Et un sourire plus que satisfait grimpa à mes lèvres comme une victoire méritée où les mots avaient été plus puissants que ces immenses et odieux pylônes dressés contre nous. Je sentis avec plaisir les peurs d’Amiel qui, à côté d’Edwina, voyait son beau tableau prendre des couleurs bien plus maussades qu’angéliques. J’étais satisfait du choix de cette jeune femme, peu importe ces choix premiers, elle avait su prendre le bon au moment le plus opportun. Elle nous avait même permis d’atteindre le camp de l’intérieur et de pouvoir le blesser en plein coeur.

J’avançai mes pions avec prudence depuis plusieurs heures à présent mais sans l’avouer, de peur que l’on comprenne quel jeu dangereux je menais. Mon plan arrivait à terme alors qu’Amiel au sommet de son échec fini sous un tas de neige qui devait lui glacer le sang jusqu’à la rétine.

« Echec, Amiel. » J’acquiesçai d’un signe de la tête en fixant Edwina, lui confirmant qu’elle avait, à cet instant, agis pour le mieux et que je l’en remerciais. Amiel, fier comme un coq n’allait pas se laisser abattre comme cela mais ça aussi je pouvais le prévoir. Alors que pylône tanguait doucement, je reprenais place au cœur du corps de Lastraé par lequel j’avais jeté ma projection derrière le mur où se barricadait il y avait cinq minutes encore Amiel et Edwina. Regardant la scène, j’étais fier des mes compagnons éphémère qui avait su prendre parti de la situation, nous avions conquis notre territoire et ce malgré l’opposition de taille. Tel un général d’armée, je croisais les bras, mon sourire grandissant, je voyais le règne du pylône prendre fin sous mes yeux et par la même occasion, le règne de Delix. Les anges de glace étaient toujours piégés dans mon cône de glace et tandis que j’avais bouclé tous les pions adverses, le roi prenait la fuite en fuyant le champ de bataille. Le fou que j’étais laisserait-il cela se passer ? J’oubliais que j’étais devenu la reine avec ces changements de corps, il fallait donc que Lastraé en bon fou pense comme moi et agisse comme j’aurais agis. Voyant la sirène se mettre en position, fixant Amiel qui s’envolait tel un prédateur prêt à sauter sur sa proie, je soufflai alors…

« Echec et mat, Amiel. » Et le fou noir qu’étai Lastraé s’abattit sans prévenir sur le roi blanc qu’était Amiel d’un coup mémorable dont je me souviendrais longtemps. Lastraé avait su comprendre l’essence même de mon pouvoir. Oui j’étais fier et assez stupéfait par la prestation sans défaut de la sirène squatteuse de mon corps. Elle avait allié la force à l’esprit, la magie à la psychologie et le mirage à la douleur des roses. Elle avait compris que pris séparément, mes pouvoirs n’étaient rien de bien fameux mais que pris ensemble, ils pouvaient mettre à genou des colosses indomptables et ce, sans lever le petit doigt. Elle commit alors le meurtre, peut-être le premier de sa vie, qu’en savais-je. Elle était presque belle dans ce corps masculin, au-delà de ces principes, elle avait su se porter au-delà des cultes de sa race pour lutter contre Delix et son autorité illégitime. Oui, j’étais fier de Lastraé bien qu’elle avait honte de ce qu’elle avait à Amiel. J’avais joué mon rôle dans cet épisode et toute mon énergie avait été drainée par le pylône alors même que je reprenais mon propre corps, mes pouvoirs et mes fardeaux. Je pu presque toucher l’âme de Lastraé lors du nouvel échange, sentant un instant la chaleur de son cœur frôler la froid du mien. Je sentis le paradoxe que nous représentions tous deux, elle et moi et trouvai intéressant que durant une bataille au moins, nous avions pu connaitre l’inverse de nos vies respectives.

Reprenant conscience dans mon corps, je peinais vraiment à me relever. Je pris toutefois la peine de me forcer pour ne pas me faire écraser par le pylône en chute libre. Je regardai brièvement Lastraé que Seth aidait et pour qui donc je ne me faisais plus de soucis. Un envoyé de l’au-delà, aider à la survie d’un être. N’était-ce pas là la particularité intéressante de nos mœurs, si nous respirions le mal, au moins nous n’étions pas prévisibles et non étions capable d’autant de beauté que d’horreurs, pour nous rien n’était acquit et c’était là oui, notre gloire à être certes maléfiques.

Et alors que j’étais vidé de toutes mes forces, j’avais pourtant survécu, ma magie n’était plus qu’un souvenir pour le moment mais j’avais encore la foi envers la mort à venir de Delix. J’avais toujours « dévore-rêve » mon épée et bien que ne serai sûrement plus utile à grand-chose, j’irai jusqu’au bout, jusqu’à ce que je puisse contempler le corps du compteur à terre, sans vie, son règne en cendre. J’aiderais ceux qui ont encore un peu de force et les protégeraient d’attaques diverses le temps que ces derniers assassinent l’archange. Alors le monument religieux semblait être la suite de notre périple ? Alors qu’il en soit ainsi, amen.