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 [Q] - Tomber du nid

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Dim 19 Avr 2020, 02:19

Intrigue/Objectif : Yuan et son amie quittent Maëlith et ont une vie pourrie.


Crédits : Pietro Bernardi
Yuan et Feiya avaient énormément marché. La seconde avait pleuré chaque pas, aussi. La mort d’un parent est une épreuve difficile quoique libératrice, d’une certaine manière. Les orines connaissaient leur valeur, leur rôle et les responsabilités qui venaient avec. Nées de l’âme de leur père ; leur devoir impliquait de marcher dans les pas de leur mère. Pour certaines, il y avait quelque chose de réjouissant, dans le fait d’avancer vers une destinée préfabriquée. Pour d’autres, il ne restait que la terrible impression de se faire pousser dans un moulin à âmes dans lequel elles joueraient un rôle secondaire. Toutes ou presque avaient l’envie profonde de rencontrer leur Maître, mais il était normal d’être déçue. Elles se trouvaient là, jetées au monde, sans réellement pouvoir goûter à une impression de libre-arbitre. Leur mission était la priorité.

« Je me demande à quoi ressemblera mon Maître. » Feiya faisait quelques essais de peintures. Elle avait acheté des pigments, lorsque les deux Orines — et leur mercenaire — s’étaient arrêtées au village d’Heicho. Les territoires de leur race étaient loin, maintenant. Leur petit groupe était là à Arväsh, dans la montagne de l’Edelweiss. Edelweiss… c’était drôle, comme nom. Est-ce qu’Edel était liée à cette fleur ? Peut-être bien qu’une coutume le pensait, quelque part dans un continent. Les orines étaient éduquées, que ce soit en bonnes manières, en religion ou en art. Au sein de leur terre natale, elles étaient pour la plupart loin d’être des créatures frêles et naïves. Pourtant, une fois mises au contact de ce monde qu’elles n’avaient pas effleuré, elles perdaient toute confiance. Tout était si grand, si varié et si ouvert que les possibilités pouvaient rendre nauséeuse celle qui les contemplait trop longtemps.

« Il sera… » Yuan répondait avec un peu de latence. Elle empilait sur la table sa collection de grelots, comme pour faire un château de cartes. Ce serait un palace idéal, pour elle. Après avoir posé sa pièce finale, elle rendit son verdict. « Blond platine. » Sa voix était portée par une assurance sans limites, comme si elle prononçait l’évidence. « Pourquoi ça ? »« Comme pour la Vie et la Mort. Il faut que la personne ait la couleur de cheveux inverse de toi. » Feiya souffla un rire, tout en contemplant ses essais de peinture. De tous ses échantillons, son préféré restait l’azurite. On l’appelait aussi bleu de montagne, ce qui était fort à propos compte tenu de leur environnement. Ce pigment avait une teinte fascinante. Elle le prêterait à Yuan. « Et les roux, alors ? Comme Hanaé. Il n’y a pas de couleur inverse à elle. Elle est condamnée à rester seule à jamais ? » « Son maître aura les cheveux verts. Ce n’est pas commun dans beaucoup de races, mais ça doit pouvoir se trouver. »« Et si je suis chauve ? »« Dans ce cas-là ce sera ta couleur de sourcils qui décidera. » Yuan avait réponse à tout. Cette théorie de compatibilité dépendant de la couleur de cheveux, elle l’avait inventée hier, pour palier l'ennui.

« J’espère que mon maître ne sera pas blond, juste pour te contredire. » L’intéressée ne parut pas se vexer, se contentant de jouer du grelot. « Tu comptes charmer tout le monde en jouant de ça ? » Les deux s’échangèrent un sourire, sans trop de raisons. Elles avaient tissé un lien d’amitié profond, et chacune donnait une confiance sans limites à l’autre. « Moi, au moins, je n’ai pas à transporter une harpe lourde. Stefan doit être fatigué, de tirer la charrette. » Feiya feint l’offense. « Tu pourrais lui prêter ta gourde comme moi, mais tu préfères lui gratter les joues. » En effet, l’étrange orine avait répété ce geste plusieurs fois. « Je me suis dit qu’à sa place, la première chose qui me dérangerait serait de ne pas pouvoir me gratter. Il a tout le temps les mains occupées. »

On toqua trois fois à la porte, lentement. « C’est Stefan. » Les deux femmes eurent un regard complice. Comme le voulait l’expression : « quand on parle du kitsune, on voit l’une de ses queues », ou quelque chose dans ces eaux-là. L’homme entra, jaugeant d’un œil les orines. Il était compétent, et n’avait pas à se plaindre puisque le voyage s’était déroulé sans trop d’écueils jusqu’ici. Cela dit, il ne pouvait qu’avoir hâte que cette corvée se termine. « On n’a pas de quoi payer l’auberge pour bien longtemps. »« Dommage, on aurait aimé pouvoir découvrir les thermes d’ici. »« Vous en aurez l’occasion. J'ai demandé aux locaux, et on sort d'une sorte de phase capricieuse de la météo - Rashkanar, et il y a beaucoup de tempêtes de neige ces temps-ci. Donc… il va falloir rester un temps. J’ai commencé à faire du porte-à-porte en ville. Aucun ne veut prendre une paire d'orines, mais ils sont deux à m’avoir proposé d’héberger l’une d’entre vous. » En dehors de leurs terres natales, le duo d’orines n’avait jusque là jamais été séparé à plus de cinquante mètres. Néanmoins, elles restaient autonomes. L’expérience allait sûrement être enrichissante, et les orishas semblaient être de bons hôtes.



Yuan était installée dans cette maison depuis un jour. Il était prévu de reprendre la route jusqu’au Lac Bleu, initialement. Toutefois, la météo n’était pas clémente et Stefan avait déjà longuement discouru pour expliquer à ses protégées pourquoi rester ici un peu plus longtemps serait nécessaire. C’était un mercenaire, mais parfois, il devait prendre goût à cette position paternaliste. En fin de compte, Feiya avait été accueillie à l’autre bout du village, dans une humble demeure où habitaient collectivement une dizaine de personnes. Yuan, quant à elle, vivait la situation inverse. Son hôte était un vieillard taciturne, errant dans une maison à plusieurs étages. Cependant, il n’était pas désagréable, et l’orine faisait de son mieux pour ne pas déranger sa tranquillité. Il devait être scientifique, historien, ou simplement savant. Elle aurait adoré lui poser des questions sur sa profession, mais l’homme avait l’air de tenir ses travaux en haute estime, et ne sortait jamais ses papiers de son bureau. À bien y réfléchir, elle aurait sans doute préféré vivre entassée avec une masse d’individus. Il y avait dans la cohabitation forcée quelque chose d’amusant, et c’était une situation à vivre au moins une fois dans sa vie.

« Vous peignez à l’huile ? » Yuan se retourna subitement. Son hôte avait descendu les escaliers sans un bruit. « Ouvrez bien les fenêtres. On aura froid mais… tant pis, c’est mieux que de s’étouffer avec les vapeurs des solvants. » L’orine hocha de la tête frénétiquement, ce qui lui donnait sans doute l’air un peu bête. Elle trouvait simplement les vieilles personnes intimidantes. Fascinantes, aussi. Sa mère était l’une des seules femmes de Maëlith portant l’apparence d’un âge mur. Cependant, il était incroyable de constater à quel point ces personnes ridées étaient communes, en dehors des territoires de sa race. Elles portaient en elles quelque chose de sage, quand bien même beaucoup d’individus plus âgés qu’eux paraissaient avoir la vingtaine.

« Vous ne vous êtes jamais présenté. » La remarque s’était échappée de la bouche de Yuan. « Vous non plus. » C’était vrai. Des mots avaient été échangés, sans que quiconque ne pense à ces formalités. « Yuan Sidiun. »« Orüsleg Minnshäler. » Voilà qui avait l’air difficile à prononcer. Les orines avaient pourtant des cours, sur ces points de détails là. Savoir s’adapter à son maître était essentiel. « Enchanté. »« Moi de même. » La jeune femme répondait immédiatement, avec un air un peu béat. Elle regarda son hôte se diriger vers les escaliers, le dos courbé. Il n’avait rien pris ni fait en bas, et était certainement venu uniquement pour cette esquisse de conversation — et pour lui demander d’ouvrir les fenêtres —. Se sentant coupable à l’idée de le voir monter deux étages jusqu’à son bureau sans le retenir un peu plus au rez-de-chaussée, elle lança la première phrase qui lui passa par l’esprit. « Vous travaillez sur quoi ? »

Le vieillard se retourna, faisant un regard rieur. « Longue histoire. Des artefacts sorciers basés sur l’orishalque, ça ne te dit rien, hein ? » Yuan hésita un instant. « C’est une question rhétorique ? »« Oui. C’est normal que tu n’en saches rien, ce sont de vieux travaux que presque personne n’a étudié. Je complète les plans de l’un d’eux, même si je ne sais pas encore à quoi il est censé servir. » L’orine était intéressée, mais ne savait pas vraiment comment l’exprimer. Elle se tourna un peu brusquement vers la cheminée, les grelots de ses habits tintant à travers la maison. « Ils datent de quand ? »« Difficile à dire, ce sont des idées innovantes qui n’ont jamais été mises à exécution, donc je n’arrive pas à situer dans un des courants scientifiques des sorciers. C’est probablement avant la naissance de Nementa Corum. » Le vieil homme se rapprochait lui aussi du feu, tout en continuant son explication. « Je ne pensais pas que l’artefact ait jamais vraiment marché, je me disais que si ça avait été le cas, les sorciers en auraient sûrement trouvé l’utilité depuis. Mais il semble qu’il est toujours effectif. C’est juste que son inventeur a dû juger bon de ne rien diffuser, sans doute parce que ça n'est pas aussi impressionnant que ça. Enfin, c’est dur à dire. » Il souffla, le visage indifférent.

« Et… l’artefact est installé ici ? » Yuan essayait de faire la conversation, sans jamais savoir si ses tentatives étaient efficaces. « Installé ? Non, il est bien plus petit. La partie que j’ai récupérée prend la forme d’un bijou. Les orines sont compétentes en ce domaine, non ? Tu pourrais aider. »« Plutôt, oui. Je peux monter le voir avec vous ? » En guise de réponse, il sortit de sa poche une sorte de goutte dorée, aux symboles variés. Elle ressemblait à une boucle d’oreille.

Yuan eut un grand sourire. « Oh, la gravure est un motif Tao-Tie ! » L’orisha la fixa d’un air interloqué. « Pardon pour l’enthousiasme, c'est juste que ça m'est familier. Chez moi on apprenait ça, en cours d’art. C’est un motif traditionnel. Il est inspiré par une créature vorace ! » Le vieillard avait dans son regard un état d’âme sur lequel il était facile de mettre le doigt : la curiosité. « Laquelle ? »« Eh bien, c’est… »



Les deux passèrent l’heure qui suivit à discuter sur divers sujet, si bien que le feu perdit en intensité et s’éteignit, laissant l’air se rafraîchir. L’hôte de Yuan, quoiqu’un peu timide, se révélait être d’excellente compagnie.

La poignée de la porte du jardin grinçait. Les fenêtres étant ouvertes, on put l’entendre depuis le rez-de-chaussée. Orüsleg vivant seul, il ne pouvait entretenir l’entièreté de sa demeure, et n’avait pas pris le temps de remettre à neuf l’extérieur. Les anciennes maisons faisaient toutes sortes de bruit, mais il s’agissait là de quelqu’un qui avait enclenché la poignée de lui-même. « Je vais voir, ce doit être un voisin impoli. » Le vieil homme partit ouvrir la porte d’entrée. Toutefois, en quelques secondes, l’atmosphère changea drastiquement. Ce n’était pas simplement le froid hivernal qui s’invitait un peu plus dans le chalet.

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Mer 10 Juin 2020, 13:58


Crédits : Tyler Smith
« Cours ! » Yuan sursauta, renversant d’un geste brusque un flocon d’essence d’aspic. Ce produit-là coûtait une fortune, et elle n’avait pas le luxe de pouvoir s’en procurer un autre. Visiblement, il allait falloir arrêter la peinture à l’huile. Toutefois, à peine cette pensée eut-elle traversé son esprit que l’orine vit deux silhouettes massives pousser la porte. On ne lui avait pas demandé de se dépêcher pour rien. En quelques mouvements, la situation avait radicalement changé.

Orüsleg et la jeune femme s’étaient empressés de monter au plus haut étage. Les brutes qui les poursuivaient avaient été ralenties par tous les obstacles qui avaient pu leur être jetés au visage. Un chevalet de peinture, une tasse, des livres : tout y était passé. Yuan ressentait une adrénaline sans précédent, alimentée par sa peur. Elle manqua plusieurs fois de trébucher sur l’immense tissu qui lui servait de veste. En d’autres circonstances, elle aurait ri de ces maladresses, mais cette fois-là était différente. L’orine ne savait rien de la situation et de leurs poursuivants, mais elle et son hôte étaient déterminés à ne pas se faire attraper. En moins d’une minute, les deux avaient rejoint le bureau d’Orüsleg et fermé à clef la porte derrière eux.

Yuan n’avait jamais vu cette pièce durant son court séjour ici. Le bureau du chercheur était en désordre, aucun angle n’étant épargné par l’épidémie de feuiles éparpillées. Il semblait travailler sur des sujets divers et variés. L’orine se sentait lente et inutile, à faire ce genre de constats alors que la situation était au plus mal. Aucune idée ne lui venait à l’esprit : elle était simplement spectatrice d’un drame. Est-ce que leurs poursuivants la voulaient, elle ? Toujours craintive, elle se retourna en entendant un bruit de grattement.

C’était Orüsleg. Il déplaçait une armoire contre la porte, pour la bloquer. « Qu’est-ce qu’ils nous veulent ? » Trop occupé, le vieillard n’eut pas le temps de répondre à temps. De lourd coups contre le bois vinrent signaler que les assaillants étaient proches. Sans doute ne pourraient-ils pas à la fois enfoncer la porte et renverser le meuble… en vérité, l’orine ne savait que trop peu de choses sur ces situations. On lui avait appris à pratiquer diverses formes d’art, pas à survivre à une attaque surprise dans un chalet cossu de l’Edelweiss enneigé.

« On veut un objet que vous gardez. Un bijou en forme goutte dorée. Donnez-la nous. » Un de leurs agresseurs s’était décidé à communiquer. « Quelle goutte dorée ? À quoi est-ce que ça ressemble ? Elle sert à quoi ? » Orüsleg essayait de gagner du temps, en feignant l’ignorance. S’il parlait assez fort pendant assez longtemps, le reste du village finirait par être alerté. Cela dit, avec la tempête de neige, même ses voisins les plus proches n’oseraient pas se déplacer jusqu’à sa maison.

Le vieillard posa le bijou sur la table et murmura quelques mots à Yuan. « Prends-la. S’ils la veulent, c’est qu’elle doit être plus importante que ce que je pensais. Il ne faut qu’ils y aient accès, je peux mentir. » Le premier instinct de l’orine serait de donner directement l’artefact aux criminels, mais elle rejoignit l’avis du chercheur. Ce serait égoïste, de laisser un objet potentiellement dangereux à ce qui semblait être des maléfiques. Maintenant était le moment où jamais de se montrer héroïque. Ses instructrice avaient toujours prêté énormément de qualités au courage.

« Je pense savoir comment on peut faire. » Yuan cherchait dans les tiroirs, afin de récupérer les premiers outils de précision et de découpage qu’elle trouverait. « Il faudrait que je puisse partir prévenir de l’aide… vous avez un drap ici ? »« Non. » L’instant d’après, il la vit retirer son immense veste. L’on etendait ses grelots tinter, encore une fois, mais la mélodie sonnait bien différémment. « Vous l’occupez, j’utilise les lambeaux de ma veste pour descendre en sécurité, et vous gardez les grelots pour faire semblant que je suis toujours sur place. C’est une bonne idée ? » Les deux murmuraient à peine, par peur d’être entendus. « Soit. Je n’ai pas de fenêtre à cet étage. Essaye de descendre par la cheminée. » Yuan acquiesçait. Cela impliquait de monter sur le toit. Il y avait des techniques moins risquées, mais elle était fluette et pourrait certainement atteindre le foyer éteint du feu. Ensuite, il lui faudrait partir par la porte discrètement et appeler à l’aide une fois à une distance raisonnable. Il ne restait plus qu’à essayer de mettre en application ce plan.


L’orine était blottie entre les pierres. Alors qu’une tempête de neige faisait rage et que le feu était mort depuis des heures, les parois de la cheminée étaient toujours brûlantes. La sensation était pour le moins désagréable, mais Yuan serrait les dents et continuait son avancée. Elle avait peu ou prou sécurisé cette redescente, se reliant au toit de la cheminée avec les tissus de sa veste. Sans doute que ce n’était pas nécessaire, mais manquer de précaution en ce moment serait faire preuve d’une bêtise sans précédent.

La jeune femme mit enfin les pieds sur le foyer de la cheminée. C’était brûlant, mais l’environnement restait trop confiné pour qu’elle puisse réagir. Il devait rester quelques braises en dessous du charbon. Après plusieurs contorsions maladroitement effectuées, elle put enfin retrouver le décor familier – et moins étroit – du rez-de-chaussée. L’odeur de lavande était forte, à cause de l’essence d’aspic renversée plus tôt. L’on ne voyait pas grand-chose, par manque de source de lumière. Il y avait un faible éclairage, un peu plus loin. Il était difficile d’en discerner la source, mais cela semblait être une lampe à huile. Elle n’était pas là plus tôt, et avait dû être amenée par les voleurs pour les aider dans leur recherche. La lumière qu’elle procurait permettait de faire plusieurs constats. Tout d’abord, chaque tiroir avait été ouvert, fouillé et vidé. Son chevalet de peinture était toujours là, mais leurs assaillants avaient retourné la toile. Sans doute pensaient-ils que la goutte d’or avait pu y être cachée. La pièce entière semblait avoir été passée au peigne fin.

Yuan se précipitait vers la sortie, quand elle sentit une vive douleur lui saisir le pied. Un charbon ardent s’était logé entre deux orteils. Par réflexe plus que par choix, elle sursauta et le combustible incandescent termina sa course sur le sol. Il était difficile de savoir où l’on mettait les pieds : le foyer de cheminée ne produisait qu’une faible lueur, et le reste de la pièce était plongé dans la pénombre. Alors, l’orine se saisit de la lampe à huile.

Malheureusement pour Yuan, le bruit de l’une de ses acrobaties avait dû attirer l’attention. Un des mercenaires descendait l’escalier à toute vitesse. Elle était censée quitter la maison sans alerter les brutes, mais ce n’était plus envisageable. Espérant intimider le voleur, elle fit un geste brusque. La lampe qu’elle tenait s’écrasa contre le sol au même moment. Ce serait une course contre la montre, et elle devait prévenir le reste des villageois avant de se faire attraper. Sans se retourner, et sans se douter de ce qui allait arriver, l’orine passa la porte principale.



« Vite, allez au chalet d’Orüsleg ! Il est en danger, des gens l’attaquent ! » fût à peu près la seule chose que Yuan put dire, pendant quelques minutes. Elle avait couru dans la neige, ses pieds passant du brûlant au glacé non sans douleur. Une partie conséquence du village avait été alerté, et une foule se précipitait vers la demeure du vieil homme. L’orine, quant à elle, continuait de crier à qui voulait l’entendre d’aider, mais fut arrêtée par nul autre que Stefan.

« On a compris. Qu’est-ce qu’il s’est passé ? » Leur protecteur avait l’air de s’être réveillé il y a quelques minutes seulement. Il tenait fermement les épaules de la jeune femme, pour éviter qu’elle ne se mette à courir.  « Le chalet d’Orüsleg a été attaqué ! »« Oui mais pourquoi ? » Yuan n’arrivait pas à se ressaisir. Le drame s’était passé il y a trop peu de temps pour qu’elle soit calme. « Ils essayaient de récupérer quelque chose. Un bijou qu’il avait. » Dans un moment de clarté, elle omit volontairement de mentionner qu’elle était désormais en possession dudit objet. Il valait mieux n’en parler à personne, si ce n’est Feiya.

« La maison prend feu, là… » Le protecteur pointait du doigt le chalet d’Orüsleg. Au milieu de la tempête de neige, il semblait pourtant dévoré par les flammes depuis le rez-de-chaussée. « Ils n’ont peut-être pas trouvé ce qu’ils cherchaient. Ils maîtrisaient le feu ? » Yuan se figea sur place. « Je ne sais pas mais… » Mais l’essence d’aspic était inflammable, et elle en avait renversé plus tôt dans la soirée, puis avait jeté une lampe à huile. Le calcul était évident. Elle aurait pu dire « j’ai certainement mis le feu à cette maison »[/color] sans douter, mais articuler ces mots lui brûlait la gorge. Une odeur de lavande fantôme revenait à ses narines.

« Bon… ce n’est pas nos affaires. Viens, on va chercher Feiya et partir d’ici avant l’aube. Ils auront beaucoup à faire après avoir chassé les voleurs. On ne va pas prendre plus de leur temps. » Le protecteur n’avait pas remarqué que Yuan était devenue pâle, et que son visage s’était raidi. Il s’était simplement dit qu’elle avait fini par se calmer, sans se douter du chaos interne qu’elle vivait. La jeune femme ne prit pas même la peine de répondre, ou de formuler une objection. Son cerveau lui disait « en pleine tempête de neige, partir semble risqué », mais elle semblait déconnectée de ces considérations. L’orine essaya, dans un second temps, de se réconforter. « Avoir mis le feu à une maison, ce n’est pas si grave, non ? Et puis, ce n’est pas de ta faute. Enfin si, c’est à cause de toi, mais tu n’avais pas de mauvaises intentions. » Ces pensées n'étaient pas convaincantes.

Comme une statue animée, elle avait suivi son protecteur. Les deux avaient rendu visite au foyer qui hébergeait Feiya, et récupéré l’orine. Puis, ils étaient partis. Yuan n’avait pas pipé mot, même lorsque son amie avait essayé de lui poser des questions. Elle avait fini par calmer ses pensées, cependant. Maintenant, elle était à l’affût d’une chose : Orüsleg. De la même manière qu’elle avait pu voir sa défunte mère, elle se savait capable de visualiser – de temps à autre – les autres trépassés. Si le visage ou la silhouette du vieil orisha lui apparaissaient, quelque part au loin dans la tempête de neige, Yuan serait brisée et se sentirait responsable de la mort d’Orüsleg. Dans le cas contraire, si elle ne voyait rien de semblable, elle finirait par relâcher sa vigilance une fois loin des montagnes. Plus les heures passaient, et plus le trio s’approchait – avec difficulté – des Terres du Lac bleu, plus cette seconde possibilité devenait probable. Quand le groupe atteint un hameau à quelque lieues de Vervallée, l’orine poussa un soupir de soulagement. S’il n’était pas apparu, c’est qu’il devait encore être en vie. En temps voulu, il faudrait lui rendre la goutte d’or.

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Siruu Belhades
~ Sorcier ~ Niveau III ~

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Siruu Belhades
Mer 05 Aoû 2020, 17:18


Crédits : Pietro Bernardi
Yuan inspectait le bijou, qu’elle avait jusque là gardé précieusement dans un de ses poings fermés. Il y avait de la suie sur sa carapace dorée : elle avait sans doute dû se salir les mains en descendant la cheminée. « Il faudra te laver, hein ? » Feiya parlait doucement. Elle n’attendait pas de réponse de la part de son amie : il fallait simplement la remettre en confiance. « C’est dommage, qu’on n’ait pas pu essayer les sources chaudes… en plus tu as laissé les pigments que je t’avais prêtés sur place. Ma pauvre azurite… »« Bleu montagne, pas azurite. » Yuan avait soudainement repris la parole. « Comme ça, à chaque fois que tu penseras à cette couleur tu te rappeleras de la fois où on a dû traverser une tempête de neige et fuir un village. »[/color] La seconde orine prit soin de ne pas prendre un air surpris.

« Tu ne veux plus visiter l’Edelweiss enneigée, hein ? »« Oui, forcément. Mais j’y reviendrai forcément un jour. Pour prendre des nouvelles de mon hôte et de sa maison. On est tous partis si vite, on ne sait même pas si les voleurs ont été attrapés. » Feiya haussa les épaules puis prit les mains de son amie. Elles étaient encore couvertes de suie. « Avec tout le village sur leur dos ? Bien sûr qu’ils vont se faire capturer. Les voleurs finissent toujours punis pour leurs crimes. » Elle ponctua sa phrase en fredonnant un air. « Tu penses à la chanson à laquelle je pense ? »

Une ballade traditionnelle orisha. Les orines apprenaient parfois ces choses-là pour se fondre dans la masse de n’importe quelle race. Partager une base culturelle avec son futur maître aidait, notamment afin de lui fournir une énigme personnalisée. « Les Orishas s’affranchirent de leurs crimes désinvoltes. ; Oh mais tout ça changea ; Ouvre bien ton esprit ; Ne te laisse pas avoir par ces… tromperies ? »« Duperies. Mais à part ça, c’est bon. » Elles étaient entrées dans ce hameau encore silencieuses, mais partageaient maintenant un sourire complice. Tout revenait à la normale, comme avant que le chalet ne soit attaqué. La seule différence, c’était que Yuan possédait maintenant une goutte d’or et, quelle que soit son utilité ou sa valeur, elle devait venir avec une part de responsabilité.

« On va loger dans une auberge à… hmm, quinze ou vingt minutes de Vervallée. » Leur protecteur, menant la marche, était resté silencieux depuis un certain temps. Son attention était bien assez occupée par la carte et les quelques papiers qui lui servaient de guides. Ils lui avaient été offerts par le gouvernement du Mars, afin qu’il puisse mener sa mission à bien. Certains Boräks originaires du continent naturel n’avaient jamais mis les pieds près du lac bleu : ils préféraient rester isolés, dans des zones où les visites demeuraient rares. « Et ensuite ? »« Ça, c’est à vous de le décider. »« J’aimerais bien travailler à Basphel. Il y a souvent des conférences et des visites de personnes importantes, il doit y en avoir qui sont sur la Liste. Et je pourrais donner des cours de solfège. » Yuan préféra ne rien ajouter à la conversation, pour se concentrer sur ses pensées. Où irait-elle ? Près de Feiya, en tout cas. Elle peinait à accepter que de la distance se créé dans leur amitié.



Le groupe s’était installé à l’auberge il y a plusieurs jours déjà. Chaque midi, alors qu’ils se sustentait au rez-de-chaussée de l’auberge, Stefan leur posait la même question. Il espérait que ce jour-là serait l’un des derniers qu’il passerait à pourrir ici.  « Vous avez une idée de potentiel Maître ? » Le mercenaire buvait lentement. De leur réponse dépendrait la suite de son programme. « J’aimerais bien croiser la route de Maximilien Eraël. Il est fort, intelligent et… c’est l’Obstiné, donc ça doit vouloir dire quelque chose de positif. Je ne sais pas vraiment comment il est, en fait. Mais aider les humains semble être une bonne idée. » Yuan laissait Feiya terminer sa phrase, hésitant timidement à ajouter une remarque. « C’est l’humain qui a deux ailes ? »« Oui. Il pourrait m’envoler partout, c’est pratique ! » Stefan se racla la gorge pour attirer l’attention de ses protégées. « Je ne sais pas s’il sait voler. Et… son anti-magie affecte le Lien, non ? »« En effet, ça rend la tâche plus compliquée. » Le mercenaire ne se sentait plus utile, récemment. Ici, elles ne risquaient rien, et elles ne semblaient pas prêtes de trouver leur Maître dans l’immédiat. Combien de temps devrait-il passer loin de son village, à barboter auprès de deux jeunes Orines qui n’allaient vraisemblablement pas se faire attaquer ? Le Marcus et son gouvernement payaient grassement les protecteurs pour leurs services, mais rares étaient les Boräk qui ne perdraient pas patience dans sa situation. « Avec ou sans Maître, vous allez devoir apprendre à vous débrouiller sans moi. » Le pavé venait d’être lancé dans la mare.

« Mais… Stefan, tu ne vas pas nous laisser ? » Les deux amies n’avaient pas hâte de se retrouver seules. Après tout, la dernière fois qu’elles avaient été un poil éloignées de leur protecteur, l’histoire s’était terminée sur une maison enflammée. « Pas tout de suite. Je reste encore une dizaine de jours. » Yuan tapotait sur l’un de ses grelots. Elle était anxieuse. « Il n’y a pas de danger, près du Lac Bleu. Vous êtes en sécurité. » Feiya acquiesçait. « Oui, on saura s’occuper de nos affaires toutes seules. »



Deux semaines avaient passé. Accrochez-vous bien, j'aime les ellipses. « Arrête de faire du crochet, on doit cuisiner. » Elles n’avaient plus assez d’économies pour se permettre de manger au restaurant intégré à l’auberge. Fort heureusement, on leur avait autorisé l’accès aux cuisines pour préparer leurs propres repas. « Mais, le bonnet rouge est presque fini ! »« Il attendra. Il ne fait pas froid. Et puis… tu as déjà ton bonnet vert, non ? » Le duo avait presque le même âge : un jour d’écart faisait de Yuan l’aînée. Pourtant, Feiya se comportait de manière plus responsable. « Oui, mais j’offrirais le nouveau à mon futur Maître pour la saison des neiges ! » Elle lançait un sujet intéressant.

« À ce propos… tu as déjà donné ton énigme à quelqu’un de la Liste ? »« Non, j’en ai trouvé un, mais je n’ai pas osé… mais ça viendra, il faut juste qu’on soit certaines que c’est le bon. » Feiya se figea, pensive. Une idée commençait à se former au sein de son esprit, mais elle devait encore en analyser les ramifications. Ou alors, elle pouvait toujours proposer ce plan l’air de rien. Après tout, ça ne les engageait à rien. « Je sais que Stefan a recommandé de rester en sécurité, mais… et si on cherchait à trouver nos Maîtres activement ? » Yuan n’était pas particulièrement inquiète, mais savait qu’il valait mieux suivre les directives des Muses. « Tant qu’on reste dans l’auberge ou pas loin, je suppose que ça devrait aller. »



Le rez-de-chaussée était noir de monde, en soirée. Yuan était moins nerveuse, maintenant que son énigme avait été posée. Parler à cet homme avait nécessité de rassembler énormément de courage, mais elle avait su relever le défi. « Quand même… c’était ton idée, tu aurais dû assumer et lui demander à ma place. » Elle avait eu peur de se faire ignorer. Fort heureusement, il était difficile de passer à côté d’elle sans être interloqué par le bruit incessant des grelots qui la suivaient quoi qu’elle fasse. « Tu es l’aînée, c’est ton rôle de prendre des risques ! »« J’aurais peut-être dû attendre de le connaître un peu mieux avant de poser l’énigme ? Il avait l’air incapable de répondre. »« Non. Franchement, tu as assuré. Ce Ptolémée Taiji n’était juste pas à la hauteur. » Elles ne savaient pas encore que seul un enfant pourrait répondre à l’énigme de Yuan. Les autres, aussi développée soit leur intelligence, ne trouveraient pas les mots. C’était un phénomène étrange, qu’elle ne comprendrait que bien plus tard.

Les deux Hanatsu commandèrent à boire, légèrement euphoriques. Yuan n’était plus aussi embarassée. « Je suis pas sûre que chercher un Maître dans un bar est une bonne idée, maintenant. »« Tu parles ! C’est la meilleure idée qu’on ait jamais eue ! »« C’est toi qui me l’a proposée, je suis pas responsable. »« Tu as accepé ! » Feiya se pinca la lèvre inférieure, imaginant quelques scénarios, du plus réaliste au moins probable. Elle n’aimait que les hypothèses risquées. « Puis, tu sais, ça pourrait tourner d’une manière intéressante. Tu pourrais très bien poser une énigme au hasard, puis paf : un type qui l’a entendue depuis l’autre bout de la pièce répond à la place de ton prétendant. Et tu te retrouves orine de Rogerald Vaughan-machin chose au lieu de Kaahl Paiberym. » Yuan prit une gorgée de thé, réfléchissant à sa réponse. « Et bien, ce serait le destin. »« Le destin est pas drôle, s’il te fait te lier à quelqu’un qui n’en vaut pas le coup. »« Est-ce que c’est si mal d’avoir un Maître lambda ? S’il est gentil et calme, moi ça me va. Je regarderais juste les étoiles avec lui, au calme. » Feiya haussa les épaules. « J’espère quand même être liée à quelqu’un de grand ou de majestueux. Mais… oui, l’essentiel c’est qu’il soit bon et gentil. »


« Yuan ? Tu t’es levée tôt… » La concernée sourit. Le zénith était passé depuis quelques heures déjà. « Tu t’es couchée tard. » Feiya s’était redressée, adossée contre le mur. Soudain, elle eut un spasme, comme si quelqu’un l’avait électrisée. « Où est l’argent ? » Son amie lui tendit la bourse qui leur était commune. Stefan gérait leurs dépenses strictement et, à son départ, leur avait conseillé de rester raisonnables. « Il n’y a pas tout… on a été volées ? » Les traits de Feiya étaient déformés par l’inquiétude. « Non, du tout ! On a été prudentes. J’ai juste acheté du tissu. »« Et pour combien tu en as eu ? »« Une pièce d’or. Et dix pièces de bronze. » La harpiste essaya  de lancer un regard sévère, mais elle était encore embrumée par son réveil. « Bon, je garderai l’argent à partir de maintenant. Ne fais plus de bêtises. » Yuan acquiesça. Elle avait beau être la doyenne  du duo – à un jour d’écart, elle reconnaissait volontiers que ce n’était pas la plus responsable. Parfois, elle regrettait que sa propre mère ne lui ait pas appris à être économe. On ne manquait jamais de rien, à Maëlith. Il était alors difficile de ne pas voir le monde extérieur comme un grand magasin de jouets.

« Écoute… le vendeur était adorable, donc il acceptera sûrement si je rends les tissus contre l’argent. Le marché n’est pas loin. » Feiya semblait considérer l’option. Elle avait peur que son amie surestime la générosité du commerçant. Peut-être que si elles étaient deux, il serait plus facilement intimidé et accepterait le retour ? « Je t’accompagne. » D’un geste de la main, Yuan l’empêcha de se lever. « Pas besoin, je peux me débrouiller seule. Prépare-toi pendant ce temps-là. Je reviens vite ! » Sur ces mots, l’aînée tournait les talons en se précipitant vers la porte.

Et Feiya se fit enlever dans la demi-heure qui suivit.

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