Une étrange aventure qui t'était arrivée là... Tout avait commencé lorsque tu avais reçu cette drôle de lettre, d'un commenditaire inconnu. La lettre expliquait très bien ses attentions : il souhaitait obtenir des créatures vivant sur le territoire des magiciens, et il t'engageait pour que tu les captures à sa place. Même si devoir accomplir la basse besogne pour les autres t'agaçait, tu n'étais pas en position de refuser : l'argent se faisait rare et tu te rabaisssais à accepter ce genre de petit travail... Une simple demande, donc, qui ne changeait pas de d'habitudes. Comme toujours, tu commenças par faire des recherches sur ces petits habitants, toi même n'en ayant jamais vraiment entendu parler. Les sources étaient rares et vagues, sans doute les magiciens tenaient-ils à protéger leurs petits amis. Aussi, tu n'eus d'autres choix que d'aller te rendre sur place pour en apprendre davantage.

Seulement, un sorcier au lac de la transparence risquait de ne pas passer inaperçu. Même si tu ne te baladais pas avec une étiquette sur le front, certains signes ne trompaient pas et tu n'était plus assez puissant pour pouvoir les dissimuler. Mais tu avais vite trouvé une solution pour que ce problème n'en soit plus un. Giselle, l'infirmière qui s'occupait de toi à l'asile, t'avais dit qu'elle était autrefois magicienne. Elle n'était certainement pas sorcière -quel sorcier aurait l'idée de travailler pour aider les autres?- et tu n'avais pas idée de ce qu'elle pouvait être à présent mais, à dire vrai, tu te moquais de cette question. Seul son ancien statut t'intéressait, car elle connaissait bien le lac de la transparence et ses alentours. Tu savais qu'au cours des deux années en sa compagnie, tu étais parvenu à l'attendrire, et tu t'étais attirer sa sympathie. Elle avait un ' petit faible pour toi, elle ne pouvait plus le cacher. Aussi, lorsque tu l'avais recontacter par courrier après tous ces mois sans aucune nouvelles, lui demandant audience sur ses terres natales, elle n'avait su refuser.

Tu te ferais alors passer pour un sorcier en réhabilitation, sur la voie de la "guérison", retrouvant le bon chemin... Ce petit jeu avait duré plusieurs jours, pendant lesquels tu avais du te faire bataille pour ne pas exiger qu'elle t'emmène au coeur bleu. Mais finalement, lorsque tu fus certains que d'autres mages blancs te regardent échanger des sourires, des paroles aimables et des sucreries aux enfants, tu décidas qu'il était temps de passer à l'étape suivante : "Dites moi, ma colombe, pourriez-vous me conduire au coeur bleu ? J'ai entendu mille histoires à propos de cet endroit, et je brûle de m'y rendre en personne pour démêler du vrai du faux toutes ces rumeurs..." Naturellement, elle ne put te refuser ta requête.

Une semaine passa avant que tu ne trouves leur drôle de cité... Alors que vous marchiez sur le chemin de Lynn, la forêt silencieuse s'imposa à vous. Ou peut être était-ce vous qui vous imposiez à ce lieu si calme, si paisible... "Mais il ne le sera plus pour longtemps" songeas-tu en te promenant au travers des arbres. Le silence était assourdissant, presque douloureux, aussi chacun de vos pas, de vos souffles semblaient prendre des proportions gigantesques et résonner à travers la forêt entière. Tu t'en serais presque voulu de vouloir briser cette atmosphère presque religieuse... Presque.

Finalement, vous arriviez devant une drôle de petite stèle, un dôme avec une ouverture étroite où tu pourrais à peine passer la main... mais, tandis que vous avanciez au milieu de la clairière, vous sembliez rétrécir, encore et encore, jusqu'à ce que vous ne soyez pas plus grand que ladite ouverture. Vous passiez sous la porte, qui te sembla alors immense, avant de glisser soudainement dans un tunel en pente raide. Celui-ci vous conduisit directement dans un dédale d'embrenchements, qui déboucha bientôt sur une ville miniature, parfaitement organisée. Émerveillé. C'est bien le mot qui te désigna lorsque tu découvris la cité que tu allais bientôt endeuiller.

Les visites semblaient rares, dans cet endroit reculé, mais appréciées, car vous furent accueillis comme des rois. On se bousculait, se disputait et parfois même se battait pour avoir le privilège de voir qui s'était introduit dans le dôme. On vous distribua même des couronnes de fleurs à l'étrange aspect. Personne ne semblait remarquer le sourire malveillant qui t'échappait. Sous l'agitation, vous vous mîtes en route, visitant la ville qui s'offrait à vous sur un plateau d'argent... tu n'imaginais pas qu'il fut aussi simple de s'introduire ici et d'y semer la pagaille...

Eprouvée par une marche qui s’éternisait depuis trop longtemps, elle s’était sentie faiblir et avait cru s’évanouir plusieurs fois. Pourtant, la douce Khénora était prudente et cherchait les petits bourgs et villages qui s’éparpillaient sur les Terres d’Emeraude, demandant le gîte et le couvert pour une nuit, contre quelques tâches dans la chaumière ou au champ. Elle ne craignait guère de dormir à la belle étoile, pour être encore entre les frontières rassurantes de son peuple, mais appréhendait la soif et la faim. Le départ de Maëlith n’était guère aisé, les habitudes bousculées par la cruauté d’une vie simple et sans apparat. Elle n’était pas déçue pour autant. Elle ne s’était pas attendue à autre chose et préférait l’existence brute du monde extérieur à l’emprisonnement qu’elle avait subi auprès de sa mère. Cependant, elle manquait cruellement de repos et avait besoin de dormir convenablement, de se nourrir correctement. Elle ne trouvait pas refuge et sentait le désespoir la gagner à mesure que son ventre se creusait. N’y avait-il pas quelques paysans dans les parages ? Une maisonnette ? N’importe quoi. Elle avait déjà mangé toutes ses baies et sa gourde était presque vide. Elle ne tiendrait guère longtemps, dans ses conditions. A sa plus grande surprise, elle fut recueillie au détour d’un petit bois par des bienfaiteurs qui lui proposèrent de passer quelques jours dans leur petite ferme, au Lac de la Transparence. Des Magiciens. Elle accepta sans hésiter une seule seconde. L’occasion était belle et elle ne comptait pas la laisser passer. Ils savaient ce qu’elle était. C’était évident. Ils paraissaient même avoir l’habitude d’épauler les jeunes Orines, égarées et fatiguées de leurs premiers jours de liberté. Ils étaient des gens très bien, la main sur le cœur et le regard juste. Khénora resta quelques temps parmi eux, oubliant même l’existence de l’Autre, qui n’avait pas refait surface depuis longtemps. Elle commençait à croire qu’elle n’existait pas, qu’elle n’avait été qu’une échappatoire pour supporter les yeux de sa mère. Etait-ce possible ? Elle l’ignorait. Elle ne voulait pas le savoir et se berçait d’illusions, dans la délicatesse d’un instant suspendu dans le temps.

« Est-ce que tout va bien ? » s’enquit la jeune femme dans un murmure, curieuse. Elle venait tout juste de longer la ferme, un seau rempli de grains pour les bêtes et avait l’impression d’avoir interrompu la conversation entre les propriétaires. Le mari semblait préoccupé. Ce fut la femme qui répondit. « Ne t’inquiète pas, Hora. Nous avons simplement entendu des bruits sur … quelques problèmes. » Elle restait évasive. « Est-ce que je peux faire quelque chose pour vous ? » L’Orine cherchait continuellement à se rendre utile, désireuse de remercier les Magiciens d’une façon ou d’une autre pour leur accueil. « Je ne pense pas … » commença l’un, avant d’être coupé par l’autre : « Pourquoi pas ? Le Cœur Bleu a besoin d’aide, le plus possible. » - « Mais elle … » - « Elle est assez grande et mature pour savoir ce qu’elle peut faire ou non. » Ils tournèrent les yeux vers elle. « Que se passe-t-il ? » demanda-t-elle, intimidée. Ils prirent le temps de lui expliquer la situation. L’affaire fut rapidement entendue. Ils se mirent en route vers le Lac et empruntèrent le Chemin de Lynn, jusqu’à s’approcher des fameux dômes, qu’ils avaient évoqués et dont la magie opéra. Khénora se sentait nauséeuse. Encore chamboulée par les changements, elle fit à peine attention aux étranges petites créatures qui accoururent pour les saluer. Ils avaient l’air tellement prévenants. Elle reçut même à boire pour se soulager de son état. Qui pouvait vouloir s’en prendre à des êtres pareils ? Personne n’en était réellement certain, bien que certaines pistes et rumeurs commencent à circuler. Quoiqu’il en soit, ils étaient nombreux à enquêter sur la disparition de ces Créatures, qu’il fallait retrouver de toute urgence. Khénora et les Magiciens avaient décidé de commencer les recherches à la Forêt Silencieuse, l’endroit où elles vivaient. Ce serait certainement un bon début, bien qu’il y avait peu de chance pour attraper le responsable en ces lieux. Il devait déjà être loin, avec en sa possession ses petits prisonniers.

Khénora visitait les lieux, rêveuse. Elle avait voulu interroger les petits habitants bleus, avant de se rendre compte qu’ils ne parlaient aucune des quelques langues qu’elle connaissait. Elle allait sûrement être inutile mais préférait attendre les Magiciens, avant de quitter la Forêt. D’un pas léger, elle flânait en contemplant les environs. C'était si calme. Elle peinait à croire que des gens mal intentionnés pouvaient rôder dans les parages.

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