Vanille marchait, le pas sûr dans Medigo. Elle trouvait la ville superbe, mais elle était mal réputée maintenant... Dangereuse... Évidemment, Vanille s'en souciait guère. Comme toujours. Kesmos la suivait en observant les alentours méfiant. Des regards s'étaient déjà posés sur la sirène avec beaucoup d'intérêt... Quand allait-elle enfin se décider à se vêtir convenablement!? D'autres personnes reluquaient les tigres avec peurs, de la méfiance eux aussi. Oui... Medigo n'était vraiment pas une ville sûre. Mais Vanille dans un excès de gentillesse et de compassion avait décidé de venir en aide à quelqu'un.
Madame Kure, une jeune femme habitant dans le continent dévasté où se trouvait la ville de Medigo, l'avait interpellé. Vanille était gentiment en train de se faire offrir un verre par deux jeunes hommes. Elle avait soif et avait usé de ses charmes pour arriver à ses fins, quand une femme déboula dans la taverne où elle était posé, sans Kesmos qui attendait à l'extérieur. La femme, au nom de Madame Kure, cherchait désespérément son mari. Elle demandait à toutes les personnes présentes si elles n'avaient pas quelques informations. Mais personne n'en avait. Vanille abandonna donc ses charmants messieurs malgré leur protestations intensives.
Elle rattrapa Madame Kure qui courrait dans la rue pour aller chercher ailleurs. Kesmos, qui se demandait ce qui pouvait bien se passer, suivit la sirène.
-Madame! Madame! Eh oh MADAME!
Au bout d'un certain temps, Madame Kure comprit qu'on essayait de l'arreter. Elle se retourna et dévisagea la sirène.
-Oui. Que me voulez vous? Je vous ai vu à la taverne... Savez vous quelque chose?
-Non madame désolée. En passant je m'appelle Vanille. Bref... Je voulais que vous, vous me disiez ce que vous savez. Peut-être pourrais je vous aider, qui sait?
Les yeux de la femme s'illuminèrent et elle pria Vanille et son tigre de la suivre. Elle les mena chez elle, une coquette maison blanche et les fit assoir dans le salon. Elle leur apporta de l'eau (verre pour la sirène, gamelle pour Kesmos) avec du sirop et un gâteau au chocolat fort appétissant. Ils mangèrent tous tandis que Madame Kure contait les événements.
-Chère Vanille... Si vous pourriez m'aidez je vous en serai très reconnaissante. Voyez vous, mon mari est commerçant. Il voyage donc beaucoup. Il se rendait beaucoup à Medigo, vous savez la ville non loin d'ici, réputé dangereuse... Je m'inquiète beaucoup. Cela fait longtemps qu'il est parti et je suis sans nouvelle de lui. Si vous … Enfin... Si cela ne vous gène pas d'aller à Medigo... je...
-Ne vous en faites pas Madame Kure. J'irai à Medigo. Mais avant, j'ai quelques questions à vous poser pour éclaircir quelques points. Votre mari allait-il assez régulièrement à Medigo?
-Oui. De plus en plus fréquemment depuis quelques mois.
-Je suis navrée de vous poser ce genre de question.. Mais ne pensez-vous pas qu'il pourrait avoir une maitresse?
-Grand Dieu! Non! Mon mari est un homme honnête et fidèle. Il ne s'abaisserait jamais à de telles chose!
-Si vous le dites... (Vanille n'était pas franchement convaincu) Avez vous un portrait de lui à me montrer?
Madame Kura courut, fouilla dans ses affaires et revint avec un petit portrait de son mari.
-Il s'appelle Gaël, précisa-t-elle.
La sirène hocha la tête puis reporta son attention sur le portrait. Monsieur Kure était un homme élégant et raffiné d'après le portrait. Des cheveux noir ébène, des yeux verts, il avait plutôt l'air fin, pas trop de muscles. Elle montra le portrait à Kesmos, puis ils partirent tout deux pour Medigo.
Comme d'habitude, Kesmos reprochait à Vanille sa spontanéité dans ses choix. Ils étaient parti trop vite, un peu à l'improviste pour retrouver un homme soit en danger, soit infidèle, mort peut-être? C'était risqué. Mais, comme d'habitude aussi, la sirène avait fait la sourde oreille au sermon du tigre.
Les rues étaient bondés de personnes en tout genre. Plus ou moins fréquentable. Enfin du point de vue de Vanille. Pour celui de Kesmos c'était plus rapide: pas fréquentable. Vanille allait vers quelques personnes et leur demandait avec un grand sourire charmeur et ravageur si ils avaient vu Monsieur Kure. La plupart ne connaissait pas ce nom. Pour être plus précis, une seule personne sur les centaines d'interrogés le connaissait. Il s'agissait d'un petit garçon dans les six ans, tout blond avec les yeux bleus.
-Moi j'ai vu Monsieur Kure. Gaël tu chercher, hein?
-Oui petit. Ou l'as tu vu?
-Pas petit! Heöl!
-Désolée. Donc je reprends, ou l'as tu vu, Heöl?
-Il vient souvent dans le quartier ou il y a le plus de maisons!
-Tu veux bien m'y conduire?
-Oui!
Le gamin partit en sautillant et ils traversèrent ainsi une bonne partie de la ville. Heöl jetait souvent des regards en coin au tigre, intrigué et terrifié à la fois. Il les mena jusqu'à une rue aux maisons étrangement construites.
-Voilà! C'est ici que je le vois souvent sortir d'une maison! Mais je sais plus laquelle..
-Ce n'est pas grave. Tu veux quelque chose? Pour te féliciter.
-Non merci.
Il détourna tout de même les yeux. Vanille comprit vite et lui demanda gentimment:
-Veux tu caresser Kesmos?
-Oui!
En voilà un enfant enthousiaste.. Après quelques minutes de jeu, Heöl partit en faisant un signe de la main à Vanille et au tigre, heureux. Bon. Maintenant les choses sérieuses. Vanille observa les maisons une à une. Malgré les dires de Madame Kure, Vanille privilégiait la piste d'une maitresse. Elle repéra une maison un peu plus efféminée que les autres. Elle commencerait par là. Il fallait bien débuter quelque part.
Avec Kesmos, elle alla frapper à la porte de la maison qu'elle avait choisie. Une belle jeune femme avec des cheveux très courts et noirs lui ouvrit. Elle était un peu distante.
-Oui? Vous voulez?
-Excusez moi de vous déranger ainsi... Mademoiselle...(pause pour voir si elle ne rectifiait pas...)
-Madame.
Bingo.
-Pardon, madame... Je cherche quelqu'un. Monsieur Kure.
-Oh. Vous voulez parler à mon mari? Je vais le chercher. Entrez.
Vanille cacha sa surprise. Elle était donc aussi une Madame Kure? La sirène tout comme Kesmos craignait le pire. Mais elles pouvaient avoir toutes les deux le même nom de famille. Ca arrivait. Mais avouons le, ce serait vraiment une ENORME coincidence. La seconde Madame Kure revint avec son mari.
Vanille et son tigre se regardèrent. Ils avaient comprit. Cet homme avait deux vies, avec deux femmes différentes et les alleternait. Mais il s'était surement lassé de la première madame Kure au caractère excessif et avait épousé aussi la seconde, plus jeune, plus calme.
-Bonjour Monsieur Kure. J'aimerai beaucoup vous parler. La tout de suite en privé.
Elle n'y allait pas par quatre chemins. Elle était quelque peu énervée... Monsieur Kure fut déconcerté... Il bégaya:
-Euh... Oui si vous le souhaitez tellement mademoiselle... Tally, tu ne devais pas aller au marché?
-Si. Je vais en profiter. A toute à l'heure.
Elle embrassa son mari et parti, légerement inquiète. Une fois seuls, Vanille continua:
-Je suis enchantée de faire votre connaissance Monsieur Kure. Je suis envoyé par Madame Kure. Pour vous retrouvez.
Le visage de Gaël se décomposa.
-Oh. Vous avez comprit vite. En même temps, ce n'était digne d'un génie. Que dois je donc dire à votre autre femme?
-Je... Ne dites rien... J'irai la revoir... Lui expliquer.
-Non Monsieur. Vous le faites maintenant. VOus partez sur le champ, ou je m'en charge.
Il réflechit quelques instants puis saisit un morceau de papier ou il écrit un mot à l'intention de Tally. Il comptait donc revenir auprès d'elle. Il allit abandonner la première. La pauvre. Etant accompagnée du gros tigre, Gaël ne protesta pas les demandes de Vanille et il rentrerent immédiatement voir la première Madame Kure. Ce fut violent, émouvant, cruel. Mais monsieur Kure repartit pour vivre avec Tally laissant Madame Kure redevenu Mademoisele Kerilo seule avec ses larmes. Vanille le foudroya du regard. Il n'avait donné qu'une raison: "Tu n'était plus interessante." Cet homme allait surement recommencer cette grotesque mascarade quand il le lasserait de Tally. C'était ecoeurant.
