« Hum. » Un léger sourire aux lèvres, Vanille scrutait les alentours. Ses grands yeux verts brillaient d'un éclat de malice, moquerie à peine dissimulée. Perchée sur la branche calcinée d'un vieil arbre tordu qui se maintenait péniblement sur l'un des flans du Volcan, elle balançait ses pieds nus dans le vide. « Tu aurais pu rester un peu plus longtemps auprès d'elle, à la guider subtilement. » murmura le Tigre dans un reproche grognant. La Sirène rit tout bas. Sans le moindre scrupule, elle avait disparu au détour d'un tunnel avec ses bêtes pour ne plus réapparaitre, songe éthéré ou cauchemar ambulant qui allait et venait à sa guise sans laisser de trace si ce n'est un bon ou mauvais souvenir. « Cette femme est tout à fait détestable, à sa manière. Peut-être n'est pas un mal puisque sa nature n'est pas d'être douce et agréable. Je lui prédis un certain avenir. » - « Alors tu as décidé de l'abandonner dans une Montagne de Feu qui ne demande qu'à cracher sa lave. » - « C'est une Ombre, mon chaton. Elle est déjà morte, peut-être même enterrée et tes semblables ont pu ronger ses os. Elle ne craint rien, si ce n'est l'influence de ses propres peurs. » Doucement, la jeune femme pencha la tête sur le côté. « Contemple le spectacle. N'est-ce pas magnifique ? Ces paysages là ne se retrouvent pas sous les eaux. J'apprécie la diversité du monde d'en haut. » - « Magnifique ? Ce n'est pas forcément le mot. » - « Tu es trop manichéen. La beauté n'est pas synonyme de petits oiseaux et de fleurs. Le chaos, aussi, est splendide, mais d'une manière plus complexe. » Les terres brulées étaient de rouge et de noir. Plus rien ne pouvait y pousser. Parsemées d'arbres morts et de roches colorées, ses ténèbres plaisaient autant à l'oeil que les charmes des Terres d'Emeraude. « Le Volcan gronde. » souligna Kesmos tandis qu'une ultime secousse tremblait. La lave jaillit lentement pour couler dans les nuances flamboyantes du feu crépitant. « L'Ombre ? Etait-elle sortie ? Et si elle était encore à l'intérieur ? Tu la laisserais mourir ? » Vanille tourna lentement la tête vers le félin. « Tu oses encore me poser cette question. » souffla-t-elle, impassible. Elle avait fait tellement pire.

« Puisque tu insistes. » soupira Vanille bien que ses traits soient cyniques et sarcastiques. Bras tendus, elle se mit à doucement bouger les doigts dans quelques gestes élégants. « Si elle ne comprend pas le message, je ne peux rien pour elle. Elle ne me fait pas confiance. » Vanille sourit. « On ne peut lui enlever cette bride de raison. Ceci dit, fou serait celui qui ne croirait pas en mes prédictions. » La Sirène était des plus puissantes. Encore fallait-il qu'elle ne mente pas. « Je lui ai tracé un chemin sûr. Libre à elle de l'emprunter. » Le Volcan se fissurait et craquait. Des éboulements résonnaient. Dans les décombres, il pouvait être bien difficile de se réperer, à moins d'être un tantinet observateur. Dans la chaleur étouffanteet  le brasier de ce lieu chaotique, certains murs étaient étrangement grifonnés d'une couche de givre pour mener à une paroie censéese briser lorsque l'Ombre atteignerait le terme de son épopée. « J'ai vu ce que j'avais à  voir. » conclut Vanille de sa voix douce et chantante. « Partons, à présent. » Elle sauta de sa branche pour atterrir sur le sol brulé. Anzu vint immédiatement se lover dans ses bras alors que Kesmos se relevait demauvaise grâce. Vanille jeta un coup d'oeil au loin, vérifiant si l'Ombre était sortie. Elle sourit, avant d'effleurer son artefact de téléportation pour disparaitre.

« Je savais que vous étiez sympathique, dans le fond. » Vanille soupira. Bien évidement, il était là. « Professeur. Ne puis-je donc être tranquille même dans mes propres appartements ? » - « Oh arrêtez donc, je sais que vous m'adorez. » Affalé sur le lit, le drôle de magicien envoyait un balle régulièrement. « Partez. » - « Je comptais vous inviter à diner, à vrai dire. » La Sirène haussa les sourcils. « Pardon ? » - « Cela ne vous tente pas ? » Il dévisagea l'Ondine. « Pourquoi cette mine dégoutée ? Eh ! Restez là !  » La porte claqua. La Sirène n'était pas d'humeur. Cet homme là déclenchait en elle des sentiments contraires. Peut-être l'aimait-elle. Surtout, elle désirait sa mort. Par dessus tout, elle aspirait à être son bourreau.

Spoiler:

      Aaliah s'était engouffrée dans le premier tunnel à sa porté, essayant de distancer le squelette qui l’inquiétait bien plus que la lave. Elle entendait l'écho des griffes de sa louve et des métatarses de son poursuivant qui raisonnaient sur le sol rocailleux du volcan énervé, mais nul son n'évoquait la présence de la sirène. Celle-ci avait dû emprunter un autre chemin et l'Ombre s'interrogea un bref instant si la rouquine avait opté pour une meilleur option qu'elle. Aaliah n'avait cependant guère le temps à perdre en réflexion et s'apprêtait à disparaître dans les ombres lorsqu'elle sentit une force s'agripper à l'objet tant convoité. Déséquilibré, elle bascula en arrière en grognant de mécontentement. Elle eut toutefois le réflexe de resserrer sa poigne contre la couronne récemment voler. A moitié par terre, le bras presque tordu, elle eut tout le loisir de contempler l'anatomie du squelette qui souhaitait récupérer son bien.

      « Répugnant...» marmonna-t-elle dans un grimace de dégoût et de gêne devant l'amas d'os rongé par le temps.

      Loin de se laisser déconcentrer par la remarque de l'Ombre, le macchabée décharné tira violemment sur la couronne, secouant Aaliah comme un insecte dont il souhaitait se débarrasser. La jeune femme pesta, mais parvint à retrouver son équilibre et une position plus pratique pour lutter. De son regard sombre, elle dévisagea les orbites vides de son ennemi. Elle avait assez vu de cadavres dans sa vie pour ne pas se laisser déconcentrer par celui-ci.

      « Lâche cette couronne tas d'os!» lui cracha-t-elle au visage en tirant vainement de toutes ses forces.

      Ce dernier ne semblait pas vouloir lâcher prise aussi facile, les phalanges bien refermées sur le métal de l'objet désiré. L'Ombre grimaça devant tant d’acharnement et tenta de lui faire lâcher prise en lui balança un coup de poing en pleine la mâchoire qui se décrocha ─ au sens propre du terme ─ tant en produisant une douleur peu agréable dans les doigts de l'Ombre. Elle n'avait pas l'habitude user de ses poings et les os, c'était tout de même plus rugueux qu'une peau. Le squelette, lui, semblait s'en ficher royalement et s'il avait pu, il aurait probablement ri. Aussi, pour toute réponse à cette vaine attaque, il repoussa la jeune femme violemment sur le sol. Aaliah se retrouva sur le sol avant même d'avoir pu se défendre. Lorsqu'elle se remit sur ses jambes, le squelette réfractaire à toute demande avait déjà repris possession de la couronne qu'elle avait malheureusement lâcher. Profitant de son inattention, elle défeurra sa lame et se précipita sur lui.

      « Hé, le pouilleux! Touche pas à ça, c'est à moi! » l'apostropha-t-elle en lui assénant un coup d'épée rageur qui lui brisa le bras en deux.

      Il eut un bruit d'os et de métal qui s'écrasaient et roulaient sur le sol, quelque peu jouissif pour l'Ombre qui retrouvait une soudaine énergie pour en finir avec ce maudit squelette. La jeune femme avait horreur qu'on lui piquât ses affaires, même si celles-ci ne lui appartenait techniquement pas. Elle n'avait cependant pas fait tout ce chemin en compagnie d'une sirène insupportable, dans un volcan capricieux, juste pour le plaisir de se rouler dans la cendre et se retrouver sale de la tête au pied. L'Ombre avait sa fierté et elle n'aimait guère voir celle-ci être égratignée. Pour s'assurer que le squelette ne l'ennuierait plus, elle lui donna un second coup, lui tranchant le cou net. D'ordinaire, elle n'aurait pas prit le risque de faire cela, mais là, elle savait exactement où frappé pour briser l'os sans briser sa lame... L'avantage d'avoir affaire à un être d'os et non de chair. Et tandis que le crâne roula le long du tunnel poursuivit par un squelette en perdition, Aaliah récupéra sa couronne.

      Elle aurait bien soufflé un instant, mais ce combat, même éphémère, lui avait fait perdre un temps précieux. Les parois du volcan tremblait sous le coup de sa colère et des rochers malmené par des fissures se détachaient du plafonds à des intervalles bien trop proches à son goût. Il lui fallait filer d'ici le plus rapidement possible. Aaliah regarda autour d'elle, cherchant après sa louve pour s'assurer qu'il ne lui était rien arrivé de fâcheux. Celle-ci trépignait d'impatience pour quitter ces lieux peu accueillants et l'Ombre décida de lui faire confiance pour trouver un chemin sans danger notaire. Elle remarqua ci et là sur certaines parois d'étranges reflets cristallins lui rappelant le givre des hivers rudes. Chose impossible puisque la chaleur du volcan était bien trop étouffante pour espérer voir du givre, encore que, au vu de sa nature, tout était finalement possible sur les Terres du Yin et du Yang.

      Il était même possible de sortir d'un volcan en éruption sans difficulté apparente, puisqu'elle pouvait désormais contempler sa colère de plus loin. Elle posa son regard sur l'objet récupérer des entrailles de la montagne, intriguer par le reflet doré. La couronne semblait ancienne, dormant probablement là depuis de longs siècles. Elle était belle et joliment décoré, une véritable couronne de roi, pas comme celles qu'elle se créait petites avec des lianes pour jouer à la princesse des bois. Toutefois, Aaliah ignorait le pouvoir qu'elle pouvait bien renfermé, ni même si elle en avait réellement un, mais elle avait tout le temps pour le découvrir. La jeune femme reporta son regard sur l'horizon, cherchant du regard après une éventuelle mèche rousse. L'Ombre ignorait si la jeune femme qui l'avait accompagnée dans sa fol aventure s'était sortie indemne. Probablement, elle n'était pas du genre à mourir aussi bêtement. Aussi, elle décida de tourner les talons et de continuer son chemin, sans même chercher à savoir ce qui était advenu de la sirène. De toute façon, cela l'arrangeait de ne pas la retrouver; cela lui évitait de devoir la remercier pour son aide...

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