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 [Q] Le plus Grand voyage de tous les voyages | Solo

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Min Shào
~ Orine ~ Niveau II ~

~ Orine ~ Niveau II ~
◈ Parchemins usagés : 291
◈ YinYanisé(e) le : 25/03/2022
◈ Âme(s) Soeur(s) : Elle m'attend quelque part.
Min Shào
Dim 27 Mar 2022, 10:12


Image par Mike Deng
Le plus Grand voyage de tous les voyages
Suite de la fiche de Min.


Objectif : Voyager sans moyen de transport magique d'Onikareni à Maëlith en suivant son groupe d'expédition.

« Pose les ustensiles avec plus délicatesse »,  enjoignit Mei à son neveu Min. Il se reconcentra et poursuivit la cérémonie du thé. C’était normalement au plus jeune membre de la famille de le verser, mais en cas de départ, c’était à la personne quittant le foyer de le faire. Un ultime test de sa tante dont il se serait bien passé. « Il reste un peu d’eau en-dessous de la tasse. » Min reprit son fukusa tellement doucement qu’il avait l’impression d’en faire une caricature. Il essuya la goutte qu’il avait manquée puis le replia et le posa délicatement à quelques centimètres des autres outils, à distance parfaitement égale. Déterminé à ne plus entendre les remontrances de l’Orine, Min se concentra autant qu’il pût pour poursuivre correctement la cérémonie. Sans un mot, la tablée l’observa tout au long du processus.

Une fois le thé servi, sa cousine Xue, âgée de 9 ans, ne put se retenir plus longtemps. « Min, est-ce vrai que tu verras les Réprouvés ? Et l’océan ? Et les pierres précieuses de Maëlith ? » Elle tentait d’être la plus calme possible, mais son ton trahissait une grande excitation. « Enfin, Xue, laisse-le prendre une première gorgée ! » S’écria son frère Tao, un sourire en coin. La famille commença à discuter en terminant son thé, d’abord calmement, puis avec plus d’émotion. Le départ de Min pour un autre continent était sur toutes les lèvres dans le village si paisible qu’était Takao, à quelques kilomètres d’Onikareni. C’était un lieu où peu de choses méritaient d'entrer dans les livres d’histoires. Mais c’était bien cela que Min aimait dans son village de naissance. Il y régnait une tranquillité ancestrale, avec ses champs à perte de vue et ses maisons au creux des montagnes.

Officiellement, Min partait à Maëlith chez sa tante Ting pour libérer une place dans le foyer Shào, à cause de la naissance imminente d’une Orine. Mais il se doutait que cette raison en cachait une autre. Sa tante Mei n’était pas aussi stoïque qu’elle ne le pensait. Min savait repérer ses tressaillements qui trahissaient ses sentiments. Sa tante tenait encore la tasse vide et suivait des yeux les conversations, avec une tension dans ses muscles qui dévoilait une certaine anxiété. Min en fût touché, car cela lui rappela qu’elle l’aimait réellement malgré ses rares démonstrations d’affection. « Bien ! Il ne faudrait pas que je m’attarde, même si je pourrais rester ainsi ici à vous parler éternellement », coupa soudainement Min. « Ah, non, il ne le faudrait pas », s’exclama Zhang presque malgré elle. L’aînée du foyer était certainement celle qui s’agaçait le plus de l’énergie dont Min débordait. La grand-mère était l'image même de la tranquillité du village ; elle était tellement lente qu'elle pourrait s'incruster dans la pierre de la montagne. Une image qui lui arracha un sourire intérieur. « Merci de ton honnêteté, wài pó*…! Mais avant que je parte, Mei m’a indiquée que vous aviez des présents à me transmettre pour nos proches à Maëlith. C’est le moment ou jamais de le faire », dit-il en se levant.

Il aurait dû attendre que sa tante Mei initie cette remise de présents, mais il était à bout de patience. Tant d’aventures l’attendaient ! Chaque moment qui retardait son départ était une inquiétude : il avait une peur irrationnelle que la délégation décide de partir en avance sans lui. *Et s’ils faisaient cela, je monterais sur le premier cheval que je trouverais et braverais les flancs de montagne au galop pour les rattraper tel un guerrier !* pensa-t-il alors. Il s’imaginait empoigner la crinière d’un cheval en plein galop et monter dessus en faisant une pirouette, les cheveux dans le vent. « …et celui-là à Chang-Min, mais pas avant le festival des lanternes ! » lui dit la petite Xue en lui tendant des origami de grenouilles. Il avait machinalement empoigné les cadeaux pour les enfouir dans son sac en souriant, mais, distrait, il avait déjà oublié les noms de tous les destinataires. « Envoyez-moi des lettres quand je serai arrivé ! Je ne saurai me souvenir de tout après un si long voyage », admit-il en fermant son sac avec difficulté. « C’est déjà prévu, mon cher neveu », répondit Mei avec un sourire entendu.

Zhang se leva à son tour et tous les autres membres de la famille l'imitèrent. Sa tante Mei alla faire coulisser la porte du salon et traversa le jardin, en ajustant les pierres et les décorations qui avaient bougé durant la nuit. « Xue, Tao, accompagnez votre cousin, voulez-vous ? » Leur inquit Mei quand la famille sortit du jardin. « Oui, Māma ! » S’exclama-t-elle. Tao montra moins d’enthousiasme à la tâche, mais il proposa de porter son sac jusqu'au village. Il était comme sa tante : il était avare de mots, mais montrait son affection par les gestes. Min se courba cérémonieusement avant de tourner les talons et de partir vers Onikareni aux côtés de ses deux compagnons. Xue courut pour les rattraper et agrippa la main de Min, en faisant signe à sa mère de l’autre main. Min et Mei n’eurent aucun mot d’au revoir, et c’était bien mieux comme cela. De toute façon, Min avait déjà l’esprit à mille lieues de Takao. Sur le chemin, il parla avec Xue de tout ce qu’il allait découvrir. Il avait déjà voyagé, mais jamais aussi loin et aussi longtemps. Il n’avait jamais pris le bateau. Les pirates, les chants de marin, les sirènes… c’était certainement la partie du voyage qu’il avait le plus hâte de découvrir. « Si je vois une sirène, Xue, je ne me ferai pas happer par son charme car j’ai déjà rencontré la plus belle femme de l’univers », dit-il à Xue sur un ton de confidence. « Oh, c’est vrai ? C’est vrai ? » Elle se tourna vers Tao comme pour chercher une confirmation, mais l’Orine ne les écoutait qu’à moitié. « C’est qui ? Oh, dis-le moi, Min ! » Ce dernier sourit et s’arrêta brièvement pour marquer son effet dramatique. « Tu la connais, petite Xue. C’est toi ! » Les deux Orines rirent en recommençant à marcher. « Je vais naviguer sur les océans, et peut-être même que j'apprendrai à hisser des voiles et à manier la barre. Tu m'imagines, moi, avec un chapeau de capitaine ? » « Tu serais le plus fort des capitaines, redouté de tous les pirates des mers ! »

Xue lui tendit les bras et il la fit monter sur ses épaules en imitant un galop de cheval. « Plus vite, destrier, plus vite ! » Scandait-elle en lui assénant de légers coups de talons. Il tenta d’accélérer, mais faillit glisser sur des cailloux. Tao le rattrapa et lui arracha Xue pour la faire redescendre aussitôt, une fureur dans le regard. Min s’excusa et l’ambiance fut plus calme sur le reste du chemin.  Il était ponctué par les bons vœux de ses voisins, qui attendaient de le voir passer pour lui apporter des présents lui portant chance. Arrivé à Onikareni, il en avait tellement qu’il fut contraint de les fourrer dans toutes les poches qu’il pouvait trouver. Ses adieux avec Tao furent brefs, mais son cousin dût emmener de force Xue qui se refusait à le quitter en sanglotant. « Sèche donc des larmes, Xue. Je ne veux pas que mon souvenir de la plus belle fille sur terre soit ce visage triste », avait-il dit en essuyant ses joues avec ses manches. Cela l’avait calmée pour un moment, mais dès qu’il lui tourna le dos, cela recommença, et il s'éloigna sous les pleurs de la petite fille. Ses compagnons de voyage rigolèrent en regardant la scène. « C'est à croire que tu pars en guerre, Min-ah ! Si tu reviens vivant, tu auras une femme qui t'attend. » Leurs rires chassèrent sa pointe de tristesse.

En entamant sa route sur les flancs de montagnes avec la délégation, l'Orine avait une fière allure : ses colliers de fleurs dansaient sur son torse, ses autres cadeaux frottaient contre le tissu dans ses poches et ceux dans son sac s’entrechoquaient. Mais l’Orine n’en était nullement gêné, contrairement aux promeneurs autour de lui : tel était son doux fardeau en tant que membre de la famille Shào. Il se sentait investi d’une mission plus grande que lui, tel un messager bravant les éléments pour faire parvenir une missive de la plus haute importance. *Je me demande si c’est une bonne situation, ça, messager. Pouvoir voyager et rencontrer toutes sortes de personnes, faire partie de leur histoire… mais je ne pourrais pas le faire, moi. J’aurais trop envie de découvrir les secrets de leurs messages…* Perdu dans ses pensées, Min ne remarqua même pas que, déjà, les cimes des maisons d’Onikareni avaient disparu derrière la brume du matin. Ainsi commençait le plus grand voyage de sa vie.

Wài pó : grand-mère

Mots: 1472


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Min Shào
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Min Shào
Mar 29 Mar 2022, 19:34


Image par Wang Jie


Carnet de bord | Jour 1.

Tante Ting m’a enjoint de tenir un carnet de bord au fil de mon voyage, alors c’est ainsi que je vais procéder. Nous sommes partis d’Onikareni peu après l’aube. La famille Shào m’a confié de nombreux cadeaux à transmettre à destination [note: redemander les destinataires à tante Mei] et je compte mener ma mission à bien, même si j’ai eu quelques inconvenues !
Nous sommes arrivés en bas des montagnes, et ce n’était pas chose facile. La neige a fondu, mais les rocailles restaient glissantes par endroits. Heureusement, notre guide attitré Yuan a sécurisé tout le chemin pour nous et il est remonté vers le village une fois que nous sommes arrivés au croisement du Berceau. Un vrai sportif ! Nous avons ensuite marché au milieu des rizières. Evidemment, il a fallu que je glisse sur l’herbe et je me suis étalé la tête la première dans la boue ! Cela a eu le mérite d’animer le groupe d’expédition. Heureusement que Wao maîtrise l’élément de l’eau ; je suis reparti aussi sec que si rien ne m’était arrivé. La boue sur mon sac est le seul témoin de l’incident. [note : laver le sac en arrivant à Maëlith.]

Le reste de la journée s’est déroulé sans incident. J’ai déjà mangé toutes les réserves que wài pó m’a cuisinées ; Wao s’est jeté sur mes mochi sous le prétexte qu’il m’a sauvé d’un rhume certain ! Mais la nourriture est bien meilleure quand elle est partagée, donc je les lui ai donné de bon cœur. C’est ce que wài pó aurait voulu. De toute façon, elle m’en avait donné assez pour nourrir une armée. [note : lui demander sa recette.] J’ai des ampoules aux pieds et les épaules douloureuses, mais l’esprit plus vivace que jamais. Notre terre est si belle. Nous avons improvisé des chants en l’honneur de nos montagnes ce soir. Wao a commencé à m’apprendre un morceau au xun et je lui en apprends un au dizi. [note : le jouer à Ting à mon arrivée.] J’ignore si c’est l’instrument de musique lui-même ou son talent qui me fascine le plus. Le son me transporte dans une autre dimension. Si le dizi est tel le vent qui fait frissonner les arbres, le xun est un doux ruissellement de rivière, intemporel.

En réalité, j’écris ce texte à l’aube du second jour de notre expédition, que j’ai nommée la Grande traversée. Je n’avais pas dormi ainsi depuis très longtemps. Je n’ai qu’un vague souvenir de mon rêve. J’étais sur la proue d’un navire en bois et je suivais des yeux une curieuse forme sous les vagues. Etait-ce une sirène ? Je me suis réveillé avant d’avoir la réponse. Peut-être pourrai-je poursuivre ce rêve cette nuit. Mais avant, une journée chargée nous attend. Selon Yin, il nous faudra encore deux jours de marche avant d’atteindre l’océan. Yin est la responsable de notre groupe. Elle a l’élégance d’une reine et la prestance d’un roi : l’on reconnaît l’expérience d’une Yoenæ*. Je me sens en sécurité de la savoir en charge de notre voyage. D’ailleurs, elle vient d’arriver dans le salon de l’izakaya : nous allons pouvoir entamer notre repas et repartir.

Carnet de bord | Jour 2.

Je suis extrêmement fatigué, alors je serai bref. Nous sommes arrivés dans les grandes vallées qui nous séparent de la côte. C’est la première fois de ma vie que je les découvre, ayant voyagé par téléportation les dernières fois. J’ai donc officiellement arrivé dans l’inconnu ! Je suis bref, donc je ne peux décrire leur beauté. [note : en faire une peinture à mon arrivée avant de perdre la vivacité du souvenir, ou avant si je trouve le matériel.]

Nous nous sommes ravitaillés près d’un temple du Hahanaru Shizen, le plus grand que j’ai jamais vu. Wao m’a dit avoir prié pour moi et laissé non pas une, mais trois offrandes, car “j’ai besoin de toutes mes chances” ! Il est tellement bienveillant. Nous avons beaucoup discuté sur le trajet. Il est en train de penser à son énigme pour se Lier à son Aisuru potentiel. Il y pense jour et nuit. J’ai voulu lui donner des idées, car j’en déborde, mais il s’est quelque peu vexé. Je comprends ses états d'âme : l’attente avant leur prochaine rencontre doit être un calvaire. Mais il est aussi si proche de son objectif, et j’ai honte de l’avouer mais je l’envie quelque peu pour cela. Ses yeux brillent quand il me parle de son Aisuru. Il me dit ne plus jamais pu avoir le chasser de ses rêves depuis leur rencontre, il me dit que c’était instantané. Je me demande si, moi aussi, je serai frappé d’une telle certitude inébranlable à sa rencontre. Mais je m’arrête ici, car mes pensées m’emmènent dans de lugubres divagations.

Carnet de bord | Jour 3.

Nous y sommes ! La grande bleue, comme Mei l’appelle, nous attend. Non, nous n’y sommes pas encore, à vrai dire. Mais cette nuit est la dernière avant de l’atteindre. Yin déplore que nous ayons pris du retard : nous aurions dû arriver ce soir, et l’équipage nous attend pour partir. Mais plutôt que de nous aventurer dans la vallée en pleine nuit et risquer de trébucher sur des Töh Taureaux, nous campons sur le chemin. Ce sont de gentilles créatures, mais j’ai entendu des légendes qui font froid dans le dos. Certains racontent que les Töh Taureaux peuvent atteindre la taille d’un bambou et nous avaler dans leur sommeil sans s’en rendre compte, comme de vulgaires insectes.

D’ailleurs, tout à l’heure, un insecte m’est monté dessus sans vergogne alors que je faisais mes arpèges au dizi. Je ne sais pas si je vais parvenir à dormir même si je tombe de fatigue. Que ce soit car j’ai hâte de voir l’océan ou peur de sentir les petites pattes de ces insectes sur mon visage. Non, Min ! Les insectes sont nos amis. Qu’ils viennent s’ils le veulent ! Cette idée me fait frémir malgré moi. Je vais m’efforcer de danser un peu pour me fatiguer d’autant plus. Le sommeil viendra peut-être plus facilement. Adieu !

Yoenæ : Orine de niveau III

Mots: 990
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Min Shào
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Min Shào
Sam 02 Avr 2022, 13:13


Image par Tyler Smith


Au quatrième jour de voyage, Min et son groupe atteignirent enfin la côte. L’Hanatsu était encore à moitié endormi à cause de sa nuit agitée. Mais il ne l'était pas non plus assez pour rester silencieux : voir l'océan pour la première fois l'excitait tellement qu'il ne cessait de poser des questions au groupe. Yin avait fini par lui interdire de prononcer tout mot en relation avec l'océan, l'eau et "en fait, des mots tout court". Il s'était donc renfrogné en essayant d'imaginer à quoi ressemblait la vue qui l'attendait.

Soudain, une odeur lui fit l’effet d’un électrochoc. C'était une odeur inconnue qu’il apparentait au sel et aux oiseaux. Cela ne pouvait signifier qu'une chose. « Est-on proches, ça y est ?! » s’écria-t-il en se tournant vers Wao. Quand il opina de la tête avec un sourire en coin, Min alla à l'avant du groupe à grandes enjambées, son bâton s’enfonçant dans la terre humide de la forêt. « Est-ce que vous la voyez ? » Il posa la question à Yin en devant de file, mais elle n’eût pas le temps de répondre, puisqu’il la devança de quelques pas avant de s’arrêter net. A quelques dizaines de mètres, il distingua une ligne grise où le soleil se reflétait par endroits, derrière les arbres. Il avait envie de courir et d’aller s’imprégner de cette vue, de crier son enthousiasme. Il était bien là ! Mais il se retint et se rangea à côté de Yin en gardant toute sa contenance. En attendant de pouvoir y voir plus clair, il s’imprégnait autant qu’il pouvait de cette vue partielle et de l'odeur si particulière.

Et puis, il eut enfin une vue complète de la berge. Au nord, les docks de bois s’étendaient vers l’océan, parsemés de navires monstrueux et de barques qui bougeaient en faisant des clapotis. Et au sud, le bois finissait par laisser place à une grande étendue de sable. C’était comme une peinture, mais tellement plus beau encore. Aucune peinture ne pouvait rendre hommage à un tel mouvement des vagues, à une telle lumière reflétée par le soleil. On aurait dit un ciel de gouttes étoilées.

« Splendide ! » Min, lui qui avait toujours mille mots à la bouche pour décrire le plus insignifiant des détails, ne savait soudainement plus quoi dire. Il était submergé. « Tu auras tout le temps d’admirer la vue sur le bateau. Nous devons continuer », entendit-il soudain à l’oreille. C’était So-Hyun, fermant la marche, qui le ramenait à la réalité. « Oh… tu as raison. » Min reprit la marche, non sans jeter des regards réguliers à l’horizon infini comme s’il risquait de disparaître. L’expédition s’avança sur les docks. C’était un petit port logé entre la mer et la forêt. En suivant le groupe, Min s’attarda sur les préoccupations des passants. Il adorait voyager dans de nouveaux endroits : dans ces moments, il avait l’impression de sortir de son corps pour entrer dans un roman. Chaque personne était une porte sur des mers d'inconnues.

« … Wao, et notre jeune pousse Min. » soudain, Min fut tiré de ses divagations par la voix fluette de Yin. Il faillit lui foncer dessus, mais il remarqua que tout le monde s’était arrêté juste à temps. Le groupe s’était planté devant un navire de taille moyenne par rapport aux autres, mais qui lui semblait énorme. Le monstre de bois et de métal trônait devant eux, une planche étalée pour assurer le passage entre le dock et le navire. L’équipage était déjà en train de s’affairer, mais l’un d’eux était venu les accueillir.

Il était toujours intimidant de se retrouver devant un Réprouvé. Ils avaient des carrures de vrais gladiateurs, tout l’inverse de la plupart des Orines. D’ailleurs, cet homme faisait deux têtes de plus que toutes les Orines attroupées devant lui. Son visage carré était flanqué de cheveux bruns et courts, ce qui ajoutait à sa prestance. Ses muscles saillants déformaient ses loques et ses bas dévoilaient des mollets d’acier. Il était pieds nus. « On f’ra les présentations plus tard, on a assez attendu comme ça. Montez. » Il renifla bruyamment et ouvrit le bras pour illustrer ses propos. Leur enthousiasme quelque peu douché, les Orines se turent et montèrent docilement.

Min connaissait le tempérament imprévisible des Réprouvés, et les autres Orines aussi, mais Yin semblait être légèrement vexée. Il était curieux de savoir ce que la proximité entre Orines et Réprouvés sur une si petite surface et pendant si longtemps allait donner. On l’avait prévenu : il faudrait qu’il reste ouvert d’esprit et garde son calme à tout prix. Le message le plus important qu’il retenait était : “ne les énerve pas et ne parle pas trop !”. Après avoir mis un pas sur la planche, Min s’arrêta au milieu et opéra une rapide courbette devant le marin. « Monsieur, c’est un honneur de partager cette expédition avec vous et ce noble éq… » « Pas l'temps », le coupa le marin. Il le poussa et lui emboîta le pas avant d’empoigner la planche et de la poser dans le navire. « Viens sur le pont. »  Sans un mot, Min le suivit, choqué par l’impolitesse du Réprouvé. Ce dernier avait réussi un miracle : le rendre bouche bée.

Min et ce marin dont il n'avait pas entendu le nom, mais qu'il décida de surnommer Grognon, arrivèrent sur le pont. Vu d'ici, et surtout en considérant le nombre de passagers et l'équipage qu'il contenait, le navire semblait soudainement moins grand. Il y avait six Orines, deux Rehlas et un équipage de six Réprouvés. Le capitaine ne s'embarrassa pas de formalités et informa l'équipage que l'heure du départ était arrivé, avant de beugler des ordres aux Réprouvés qui s'étaient à peine interrompus pour regarder le groupe d'Orines. Devant cet équipage, Min avait l'impression de se retrouver devant une armée de mercenaires implacables et, à l'inverse, de n'être rien de plus qu'un petit caniche frêle. Même les femmes avaient une musculature saillante ! Cela l'emplissait autant de peur que d'admiration. Pourraient-ils lui apprendre des chants marins ? Devraient-ils les défendre contre des pirates ? Un océan d'inconnues s'étalait à ses pieds et cela lui donnait le tournis.
Mots: 1046
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Min Shào
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Min Shào
Dim 03 Avr 2022, 10:53



Min descendit dans la cabine du bateau, son dizi à la main. Le crépuscule avançait et il sentait qu’il n’aurait plus l’énergie d’écrire s’il repoussait encore l’échéance. Cela faisait sept jours qu’il avait quitté Takao, dont deux passés sur le bateau, et il n’avait pas encore donné de nouvelles à sa famille. L’Orine n’en avait pas envie, mais il imaginait déjà sa grand-mère se plaindre de ne pas recevoir de lettre chaque matin. Son ton sec le poursuivait telle une malédiction qu’il devait conjurer.

Dans la pièce, les lampes tanguaient au rythme du bateau, en faisant danser les lumières de l'autre côté des couchages. Le mouvement rendait le sommeil difficile aux Orines, mais il ne dérangeait nullement l'équipage. Un Réprouvé, il ne voyait pas lequel, était en train de ronfler à en faire trembler les planches. Min alla vers la table lovée dans le coin de la cabine à pas de loup, ses ustensiles flanqués sous le bras. Il posa délicatement son dizi et s’assit. Il posa délicatement sa plume magique et tira une feuille du parchemin Shào. Dès qu'il mettrait sa langue sur le papier, il disparaîtrait pour se téléporter dans le salon familial à Takao. Mais au vu de l'heure, il se doutait que sa famille ne verrait l'apparition de sa lettre qu'à l'aube du lendemain.

*

Lettre à Mei.

Très chère tante,

Je t’écris de la cabine de notre navire. Nous avons mis les voiles il y a deux jours, mais j'ai l'impression de naviguer depuis une semaine. Quelle sensation étrange de voir son monde disparaître à l’horizon… et il est encore plus étrange de voguer dans une infinité bleue. Le cycle du jour et de la nuit est le seul témoin du temps qui passe, et pour ce qui est du voyage, j’ai la sensation d’aller nulle part. Mais j’ai conscience que ce n’est que mon impression. Ne t’inquiète pas : le groupe d’expédition prend bien soin de moi et l’équipage des Réprouvés est compétent. Tout se déroule bien et je suis certain que nous arriverons à destination sans soucis.

Tu m’avais averti sur le mal de mer, et je pense ne pas t’avoir assez prise au sérieux. C’était horrible. Heureusement, So-Hyun m’a vite pris sous son aile et a fait disparaître la sensation. Cela a tout de même suffi à Wao pour me dédicacer une chanson qui a été suivie avec joie par les Réprouvés… en voici les paroles :

En haut, en bas,
Il ne sait plus où est le mat
Il courbe son corps
Sur l'étroit rebord,
Et se déverse de son poitrail
Une marée de victuailles !

Ce n’est pas ce genre d’exploits que j’imagine mes héritiers chanter à l’avenir, mais il faut avouer que cela a eu le mérite de briser la glace entre nous et l’équipage. C'est devenu une sorte d'hymne sur le navire. Les Réprouvés ne sont pas faciles à cerner, mais nous y mettons tous de la bonne volonté. Leurs humeurs changent autant que le vent : parfois exécrables, parfois aimables, on ne sait jamais à quoi la journée va ressembler. J’aime beaucoup les entendre parler de leurs coutumes si différentes des nôtres. J’espère avoir la chance de visiter Stenfek, un jour. Si ce jour arrive, je te demanderai évidemment tes recommandations, toi qui connais si bien ce peuple.

Je commence à m’habituer aux particularités du voyage en bateau et à apprécier la quiétude qui l’entoure. C’est un très bon moyen de me concentrer sur mon apprentissage et de prendre du recul. Tante Mei, je ne suis pas dupe. Je comprends les motivations qui t’ont poussé à prendre une telle décision pour moi. Tu as certainement raison : mère aurait fait la même chose. D’ailleurs, je ne doute pas un seul instant que tu as requis son aval avant de m’envoyer à Maëlith.

Tante Mei. Sache que je prends au sérieux l’honneur de la famille Shào. Je suis bien conscient des inquiétudes que vous ont causé mes déboires au cours de mes derniers rendez-vous avec des Aisuru potentiels. Mais je souhaite de tout cœur que tu comprennes qu'il ne s'agit pas d'un jeu pour moi : j'ai la volonté de vous faire honneur. Faire naître mon Lien est le plus grand de mes souhaits. Je travaillerai dur pour vous rendre fiers et je reviendrai à Takao en tant qu’Orine liée à son Aisuru. Je t’en fais le serment.

Ton neveu, Min Shào.

*

L’Orine posa sa plume et essuya les larmes qui perlaient à ses yeux de sa manche. Il humecta un coin du papier avec sa langue avant de se laisser le temps de changer d'avis et de recommencer cette lettre. Il n'avait pas eu le courage de crever l'abcès avant de partir. Il n'était pas totalement honnête, mais il avait envie de croire en ce qu'il avait écrit.

En réalité, il n’arrivait pas à comprendre que sa tante ait pris une décision aussi radicale pour lui, et il imaginait encore moins sa mère la soutenir dans cette initiative. C’était certainement cela qui le blessait le plus. Avait-elle si peu d’espoirs en sa progéniture ? Une sensation amère lui arracha d’autres larmes ; celle d’être abandonné une fois de plus. Sa mère ne revenait que rarement de Melohorë et il savait qu’elle était retenue par sa vie avec son Aisuru. Il savait aussi que grandir à Takao, avec son peuple, était plus bénéfique pour lui que de la rejoindre et de vivre dans un monde qui lui était étranger. Mais malgré cela, il ne pouvait rejeter ce sentiment d’abandon. Il ne pouvait rejeter les pensées sombres qui s’invitaient dans son esprit : était-ce une corvée de revenir le voir ? N’était-il qu’un fardeau ?

Min était fatigué, mais il ne se voyait pas s’endormir dans ces conditions. Sa grand-mère lui disait toujours qu’on ne devait jamais s’endormir avec de mauvaises pensées en tête, car c’était une porte ouverte sur les cauchemars. Il fallait qu’il se change les idées. Résolu, l'Orine fit une grande inspiration et se leva en reprenant son dizi. L'idée de voir le même océan infini en remontant sur le pont ne l'enchantait guère, mais il ne se lassait pas de s'allonger pour regarder le ciel et ses étoiles. Si l'océan lui était inconnu, le ciel était le même que celui de son village natal, et là était sa source de réconfort.
Mots: 1081
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Min Shào
Dim 03 Avr 2022, 18:45


Image par Sin Jong Hun

D’humeur maussade, Min remonta les escaliers et retourna sur le pont, non sans louper une occasion de boire un jus d’orange sur le passage. En sortant, il remarqua Wao à la proue du bateau qui était en train de divertir un public de quelques Réprouvés et Orines. En utilisant sa maîtrise de l’eau et des illusions, il donnait vie à une représentation de ce qu’il semblait être son futur Aisuru, selon les multiples descriptions qu’il lui en avait donné. Mais ce spectacle ne l’intéressait pas : il en avait entendu assez de Wao et de son avenir prometteur. Il se détourna du groupe et se dirigea vers l’autre côté du pont. Il passa devant So-Hyun, qui était en train de peindre avec de l'aquarelle.

« Tiens, tu te détournes de la peinture à l'huile ? » lui demanda Min après lui avoir signifié sa présence, histoire d’éviter que l’Orine fasse tomber son pinceau dans l’océan par surprise. « Ah non, jamais ! J’expérimente. Il me paraissait poétique de dessiner l’océan à l’aquarelle. Et les tons font honneur aux douces nuances du crépuscule », poursuivit-elle.  « Tu as raison, c’est divin. Et on retrouve ton style. Maintenant que j’y pense, pourras-tu me prêter tes ustensiles de peinture à l'huile ? J’aimerais immortaliser certains paysages qui deviennent déjà flous dans mon esprit. » « Bien sûr ! Si tu me montres tes oeuvres. » So-Hyun sourit puis se replongea dans sa peinture, en lui signifiant qu’elle n’était pas d’humeur à faire la conversation.  « Je te remercie. Je le ferai demain. J’ai hâte de voir ta toile quand elle sera terminée ! » Il opéra une légère courbette de la tête et poursuivit sa route vers la poupe du navire.

Une fois arrivé, Min s’allongea sur le bois et plongea son regard dans le ciel et ses étoiles naissantes. La lumière évanescente du soleil laissait apparaître la lune, qui était croissante. L’Orine contempla les dizaines d’étoiles qui étaient déjà apparues et observait les couleurs changeantes de la fin du crépuscule. Soudain, une voix forte l’arracha de sa contemplation.  « Hé, Galette, c’est ma place. » Galette était le petit nom qu'on lui lui avait trouvé en référence à son accident à cause du mal de mer. Min tourna la tête pour découvrir le visage de la personne qui avait décidé de l’importuner. Il découvrit le visage de la Réprouvée Xaëlan, éclairée par le clair de lune. C'était elle, d'ailleurs, qui avait trouvé ce surnom. « Oh… pardon », commença-t-il à dire en roulant d’un côté pour lui libérer l’espace. Mais elle l’arrêta d’un geste : « Non non, bouge pas ! Je t’ai bien eu. »


Xaëlan était, selon les observations de Min, l’une des cadettes de l’équipage. Elle était plus subtile que la plupart de ses congénères, mais tout aussi imprévisible. Alors que beaucoup ne portaient pas beaucoup d’attention aux Orines, elle semblait avoir une réelle curiosité. Wao avait même commencé à lui apprendre à jouer du Xun. Après tout, les Réprouvés qui vivaient à Stenfek étaient, selon la tante de Min, plus tolérants et ouverts d’esprits que les autres. C’était le cœur de leur pôle diplomatique, là où étaient formés les meilleurs ambassadeurs de leur peuple. Et Xaëlan, pour sa part, semblait en avoir toutes les qualités… du moment qu’on lui pardonnait son humour douteux. « Ah ! Touché ! » répondit-il avec un enthousiasme un peu forcé. Elle sentit qu’il n’avait pas beaucoup apprécié le dérangement. « Oh, c’est bon, détends-toi un peu. Vous êtes beaucoup trop intenses, vous autres. Allez, tiens, pour te décoincer. » La Réprouvée lui tendit une bouteille de rhum qui avait l’air d’être passée entre les mains d'une armée d'ivrognes. Tout l’or du monde n’aurait pas suffi à le convaincre de mettre ses lèvres là-dessus, mais il ne voulait pas la vexer non plus. Il jugea que l’humour était la seule solution pour garder le status quo.

« Je te remercie, mais nous les Orines, nous ne buvons de l’alcool que s’il a été mis en bouteille par pleine lune et a été béni par la Reine elle-même, Sakuya Tsuyari. » Cette réponse fit mouche : Xaëlan éclata de rire. Quand elle se ressaisit, elle déboucha la bouteille avec ses dents et but quelques gorgées comme si c’était du jus d’orange. Min appréciait l’effet de l’alcool à petite dose, mais dans ce contexte et entouré de ces personnes, il n’était pas question qu’il coure le moindre risque. « Plus sérieusement, il arrive que nous buvions de l’alcool tout de même. Si vous avez déjà assisté à une cérémonie du Lien de Takao, vous verriez de quoi je parle. » La cérémonie était la seule occasion où Min avait vu des Orines ivres –selon sa définition. Mais du côté des Réprouvés, il avait déjà identifié une dizaine d’occasions d’en boire : pour se souhaiter bonne chance, se donner du courage en se levant ou encore s’assommer après le travail. C’était peut-être ça, le secret de leur sommeil si lourd. « Alors, une fois le mal de mer et du pays passés, tu penses quoi de cette expédition ? » Min exprima ses sentiments sur l'océan, les bateaux et le voyage en général. Le duo discuta longtemps de tout et de rien, jusqu’à ce que la lune brille haut dans le ciel et que le spectacle de Wao se termine. Quelques Réprouvés restaient sur le pont pour travailler ou boire avec des discussions animées. A un moment, les deux se turent et contemplèrent le ciel en silence. Puis il se retournèrent et observèrent ce qu’il se passait sur le pont.

« Il y a une chose qui me frappe chez vous, c’est que vous voulez que tout aille très vite. Il ne faut pas être en retard ! Il faut prendre avantage du vent ! Il faut engloutir le dîner ! ça doit être très fatiguant », déclara l'Orine. Xaëlan se renfrogna : elle n’avait pas l’air d’aimer cette remarque. Pourtant, il n’avait pas voulu que cela sonne comme un reproche. « Evidemment que tu penses ça. Vous vous rendez pas compte, dans votre bulle, de ce à quoi peut ressembler la vie des autres. Et puis tu voudrais naviguer pendant des semaines sans jamais atteindre Maëlith ?! » Min n’était pas d’accord : le peuple des Orines était bien plus ouvert sur le monde qu'elle ne semblait le penser. Mais il se tut de peur d’envenimer les choses, et de toute façon, il s'imaginait mal faire changer d'avis un Réprouvé. « Vous, vous êtes protégés. Nous, on a été maudits, chassés, torturés pendant des générations. Tu crois qu'on a survécu par la clémence de vos précieux Ætheri ? Non, c'est grâce au sang versé de nos ancêtres. On peut pas se permettre de ralentir. S’arrêter, c’est mourir. On naît dans le cœur-même de la guerre, et le monde dans lequel on vit est un autre genre de guerre. » L’Orine n’eût que pour seule réponse un sourire gêné et un hochement de tête. Il ne connaissait que trop bien l'histoire tragique du peuple des Réprouvés : ils en parlaient tout le temps.

Min chercha un prétexte pour échapper à son hostilité. Xaëlan avait désormais bu la moitié de la bouteille : cela n’augurait rien de meilleur pour la suite des conversations. « Eh bien, je vais retourner dans ma bulle de ce pas. Je te souhaite une très bonne fin de soirée ! A la tienne. » Il trinqua sur sa bouteille avec son poing, histoire de retourner son attention sur son nectar. « C’est ça, va donc dormir pendant qu’on travaille ! A plus, Galette ! » *Et ce que tu fais, c’est du travail, peut-être ? Quel toupet.* Sans un mot, Min alla se coucher. Il avait eu beau se changer les idées, il redoutait désormais qu’un croque-mitaine ivre vienne hanter ses rêves.
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Min Shào
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Min Shào
Dim 10 Avr 2022, 16:32


Image par Nataly Kononova

Carnet de bord | Jour 8.

Ce matin, nous avons mangé tous ensemble. Des tensions montent entre certains, mais ce repas a ramené un semblant d’harmonie. A chaque repas, nous leur faisons découvrir une nouvelle variété de riz. Notre gastronomie semble être la seule chose qui réveille un intérêt chez certains membres de l'équipage. Je crois qu’il y a eu une sorte de grand conflit entre Yin et des Réprouvés. Ils ne se seraient pas comportés correctement avec elle. Je ne connais pas les détails, mais je n’ai pas l’audace de les demander : bénis sont les ignorants.

Après le repas, So-Hyun m’a confié son set de peinture à l’huile. J’ai représenté nos vallées traversées au début de la Grande Traversée. J’ai peint nos rizières avec une Orine inspirée de Yue et un petit Töh-Taureau sur son épaule. So-Hyun était impressionnée par mon imagination. Que ce serait ennuyeux de peindre la réalité quand on a le pouvoir de manier le monde à notre guise.

Selon l’avis de Xaëlan, cette peinture manque de sang. J'ai donc eu l'idée de peindre un coucher de soleil et de la lui offrir avant que nos chemins se séparent. Je peindrai ce coucher de soleil au-dessus du mat de ce bateau. En attendant, nous avons commencé un projet de partage de connaissances quotidien. J’ai essayé de lui apprendre la couture car elle s’est déchirée le bout de la manche en nettoyant le pont, mais... ça ne s’est pas passé comme prévu. Elle n’est pas arrivée à faire ne serait-ce qu’un point devant et a fini par jeter mes outils à la mer dans un élan de rage. [note : demander une aiguille, un dé à coudre et du fil d’épaisseur moyenne à Mei.] Ce soir, elle va m’apprendre à faire une clé de bras. Je me demande encore si ce cours improvisé n’est rien de plus qu’un prétexte pour me violenter ! J’espère que mon bras va y survivre.

Carnet de bord | Jour 9.

Ce soir, j’écris à la lueur des lanternes avant de dormir. Cette nuit va être très spéciale. Notre groupe d’expédition et les deux Rehlas allons dormir dans la cale ce soir. Je suis à quelques centimètres des pieds de Yin… autant dire que ce sera une nuit difficile. Mais jamais autant que celle des Rehlas. Ils dorment à la belle étoile, d’habitude. Ce changement effraie d’autant plus Aku, le plus jeune. C’est l’un de ses premiers voyages et il semble plus instable chaque jour qui passe. Min du futur, toi qui as oublié cette expédition, pourquoi nous devons nous enfermer cette nuit ? Eh bien, l’équipage n’a pas su rattraper notre retard, notamment car nous n’avons pas eu beaucoup de vent. La météo restait très calme aujourd’hui. Par conséquent, nous n’arriverons à quai que demain soir. Où est le problème ? Cette nuit sera une pleine lune.

Je n’ai pas bien compris les explications de Yin, mais selon ses dires, la pleine lune a une influence sur le tempérament des Réprouvés. Pour cette raison, elle ne veut pas courir le moindre risque. Il faut dire que depuis le problème avec elle et l’équipage, l’atmosphère s’est refroidie. Personne ne s’est donc opposé à sa décision.

Le peuple des Réprouvés m’intrigue de plus en plus. Il y a quelque chose de poétique dans leur radicalité. Elle fait écho à nos propres conflits internes. Yin dit qu’ils ne pourraient être plus éloignés de nous, mais je ne suis pas d’accord. Je retrouve une partie de moi dans Xaëlan. Comme une version de mon esprit si toutes les barrières étaient tombées. Ne sommes nous pas aussi en proie à des questions éthiques au cours de notre vie ? L’équilibre du monde ne repose-t-il pas sur des paradoxes ?

Yin vient de déclarer notre couvre-feu. Laissons ces réflexions de comptoir au futur.

Carnet de bord | Jour 10.

Quelle journée ! J’écris sur la terre ferme. Enfin ! Cette expédition m’a beaucoup appris, mais l’eau n’est définitivement pas mon élément. Je ne suis pas fait de nageoires, et ce n'est pas pour rien. Je suis aussi déçu de ne pas avoir rencontré de Sirène ni de dauphins. Quoiqu’il en soit, j’ai survécu à la Grande Traversée, ce qui est déjà positif. Et pourtant ! La dernière journée a été mouvementée. Les Réprouvés ont passé leur temps à se disputer. L’un d’eux en a même jeté un à la mer. Il s’est vite envolé pour revenir dans le bateau, mais ensuite, Xaëlan et Grognon ont été obligés de les séparer à coups de poing. Je n'avais jamais vu de combat aussi sale de ma vie... c'est bien loin des duels sportifs propres à notre peuple. Ce n'est pas élégant. L’un d’eux a fini le voyage dans la geôle. Moi qui pensais que la cage servait pour faire de pirates vaincus des otages ! Eh bien non, elle est utilisée pour l’équipage lui-même.

Mais je me suis surpris à apprécier Xaëlan de plus en plus. Nous avons découvert quelques points communs. Elle aussi a des parents qui ne sont que rarement présents. Elle vit dans la maison de son oncle. Elle aussi a tant besoin de cette reconnaissance si précieuse. Elle m’a proposée de la rejoindre dans le salon de l’auberge après le souper, qui est quand j’aurai terminé d’écrire et que Wao me rejoindra. En effet, les Orines refusent de me laisser seul avec une Réprouvée sans surveillance. Je trouve qu’ils font du zèle à ce sujet, mais je ne saurais remettre en question les décisions de Yin. J’ai préparé la peinture, je lui ai même trouvé un cadre. J’espère qu’elle lui conviendra. Wao me fait signe, il est temps de descendre.

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Min Shào
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Dim 01 Mai 2022, 12:07


Peinture de Van Gogh

Min sortit du dortoir, accompagné de Wao. Quand les deux Orines descendirent les escaliers, une odeur mêlée de bois, de sel et d’alcool propre aux auberges installées sur les côtes les envahit. Le soleil n’était pas encore couché ; les serveurs attendaient patiemment le coup de feu du soir. Et, dans un coin près d’une fenêtre, Xaëlan attendait, une chope trônant devant elle. Les deux Orines la repèrèrent en même temps. « Je serai là-bas », indiqua Wao en montrant du doigt un endroit situé à trois tables de la Réprouvée. Il serait assez loin pour ne pas entendre leurs dires, mais assez près pour réagir en cas de problème.

Les Orines faisaient confiance à un groupe restreint de Réprouvés pour prendre en charge leur protection, mais elles savaient aussi repérer les plus instables d’entre eux, notamment les novices. Xaëlan en faisait partie, et personne n’aurait laissé Min s’entretenir seul avec elle. N’ayant pas encore atteint les terres protégées par la bénédiction de Sympan, c'était trop dangereux. D’ailleurs, c’était seulement grâce à la proposition de Wao de le chaperonner que Min y avait été autorisé. Son cadeau caché dans un sac flanqué sous son bras, Min approcha de la table de la Réprouvée. Cette dernière se retourna avant qu’il ne puisse dire un mot. Elle avait les sens aiguisés.  « T'as vraiment eu le temps de te doucher ? Ou vous transpirez jamais, vous autres ? » lança-t-elle en le reniflant vulgairement. Nullement vexé, Min avait compris comment communiquer avec elle : le second degré.

« Ma chère, si ne nous dérangeons jamais vos narines, c'est que notre transpiration est parfumée par nature. Telle est la bénédiction de l’Æther Subarashī. » La Réprouvée eut un rire, puis se tourna vers la serveuse qui amenait des victuailles sur un plateau : un thé pour Min, et pour Xaëlan, trois petits verres et trois tubes puants. Sans un mot pour la serveuse, elle se jeta dessus instantanément. « Celui-là, c'est pour une traversée réussie. » Elle leva le premier petit verre et le but d’une seule gorgée. Min se douta que ces breuvages étaient chargés en alcool, un peu comme tout ce qui passait par le goulot de cette dernière. « C'lui-ci, c'est pour les 50 kilos de sacs de riz que j'me suis trimballée sans les percer. » Une fois arrivés sur la côte, les Réprouvés avaient déchargé la tonne de riz qui leur avait été promise en l’échange de la traversée en bateau. « Et celui-là, c'est parce que j'le vaux bien. » Elle but le troisième verre d’une traite puis le reposa avec une force qui fit trembler la table, avant de se précipiter sur le tube blanc qu’elle commença à trancher vigoureusement avec un couteau sorti de sa ceinture.

Min s’essaya à une politesse, bien que Xaëlan ne semble pas d’humeur à l’écouter. Ce n'était pas un très bon début. « Notre riz est donc bien prêt pour Stenfek ? Nos chemins vont-ils se croiser à l'aube, avant que nous repartions ? » demanda-t-il. Elle balaya instantanément sa question de la main. « Bah ! Tu crois qu'on a l'temps pour ça ? Mes feignants de collègues poussent un roupillon là, mais après, on repart direct à Stenfek. On voyage de nuit, nous. On a pas peur de la lune », dit-elle, dans un ton lourd de sous-entendus. Elle ne manquait jamais de souligner à quel point c'était une dure à cuire. « Oh ! … » répondit bêtement Min, une pointe de déception dans la voix.

Min eut l’impression de ne plus être à sa place. Il aurait aimé se cacher sous son lit. Secrètement, il avait espéré des adieux un peu plus émouvants avec Xaëlan, même sous ses grands airs. Cette réponse froide sonna comme un douloureux rappel : s’attacher si vite à des étrangers ne lui apportait rien de bon. Il aurait dû garder ses distances. En guise de fuite, tout ce qu’il trouva fut de changer de sujet, sans savoir s’il voulait encore lui offrir son tableau. Soudain, tout cela lui semblait futile. « C'est donc ça, cette chose que vous avez mangé à pleines dents tout le voyage ? » se contenta-t-il de demander en donnant un coup de menton vers la mixture sur laquelle elle s’acharnait. « Ouais ! Vas-y, goûte. J'suis d'humeur généreuse, pour une fois. »

Il n’avait pas envie d’ingérer une chose qui avait plutôt l’air d’être destiné à la poubelle, mais après tout, il s’agissait de la culture de Xaëlan. Quel mal pourrait-ce lui faire ? Min haussa les épaules et empoigna une tranche. Il s’efforça de l’engloutir sans la détailler du regard, de peur d’être dominé par son dégoût.. « Hm... c'est... ça a... du caractère. » Il ne put réprimer un déglutissement en terminant sa bouchée, ce qui arracha un rire à gorge déployée à Xaëlan.  « Maintenant que t'as goûté, j'peux te le dire : c'est des tripes ! » Si Wao ne pouvait pas entendre les dires de Min trois tables plus loin, il en était autrement pour son interlocutrice. Min tenta de faire tourner la conversation autour de l’invitation qu’elle lui avait faite de l’emmener voir des Bicornes, ou pour parler de sa culture Orine, mais Xaëlan n’était pas particulièrement coopérative. L’alcool semblait avoir aggravé ses sautes d’humeur. Cela ne menait à rien ; il avait l’impression de jouer au chat et à la souris. Sauf qu’il avait l’impression d’être la croûte de fromage dans l’histoire.

« J’reviens, j’vais démouler un cake. » Il ne comprit pas son expression, mais quand la jeune navigatrice se dirigea vers les toilettes, il secoua la tête pour chasser des images peu gouleyantes. En attendant son retour, un maelstrom d’angoisses faisait rage dans son esprit. Quand elle revint, Xaëlan s’essuya la bouche d’un revers de la manche et sans chercher à ré-engager la conversation, s’affaira à massacrer le reste du saucisson. Min décida de couper court aux adieux ; de toute évidence, elle n’était pas d’humeur.

« Je dois faire mes arpèges et écrire à ma famille avant de dormir, et une longue journée nous attend demain. Je vous fais donc mes adieux. » Sa voix trembla, trahissant ses émotions, mais Xaëlan lui adressa à peine un regard. Il prit une grande inspiration et empoigna sa sacoche pour en sortir son cadeau. Pourquoi le garder, après tout ? Il le lui donnerait, elle en ferait bien ce qu’elle voudrait. « Voici, en souvenir de votre première traversée réussie. Je vous remercie de nous avoir menés à bon port et j’espère que notre riz sera à votre convenance. » Et enfin, il parvint à piquer l’intérêt de la Réprouvée.

Elle lâcha sa charcuterie et la fit glisser sur le côté de la table pour laisser la place au cadeau. Il était emballé dans un grand carré de soie orné de motifs calligraphiques. Sans un mot, elle dénoua le tissu. Min s’était attendu à la voir essayer de le déchirer et avait avancé ses mains pour l'en empêcher, mais il n’en fut rien. Il fut surpris de la douceur avec laquelle Xaëlan manipula la matière. Une lueur enfantine dans les yeux, elle leva le tableau et s’en imprégna.

C’était une peinture à l’huile de taille moyenne. Elle représentait le haut du mât d’un bateau qui ressemblait au leur, mais dans une version plus embellie. Et à l’horizon, le soleil crachait des flammes dans le ciel et léchait la mer. C’était un coucher de soleil comme Min l’avait imaginé à travers les yeux de la Réprouvée : il n’était pas tranquille, mais confus. Les mouvements de peinture donnaient un sentiment de chaos dans le ciel, comme si les étoiles se livraient une bataille pour essayer de rivaliser avec le soleil. C’était un crépuscule sanglant.

Min n’en était pas si fier : il n’avait jamais peint dans ce style. Il l’avait simplement fait dans l’inspiration du moment, après la soirée passée avec la Réprouvée. Mais il trouvait en réalité que sa peinture était moche : ses traits étaient grossiers, elle manquait de finesse. Il se demandait même ce qu’il lui avait pris de peindre ainsi, et il n’avait même pas eu le courage de la montrer à So-Hyun. Mais d’un autre côté, il lui semblait qu’elle parlerait à Xaëlan, et si c’était le cas, son objectif aurait été rempli quand même.

L’Orine essaya de déchiffrer l’expression de son interlocutrice, mais elle ne laissait rien paraître. Elle resta ainsi pendant quelques minutes, et plus le temps s’écoulait, plus il avait peur de sa réaction. Ce dernier jeta un regard vers Wao, pour s’assurer qu’il soit bien encore là en cas de problème. Puis, enfin, elle lui répondit. « J’en reviens pas. » Quand elle abaissa le tableau, Min découvrit une Réprouvée complètement changée. Elle était apaisée. Voire même… touchée ? Etait-ce ça, la lueur qu’il décelait dans le fond de ses prunelles ? « C’est de la magie, ça ! J’ai envie de toucher l’dessin, mais si je le fais, j’ai peur de me brûler. T’as assuré, mon gars. »

Elle jeta un ultime regard au tableau puis le noua délicatement dans le tissu, qu’elle caressa du bout des doigts. Min venait de découvrir une facette d’elle qu’il n’aurait jamais cru voir : une femme sensible, presque vulnérable face à son art. L’objectif était plus que rempli. « Tiens, Galette. T’emmèneras ça avec toi. J’peux rien faire de plus pour te remercier. Allez ! » Xaëlan lui fit une accolade qui manqua de lui déboîter l'épaule, puis fourra un reste de saucisson dans sa main, ne lui laissant pas vraiment le choix d’accepter son présent. A moitié dégoûté par le gras sur son doigt, à moitié touché par son geste, il se contenta d’afficher un sourire confus. « On se reverra. » Ce dernier hocha la tête, fit signe à Wao qu’il était temps de partir, et tourna le dos à la Réprouvée. Et pour la première fois depuis son départ d’Onikareni, une sensation de pure satisfaction l’envahit : la victoire était délicieuse.

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Mar 03 Mai 2022, 20:41


Image de Sam Gao




« Partons vers le centre-ville, puis nous pourrons nous séparer », tonna Yin en essayant de surpasser le vacarme de la fermeture des portes. Les allées et venues n'étaient pas courantes à Maëlith. Invisible à l’horizon, la capitale des Orines était apparue comme par magie quand le groupe était rendu à quelques kilomètres de ses portes. Et depuis ce moment, Min avait été plongé dans un état de profonde fascination. Très bavard sur le trajet, il avait posé toutes les questions possibles et imaginables sur cette ville au groupe ; mais soudain, face à elle, il se rendait compte que rien n’avait pu lui décrire par les mots ce qu’il voyait. La ville était gigantesque.

Il y avait trop d’informations à traiter ; trop de citadins dans les rues, trop de bâtiments différents avec trop d’étages. Chaque pas lui dévoilait de nouvelles merveilles desquelles s’imprégner. *Grandiose. Brillant. Subtil. Escarpé. Jolie.* Les mots défilaient ainsi dans son esprit alors qu’il contemplait la ville. *Cette place, je l’appellerai la Cour des Joyaux*, pensa-t-il en soulignant le marbre orné de pierres précieuses de diverses couleurs.

En admirant la ville autour de lui, Min marchait machinalement, sans trop savoir où les pas le menaient. Et soudain, quand ses yeux redescendirent pour se poser devant lui, il s’aperçut que tous ses compagnons de voyage avaient disparu. *Oups.* Un électrochoc lui parcoura l’échine. Pour la première fois depuis très longtemps, Min était seul. Parmi les Orines, les moments de solitude se faisaient rares. Et lui, en particulier, veillait sur ses nièces et neveux à Onikareni. Une boule se forma dans son estomac quand il pensa à la famille dont il s’était déjà séparé depuis plusieurs jours. Min baissa le regard et arrêta de marcher, perdu dans un tourbillon d’émotions négatives.

« Un mochi pour un voyageur éreinté ? » Une voix fluette le ramena à la réalité. C’était une petite fille qui lui tendait son œuvre, les mains pleines de farine. Cette image lui rappela sa nièce Xue et lui réchauffa le cœur. « Vous me faites trop d’honneur ! » s’exclama-t-il en s’accroupissant. Avant de prendre la pâtisserie de riz, il fouilla dans sa poche et en sortit une petite figurine sculptée qui représentait le temple miniature de son village natal. Il en avait fait plusieurs pour sa famille à Maëlith, mais l’occasion ici était trop belle. Il troqua le mochi contre sa figurine et se courba en signe de remerciement. En voyant qu’elle attendait de voir sa réaction, il en prit une bouchée. « Mmmmh ! Délicieux ! J’en mangerais tout une colline si mon estomac me le permettait ! » « Ouii ! Merci, monsieur ! » s’exclama la petite fille.

Elle fit une courbette et s’en alla en courant vers sa maison, des grains de farine s’échappant de ses mains. Quand il se retourna pour traverser la grande place, il fut guidé par un air lointain de Guzheng. Comme hypnotisé, l’Orine se dirigea lentement vers la musique. Elle le conduisit à un bosquet qui surplombait la place. Les arbres dévoilèrent un groupe de très jeunes filles qui s’entraînaient à jouer l’une des chansons que toute Orine apprenait dans son enfance. Aussi silencieusement qu’il le pouvait avec ses bagages, Min s’assit et les écouta de loin. Il se perdit dans la musique, le bruissement des arbres et la vue de l’entrée de la ville en contrebas. C’était l’un de ces moments hors du temps où soudain, tout était parfait. Et puis la musique s’arrêta et ce moment s’échappa aussi vite qu’il était venu.

Les Orines se levèrent, rangèrent leur instrument puis se dirigèrent vers la Cour des Joyaux. Min se leva puis détourna le regard quand le tissu de leur hanbok disparut derrière les arbres. Quand il se retourna pour jeter un dernier regard sur les grandes portes de Maëlith, il s’aperçut avec stupeur que les murs de marbre étaient teintés de l’orange du crépuscule. Combien de temps avait-il réellement passé assis contre cet arbre ? Se pourrait-il qu’il se soit assoupi ? En pensant à ce qui allait suivre, l’image du visage de sa tante Ting déformé par la colère lui donna un frisson dans le dos. Il lui avait dit arriver en plein après-midi ; il avait déjà plusieurs heures de retard. *Je dois trouver un prétexte !* pensa-t-il en remettant maladroitement son sac sur son dos endolori.

En revenant sur la Cour, Min s’aperçut qu’en plus, la carte de la ville qu’il avait griffonnée n’était plus dans ses poches. *Par les Aetheri ! Heureusement que la famille Shào est bien connue. Je vais demander mon chemin.* Il chercha la petite fille qui lui avait donné un mochi plus tôt, mais les shoji de sa maison étaient fermés. Ce dernier décida donc de monter vers les hauteurs de la ville, puisque c’était la seule information dont il se souvenait. En cours de route, il finit heureusement par trouver une famille qui saurait lui indiquer où se trouvait la maison des Shào.

C’était une famille très discrète, les enfants s’entraînant sagement à la calligraphie dans le jardin. Comme c’était de coutume chez beaucoup d’Orines, la maîtresse de maison lui offrit un thé avant de repartir. Et après d’incessants bavardages sur son voyage et Takao, son village d’enfance, il faisait nuit quand cette dernière l’accompagna jusqu’à la maison Shào. Une autre règle d'hospitalité recommandait de ne pas seulement indiquer le chemin au voyageur perdu, mais aussi de le parcourir avec lui. C'était une bonne chose, mais en imaginant la réaction de Ting, Min fut presque triste d’avoir finalement trouvé son chemin. Il aurait préféré manger des tonnes de saucisson plutôt que de se faire gronder par la femme la plus sévère qu’il connaissait. Mais le choix ne lui appartenait plus désormais. Lentement, comme un condamné parcourant son ultime chemin vers la potence, il entra dans le jardin de sa tante en faisant les derniers pas de la Grande Traversée.
Mots: 972

FIN
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