«Je n'aurais pas dû le laisser seul...» Dasäalm se mordit la lèvre. «Chéri, tu ne pouvais pas savoir...» murmura Ish en passant sa main le long du visage creusé d'inquiétude de son époux. Ce dernier ne répondit rien bien qu'il n'en pensa pas moins. Chéri ceci, chéri cela... Elle ne comprenait jamais le véritable problème. Ce n'était pas le fait que Râmses soit actuellement perdu au milieu des Terres d’Émeraude, ni le fait qu'ils aient pas retrouvé sa trace malgré une journée de recherche. Le problème, c'était qu'il n'avait pas contrôlé la situation et que de même, il ne contrôlait plus son frère, pour peu que ce dernier soit encore en vie... Quoique ces terres avaient l'air très sécurisées. Mais Dasäalm craignait que dans sa nouvelle fugue, Râmses ne rencontre un de ces groupes de voyageurs nomades attirés par les mines du Mars, qu'il en profite pour se joindre à eux pour s'échapper du territoire. Si son inquiétude envers son frère était véritable, elle n'en était pas moins parsemée d'égoïsme. Il sentit les bras de sa femme l'entourer doucement et s'en trouva mal à l'aise. «Non. Hum... Je vais prendre l'air.» Sans un mot de plus, l'Orisha sortit de la tente qu'ils avaient placé à la sortie du village de Chami.

Däsaalm contempla un instant l'horizon. Il aimait cette couleur, l'émeraude. Les Orines pouvaient se vanter d'avoir un très beau territoire. L'Orisha détourna alors son attention sur l'entrée du village. L'après-midi battait son plein et il décida de se promener dans les ruelles pour se changer les idées et s'immerger dans cette culture étrange à ses yeux. Il arriverait mieux à marchander avec ce peuple s'il faisait l'effort de comprendre les éléments les plus basiques de leurs mœurs et d'apprendre quelques mots basiques de leur langue. Par ailleurs, l'Orisha n'avait pas besoin de faire d'effort pour être curieux lorsqu'il voyageait à l'étranger. C'en était parfois trop et rassasier sa soif de savoir lui faisait dépasser les comportements acceptables. Ils n'étaient qu'à l'orée de ce territoire et déjà, beaucoup d'éléments bousculaient ses pensées. La grâce et la beauté des habitants de ces lieux avaient de quoi enchanter n'importe qui de censé. Dasäalm alla jusqu'à se demander brièvement si installer son futur cabinet de médecin psychiatre en ces lieux  ne pourraient pas aider ses futurs patients à guérir plus vite... Quoiqu'il y avait beaucoup de fois le mot futur, dans cette phrase. Tout ceci lui semblait loin et irréalisable. L'idée seule de vouloir aider socialement et psychologiquement chaque membre de sa famille était risible. D'ailleurs, il ne s'agissait même pas d'une véritable famille. L'Orisha soupira tout en continuant de piquer des framboises dans une barquette qu'il avait acheté cinq minutes avant en passant devant une sorte de marché local. Ses doigts ne rencontrèrent que le vide car il avait déjà tout mangé. Frustré, il retourna au stand pour en racheter.

Il repensa à Ish et se dit qu'il devrait arrêter de lui mentir, un jour. Ou commencer à lui donner la vérité en entier... Un nouveau soupir passa ses lèvres. «Excusez-moi, vous me conseillerez quelle route pour rejoindre Avalon à pieds et visiter votre contrée au passage ?» Son beau-père lui avait conseillé un trajet maritime très précis, mais Dasäalm n'en avait fait qu'à sa tête. Il supportait de moins en moins les ordres de ce grossier personnage... L'Orisha engouffra plusieurs fruits dans sa bouche dont les lèvres étaient tâchées de pourpre. «Excusez-moi encore, vous n'auriez pas vu mon frère jumeau ? Il a des cheveux noir de jade et des yeux ambrés...  Nous le cherchons en vain depuis ce matin.» Avoir égaré un jeune homme de vingt-cinq ans, cela devait paraître incongru et bizarre... Mais Râmses était loin d'avoir cet âge là dans sa tête. Cet idiot avait disparu depuis l'aube. Enfin, le couple ne s'en était aperçu qu'en voyant la couchette vide et froide à leurs côtés sous la maigre tente. «Je suis inquiet pour lui. Il peut devenir très agressif s'il se sent perd- Comment ? Oui, hum. Nous avons un dur passé.» Dasäalm ne pouvait pas repartir avant de l'avoir retrouvé. Il avait véritablement peur que son frère ne survive pas seul. Aussi, il voulait lui remettre le grappin dessus. L'Orisha interrogeait un peu tous les passants du marché, attirant ainsi l'attention comme il pouvait. «Vous pourriez peut-être m'indiquer les possibles cachettes pour un fugueur ? »

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Pendant ce temps.
Râmses courrait dans les rangées de framboisiers en rigolant comme un idiot. Il faisait toutefois attention à éviter les petits plans, les guêpes, les araignées et les serpents attirés par ce genre de plantations. Il s'était éloigné d'une vingtaine de kilomètres du village, après plusieurs heures de marche d'un pas décidé. Comme la fatigue commençait à poindre le bout de son nez, le clone envisagea de faire une sieste en sécurité. Il avisa une cabane au coin du champ de culture désert et se glissa derrière cette dernière, entre le mur de planches et les ronces. «Ils ne me retrouveront jamais.» chuchota-t-il d'un air machiavélique. Il n'avait conscience ni de son horrible faim et soif ni de son état de fatigue avancé. Râmses se contenta d'engouffrer quelqu'un de ces fruits rouges foncés qu'il avait chapardé en chemin. Puis l'homme ouvrit la bourse qui pendait à sa ceinture et recommença à compter les pièces d'or en chuchotant comme un demeuré. «Un, deux, trois...»

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