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 [Q] - Les plumes écarlates

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Priam et Laëth
~ Ange ~ Niveau III ~

~ Ange ~ Niveau III ~
◈ Parchemins usagés : 3867
◈ YinYanisé(e) le : 02/02/2018
◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam et Laëth
Mar 04 Fév 2020, 10:44


L
es plumes écarlates.

Solo avec Priam



Partenaire : Solo.
Objectif/Intrigue : Après avoir trouvé des Omije, Priam retourne aux Jardins. Sur sa route, il s’arrête pour dormir chez l’habitant. Il s’avère que celui-ci emprisonne des Anges pour récolter leurs plumes afin de faire de la literie. Le fils de Réprouvés choisit de venir en aide aux jeunes Ailes Blanches. L’occasion de découvrir l’insoupçonnable et de faire éclore de nouveaux projets.
Merci à Kyra pour le gage nastae


« Je vous en prie, entrez. » Priam jeta un dernier regard par-dessus son épaule. Yuvon s’était réfugiée sous l’abri du pré. Les chèvres la regardaient avec curiosité, mais sans animosité. Il entra. La porte se referma derrière lui. Son hôte lui sourit. C’était un homme dont l’apparence avoisinait les quarante ans. Quelques cheveux gris décoraient la masse sombre de ses boucles et se perdaient dans une barbe parfaitement taillée. Ses vêtements grossièrement découpés, qui laissaient imaginer sa carrure, rappelaient ceux de Lumnaar’Yuvon – c’étaient des habits de fermier. Il marchait pieds nus. « Encore merci. » Il entreprit de retirer son surplus d’affaires – manteau, sac, chaussures. « C’est bien normal ! Je n’allais pas vous laisser mourir de froid dehors. J’espère que votre cheval sera assez bien pour la nuit. Tenez, donnez. » fit-il en tendant les bras vers lui pour récupérer ses biens et les ranger. Le fils de Réprouvés obtempéra et acquiesça. « Elle est rustique, elle tiendra sans problème. » - « Fort bien, fort bien. Vous avez faim, peut-être ? » - « Ça va, il me restait un repas. » - « Bien, bien. Bon, faites comme chez vous, je vais préparer une chambre ! » - « Merci. » L’homme s’éclipsa avec la discrétion qui semblait le caractériser. Son invité observa la pièce. Les murs en bois conféraient un aspect chaleureux à la maison. Les épaisses tentures aux fenêtres, dans des tons pourpre, et le mobilier coloré ravivaient le salon. Çà et là, des cadres étaient accrochés. Priam s’en approcha, curieux. C’étaient de simples scènes de vie et quelques natures mortes. Des gardiens d’oies, des vachers, des enfants courant dans une rue, une boulangère menaçant de frapper un chat à l’aide de son rouleau à pâtisserie, une composition de fruits, des gerbes de blé, un vase éclatant de fleurs… Comme il entendait son hôte revenir, l’Ailé pivota. « Je vais raviver un peu le feu, il ne fait plus très chaud. » - « Ne vous embêtez pas, ça ira très bien. » - « Vous êtes sûr ? » - « Oui, je suis assez rustique aussi. » répondit-il dans un sourire amusé. Il ne faisait jamais très froid à Lumnaar’Yuvon, mais il faisait suffisamment bon chez le Magicien. « Qu’est-ce qui vous amène par ici… Priam, c’est ça ? » L’intéressé acquiesça. Ils s’étaient échangé leurs prénoms lorsqu’il avait frappé à sa porte. Vladémir. « J’effectuais une mission pour les Anges. » Les traits de son interlocuteur se détendirent. « Aaah, vous êtes un Ange ! C’est bien ce que je pensais. » Priam grimaça. « Ça se voit tant que ça ? » Le Mage eut l’air amusé. « On voit bien que vous n’êtes pas un Magicien, en tout cas. Et puis, c’est plus rare que près de Vervallée, ici, les Anges, alors on vous repère assez facilement. » L’Ailé hocha la tête. Un petit silence s’étendit, puis il demanda : « Vous élevez des oies, c’est ça ? Il me semble en avoir vu en passant. » - « Oui, c’est ça ! Je fais des oreillers et des couvertures grâce à leurs plumes, et je vends le reste au boucher du coin. » Il prit place dans un fauteuil et invita l’Ange à faire de même. « Enfin, il y en a quelques-unes qui restent plus longtemps que d’autres, voire qui ne partiront jamais… Avec le temps, on s’y attache et on a du mal à s’en séparer, vous voyez ? Elles sont devenues des sortes d’animaux de compagnie. » La tendresse qui transparaissait dans ses yeux fit sourire Priam. « Oui, je vois. Je connais pas mal d’agriculteurs qui ont pu être confrontés à ce problème. » - « Ah oui ? » Et la conversation perdura jusqu’à ce que la fatigue ne les étreignît. Chacun alla se coucher. Voilà, c’était un Magicien aussi et il était parfaitement sympathique aussi, tenta de se raisonner le fils de Réprouvés, dont la colère, contre Ulrich, contre les commères et contre ce foutu Baron, persistait malgré tous ses efforts.

***

« Chut, faites pas de bruit. » Priam grogna. « Ah ! Il se réveille ! » - « Mais chut ! » Son crâne le faisait souffrir. Il avait l’impression que l’on y avait glissé des milliers de lames et que quelqu’un s’amusait à le secouer. « De l’eau, apportez de l’eau ! » Des cliquetis, des objets qui tombent, des crissements. « Là, merci. » Une odeur forte, suffocante, abondait. Il toussa violemment et se tourna sur le côté pour se recroqueviller. Ce n’était pas que sa tête ; tout son corps se contractait de douleur. « Il faut que tu boives. » Les voix semblaient parvenir d’une autre dimension. Une ouate épaisse les entourait et les rendait diffuses. Au contact d’une main sur son bras, Priam frémit. « Bois. » La poigne se referma et le tourna doucement sur le dos. Quelqu’un l’attrapa par les épaules et le redressa, tandis qu’une autre personne le saisissait par la mâchoire et serrait fermement – sans lui faire mal – pour l’obliger à ouvrir la bouche. Le premier filet d’eau coula comme un feu. Il s’étouffa quelques secondes, fut secoué de toux, puis réussit à avaler. Le reste glissa avec plus de facilité et moins de dommages : à la brûlure succéda la fraîcheur. Il voulut parler, mais aucun son ne sortit. Ses yeux s’entrouvraient sur un monde flou. Seules des tâches colorées aux contours édulcorés dansaient devant ses rétines. Il cligna des paupières. « Bonjour. » Les sons grésillaient à ses oreilles, altérés par le sang qui y grondait. « Hn. » souffla-t-il entre ses dents. Quelque chose scintilla et, doucement, il commença à se sentir mieux. Magie de soin, lui chuchota sa raison. « Comment tu t’appelles ? » - « … Priam. » parvint-il à dire alors que ses pensées se réordonnaient. « Alors bienvenue, Priam. Si on peut dire ça… »

***

« Trois semaines ? » - « Plus ou moins… On a du mal à compter les jours, dans cette cave. La seule lumière naturelle, c’est celle qui provient du salon, quand il ouvre la porte. Et je crois qu’il ne vient pas tous les jours. » Priam, abasourdi, écoutait les précisions qu’apportaient les Sonu. Ils étaient six. Ils venaient de la Terre Blanche ou de Sceptelinôst. Sur le chemin qui devait les amener aux Jardins, celui qui n’était plus un Magicien les avait interceptés et emprisonnés. Des boules de lumière magique pendaient du plafond et éclairaient leurs visages fatigués et apeurés. Ils étaient sales et semblaient mal en point. Leurs ailes, apparentes, avaient été nouées à l’aide d’épais morceaux de cuir. De larges croûtes recouvraient des pans de chair à vif. Des chaînes enserraient leurs chevilles, tout comme les siennes. Il sentit la colère germer dans son cœur, et cette fois-ci, il ne tenta pas de la brimer. Elle était Juste. « Et personne ne s’est jamais échappé ? » - « Tous ceux qui ont essayé sont morts. » - « Et pas qu’eux… » murmura une petite voix, presque couinante. « Comment ça ? » Les jeunes Anges échangèrent des regards, puis celle qui l’avait soigné prit la parole : « Si notre duvet ne se refait pas assez vite, il nous tue. Et certains ne résistent pas à ses séances de… déplumage, comme il les appelle. » A l’aide de son ton et du frisson qui transparaissait jusque dans ses iris clairs, il n’était pas difficile de deviner que ces fameuses séances ressemblaient plus à de la torture qu’à autre chose. Le fils de Réprouvés serra les dents. Ce serait trop bête de mourir ici. Il avait trouvé les Omije. Tout ce périple pour rien ? Il refusait cette possibilité. Quant à eux, il ne pouvait se résoudre à les abandonner ou à les laisser mourir sans rien tenter. Certains étaient de son sang, d’autres de son peuple. « Et tu vas être emmené aussi… » La petite voix avait repris. Priam en chercha la source : dans un recoin de la pièce, ce qu’il reconnut comme étant un jeune homme était recroquevillé. Il ne ressemblait plus tout à fait à un être humain. « Si tu résistes, il utilisera son don pour faire sortir tes ailes. Puis il arrachera les plumes et… et… » Le faciès de la créature disparut dans ses genoux, et il se balança d’avant en arrière. « Ardem. » La soigneuse, qui tenait apparemment le rôle de guide, s’approcha et posa une main apaisante sur l’épaule du traumatisé. Le brun se redressa, assis, puis se leva. Les pieds fermement ancrés dans le sol, il déclara : « Je ne compte pas rester ici. Je vais trouver une solution, et vous sortirez de là aussi. » Il ne croisa que des regards dubitatifs, au fond desquels l’espoir n’osait plus germer. La détermination baignait le sien. Il ne les laisserait pas mourir entre ces murs.

***

« Aaah, il est réveillé. » Dès que la porte avait grincé, tous les Anges s’étaient réfugiés au fond de la pièce. Priam se tenait devant eux. Son cœur pulsait et ses muscles tendus lui criaient de se cacher, cependant, il voulait résister à cet appel de la lâcheté. Un sourire malsain collé au visage, Vladémir s’approcha. Ses yeux le détaillaient avec avidité. « Vous êtes un joli spécimen… J’ai hâte de voir vos ailes. Elles promettent… » Des menottes vinrent ceindre les poignets de l’Ange. Le Sorcier tenait une chaîne en métal. Il tira. L’Ailé ne résista pas et le suivit, sous les prunelles terrifiées de ses comparses. Il allait lui faire sa fête. Il ne venait pas de Lumnaar’Yuvon par hasard ; il n’était pas sorti des entrailles de sa mère pour rien. Son regard dur toisait le dos du geôlier.

La pièce qui lui servait d’atelier s’avérait savamment ordonnée. Chaque élément reposait à sa place, dans un ordre méticuleux à la limite de l’obsessionnel. Priam se laissa attacher à un mur. Son apparente docilité faisait sourire le Mage Noir. « Vraiment sage… Les autres vous ont prévenu que je suis plus… conciliant, avec ceux qui ne se rebiffent pas ? » En réalité, il réfléchissait. Il aurait peut-être dû tenter quelque chose avant. Comment se défaire des fers qui enserraient ses articulations ? Un rire secoua Vladémir, puis il se détourna pour s’emparer des premiers outils. Le brun tira sur ses chaînes, en vain. Elles étaient solidement accrochées. « Ne vous débattez pas. Votre douleur n’en serait que plus grande. Pas que cela me dérange, évidemment. Mais je préfère vous préserver. Sinon, vous devenez aigris, apeurés et colériques. Tout cela nuit à la beauté de vos plumages. » Il releva la tête vers sa victime et, dans un large sourire, ordonna : « Déployez-les. » Aucun mouvement. « Ah, on est tout de même un peu récalcitrant. Tant pis. » En fait, il paraissait presque réjoui. Raffermissant sa prise sur l’ustensile qu’il tenait entre ses doigts, il découpa le vêtement de Priam pour faire apparaître son torse et dégager son dos, puis glissa une main dans celui-ci. Le contact froid du métal le fit frissonner. Le fou se décala et leva les avant-bras : ses phalanges se tordirent et une douleur aiguë éclata entre les omoplates de l’Ange. Dans un grognement, il se cambra pour échapper à la souffrance qui lui broyait les muscles dorsaux et tira encore sur les chaînes. En dépit de sa volonté, il sentait ses ailes frémirent sous l’attaque de la lame, prêtes à se dévoiler. Bientôt, un cri lui fut arraché. Quelques secondes plus tard, malgré lui, ses appendices plumeux s’ouvrir de part et d’autre de son buste. « Aaaah ! » La douleur cessa. Son corps se détendit, mais la sueur perlait à son front et il respirait lourdement. Vladémir caressa les plumes blanches. « Superbes, superbes. » Il paraissait tout excité. Il approcha d’autres outils des ailes immaculées et commença son travail.

Message I - 1862 mots



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Priam et Laëth
Mar 04 Fév 2020, 10:57





C’était pénible et douloureux. Plus que ce que Priam aurait imaginé. Il se tordait sous l’assaut des instruments et laissait échapper des cris de souffrance. Il commençait à sévèrement regretter d’avoir voulu attendre d’être seul à seul pour s’en prendre à son tortionnaire. Il aurait dû tenter quelque chose dans la cave. En voulant étudier la pièce et repérer ce qui pourrait lui être utile, il avait aussi perdu du temps. Désormais, toute tentative lui paraissait plus difficile. Pourtant, il persévérait. Concentré, il tentait de faire se mouvoir une bouteille. Soulevée par télékinésie, elle se déplaça vers le Sorcier. Cependant, un arrachage virulent de plumes lui fit perdre ses moyens et elle s’écrasa au sol dans un fracas de verre brisé. Dans un bond, le geôlier pivota. Une grimace atroce tordit ses traits. « Tous les mêmes. » Sur ces paroles tranchantes, il revint à l’Ailé, et s’acharna. Le sang coulait et ternissait la pureté de son plumage. Plus la souffrance était aiguë, plus Priam sentait monter en lui une colère brûlante. Elle courait dans ses veines, grondait dans son cœur, frappait à ses tempes. Il ne s’en aperçut pas immédiatement mais, lentement, à force de bouger et parce que sa force augmentait peu à peu, les gonds qui tenaient les menottes fixées au mur cédaient. Ils lâchèrent brutalement : l’Ailé tomba sur l’homme que le mal habitait. Ils roulèrent au sol dans une série de grondements et d’injures. La lame du Sorcier fusait ; çà et là, elle tranchait la peau, les plumes ou les cheveux. L’enfant de Réprouvés usait de ses poings pour blesser son adversaire. Il se passa quelque chose d’étrange, et que l’on n’expliquerait seulement plus tard. Le corps de Priam se mit à irradier d’une lumière argentée. Ses ailes gagnèrent un éclat improbable et ses cheveux blanchirent, tandis que ses iris fondaient dans un océan laiteux. « Qu’est-ce qu- ? » débuta le maître de la magie noire, avant de recevoir un puissant coup sur le crâne. Un craquement sinistre retentit, puis seul le souffle de l’Ange troubla le silence. Précautionneusement, il se releva. Il ne songea même pas qu’il venait d’accomplir son premier meurtre. Une urgence résonnait dans tout son être. Titubant, il se dirigea vers la cave. Il ouvrit la porte : les Sonu eurent à peine le temps d’observer cette apparition, plus pure et majestueuse que tout ce qu’ils avaient pu voir jusqu’ici, que le rescapé chuta, évanoui.

***

Aux Jardins de Jhēn, ils furent accueillis avec surprise. Ils étaient restés quelques jours chez le Sorcier. Cela avait été nécessaire pour qu’ils recouvrassent leurs forces et fussent en état de voyager. Priam avait fait monter Ardem sur Yuvon. Il devinait que sans soins rapides, le jeune Ange mourrait de ses plaies. Lui-même peinait à ignorer les siennes. Son aile gauche portait les stigmates des efforts du tortionnaire. Par endroits, les blessures peinaient à se refermer et des trous béants dans le plumage dévoilaient une chair rose et couverte de croûtes. Les plumes repousseraient et d’ici quelques mois, plus rien ne serait visible, mais en attendant… Il en rêvait la nuit et refusait qu’on y touchât. Il passa une main distraite sur une cicatrice qui filait sur sa pommette. « Priam. » Nalim s’était penché devant lui et cherchait à capter ses iris dorés. L’intéressé releva la tête et cligna des yeux, troublé. « Est-ce que tout va bien ? » - « Je… » Il n’avait ni besoin d’être médecin ni besoin d’être psychologue pour comprendre que son traducteur était sous l’emprise d’un choc. « Tous les Sonu que tu as ramenés iront bien. Le petit chétif ne mourra pas. » En réponse, il acquiesça. « J’ai demandé à ce que tu consultes, toi aussi. » - « Oui. On me l’a dit. J’ai rendez-vous cet après-midi. » Il avait pris une vie, aussi. Il ne savait pas quoi en penser. « Je compte sur toi pour y aller. » - « Evidemment. » Sa voix n’était qu’un souffle. Le diplomate se tut et s’assit au bord d’un fauteuil disposé juste devant le sien. Il appuya ses coudes sur ses genoux et laissa ses mains reposer dans le vide, imitant la position de son employé. « Je repensais à… » Il battit des paupières et se redressa pour planter son regard dans celui de son interlocuteur. « Vous avez déjà tué quelqu’un ? » - « Oui. » - « Pendant la guerre ? » - « Oui. » - « C’était la première fois ? » - « Oui. » - « Qu’est-ce que vous avez ressenti ? » Nalim grimaça et se recula dans son siège, jusqu’à y appuyer son dos. Il joignit ses mains et les cala contre son torse. « De la colère et du dégoût, je crois. » En vérité, il se souvenait très nettement des sensations qui l’avaient assailli. Il n’aimait juste pas en parler. Un goût amer, fielleux, enrobait toujours sa langue lorsqu’il y songeait. Il n’avait pas la flamme des combats. « Mais c’était nécessaire. Je défendais mon peuple et ma vie. Comme tu l’as fait avec ce Sorcier. » Priam acquiesça, puis inspira profondément. « Je me sens bizarre. » Pris d’une impulsion soudaine, il se leva et marcha jusqu’à la fenêtre. Dehors, la vie battait son plein : les couleurs et les mouvements se mêlaient dans un chatoiement exaltant. « La mort et la violence ne me sont pas étrangères. Elles sont plutôt monnaie courante à Lumnaar’Yuvon. Se battre et tuer y est normal. J’ai l’habitude des cadavres, du sang, des os. Ça ne m’a jamais dérangé. » D’un mouvement ample, il se tourna vers le diplomate. « Du coup, je crois que je ne pensais pas que ça me ferait cet effet-là. » Le brun, qui endossait conséquemment le rôle de mentor, ferma les yeux pour opiner. « Quelle que soit la vie arrachée, ça en reste une. Et quel que soit ton vécu, ta nature profonde reste celle d’un Ange. Nous ne sommes pas réputés pour chérir la brutalité ou le meurtre. Nous ne les prônons jamais et nous n’y recourons que lorsqu’ils sont nécessaires ou justes. » - « J’aurais pu ne pas le tuer. » - « Alors c’est lui qui t’aurait tué. Les Sorciers n’ont pas l’âme bon enfant des Magiciens. Ils sont cruels et perfides. Si tu avais laissé paraître la moindre faille, il t’aurait achevé. » Priam fronça le nez. « Je sais. Je ne regrette pas. » Tous les Sorciers méritaient de crever de douleur dans des trous à rat. Il trouvait même qu’il avait été plutôt clément avec ce monstre. « C’est juste… je ne sais pas. Je ne m’attendais pas à le vivre ainsi. » Nalim le dévisagea en silence. « C’est sans doute juste le temps de digérer. » - « Oui, ce n’est jamais facile. » Il se racla la gorge, inhabituellement mal à l’aise. « Je ne suis probablement pas la personne la plus indiquée pour en parler avec toi, mais si jamais tu en ressens le besoin, n’hésite pas. » Un sourire amusé glissa sur la figure du fils de Réprouvés. Pour une fois qu’il n’était pas celui que la gêne ou tout autre sentiment négatif tenaillaient. « J’y penserai, merci. » Il passa une main dans ses cheveux noirs, avant d’en replacer une partie derrière son oreille gauche. « Les Sonu sont tous à l’hospice ? » - « Oui. Dès qu’ils iront mieux, ils seront placés dans des casernes et on débutera leur enseignement. » - « Hum… J’irai les voir. » D’une démarche plus assurée que précédemment, le brun retourna s’asseoir. « J’ai eu une idée, aussi. » - « Ah oui ? » - « Ces Anges… Comment être certains qu’ils sont les seuls à avoir subi ce genre de déconvenues ? Il en existe peut-être plein d’autres, ailleurs sur les trajets qui mènent jusqu’ici. Rien que pour ce groupe-là, la plus ancienne, Ansja, m’a dit qu’elle pouvait compter au moins dix morts. Dix… Vous qui tenez tant à vivifier une démographie en déclin, je crois qu’il est temps de prendre les devants. » - « C’est-à-dire ? » demanda le politicien, curieux. Priam s’inclina vers lui. « J’ai réfléchi pendant le trajet. Je ne sais pas si ça pourrait être mis en place, ni comment, mais je me suis dit qu’on pourrait organiser des patrouilles pour guider les Anges venus de chez les Réprouvés et de la Terre Blanche. Avec ceux qui vivent déjà ici, on pourrait établir sur une carte les réseaux de routes empruntées, et à partir de là, on pourrait s’organiser pour sillonner les plus parcourues. » Le diplomate demeura impassible, quand la surprise bouillonnait derrière son masque imperturbable. Finalement, il lâcha : « Cela nécessiterait l’accord des peuples sur les territoires desquels nous passerions. » Il laissa passer quelques brèves secondes, comme s’il se donnait le temps de mieux penser les choses. « Je peux m’en charger, si tu m’aides. » Un sourire éclaira les traits encore fatigués du fils de Réprouvés.

***

« A quoi ressemblait-il ? » - « On ne l’a pas vu longtemps, mais… ses cheveux étaient blancs, et ses yeux aussi. C’était comme si une aura l’entourait ! Quelque chose de lumineux, qui se propageait même dans ses ailes, même là où le sang rendait ses plumes rouges. Il avait l’air… Je ne sais pas. Il y avait quelque chose de véritablement pur qui émanait de lui. Et il paraissait… plus sûr de lui ? Plus imposant ? Je… je ne saurais pas comment le décrire. Ça n’a pas duré longtemps, comme je vous le disais. Après, il s’est évanoui. » L’historien, qui posait les questions, se tourna vers le diplomate. Ce dernier haussa les sourcils face à l’expression livide de son ami. « C’est impossible. » - « Cela fait bien des années que je ne crois plus en cette théorie. » répondit-il dans un sourire amusé. De son pas élégant, il s’avança vers la Sonu. Les versions concordaient. « Tu peux retourner à l’infirmerie avec les autres. Merci beaucoup. Et pas un mot de tout cela à quiconque. » La jeune ne se fit pas prier : elle hocha la tête, se leva et tourna les talons. Lorsqu’elle fut sortie et eut refermé la porte de la bibliothèque derrière elle, Nalim pivota vers le chercheur. « Je vais en parler avec les Olori. S’il s’agit bien de cela, c’est une information capitale, qu’il faudra exploiter. » - « Penses-tu que nous serions capables de la même chose ? » Il prit le temps de réfléchir. « Je ne sais pas. Sans doute. » Il esquissa quelques pas et s’arrêta près d’un planisphère. Ses doigts coururent sur le papier. « C’est un Élu d’Hel’dra, mais hormis cela, il n’a rien de plus que n’importe quel autre Ange. Au contraire. Parfois, j’ai l’impression d’avoir un Réprouvé en face de moi tant notre culture lui fait défaut. » Un sourire moqueur, où cependant semblait vibrer une forme de tendresse, étira ses lèvres. « Quant à cette prophétie, je ne pense pas qu’elle justifie le déclenchement de ce pouvoir. » Il souffla délicatement par le nez. La Déesse aurait-elle pourvu ses protégés de capacités uniques ? Qu’auraient reçu ceux des autres peuples, dans ce cas ? Fallait-il se réjouir ou s’inquiéter ? Un traitement rationnel lui paraissait plus adéquat. « Ou peut-être que si. Si je dois me montrer tout à fait honnête, je dois avouer que je n’en sais rien. Nous vivons une époque troublée. Peut-être que tout ceci s’inscrit dans la lignée de projets divins qui nous échappent, et nous dépassent très probablement. D’abord ces mille Anges revenus de la Terre Blanche, Hel’dra, puis Väaramar et les Enfants des Cieux, et maintenant ça… Le tout dans le contexte des expéditions. » - « Crois-tu à une aide venue des Ætheri ? » Le politicien quitta la carte des yeux et se tourna vers son ami. Un sourire énigmatique, de ceux qu’il chérissait, fleurit sur sa bouche. « Je crois que le vent de la chance souffle à nouveau dans nos ailes. » Ils les avaient déployées. Ils n’avaient plus qu’à planer sur ce courant ascendant. Ils renaissaient, fiers et conquérants.

FIN

Message II - 1908 mots
Priam a utilisé le Don des Anges puis la Forme Angélique (cf. fiche).



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