Quelle indignité !

Buddy Holly - Everyday

« Allons, allons. » Joline tapotait l'épaule de Philomena qui sanglotait contre elle. « Il faut te calmer, la course ne va pas tarder à commencer. On doit aller retrouver les autres. » Cela faisait déjà plusieurs minutes qu'elle tentait de raisonner l'Eversha qui avait fondu en larmes en revenant vers son équipe. Joline avait pris les choses en main. Elle l'avait entraînée à l'écart et Philomena lui avait rapporté l'objet de ses tourments. La fille sortit un mouchoir de sa poche et l'offrit à l'éplorée qui le prit et se moucha dedans. « Je ne peux pas. J'ai trop honte. Je veux rentrer à Basphel. Non, je veux rentrer chez papa et maman. Il va forcément le répéter à tout le monde, c'est un Sorcier. Tout le monde va dire que je ne suis qu'un sale chien qui pue et qui bave. » Elle renifla en sentant les larmes se réagglutiner sous ses paupières. Joline inspira, ferma les yeux un instant. Quand elle les rouvrit, elle envoya sa main claquer la joue de la brune. Sous le choc, Philomena s'arrêta instantanément de pleurer sur un dernier hoquet. « Tu ne vas quand même pas abandonner pour un Sorcier, justement ? » « Ce n'est pas ça, c'est - » « Tais-toi. Je n'ai pas fini. Où est passé ton sens de la compétition ? Tu es Puff-Puff Gueurl, non ? Alors ressaisis-toi et concentre-toi sur la course. En plus, on a le thème de la guerre, tu ne vas quand même pas arriver avec ces grosses larmes de crocodile sur le champ de bataille ? » « Mais... » « Si Léonidas le répète, tu n'auras qu'à nier, voilà tout. Ou lui mordre les fesses. » Elle gloussa, visualisant probablement la scène. « Ce n'est pas drôle. » « Oh si, un peu quand même. Allez, fais-moi un sourire et allons rejoindre les autres. Tu veux que je te refasse ta tresse avant ? »

Quelques minutes plus tard, les yeux gonflés mais les joues sèches et les épaules redressées, Philomena rejoignit l'embarcation alors que l'équipe commençait à y grimper. Elle adressa un sourire reconnaissant à Joline et alla aussi sur l'ublys. Elle trouva une place libre à côté de Blu, qu'elle aimait bien du peu qu'elle avait vu. Motivée par les plus enthousiastes, le bateau quitta le ponton où il était amarré et sa petite voile se tendit pour donner une petite impulsion supplémentaire. « C'est toi qui en a eu l'idée, non ? C'était intelligent, tu t'y connais bien en bateau ? Papa et maman m'ont promis que nous ferions un voyage en bateau en famille, quand il n'y aura plus les monstres et la sauge, car là c'est trop dangereux. » Tout en bavardant avec sa binôme de banc, Philomena poussait sur ses bras pour ramer. Quand elle se rendit compte qu'elle recommençait à haleter, la langue dehors, elle sursauta et la ramena à l'intérieur de sa bouche. Elle toussa, gênée, espérant que Blu n'avait rien remarqué.

Son attention se focalisa sur les binômes assis devant elles. Ils avaient cessé de ramer, le garçon murmurant à l'oreille de la fille. Celle-ci se mit à rire quand il ramena ensuite une mèche de ses cheveux derrière ses oreilles. « Tu me chatouilles ! » « Ce n'est pas chatouiller, ça. » objecta le garçon avant d'attaquer les flancs de la fille qui se tortilla aussitôt et leva les bras pour le repousser sans y mettre trop d'efforts, estima la Hanove. Il franchit d'ailleurs facilement sa défense, écarta ses bras et s'avança pour poser ses lèvres sur les siennes. Ses mains sur sa taille la rapprochèrent de lui et descendirent dangereusement vers la chute de ses reins. Médusée, Philomena n'osait même plus ciller, comme si elle avait peur d'être prise en flagrant délit de voyeurisme. Elle rougit jusqu'à la racine de ses cheveux et échangea un regard choqué avec Blu. « Hé ! Ça rame devant ? On se fait devancer ! » râla Joline dans leur dos. « Philo, Blu, faites quelque chose, bon sang ! »

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Quelle indignité !

Poppy - Girls In Bikinis

Philomena salua l'intervention de Blu par de vigoureux hochements de tête approbateurs. On n'avait pas idée de s'exhiber de la sorte, c'était scandaleux, et irrespectueux pour tout le monde. Sa mère lui avait bien dit qu'elle avait le droit à avoir des petits copains pendant sa scolarité, tant qu'elle n'était pas fiancée. Dans tous les cas, elle devrait s'en tenir à des effleurements de mains, pas davantage. Elle l'avait prévenue qu'elle pourrait avoir envie de plus, que les garçons se montraient parfois très persuasifs, mais qu'il ne fallait jamais céder, pour ne pas jeter l'opprobre sur sa réputation. « Après, personne ne voudra de toi, ma Pralinette. On dira que tu es une fille facile. » lui avait-elle dit, ce qui avait généré des cauchemars sans fin à la brune.

Non contents de les gêner, le couple eut l'audace de s'irriter de la remontrance de Blu, comble de l'outrecuidance. Outrée, l'Eversha serra les mains sur sa pale en bois. « Vous devriez avoir honte. Il y a des enfants qui assistent à cette compétition, c'est l'exemple que vous souhaitez leur donner ? Et comme le dit Blu, ce n'est pas non plus le moment. On a besoin des efforts de toute l'équipe si on veut gagner, figurez-vous. » « Ouais, ouais, on a compris. » Le garçon leva les yeux au ciel et échangea un regard avec la fille qui se mit à glousser.

La mine revêche, Philomena se remit à ramer, son attention rivée sur le dos des deux gêneurs. « C'est quand même fou. » grinça-t-elle à voix basse, pour sa coéquipière. « Jamais je n'oserais faire ça devant tout le monde, encore moins quand d'autres personnes comptent sur nous. Certains n'ont vraiment reçu aucune éducation. Si on perd, ils vont entendre parler de moi. Ma maman dit que c'est de pire en pire la jeunesse, et je commence à penser qu'elle a raison. Pas plus tard que tout à l'heure, j'ai croisé Léonidas, tu sais, celui qui est fiancé à Muscarine ? Il m'a dit qu'il essayait de fuir une Magicienne qui lui avait mis le grappin dessus. Certaines sont vraiment désespérées, surtout quand elles ne sont pas encore fiancées. Tu en connais, toi ? »

Un mouvement devant elles interrompit leurs bavardages. Philomena braqua deux yeux fulminants sur le couple dont les lèvres s'étaient soudées entre elles. Ils étaient si collés que la brune ne sut même plus discerner à qui appartenait quelles mains. « Mais ! » Elle inspira profondément, envahie par la rage. La désobéissance devait toujours être punie. S'apprêtant à hausser le ton, elle ouvrit la bouche et aboya sèchement. Elle-même sursauta sur son banc à ce son, incongru entre ses lèvres. Elle blêmit et se mit à regarder ailleurs, comme si elle se demandait d'où provenait l'aboiement. « C'était quoi, ça ? » s'inquiéta la fille qui s'était détachée de son amoureux avec un bruit de succion.

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