méfiant, mais malgré tout, sa curiosité et sa naïveté le faisait admirer cet homme qui se tenait devant lui. Une fois en haut du puits, et malgré la bougeotte de Nastaé, ce dernier fut surpris des paroles du type. Il avait quelque chose que les autres n'avaient pas ? Flatté dans son égo, il voulu devenir un peu arrogant et séducteur, avec des mimiques bien à lui, mais se ravisa. Il était devant un sage, ce n'était clairement pas le moment de se la jouer. Restant pratiquement impassible, il arqua seulement un sourcil pour simple réponse, attendant la suite. Il restait quelque peu bloqué sur "quelque chose que les autres n'ont pas", car Nastaé ne se trouvait pas fantastique, bien loin de là.
Ainsi, Nanti s'était enfuis ? Eh bien lui qui était censé lui avoir "sécurisé" la zone, et se vantait d'avoir "grandit", il aurait quelques mots à lui toucher. Mais il n'y pensa plus, se concentrant sur l'autre homme, écoutant ce qu'il avait à dire, son histoire.

Se gorgeant d'informations, il eu un moment, l'impression de décrocher. Dans sa tête, il tria toutes les données, ne voulant pas passer pour un crétin qui avait une mémoire de poisson rouge, mais il du admettre qu'à la fin de son monologue -et malgré ses pauses- il eu quelques questions à poser :

-Atlantis ? Où se situe-t-elle ? Je n'en n'ai jamais entendu parlé...
-Tu parles de traditions, mais quelles traditions ? Je ne comprends pas bien ta venue ici... Enfin si, tu me veux, mais certaines choses restent trop floues pour le moment.

Le reste, sur la connaissance, il l'acceptait sans broncher. Après tout, rien n'était mieux qu'avoir accès à un savoir suprême et divin, voire infini non ? Même s'ils n'étaient pas immortels, et que quand ils mourraient, ils se transformaient en écume, au moins ils auraient eu une vie remplie, et pleine de sagesse, malgré son caractère extravertie et un peu volage. Réfléchissant, sans rien dire, il se voyait tout à fait évoluer dans un univers de savoir et d'apprentissage, tout en menant sa vie sur terre. D'ailleurs la terre ferme, parlons-en. Apparemment son peuple n'était pas friand de la terre ferme, et peu mutaient pour se balader dans ce monde là. Oui il avait affronté bien des dangers, mais il s'en fichait, car il avait découvert tellement de belles choses à côté...
Il avait découvert plus que l'amour d'une mère, la gourmandise à l'état pure, la passion pour un homme, le plaisir de pouvoir courir, voler, rire, tomber, pleurer, jouer... Il avait l'impression d'avoir plus appris en moins d'un an, qu'en dix huit ans d'existence. Alors non, il ne regrettait pas et il y retournerait de toute façon car sa vie était là bas, elle n'était plus sous l'eau. Enfin, en outre mesure bien sur. Mais quelque chose le fit tiquer.

-Comme tout à l'heure ? Car tu m'as vu sur la plage avec Morvan ?

Il se mit à froncer les sourcils, et sa tête se tourna sur le côté, faisant onduler ses cheveux aux reflets nacré, dans l'eau marine. Pourquoi l'avait-il suivit ? Alors depuis un moment il le voyait évoluer chez lui, dans l'eau, sur la terre, sans s'être manifesté avant ? Il baissa un peu dans son estime, mais il continua de l'écouter, croisant les bras.

-Une petite aventure ? De quel type ?

Nastaé oublia immédiatement sa petite moue boudeuse, pour s'intéresser de plus près à cet homme. Il était prêt, à chaque seconde, pour partir vers de nouveaux horizons inconnus, aussi dangereux soient-ils. Alors il hocha vigoureusement la tête :

-Bien sur que je suis d'accord !

Le voilà excité comme une puce maintenant.
Atlande avait piqué la curiosité de l'ondin, et il l'aurait suivit jusqu'au bout du monde lorsqu'il parlait de la sorte. Se redressant prestement, il ouvrit ses bras et rajouta :

-Tu sais où aller ? Car j'ai bien peur de connaitre le coin bien moins que toi...

Sa phrase resta quelque peu en suspend. Lorsqu'il regardait autour de lui, il avait tout à coup l'impression que tout lui semblait pareil. Comme s'il n'était jamais venu ici, et n'avait jamais nagé dans l'océan. Avait-il passé trop de temps à l'extérieur ? Etait-il devenu un humain banal, sans plus aucun attrait que pouvait avoir une sirène ? Il ne savait mais son cœur fit un bond dans sa poitrine. Si l'océant le rejetait, en le faisant se perdre dans son immensité, il lui prouverait qu'il était toujours son enfant, née aux creux de ses eaux, et qu'il lui appartenait plus que jamais. Alors il écouta attentivement Atlande, voulant à tout pris mener à bien une telle mission. Après tout, peut être était-ce un signe de ce géant, l'ayant vu grandir, et que maintenant il était temps qu'il fasse ses preuves.

Finalement, il avait bien fait de revenir voir sa famille.

Un mythe ? Alors comme ça, un type sortit de nulle part lui dit qu'un mythe est en fait réel ? Hum... Ceci demandait réflexion -ce que Nastaé n'avait pas-. Forcément, il était tout de suite emballé et cet homme lui inspirait finalement assez confiance pour qu'il le suive. Ainsi il avait hâte. Il cessa ses questions, se disant que de toute façon, il aurait le temps d'en poser d'autres plus tard. Un problème se posait : certes être gardien d'une citée le fascinait, mais... Que devra-t-il faire exactement ? Rester là, à surveiller une ville éteinte ?
Mais il dégagea toutes ces pensées là de sa tête, bien plus conquis par la recherche de pierres précieuses. Au moins, il serait dans l'océan, son monde adoré, en visitant chaque recoins, avec cet homme. L'ondin lui lança un petit regard en coin. Eh bien, pour un quinquagénaire, il était plutôt bien conservé. Certes, les sirènes vivaient longtemps, au delà du siècle, mais la vieillesse arrivait assez vite quand on regardait la plupart de ses congénères. Atlante lui, et peut être grâce à sa fonction, était assez bien et Nastaé se surprit à le dévisager. Ne voulant froisser un type qui faisait partie des Grands, il détourna le regard se concentrant sur autre chose.

Ainsi, il l'observait depuis un moment. L'un des seuls à marcher sur la terre ferme ? Comment ça ? Oui, l'ondin pensait qu'il y avait bien des sirènes aventurières qui avait déjà prit cette décision, mais visiblement il se trompait. Il était alors honoré que Atlante l'ait vu et l'ait choisi. Lui qui était dans une passe psychologique assez commune aux jeunes adultes, ce signe du destin lui faisait prendre confiance en lui. Il dit :

-Tu sais, ce n'était pas très difficile de rencontrer des humains. Les gens sont gentils, et il a été celui qui m'a trouvé le premier. Je m'étais échoué sur la plage.

Il disait ça avec une certaine nostalgie. Eh oui, il avait adoré ces moments là, et maintenant il avait l'impression que c'était tellement loin... Bien qu'il en gardait de grands souvenirs, son visage affichait une petite mine. Le fait qu'Atlante appuya son affirmation, il hocha la tête en souriant, croyant en lui désormais. Il était là pour son propre profit aussi, et celui de cette citée, alors Nastaé était bien moins méfiant.
L'histoire des pierres lui donna envie de partir de suite. D'accord c'était dangereux, et certainement long et fastidieux, mais il s'en fichait après tout, c'était excitant ! Mais le sage homme lui dit de le suivre, lui indiquant un certain chemin qu'ils emprunteraient. Soit, peut être pourrait-il plus en apprendre sur lui ? L'admiration qu'il lui portait commençait à franchement montée en lui, et il avait du mal à détacher son regard, surtout lorsqu'il parlait.

Alors se mettant en route, ils nagèrent côte à côte pendant un moment, puis avec beaucoup de tact, Atlante lui posa une question.

-Du courage ? Non... J'en avais envie. Il était temps pour moi partir et le meilleur endroit qui soit était la terre elle même. Je voulais découvrir d'autres horizons, simplement.

Après tout Nastaé n'était pas conscient du danger alors ici ou ailleurs c'était pareil.

Nastaé écouta attentivement les conseils et indications de Atlande. Cette épreuve là requérait de la patience, mais plus encore : une vision accrue. Non pas physiquement, mais psychiquement. Au-delà du palpable, il fallait qu’il soit plus intelligent. Se demandant bien pourquoi, il haussa les épaules, se disant qu’il verrait bien. Quand l’Ondin disparut, se fut son départ.
Lorsqu’il pénétra dans la grotte, il s’aperçut rapidement qu’elle s’assombrissait. Pas de lumière, pas d’eau transparente et lumineuse, rien. Juste sa vision nocturne en guise de soutient. Bien, il en avait l’habitude de toute façon, alors il n’allait pas se plaindre, mais il préférait quand même être de jour pour réaliser ce genre de défis.

Dès son entrée dans l’antre, il suivit machinalement les couloirs, sans vraiment faire attention, et puis au bout de cinq bonnes minutes, s’aperçut qu’il tournait en rond. Tout lui était on ne peut plus familier. Ceci était donc un cul-de-sac ? Pourquoi l’avoir envoyé là ? Nastaé avait tourné à un angle de mur, lorsqu’il se rendit compte de la chose, et voulu –logiquement ou pas- faire demi-tour. Cependant, l’endroit où il se trouvait juste avant était totalement bloqué par une paroi, et au contraire, un autre couloir s’offrait à lui. Intrigué, il s’engouffra là-dedans, se demandant bien ce qui avait pu se passer. L’ondin n’était pas très intelligent, alors il ne capta pas tout, tout de suite.

Faisant attention aux alentours, il suivit quelques couloirs comme ça, pendant un moment, jusqu’à entendre un bruit. Là aussi il tourna, vira, chavira, se reposa, et se mit à réfléchir. Tout était pareil, tout se ressemblait et les voix d’accès précédentes, devenaient impraticables, alors que d’autres s’ouvraient à lui. Ce n’était pas normal, quelque chose clochait dans ces tunnels. Touchant les murs rocheux, il ne découvrit rien d’anormal et puis, comme un signe du destin, un petit poisson arriva de nulle part. Un peu trop heureux, Nastaé le suivit, aveuglément, se disant qu’il trouverait la sortie avec lui. Les bêtes n’étaient pas douées de la pensée humaine, alors peut-être qu’il arriverait à le sortir de là.

Mais ce fut tout le contraire. La bestiole l’emmena à un carrefour, pour le semer. Et là, comme si tout s’éclaira, il s’arrêta en plein milieu, et vit des parois, au loin, dans chacun des nombres tunnels, bouger, apparaitre, disparaitre, le tout très silencieusement. Il crut devenir fou.

« Je suis dans un labyrinthe ! »

Oui, un vrai, un pur, un dur !
Nastaé se mit sur le sol, prenant sa tête entre ses mains, essayant de chercher le petit poisson de son empathie, en vain. Il ne ressentait rien, mis à part le vide total aux alentours. C’était difficile et éprouvant, combien passerait-il d’heures ou de jours entiers là-dedans ? Y avait-il des monstres affamés de sa personne en son sein ? Il ne savait rien, il était perdu. Il aurait voulu se téléporter, mais il ne le pouvait pas, et ne le savait pas.
Se redressant doucement, après une mini crise d’angoisse, il choisit un des tunnels, un peu par hasard. Son but était de voir à travers ces parois-là, car toutes pouvaient être fausses, comme réelles, c’était clairement déroutant.

Suivant un chemin, l’ondin revint dans le carrefour, il trouva ingénieux de placer des cailloux, et monticule de sable aquatique, devant chaque entrée où il était passé, de manière à mieux se repérer. Ainsi, il en essaya un autre, peut être serait-ce le bon ? Mais il arriva encore au carrefour. Un troisième, idem. Lors du quatrième ce fut différent, un cul de sac. Faisant demi-tour, sans chercher à comprendre, il revint au corridor et s’aperçut que, finalement, il les avait toutes faites, d’un côté ou de l’autre. C’était là que la solution se trouvait. Il pénétra à nouveau dans le couloir, et cherchant à nouveau le mur. Cependant, il trouva qu’il avançait beaucoup, par rapport à tout à l’heure, et par rapport au mur. Il était là il y avait un instant !
Mais ce dernier ne s’était pas envolé au contraire. Nastaé le percuta un peu plus loin, voyant clairement qu’il s’était déplacé, et tenta de chercher la solution. Il fit tout : lancer des sorts, gratter la roche, pousser le mur, lui parler, avant de si appuyer pour se reposer. Il en avait marre. Combien de temps cela faisait-il qu’il était là, en train de galérer ? Trop de temps à son goût. Pire encore, il restait un dernier temple… S’il sortait de celui-ci vivant.

Se relevant, il cherchant correctement et se remémora la phrase d’Atlande. Voir avec autre chose que ses yeux ? C’est… Comment dire… Très abstrait.
Il essaya de fermer les yeux, mais la non plus ça ne servit a rien, il se cogna plus qu’autre chose au mur en pierre.

Et puis il eu la foi.

Nastaé cru en « autre chose » qui pouvait exister derrière la paroi. Autre chose de concret, de réel, comme si c’était lui, maintenant, qui traçait son chemin. Tous les murs n’étaient pas des illusions, mais la plupart. Ce fut ainsi qu’il arriva à braver la roche, et à berner le labyrinthe vivant. Il passa la main, puis le bras, et se retrouva finalement de l’autre côté.
Pendant quelques heures, il refit cela, encore et encore, puis finit par arriver, exténué, devant les gardiens. C’était les deux mêmes statues que le temple précédent. Soupirant, il s’avança vers elles, désireux de savoir si elles allaient le laisser passer. Mais il fut retenu par une voix. Une voix qu’il connaissait :

« Si tu es arrivé jusqu’ici, cela prouve bien des vertus que tu détiens en toi. Résous l’énigme, et la pierre est tienne. »

Pardi, une énigme, mais que va-t-il encore lui arriver ?

« Tu ne peux ni l’attraper, ni le manger, mais si tu essayes tu en meurs. Qu’est-ce ? »

…et une énigme à la con en plus. S’asseyant sur le sol, il comprit qu’il n’arriverait pas à maturation de suite, de suite.
Au début, il pensa bêtement à de la nourriture. Mais qu’elle nourriture ne peut-on pas attrapé ? Non, clairement, ce n’était pas ça. Tout était palpable. Un liquide ? On ne peut, peut-être pas retenir un liquide dans ses mains, mais on peut l’ingurgité, sans en mourir. Non, ce n’était pas cela non plus. Objets, minéraux, faune, flore, humain, sentiments… Il passa par tout ce qu’il jugeait bon et utile, jusqu’à dépérir. Cependant, la piste des émotions était une piste à bien étudier. On ne peut pas attraper les émotions, ni les sentiments, mais si nous n’en n’avons pas, nous n’en mourrons pas non plus. Rien. Il n’y a rien que nous ne pouvons avoir ou toucher, sans mourir ou rester en vie. Rien.
Rien.

Nastaé leva la tête, et eu comme une lueur d’espoir. Mais bien sûr !
Se rapprochant des statues il prononça d’une voix forte :

« Rien ! »

Evidemment ! On ne peut pas attraper rien, et si on ne mange rien, on meurt. Quel idiot faisait-il ! Il a passé trente-six ans dans cette grotte, à braver des épreuves, pour arriver devant une énigme qui était finalement, aussi bête que méchante.

Là encore, les statues se décalèrent et, contrairement à l’épreuve d’avant, il n’eu pas à faire demi-tour. Quand il récupéra le caillou dans l’anti-chambre, une porte dérobée s’ouvrit, l’emmenant ainsi directement dehors. Même si la lumière était filtrée grâce à l’eau, Nastaé fut sacrément éblouis en sortant de là. Cependant, Atlande l’attendait comme il se devait, et à nouveau, il lui remit la pierre.

« C’était… Très dur. Je suis assez fatigué Atlande, laisse moi cinq petites minutes, s'il te plait. »

N’attendant pas sa réaction, il fila vers un bloc de rochers, adjacent, et trouva une place pour s’assoir, voir s’allonger dessus. Il se lèverait et partirait après ses questions, ses remarquent et ses appréciations.