« Faîtes attention un peu. Je veux que ce soit le meilleur oreiller du monde. Vous comprenez ? Pas un oreiller. L'Oreiller. Saisissez la différence, dans votre caboche. » Devaraj se pencha vers l’artisan, un sourire mauvais sur les lèvres, et supposa que l'absence de réponse voulait dire oui. « Parfait. » Oui, ce devait être parfait. Il n'avait pas trouvé de présent pour tout le monde encore, mais Alaster était lui, un homme facile à contenter. Quant à l'autre pimbêche, son cadeau à elle sera d'être jalouse de tout les autres et de se sentir écartée injustement. L'Oreiller aura du succès. Il comptait bien le mettre dans son lit -l'oreiller, pas le Déchu- et en profiter lui aussi de temps à autre. Il fallait être malin et savoir se satisfaire à travers les autres, parfois.

Le Draugr effleura le coton de l'oreiller du bout des doigts. C'était parfaitement doux, parfaitement moelleux, et en plus ça sentait bon, d'une odeur indescriptible qui donnait simplement envie de s'allonger et de fermer les yeux pour profiter. On pouvait penser qu'il s'agissait de fleurs d'oranger, mais si on réfléchissait bien, c'était peut-être la cannelle, à moi que ce soit la lavande, ou tout bonnement l'odeur qui convenait le mieux à l'imagination et aux goûts. Il lui sembla que la couleur changeait elle aussi sous la lumière, pourtant, ce n'était qu'un oreiller. Mais poser la main dessus donnait l'impression de se faire doucement et sûrement aspirer dans un monde de coton et de mousse. Lui-même manqua d'y succomber sans faire attention. Voilà qu'il avait envie de dormir et que sa tête se rapprochait déjà de l'objet avant qu'il ne se relève brusquement lorsqu'un bruit retentit dans le couloir. Ce n'était qu'un servant qui passait, sans le voir heureusement. Il n'avait rien à faire ici dans cette pièce à tester le cadeau réservé à un époux du roi, mais voilà, il passait par là pour rejoindre le Harem, il connaissait les rumeurs loufoques sur le fait que le roi avait commandé un oreiller, et puis il était juste curieux et bête. C'était en dehors de ses limites de résister à cette tentation. Cela ne faisait pas de lui une mauvaise personne, n'est-ce-pas ? Il fixa l'objet qui était soigneusement posé sur un plateau, entouré d'un ruban en soie rose. Sur les côtés, des petites plumes pendaient des bordures et se soulevaient au rythme de la brise. Ça lui donna encore plus envie de dormir... Non, pas de dormir. Voyons. Oui, cet oreiller donnait envie de profiter, c'était le mot adéquat. Un sourire pervers illumina son visage. Profiter de quoi, exactement ? Pas besoin de réfléchir. Il avait bien une idée, voire beaucoup beaucoup d'idées très diverses et pourtant toutes sur le même sujet. Le Chaman fronça les sourcils. Il manquait une petite fantaisie à cet objet. Quel dommage, cela risquait d'en faire un cadeau amusant mais plat, duquel on finit par se lasser. Maintenant qu'il s'en rendait compte, il ne pouvait pas repartir et faire comme s'il n'avait rien vu. Sinon, cela allait le hanter pour le restant de sa vie. Oui, il devait plutôt agir. C'était son truc ça, l'action. Le Chaman agita ses doigts. Il ne faisait qu'agir pour le bien de son roi -et pour rigoler-, après tout. Jamais rien d'autre ne lui viendrait à l'esprit. Personne ne se rendrait jamais compte de sa surprise, sauf peut-être le principal concerné. Mais encore une fois, bien d'autres explications lui viendront à l'esprit, toutes très éloignées de « l'hypothèque que le Draugr Raoni ait trafiqué mon oreiller cadeau ». Comment dire ? Tout le monde le pensait stupide et bon qu'à baiser. Malheureusement pour eux, ce n'était pas tout à fait vrai. Il avait d'autres talents, simplement, il ne les utilisait jamais parce-qu'il préférait baiser, en effet. A ce sujet, il connaissait toute une panoplie étonnante de sors magiques qui contribuait parfois à son succès. Par exemple, ce n'était pas très difficile d'enchanter des objets, d'y attacher une image à transmettre à l'utilisateur et de stimuler un fantasme.  

1485 mots | L'Oreiller : un oreiller parfait, enchanté pour avoir des rêves érotiques à propos de Devaraj.