Jämiel refermait la porte de l'entrée dans un claquement involontaire, se figeant un instant sur place lorsque le battant se ferma brutalement derrière lui. Tant pis. Au pire ça ne fera que du bruit et ce ne serait pas demain que la maison risquerait de s'effondrer à cause de ça. Puis, en plein milieu de journée, ce n'était pas comme s'il risquait de réveiller quelqu'un. Tout le monde était bien trop occupée dans leurs affaires pour se permettre de faire une sieste de ne serait-ce qu'une quinzaine de minutes. Le jeune Alfar se dirigea rapidement vers la cuisine et y attrapait une pêche avant de s'échapper vers le jardin. Du moins était-ce sa volonté première. Passant devant le salon, il y découvrit sa mère en pleine réflexion devant un papier dessin et un morceau de parchemin. « Qu'est ce que vous faites ? ». La Nerethi leva le visage vers son fils et lui offrit un fin sourire. « Jämiel. ». Elle posa la plume qu'elle tenait distraitement du bout des doigts pour inviter, d'un geste souple de la main, ce dernier à s'avancer. « La famille s'agrandit d'un neveu. » commença-t-elle d'une voix neutre malgré l'événement. « Je me demandais seulement de quelle façon féliciter ta tante pour cette naissance. Ou même si c'était seulement nécessaire que je le fasse une nouvelle fois. ». Jämiel marqua un temps avant de demander « C'est une obligation ? Je veux dire, on ne l'a jamais fait avant. Qu'est ce qui est différent ? » - « Il s'agit de ma sœur cette fois, et elle a eu la bonne idée de le faire, elle, pour votre naissance à ton frère et toi. » répondit-elle toujours de cette voix monocorde, presque blasée. « Ah. » fut la seule réponse du Sarethi. Il n'y avait rien d'autre à dire. Venant d'un Déléis, il n'était pas étonné, quoi que cela faisait longtemps que l'un d'entre eux n'avait pas été béni d'Edel. « Mais sa descendance est deux fois plus nombreuse que la mienne et ça, je suis certaine qu'elle n'y a pas songée. Ou s'en moque totalement, c'est tout à fait possible aussi. ». A l'évidence, la relation entre les deux femmes n'était pas au beau fixe. Son regard était posé sur son fils, imperturbable, ce dernier n'osant alors faire un seul mouvement. Finalement un sourire se dessinait sur les lèvres de la peintre. « J'ai une idée. Tu veux bien aller trouver Alastar pour moi ? ». Jämiel confirma la demande d'un signe de tête, prenant finalement la direction de sa chambre pour y poser son sac avant de repartir chercher son frère.

La famille au complet, assise autour de la table comme assistant à une réunion de crise, les trois hommes fixaient la mère de famille curieusement. « Et donc, quel est l'objectif ? » fit Líadan, imaginant tout ce qui pouvait passer par l'esprit de sa femme. « Nous allons fêter une naissance. » répondit son épouse comme elle remplissait le parchemin autrefois vierge d'une façon telle que cette "fête" semblait être une évidence. « Une naissance. Tiens donc. » rétorquait l'universitaire en rejoignant Ailill, jetant un regard par-dessus son épaule sur ce qu'elle pouvait bien écrire tandis que leurs progénitures se jetaient mutuellement un regard interrogatif. « Et en quoi... Cerys ? A-t-elle droit à ces honneurs ? » - « Elle a que je commence à être agacée de devoir souhaiter "tout mes vœux de bonheurs" chaque fois que Blaanid nous gratifie d'un nouveau-né alors qu'elle sait très bien que ce ne sont que des mots sans le moindre sentiment. Nous allons donc l'inviter, fêter la naissance de cette enfant en grande pompe et lui expliquer cordialement que je la féliciterais le jour où l'un d'eux quittera Mornhîngardh. ». Un sourire amusé se dessinait sur les lèvres du patriarche. « Elle va le prendre mal. Ce sera elle qui va rire de toi si ses enfants emménage à Tinnugardh avant les nôtres. ». Il avait dit cela sans se soucier de ces derniers qu'il savait leur attention pleinement portée sur leurs parents. Évidemment qu'ils ne laisseraient jamais ces gosses leur prendre leur place. « A quelle heure rentre Bellone, Jämiel ? » reprit Líadan en se tournant vers ce dernier. « Je ne sais pas. Elle travaille dur pour faire ce qu'elle aime. » répondit-il d'un ton sec. Pour une fois que c'était pour une passion propre et non pour lui qu'elle agissait, il n'allait pas l'empêcher d'entretenir sa flamme. « Ce n'est pas grave. On ne fera ça que d'ici demain ou après-demain, qu'ils aient le temps de se préparer. » - « La maison sera pleine de bibelots festifs pendant deux jours ? » répliqua Alastar en arquant un sourcil. « Oh, on se limitera au jardin, qu'est ce que tu en dis ? » répondit Líadan en se tournant vers son épouse. « Ça me paraît convenable. Inutile de leur faire visiter inutilement. »