Dans les quartiers riches de la ville se trouve la maison de monsieur Valjean, un ancien forçat qui fût délivré par l’aide inespéré de son fidèle ami à quatre pattes: Marcus. Depuis, le chien et le maître sont très fortement liés l’un à l’autre et rien ne pouvait briser leur amitié jusqu’à aujourd’hui. Car oui, aujourd’hui, alors que vous marchiez tranquillement sur la place Sforza, monsieur Valjean fut sauvagement agressé par son chien, le cabot s’enfuyant à toute jambe dans les rues de la cité. Vous vous précipitez vers le vieil homme qui verse des larmes en tenant sa main blessée et il vous conjure de retrouver son chien. Il n’est pas aussi agressif d’habitude et il se demande franchement ce qui a bien pu se passer. Vous vous mettez alors en quête de Marcus et durant vos recherches, vous tombez sur le cadavre d’un jeune homme, complètement nu, dans une ruelle. Vous constatez qu’il a de la mousse sur le bord de ses lèvres, comme s’il avait attrapé la rage… et après un rapide examen, vous remarquez qu’il porte un étrange collier autour de son cou. À cet instant, votre respiration se bloque, car le chien de monsieur Valjean était en fait un Bélua. Et vous savez ce qui se passe une fois que l’on se fait mordre par un Bélua, n’est-ce pas? Soudainement, vous entendez des cris en direction de la place Sforza, que vous venez à peine de quitter!

Vite! Vous devez arrêter monsieur Valjean et espérer que l’Animal, qui s’est brusquement imposé en lui, ne fera pas plus de dégâts! À vous de choisir comment vous allez l’arrêter: en tentant de le raisonner ou cette histoire se terminera-t-elle dans un bain de sang?


Momoko était concentrée dans son action mais il faut dire qu'elle n'était pas vraiment faite pour ce qu'elle était en train d'entreprendre. Serveuse à Megido, une large farce, voilà ce que c'était ! Cependant, elle n'avait pas vraiment le choix. Elle devait travailler pour pouvoir vivre. Comme elle n'avait pas encore trouvé la perle rare, l'homme qu'elle aurait l'honneur de servir, et tout le charabia de ses professeurs de Maëlith, elle devait subvenir seule à ses besoins. Autant dire tout de suite que la chose était délicate. Durant son parcours de la cité secrète des Orines à Megido, elle avait exercé plusieurs professions : gardienne d'enfant, jardinière, joueuse de tambour, femme de chambre, missionnaire et deux ou trois autres métiers qu'elle n'aurait su définir. Comment appeler une personne qui était préposée au ramassage du crottin de cheval toute la journée ? Certains auraient pu dire, devant cet éventail de professions, que la jeune femme devait avoir une grande expérience et être très habile et compétente dans ce qu'elle entreprenait. Cependant, ce n'était pas franchement le cas. Non. Momoko valsait plutôt de déception en déception, comme si son partenaire de danse devait être, à chaque fois, le même, toujours aussi pathétiquement décevant. Elle n'était capable de rien et maladroite à bien des égards.

- « Je vais y arriver, je vais y arriver... » répétait-elle tout bas.

- « Que dites-vous ? ».

L'un des clients l'avait entendu parler et, comble du malheur, avait souhaité taquiner la jeune serveuse. Ce qu'il avait pris  précédemment pour de simples paroles d'encouragement d'une jeune fille intimidée par ses nouvelles fonctions n'en étaient en réalité pas. Si Momoko se murmurait cela, c'était avant tout parce qu'elle sentait le poids du plateau appuyer de plus en plus sur son poignet, poignet qui commençait à se tordre douloureusement. Elle voulait y croire, se dire qu'elle pouvait parvenir, avec quelques efforts, à poser le plateau – qui ne contenait pourtant que très peu de choses – sur la bonne table mais « l'espoir fait vivre », comme on dit. Ajoutez à son manque de force, les paroles du client et voilà que l'Orine maladroite reprenait le dessus. Le visage de la jeune femme se tourna vers l'intéressé et, comme si cela ne suffisait pas, elle se prit les pieds dans la gravité et faillit tomber, se retenant in extremis au dossier de la chaise. Son plateau, lui, finit sa course sur les jambes du malchanceux qui aurait mieux fait de ne rien dire. Pourtant, ce n'était pas comme si cette fille avait quoi que ce soit pour plaire. Après un cri de surprise, accompagné d'un bruit de verre brisé, se fut le regard assassin du tavernier qui s'imposa à son tour. Ni une ni deux, Momoko était à la porte, perdant, pour la énième fois depuis qu'elle était partie de Maëlith, son travail.

Son caractère voulait qu'elle s'énerve, qu'elle maudisse le gérant et lui envoie une bonne raclée. Elle avait toujours été impulsive. Le souci c'est qu'elle n'avait pas la force de ses prétentions. Ses petits bras non musclés avaient déjà été mis à rude épreuve en ce jour et ses jambes étaient fatiguées. Le dos légèrement voûté, elle soupira, l'une de ses mèches de cheveux s'envolant légèrement de devant son visage, prise dans le vent tumultueux de son expiration. Penchant la tête sur le côté dans une posture presque fataliste, elle se dit qu'elle dormirait bien. Malheureusement, si elle rentrait à l'auberge où elle avait loué une chambre et annonçait à l'aubergiste qu'elle avait perdu son travail et n'aurait, de ce fait, pas de quoi payer, il allait, à son tour, la mettre à la porte. Voilà comment commençait l'histoire de Momoko, Orine sans maître et sans domicile fixe... sans domicile tout court d'ailleurs.

Lançant son pied dans l'objectif de percuter un caillou qui l'énervait de part sa simple présence, elle manqua une nouvelle fois de se retrouver les fesses sur le sol. Là encore, elle réussit à se stabiliser au prix de gestes clownesques qui auraient pu attirer l'attention si elle n'était pas aussi insignifiante. Sans doute que deux ou trois gamins la virent, pouffant de rire avant de s'éloigner. Elle n'en aurait jamais la confirmation. De toute façon, elle avait l'habitude des moqueries et elle n'allait pas noter le nom de tous ceux qui lui avaient un jour ris au nez sur un bout de parchemin avec pour objectif de se venger ensuite... à moins que...

Soudain, il y eut une sorte d'ambiance nouvelle, comme si quelque chose se passait un peu plus loin. Trottinant maladroitement vers le lieu de la scène, Momoko resta dubitative, ne comprenant pas vraiment ce qu'il était en train de se produire.