Aäron resta immobile lorsqu’une membre de l’AAAP lui attacha les poignets entre eux, derrière son dos. C’était étrangement plaisant. Ça lui faisait un effet compliqué à décrire. Les mains liées, il n’avait plus à réfléchir à ce qu’il convenait de faire avec. Il devenait majoritairement impuissant, incapable. Il ne pouvait plus chercher sa sœur et ce n’était pas de son fait. Il n’aurait pas pu participer aux jeux de son père. Il aurait perdu à cause d’autre chose que de lui-même. Il avait une raison d’être malheureux ou, plutôt, une excuse. « L’autre aussi aura les poignets attachés ? » demanda-t-il. « Non, c’est seulement l’un des deux. » « Ah. D’accord alors… » Il pensa qu’il espérait ne pas se faire frapper en y mettant très peu du sien. En réalité, il se disait plutôt qu’il aimerait bien qu’on le tapât, juste pour éprouver une autre forme de douleur. Il soupira et pensa à ce que lui avait dit Alcide. Le blond s’entendait bien avec son père et semblait être entouré à en étouffer. Il connaissait plein de choses. En l’écoutant parler, il avait pris un peu plus conscience du fait qu’il ne connaissait rien à rien. Adam Pendragon, Laëth… tous ces gens lui étaient parfaitement inconnus. Il en avait voulu à son père pour ça mais n’était même pas sûr que ce fût de sa faute. Il aurait pu apprendre seul, être curieux.
Il entra dans la salle de fortune qui était destinée à son troisième et dernier rendez-vous avec une forme de vague à l’âme. Il avait envie de se rouler en boule et de ne plus bouger. Il voulait écouter Chaos et Mélancolie et oublier. La vie lui demandait vraiment trop d’efforts parfois. Quand il voyait Alcide qui n’avait besoin de rien faire pour être heureux, il ne pouvait pas s’empêcher de le haïr. Le bonheur collait à la peau du blond comme la dépression collait à la sienne. Il aurait aimé qu’on le lâchât dans le vide, juste pour ressentir le frisson de la mort. Peut-être qu’ensuite, il aurait chéri la vie.
Lorsqu’il vit une jeune fille entrer, il la regarda longuement. Il se dit qu’il avait probablement déjà dû la voir de loin. Elle lui disait vaguement quelque chose. « Salut… » lui dit-il, un peu amorphe. « J’ai une requête un peu étrange… » Il se trouvait également bizarre. « Est-ce que tu pourrais me donner une claque ? » Il laissa une seconde filer, avant d’ajouter. « S’il te plaît. »
419 mots
Lana Kælaria ~ Sirène ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 262 ◈ YinYanisé(e) le : 20/01/2021◈ Activité : En études
Pour la première fois, lorsque Kiara entra dans l’isoloir, elle n’espéra pas trouver Adriæn. Après sa discussion avec Ikar, elle aurait été beaucoup trop gênée. Fort heureusement pour elle, elle se retrouva face à un garçon qu’elle ne connaissait pas. À la vue de son allure et de son physique, elle supposa qu’il s’agissait d’un Alfar. Des oreilles pointues, et d’humeur sans doute trop sombre pour être un Ygdraë. Elle essaya d’écouter ce que lui disait son intuition rehla mais, comme face à Zeryel, elle avait du mal à la faire sienne. Son regard descendit sur ses épaules, tenues en arrière. Ses mains étaient attachées dans son dos. Le membre de l’AAAP qui l’avait conduite jusqu’ici n’avait pas menti : ce rendez-vous, dans la lignée du précédent, se révélait particulier. Il lui rappela immédiatement ce rêve qu’elle avait fait, de longs mois auparavant maintenant. Lana et Adriæn les avaient attachés ainsi, Læn et elle. Ce songe ou des dérivés avaient souvent ponctué ses nuits, par la suite. Elle avait rêvé plusieurs fois des doigts du Kælaria venant nouer des rubans et des cordes autour de son corps, avant de le parcourir jusqu’à le posséder parfaitement. Elle avait aussi rêvé de l’inverse, de l’attacher et de le conduire elle-même à la jouissance. Le goût des chocolats oniriques lui revenait parfois, et avec eux, la saveur de ses lèvres. L’Ondine déglutit, comme pour ravaler les ressentis qui venaient la harceler. « Salut. » répondit-elle. Elle s’avança, puis tira la chaise qui lui était destinée et s’assit. Ses iris dorés voltigèrent jusqu’au brun. « Comment ? » Elle avait parfaitement entendu. « Je… hum. » Elle plissa les yeux, les sourcils froncés et les lèvres scellées dans un pli suspicieux. « Tout va bien ? » Elle regarda ses joues, puis revint s’ancrer dans ses pupilles. Se sentait-il mal, comme elle un peu plus tôt ? Le monde semblait-il tourner autour de lui ? Des étoiles scintillaient-elles devant ses prunelles ? Tout lui paraissait-il trouble ? Elle réétudia son visage. Son teint était blême, cireux. Il avait même le regard légèrement vitreux. Comme si son corps résidait ici sans son esprit. La Rehla finit par acquiescer. « Très bien. » Doucement, elle se leva pour aller se poster devant lui. Elle le gifla, pas trop fort. « Ça va mieux ? » Ses iris le scrutèrent. « Je peux appeler quelqu’un d’autre, sinon… »
Message I – 401 mots
Aäron Taiji ~ Alfar ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 69 ◈ YinYanisé(e) le : 22/08/2022
« Je crois, oui… » En fait, il n’allait pas très bien mais ce n’était pas très grave. Son esprit était focalisé sur autre chose, sur cette volonté qu’elle le frappât. Les liens qui maintenaient ses mains lui faisaient du bien. Il aurait aimé être enfermé quelque part, dans un cercueil peut-être. Son père lui avait fait un jeu dans ce style quand il était plus petit. Un mécanisme ingénieux permettait de s’extraire de la boite géante mais il n’avait pas réussi à résoudre l’énigme qui y était liée. Il s’était débattu, avait crié, tambouriné contre la paroi et pleuré. Finalement, il s’était évanoui et, lorsqu’il avait repris connaissance, il était au chaud, dans la demeure principale. Aujourd’hui, si on l’enfermait dans un cercueil, il y resterait peut-être sans rien faire. Il attendrait que le temps passât, bercé par un calme qui lui ferait sans doute du bien.
Lorsque la main de la jeune fille s’abattit sur lui, il en ressentit un étrange frisson. Ce n’était néanmoins pas assez fort. Il aurait voulu avoir mal. Il leva les yeux vers elle et les plongea dans ses iris. En la détaillant, il eut l’impression que de la magie pulsait autour d’elle. Son regard semblait plus intelligent que le sien. Elle était plus belle que lui et sa peau était aussi plus chaude et colorée. Il eut honte d'être nul ; de ne pas être assez bien. « Non. Je préfère rester avec toi. » Si elle appelait quelqu’un, il y avait de fortes chances pour qu’une personne comme Alcide accourût. Il n’avait pas envie de voir l’inquiétude sur le visage d’un individu qui avait déjà tout et qui ne pourrait faire que ressentir de la pitié pour lui. Il voulait rester avec elle parce qu’il lui semblait qu’à la surface de sa peau, il y avait un soupçon de mélancolie aussi. C’était plus une impression, quelque chose qu’il n’arrivait pas à saisir. « J’aimerais que tu me frappes plus fort. » articula-t-il, avant de lui lancer un sourire effacé. « Tu n’as qu’à imaginer que je suis quelqu’un que tu n’aimes pas. » Il avait envie qu’elle lui fît mal pour qu’il pût pleurer un coup. Il voulait avoir une raison valable de pleurer et pas simplement larmoyer pour un vague à l’âme qui n’avait rien de palpable. Il se détestait de se sentir vide. Il se détestait de s’en foutre de tout. Plus il plongeait dans la nonchalance et plus il était malheureux. Il ne savait pourtant pas faire autrement parce qu’il avait conscience, au fond, d’avoir déjà perdu d’avance. À quoi bon se battre, dans ce cas ? Comme son lui enfant qui s’était retrouvé coincé dans le cercueil, il avait l’impression d’être coincé dans sa vie. Il n’avancerait pas tant qu’il n’aurait pas trouvé sa jumelle. Néanmoins, il n’était même pas sûr qu’elle existât.
464 mots
Lana Kælaria ~ Sirène ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 262 ◈ YinYanisé(e) le : 20/01/2021◈ Activité : En études
Les yeux de Kiara allèrent de l’un à l’autre des iris du garçon. Au moins, il parlait. Tant qu’il parlait, le risque qu’il s’évanouît demeurait faible, bien que sa langue fourchât sur des pensées incohérentes. « Plus fort ? » Elle scruta son sourire. Son éclat terne lui fit penser à la faiblesse d’un pouls en fin de vie. Il y avait quelque chose, chez ce garçon, un éclat sombre et pénétrant, serti de détresse et de désespoir, qui appelait des ténèbres. « Quelqu’un que je n’aime pas… » répéta-t-elle, en réfléchissant. Au pensionnat, où elle avait vécu de nombreuses années avec Lana, elle avait détesté plusieurs filles. Au début, elle n’avait pas porté la Kælaria dans son cœur. Par certains aspects, elle était effrayante ; c’était de cette façon qu’elle imposait sa tyrannie aux autres, à coup de menaces ou de silences pis encore. Mais il y en avait bien eu une pire que les autres. Cette fille, qu’elle avait exécrée parce que, quand elles étaient petites, elle lui volait ses affaires et passait son temps à lui tirer les cheveux ; puis, une fois adolescentes, elle ne cessait de la railler et de moquer son physique – ces cheveux trop blancs et cette peau trop sombre, ce nez qu’elle disait ressembler à celui d’une centrine commune, et tous ces éléments qu’elle se plaisait à critiquer. À l’époque, la Rehla était démunie face à ses attaques – et c’était souvent Lana qui ripostait pour elle. Le temps passant, elle s’était plusieurs fois demandé comment elle aurait réagi, si elle l’avait revue. Peut-être qu’elle l’aurait giflée. Peut-être qu’elle aurait attrapé sa tête et l’aurait fracassée contre le sol. Peut-être qu’elle se serait contentée d’une remarque cinglante. Peut-être qu’elle aurait juste passé son chemin. « Je ne suis pas sûre que te frapper soit la solution. » dit-elle. « Je veux bien essayer, mais après, on arrête. » S’il ne se sentait pas mieux, elle appellerait une infirmière. Levant la main, Kiara se concentra sur la pensionnaire tortionnaire, puis l’abattit avec autant de force qu’elle le pouvait sur le visage du brun. Le choc claqua, avant de répandre dans l’air un silence sec. Une pointe de culpabilité fondit sur la fausse Sirène. Lana aurait adoré cette situation. Susannah aussi, probablement. Mais elle… Elle, elle était différente. Elle était différente et elle ne comprenait pas tout de cette différence. Des aspects lui échappaient ; parfois, elle avait même l’impression de s’échapper toute entière. « Pardon. » Un souffle haché heurta ses lèvres. Elle s’accroupit et posa ses mains sur les genoux de l’adolescent. Sa magie s’était défaite des carcans qui la retenaient. Elle se répandait sur eux et autour d’eux sans que Kiara n’en eût conscience. Touchée par sa propre noirceur, elle fut happée par un sentiment d’impuissance. Des larmes roulèrent sur ses joues. Elle posa son front sur ses mains. Être comme tout le monde était un rêve aussi inutile que douloureux ; elle était condamnée à souffrir de sa propre existence, et jamais elle ne pourrait y changer quoi que ce fût. C’était le Destin.
Fin
Message II – 513 mots
Vous reprendriez bien un petit coup de Spleen ? <3
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Pour la première fois, lorsque Kiara entra dans l’isoloir, elle n’espéra pas trouver Adriæn. Après sa discussion avec Ikar, elle aurait été beaucoup trop gênée. Fort heureusement pour elle, elle se retrouva face à un garçon qu’elle ne connaissait pas. À la vue de son allure et de son physique, elle supposa qu’il s’agissait d’un Alfar. Des oreilles pointues, et d’humeur sans doute trop sombre pour être un Ygdraë. Elle essaya d’écouter ce que lui disait son intuition rehla mais, comme face à Zeryel, elle avait du mal à la faire sienne. Son regard descendit sur ses épaules, tenues en arrière. Ses mains étaient attachées dans son dos. Le membre de l’AAAP qui l’avait conduite jusqu’ici n’avait pas menti : ce rendez-vous, dans la lignée du précédent, se révélait particulier. Il lui rappela immédiatement ce rêve qu’elle avait fait, de longs mois auparavant maintenant. Lana et Adriæn les avaient attachés ainsi, Læn et elle. Ce songe ou des dérivés avaient souvent ponctué ses nuits, par la suite. Elle avait rêvé plusieurs fois des doigts du Kælaria venant nouer des rubans et des cordes autour de son corps, avant de le parcourir jusqu’à le posséder parfaitement. Elle avait aussi rêvé de l’inverse, de l’attacher et de le conduire elle-même à la jouissance. Le goût des chocolats oniriques lui revenait parfois, et avec eux, la saveur de ses lèvres. L’Ondine déglutit, comme pour ravaler les ressentis qui venaient la harceler. « Salut. » répondit-elle. Elle s’avança, puis tira la chaise qui lui était destinée et s’assit. Ses iris dorés voltigèrent jusqu’au brun. « Comment ? » Elle avait parfaitement entendu. « Je… hum. » Elle plissa les yeux, les sourcils froncés et les lèvres scellées dans un pli suspicieux. « Tout va bien ? » Elle regarda ses joues, puis revint s’ancrer dans ses pupilles. Se sentait-il mal, comme elle un peu plus tôt ? Le monde semblait-il tourner autour de lui ? Des étoiles scintillaient-elles devant ses prunelles ? Tout lui paraissait-il trouble ? Elle réétudia son visage. Son teint était blême, cireux. Il avait même le regard légèrement vitreux. Comme si son corps résidait ici sans son esprit. La Rehla finit par acquiescer. « Très bien. » Doucement, elle se leva pour aller se poster devant lui. Elle le gifla, pas trop fort. « Ça va mieux ? » Ses iris le scrutèrent. « Je peux appeler quelqu’un d’autre, sinon… »
