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 Tomber comme un flocon [Abel]

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Dim 04 Sep 2016, 18:49

Evangéline


Regardant son doigt, elle attrapa ce dernier entre ses lèvres pour éviter que le sang ne perle sur la neige au manteau si pur. Continuant d'arpenter ce chemin un peu sinueux, elle ne perdait pas de vue son objectif pour autant. S'appuyant sur un rocher un peu ciselé, Ève s'entama un peu la chair. Bien qu'elle fut douce, elle n'en était pas moins une pleurnicheuse et rien ne lui servait de s'apitoyer sur son sort pour un si petit bobo. D'après ce que le vieil homme lui avait énoncé, elle arriverait au village d'ici deux heures. Seulement, la nuit tomberait bien assez tôt et elle ne voulait pas se laisser prendre au piège par le froid transcendant. Juste à cette altitude, elle avait déjà la peau gelée sous ses vêtements et la pauvre fourrure qu'on lui avait forcé à prendre malgré son dégoût. Dorénavant, elle chérissait l'animal mort qu'elle avait sur le dos car il lui permettait de lui couper une partie du blizzard. Sa tête et tout son être était savamment enveloppé d'un patchwork de vêtements. Si bien que si elle n'avait pas été si jolie et propre, l'on aurait pu la prendre pour une vagabonde ou une pèlerine.

Enfin arrivée sur un aplat, Évangéline se réfugia dans une petite cavité rocheuse, qui la coupa complètement du froid mordant. Elle frotta ses bras de ses mains, avant de se rouler en boule contre un mur. Il fallait qu'elle dorme un peu pourtant, elle n'avait pas de temps à perdre. Ici, en montagne, chaque minute comptait et là, elle perdait un temps précieux. Ses doigts, enroulés dans des épaisseurs de gants, étaient insensibles. Ses extrémités commençaient à changer doucement de couleurs malgré les épaisseurs de laines. Trop fragile pour ce monde enneigée, elle fut suicidaire visiblement, de se rendre là-haut. Pourtant, le courage qui la caractérisait n'avait de cesse de la lancer dans des plans abracadabrants... L'Orine souffla sur ses paumes cachées, avant de se relever. Il fallait absolument qu'elle se remette en route sinon, elle allait vraiment mourir ici.

La petite, décidée, sortit de sa grotte pleine. Elle traversa le versant plat sur lequel elle était, profitant du plateau pour reprendre son souffle et ensuite, monter à nouveau. Ève se dépêcha de changer de côté, espérant être coupée complètement du vent si elle prenait un autre versant. Sans regarder où elle mit les pieds, sa chaussure glissa sur une plaque de verglas et elle plongea dans la poudreuse en poussant un petit cri de surprise. Des oiseaux partirent en croassants, dérangés par cette intruse. Doucement, elle se remit debout, sentant ses articulations craquer et son dos lui faire assez mal. Ses muscles étaient si tendus, si contrit, que même dans la chute ils ne purent amortir la douleur. Evangéline, une fois debout, épousseta la neige qui s'était collée partout et qui commençait tantôt à cristalliser, tantôt à mouiller ses lainages. Un bruit attira cependant son attention malgré l'espèce de tempête incessante. Lorsqu'elle leva les yeux, ses prunelles azurées atterrirent sur une tâche noire. Un animal, bestial, primitif et très certainement affamé, l'avait entendu. Ses yeux mordorés la regardaient et l'Orine se paralysa. Une panthère, ressemblant à une boule, mélangeant fourrure courte et terre dure. Elle n'en avait jamais vu et, à dire vrai, ça ne lui avait pas manqué plus que ça. Ève avait peur. La frousse la réchauffa immédiatement, l'adrénaline la cloua sur le sol, elle avait mal partout. Elle était déçue de mourir maintenant... Pourtant, elle n'acceptait pas l'idée « Je... » Qu'espérait-elle ? Sincèrement, à quoi s'attendait-elle ? Discuter avec et lui demander de l'épargner ? C'était un animal emplie de bave et d'autres instincts qu'elle ne pouvait comprendre. Elle n'avait pas le droit de lui demander ou même, ne serait-ce que d'espérer, rester en vie. Il aurait fallu qu'elle se batte. Qu'elle emmène un autre animal et qu'ensemble, ils se battent alors qu'elle fuit.

Ses réflexions furent vite coupés. Le sol trembla. Bien trop pour n'être qu'une petite secousse et pas assez pour être un séisme. Non, c'était plus localisé, juste au-dessous de ses pieds. Ève n'eu pas le temps de faire un bond en arrière, de réfléchir plus, qu'elle voyait déjà le ciel s'éloigner d'elle, dans un puit de lumière...

Mots : 753

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Dim 04 Sep 2016, 21:20



A mesure que la panthère avait gagné en altitude, la température s’était nettement rafraîchie, faisant jaillir des flots de vapeur de sa gueule et de son nez à chaque expiration. Mais paradoxalement, plus elle grimpait et plus elle se sentait en sécurité. Au-delà de l’Edelweiss, les villageois qui la poursuivaient n’oseraient jamais la suivre, et même s’ils essayaient, elle n’aurait plus eu qu’à abattre sur eux les mille serres et les mille griffes de la forêt. Plus que quelques heures et elle serait sauve, en sécurité. Abel prit une impulsion sur ses pattes arrière et son corps massif repartit à l’assaut de la montagne. Du sang coagulé accroché ses pattes tâchait la neige immaculée à chacun de ses pas. Sa forme humanoïde l’aurait sans doute moins fatiguée, mais elle l’aurait bien trop ralenti. Il n’était même pas sûr qu’il ait été capable de gravir une pente aussi abrupte sans la prise ferme de ses griffes et sans cette étonnante habileté qu’avaient certains animaux à défier la gravité pour atteindre des endroits insolites.
Approchant d’un des cols visibles de l’Edelweiss, qui bravait le ciel de ses arrêtes saillantes comme s’il voulait transpercer l’azur infini, Abel fut arrêté net par une bourrasque glaciale. Le blizzard semblait vouloir lui interdire le passage, comme si la justice avait pris forme dans ces volutes de neige et de glace que charriait furieusement le vent sur son passage. La panthère baissa la tête et se surpris à sourire à l’idée de Drejtësi contrôlant les éléments pour le refouler vers ses poursuivants. Mais le jour où une petite brise, si gelée soit-elle, allait lui imposer la direction à prendre n’était pas encore venu.

Abel progressait lentement, les larges plaques de son corps creusant un sillon marqué dans la neige tel un guide ouvrant une route pour une caravane. Mais ce guide-ci espérait bien que personne n’aurait l’audace de le suivre. Franchissant le col avec difficulté, le poids de son corps commençant à peser lourdement sur ses pattes, la panthère de Bois-Lune constata que le blizzard faiblissait peu à peu, et il aperçut bientôt les coulées de neige sinueuses qui redescendaient vers les vastes forêts qui bordaient le rocher au clair de Lune. Le chemin rendu traitre appelait à la prudence, et le bélua longea longuement une haute corniche à la recherche d’une piste plus sûre, sachant pertinemment que s’il chutait de cette hauteur, il allait dégringoler en roulant jusqu’à Dhitys et y arriver bien mal en point. Ce fut à ce moment qu’il entendit leur cri.
« Intrus, danger, fuyez ! Intrus, au secours, danger ! »
La panthère grogna. Ce qu’elle pouvait détester ces maudits volatiles… Leur voix piaillait à des centaines de mètres à la ronde et leurs intonations aigues transpercèrent le crâne du bélua à la seconde où il les entendit. Mais en tant que bélua, il se devait d’être le défenseur de la nature, le gardien de Phoebe. Cette tâche pesait parfois sur ses épaules comme une corvée. Mais il le fallait… Abel s’élança rapidement, oubliant bien vite l’abîme qui s’ouvrait à quelques mètres de lui pour parvenir à l’endroit d’où ils avaient décollé.
« Intrus ! Au secours ! »
« Fermez-la !! »
Le grondement raisonna dans la poitrine massive de la panthère et envahi soudain l’air environnant, venant se fracasser contre les falaises et les rocs, irradiant les alentours comme une ultime mise en garde. Les oiseaux qui ne s’étaient pas envolés le firent en toute hâte, mais aucun, même hors de portée du félin, ne se risqua à croasser une nouvelle fois. De la neige tomba du haut de la falaise, entraînant un rocher dans sa chute qui vint s’écraser à quelques mètres de tout ça, ouvrant une fine fissure dans le plancher de glace qui les soutenaient tous.

La panthère de Bois-Lune fit irruption sur le chemin, ses yeux jaunes perçant à travers la neige pour contempler l’étendue du danger auquel les oiseaux avaient été confrontés. Une jeune femme, visiblement frigorifiée, et sentant la peur à plein nez, bien qu’il ne soit peut-être pas étranger à ce dernier facteur.
« Alors, c’est ça votre grand danger ? Et vous dérangez les gardiens de la Lune pour une voyageuse égarée ? »
Les sons qui sortaient de la gueule d’Abel n’avaient de sens qu’aux oreilles de ceux à qui il les adressait, et il se rendit soudain compte que ses grognements allaient être mal interprétés par la jeune femme. En temps normal, il n’en aurait pas tenu compte, mais il avait déjà fait couler assez de sang aujourd’hui, et la vue de cette jeune femme trempée et frigorifiée au milieu d’un océan de glace l’avait comme attristé, touché par une émotion qu’il n’aurait pas cru ressentir en de telles circonstances.
Abel modula ses cordes vocales, tentant de chasser la morphologie animale à l’intérieur de sa gorge pour redonner à sa voix un semblant d’humanité, et il approcha plus lentement.
« Ne t’inquiète… »
La panthère ne put finir sa phrase. Arrivé à quelques mètres de la jeune femme, le poids de son corps s’appuya sur la couche de glace déjà fragilisée sur laquelle ils marchèrent et un craquement sinistre retentit. Un éclair zébra la glace sous leurs pieds et le sol s’ouvrit soudain sur un abîme de ténèbres. Abel eut à peine le temps de se recroqueviller sur son flanc avant de voir la neige et le ciel se mêler Il se sentit tomber et son corps heurta plusieurs blocs durs, glissant sur plusieurs mètres avant de s’arrêter. Le félin releva lentement la tête, s’attendant à recevoir un rocher ou un bloc de glace sur le coin du museau, mais après quelques secondes, il lui sembla que c’était terminé. Louant l’armure naturelle qui venait sans doute de lui éviter nombre de contusions et de fractures, il se releva et s’ébroua avec force pour retirer la neige et broyer les fragments de pierre qui étaient venus se loger entre ses plaques.
La fente de l’iris de la panthère s’élargit rapidement pour venir former un cercle noir, et les environs s’illuminèrent à mesure que ses pupilles se gorgeaient du peu de lumière qui régnait ici-bas. Abel constata qu’il avait fait une chute d’au moins dix mètres, et les parois de glace abruptes de la crevasse lui interdisaient de ne serait-ce que penser à remonter par là où il était tombé. Plusieurs oiseaux étaient revenus se poser sur les bords du précipice, contemplant avec un brin d’ironie leur sauveur à présent pris au piège.
« Volez jusqu’au rocher et ramenez moi un autre gardien, stupides volatiles. »
La panthère se mit à chercher des yeux la jeune femme, ne sachant pas si elle avait été prise avec lui dans sa chute, et aperçut son corps inerte, allongé face contre le sol quelques mètres plus loin. Abel s’approcha en quelques bonds et prit son bras dans sa gueule pour la retourner, espérant qu’il ne venait pas de faire une malheureuse victime supplémentaire, cette fois par accident.


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Lun 05 Sep 2016, 11:01

Evangéline


Le froid était de plus en plus présent. Ève se sentait meurtrie jusqu'à l'intérieur de son corps, comme si le blizzard s'insinuait partout. Elle souffrait de plus en plus. Lorsqu'elle vit la panthère, ce fut en fait pire. L'Orine se tétanisa, devint plus blême que la neige elle-même, avant de voir la panthère arriver. Les sons qu'elle produisit, les bruits sortant de sa gueule, étaient, aux oreilles de la brune, totalement difformes. Elle n'était pas assez éclairée pour comprendre un soupçon d'humanité en ce félin. La glace rompit et son conscient aussi.
Son corps atterrit lourdement sur la roche plate et dure de la cavité. Dans la crevasse, loin du ciel, ses couches de laines arrivèrent à amortir sa chute au moins pour ne pas lui briser les os. Ève s'évanouit bien avant d'arriver sur la terre de toute façon et la chute ne la réveilla pas pour autant.

Le Bélua à ses côtés chercha à savoir si elle respirait toujours ou non. Se sentant secouée et trainée, ses yeux s'ouvrirent, ses paupières papillonnèrent doucement, jusqu'à se voir devant le visage une gueule de panthère noire, débordante de terreur. Hurlant à la mort, son cri résonna à travers la grotte et prise d'une énergie nouvelle, elle se redressa pour reculer. La panique était à son comble : elle avait chu avec ce monstre. Le ciel ne pouvait pas plus lui en vouloir visiblement. Ève était perdue. Dans un dernier élan, elle tenta de communiquer, mais sa voix tressautait « Je... Je ne te veux pas de mal... Ni à... toi... ni aux... autres... » Mettant ses dernières forces à contribution, elle se releva pour s'en aller à reculons, abandonnant l'idée de remonter par le puit de lumière.
Elle était entre la peur à cause de l'animal et la peur de l'inconnu dans le noir. Seulement, elle se retrouvait devant un choix à faire et à dire vrai, il n'y en avait pas dix mille.
Se sachant perdue malgré tout, elle fit volte-face et fonça dans le noir total, quitte à tomber dans le pire des pièges. Et en effet, elle y tomba dedans, à pieds joints.

Le souffle court, les larmes aux yeux, le cerveau embué, elle avait mal aux pieds. Les forcer à courir dans un désespoir sans fin, pour se voir souffrir toujours un peu plus, dévorée par cet animal... Qu'espérait-elle ? Sortir vivante ? Le rêve s'arrêtait là. Dire qu'elle n'avait été qu'à une heure de la vie sauve, qu'à une heure du repos mérité de la randonneuse émérite. Et il avait fallu qu'elle réveille la nature pour se condamner elle-même.
Dans sa course, elle glissa sur une pierre qui l'emporta plus loin. Sauf que le sol ne vint qu'un temps après. L'Orine avait mal partout et était transit d'effroi. Quand allait-on arrêté de la maltraiter ? En un peu moins de dix minutes elle avait vécu les pires moments de sa vie...
Le trou dans lequel elle tomba en criant, l'accueillit comme dans un cocon. Sauf que le-dit cocon était des plus gluants, des plus collants. Elle ne comprenait pas bien où elle était tombée et pourquoi elle ne s'était pas fait mal. Accusant un peu le coup, n'entendant aucun bruit, elle en profita pour remettre ses esprits en place. Enfin un peu de calme et vu la hauteur à laquelle elle avait chu il serait impossible pour le prédateur de l'atteindre. Il fallait qu'elle trouve une torche où, du moins, de quoi éclairer l'endroit.
Un bruit étrange la fit sortir de ses pensées. Une sorte de caquettement sauf que ce n'était pas des poules qui picoraient. Plus elle tendit l'oreille, plus elle comprit que le bruit en question était en fait des petites dents s'entrechoquant sans cesse. Quelque chose était en train de lui tomber dessus lentement, prête à la dévorer « Non... !!! » Ève tenta de se retourner, mais la toile d'araignée sur laquelle elle était, était trop tissée, trop collante, pour pouvoir lui laisser le moindre mouvement possible. Même en perdant quelques lainages qui la maintenaient au chaud, elle n'avança qu'un peu plus vers sa propre perte.

Mots : 725

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Jeu 22 Sep 2016, 23:31



Lorsque la jeune femme se réveilla, Abel fut surpris de voir son visage parcouru de terreur lorsqu’il approcha. Il en avait presque oublié sa forme féline, comme bien souvent lorsqu’il l’arborait depuis un bon moment. Ses foulées, sa posture, ses pensées et ses perceptions félines lui étaient si naturelles qu’il n’y prêtait plus attention, et les quelques chocs qu’il avait subis lors de sa chute n’avait pas aidé à lui éclaircir les idées. Il vit donc la jeune femme se lever d’un bond pour le fuir, et durant un instant il voulut la laisser faire. Après tout, son souhait le plus cher en cet instant était de ne plus jamais le revoir, alors pourquoi ne pas lui donner simplement ce qu’elle voulait en partant dans une autre direction ? Mais leur situation actuelle ne leur laissait que peu de possibilités quant au chemin à suivre. Pire encore, laisser cette frêle jeune fille dans le noir et le froid aurait revenu à la laisser à une mort certaine. Phoebe aimait toutes les formes de vie, d’un amour charitable et pur. Elle n’aurait pas voulu que l’un de ses fils n’envoie à la mort un être aussi désemparé que cette femme semblait être. Abel avait l’impression d’entendre la voix de la grande prêtresse de Bois-Lune dans sa tête, l’impression de sentir le regard du chanoine de son ordre sur lui et sur ses actes. Il devait faire la volonté de Phoebe, c’était la voix qu’il avait choisi de suivre, et ce n’était pas le moment de s’en détourner.
La panthère observa les environs avec prudence. Les cris étouffés de la jeune fille s’étaient vite arrêtés, et il comprit rapidement pourquoi lorsqu’il constata la chute qu’elle avait faite. Heureusement, une rampe de pierre tombait vers une plate-forme plus basse sur laquelle elle avait atterri, et Abel se dirigea sur le côté lorsqu’il aperçut les toiles. Elles étaient d’un blanc laiteux, ce qui les rendait difficiles à distinguer pour ses yeux félins qui n’étaient pas habitués aux contrastes. Ses sens de chasseurs étaient faits pour traquer les mouvements lointains, pas ce qui était immobile devant ses yeux. Mais en se concentrant, il vit que la grotte entière était tapissée de toiles d’où tombaient des cocons plus ou moins épais. Certains étaient ouverts, déchirés, où d’autres semblaient figés.  Des pans entiers de ce qu’il avait pris pour des murs étaient en fait un enchevêtrement de roches et de fils blanchâtres qui s’étendaient parfois sur plusieurs mètres. Un ouvrage pour le moins impressionnant.

Mais alors qu’il contemplait la complexité de ces constructions, un mouvement attira son attention. La jeune femme semblait se débattre, piégée dans un réseau de fils, et une autre forme presque aussi grosse descendait vers elle. Abel ne tarda pas à identifier une araignée. Elle était sur le point de fondre sur sa proie, ses pattes prêtes à l’entourer de liens pour l’emprisonner dans un autre cocon où elle finirait sa vie dans l’attente d’être dévorée. Mais, bien qu’elle était plus grosse que la plupart des araignées communes qui vivaient au-delà des montagnes, il était très peu probable qu’elle ait été capable de tisser autant de toiles, et de composer des pièges si grands. Le bélua commençait à connaître les animaux qui peuplaient ces contrées, et cette dissonance inexplicable dans la situation ne put que lui sauter aux yeux. Il en oublia presque la posture alarmante dans laquelle sa compagnonne d’infortune se trouvait. Abandonnant l’idée de descendre sagement le long de la rampe, Abel sortit ses griffes et fit deux longues foulées, grattant la roche comme s’il voulait se catapulter vers l’avant, et bondit droit vers l’araignée qui descendait pour tenter de l’intercepter. Celle-ci ne put pas faire grand-chose contre ce qui lui apparut comme un véritable éboulement, et la panthère la jeta vers le fond de la grotte, l’arrachant à son fil avant de venir lui-même s’écraser au sol dans une réception approximative. Tachant de retrouver des appuis stables, il arracha plusieurs fils qui s’étaient accrochés à lui en tournant pour venir se placer entre la jeune femme et l’araignée, lançant à l’insecte un regard perçant.
« Tu ne la toucheras pas. »
L’araignée écarquilla ses multiples yeux, jaugea rapidement son nouvel adversaire et parvint rapidement à la conclusion qu’elle n’avait absolument aucune chance de le battre.
« Mais pourquoi ? Je l’ai capturée ! Je dois vite la piéger, elle va s’échapper ! Écarte-toi, stupide animal ! »
Sa voix éraillée était semblable à un cri, mais Abel n’était pas du genre à laisser un vulgaire insecte lui dicter sa conduite.
« C’est ma proie. Si tu la veux, viens la chercher. »
Les mots de la panthère se perdirent dans un grognement menaçant, et ses épaules roulèrent légèrement pour frotter ses plaques les unes contre les autres, provoquant un cliquetis caractéristique de son espèce. L’araignée fit volte-face et se mit à courir.
« Mamaaaaaan ! »

Maman ? Voilà qui expliquait beaucoup de chose… Ils n’avaient pas de temps à perdre.
Le bélua se tourna vers la jeune femme et s’approcha en tentant d’arracher les fils collants qui tendaient à se coller à lui, jusqu’à se dégager une petite zone de roche nue. Abel commença griffer la toile avec précaution pour tenter d’aider l’orine à se libérer. Modulant à nouveau sa voix, il essaya cette fois d’adopter un ton calme et intelligible.
« Calme-toi, petite fleur. Je suis bélua. Et j’ai déjà mangé. Je vais te détacher, mais fais attention où tu marches… »
La panthère acheva de sectionner ses entraves, et recula de quelques pas. Abel se recroquevilla alors et lança son esprit pour chasser l’animal. S’en suivi quelques instants désagréables pendant lesquelles ses grognements se muèrent en quelque chose de moins bestial, et ses plaques devinrent des traces grises le long de sa peau, disparaissant peu à peu. Sa silhouette se releva, et quelques secondes plus tard, Abel avait repris forme humaine. Seuls ses pupilles, son iris et les abords de ses yeux orangés avaient conservé les traits de son totem.  Il fit quelques moulinets de poignets pour dégourdir ses membres, avant de se rappeler qu'un petit peu de décence était la bienvenue auprès d'une demoiselle, se hâtant de faire apparaître un morceau de tissus qui changea peu à peu de forme, s’enroulant autour de sa taille pour descendre le long de ses jambes jusqu’à former des braies vertes. Le bélua passa ses mains sur sa barbe naissante et écarta les longs cheveux noirs qui tombaient sur son visage pour les lancer vers l’arrière, inspirant à pleins poumons comme si c’était sa première bouffée d’air depuis des jours. Perdant quelque peu son aplomb, Abel n’en avait pas moins gardé une certaine sauvagerie primitive, sans doute trahie par les traces de griffes qui zébraient son corps, témoins de promenades mouvementées aux abords du rocher au clair de Lune.
« Tu vois, je ne suis pas dangereux. »
Lui non, mais à quelque dizaines de mètres de là se trouvait tapie une chose qui l’était, et qui venait de recevoir de sa fille des nouvelles des plus regrettables.


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Tomber comme un flocon [Abel]

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