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 Quand rien ne va, fume de l'herbe et bois du cavin [Caleb]

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Mar 31 Juil 2018, 20:30

Quand rien ne va, fume de l'herbe et bois du cavin
-Caleb


Les regards moqueurs des esprits étaient tous dirigés vers une unique personne, qui se dépêcha bien vite de leur promettre une éternité de souffrance s'ils ne le laissaient pas tranquille immédiatement. Le Suprême de l'Au-Delà, ou plutôt, ce qui restait de lui après une malencontreuse expérience, se serait bien appliqué à détruire le village entier pour se détendre si seulement il n'était pas sur le territoire d'un autre peuple. Oui, lui, coincé sur les terres d'hypocrites soit-disant pacifistes dont la stupide reine avait tenté de l'assassiner il y a quelques lunes à peine. Pour une première rencontre entre les deux souverains, le fiasco était total. Edwina était désormais l'ennemie public numéro un des chamans, quant aux magiciens, ils venaient tout juste de se rajouter à la longue liste de personnages que Devaraj se permettait de mépriser sans vergogne...

Ses yeux fatigués tentèrent une nouvelle fois de déchiffrer la page qui l'intéressait. Sans succès. De rage, il se leva brusquement dans un bruissement de papiers et s'empara du panier qui débordait de parchemins avec l'optique d'aller le brûler dans la cheminée au rez de chaussé. A mi-chemin, il fit un effort surhumain pour ne pas hurler en plein milieu de la taverne -par Ezechyel, que c'était compliqué de ne pas être chez soi...- et prit sur lui. Les quelques clients présents préférant rester en bas prêt du comptoir, peu virent son manège et ils ne tardèrent pas à fuir cet homme étrange qui avait prit ses quartiers sur le toit. Blanc de rage, il fit demi-tour et dans une démarche improbable, se rapprocha du bord de la façade en se souciant peu de faire un faux pas dans le vide. Sa situation était délicate. Comme les mages bleus étaient connus pour la création de la matière, il avait pensé que s'intéresser à leur savoir serait le premier pas pour la fabrication de la Couronne des Chamans. En se croyant compétant dans le domaine, il avait eu la bonne idée de lancer un sort sur un des diadèmes de Lilith. Sa prononciation était de toute évidence bancale puisqu'au lieu de l'effet voulu, il se retrouva téléporté lui et tout ses livres, à des milliers de kilomètres avec la majeure partie de sa magie enfermée dans le bijou qui reposait tranquillement dans sa chambre sur l'Île Maudite. Ma foi, ce n'était qu'une raison de plus pour haïr les terres bleues et l'entièreté de leurs habitants.

Non seulement devait-il trouver un moyen d'inverser le sort, mais il fallait en plus qu'il retourne chez lui par ses propres moyens. Le hameau ridicule dans lequel il se trouvait semblait être perdu au milieu de nulle part en pleine campagne. Si cela venait de sa propre volonté, il aurait trouvé cela amusant de revivre une aventure de voyageurs comme il le faisait cinquante ans en arrière, libre de toute responsabilité ou devoir racial. Mais non, ce n'était pas amusant du tout. Si quelqu'un se rendait compte de sa disparition, il ne saurait même pas quoi dire pour en expliquer la raison... Par bonheur, personne ne semblait l'avoir reconnu. Il faut dire qu'il s'était hâté d'acheter un pantalon local pour couvrir ce qui semblait choquer ces idiots et qu'il s'était départi de tous ses peintures et bijoux, rattachant ses cheveux en queue de cheval. Le marchand qui lui avait vendu son sac en cuir lui avait précisé que "c'était parfait pour toutes ces breloques". L'éducation de ces gens était décidément déplorable. Par chance, il s'était retenu de ne pas l'égorger sur place. Dépenser tout le reste de son argent en boissons fortes l'avait aidé à accepter ce furieux coup du Destin.

Le Fumeur Macabre s'assit les jambes dans le vide et leva son regard vers le ciel dégagé brillant d'étoiles. Il n'y connaissait pas grand chose en astronomie excepté le nom de quelques constellations emblématiques, mais il avait toujours pensé qu'il s'agissait de la lumière des Aetheri. Eh bien les Aetheri devaient l'avoir maudit, pour que tout ceci arrive. Cette supposition ne l'étonnait qu'à moitié, il était déjà conscient d'avoir éveillé le courroux d'Ezechyel au point de faire trembler l'Île. Enfin, il ne pensait pas en être l'élément provocateur, mais avoir servi d'outil au coupable le faisait quand même culpabiliser. Il porta la pipe sacrée à sa bouche et souffla un énorme nuage de fumée âpre. Un fort sentiment de fatalité l'envahit, ou peut-être n'était-ce qu'une grande fatigue... Le Chaman laissa son dos retomber sur le sol. Il crut entendre le vague bruit d'une toux provoquée par la fumée et n'y prêta pas attention. Il avait bien trop bu pour pouvoir juger correctement la réalité.

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Mer 01 Aoû 2018, 20:08


Quelle imprudence … Il devait cruellement manquer d’hommes et de femmes pour accomplir les basses besognes, au point de sacrifier de simples apprentis, tout juste capables de comprendre les conséquences de leurs actions. Ce n’était que des enfants, charmés par l’indépendance et la liberté promises à ceux qui se détournaient des Ætheri Légitimes pour s’offrir à une voie plus nébuleuse. Ils obéissaient aveuglement aux ordres de Chaim et suivaient ses enseignements, dans l’espoir de devenir aussi puissant que lui. J’imaginais aisément les beaux discours, l’attrait des promesses. Il estimait sans doute que je n’oserais pas m’en prendre à des novices, dans un trait de tendresse et de compassion. Il se trompait. Préserver la Véritable Ligne du Temps était mon unique but, et quelques meurtres supplémentaires ne tâcheraient pas davantage mes mains. Elles étaient déjà couvertes de sang. Il aurait dû s’en douter. Ces néophytes allaient gagner en force, jusqu’à devenir un problème. Ils ne pouvaient plus reculer : ils étaient des traitres aux yeux des Dieux et de la Prophétesse. Des miens aussi. Cela n’empêcha pas mon regard de glisser sur la silhouette frêle et juvénile de la jeune femme, les lèvres tordues en une moue contrariée. Elle murmurait quelques mots à mon attention. Une supplique. Des insultes. Une prière. Je ne savais pas. Je n’écoutais pas. « Désolé. » marmonnai-je pour la forme. Un craquement sourd résonna, et elle s’effondra dans mes bras. Je pris le temps de contempler son visage enfantin, hésitant. Elle ressemblait vaguement à Azénor. Devais-je ramener le corps à ses parents ? Je ne permettais pas aux renégats de recevoir les rites et les sacrements, pas plus qu’une sépulture au sein de mes terres. Je supposais néanmoins que j’étais assez miséricordieux pour enterrer la dépouille quelque part, dans de vastes plaines sauvages. Une tombe sommaire, afin de permettre à la famille de pleurer et de se lamenter. De toute manière, je ne pouvais décemment pas abandonner le cadavre, si près d’un bourg du Lac Bleu. Dans un soupir, je me relevai avec la jeune femme, toujours dans les bras. Il fallait que je me dépêche : j’étais quelqu’un de plutôt connu dans les parages et je préférais éviter qu’on m’aperçoive avec une personne que je venais d’assassiner.

« Hum … » J’étais assis sur un rocher relativement peu confortable, juste à côté de la terre que je venais de retourner. Une bouteille de vin à la main, je réfléchissais. Chaim n’allait sûrement pas tarder à répondre à ma lettre. Je devais surveiller mon courrier, peu désireux d’être questionné par ma femme ou mes filles sur l’expéditeur de ces dizaines et dizaines de missives. Ma famille … Elles ignoraient tout de mes petites expéditions nocturnes et meurtrières, ou préféraient ne pas savoir ni poser de questions. Que penseraient les filles de leur père, si elles me voyaient ainsi ? Est-ce que mon épouse me regarderait différemment ? Elles n’étaient pas encore prêtes à ce genre de révélations. J’étais seul. Mes Eloqui devaient gérer leurs propres difficultés, ils n’avaient pas à supporter les déboires de leur Roi, en plus. Dans un soupir, je m’allongeai dans les herbes grasses, tout près du tombeau de fortune. Mes yeux s’égarèrent dans la beauté de la voûte, tout particulièrement sur la Constellation du Sablier puis sur la Nébuleuse de l’Opale. L’Etoile Rêve accapara aussi mon attention, déclenchant un sourire sur mes lèvres et un malaise au fond de mon cœur. Je soufflai à nouveau avant de boire mon vin, d’une traite. J’avais dû me résoudre au sevrage, le temps de la traque de la Rehla. Ma migraine persistante et sifflante, mes tremblements et mon humeur exécrable me poussaient à remédier à ma sobriété au plus vite. Cependant, ce n’était que la première bouteille : trop peu pour ma consommation excessive. « Hum. » marmonnai-je encore, en me relevant. Une vague odeur avait chatouillé mes narines et je me demandais d’où elle provenait. Mes visions allant plus vite que mes yeux, la réponse s’imposa à moi en quelques secondes : ce cher Maître des Esprits était tout près. Je connaissais peu cet individu. Pas personnellement, du moins. Je n’étais pas sensible aux rumeurs et aux scandales des gazettes, pour connaître déjà son existence sur le bout des ongles. Il avait une vie bien remplie et je n’étais pas certain de vouloir en faire partie.

« Bonsoir ! » lançai-je tout de même, en brandissant ma bouteille, avant de me laisser retomber dans l’herbe. Ma cohérence n'était pas mon fort. Je n’avais déjà plus rien à boire et cela me désolait. J’avais besoin d’alcool, à défaut d’avoir le courage de rejoindre le Palais de la Cité des Astres. Ils avaient l’habitude de mes absences répétées.
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Sam 18 Aoû 2018, 11:48

Quand rien ne va, fume de l'herbe et bois du cavin
-Caleb



Les prunelles du Suprême de l'Au-Delà contemplèrent un instant l'amas de terre fraîchement retournée. Hélé par une voix en contrebas, le chaman s'était rassit pour pouvoir contempler l'origine du bruit et s'assurer que c'était bien à lui qu'on s'adressait. S'il était vaguement curieux de savoir ce que l'esprit qui hantait désormais ce lieu avait à raconter au sujet de sa récente mort, il ne s'offusqua pas le moins du monde de la présence d'un cadavre encore chaud une centaine de mètres plus loin. Parfois, il lui fallait plusieurs minutes pour se souvenir que les autres ne pouvaient pas voir les morts et quelques heures de plus pour se rappeler que mourir leur était choquant et effrayant. Son regard s'était si bien habitué à distinguer les ruines éthérées des anciens temps ainsi que leurs habitants millénaires, se superposant aux constructions de l'ère actuelle, qu'après plusieurs mois, presque une année entière passée sur l'Île Maudite, il lui était compliqué de devoir différencier les deux à nouveau. C'était d'ailleurs pour cela que les grandes et anciennes villes lui étaient désagréables, car s'y trouvait une foules d'esprits dont les conversations et les gestes saturaient complétement sa vue et son ouïe. Heureusement, les anciens de ce petit bourg semblaient pour la majorité avoir rejoint l'Au-Delà. "Hum, bonsoir..." Sa voix était quelque peu enrouée et il dût se racler la gorge plusieurs fois. Alors que sa gorge le brûlait, le contenu de la bouteille brandie dans les airs avait soudainement l'air très rafraichissant... Cet homme lui était parfaitement inconnu. Les apparences n'étaient bien trop souvent que mensonges en ce monde, mais Devaraj aimait se prêter au jeu et prendre temporairement pour vrai ce que les personnes voulaient que les autres voient et croient. Le chaman supposa donc avoir affaire à un magicien un peu trop alcoolique... Quoique perché sur le toit un étage plus haut, il avait du mal à discerner complétement les traits de l'homme et le voile flou qui tremblait devant ses yeux n'aidait pas beaucoup.

"Vous ne voulez pas me rejoindre ? Passez par l'intérieur de la taverne, c'est bien plus confortable là-haut et vous pourrez toujours surveiller de loin votre macchabée." Son ton décontracté était sûrement déconcertant... Mais le chaman n'était plus d'humeur à faire semblant d'être ce qu'il n'était pas. S'il pouvait au moins éduquer un magicien au sujet de la Mort et partager son herbe avec quelqu'un d'autre -comme cela se faisait toujours dans la tradition des chamans- peut-être que sa soirée ne serait pas entièrement perdue. Au pire du pire, si ce dernier se révélait être insupportable, insultant, malpoli ou irritant d'une façon ou d'une autre, il pourrait toujours lui briser le cou et le pousser dans le vide tout en accusant le déséquilibre causé par l'alcool. Serein et tout à fait inconscient de la véritable nature de son invité, le chaman souffla une seconde bouffée de fumée en attendant d'être rejoint. Devaraj regretta subitement de ne pas lui avoir demandé de prendre une autre bouteille au comptoir au passage, car il n'était pas certain de pouvoir redescendre les marches correctement pour aller en chercher une par lui-même. Et du saucisson aussi... C'était toujours le problème avec cette herbe, elle creusait l'estomac et asséchait tout le reste du corps.  Heureusement, les effets étaient suffisamment puissants pour lui faire confondre démons et anges, parfait donc pour écouter les divins se moquer du pétrin dans lequel il était et peut-être les entendre lui glisser un ou deux conseils au passage.

En quelques minutes, il avait déjà oublié la venue du magicien et sursauta presque en entendant la porte du toit. "Donc ! J'espère que vous avez creusé suffisamment profond, sinon les bêtes vont venir en déterrer un morceau !" L'idée provoqua chez lui un rire machiavélique, qui se termina brusquement en toux. "Je vais vous dire ! Les gens ne sont jamais contents de leurs dépouilles de toute façon." grogna-t-il, plissant les yeux et préférant ne pas trop en dire sur le sujet. Trop moche, trop loin, pas assez visité, pas assez de fleurs, les cendres versées au mauvais endroit, le cadavre disparu et compagnie. Il en avait vu des vertes et des pas mûres et était désormais heureux de laisser ces revendications idiotes à ses subalternes.

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Mar 15 Jan 2019, 19:26


Il m’arrivait de sombrer avec un peu trop d’entrain dans la traque aux Bannis, cette activité ayant le mérite d’accaparer toutes mes pensées, mes dons par la même occasion. Cette vérité m’écorchait l’âme. J’étais tombé bien bas, pressé de chasser des imprudents et des inconscients pour les assassiner plus ou moins proprement.Je ne parvenais cependant pas à les plaindre : ils avaient choisi leur destin et c’était à moi de le sceller. Il me fallait simplement redoubler de prudence, pour éviter que cette course-poursuite devienne une nouvelle addiction destinée à me soulager de mes autres responsabilités. Je tâchais de me rassurer dans l’idée qu’il était primordial d’arrêter Chaim … Tout en évitant soigneusement d’ébruiter mes entrevues avec la charmante – et néanmoins encombrante – Yennefer. Personne ne connaissait cette femme, pas même ma famille. C’était mieux ainsi. Je risquais ma vie pour elle. Il était hors de question de mettre en péril mon épouse et mes filles. Je devais soigner ma couverture et continuer à œuvrer selon les volontés de Phoebe. Pour l’instant. « Drôle de vie. » marmonnai-je en vidant une seconde bouteille, les pieds dans le vide. Mon regard tomba sur la petite caisse en bois, maladroitement posée sur les tuiles du toit. « N’hésitez pas à vous servir. Considérez que je suis votre bonne Fae personnelle, ce soir. » On ne pouvait rien me cacher et je savais pertinemment que la soirée serait bien moins catastrophique, accompagnée par une myriade d’alcool en tout genre, de pain, de charcuterie, de fromage et de pâtes de fruits. Avec une aisance propre à l’habitude, je débouchais deux bouteilles pour en tendre une au Maître des Esprits, l’autre étant ma consommation personnelle.

« Une bonne Fae ... » Un petit rire s’échappa de mes lèvres. Je m’imaginais avec une petite paire d’ailes colorées, une baguette et une petite robe. Bien … Un ricanement sorti de nulle part et une réflexion passablement raciste … L’alcool commençait  enfin à faire son effet. « Quoi qu’il en soit … Je vous crois sur parole ! » Une nouvelle gorgée, avant de m’étirer les bras. « Cette tombe est parfaite. Une véritable œuvre d’art ! Je sais de source sûre qu’elle ne sera pas pillée par les charognards des environs. » Mes traits se figèrent brièvement avant de se tordre en une grimace peu élégante. Cette migraine était de plus en plus virulente. Le contre-coup du temps passé à regarder ailleurs, sans doute. Les visions affluaient dans mon esprit dans un véritable ballet chaotique. Je devais avoir les yeux dans le vide, comme légèrement voilés par quelque chose d’indescriptible.« Hum ... » Une troisième bouteille vidée, j’entrepris de me masser les tempes. « Mes premières tentatives n’étaient pas fameuses, je dois bien l’avouer … Cependant, à force d’entraînement ... » Je poussai un long soupir, le vrillement de mon crâne ayant raison de mon humour déplacé. « Disons simplement que j’ai appris de mes erreurs. Sans compte que … Je me moque éperdument de l’avis de cette fille sur la qualité de son enterrement. Je m’estime suffisamment miséricordieux de ne pas avoir abandonné le corps sans me retourner. » Je devais donner l’impression d’être un meurtrier en cavale. Cela m’aurait certainement inquiété, si je n’étais pas face à un spécimen autrement plus préoccupant.  « Vous êtes bien loin de chez vous, Devaraj. Je ne perdrai pas mon temps à vous demander pourquoi, puisque je connais déjà la réponse. Vous n’avez pas envie de faire semblant ce soir, n’est-ce pas ? Grand bien vous fasse ! Moi non plus. Vous permettez que je vous appelle par votre nom ? Vous pouvez faire de même avec moi. Je m’appelle Caleb. Je suis le type que personne ne veut inviter à une soirée poker et qui est interdit à l’entrée de toutes les salles de jeu à travers les Terres du Yin et du Yang. » Je me mis bêtement à rire, même si cet éclat sonnait faux, affreusement triste et presque résigné. « Caleb Suellan. » repris-je, désireux de me présenter un peu mieux.

J’attrapai le couteau, tombé dans les tréfonds insoupçonnés des poches de mon manteau, pour couper un morceau de pain que j’entrepris d’engloutir avec du jambon, laissant la lame sur le bord de la caisse pour servir plus tard. « Les gens me connaissaient avant … Mais ils m’ont oublié. Moi et ma race. » Je fis un petit signe vers le ciel. « Merci pour le cadeau. » Mon ton était étrange, de sorte à ce qu’on ne puisse pas vraiment savoir mes sentiments à l’égard de cette vérité. Mes pensées vagabondèrent sur la question de mon identité, la fausse comme la vraie.
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Mer 16 Jan 2019, 18:25

Quand rien ne va, fume de l'herbe et bois du cavin
-Caleb


"Ma Fae personnelle..." répéta stupidement le Fumeur Macabre, en cherchant là une allusion sexuelle quelque peu exotique. Il n'était pas contre, mais sortit du contexte de l'Île cela lui sembla inadéquat. "Euh." Il cligna des yeux en acceptant néanmoins la bouteille, tout en se disant que ce magicien ne correspondait pas du tout à l'image typique qu'il avait de ce peuple, ce qui avait pour avantage d'épargner à son nouvel interlocuteur la myriade de remarques racistes qui fourmillaient dans l'esprit du chaman. Tout d'abord, il fût plutôt impressionné par l'homme maintenant qu'il pouvait le distinguer de plus près, et se contenta de ponctuer sa description meurtrière de "Oh" et "Ah" comme s'il ne s'agissait que d'une discussion sur l'entretien des potagers. "Au moins ça fait de l'engrais pour planter des patates." Devaraj entama sa bouteille par petite gorgées, beaucoup moins vite que son homologue qui descendait la boisson au rythme d'un Réprouvé entraîné. "Ah. La miséricorde..." Ses yeux se plissèrent, comme s'il cherchait dans son esprit où était enfouie la signification de ce mot. De toute évidence, il l'avait oublié. D'une moue, il chassa ses pensées inutiles et tira une nouvelle bouffée empoisonnée au point de disparaître complétement dans les vapeurs âpres. Cela eut pour avantage de dissimuler son étonnement. En général ceux qui connaissaient son nom ne s'adressaient plus à loin de façon aussi directe. Son identité tirait derrière elle une longue liste ensanglantée qui rendait les gens prudents à l'ennui. C'est pour cette raison précise que le chaman afficha son fameux sourire enfantin -celui qu'il avait quand il était content et qui contrastait violemment avec le reste de sa tête. "Ah bon Caleb... Mon vrai nom est Wom'Zaïkam'Yé'Hofdingi, mais vous le savez aussi, n'est-ce-pas ?" dit-il, ne pouvant dissimuler son amusement soudain devant ce faux magicien couronné. Ce qui lui vint à l'esprit sur la nature possible de cet homme n'étaient que des rumeurs dont il n'avait jamais prit le temps de s'inquiéter. Le problème était que son esprit était bien trop voilé par la souffrance et le Néant dans lequel il tombait pour qu'il ait l'envie ou le temps de se pencher sur ce qui existait en dehors de Awaku No Hi. "Ah oui ? Pardonnez-moi mais je vous l'envie. Ce cadeau." souffla-t-il après un bref silence. Une brève colère brûla dans ses pupilles, aussi éphémère que violente. "S'attacher aux Vivants entrave notre tâche, nous devrions disparaître de leur vue." dit-il, pas seulement par rancœur d'avoir failli mourir sous la main d'une souveraine. La graine de cette idée était implantée depuis longtemps dans sa tête, elle était devenue une plante grimpante qui envahissait tout, même la vue. Un Aether trop joueur venait de déclencher l'autarcie de son peuple, mais ce n'était qu'un début. Aussi fou était-il, Devaraj ne croyait pas aux coïncidences. Il était particulièrement familier avec le concept de Destin et s'imaginait le sien sous la forme d'une infinité de lignes produites par les milliers de choix incongrus et imprévus que sa Folie lui dictait ; puis avec fierté il se disait que son futur devait particulièrement pénible à lire.

Devaraj reposa doucement la bouteille contre son flanc. Il préférait sa fumerie et plus particulièrement les formes qu'il arrivait à former dans l'air à force d'entraînement. Cependant, le blond n'oubliait pas la politesse chamanique, aussi loin fût-il de son habitat naturel. En écartant la vapeur d'un geste de la main, il tendit l'instrument d'hallucinations à son congénère tout en expliquant brièvement ce qu'il ne fallait pas faire pour finir asphyxié. "Vous savez, c'est plus efficace contre les migraines que l'alcool. Et contre l'angoisse aussi ; et la panique paralysante ; et la démence paranoïaque et pour ne pas s'évanouir quand un Aether choisit de surgir dans notre dos. Oh, je suis un grand spécialiste ahahaha !" Un refus pourrait le vexer profondément mais par chance, il semblait plutôt enclin à la "miséricorde" lui aussi... Bien que cet état d'esprit soit aussi stable d'un éléphant sur un fil au milieu du vide. "Hum. Et les esprits de vos victimes, vous les laissez vagabonder à l'air libre ? Et après ma camarade Léto les récupère au tribunal des Morts avec des demandes incongrues, bravo." Un rire s'échappa de ses lèvres. Comme ce n'était pas lui qui subissait les innombrables requêtes que les Morts demandaient en hurlant pour la plupart, il trouvait que les révélations qu'on pouvait apprendre en présidant les tribunaux étaient hilarantes -vues de loin. "Avec un peu de chance, les assassinés deviennent même des Parasites et reviennent empêcher de dormir le Suprême de l'Au-Delà. C'est moi, il paraît." Ses yeux brillaient forts. "Mais cela n'arrive pas aux vôtres, ce qui signifie que vous l'êtes donc en effet. Trop miséricordieux." Était-ce un jugement négatif ou positif ; ou même autre chose qu'un jugement ? Il fût lui-même incapable de le définir. Quand on lui posait la question, il aimait répondre avec honnêteté "Tout à la fois."

Ses lèvres étaient sèches et la bouteille se vida. Puis son corps devenant flasque et difficile à tenir, le chaman s'affala de tout son long sur le dos, pas vraiment importuné par la poussière du sol qui se mélangeait à sa chevelure. "Vous avez une femme, Caleb Suellan ?" Le changement de sujet drastique était quotidien chez lui. "C'est un nid à problèmes, les femmes. Je suis planté ici comme un poireau au milieu des carottes et j'ai perdu la quasi-totalité de ma magie pour la mienne. Ou pour un cadeau censé lui plaire... Enfin je sais plus vraiment." marmonna-t-il, finissant sa phrase en grommelant à voix basse. Le chaman finit sa tirade de plaintes, les yeux perdus dans le vague. "La prochaine fois que je la croise, je lui arrache ses ailes dégueulasses, c'est beaucoup plus simple." S'il avait su que Lilith s’enfuirait pour ensuite revenir lui demander elle-même d'appartenir à son peuple, il ne l'aurait pas cru et serait probablement tombé du toit par surprise. Sa main tâtonna pour trouver les pâtes de fruits qu'il engouffra par dizaines dans sa bouche, comme un enfant. Son esprit vagabonda sans but, jusqu'à revenir sur une phrase prononcée par le Sin Luxinreïs. "Vous savez, il n'y a pas que le hasard pour jouer." Sa tête se tourna sur le côté, de sorte qu'il puisse contempler son homologue avec un sourire carnassier. "Je connais un Aether très doué, vous voulez l'adresse ?" Lorsqu'il se représenta Nidalu dans son esprit, il ressentit un ouragan émotionnel, un mélange dangereux de haine, d'appartenance et d'attirance profonde. Cela le perturba si bien qu'il se releva d'un bond dans l'objectif de taper quelque chose et commença, le regard flou et la tête vibrante, à perdre l'équilibre et à battre les mains dans le vide. "Aether, lui, c'est un grand mot ! Qu'il ose me tuer s'il m'entend !" blasphéma-t-il, le visage blanc de rage, perdant tout contrôle. Par chance, la majorité de sa magie lui avait été arrachée...

Mots : beaucoup. Et maintenant que je me suis emballé, je disparais, bye. :D
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Mar 22 Jan 2019, 18:08




« Devaraj … Je crois que vous allez m’arracher une petite larme ! Tout cela est beaucoup trop émouvant pour mon pauvre petit cœur fragile. Il faut dire que … »
Cette phrase, articulée après un long silence, fut interrompue par l’étanchement en bonnes et dues formes de ma soif à l’aide d’une bouteille de whisky, déjà à moitié vide. A moitié pleine ! J'avais décidé de voir la vie du bon côté, ce soir. « Je rencontre rarement des hommes comme vous. C’est plutôt rafraîchissant. » Je me laissai tomber à mon tour sur les tuiles du toit. Je ne comptais pas m’épancher davantage sur mes sentiments, ni sur les raisons qui m’avaient poussé à dire ces quelques mots. Mes yeux vagabondèrent tranquillement sur les astres scintillants qui illuminaient les cieux obscurs, avant de s’attarder sur le halo pâle et lumineux de la lune. Cette vision m’arracha une grimace que je m’empressai d’effacer par une nouvelle gorgée d’alcool. « De l’engrais ! » m’écriai-je soudainement en tapant du poing. Je venais de me souvenir qu’il fallait que je paie pour une petite bévue dans les plantations des Plaines Rouges, désormais gorgées par des litres de vin. Mon insouciance avait ruiné des mois d’efforts, une grande partie des récoltes – loin d’avoir mon endurance et mon habitude – ayant flanché sous une pluie de raisin fermenté. « Il faut que je règle une facture monumentale pour l’achat d’engrais. C’est pour la bonne cause. Près de chez moi, il y a de grands vergers de papayers … Ils font grises mines depuis que je … Hum … C’était une sombre journée, Devaraj. Il ne reste plus qu’un fruit, sur l’entièreté des arbres fruitiers. Elle s’appelle Géraldine. Il ne faut pas trop que je m’attache à elle … Sa destinée n’est guère enviable. » Un ricanement s’échappa de mes lèvres. J’étais déjà fier d’une bêtise que je n’avais pas encore faite. « Bien sûr que je connais votre véritable nom aux sonorités si tendres et délicates … Permettez moi de me contenter de Devaraj, le pauvre hère que je suis commence à être trop saoul pour enchaîner un prénom exotique composé de plus de quatre syllabes. Même Devaraj devient trop compliqué, d’ailleurs … Je peux vous trouver un petit surnom, juste entre vous et moi ? Ça serait notre petit secret. Un nom de code ! »

Ma bouteille était vide. Déjà ? Je me demandais vaguement si j’étais maladroit au point de la renverser sans m’en rendre compte, ou ou bien si je buvais de manière automatique. La réponse m’intéressait finalement assez peu. La solution restait la même : ouvrir une nouvelle bouteille. « Je ne sais pas … J’ignore encore si je considère ce cadeau comme empoisonné ou bienveillant. Il est sûrement les deux, de toute manière. » Tiens, j’étais en train de boire une gorgée de … De quoi, d’ailleurs ? Juste du vin, visiblement. En tout cas, cela avait le mérite de répondre à mes précédentes interrogations. « J’agis toujours comme il se doit. Selon leurs règles, à eux. » Il me semblait inutile de préciser que j’évoquais nos Dieux. « Il m’arrive de m’attacher à des gens, comme ce charmant couple dans ma cité. Ce sont quasiment mes voisins. A ce que je sache … Cela ne m’a pas empêché de briser le cou de leur fille. Rien ne peut m’entraver. » Mon ton avait été plus froid que je ne l’aurai voulu. C’était pourtant une réalité : je pouvais commettre des horreurs sans sourciller, parce que c’était ce qui devait être fait. Etais-je un monstre ? Sans doute, selon les critères biaisés des ignorants. Il m’arrivait de penser encore que j’étais un être abominable. Qu’importait. Le Sin Luxinreïs n’avait pas le luxe de s’attendrir sur des banalités. Les enjeux étaient trop grands. Mon interlocuteur pouvait parfaitement le comprendre. « Vous savez ... » D’un mouvement du menton, je désignais les étoiles. « Elles me parlent. Tout le temps. Elles sont un peu comme vos fantômes … Personne ne les voit ni les entend mais qu’est-ce qu’elles sont bruyantes ! Elles me hurlent dessus, parfois. L’une d’entre elles est même mon amie. Elle a même été … hum … plus que ça. » Je n’en étais pas vraiment fier mais je n’étais qu’un homme ! Que celui qui n’aurait pas la moindre pensée déplacée en voyant Rêve me jette la première pierre. « Alors … Navré de vous filer des insomnies avec mes petits meurtres mais c’est un juste retour des choses ! Vous tous … Les gens. Vous me filez des migraines. Je ne peux pas poser les yeux sur vous sans voir votre vie défiler. » Il y avait pas mal de choses à voir, concernant mon compagnon du jour.

« Hum ... » Mes yeux tombèrent sur le drôle d’objet que me tendait le Maître des Esprits. Je n’étais pas certain qu’il soit très judicieux d’accepter cette proposition, mais il me semblait aussi que refuser était tout autant stupide. « Vous n’avez pas peur des effets que ça pourrait avoir sur un type comme moi ? » demandais-je en riant. Malgré tout, j’étais indécis, peu désireux d’allonger la liste de mes vices et de mes dépendances. L’alcool – ce meilleur ami aux idées dépravés – acheva de me convaincre et je suivis les instructions du Chaman. « D’accord d’accord ... » marmonnais-je en plissant les yeux, sous un nuage de fumée. « Ma tête ... » Une bouffée d’herbe, une gorgée d’alcool. Une bouffée d’herbe, une gorgée d’alcool. Encore une bouffée d’herbe et une autre gorgée d’alcool. Une gorgée d’herbe et une bouffée d’alcool. Voilà que j’étais en train de suffoquer dans un coin de toit, à quatre pattes sur le tuile, à cracher mes poumons en essayant de ne pas rendre tout le vin que j’avais dans le ventre. « Petite chose faible que je suis. » finis-je par murmurer en retournant à ma place, après m’être assuré que je ne rendrais pas mes consommations. Un petit sourire étira mes lèvres. « Oui … Je suis marié. Ma situation est toutefois un peu différente de la vôtre. Je pense que dans mon couple, c’est moi le nid à problèmes. Je ne mérite pas ma femme. Elle est bien trop douce, bien trop bienveillante et bien trop belle pour moi. » Je tournai légèrement la tête vers Devaraj. « Lilith est une femme exceptionnelle. Qui dit exceptionnelle dit compliquée … Tout comme vous. » L’alcool me montait à la tête. Je commençais à dire tout et n’importe quoi, sans trier mes paroles. Loin d’être paniqué, je me mis à rire. « Si vous lui arrachez les ailes …. Gardez moi une plume, s’il vous plaît. » Je soupirai. « Si vous saviez … Buvez. Je vous jure que vous allez en avoir besoin. » Mes épaules frémirent, tandis que j'étouffais un hoquet. « Hum … Laissez-moi vous dire un petit secret : mes visions sont orientées par ce que j’ai sous les yeux et ce que j’entends. Je viens d’avoir un condensé de toutes vos parties de jambes en l’air … Alors … Oui, bon. Parfait. Vous avez la forme, j’en suis heureux pour vous … Félicitations … Mais j’aimerai assez m’épargnez ce genre de choses. »

Pour ma part, j’engouffrai une tranche de pain avec un peu de charcuterie. « Je commence à avoir sérieusement faim … Pas vous ? » Depuis combien de temps n’avais-je pas pris un repas décent ? Trop longtemps. Mes vadrouilles meurtrières m’empêchaient de vivre une existence à peu près convenables, et si je trouvais toujours le temps pour boire un peu, manger n’était plus dans mes priorités. Je sautai sur mes pieds, et longeai le toit avec une démarche étrange et chancelante. « La vie n’est pas faite de hasard. » continuai-je, en élargissant le sujet. « Vous êtes familier au Destin. Moi, c’est mon quotidien. Et je ne peux même pas mélanger des cartes sans connaître l’ordre dans lequel je vais les arranger ! » J’éclatais de rire, sans raison particulière. « Une fois … Bien avant de rencontrer mon épouse … J’ai failli me marier. Avec la Vénus. Vous savez ce qui est le pire ? C’est de savoir par avance qu’on va passer une mauvaise journée. Votre père m’a viré de mes propres noces pour prendre ma place, sur les bons conseils d’une rouquine qu’on s’est tapé tous les deux, simplement parce qu’elle avait envie de pourrir l’existence de ma fiancée et que si elle pouvait s’en prendre un peu à moi par la même occasion, c’était un petit bonus agréable. Je savais tout. Et je n’ai rien pu faire, parce que je n’en avais pas le droit. C’était mon destin. » Je tournai sur moi même, la tête penchée vers le ciel. « C’est comme ça, je ne peux presque rien dire. » Mon regard tomba sur Devaraj. « Mais je peux vous confier une chose : si un Aether devait montrer le bout de son nez, je serai prostré dans un coin à me tenir la tête parce que cela serait une aberration pour le Temps. Je vais bien. Donc pas de Dieu pour le moment et c’est tant mieux. Je ne tiens pas à rencontrer Nidalu. » Je me mis à tapoter mes cuisses, au rythme d’une musique qui traversait mon esprit. « Évitons de les offenser. Je tiens à rester discret. Quelque chose se prépare, Devaraj. Ça va faire mal. » Je poussai un long soupir. Il fallait que je me taise, maintenant. Pour parvenir à ce miracle … Une autre bouteille.
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Mar 22 Jan 2019, 22:48

Quand rien ne va, fume de l'herbe et bois du cavin
-Caleb



Les racontars eurent le mérite de faire oublier à Devaraj sa colère contre l'Aether de la Folie. C'était toujours ainsi : sa rage pointait brusquement se nez puis repartait sans prévenir et sans que cela n'ait ni queue ni tête. Il battit ses bras dans l'air afin de reprendre un équilibre éphémère mais suffisant, tout en hochant la tête. "Oui... ça ressemble à ce que Jun pourrait faire comme genre de blague. Et la rouquine aussi, si nous parlons de la même. Hum." Il n'y avait pas cinquante rouquines avec laquelle Jun aurait pu coucher et faire des farces. Sur le coup, le chaman trouva le récit très drôle. Il avait hérité de l'humour hasardeux de son père, ce n'était pas un secret. Mais il avait aussi hérité de sa jalousie possessive. Devaraj se rembrunit brusquement en pensant à sa propre femme. Loin de lui l'idée que l'Aether viendrait lui piquer Lilith dans peu de temps, tout comme il avait piqué Lily-Lune autrefois... Les deux ivrognes ici-présents auraient alors une raison commune de le haïr. Il fit une moue boudeuse, semblant se calmer devant les propos de son compagnon de beuverie. "Bon d'accoooooord. Pas de blasphèmes, blahblahblah. J'irais faire pipi sur ses totems un peu plus tard..." dit-il d'une voix pâteuse. Il se sentait loin, très loin de son île et de ses milliards de tabous religieux qui représentaient une chape de plomb dans son quotidien. En réalité, il se sentait très léger, là, sur un toit poussiéreux en compagnie du roi des Rehlas. "Ah ah ah ! Avec ce que vous me racontez... Si je n'étais pas déjà très occupé à me plaindre de ma misérable personne, je passerai mon temps à verser des larmes pour votre compte. On pourrait monter une pièce de théâtre avec nos deux vies et faire pleurer toutes les terres du monde entier... Ce... C'est drôoooole !" Ce qui l'était moins, c'était son ventre qui gargouillait. Il ne se gêna pour piquer du saucisson à son compère. "Enfin... Comme mon peuple est très susceptible, personne ne ressortirait vivant de ces spectacles." conclut-t-il en fixant un groupe d'homme qui sortait de la taverne en contrebas. "Oh ! J'ai toujours un petit jeu, c'est de regarder les autres et de me demander lequel finira esprit parasite... Le grand type tout sec là par exemple, il a l'air mesquin ! Hum. Non mais c'est pas amusant en fait." fit-il en se rendant compte la stupidité de parier sur le futur en compagnie d'un Rehla. "Je manque d'habitude ! Nous devrions nous voir plus souvent, Caleb !" Prostré par sa révélation, il fronça les sourcils, mécontent, repensant à leur conversation décousue. Certaines parties lui revenaient en tête pendant que d'autres s’effilochaient dans son esprit comme la fumée dans l'air nocturne. "Un nom de code ? Hmphhfr. Allez-y. Quant à mes parties de jambes en l'air, je suis heureux qu'elles vous plaisent." Le Chaman ponctua cette remarque d'un sourire particulièrement idiot. L'herbe commençait ses effets dévastateurs sur son collègue. Pour sa part, il y était devenu trop résistant, mais il n'avait pas l'habitude de vider des bouteilles. On pouvait dire qu'ils étaient quitte après avoir partagé leurs vices respectifs. Devaraj rit, tout à fait incapable de faire le tri dans les paroles de Caleb, qu'il n'était pas certain de comprendre tout à fait parfois, et dont il ne se souviendrait qu'à moitié le lendemain. C'est pour cela qu'il ne prêtait lui aussi plus vraiment attention à ses propres mots. "Beaucoup de choses vont faire mal, merci du présage. Ce n'est qu'une question de point de vue." grommela-t-il, cynique. "Quand j'étais petit, j'ai entendu dire que certaines personnes utilisaient la magie pour enlever leurs sentiments. Seulement moi, je crois que j'aime beaucoup trop souffrir pour faire ça. Le masochisme, ça s'appelle, c'est un truc commun aux Suprêmes de l'Au-Delà et qui nous aide à ne pas se suicider. Eh ! Vous croyez que c'est juste pour halluciner Machin en train de culbuter Machine et puis se tripoter à poil en dansant qu'on cultive des parterres entiers d'herbe à pipe ?! Les gens sont idiots. JE LES DÉTESTE !" Ramassant une poignée des gravillons éparpillés sur le toit, il les jeta sur le groupe en bas en hurlant. "HOUSTE ! BANDE D'IGNORANTS !"

Cela lui inspira une comptine, souvent récitée chez les chamans, et comme ses oreilles commençaient à trouver le manque de musique agaçant et qu'il ne pouvait culturellement concevoir de fumer et boire sans jouer ou chanter, Devaraj se leva. Enfin, il appuya son bras au sol et rampa jusqu'à l'appuie plus solide du mur pour se mettre sur ses jambes, plus exactement. "Attendez, je reviens v-vite." C'était sans compter les maudits escaliers dans lesquels il trébucha deux fois et où il réussit à se mettre une épine dans la main en voulant se rattraper sur la rambarde en bois. Dans la salle vidée de ses occupants, Devaraj avisa un instrument à corde soigneusement posé dans un coin près de l'âtre, qu'il vola sans demander son reste. Retournant sur le toit en brandissant avec triomphe la mandoline, il se rassit et entonna d'une voix plus ou moins juste, avec des notes plus ou moins fausses.

"Enfants d'Edel et d'Ezechyel
Ils gardent le Cycle dans l'ombre des divins
Ils célèbrent leur vie éphémères sans tabous
Hantés par les fantômes d'hier et de demain
Alliés des Ombres et amis des esprits fous

Leurs oreilles sont innombrables et éthérées
Les secrets sont sondés par leurs yeux espions
Dans leur sang coule la brutalité des Réprouvés
Ils aiment la luxure des Déchus et les Péchés des démons

Fous-êtes vous de penser sauvages
Ceux qui seront vos juges dans l'éternité de la Mort !

Fous ê- CHTOOOOONG !"


L'une des cordes se cassa. Outré, le chaman balança l'instrument dans le vide.
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Ven 01 Mar 2019, 13:34


Mon rire était devenu intarissable, à peine perturbé par ma toux qui menaçait pourtant de me faire cracher mes poumons. Je ne trouvais rien de mieux que de boire un peu pour apaiser ma gorge en feu, et à défaut de trouver de l’eau dans ma caisse à merveilles, je jetai mon dévolu sur du rhum. Je pris une grande inspiration pour calmer mon hilarité. Il fallait vraiment que je parvienne à respirer normalement. Quelques secondes s’écoulèrent en silence, la mandoline ayant été brutalement congédiée du petit interlude musical. « Quel dommage … Personne ne veut jamais parier avec moi. » soupirai-je, faussement contrit. Il arrivait que des étrangers me mettent au défi. Ils ne revenaient jamais à la charge. C’était de l’argent facile pour moi. Non pas que j’en manquais …  C’était simplement divertissant. « Vous allez finir par vous habituer. Je peux vous assurer que nous nous reverrons, Devaraj. » J’esquissai une petite grimace, redoutant par avance ce moment. Mes histoires n’étaient pas innocentes, pas plus que mes anecdotes. C’était tout ce que je pouvais faire pour lui : lui conter quelque chose du passé, pour qu’il ne soit pas trop décontenancé à l’avenir. « Essayez de vous rappeler de ce que je vais vous dire. » continuai-je, sur un ton étrangement sérieux. « Que ce soit dans les moments de désespoir où tout semble noir … Ou dans les instants d’euphorie où la vie paraît si tendre … Peu importe que, pendant une seconde ou une semaine, vous vous sentiez misérable ou triomphant. » Je dodelinais de la tête, les yeux perdus dans les étoiles. « Ça aussi, ça passera. » Il fallait vraiment que je postule dans les établissements proposant d’organiser des soirées, parce qu’il n’y avait pas à dire : je savais comment mettre de l’ambiance. Caleb, à votre service pour refroidir l’atmosphère avec des élucubrations extravagantes, dont le sens échappait sans doute au commun des mortels. « Bon ! » ajoutai-je plus fort, en tapant sur mes cuisses. « Notre nom de code. » Il était hors de question de verser dans le « Dédé », bien trop classique, ou le « Vava », qui m’évoquait bien trop la fameuse rouquine. Non … Ce Chaman méritait un sobriquet surprenant. Un nom dont on ne l’affublait pas tous les jours. Quelque chose inattendu et de rafraîchissait. Je fronçai doucement les sourcils, perdu dans mes réflexions. Puis ce fut l’illumination. « Lord Poulpe. Je vais vous appeler Lord Poulpe. Appelez moi Doudou Lapinou. » Je souris, satisfait de ma trouvaille. « C’était le nom des peluches favorites d’une de mes filles. Des machins affreux qui ne ressemblaient à rien, tout droit sortis d’un cauchemar. Je m’en suis débarrassé à la première occasion, bien trop content de les expédier dans l’au-delà réservé aux nounours monstrueux comme eux. Lord Poulpe vous ressemblait un peu. Il avait un regard dérangeant et un grand sourire carnassier, avec des dents pointues. Je l’aimais bien, au fond. » Mes compliments étaient hors concours. Avec un sourire idiot incrusté sur les lèvres, je me mis sur mes pieds, avec la grâce d’un émeu qui craindrait pour sa vie. Ils étaient beaux, les Souverains de ce monde ! Heureusement que mon peuple était un secret bien gardé. Personne ne connaissait mon rang. « J’ai faim. Bien trop pour me contenter de grignoter. Attendez une seconde ... »

Je m’étais évaporé sans crier gare, pour revenir en deux temps trois mouvements auprès du Roi des Chamans. Plusieurs assiettes tenaient maladroitement sur mes bras, dans un équilibre plus que douteux. Je fis en sorte de poser le tout sans catastrophe. « Bon appétit. » Je n’avais pas vraiment besoin d’indiquer à mon interlocuteur ce qui était pour lui. En véritable détective privé qui savait tout sur tout, j’avais choisi de lui commander ses plats favoris, assez différents des miens. Il allait l’apprendre à ses dépens : me côtoyer était agaçant. « Est-ce que vous souhaitez que je vous ramène quelque part, ensuite ? » demandai-je par pure courtoisie, puisque je venais de faire la démonstration de mes dons de téléportation. Je débouchai une bouteille – de bière à en croire l’étiquette – pour boire quelques gorgées. Je fis une grimace, plissai les yeux pour regarder à nouveau ma boisson. Absinthe ? Oui bon. J’y étais presque. « Hum ... » marmonnai-je en frottant mes tempes, abandonnant un instant ma fourchette. Je sentais que mon Spleen m’échappait. Il fallait que je me calme sur l’alcool. « Dites-moi si vous avez soudainement des envies suicidaires. Enfin … Vraiment. Si vous envisagez brutalement de vous trancher la gorge. Ma faute. Désolé. » articulai-je en piquant mes pâtes à nouveau pour les engouffrer dans ma bouche. Manger allait peut-être me remettre les idées en place. Personne ne devait mourir. Pas comme ça , en tout cas. J’allais me faire sévèrement taper sur les doigts, si je n’étais pas fichu de me contrôler à cause de mon état lamentable. « Une fois … J’ai failli pousser un jeune aristocrate à mettre fin à ses jours. J’étais un peu ivre et très en colère. Il courtisait une de mes filles. Je sus un papa poule, je crois. » L’euphémisme de cette ère.  
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Dim 03 Mar 2019, 17:09

Quand rien ne va, fume de l'herbe et bois du cavin
-Caleb


«Oh.» C'était bien la première fois qu'on lui avouait à haute voix son regard dérangeant et son sourire carnassier. En général les gens préféraient se taire en baissant la tête, ou bien détourner le regard avec dégoût, c'était d'une insipidité incroyable. Le Chaman contempla son homologue en train de manger comme si de rien n'était. Lui n'avait plus faim. Son appétit était aussi instable que son esprit. Parfois il oubliait tout simplement de subvenir à ses besoins vitaux et s'évanouissait sans prévenir. Il sourit autant qu'il put, sincèrement touché par les compliments. Embrumé par l'alcool, Devaraj tenta de se lever. En vrai. Tant pis. Il leva les bras au ciel en direction de Caleb. «Merci mon DOUDOU LAPINOU ! Je vous signale que vous avez le même regard que moi. En plus intelligent, certes. On doit vous prendre pour le premier de la classe tout innocent, ah ah AHAHAHAHA ! Innocent et sain d'esprit ?! Que nenni, ce n'est pas à un vieux singe qu'on apprend à faire des grimaces. » Brutalement, Devaraj cessa de sourire et se pencha d'un air mystérieux vers Caleb, jusqu'à lui frôler la joue, ses pupilles presque blanches fixées sur le Rehla. Il se sentit bizarre. Les paroles de Caleb n'arrivèrent pas à son esprit soudainement renfermé sur lui-même. Ne réalisant pas vraiment sa proximité un peu trop grande avec son camarade, le Chaman s'immobilisa comme une statue, le regard plongé dans un abîme sombre. Quelque chose l'empêchait de regarder ailleurs. Oh, il aurait pu la combattre, cette chose, et peut-être s'en sortir. Après tout, il avait déjà une sacré expérience renforcée par l'Emprise qu'il subissait quotidiennement. Mais ce n'était pas son genre. Son genre à lui était de prendre comme tel tout ce qui lui arrivait, car il s'agissait de la volonté des Aetheri. «Je suis tout seul au fond du ravin de la Folie, à vous examiner tous un par un et à me demander qui me rejoindra le premier.» chuchota-t-il frénétiquement. Il appuya sa main sur l'épaule du Rehla, bien inconscient d'être sous l'emprise du Spleen, bien qu'il voyait que son état soudain n'était pas naturel. Ses doigts se crispèrent. «C'est étrange et anormal. Comment se fait-il que vous vous en sortiez mieux que moi avec toute votre vie détestable ? Vous feriez mieux de me rejoindre, d'arrêter de vous accrocher misérablement à vos illusions. Les illusions, c'est quand on y croit le plus qu'elles disparaissent. PCCHHFIOUuuuuuuu... Puis plus rien. Le néant. » Il illustra ses propos par un vague geste de la main, les yeux écarquillés. «Ici-bas plus rien ne compte.» Devaraj répéta cette dernière phrase plusieurs fois, les yeux dans le vague. Il n'était qu'un pion. Il le savait déjà depuis les premiers jours où cette fichue couronne s'était posée sur sa tête. Dire qu'il n'avait même pas eu son avis à donner... Le Chaman se recroquevilla en boule, envoyant valser d'un geste brusque le plat de pâtes qui le gênait dans son idée de se faire un oreiller de la première chose attrapable à portée de main, c'est à dire : Caleb. Le Chaman se débattit furieusement avec une violence rare pour s'emparer de son coussin peu importe le désaccord de ce dernier. Il l'attrapa par la taille et ne le lâcha plus, comme un homme en train de se noyer et s'attachant à son unique bouée de sauvetage. Oui. Caleb était une bouée, rouge et blanche. Devaraj n'avait plus du tout conscience de tenir un humain dans ses bras. Il devint persuadé que s'il le lâchait, tout sa vie allait tomber en morceaux. Il allait se noyer. Et finir dévoré par des sirènes qui avaient toutes Vanille en portrait. Elles étaient toutes là à roder et à lui attaquer les jambes qu'il agitait avec frénésie dans le vide. Et c'était effrayant. Il aurait donc fallu lui couper un bras pour qu'il obtempère... Ah, c'est qu'il fallait faire attention à ne pas le brusquer lorsqu'il avait trop fumé et qu'il entamait son voyage hallucinatoire, car il y avait deux directions possibles, l'une merveilleuse et l'autre monstrueuse. Trop tard, il penchait vers la mauvaise désormais. «Pourquoi manger, ça sert à rien ! Et moi aussi je sers à rien ! Même pas fichu de faire cette couronne et puis au final ça ne lui aurait pas plu à Lilith. Elle préfère les autres, les Anges, et tous les autres dont elle me parlera jamaiiiiiiiiiiiiiiis ! POURQUOI ELLE M'A DIT OUI HEIN !!!! J'EN AI MARRE !!!!! JE - oh.» Il fondit en sanglots soudainement, articulant parfois des phrases que lui seul pouvait bien comprendre et tirant nerveusement sur les habits qu'il pouvait attraper. «JE VEUX RENTRER CHEZ MOIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII... » dit-il entre deux spasmes. «Et ma magie... JE VEUX MA MAGIIIIIIIE.. ELLE ME MANQUE MA MAGIE...»
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Dim 03 Mar 2019, 18:49



Mon regard tomba lourdement sur mon assiette brisée et son contenu renversé, vaguement contrarié par ce spectacle désolant. Je fis la moue, en jouant avec un macaroni du bout de l’index. Quel gâchis … Envahi par un sentiment de culpabilité à l’égard de ses aliments au destin corrompu, je commençai à donner à nom à chacun d’entre eux, afin d’honorer dignement leur mémoire. Puis je me surpris à me prendre soudainement d’affection pour les fraîchement baptisés, Alonso et Dorothy. Ils avaient une bonne tête. « Toutes les nuits dans mes rêves, je te vois, je te ressens ... » J’étais en train de secouer une pâte de la main droite, tout en l’approchant de celle que je tenais – avec une infinie précaution - de la gauche. « C’est comme ça que je sais que tu existes ... » Etais-je réellement en train de chanter, là ? « Malgré la distance et l’espace entre nous ... » Le macaroni ondulait, se rapprochant sensuellement de la nouille de ses rêves, qui faisait sa timide dans mon autre main. « Tu es venu pour montrer que tu existes. » Elles étaient maintenant proches l’une de l’autre, à deux doigts de s’embrasser. « A côté …. Loin ! Qu’importe où tu es ! » Elles dansaient langoureusement, avec des petits morceaux de fromage en guise de bras. « Je crois que le cœur continue de battre  ... » Alonso se pencha pour voler un baiser à Dorothy. Je me mis à pouffer, avant de baisser les yeux sur Devaraj, toujours accroché à moi. « Mon petit Poulpy ... » marmonnai-je en frottant son dos. Je ne réfléchissais plus de façon claire, la faute à une consommation particulièrement excessive d’alcool en tout genre et de ma première rencontre avec les herbes hallucinogènes du Peuple des Chamans. Je déposai avec délicatesse les deux macaronis sur une tuile, pour qu’elles puissent rester ensemble, avant de me relever. Mon geste manquait cruellement d’élégance. J’avais déjà du mal à rester debout … C’était encore plus difficile, avec le Suprême de l’Au-Delà qui se pendait à mon cou en pleurnichant. C’était sans aucun doute à cause de moi et de mon Spleen. Mais je n’arrivais pas à canaliser ma magie, qui était libre comme le petit pétale de coquelicot dans la fraîche brise matinale d’un beau jour de soleil. « Je vais vous ramener … Tout va bien ... » La possibilité d’un échec cuisant de ma téléportation pouvant nous disperser  aux quatres coins des Terres du Yin et du Yang ? Naaaaaan. « Elle va revenir ... » La Magie ? Lilith ? Arrêtez de me poser des question ! Je ne sais même pas de quoi je parle. « Il est temps d’aller faire un gros dodo. » Devaraj était plutôt petit. Je faisais une bonne tête de plus que lui. C’était plutôt facile de le tenir dans mes bras. Je n’étais pas certain d’avoir le choix, de toute manière. « Hum ... » Dans un éclat de conscience … Je me dis qu’il n’était peut-être pas idéal qu’on me voit, de cette façon, avec le Roi des Chamans sur l’île Maudite. Il y avait bien assez de rumeurs dérangeantes à mon sujet. Il fallait que je protège mon identité. J’eus une idée lumineuse. C’était du moins ce que je croyais. Je pris donc la liberté de faire une première éclipse, pour trouver ce que je voulais, avant de me rendre sur le territoire de mon ami. Ami ? Oh … Oui … Non ! Peut-être … Peut-être pas. Je n’en sais rien. Je m’en fiche !

« Ne faites pas attention à moi … Je ne suis qu’un humble Doudou Lapinou, venu ramener son amant …. » J’étais persuadé d’avoir dit « ami ». C’était presque ça, après tout. J’étais d’avis que, quand on ne se trompait que d’une syllabe, on ne devrait pas changer autant le sens d’une phrase. Devaraj, qui avait presque déchiré ma chemise à force de s’accrocher à moi, n’allait pas arranger mes affaires. Au moins … J’étais parfaitement anonyme. Je ne me présentais pas son mon véritable nom, et mon visage était dissimulé derrière un masque représentant un lapin, avec de petites oreilles pointant entre les mèches désordonnées de la tignasse brune qui me servait de chevelure. C’était une très bonne idée ! Je n’allais tout de même pas me présenter en tant que « doudou lapinou » en arborant un masque qui représenterait un lion ou une chèvre, quand même ! Il fallait un peu de cohérence. J’avais à peine conscience de ce que je faisais et de mon Spleen, qui tombait lourdement sur tous les individus qui avaient le malheur de croiser ma route. Je ne faisais que passer. Ils ne risquaient pas grand-chose, si ce n’est quelques idées noires passagères. J’étais sur un petit nuage, loin, très loin de mes considérations habituelles. Je ne réfléchissais pas. Mon cerveau s’était cassé en même temps que mon assiette de pâtes. « Voilà ! » clamai-je victorieusement, en allongeant Devaraj sous une tente et en essayant de me dégager de son étreinte. J’étais tellement fatigué … Je me laissai tomber à ses côtés. Une idée lumineuse, là encore. Après tout … Quand on avait sommeil, il fallait se coucher. Non ? « Dors. » ordonnai-je au Chaman, sans même me rendre compte du tutoiement, employé naturellement. Comme si je forçais mes enfants à aller au lit. Il n'avait qu'à pas se comporter comme un gamin de quatre ans ... Cela ne réveillerait pas mes instincts paternels. «  Ta magie sera là, à ton réveil. C’est promis. »
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Dim 03 Mar 2019, 20:24

Quand rien ne va, fume de l'herbe et bois du cavin
-Caleb


Sa magie était bien là, à son réveil. La preuve en était qu'il parlait tout seul et que ses yeux brillaient dans le noir alors qu'il dormait encore. Devaraj se réveilla en sursaut. Pas à cause de la présence d'un homme masqué à ses côtés cela dit -chose tout à fait normale somme toute pour un Suprême de l'Au-Delà, mais simplement grâce à un cauchemar idiot où il devait retrouver les maris et les femmes de tous les dieux un par un sans jamais pouvoir reconnaître ou se rappeler des visages et des noms de ceux qu'il avait déjà interrogé. Débile. Le Chaman bailla et porta sa main à la tête. Ses yeux le brûlaient et son crâne allait probablement exploser. «De l'eau...» murmura-t-il en se retrouvant avec la voix d'un cadavre en renaissance. Il s'aperçut enfin qu'ils n'étaient pas dans sa chambre et, vexé de ce fait dérangeant, il les téléporta tout deux au bon endroit à Zaowa, dans ses appartements. Dans sa précipitation, Devaraj ne se rendit pas compte que sa magie encore un peu instable détruisit la tente entière, ne laissant qu'un cratère béant et noir derrière leur passage... «Hum !» Le Chaman contempla Caleb. Il se rappelait à peu près leur rencontre, jusqu'à un certain niveau de détail. Par exemple, il n'avait aucun souvenir de ce masque, ni d'avoir couché avec cet homme. Pourtant cela semblait être une évidence aux yeux de tout ceux qu'il rencontra dans sa maison. Perplexe, Devaraj poussa le Rehla sur son lit en fourrures, avec la même délicatesse que s'il avait affaire à un sac à patates. Oui bon. Après réflexion et une inspection plus approfondie, Caleb était vraiment pas mal. Il avait bien dû se le taper dans un moment d'euphorie. Ou de désespoir. Devaraj se rappela avoir fondu en sanglots et grogna sur lui-même en traversant les couloirs. Ce n'était pas son genre de pleurnicher devant quelqu'un d'autre qu'un Dieu, il ne comprenait décidément pas sa précédente crise, ni les affreux cauchemars qu'il avait eu, ni l'humour noire qui planait toujours au dessus de sa tête, comme un orage. Ses yeux étaient noirs de cernes et rouges de sang. Il plongea dans un des bains qui jouxtait sa chambre. Franchement, Caleb ne devait pas être un bon amant, sinon il s'en serait souvenu pour commencer, et puis il ne se serait pas senti aussi mal après une nuit dans son lit. Non, vraiment ! Il devrait lui donner des conseils pour la prochaine fois que monsieur voudrait faire des galipettes avec quelqu'un parce-que la situation avait l'air d'être misérable. Et l'autre alors, est-ce-qu'il avait prit du plaisir ? Non, le mot plaisir ne convenait vraiment pas à ce dont sa mémoire témoignait encore. Étrange. Il n'avait jamais baisé sans prendre son pied, ce qui le poussa à mettre sérieusement en doute ce que tout le monde affirmait désormais sur cette île : «Le roi a couché avec un Eversha lapin géant !» ou quelque chose du genre. Le Chaman fit des bulles avec l'eau, pensif. «Blblblblblblblblblbl...» Quelle tristesse de ne pas savoir se servir de son entrejambe pour honorer Edel ! Et un Souverain en plus ! Il fallait qu'il appelle Satinka pour lui demander de prêter son harem au Rehla le temps de parfaire son éducat- Pfrrrrr Le Chaman manqua de se noyer en buvant la tasse après avoir glissé sur le rebord lisse de la pierre. Ouai. Il n'était pas très bien réveillé encore. Il sortit -avec difficulté- du bain, se sécha et attrapa une tunique qu'il ne prit pas la peine de fermer. Il était chez lui, il pouvait se balader nu comme un ver, non, il devait, même.

Avec un sourire espiègle, le Chaman profita des derniers moments de sommeil de Caleb pour s'emparer d'un pinceau et... le recouvrir de signes peints de la tête aux pieds. Ses capacités intellectuelles pas très élevées de base ne lui étaient toujours pas revenues. Il réfléchissait toutefois à un moyen de remercier le Rehla de l'avoir raccompagné et de lui avoir remis sa magie ; et n'avait rien trouvé de mieux à ses yeux que de l'orner de ses peintures. Malgré son angoisse encore très présente, Devaraj trouva le moyen de se calmer en peignant et en profitant des odeurs d'encens et de fleur d'oranger qui lui étaient si familières. Sa chambre était ornée de masques et de représentations diverses des Aetheri, si bien qu'elle était un temple à elle toute seule ; son seul refuge. C'était ici que les fourrures étaient les plus douces, les couleurs les plus pétantes et la fumée la plus belle. Il se sentait très nul et incapable mais au moins, il était chez lui, où tout était à son goût -discutable- parfait. «C'est qui ?» Satinka qui s'occupait de déshabiller l'homme, le mangeait des yeux avec curiosité. «Euh. Je sais pas trop. Ca- Hum. Doudou Lapinou.» ; «C'est ta dernière trouvaille ? T'en as passé du temps avec lui ! On te croyais de nouveau mort.» ; «C'est ma spécialité de faire semblant de mourir. Je n'ai pas de trouva-... Hm. C'est très compliqué. Un très mauvais coup en tout cas ! Mais je l'aime bien quand même, il est drôle. Et un peu bizarre, je crois.» répliqua-t-il doucement. Le Chaman releva la tête pour fixer la jeune femme d'un sourire dérangeant mais ravi, les yeux pétillants typique des enfants. «Comme moi ! »
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Jeu 17 Oct 2019, 20:48


Mes yeux se mirent à papillonner de manière frénétique, pour scruter avec une pointe d’incrédulité le décor bariolé d’une chambre particulièrement encombrée. Je me redressais d’un bond, presque à bout de souffle. « Je ne comprends pas. » baragouinais-je, la voix un peu enrouée. « D’accord pour la momie … Mais que fait Vanille au mariage d’un crocodile et d’une asperge ? » Il me semblait inutile de préciser que je n’étais pas vraiment du matin. Je faisais partie de cette catégorie de personnes, incapable d’être cohérente et gracieuse au réveil, et à peine aimable avant son café. Avec une goutte de rouge pour moi. « C’était un beau mariage. » Mon esprit était encore à moitié dans cet étrange rêve aux allures nébuleuses, dont j’avais été douloureusement extirpé. Sans parler du brouillard alcoolisé qui planait encore sur ma pauvre petite caboche. Je me frottais un peu le visage, avant de m’étirer de tout mon long comme un chat. « Bonjour Devaraj. » Je grognais plus que je parlais. « Satinka. » continuais-je, comme s’il était parfaitement normal que je connaisse le nom de cette parfaite étrangère qui me reluquait avec gourmandise. « Où est-ce que … » Je reprenais peu à peu conscience de mon environnement. « Ah ! » Je sursautais brusquement. « Il y a quelque chose sur ma main droite ! » Je pris le temps d’observer ce qui se tramait, les sourcils froncés. « Tout va bien. Fausse alerte. C’est juste ma main gauche. » Quelques petites secondes s’écoulèrent. Des secondes où je pris - enfin ! - la mesure de ce qui se passait. Tout me revenait en mémoire. La passé, le présent et le futur. Dire que j’avais merdé aurait été un euphémisme généreux. Pourrais-je avoir une bouteille de … De n’importe quoi, à vrai dire, tant que c’était fort. Il fallait simplement que je noie mon malaise. Je levais un doigt sentencieux vers les deux Chamans. « Non. » Comment j’allais expliquer ça à ma femme, moi ? « Non, non, non et non. » Quelques visions obstruaient mon regard. Autant dire que je n’étais pas particulièrement enthousiasmé par ce que je voyais. « Nous n’avons pas couché ensemble. » articulais-je en détachant soigneusement toutes les syllabes. « Absolument pas. » Malheureusement, je savais pertinemment que ce n’était pas ce que l’Histoire allait retenir sur Doudou Lapinou. Je croisais les bras, la mine un peu pincée. « Si ça avait été le cas, tu t’en souviendrais. Et tu en aurais de très bons souvenirs. » Putain de merde. Est-ce qu’il était vraiment le moment de dorloter son égo de mâle blessé dans sa virilité ? Définitivement pas. Pourtant, j’avais bien prononcé ces mots. Va te faire soigner, Caleb. Et pour la bouteille, pas la peine d’emmener des verres. Je vais me débrouiller. « En tout cas, merci pour … tout ça. » Je désignais mon corps nu, recouvert de peinture. « Hum. » Comment ça, nu ? Il allait donc falloir que je trouve une excuse pour : avoir découché, revenir à poil et couvert de motifs chamaniques, le tout avec un parfum laissant peu de doute sur la teneur de ce que j’avais fumé pendant ma folle soirée. Sans compter les premières rumeurs sur le lapin de l’Île Maudite. Il n’y avait pas à dire : j’avais vraiment hâte de rentrer.  J’hésitais vaguement à demander une pelle à mon hôte, et un coin de son territoire pour creuser ma tombe. « Ce fut une … sacrée soirée. » Aux conséquences qui allaient avec. Je prévoyais déjà d’assassiner dans son sommeil une jeune peintre en herbe. « Je … » Mes doigts aggripèrent mon pantalon qui traînait dans un coin, pour l’enfiler à vive allure. « Il faut que je rentre. Si ma femme me découpe en petits cubes, mon fantôme viendra réclamer vengeance auprès de toi. » Tant pis pour ma chemise. Qu’il la garde. « Passe chez moi quand tu veux. » Est-ce que j’avais vraiment invité un être instable, passablement taré et incapable de la garder dans son pantalon chez moi ? Mine de rien … Je l’aimais bien ce petit gars. « On va se revoir très vite. » Je pris le temps de dire au revoir à mes interlocuteurs, avant de disparaître comme une tornade.

Une question me taraudait, tandis que je scrutais ma tasse de café comme si elle détenait tous les secrets de l’univers. Agacé, je la jetais à travers la véranda. « C’est moi qui les détient, petite ingrate. » Ma soeur me gratifia d’un petit sourire, peu étonnée de ma dispute avec mon petit-déjeuner. Elle se plongea rapidement dans sa lecture, sans se soucier de mon air grognon. « Hum. » Je massais mes tempes douloureuses, en me jurant de ne plus jamais boire et fumer. Pas faire les deux en même temps, s’entend. Je me voilais la face, à en croire les visions de l’avenir. Mais … Sérieusement … Est-ce que j’étais vraiment parti en faisant un bisou sur le front de Devaraj ? Pauvre taré.      
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