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 [II - XXIII] À l'Aube du Renouveau [Solo]

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Mancinia Leenhardt
~ Humain ~ Niveau IV ~

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◈ Parchemins usagés : 11258
◈ YinYanisé(e) le : 01/05/2015
◈ Âme(s) Soeur(s) : Neah Katzuta | Ange | Compagnon
◈ Activité : Joaillière [Rang IV] | Médecin [Rang III] | Éleveuse de Vaches [Rang I] | Investisseur [Rang II]
Mancinia Leenhardt
Jeu 21 Juin 2018, 17:27

Catégorie de Quête : II. Sauvetage - XXIII. Métier
Partenaire : Solo
Intrigue : Le temps est venu pour les Humains de repartir vers le Royaume dans lequel ils ont choisi de reprendre leur vie. Peu de temps avant le départ, une femme enceinte qui accompagnait son époux perd les eaux et Mancinia se charge d'aider un médecin dans l'urgence. Malheureusement, l'accouchement de la jeune femme se passe mal et l'Humaine se retrouve devant un choix ; la laisser mourir ou trahir son secret.


L'Humaine avait attendu et redouté ce moment. Cela faisait plusieurs jours que son éveil et celui de dizaine d'autres s'était produit, l'heure était venue. Celle de quitter cet endroit prodigieux, construit au milieu des dunes sablonneuses, pour se rendre dans son nouveau chez soi. Mancinia n'était pas certaine de ce qui l'attendait réellement à Qaixopia, bien que de nombreux interlocuteurs lui aient décrits l'environnement, les règles ou le mode de vie des habitants, l'appréhension grignotait ses tripes. Il lui était difficile de tourner la page. Dans son esprit, la Guerre était encore partout. Ses plaies étaient encore vives alors que d'autres avaient poursuivi leur vie. Qu'était-il advenu de sa mère au cours de cette décennie ? Elle avait mis tant d'années à retrouver sa trace. Quatre ans. Est-ce que ce calvaire allait recommencer ? Est-ce qu'elle devait à nouveau la rechercher au travers des différents Royaumes Humains, ou quelqu'un saurait lui répondre une fois sur place ? Elle l'espérait. La jeune femme se privait complètement de paroles, murée dans un silence presque religieux. Personne ne daignait la déranger dans ce qui semblait être une méditation profonde, les révélations l'avaient achevée, les actes en découlant l'avaient déchirée. Il était ici l'heure qu'elle se relève et qu'elle se tienne face au monde, essayant de retrouver sa force d'antan qui avait déclinée.

Matasif ? Matasif !
Quoi ?

Son ton était plus sec que voulu, mais elle aussi avait du mal à se refaire à cette nouvelle existence. Mancinia avait besoin de temps et de calme, un luxe que personne ne semblait être prêt à réellement lui accorder, accentuant sa mauvaise humeur. Ne pouvait-on pas lui offrir quelques moments de répits ? En se retournant, elle vit un homme aux cheveux grisonnants et au regard clair, sa tenue était débraillé et sa mine fatigué laissait présager d'avance ce qu'il allait lui réclamer.

Navré de vous interrompre dans vos réflexions, mais j'ai besoin de vous !
N'y a-t-il personne d'autre de disponible ? demanda-t-elle.
Personne d'aussi compétent, en tout cas !
Bon.

On ne lui laissait visiblement pas le choix. Certes, elle aurait pu refuser et s'en aller en le laissant là, mais son éducation se le refusait. Plus que sa réputation, d'ailleurs. Ce serait stupide que de laisser un homme à ses déboires sans connaître la raison de sa demande. Peut-être devrait-elle encore retrouver une quelconque peluche égarée, ou sauver un noble en détresse ? N'avait-elle pas dépassée ce stade ? Ou devait-elle tout recommencer comme auparavant ? Ce n'était pas la motivation qui manquait, seulement les protestations de son corps et sa fatigabilité excessive. Cela allait demander du temps et, encore une fois, ce n'était pas un luxe qu'on lui accordait. Mancinia se redressait, droite. Rien que se relever lui donnait presque envie de se rasseoir tant cela lui donnait le tournis, presque la nausée, mais elle veillait à ne pas flancher devant les autres. Comment allait-elle faire pour cette longue marche qui les attendait ? Heureusement, elle n'était pas la seule dans cet état amoindri. Ce qui était facilement explicable au passage : son corps était demeuré dix ans sans remué un droit, comme paralysé. Ç'aurait été trop simple de se redresser comme si de rien n'était. La punition, déjà cruelle, n'aurait sans doute pas été comprise. Argh. Elle maudissait Sympan ! Elle n'avait rien demandé de tout ceci !

L'homme l'attendit, impatient, avant de reprendre sa route, sans lui fournir plus de détails sur ses intentions. Il pressait le pas tandis que Mancinia essayait de le suivre du mieux qu'elle pouvait, malgré la désagréable impression de lourdeur dans ses jambes. Sans parler du vide constant dans son coeur. La présence de Kamiya était un manque. Son soutien, son poids sur son épaule. Qu'était-il advenu de son corbeau, ce précieux ami et fidèle allié ? Tout lui avait donc été enlevé ? Sa rancoeur n'en pouvait qu'elle plus grande. Son amertume de ne pas savoir également. Au milieu du chemin, coupant court à ce silence glacial, l'homme reprit la parole.

Je ne me suis même pas présenté ! dit-il sur un ton de flagellation. Je suis Khortdad, médecin de Qaixopia.

Pourquoi un médecin venait-il la rechercher dans l'unique coin calme de cette foutue Pyramide ? Allait-il lui admettre la raison, ou devait-t-elle le menacer d'arrêter de le suivre pour ça ? Ce dernier comprit sans la voir qu'il ferait mieux de lui expliquer.

J'aurai besoin d'assistance sur un accouchement.

Mancinia s'arrêtait aussi sec, ce dernier l'imitait quelques instants plus tard.

Je ne suis ni une médecin, ni une accoucheuse.
Vous avez bien dû mettre un ou deux bébés au monde !

Son regard tranchant exprimait son inexpérience à sa place. Certes, elle y avait assisté quelques fois dans sa vie, mais de là à penser que c'était inné. Surtout qu'elle n'avait fait que transporter des sceaux ou de longs draps blancs. Rien de bien glorieux en soi. Rien de bien utile non plus.

Je vous apprendrai, concéda-t-il. Vous êtes l'une des seules qui ait assez de tripes pour supporter la vue du sang, ici. Autant vous dire que vous ne serez pas de trop !

Si Mancinia avait mis quelques bébés au monde à ses yeux, pourquoi n'allait-il pas chercher des femmes plus expérimentées, moins maladroites et certainement mères, elles aussi ? N'y avait-il pas mieux pour comprendre une autre femme en couches ? Malgré son agacement, la demoiselle choisit de suivre ce Khortdad qui retournait à l'intérieur de la Pyramide, où un endroit, au frais, avait été aménagé spécialement pour celle qui donnait la vie. Quel idée de suivre son époux ici, surtout si proche du terme. Pourtant, avant d'entrer dans la pièce, elle les entendait. Ces gémissements, étrangement, lui glaçaient le sang. La femme avait l'important et terrible rôle de donner la vie. L'Humaine n'était pas sans ignorer que la grossesse et l'accouchement étaient des épreuves dangereuses, tant pour la vie de la mère que pour celle de l'enfant. Souvent, seul l'enfant survivait à sa génitrice. Pourtant, cela n'empêchait pas à ces derniers d'être aimé et désiré par leur famille qui les choyait plus que tout. La mortalité infantile étant parfois élevé selon les saisons, ce qui ne changeait rien au fait que l'on essayait aussi de concevoir le plus d'enfants possibles chez les siens. Ces enfants sont des héritiers. Ils renouvellent les générations, assurent la continuité des noms et perpétuent la mémoire des ancêtres.

Ceci résumait la nécessité pour les familles d'avoir plusieurs enfants, en plus d'assuré la pérennité démographique de son peuple qui avait décru drastiquement fût un temps. Il était temps de se reconstruire. Sa propre mère n'avait eu qu'elle, mais la vie en avait décidée ainsi. Comment lui en vouloir, vu que son père avait disparu ? Elle rattraperait sans doute cela. Mancinia aimait énormément les enfants, sans doute pourrait-elle prendre soin de plusieurs ? ...Si elle survivait à l'accouchement de son premier enfant. Ou si cette histoire ne la dégoûtait guère. Rien que de voir cette pauvre femme étendue sur plusieurs couvertures, à même le sol pierreux, qui se tordait de douleur, en nage, le corps humide, les cheveux collés au front et du sang coulant de ses cuisses, l'Humaine avait l'impression qu'elle allait vomir dans quelques instants. Elle essayait d'être forte, mais elle ne l'était plus vraiment.

...Nous avons aussi fini par prendre l'habitude que nos femmes soient allongées ? demanda-t-elle en ravalant sa salive.
Oui, cela permet une meilleure vision du travail.

Aussi aberrant que cela soit, son peuple avait longtemps fait accoucher ses femmes debout, malgré les remontrances de médecins étrangers. On trouvait fort épuisant pour la future mère que de rester droite, soutenue par des sages-femmes, soit disant pour faciliter la sortie de l'enfant. Un homme se tenait près de cette personne en pleine souffrance, il lui murmurait des mots d'encouragement, mais la crainte et la fatigue se lisait dans son regard. Le ton et les paroles ne laissaient guère de place au doute quant à son identité.

Pourquoi son mari assiste à ça ?
Il a l'habitude de vêler les vaches...

Des vaches ? Ce devait être un couple de Haute-Terre dans ce cas. Pourquoi étaient-ils venus se perdre ici ? Peu importait, le résultat était le même. On lui avait donc demandé de venir mettre à bas sa propre femme, puisque personne n'en semblait capable ici. Cela voulait aussi dire qu'il y avait de graves complications, dont elle ne mesurait pas exactement l'importance. Jamais elle n'avait porté de vie en elle, après tout.

J'aurai besoin de l'eau chaude que nous avons fait bouillir, vous pourriez la ramener ?
J'ai l'air de savoir soulever deux sceaux dans mon état ?
Il va bien falloir...

Oh, elle allait donc servir d'âne. Mancinia avait envie de l'envoyer voir le Diable, mais la pauvre parturiente avait besoin de son aide. Ravalant sa fierté et ses faiblesses pour lui venir en aide, elle entreprit de sortir de cette pièce pour reprendre ses esprits quelques instants, avant de longer le couloir où se consumait les torches. Deux hommes veillaient sur l'eau qui frémissait, sans pour autant bouillir. L'un versait le contenu dans des sceaux solides. La guerrière aurait aisément su en prendre deux autrefois, mais elle n'était plus qu'un reflet de ce qu'elle avait été jadis. Pour l'instant. On l'aidait, mais les hommes demeuraient loin de la salle de travail. Cette affaire de femmes, où seul était autorisé un médecin, faisant plus office de décoration ou de bon conseil que d'aide véritable, la future mère étant le plus souvent aidé par des femmes de son entourage, ou plus expérimentées. Khortdad était sûrement présent parce que l'accouchement se passait mal. Vraiment mal. En rentrant dans la salle avec un des sceaux, Mancinia prit conscience que la fumigation des plantes entre les jambes de la patiente, pour relaxer les chairs, alourdissait l'atmosphère.

Je vous en prie, sauvez ma femme et mon bébé !
Le bébé se présente en siège, ce n'est pas bon...
Non, ce n'est...Vous...Vous ne pouvez rien faire... ?

L'homme semblait démunit, les bras ballants, encore sous le choc. Perdre les deux êtres qu'ils chérissaient au monde ? Pas question.

Je vous en prie, sauvez-les ! Vous pouvez...Sûrement... !

Il ne savait que dire de plus. Khortdad lui mit une main sur l'épaule pour l'encourager, avant de s'apercevoir de son retour et de venir à ses côtés, tandis qu'elle reposait le sceau qu'une autre femme s'empressait de saisir pour mouiller plusieurs linges rougis.

La maman va si mal que ça...
Simin est en travail depuis presque une journée.

L'Humaine en savait assez pour être consciente que la vitesse est une composante essentielle lors de l'accouchement, plus celui-ci dure longtemps, plus il y a de risques pour les patients.

Nous avons tout essayé, mais comme vous le voyez...Nous désespérons.

Mancinia constate que l'époux fait consommer une boisson à sa femme, certainement à base de vin et de poudre d'utérus de hase, la femme du lièvre, considéré comme un animal rapide et pouvant abréger l'accouchement.

Si cela continue...La mère et l'enfant iront rejoindre les Aetheri.

C'était cruel. Revenir d'une décennie de sommeil pour assister à la disparition d'une femme et de son enfant lors de ce qui devait être un instant de bonheur. Mancinia était agacée. Les techniques médicales et l'hygiène sont toujours aussi peu développées dans son peuple, ces lacunes et ses ignorances lui sont insupportables. Déiopéa veillait sur le courage de cette femme, mais personne ici ne semblait avoir les grâces de Dareios !

Vous êtes vraiment inutile ! s'exclama Mancinia.
Vous voyez bien que le pied du bébé est sorti en premier ! Nous... !

Elle l'interrompit en levant le bras.

Vous n'avez pas voyagé autant que moi ! Vous ne savez rien !

Mancinia faisait ici preuve d'une grande prétention, d'une haute estime de ses connaissances. Qui était-elle face à cet homme ? Face à ces femmes dans son dos qui la regardait, désapprouvant ses paroles ?

Sortez d'ici ! Je vais le faire moi-même !

Cette déclaration ébranlait le médecin. Pour qui se prenait-elle celle-là ? Il était venu la chercher pour l'aider, pas pour causer plus de dégâts encore. Elle n'était pas une Aether pour prétendre guérir des maux si grands. Il eut un sourire sarcastique. Que cette épreuve lui serve de leçon pour son orgueil.

Très bien. Laissons la Matasif gérer cela seule. Venez.

Le mari refusait de laisser son épouse, mais on ne lui laissait guère le choix. Il était trop faible pour résister.

Je...Je vous fais confiance, lui dit-il.

Khortdad entraînait ce pauvre être vers l'extérieur de la salle, si bien qu'en quelques instants, l'Humaine s'y retrouvait seule avec une femme en souffrance. Non, personne ne lui mettrait la mort d'une soeur sur la conscience.

2 115 mots


[II - XXIII] À l'Aube du Renouveau [Solo] Chriss10
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Mancinia Leenhardt
Jeu 21 Juin 2018, 17:30

Sans perdre un instant, elle vint au chevet de sa patiente. N'ayant ni compétences ni rien de ce que lui avait appris la fièvre des combats, elle mit du doigt sur la gorge de la jeune femme. En effet, ses pulsations étaient très basses. Son coeur baissait de rythme. C'était vraiment dangereux. Pouvait-elle la faire accoucher en siège malgré les risques ? Le tout pour le tout. Mancinia s'enduit préalablement les mains d'huiles de violette et de laurier, rassurant celle qui ne l'écoutait à moitié et qui affrontait courageusement cette situation, glissant quelques doigts pour dilater le col et essayer de faire sortir le second pied, espérant que le cordon ne s'enroule pas autour du cou de l'enfant pour faciliter l'extraction. Rien à faire. Le petit être refusait de bouger. Les cris étaient atroces. Ils n'avaient rien de ceux qu'elle avait pu entendre de loin lors des accouchements auxquels elle avait été témoin. Ça lui faisait presque peur de la voir tant souffrir. Qu'avait donc fichu ce crétin de praticien ? La future mère cherchait désespérément du réconfort. Mancinia prit sa main dans la sienne. Elle serrait si fort qu'elle crut qu'on allait lui réduire les phalanges en charpie.

Le...Le bébé ne peut...Ne peut pas sortir...

Sa voix était faible, terrifiée à cette révélation qu'elle ressentait dans tout son corps.

Je le sens à chaque fois plus...Aïe...Plus faible. Si nous ne faisons rien...Si nous ne le sortons pas vite...Il mourra...Tu dois faire quelque chose...

Mancinia ne savait pas quoi faire pour obliger l'enfant à sortir de son sein. Malgré les poussés, il restait prisonnier du corps de sa mère, qui s'affaiblissait de minutes en minutes. Après une nuit de travail, sans sommeil, elle ne risquait plus de tenir très longtemps.

Je ne sais pas si j'y arriverai...

Ces certitudes étaient réduites au néant. Peut-être devrait-elle aller chercher son mari, peut-être devrait-elle passé ses derniers instants avec lui ? Et pourtant, une flamme apparut dans le regard de la future maman en difficulté. L'Humaine savait à quoi sa soeur pensait. Cela la rendait blême avant même d'entendre ses paroles.

Un couteau...Ouvrez-moi le ventre... !

Mancinia l'observait, interloquée dans un temps, avant de reprendre le fil de la conversation.

Tu es folle ? Je ne peux pas faire ça !
Si tu es à même de...De commander des hommes et de parcourir le monde...Tu es capable de mettre au monde un bébé...
Mais, Simin , si je fais ça, toi...Toi...
S'il te plaît...Sauve le bébé.

Cette opération avait des chances de succès pour l'enfant, mais pour Simin c'était prendre le risque de périr en couches. Mancinia savait pourquoi, elle n'était pas complètement stupide. Pour le reste, sacrifier ce dernier ne voulait pas dire sauver la mère, bien au contraire, ils risquaient même de mourir tous les deux. Est-ce que cela en valait la peine ? Qu'existait-il de plus cruels que de devoir faire des choix pareils ? Non. Pour cette femme, son enfant était plus important que sa propre vie. L'Humaine ne devrait pas avoir de doute. Cette pratique, pourtant, elle ne l'approuvait guère et ne l'avait jamais pratiquée. Si elle coupait trop loin, au mauvais endroit ou si la lame dérapait...Elle n'osait y pensé. D'abord tremblante à l'idée de tuer une de ses semblables ou pire encore, Mancinia prit une dague qui traînait dans le coin. Elle plongea la lame dans l'eau encore chaude pour la nettoyer au mieux. Sa décision était prise et elle devait agir vite. Dans tous les cas, l'Humaine n'avait pas le choix. Si Simin devait mourir, elle prendrait soin de son enfant dans la mesure du possible. Elle essaierait. Laissant la lame refroidir quelques instants, elle arracha un bout de tissu qu'elle mit dans la bouche de la courageuse. Ce serait douloureux. Innommable. Elle passa sa main sur son front moite pour lui donner de sa force, avant de reprendre la lame dans ses mains.

J'y vais.

Elle devait se souvenir, sur l'Edelweiss, après avoir repoussé les Démons. Un Déchu avait recousu le ventre d'un de ses frères blessés. Il lui avait expliqué, entre deux insultes envers son Antimagie, pourquoi plus haut ou plus bas aurait été fatal. Sans doute était-ce la même chose ? Prenant une grande inspiration, la guerrière plongea sa lame dans le corps de sa soeur qui eut un spasme prévisible sous la douleur. Elle luttait pour ne pas augmenter la difficulté du travail. Mancinia haïssait son choix. Même si c'était le bon. Au bout de quelques minutes, dans ses bras rougis de sang, le bébé pleurait. Une petite fille. La jeune femme coupe le cordon ombilical à quatre doigts du nombril. Ce chiffre représentait les quatre âges de l'existence d'un Humain. Simin saignait si fort, rien ne pouvait arrêter ce flot et le choc de l'intervention avait balayé ses dernières forces. En quelques instants, le corps de la mère se relâche et un dernier soupir s'échappe de ses lèvres. Elle n'aura vu que sa fille que quelques secondes. Assez pour partir avec un sourire rempli d'amour. Mancinia tremblait. De peur, de rage, de désespoir. De tous ces sentiments atroces. C'est là qu'elle vit la marque sur sa main droite. Ce Soleil translucide, recouvert de sang chaud. Elle n'avait pas oubliée. Zandalor l'avait écrit dans son recueil. C'était un des Fragments du Cristal Maître. Un pouvoir de Sympan au monde mortel.

Ce don qui soignait tout. Tout. Y compris la Mort. Se pouvait-il... ?

Jamais encore elle n'avait essayé. Jamais. Reposant l'enfant après de sa mère, elle agit le plus rapidement possible. Faisant d'abord sortir la secondine pour éviter qu'elle ne pourrisse et n'envoie l'âme de Simin vers les Démons. Puis, elle mit sa main sur la blessure. Et se mit à prier l'Aether de la Médecine que cela marche. À promettre au Dieu-Roi que s'il réalisait se miracle, elle saurait se montrer reconnaissante. À demander l'accord d'Ezechyel pour sortir cette âme de son royaume. Au fil des secondes, se sont ses propres forces qui sont réduites au néant. C'est à peine si elle entendait son propre nom. Son visage collé sur le sol, un bras la secouant pour la ramener à la réalité. Khortdad semblait subitement inquiet. Se demandant si sa propre arrogance n'avait pas créer tout ceci.

Mancinia ? Mancinia ! Qu'est-ce que vous avez fait ?!

Aucune réponse ne parvint au vieil homme, si ce n'était les pleurs déchirants du bébé dans la pièce. Son sang s'était glacé lorsqu'il les avaient vus inertes. Toutes les deux. L'époux se précipitait vers l'enfant, couché sur le ventre de sa mère, dont les traits apaisés lui laissaient craindre le pire. Il pleurait, mettant la main sur le front de son épouse, caressant ses cheveux, lui offrant un baiser sur le front. Elle s'en était allée. C'est du moins ce qu'il crut avant que Simin n'ouvre les yeux, lâchant un gémissement en raison de sa gorge sèche. Le fait qu'elle se redresse pour s'asseoir laissait l'assistance dans la plus grande des stupéfactions. Un miracle. Sautant presque de joie, offrant une étreinte à son épouse, serrant sa fille dans ses bras. Khortdad était stupéfait.

Comment tu te sens ? s'entendit-il demander.
Je ne me suis jamais sentie aussi bien de toute ma vie, dit-elle.

Mancinia, par contre, avait l'air très mal. Elle s'était rassise à son tour, une main sur le visage. Elle était blême, tremblante, une fiche couche de sueur recouvrait sa peau. Khortdad se demandait si elle n'était pas en état de choc à cause de l'accouchement. Elle qui semblait si sûr de ce qu'elle faisait. Elle ne semblait même plus savoir où elle était. Si bien qu'on lui offrit du vin et qu'on du presque lui ouvrir la bouche pour qu'elle en ingurgite. Cela la remit un peu d'aplomb.

Je...J'ai besoin d'air.

Deux accoucheuses l'aidèrent à se remettre sur ses pieds. Pour beaucoup, son malaise était dû à la pression trop forte seulement quelques jours après son éveil. Pour elle, c'est sa faible résistance physique due à ses années endormie qui était responsable. Et ce pouvoir qui avait drainé ses dernières forces. Autant qu'ils le croient. Avant qu'elle ne quitte la pièce,  l'époux vint à sa rencontre, elle s'appuie contre un mur quelques instants pour l'écouter et faire cesser son impression de tournis.

Mancinia ! Matasif ! Je n'oublierai jamais ce que vous avez fait pour moi et ma famille aujourd'hui ! Jamais ! Demandez-moi ce qu'il vous faudra lorsque vous viendrez à Haute-Terre ! Je vous le donnerai ! Demandez Ashrin et Simin, nous saurons que c'est vous !

Elle était trop faible pour répondre et se contentait d'un sourire. On nettoyait ensuite l'enfant de ses glaires à l'aide d'une décoction de rose pilées, de miel et de sel. La fillette fût ensuite emmaillotée étroitement avec des bandes de lin. La mère ayant survécu à cette épreuve reçoit un verre de vin, une volaille avec son bouillon et des pains de noix pour se remettre. On notifie le jour et l'heure de la naissance sur un parchemin. On lui propose à nouveau du vin, mais elle refuse. Remise en partie, elle choisit de partir. De l'air. Et se remettre de cette épreuve. De son côté, Khortdad était relativement perplexe en observant les premiers instants de la mère. Ce n'était pas normal. Comment une Matasif pouvait-elle être aussi exténuée et qu'une femme en couches soit aussi en forme malgré la rudesse de l'accouchement ? Quelque chose n'était pas normale. Mancinia dissimulait quelque chose. Il n'était pas assez idiot pour croire à un miracle. Il la suivit.

La jeune femme s'assied sur les marches de la Pyramide, en extérieur, en plein Soleil. Elle se fichait d'être brûlée si cela la réveillait.

Nous devons encore être prudent. Elle pourrait souffrir de fièvre dans quelques jours. Ou le bébé...
Ils iront bien.
Vous avez raison, ne parlons pas de malheur et célébrons cette naissance !

Elle savait que c'était vrai. Simin ne pourrait souffrir d'aucune séquelle de cet accouchement et la petite fille était forte. Pour Khortdad, ce qu'avait dit la jeune mère était assez confus. Mancinia aurait pris un couteau pour lui ouvrir le ventre, mais aucune trace d'une telle action n'était visible. Aurait-elle réussi à mettre l'enfant au monde normalement ? Comment s'y était-elle prise, elle qui n'était pas médecin ?

J'aimerai vraiment vous prendre comme apprentie, fini-t-il par dire. Vous avez un don pour la médecine. Peu de monde aurait réussi à sauver la mère et l'enfant, mais vous y êtes parvenue. Vous avez réellement une main experte. J'en suis admiratif.

Mancinia savait d'instinct que cette proposition n'était pas sans arrière-pensées, mais il lui était primordial d'apprendre dans un nouveau domaine pour dissimuler son talent. Ce serait encore plus suspect de refuser. Elle ne cèderait pas si facilement, par contre.

Je suis une humble sertisseuse, vous savez.
Oh, vous pouvez juste apprendre ! dit-il avec un sourire. Il n'est pas nécessaire d'en faire votre principale activité si vous ne souhaitez pas.

Elle n'était pas facile à convaincre par contre, il s'en rendait bien compte. Khortdad refusait de laisser partir quelqu'un d'aussi talentueuse. Ils pourraient apprendre l'un de l'autre.

En cas de combat, cela pourrait être utile ! Sans parler des possibilités pour vous pour venir aider en cas de problèmes à Qaixopia. Vous l'ignorez sans doute, mais ils nous restent beaucoup de chose à découvrir là-bas. Il y a des dangers auxquels nous n'avons pas encore été confrontés.

Mancinia faisait mine de ne pas être réellement convaincue.

Je sais que le bien des Humains est votre priorité.
J'accepte.

Personne n'était aveugle quant à son investissement passé pour les siens. Son éveil n'avait fait que renforcer sa détermination, quitte à tout recommencer. Mancinia Leenhardt veillerait à rendre la grandeur aux siens et elle apprendrait tout ce qui est nécessaire à cet objectif. Aussi avait-elle préférée couper court à cette conversation pour éviter de révéler à son insu trop d'informations la concernant et qui pouvaient se retourner tôt ou tard contre elle-même. Les Humains n'étaient pas prêts. Elle non plus. Elle ne contrôlait rien. Et elle ne savait pas si les Aetheri seraient ravis de son intervention. Qui sait ? Ce don ne lui était peut-être pas destiné. Patience. Ils sauraient tous quand elle l'aurait choisi. Et lui, il voulait connaître son secret. Il ferait tout pour y parvenir, mais il ne se doutait pas vraiment de la réalité de la chose. La jeune femme devrait donc ruser et mentir. Feindre l'ignorance, le convaincre lui aussi que c'était pour le bien de leur peuple et rien d'autre. Cependant, cette épreuve au sein de la Pyramide lui avait ouvert les yeux un peu plus grands. N'avait-elle pas attendue depuis suffisamment longtemps ? C'en devenait risible.

C'est merveilleux ! dit-il, ravi. Nous allons nous mettre en route pour le Royaume et...
Je ne viens pas avec vous.
Mais...Vous...
Je dois me rendre aux Jardins de Jhēn. J'ai quelqu'un à y voir.
Mais...

Devant sa lueur de détermination, le vieil homme ne dit plus rien. Ce n'était pas la peine d'essayer de la convaincre ou de protester devant cette décision. Elle n'écouterait plus personne. Mancinia désirait revoir Neah et rien au monde ne l'en empêcherait.

2 185 mots


[II - XXIII] À l'Aube du Renouveau [Solo] Chriss10
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