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 La pièce sans fenêtre [ Pv Devaraj ]

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Dim 08 Mar 2015, 14:21


[ L'amour rend fou. La bêtise.. juste aveugle ]


Le démon pressa le pas, s'affairant à l'avancée fulgurante de la jeune femme. Ses yeux ne quittaient plus cette forme ombragée, cette silhouette de reine, si fine et majestueuse, chevauchant sous lui, une de ces bêtes primitives dont on se servait encore. Il avait, de toute évidence, une dent envers les chevaux, depuis que son fidèle destrier l'avait jeté dans des sables mouvants aux orées du désert, pour ensuite profiter de l'occasion pour se faire la malle, histoire bien plus plaisante à l'ouï qu'elle n'était à narrer au moment des événements. Son envol était gracieux, mais pressé et plein de doutes. Kai ignorait encore où celui-ci le mènerait, et bien que suffisamment méfiant des instincts surnaturels de ce petit être, il ne pouvait qu'espérer qu'elle le conduirait à bon port. Ouvrant ses ailes, il profita d'une bourrasque pour s'élancer davantage dans le ciel, fuyant à tout prix son regard baladeur et aux mille joyaux. Une odeur chatoyante de sève humide, mêlée à une horde d'autres senteurs de la forêt parfumée, afflua vers lui, le submergeant sans merci. Entre une odeur nauséabonde de champignon venimeux, un parfum citronné d'un regroupement de sapins, celui de l'humus qui poussait à  même le sol - visqueux et verdâtre à souhait - Kai suivait plutôt des yeux les chuchotements du zéphyr, languissants et tortueux. Ces derniers préféraient s'atteler à la torture de la chevelure violine de la cavalière, plutôt que celle du petit démon dont ils n'avaient que faire. Il évita quelques conifères sur sa route, repensant toutefois, à sa petite trouvaille dans les rues bondées et criardes de Sceptelinost, entre deux verres bien mérités.

En compagnie de 'sa' petite réprouvée, elles se dénotaient du paysage fuyard, grossier et extrêmement précaire comparé à celui dont elles étaient issues. Elles ne passaient aucunement inaperçues en solitaire, et l'alliage de leurs deux présences alors, était presque envoûtant pour les yeux, surtout pour ce qu'il en est de la vampire. « La chance me sourit.. et qui suis-je pour la rejeter ? » énonça-t-il d'un air triomphant quasi dérisoire pour autrui. Le démon, cherchant à se rendre à Mégido pour épier de plus près le couple l'ayant délaissé, ne manqua pas d'échafauder un plan - quoique bien piètre - pour pallier à son manque d'orientation en territoire inconnu. En suivant la jeune femme, il savait qu'elle le conduirait jusque là, ayant élu domicile - elle aussi - dans cette ville. Mais voilà des heures qu'elle chevauchait - après une disparition momentanée dans la forêt - tandis que son loup, quelques mètres derrière elle, portait sur ses flancs un homme évanoui et à l'apparence plutôt.. rude et méprisable. Quelques blessures portaient à croire qu'un échange des lames avait eu lieu, mais que l'homme n'avait pas eu la moindre chance de salut. Elle le ramenait probablement pour le remettre aux forces de l'ordre orishas.. Oui, c'était certainement ça. Or, il fut bien surpris de voir, à l'horizon, quelque ombre se faufiler, celle d'une bâtisse incroyable, et étonnamment imposante, espérant voir devant lui s'ériger les murailles de la capitale de la liberté, et non pas celles - ténébreuses - de la plus ignominieuse des prisons, aussi présentée comme refuge du peuple le plus abject. Le cerveau du démon ne semblait plus en mesure de suivre la cadence, et voyant la jeune femme pénétrer entre les murs de la forteresse, il se laissa choir au sol, désespéré.

Il n'avait aucune idée de l'endroit où ils se trouvaient, et il n'avait que très peu de chances de trouver, sur un si vaste continent, de nouveau la trace de la belle ville orisha qu'il convoitait. Poussant un cri de rage, son poing écrasé contre la surface rugueuse de l'écorce en bois, il sentit sa rage s'apaiser, certes, mais aussi les esprits des gardes environnants s'échauffer dans la recherche d'un possible intrus. Nul doute possible, c'était bien de lui qu'il s'agissait. Après qu'ils l'aient aperçu pendant une maigre seconde, le doute n'était alors vraiment plus permis et s'entama alors une course chevronnée dans les axes et allées boueuses et crasseuses du marais tout proche, dans lequel Kai parvint à se retrouver, envers et contre tout, grâce à ses ailes qui le privaient de plusieurs maux qu'affrontaient - fort heureusement - les gardes à terre. Au bout d'une heure environ, il sentit ses dernières forces le lâcher lorsque commença à tomber sur lui une pluie torrentielle, et qu'il n'eut d'autre choix que de mettre pied à terre. Ses ailes le torturaient, et dorénavant ce serait au tour de ses jambes, devant se résigner à une longue marche dans les péninsules forestières. « B*rdel ! Tout ça à cause d'une pauv' erreur de jugement.. Et ces bougres qui ont voulu me pourchasser.. J'en avais rien à faire de votre baraque les gars » Il se devait de formuler par des mots son contentement, et encore.. Ces derniers se voyaient de toute évidence freinés par sa fatigue colossale.

Croisant l'entrée salvatrice, d'une demeure tout ce qu'il y avait de plus élégant, il se permit d'entrer, essayant de trouver un maigre refuge pour la nuit, et une douce attention de la part de son propriétaire. De gardes, la demeure ne semblait pas munie, et ce ne serait alors qu'une question de temps pour que son hôte se montre et que la boucherie se lance s'il refusait, bien gentiment, de céder à ses attentes. Naïf comme à l'accoutumée, il fut bien heureux que celui-ci ne l'ait pas gratifié de sa présence, et encore moins de ses crocs, car ce dernier - Kai, petit démon de bas étage - ne risquait pas de faire long feu. Sa course se fit longue, ou plutôt trop oppressante à son goût. Il voyait défiler, à ses côtés, divers paysages, des voix qui semblaient l'appeler, l'inviter à s'y perdre, et combien de fois fut-il tenté d'y céder ? De se laisser aller à leurs appels enchantés et envoûtants ? Combien de fois crut-il sincèrement à cette autre présence que la sienne qui semblait le suivre par des pas plus lourds et imposants ? Il fallait rejoindre le bâtiment principal au plus vite, et ce sans tarder..

Arrivé dans le hall, après cette longue cavalcade de ses membres défaillants à travers une nature luxuriante et en plein essor, il se vit stupéfait par l'allure générale du logis. L'endroit semblait avoir été ravagé par le pire des fléaux, victime de la plus obscure et lugubre des malédictions. Il semblait perdu dans les temps, entre les âges, n'ayant d'appartenance claire ni à l'une ni l'autre, se contentant de sévir entre les deux. Les murs, aux couleurs de pierre sèche et insipide, étaient d'un silence funeste, d'un froid glacial ; les dalles au sol semblaient pleurer leur abandon, leur état déplorable, pleurer qu'on ne les voit sous un tel jour alors que l'or recouvrant encore certaines parties intactes prouvait la magnificence de l'endroit, jadis ; et le verre aux fenêtres - loin d'être au complet - donnait l'air de se briser au moindre faux mouvement, à la moindre faute inexorable.

Un cri perçant, aigu, comme venu des profondeurs de l'enfer, transperça les dernières barrières du démon, alors en proie à l'inquiétude, et victime de l'épouvante qu'inspiraient ces lieux. Les carreaux s'étaient brisés, comme il avait craint de le faire. Ce n'est pas pour autant qu'il se résignerait à faire demi-tour, mais disons.. que le courage d'affronter les mille dangers de la résidence, châtiait ses narines, ses sens pervertis, autant qu'il les dégoûtait. N'ayant aucunement envie de reprendre cette avancée errante dans les larges champs délabrés qui entouraient le domaine, il observa - au loin - quelques portraits avant de vociférer la question la plus insensée au monde : « Il y a quelqu'un ? » Outre les fantômes parsemant de leurs énergies douteuses et macabres l'air de la salle, il savait que seul un être de chair et de sang, d'esprit et de conscience claires ne pourrait lui répondre, l'entendre, et il espérait que cette entreprise déjà bien assez irréfléchie, ne s'avérerait pas signer son arrêt de mort.. Les choses semblaient, à son grand déplaisir, porter plus dans ce sens là..

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Jeu 12 Mar 2015, 17:47

~La pièce sans fenêtre ~

La pièce sans fenêtre [ Pv Devaraj ] I1403661148655


Devaraj se réveilla avec la sale impression qu'un abruti s'amusait à lui taper le crâne avec un marteau. Il avait la sensation d'avoir vieilli de dix ans en une seule nuit et de revenir d'entre les morts. Ses yeux s'ouvrirent sur un monde animé et coloré, aux fortes senteurs épicées et il respira un air lourd et putride. Beaucoup de gens semblaient s'afférer autour de lui sans prêter aucune attention au chaman affalé dans un coin, à l'ombre d'une peau, dans un renfoncement où étaient empilés divers paquets. Alors qu'il se relevait lentement en constatant qu'il avait mal de partout et en se demandant comment il avait bien pu atterrir dans une réserve, les souvenirs lui revinrent petit à petit : sa longue marche dans les marécages boueux, la tribu Raoni, l'immense fête avec le discours du roi, les combats et enfin, le grand feu et la fumée étrange que tout le monde avait inhalée. La suite des événements était assez floue, il se rappelait juste vaguement d'avoir fuit un bateau géant, avant de se cacher et de discuter avec un petit gobelin. Bref... Ce fut une journée mémorable quoi.
L'odeur du sang et de la sueur remplissait encore les alentours parsemés d'une fumée âcre et volatile. Toute la tribu était occupée à ranger, nettoyer, reprenant le cours de sa vie quotidienne. Devaraj resta un long moment fasciné, à observer ces gens qui lui semblaient si exotiques. Quand il se leva, l'un d'eux vint lui apporter un bol rempli d'un liquide brûlant que le chaman accepta allègrement avec un sourire en guise de remerciement. La boisson était épaisse et épicé, mais c'était bon, nourrissant, et cela fit disparaître son mal de tête. Il soupira, s'étira et quitta son coin pour parcourir le camp, à la recherche de son esprit compagnon. Le mauvais moment du réveil passé, il était assez content d'avoir fait tout ce chemin pour venir ici, parce qu'il avait ainsi eu l'occasion de découvrir plein de nouvelles coutumes, habitudes et personnes. De plus, le roi avait fait une annonce assez spéciale à propos du royaume des morts, une évolution des choses que  le jeune chaman ne manquera pas de suivre de très près. Alors qu'il gambadait parmi les tentes,  il retrouva Khaal à l'ombre d'une pierre, observant calmement la fourmilière Raoni devant eux.
-"Bien dormi ?" demanda d'un ton sarcastique l'efle noir, tournant la tête et découvrant la tête déterrée de son maître.
Il ne répondit rien et se contenta de hausser les épaules. D'un accord silencieux, ils prirent le chemin de la sortie du camp pour ainsi reprendre leur route de vagabond. Un jeune garde leur ramena les affaires personnelles qu'ils avaient laissés à leur arrivée, c'est à dire le bâton , les habits de Dev' et les armes de Khaal. Ensuite le raoni leur donna gentiment un paquet de provisions et des indications sur la direction à prendre pour sortir du marécage, avant de les saluer poliment et de disparaître.

Nos deux compères repartirent donc dans le fameux marécage dans lequel ils avaient déjà pataugé pendant deux jours. Après une heure de torture parmi les moustiques, la vase et le limon et le sol qui s'enfonçait, le chaman était déjà en sueur. La peinture raoni suintait sur son visage et sur son torse et lui collait à la peau. Il avait des cheveux hirsutes et des cernes sous les yeux. En partant, il n'avait pas prit le temps ni de remettre ses vêtements initiaux, ni de se laver au moins le visage, ce qui lui donnait plus ou moins un air de fou furieux...  L'odeur de sueur mélangée à la moisissure ambiante lui donnait la nausée et ses pieds étaient déjà fatigués de devoir forcer leur chemin dans la gadoue et dans l'eau croupissante. Les arbres cachaient la lumière du soleil et les cours d'eau se ressemblaient tous, c'était un cauchemar. Combien de temps allaient-ils encore passer dans cet endroit ?
-"Eh ? Tu es sûre que c'est la bonne direction ? Le garde nous avait dit d'aller à droite... Et j(ai une impression de déjà vu." demanda-t-il à Khaal en ne cachant pas son désespoir.
Cette dernière montrait aussi des légers signes d'exaspération parmi son masque de neutralité.
-"Pour être franche avec toi, on est perdu." répondit-elle en fermant les yeux et en soupirant.
-"Oh... Génial."
Que dire d'autre ? Dev' n'avait plus la force, ni le courage de décharger son accablement sur Khaal. Il se contenta de continuer sa route, s'appuyant sur son bâton et prenant son mal en patience.

Alors que la journée était déjà bien avancée et après une courte pause pour manger rapidement les galettes raoni, ils arrivèrent alors devant un étrange portillon.
-"Surtout, je ne veux pas savoir qui serait assez louche pour foutre sa maison ici." grommela l'efle noir en voulant ainsi dissuader son maître d'entrer dans cet endroit. Mais elle savait déjà que c'était peine perdue, connaissant l'attirance qu'avait Devaraj pour toutes les choses bizarres et hors du commun. Comme pour confirmer ses doutes, ce dernier s'avança vers le portail, qu'il traversa comme si c'était tout à fait normal de trouver ceci en plein milieu d'un marécage.
Khaal le suivit en étouffant un soupir et en mettant sa main sur la garde de son épée. Si ses yeux aiguisés ne lui jouaient pas de tour, elle distinguait bien des tourelles noires au loin, des tourelles qui ressemblait beaucoup à l'architecture vampirique dont elle avait déjà entendu parler....

Une fois la porte passée, ils se retrouvèrent dans un parc assez vaste, avec un sol plus solide et des arbres plus hauts, et plus loin, des escaliers dévastés qui menaient à l'entrée d'un énorme manoir.
-"Laisse moi deviner... tu comptes passer la nuit ici, et vérifier par la même occasion s'ils n'y aurait pas d'éventuels esprits dans le coin... Enfin je préfère te prévenir, ce sont des esprits à crocs que tu risques de croiser." rajouta-t-elle avec son habituelle voix neutre.
Le chaman sourit pensivement. Effectivement, c'était exactement ce qu'il comptait faire ! Il entra sans attendre dans le manoir, découvrant ainsi une immense salle dévastée, pleine de poussière et dans laquelle régnait une ambiance malveillante. Quand ils continuèrent un peu plus à l'intérieur, il eurent l'impression qu'une malédiction hantait ce lieu, s'engouffrant dans chaque salle et s'incrustant chaque meuble. Les alentours étaient déserts mais il y avait tout de même une présence, personne ne les regardait mais ils sentaient quand même des yeux les scruter. Le chaman à l'affût de quelques indices permettant d'expliquer cela et restant tout de même sur ses gardes, manqua de faire une crise cardiaque en entendant soudainement quelqu'un -une vrai personne cette fois-ci- crier en demandant s'il y avait quelqu'un d'autre. N'étant pas très loin de la source du bruit, ils continuèrent dans cette direction et finirent par arriver dans un couloir dans lequel se tenait un jeune homme aux cheveux noirs, probablement autant intrigués qu'eux par l'endroit.
L'instant de surprise passé, le chaman se reprit en main et s'avança doucement.
-"Bonjour... Je- Vous êtes aussi ici pour passer la nuit ?" demanda-t-il.
Khaal maudit mentalement le manque de prudence de son maître... Cela faisait deux fois qu'il se jetait sur des inconnus pour leur serrer la patte, sans se demander s'ils avaient de bonnes intentions ou non... Cependant, elle ne prit pas le temps de pester plus, car son attention fut attirée par autre chose de plus inquiétant.  
-"Dev', il y a quelqu'un qui pleure..." dit-elle rapidement d'un ton plus brusque que la normale.
Le chaman sursauta et tendit l'oreille, se rendant effectivement compte que des cris ou des pleurs semblaient venir de l'étage juste en dessous. Il n'aurait jamais pensé que ce soit aussi stressant d'être dans une situation pareille et pour la première fois de sa vie, sa curiosité ne dépassait pas sa peur.  

-"Hum... On.. va voir ce qu'il se passe ?" demanda-t-il à tout hasard. Même en étant inférieure à sa crainte, sa volonté de savoir, de découvrir et d'apprendre le pourquoi du comment était toujours là. Si l'inconnu ne voulait pas les accompagner, il serait bien capable d'y aller tout seul, même si cela lui coûtera tout son courage.

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Jeu 19 Mar 2015, 21:58


Son regard était porté vers l'avenir. Jamais il ne se retournait pour contempler ses pas, ni admirer l'avancée fulgurante qu'il avait pu effectuer. Son insolence ne venait pas de là, et il n'avait pas besoin de se baser sur ce genre de données pour se montrer toujours aussi orgueilleux, et imbu de lui-même. Il avait ça dans le sang, dans les veines, dans la tête. Les attributs de sa race le soutenaient dans cette entreprise. Il était un composé d'arrogance et orgueil concentrés dans une même entité, et il n'avait de peine à infliger aux autres cette suffisance dont il faisait preuve. Ses yeux se portèrent vers l'homme, le détaillant ainsi de haut en bas pour tenter d'y discerner un danger quelconque qui serait la source de sa méfiance, et tout autant, l'anéantissement de cette dernière. Il crut un instant à la rencontre inopinée du maître des lieux, se prépara intérieurement à bondir si jamais leurs échanges tournaient mal et qu'un mur de résistance s'opposait à sa volonté. Au vu de cette innocence et ouverture extrême du personnage, sans tenir compte de ses paroles d'étranger, il comprit, facilement, qu'il n'en était rien. Ne s'attardant aucunement sur les détails ni sur une apparence qui pouvait se montrer trompeuse à tout instant, il voulut simplement se prononcer. La main dans les poches, il scrutait l'horizon, étrangement curieux concernant les antécédents du bâtiment, le silence religieux qui planait en ces lieux longeant le Mausolée de Séraphine. N'ayant pas eu vent des origines ni de l'engeance de celui à avoir bâti les lieux, il ne pouvait se douter de l'ombre malicieuse qui leur planait dessus.. Aux orées des marais, cette dernière n'était d'ores et déjà guère plaisante.. « Ouais. La tempête m'a prit à contre pied. J'étais dans la mouise, perdu dans les marais. » lâcha-t-il nonchalamment. Il n'avait pas pour habitude de converser avec quelqu'un d'autre, et sa nature de démon l'avait souvent porté, au bout d'un moment, à venir à bout de celui-ci. Aucune amitié n'était nécessaire, et sa famille suffisait bien à ses besoins d'affection qui n'étaient à priori déjà pas très prononcés, voire extrêmement réduits. « À ce que j'ai pu comprendre, t'essaie de trouver un abri. Faudrait fouiller un peu.. Faut pas s'attendre à ce que ça nous tombe entre les bras. La vie est pas si belle » Et reprenant une facette externe à tout trouble, à toute émotion digne des faibles, il se tourna vers le couloir que les deux autres venaient de quitter.

Une voix plaintive, craintive, l'interrompit quasi instantanément dans sa réflexion, et l'intervention de l'inconnue se laissa résonner entre les murs creux, vidées de toute essence vitale. D'après les accords aigus et l'intonation ravagée des cordes vocales de la demoiselle, on pouvait facilement en déduire qu'elle était la même à avoir pourvu ce cri strident tantôt, et des soupçons pesaient sur l'état de santé de cette jeune femme.. En provenance de l'étage inférieur, d'une sorte de galeries souterraines qui semblaient traverser l'ensemble de la demeure, le petit son semblait se fondre dans le paysage, se distinguer de lui au même temps.. S'immiscer dans les crânes de ses victimes pour y rester, les obséder. C'en devenait presque mélodieux de l'écouter, et on pouvait prendre ces petits cris silencieux, cette douleur oppressante pour un chant de sirène, mais dont la magnificence les mènerait à leur perte. Le temps les pressait, et des pas qui surgirent de part et d'autre, les hâtaient dans la découverte de l'endroit, et surtout de l'éloignement des échappatoires au manoir. Les escaliers, assez escarpés, menaient à une partie dont l'état délabré se voyait décuplé, si l'on venait à le comparer aux vues luxueuses, aux bijouteries et verreries ternies, vieillies, souillées, et dont les diverses chambres faisaient d'autant plus froid dans le dos. Sous leurs pas avisés, une bouillie verdâtre s'écoulait, et les murs de pierre étaient en proie à l'humidité saillante de l'endroit. La plupart des chambres semblaient condamnées, toute visite impossible pour tout visiteur à la trop conséquente curiosité, et seules quelques unes d'entre elles ne trouvaient pas devant leur porte un tas de boue sablée, quasi dure comme la roche, empêchant définitivement l'entrée.

Suivant les courants d'une voix énigmatique, ouvrant une des portes qui semblaient la garder captive, ils virent avec horreur le visage de la jeune femme à l'embrasure de la porte, lâchant presque un hurlement de terreur par une telle proximité imprévue. L'ombre éthérée se teignait d'une curieuse couleur, un gris foncé avoisinant le noir, ses yeux dissimulés par un bandage, dont la couleur claire laissait à comprendre l'importance majeur dans l'histoire de la demoiselle.. Ce, si, et seulement si, l'on parvenait à différentier ses traits du paysage environnant, ses courbes étant bien trop difformes, bien trop hasardeuses pour qu'on puisse aisément, outre sa chevelure et son visage, les déceler. Elle leur hurla dessus, bondit sur eux, comme pour leur faire comprendre de ne pas l'approcher. Elle paraissait sauvage, elle était purement indomptée. Elle semblait vivre sans restreintes, à ses envies, penchants et petits caprices qui ne semblaient pas si inhabituels.. Il ne douta pas que sa voix eusse été à l'origine de tous ces débris de verre, de tous ces fragments de rêves cassés, de cette utopie qui planait autrefois dans la demeure.. Sans rechigner, sans se laisser intimider par ses yeux perçants et ces pleurs sans larmes qui continuaient de se faire entendre, l'homme pénétra dans son antre, prenant place sur un des meubles dont les morceaux semblaient prêts à se démembrer à tout moment. Cet air d'indifférence sur son visage ne semblait pas s'altérer, mais le petit bout de femme ne fit pas cas de sa présence, et s'empressa de rejoindre de nouveau sa fenêtre ( petite ouverture à la limite du seuil de terre extérieur ), et s'affairer de nouveau à sa contemplation silencieuse, et tout aussi déterrée.. Elle regardait le bloc de mortier, comme si ses yeux, absents, avaient pu voir à travers. Ça en faisait froid dans le dos pour les plus sensibles, il fallait l'avouer.. « Tu regardes quoi comme ça ? Avec autant d'intérêt ? » s'enquit l'homme, véritablement comme si de rien était. Bien qu'elle fut propice à une ignorance et un détachement total de sa part, la jeune femme prit la peine de répondre, sans pour autant tourner la tête pour le regarder. Elle ne lui portait pas le moindre intérêt, il fallait dire les choses comme elles le sont. « Et bien ? » , « Les jardins sont beaux en cette saison.. » , « Tu rigoles ? Ils sont pleins de feuilles, de lierres grimpantes sur les murs, et pleins de mauvaises herbes.. » , « J'aime ce petit bruit de brise.. Elle me fait penser à ma sœur » L'homme acquiesça, ne s'intéressant pas plus que cela à la maigre explication lointaine - et complètement hors-sujet - que lui fournissait la petite femme. Feuilletant un livre posé non loin, dont les pages étaient exposées au regard mais dont on remarquait l'absence de touché, de ce contact des mains humaines, chaudes et moites à souhait pour en imbiber ses pages, il crut les sentir se désagréger entre ses paumes.

Les feuilletant d'un air las, et languissant, il ne prit pas longtemps à reprendre place sur le petit bureau, un peu en hauteur, les jambes croisées, et un air mordant, narquois sur son visage. Ses yeux s'étaient 'illuminés' comme qui dirait, et ses lèvres s'étaient déchirées d'un air plutôt dérangé. Si l'esprit décidait de se reclure, il serait forcé de la faire agir. Loin était le démon de savoir, qu'il ne s'agissait en rien d'un revenant, mais bien d'un sacrifié, d'un être propre au suicidaire, revenu de parmi les morts. Une ombre en d'autres mots.. « Hum.. Dit mon brave.. dont je ne sais toujours pas le nom.. Tu savais que les lieux avaient servi par le passé à d'expériences illicites par de vilains sorciers dont le seul but était de découvrir les secrets les plus sordides du corps des mortels ? C'est chaud hein.. Comment ils font en voir de toutes les couleurs à plein de ces pauvres gens qui n'ont rien demandé.. » Reprenant son semblant de lecture, il essayait d'évaluer les dégâts de ses mots, le désarroi que ces derniers incitaient dans le coeur de la jeune fille. « Ah oui.. Et il semblerait même qu'à un moment, il ait eu pour cobayes deux jeunes filles.. Elles étaient jumelles si je ne fais pas erreur. Elles ont été ramenées ici après qu'on les ait enlevé dans un marché trop bondé. Elles furent apparemment séparées par leurs envahisseurs qui siégeaient ici, et ce peu après leur arrivée. Ce dossier ne fournit que très peu de détails sur les sciences qu'on leur fit subir… mais bien assez, ou tout juste, pour que nous puissions comprendre ce qu'elles sont devenues.. À l'une, l'on avait arraché les yeux, torturé sans merci.. tandis que l'autre avait été élevé dans le plus grand luxe. Cette pièce était apparemment la chambre de cette première » Et effectivement, s'ils faisaient demi-tour, ils auraient pu remarquer le cadavre saillant, le lit mal fait, la bibliothèque poussiéreuse mais bien présente, des traces de vie et de griffes partout dans l'enceinte. Il était clair qu'on y avait enfermé quelqu'un, et contre son gré qui plus est. « Ils essayaient à ce qu'il paraît ( quelques petits novices insignifiants mais aux grandes ambitions ) de comprendre et déchiffrer le lien qu'il y a entre les âmes de deux jumeaux, et le pourquoi de cette âme scindée en deux.. Et comme tu peux l'imaginer, à la mort, cette dernière ne frappe pas qu'un seul, mais bien les deux. La faucille vint se placer sur la tête de l'« aînée » si l'on puit dire. Souffrant de mauvais traitements et de carences qui en étaient devenues irrécupérables, elle mourut. L'autre la suivit. FIN » Et il ferma le bouquin, d'un air franchement exaspéré par sa lecture.

Avant qu'il n'ait pu se moquer où lâcher la moindre parole qui soit, il vit l'ombre éthérée bondir sur lui, d'un aura déchirant et carnassier qu'on ne lui connaissait pas jusque là. Elle n'était pas seulement capable de cet air de profond ennui, de passivité face à son existence, mais aussi d'un plus meurtrier que violent. Plus qu'elle ne l'avait jamais été. Bien que ses mains l'eurent traversé, Kai crut réellement les sentir enserrer sa trachée, s'en prendre à sa gorge blanche de plâtre. Ses petites mains qui semblaient si fragiles étaient en fait de véritables armes qu'il aurait mieux fait de craindre, que de s'y exposer. Les portes et fenêtres fermées à clé, il ne leur restait plus aucune alternative, et leurs options mourraient lentement, mais sûrement, une à une, à même d'en faire ses prisonniers, même si un 'esprit' elle demeurait. Déliant un bout de son bandage, les laissant entrevoir quelques cicatrices parsemées sur son visage, elle renoua les liens qui gardaient ses yeux prisonniers du tissu, et vit un fil de sang perler sur sa joue pâle. Parlant cette fois on ne peut plus distinctement, et sans trop divaguer, elle s'approcha du démon, puis du chaman et de sa compagne, s'interposant entre la porte de sortie.. et eux. « Ma sœur est toujours vivante. Tu es bien sot de ne pas l'avoir remarqué. » On trouvait dans le son de sa voix, l'incantation de la folie, et ses effets semblaient perdurer, teindre sur son esprit dont ils redoutaient la clarté défaillante, et ce depuis qu'ils étaient entrés. « Silence ! Elle m'a parlé.. Elle arrive ! Attendez.. Laissez-moi la voir ! Je veux la voir !! Elle est quelque part par là.. Laissez-moi la revoir… Et rendez-moi la vue ! Et c'est seulement à cet instant que je vous laisserai la vie sauve.. » Ses menaces n'étaient pas en vain, et malgré la folie de ses paroles, elle restait étrangement.. mature pour les infanteries qu'elle débitait, cette mentalité à laquelle elle était restée figée. « Je ne vous laisserai pas partir avant cela » Le verdict avait été prononcé, et maintenant.. aux accusés de délibérer ! S'ils en avaient encore seulement le luxe..

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Dim 19 Avr 2015, 16:53

Devaraj continua lentement d'avancer dans le couloir en retenant un peu sa respiration. C'était vrai que, comme l'avait dit son nouveau compagnon d'infortune, il cherchait à la base un abri pour dormir, un endroit plus accueillant que ces marécages puants à l'extérieur... Mais si ces cris ne s'arrêtaient pas, il fallait pas compter sur lui pour dormir tranquillement à poings fermés toute la nuit ! Il suivit prudemment l'individu dans le manoir, regardant à droite ou à gauche, admirant rapidement les anciennes décorations et sentant son intérêt et son excitation monter en flèche au fur et à mesure, car l'ambiance devenait de plus en plus lugubre et maudite, leur marche étant rythmée par les pleurs déchirant l'atmosphère. Tout était immobile et inhabité et pourtant, il pouvait clairement entendre cette voix presque inhumaine. Il sentit un frisson indescriptible lui parcourir le dos alors qu'ils s'approchaient d'une vieille porte de laquelle semblait venir le bruit et ne sut dire si c'était de la peur, de l'impatience ou un peu des deux. L'homme devant lui l'ouvrit rapidement et ils se retrouvèrent nez à nez avec une espèce de créature qui devait sûrement être à la base une humaine, mais qui n'avait plus vraiment grand chose à voir avec.
Le chaman entra dans la pièce et la fouilla du regard tout en suivant attentivement l'échange entre l'homme et la créature. Alors comme ça elle pouvait encore communiquer ? C'était étrange... Qui était-elle ? D'où venait-elle ? Ce n'était clairement pas un esprit, puisque l'homme pouvait la voir et lui parler. Il la dévisagea longuement, de plus en plus intrigué. Était-ce une Ombre ? Faisait-elle partie de cette race dont il avait simplement entendu parler et qui semblait avoir tant de similitudes avec les Chamans ? Il n'aurait su dire… Mais il était presque sûr d'avoir raison.

Le chaman retourna néanmoins son attention vers l'homme et l'écouta attentivement lire le bouquin que ce dernier avait trouvé.
« Hmm... Et bien...je préfère m'intéresser aux âmes passés... mais bon pourquoi pas faire des recherches sur les jumeaux aussi, il faut de tout non ? » répondit-il vaguement en soupirant un peu et en s'accroupissant à l'aide de son bâton, pour être plus confortable en écoutant la suite. A vrai dire, tant que cela apportait des vraies connaissances, le moyen importait peu, cela ne le choquait pas vraiment, même s'il ne se sentait pas du tout de participer un jour à de telles expériences.
« Je m'appelle Devaraj au fait... » rajouta-t-il pensivement.
Des jumelles hein ? Effectivement le choc avait du être de taille pour ces deux-là, surtout si elles étaient encore jeunes... Le chaman déduisit du récit de l'homme que la première qui était morte à force de mauvais traitements devait être celle....qu'il avait actuellement en face de lui. Charmant. Depuis combien de temps datait ce bouquin... ? Il semblait partir en poussière. Depuis combien d'années cette âme errait-elle dans sa pièce ? Maintenant qu'il y était, il se sentait incapable de partir sans avoir eu la réponse exacte à toutes les questions qu'il pourrait se poser. Un peu perdu dans ses pensées, il sursauta en voyant la créature bondir et se releva vivement pour s'écarter.
« Eh ! Fais attention ! » s'exclama-t-il en s'approchant pour faire fuir la chose avec son bâton.

La créature s'interposa entre eux et la porte et leur annonça entre-autre qu'elle n'était pas seule... Quelle ironie, elle devait avoir rêvé de sortir sa solitude pendant trop longtemps, cela lui avait monté à la tête. Il était clair qu'il n'y personne d'autre qu'eux dans cette pièce, et eux-même n'avaient pas vu âme qui vive dans le manoir à leur arrivée. Tout avait l'air d'être abandonné et désert... Enfin, cela ne rendait l'histoire que plus intéressante et mystérieuse, pour le plus grand plaisir du Chaman. Finalement, Devaraj était bien content d'être venu ici ! C'était une des premières fois qu'il croisait une Ombre d'une façon aléatoire comme ça ! -si c'était bien une Ombre comme il le supposait- Il en devint tout joyeux et enjoué et se retint de sauter surexcité un peu partout dans la pièce. A la place, il se décida de faire quelque chose d'utile et s'empressa de s'adresser à la créature, le plus doucement possible :
« Calmez vous...on ne vous veut pas de mal. On peut vous aider même ? » articula-t-il le plus calmement possible et essayant de paraître un minimum crédible. De toute façon ce n'est pas comme s'ils avaient vraiment le choix vu les menaces que l'Ombre venait de proférer à leur égard.

Ses paroles avaient dû être à peu près convaincantes puisque la femme arrêta de bouger. Mais il fallait faire attention aux gestes et aux mots, car on voyait très bien sur son visage et dans sa façon d'être, la fragile limite entre raison et folie, qui pouvait être franchie en l'espace d'une seconde à peine. Khaal resta devant lui pour le protéger et tenta de communiquer avec l'Ombre pour en apprendre un peu plus, mais l'autre l'ignora simplement, lui adressant un vague regard avant de se retourner vers les deux autres individus. Devaraj était très intrigué par le bandeau qui recouvrait ses yeux et les cicatrices qu'ils avaient pu entrevoir. Elle leur demandait de l'aider à retrouver sa vue et sa sœur, mais il se demandaient bien comment ils étaient censés faire ça...
Lentement, Devaraj se rendit compte qu'il y avait encore beaucoup de choses à résoudre.

-"Hum... " A court de mots, il soupira longuement et se rassit contre le mur froid de la "cellule", avant de se retourner vers son compagnon d'infortune.
-"Je crois qu'on a trouvé un abri pour la nuit... Ou pour l'éternité peut-être aussi..." murmura-t-il d'un ton sarcastique, à moitié sérieux. Enfin, il préférait rester assit ici plutôt que de tenter de s'approcher de la porte et d'avoir affaire à la chose... Parce-que bon, les combats c'était pas vraiment son fort.
-"Raconte nous ton histoire..." dit-il alors en s'adressant à l'ombre et en priant pour que celle-ci ne rentre pas dans une nouvelle crise. Maintenant qu'ils avaient eu la version officielle des faits avec le bouquin, peut-être que cela serait utile d'avoir une autre vision des choses.

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Jeu 14 Mai 2015, 17:30


L'ambiance n'avait plus rien d'enviable, eusse-t-elle seulement été emplie - dans un premier temps - d'autre chose que d'angoisse à l'état pur. L'on sentait de ces murs se dégager la géhenne que l'on y avait infligé par le passé, assené à de sombres innocents décidément trop naïfs pour s'apercevoir de la supercherie avant l'heure, et qui par cette faute irrémédiable, avaient dû payer de leur vie cet affront. Leurs larmes s'étaient évaporées, mais leurs pleurs de désespoir étaient comme encrées dans la pierre, gravés jusqu'au plus profond de cette dernière. Cette demeure avait quelque chose de sinistre, de sournoisement funèbre, et les seuls récits exploitant tout de cette âme partagée ( dont le nom restait tu ), étaient suffisants à faire taire le comment, voire même le pourquoi.. Combien d'entre eux cherchaient encore vengeance ? Combien à l'effigie de cette petite que la folie avait dompté, erraient en ces lieux dans une quête perpétuelle de celle capable d'apaiser leurs souffrances, d'étancher leur soif, de leur quitter cette douleur lancinante de la poitrine ? D'ombres il était question, mais pas seulement, car par de tels amas d'énergie, de cris éthérés, même les esprits pesaient lourd sur les coeurs, et le tout – tendu – en ajoutait une couche à cette mine de manoir hanté. Kai, loin de s'en voir effrayé par la façade, portait son intérêt sur le contenu, dont la manifeste condamnation avait été écrite sur le bois, sur son corps tout entier qui ne semblait pas pouvoir – ou serais-ce vouloir ? - quitter cette chambre. Une attache émotionnelle qui pour tant d'autres semblerait obscène, démente, était peut-être à ses yeux l'accomplissement de sa délivrance.. Mais sa cage dorée.. l'avait-elle seulement échappé ?

« Ces hommes cherchent à percer à jour tout genre de mystères, et ce dernier est loin d'être le premier. Tout est bon à se mettre sous la dent, et ils ne manquent jamais de supports. Les jumeaux ne sont qu'un exemple parmi ceux dont l'utilité est exigée et dictée au nom de la science pour flatter l'ouïe des plus crédules. Ce semblant d'autorité et de fiabilité s'immisce dans les esprits, et sans la moindre méfiance, la confiance s'installe. Il n'était pas dur de se faire obéir ainsi, pourvu que de recouvrir ses traits du masque d'os qui tout homme saurait cacher. Il n'est en fait, pour la plupart des scientifiques.. question que de leur ôter la vie histoire de tester sur le corps ce que l'esprit ne saurait supporter de son vivant. » Il n'y était pas extérieur, et ceci n'était aucunement une leçon de moral. Il n'avait pas ce genre de mœurs, bien qu'ayant partagé trop longtemps le même toit, un ciel tout aussi bleu que les orbes de miel de la réprouvée. La bonté ne figurait pas dans ses attributs, et de coeur son peuple se disait dépourvu. L'aider revenait à accomplir un caprice, à réaliser un énième témoignage d'égoïsme pour sa part.. Loin d'y tenir de tout coeur, il cherchait néanmoins à se soustraire à l'ennui mortel d'un continu périple, ou d'une mort languissante qui s'annonçait pour eux. Les pensées de son 'camarade' lui étaient cependant closes, et impossible d'en franchir les barrières. Son comportement euphorique eut le mérite de l'ébahir, le méduser, suffisamment pour deux à vrai dire, l'autre dont le masque restait de marbre. Étrangement plu, il semblait rayonner outre la sordide réalité.

Il prit des pincettes pour s'adresser à elle, ce petit bout de femme qui tout avait de dangereux, et très peu d'accueillant. D'elle s'émanait un air de danger, de dépression, constants, accablants, et de peine elle semblait teintée. « Bien qu'il nous soit impossible de te ramener à la vie.. » Kai n'était pas si doux. Il n'avait de peine à anéantir ses espoirs, craqueler le verre translucide qui la gardait encore à l'écart, et l'empêchait de leur sauter au cou à la moindre occasion. Sa condition actuelle n'était que le fruit de ses faiblesses, de l'asservissement face à ses agresseurs, et de la souffrance qui s'en découla. Elle ne tenta pas le moindre geste brusque, et parut au contraire céder à la raison, bien que la folie fut plus à même de l'emporter. Elle était déraisonnable, et malheureusement, même si ses interlocuteurs s'en étaient aperçus, elle il n'en était rien. Elle n'avait plus conscience des pétitions déraisonnables qu'elle formulait, mais bien ( et uniquement ) de celles qui lui tenaient à coeur et qu'elle voulait voir réalisées. Elle avait tout perdu, de force, par la contrainte, cette 'obligation' qui n'en est plus une car elle on peut lui échapper. Hélas, elle n'avait absolument pas eu son mot à dire quant à la privation de sa vue.. voire de son humanité, vue alors, et considérée ainsi, comme un rat de laboratoire, dont seuls les résultats et les faits importaient. « Mon.. histoire ? Ce jeune homme n'a-t-il déjà pas mentionné.. tout ce qu'il y avait à savoir ? » articula-t-elle, fixant un point vide de l'horizon, comme si un passé révolu, une fresque d'un temps antique qu'elle chercherait encore du regard, et de ses petites mains, pouvait réellement s'y retrouver. Elle leva les yeux, ses boucles se détendirent en conséquence pour venir couler dans son dos. Elle semblait avoir retrouvé un tant soit peu.. de lucidité. « Nous étions les sujets neuf et dix de ce projet. Shäde et Shaë. Je suis la première.. J'ai été celle qui l'a mêlée à toute cette histoire, par pur caprice.. J'ai.. tué ma sœur. Du moins..c'est ce que j'ai cru. Étant jumelles, notre âme est scindée en deux. Nous faisons réellement partie l'une de l'autre, et ainsi nous avons toujours été étroitement liées. Dans la vie.. comme dans la mort. Ce qu'il est dit dans ces rapports.. »

Et elle pointa du doigts la sorte de bureau dans lequel avait été trouvé, ce dit carnet de tantôt « ..n'est que la pure vérité. J'ai grandi dans un enfer perpétuel. C'était pour elle que je supportais les tortures qu'on m'infligeait. C'était en pensant à notre rencontre prochaine que j'amassais le courage nécessaire pour tenir encore à la goutte de vie dont ils ne me privaient guère, me laissant alors dans cette latence, dans cet état mi-vivant, même pas capables de me léguer la mort, cet apaisement dont j'avais si envie. Mais.. ils nous ont finalement empêché de nous voir. Leurs expériences semblaient avoir atteint le point culminant, et ils cherchaient désormais à comprendre, à assister au mystère ultime de notre liaison. La mort d'une d'entre nous devait s'y prêter. Et vu mon état mental.. qui se dégradait à vue d'oeil, il n'était point surprenant qu'ils choisissent de me faire craquer, moi, plutôt qu'elle. En me suicidant, j'ai cru… qu'elle s'en était allée aussi. Mais j'entends de plus en plus sa voix !! Elle me hante, elle me purifie de mes péchés. Elle me fait sombrer tout comme elle me sorte de cette peine constante que je ressens en permanence. Elle doit être quelque part.. elle m'attend.. Qu'en ai-je à faire de ma vue s'il m'est permis de la retrouver ? Mais ce n'est pas pour autant que je vous laisserai la vie sauve.. Vous n'avez pas intérêt à fuir.. Je vous retrouverai avant que vous ayez pu quitter le mausolée. Et ma vengeance sera le fruit de cette haine qui ne vous est – certes – pas dirigée, mais vous en ferez bien les frais » Ses menaces n'avaient pas l'air vaines, et c'était perdu d'avance s'ils espéraient fuir assez rapidement la zone limitée sous son contrôle. Ils n'avaient que très peu d'informations sur l'entité fantasmagorique, et il allait de soi qu'ils ne pouvaient s'exposer à de tels risques..
« Je suppose.. que tu as une idée de par où commencer ? Nous ne connaissons pas bien le logis, donc à toi de nous guider » Elle eut d'abord un air de méfiance, avant de croire partiellement à ce que le démon affirmait. Il grattait l'arrière de son crâne avec agacement, et dans ses paroles l'on lisait tout l'ennui de la chose. Il cherchait peut-être à rester en vie, à tout prix, à se libérer de ce tracas au plus vite, tout en gardant une emprise sur son avenir, et pouvoir coucher dans cette muraille pour la nuit. Il ne faisait rien sans rien, ou rien qui ne fusse nourrit par ses propres envies, il fallait bien le savoir. « Sa chambre est la toute dernière.. au fond de ce couloir. » , « Dans les sous-sols également ? » , Elle déglutit. « Il ne fallait pas que nous soyons trop loin l'une de l'autre.. » Cependant.. la trouvaille qu'ils ferraient là bas, s'apprêtait et osait compromettre ce calme qu'ils croyaient être le sien de son vécu.. Shaë n'avait peut-être pas été aussi dotée que sa sœur l'eut crut.. et le plus dramatique dans cette histoire risquait de voir le grand jour, dans cette chambre, dans cet espace confiné, pour le meilleur..comme pour le pire.

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Sam 06 Juin 2015, 01:08

C'était bien. C'était magnifiquement bien... Devaraj ne regrettait pas une seule seconde d'être entré dans cette dangereuse pièce, bien qu'il ne possède qu'une chance sur deux d'en ressortir vivant...  Il réfléchira à sa probable mort en temps voulu et pas avant. Passer des heures à cogiter et à s'effrayer là dessus était une grande perte de temps totalement inutile à ses yeux, surtout que c'était un fait inévitable, donc qui ne valait pas la peine qu'on s’apitoie  dessus. pendant trop longtemps. A la place, il pouvait profiter du moment par exemple , peu importe ce qui suivrait après. Actuellement, il était donc enfermé avec un inconnu et une Ombre, et chargé en quelque sorte de découvrir une histoire pour pouvoir sortir et rester en vie... Dit-comme ça, c'était presque comme un jeu !

Il fixa d'un air heureux la créature devant eux, l'écoutant poliment et attentivement parler, un peu surpris au fond de lui qu'elle puisse encore tenir un aussi long monologue s'en s'égarer dans sa folie et qu'elle ai encore des souvenirs de son passé aussi clairs. Shäde était son nom donc... Même s'il elle ne semblait pas mentir, il doutait grandement que sa version des faits soit la pure réalité. Elle semblait tenir une partie de ses dires du carnet qui avait été laissé là, et ce carnet n'avait probablement pas été écrit de sa propre main. Autrement dit, c'était ce qu'on voulait ce qu'elle pense, à supposer qu'il ai été placé ici avant sa mort. Et dans le cas contraire, c'était simplement la version des faits du point de vue des sorciers... Mais dans tous les cas, il manquait toujours un morceau pour compléter le puzzle. Il se demandait grandement ce que Shaë aurait pu leur raconter si cette dernière avait encore été en vie... Malheureusement, ils n'auraient pas l'honneur de lui parler et il faudra reconstituer les morceaux à partir des traces laissées seulement.

Le chaman esquissa un sourire en entendant la menace qui conclu le long discours de l'Ombre et manqua d'exploser de rire. Comme s'il allait s'enfuir dans une situation pareille ?! Il préférait justement mourir plutôt que de retourner dans le marais boueux qui l'attendait patiemment à l'extérieur. Et puis de toute façon il trouvait cela très intéressant et ne risquait pas de lâcher l'affaire par simple couardise.  D'ailleurs, maintenant qu'une sorte d'accord avait été conclu entre les deux parties, il était peut-être temps d'aller chercher ce que Shaë attendait d'eux.
Il avait aussi envie d'en apprendre plus sur l'homme à côté de lui, à supposer que ce soit un humain- qui l'avait rejoint par pur hasard, même s'il doutait avoir le temps de discuter plus sérieusement avec lui. De toute façon ce dernier ne semblait pas très bavard ni volontaire pour faire "ami-ami". Devaraj devra probablement se contenter de l'observer du coin de l'oeil à défaut de l'embêter avec des questions.

-"hnmm... la pièce du fond donc ?" finit-il par dire pour confirmer, avant de s'avancer vers la porte.  L'Ombre semblait bouleversée, mais à vrai dire c'était le dernier de ses soucis. Bien sûr qu'il compatissait un minimum pour sa triste histoire, et qu'il allait chercher à l'aider d'une façon ou d'une autre, mais c'était plus pour satisfaire sa soif de savoir qu'autre chose.  Il n'était pas insensible, mais il donnait simplement des priorités à ses sentiments. Et ici, son envie de connaître la vérité était largement supérieure à son envie d'apaiser cette créature.... Il garda son sourire et toucha la porte du bout des doigts.

Le couloir était dans le même état qu'ils l'avaient laissé à leur arrivée, c'est à dire, macabre, sombre et rempli d'un silence de mort. C'était presque charmant. Du moins, c'était ce qu'en pensait Devaraj.  Ils s'avancèrent jusqu'à la fameuse chambre et le chaman regarda un instant la nouvelle porte, de plus en plus curieux de savoir ce qu'ils pourraient trouver à l'intérieur.
C'était une pièce tout aussi petite que la première chambre, bien qu'un peu plus lotie en meuble. Il y avait aussi une fenêtre qui donnait sur les jardins aujourd'hui envahis par les herbes sauvages et les arbres. Un grand lit trônait au milieu, mais le reste était plutôt tombé en décrépitude et en poussière. Aucune trace ni d'ancienne vie, ni de cadavre, du moins à première vue.  Cependant, il y avait quand même quelque chose d'étrange dans l'atmosphère de cette pièce. C'était encore plus malsain que dans la chambre de torture de Shäde, c'était plus...dépravé.
-"Peut-être que la réalité est bien plus sombre qu'on ne le pense..." finit par murmurer le chaman, en se retournant vers son compagnon d'infortune pour savoir ce qu'il en pensait lui.

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Jeu 16 Juil 2015, 15:16


Une toile, fort bien tissée, semblait se déployer dans le manoir, et ils continuaient d'échouer au contact de ses fils. Résistants et bien nattés, l'on réduisait la possibilité de les couper court à un grand exploit, et celle de leur échapper au domaine du miracle. Pris dans le conte dont ils comptaient bien assister au dénouement, le démon abandonna à sa peine la malheureuse, explorant d'ores et déjà du bout des doigts, de ses narines, de ses cinq sens les moindres indices quant aux activités antérieures que l'on menait dans ces divers 'laboratoires'. Il n'y avait pas de doute, au vu du matériel médical parsemé de toutes parts et en tout sens dans chacune des chambres qu'ils s'abstinrent de fouiller. Avant de partir, Kai avait pris soin d'emporter le maigre journal aux maints témoignages, et semblait l'examiner d'un œil attentif, voire outrageusement méticuleux : les pages jaunies aux bordures arrachés par l'usure et sa mauvaise tenue, l'encre à moitié effacée qui imbibait le manuscrit, les différentes dates qui surplombaient chaque entrée du petit carnet. Le texte en lui-même n'ayant pas tant changé, il cherchait plutôt dans l'écriture manuscrite ou dans une phrase dont il n'aurait pas saisi à premier abord le vrai sens, la sorte de traitement que l'autre jeune fille tolérait, car hélas, on ne lui laissait guère d'autre choix.

Ils entrèrent dans la chambre. En envahissant l'aire de son intimité, l'esprit sembla se sortir des méandres de son sommeil. La porte qui avait permis à leurs corps faits de chair de s'y engouffrer n'était plus qu'un lointain songe, tandis que la fenêtre qu'ils avaient cru percevoir en entrant s'avéra être une qu'elle avait elle-même dessiné, dans la seule et belle illusion de côtoyer la liberté, même dans son trou noir. Toute issue définitivement bouclée, ils purent sentir le mirage se dissiper, se fondre dans une fumée dense qui la pièce inonda. Avec elle, de nombreux squelettes ( qui avaient sûrement déjà fait les frais de ce piège ) surgirent, et les nombreux meubles virent leur bois faner, pour finalement retourner à l'état de semi-poussière tant le temps semblait les avoir affecté. Cette vision qu'ils avaient eu en entrant, n'était autre que celle d'un lointain passé dont elle avait horreur, mais qui semblait bien plus digne d'admiration que la réalité présente. Tout était d'un glauque mordant, morbide à la vue des traces de sang le long des murs, malsain de par les fortes suggestions de ce qui avait pu s'y passer. Devaraj semblait lui aussi y être sensible, et ce n'était guère étonnant qu'ils y songèrent. Des sanglots commencèrent à résonner, comme si jusque là on en avait diminué la fréquence, la résonance pour les rendre inaudibles. Ils étaient jusque là retenus prisonniers dans une boîte, celle que représentait la chambre funeste, et ne pouvaient en sortir. Les pleurs de sa sœur les avait comme remplacés. Et maintenant, c'était à son tour de crier haut et fort la douleur dans laquelle se noyait sa poitrine.

Dans ce carré ( dont les murs se voyaient parsemés d'une lourde poussière d'un noir charbon et sur lesquels on lisait une évidente résistance aux mauvais traitements ) ses chants étaient comme religieux, bien que terriblement démoniaques. Des dalles griffées, ainsi que la surface des parois dont on avait essayé d'arracher la moelle ; des traces de sang séché y noircissant toujours, assénées à la forteresse par des ongles fins et des doigts jusque là minutieusement entretenus ; des mots gravés à la sombre lueur d'une souffrance plus grande que celle de frotter sa peau, sa chair, son sang, contre une paroi, sans jamais soupçonner une réponse. Des traces de comptage furent aussi retrouvés. « Le décompte des jours qu'elle a pu passer enfermée là ? » Trop peu nombreux pour qu'il agisse des 5 années qu'elles y avaient passées, le démon déduit bien vite de quoi il en retournait. « Ou plutôt le nombre de fois où ils ont souillé son corps » Et en cette perspective, le nombre devenait affreux, effroyablement conséquent.

Au bout de quelques brefs instants, le spectre sembla prendre conscience de leur présence, et s'adressa à eux d'une voix peinée, terriblement endolorie. Dans un coin, elle semblait cacher aux yeux d'autrui ce que les siens eux-mêmes ne pouvaient plus supporter, à savoir elle-même. Recroquevillée, on distinguait sa petite taille, et son âge mental, sa maturité, qui n'avait guère eu le temps de d'avantage se développer. « N'approchez pas » , « Il nous sera alors très difficile de converser avec vous demoiselle » , « À quoi bon vous demanderai-je, car comme tous les autres, vous ne sauriez venir à bout de ma requête » , « Il ne serait donc pas.. trop osé de ma part que de déduire que tous ces ossements appartiennent à d'autres s'étant vus prisonniers à leur tour ? » Elle hocha la tête, en guise d'approbation. Il fallait dire que cet accord indiscutable n'avait, ainsi, rien de rassurant. « Vous êtes mes victimes » , « Je ne vous croirait pas si piètre personne comme pour recourir à ce genre de méthodes » Dans le timbre de sa voix, l'hésitation et la tristesse. L'homme pouvait y relever et interpréter de telles conjectures. « ..cela dit, si je ne m'étais pas moi-même retrouvé dans cette situation.. fâcheuse » , « Ne cherchez pas à vous en sortir avec vos talents de beau parleur.. Bon nombre ont essayé avant vous, et je puis dire sans doute aucun qu'ils brandissaient des lames plus affutées que vous n'en faites usage » , « Sans doute, car tel n'est pas mon fort. Je n'ai jamais voulu y prétendre, car le 'savoir' sait prévaloir sur tout le reste. Et j'ai bien pris connaissance de beaucoup de documents traitants des sujets neuf et dix. Ce serait dommage que de ne pas en faire profit » La réaction fut moindre, tout d'un échange monotone entre un être vivant, et une jeune femme torturée par les souvenirs, aux longues années d'une existence errante en ces terres. « Je n'arbore guère d'espoirs que vous trouviez quoique ce soit, mais il ne coûte rien d'essayer. Il m'a fallu de longues semaines pour m'apercevoir de mon trépas.. Je ne pouvais fuir cette chambre, et me trouvais une fois de plus prisonnière des chaînes qui m'entravent. J'ignore tout du jour où la vie m'a quitté, le jour où j'ai perdu tout espoir de revoir sourire ma sœur.. Ayant déjà passé tant de temps de mon vivant victime de cette prison, je voudrais au moins dans la mort m'en délivrer, que cette tourmente cesse enfin maintenant qu'au royaume des mortels je n'appartiens plus. » Pour une fois, les prémices d'une émotion trop abondante, trop impétueuse, firent surface.

Obnubilés par son récit, ils manquèrent presque les plus adroites parties du discours. « Mon nom est.. » , « Shäde » , « ..et j'ai vécu ici pendant.. » , « Pas plus de cinq ans » , « ..en compagnie de.. » , « Votre soeur » Lui jetant un regard noir, elle se pressa d'achever. « Et je voudrais que vous tentiez de reconstruire mon histoire » Il soupira, sachant que les choses se compliquaient en partie. Un dernier détail était à ajouter, avant que la panique ne puisse envahir leurs coeurs, ou que par joie cette émotion on ne remplace. « Vos corps seront la garantie de notre pacte. Ils sont mon assurance que vous reviendrez ici pour les retrouver, Vous emprunterez des formes éthérées pour vous faciliter la tâche, et vos recherches, notamment dans les pièces les plus fermement closes, voire impénétrables. Ils avaient lieu de douter de tout et tous, et je suis sûre qu'ils gardaient précieusement les récits de tous ceux qu'ils gardaient captifs entre ces murs. Voire des rapports sur les membres eux-mêmes à faire partie de ce projet » Et s'achevaient là le peu d'indices qu'elle pouvait réellement nous fournir. N'ayant jamais eu vent de la visée de leurs recherches, ni du pourquoi d'ainsi les pousser au vice, elles ne pouvaient que faire de leur mieux pour rester en vie. Le temps leur était compté, mais une volonté de fer les accompagnait dans leur démarche. Ils ne périraient pas pour si peu. C'était hors de question.

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Dim 26 Juil 2015, 22:46

Cette pièce était glauque. Et ce n'était que la partie la plus attrayante de la "réalité". Mais la vérité cachée derrière était autre, plus noire encore, plus profonde et insaisissable, et surtout, plus alléchante aux yeux du chaman, car il ressentait au fond de lui que quelque chose de captivant ce cachait ici. Quelque chose dont il se sentirait obligé d'arracher tous les secrets avant de pouvoir repartir du manoir l'âme en paix et la conscience tranquille.

Et ce qu'il attendait ne tarda pas à montrer le bout de son nez. Clairement, il vit un esprit recroquevillé dans le fond de la pièce, pleurant sur sa propre destinée et hurlant sa détresse. Devaraj prit le temps de l'examiner sous toutes ses formes, admirant sa constitution blanchâtre maigre, tremblante et frêle. Elle était cassée et cela semblait tout à fait impossible d'essayer de recoller les morceaux. Et dire que sa soeur était coincée à quelques pas d'ici seulement... C'était une fatalité si cruelle qu'il eut envie d'en rire. Sûrement que si leurs anciens bourreaux étaient encore en vie, il s'en roulerait par terre.

Quand il détacha enfin son regard de l'apparition, il se rendit compte que le décor avait changé tout en restant autant morose et dramatique. La fenêtre et la porte avaient disparu... Donc autrement dit, ils étaient prisonniers. Heureux piège et occasion bienvenue de pouvoir discuter avec cette lamentable chimère du passé. Ce fut son compagnon qui ouvrit le bal et ma foi, l'esprit semblait plus bavarde qu'elle ne le laissait paraître.
"Vous êtes mes victimes."
"Avec plaisir..." répondit Devaraj en s'accroupissant au niveau des squelettes pour en attraper un os et le tourner entre ses doigts, écoutant attentivement la suite du dialogue. Il se trouvait donc qu'elle avait perdu ses souvenirs en mourant et qu'elle voulait les retrouver. Le chaman se demanda pour lui-même si elle ne regretterait pas cette décision une fois que tout serait fini... Parfois, on se portait mieux en restant ignorant et à ses yeux, la vérité ne pourrait qu'apporter encore plus de souffrance à ce spectre maudit. Enfin bon... ce n'était absolument pas son problème au final. Ni celui de son camarade apparemment. Eux, ils se contenteraient de faire ce qu'on leur demandait, ni plus ni moins.

Bien qu'il en ai déjà le pouvoir en étant chaman, ce fut la première fois qu'il se retrouva sous forme éthérée. Il n'en avait entendu parler que via les récits de son vieux maître et ne savait pas vraiment comment utiliser ce pouvoir de lui-même. Devaraj posa un regard curieux sur son bras qui n'en était pas un et observa leurs deux corps immobiles à leurs pieds. Quelle étrange point de vue... C'était déconcertant et divertissant en quelque sorte. Il n'aurait jamais pensé pouvoir  vivre ça en allant se perdre dans ce vieux marais. Comme quoi le monde leur réservait bien des surprises... S'il aurait encore été en chair et en os, ses yeux auraient brillé d'une lueur avide de connaissances. Désireux de pouvoir se mouvoir avec sa nouvelle forme, il se retourna pour sortir. Un instant, il manqua presque de s'avancer pour prendre la poignée en bois quand il se rappela qu'il n'en avait aucunement besoin ...Et que de toute façon la porte avait disparue. A la place, il passa donc à travers le mur et atterrit dans le couloir.

Pour lui c'était comme un jeu dont ils étaient les principaux acteurs. Il se fichait bien de savoir que sa vie était mise en jeu, du moment qu'il pouvait tester de nouvelles expériences. Et puis la tâche ne semblait pas si ardue que ça, à première vue du moins. Peut-être qu'ils pourraient trouver une pièce cachée à l'ombre d'un coin de mur. Il lui semblait évident pour lui aussi que les sorciers avaient du garder des traces écrites plus détaillées que ce carnet rachitique sur lequel ils étaient tombés. Profitant de sa nouvelle mobilité, il passa donc à travers quelques murs pour vérifier qu'il n'y avait rien de concret derrière, et ils avancèrent ainsi le long du couloir, jusqu'à retrouver l'escalier par lequel ils étaient descendus dans cet pénombre cafardeuse.
-"En haut peut-être ?" proposa Devaraj en jetant un coup d'oeil à l'autre homme. De ce qu'il avait vu, le manoir était assez grand, et ils n'étaient qu'au sous-sol. Peut-être que les rapports étaient stockés ailleurs, étant donné l'humidité et le moisi qui régnait en bas, capable d’abîmer les papiers.

Alors rapidement, ils grimpèrent au rez de chaussé, puis au premier étage, retrouvant la série de portraits démodés, vestiges noirâtres gardant la demeure et œillant les visiteurs d'un air suspicieux, jusqu'à tomber en poussière. De drôles de bruits et craquements accompagnaient leur passage, comme si les anciens habitants étaient encore là sans vraiment l'être. Mais bizarrement, maintenant qu'il était lui-même un fantôme, Devaraj ne ressentait aucune appréhension. Passant telle une ombre parmi les restes de mobiliers rongés par le temps, le chaman remarqua ce qui ressemblait à une porte de bureau. Il passa à travers et se retrouva dans une grande pièce illuminée par le clair de lune, les étagères poussiéreuses baignant dans la lueur blanche. Là se trouvaient des livres, et peut-être avec eux la vérité qu'ils cherchaient.

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Mar 11 Aoû 2015, 20:42


Une perte de contrôle, un corps qui part à la dérive. La pression des muscles se relâcha, tandis qu'eux-mêmes perdirent toute consistance. Toute volonté s'évaporait, la flamme de vie s'éteignait, et les portes s'ouvraient aux plus curieux aguets qui le malin avaient tenté. Ils déjouèrent la nature, ses lois, se joignant à un monde étranger à leurs pratiques, où l'être n'était que poussière, et le désarroi que vérité. Revêtant une forme que pour défunts comme âmes en peine s'avère réceptacles du malheur, que d'autres prient sans en connaître le prix, leurs pieds décollèrent du sol. Pour certains, à ce dernier ils avaient toujours été enchaînés, et la découverte des cieux était une autre de leurs cupides ambitions. Kai, sous cette forme éthérée, valdingua sur le périmètre de la salle, désemparé. Le changement avait été soudain, et les changements trop importants pour une assimilation si  abrupte. Le chaman semblait plus à son aise, et le voyant quitter la pièce, s'élancer à la trouvaille d'une paroi qui en temps normal les aurait embrassé de tout son saoul, il fit de même. « Dev' ! » laissa-t-il échapper, inopinément. Approximativement stable, il le suivit dans une énième fouille, histoire de se certifier qu'en les lieux ne sommeillait, manifestement, plus le moindre indice qui put leur servir. Face aux escaliers qu'ils avaient emprunté pour descendre, l'autre s'exprima, bien qu'il  ne le fit que très peu. Il semblait du genre silencieux, mais alerte. Il semblait concilier en son sein tous les maux, toutes les peurs qui purent le déserter, le faire perdre pied, sans ne jamais rien afficher sur sa frimousse des expressions froides et réservées. Impossible de lire dans ses actes, car ils semblaient tous s'opposer par une logique immuable, et qui sait étrangère à la sienne. S'il le crut simplet dans un premier temps, il comprit par son engouement qu'il n'en était rien. S'il le supposât ennuyé ensuite, en voyant ses yeux scintiller face au mystère qui se présentait à eux, il comprit qu'il avait tort. Aucun lien ne s'établissait entre eux, et nul ne confessait ses malheurs. La conversation ne semblait pas s'établir sans mal, bien l'inverse, en dépit d'une mauvaise humeur absente ou de tout sentiment de gêne entre les deux. Kai remercia d'ores et déjà ce point, ce genre d'entraves n'ayant pour mérite que de l'agacer terriblement.

Il renchérit derrière. « Ces documents sont majeurs pour ceux qui devaient occuper les lieux.. Ceux à les rédiger échangeaient avec le 'bétail' mais ne faisaient que cela : rédiger des rapports. Ces derniers devaient bien être conservés par un sorcier d'un plus haut grade, et non pas éparpillés sur toute la demeure au bon vouloir des jeunots qui le secondaient. D'autant plus que cet endroit regorge d'humidité et est prompt à attirer tout genre de.. » Il regarda à ses pieds, et se rappela les nombreuses bêtes qui s'étaient éclipsé plus tôt, mais qui avaient failli rester coincées entre ses pattes. « En haut, me semble effectivement la meilleure option. Et au passage, moi c'est Kai » S'il n'eut délié ses lèvres ainsi, il ne s'y prêterait plus désormais. L'échange nécessaire était maintenu. De douces paroles ils n'avaient, effectivement, aucunement besoin.

Les déplacements étaient plus simples, plus rapides. Sur eux, ne pesait aucune fatigue, et la vigueur de leurs âmes semblait suffisante à inspecter les chambres à l'étage qui ne semblaient, soit dit en passant, pas si nombreuses. Entrés dans le bureau, contemplant la désolation qui s'y immisçait et que partageait tout le reste de la demeure, ils s'attelèrent à une lecture rapide et une recherche tout aussi instantanée du nom de l'esprit ou des études auxquelles elles étaient toutes deux reliées. Quelques fauteuils éparpillés dans la pièce laissaient à penser qu'on y accueillait parfois des réunions, et les tasses laissées à l'abandon dans un coin de la chambre, vinrent renforcer cette déduction. De larges tapisseries à moitié rongées croassaient à leur passage, sous leurs chaussures plus dures, tandis que sur les rebords de fenêtres et de bureau, trônaient quelques petits ornements dorés qui n'étaient guère aussi précieux qu'ils en donnaient l'air. Une dense quantité d'ouvrages emplissait les étagères brillantes d'un gris poussiéreux, et de leurs pages s'exhumait une odeur putride. Qu'il eusse s'agit de la décomposition ou pas, l'achèvement était le même, et à travers de larges passages où l'encre n'était plus si visible, ils comprirent que très peu ils arriveraient à dégager de ces récits. Finalement, juste quelques noms de scientifiques leur furent parvenus, ainsi que leurs rôles, globalement. Un petit résumé s'y attachait.

Après une petite lecture silencieuse des quelques premiers individus, il reprit mais cette fois à voix haute, suffisamment pour être audible. « Numéro quatorze : Issu d'une famille anciennement riche, déchue à ce jour, mais très connaisseur en matières premières et pierres précieuses….. Numéro dix-sept : Fait prisonnier un bon nombre de fois pour accusation de nécrophilie sans qu'on ne fournisse jamais de preuves à son appui. Se débrouille très bien dans le maniement des cadavres, et pour les empêcher de pourrir trop vite. Est en charge de leur garde et leur entretient….. Numéro vingt : Ancien herboriste, contrôle parfaitement les potions, voire encore mieux les poisons. Constitue en permanence de nouvelles recettes. Son partenaire, numéro vingt-trois, se charge de trouver des cobayes propices à ingurgiter leurs confections, ainsi qu'en toute autre circonstance. Sert aussi d'espion…… Numéro vint-cinq et vingt-six : Frères jumeaux, nés d'une union immorale, extrêmement avares. Trouvés dans une grotte du désert, aux portes de la mort. Étrangement bien élevés, mais aux tendances plus que sadiques dû à des mauvais traitements pendant l'enfance et renforcés par la famine. Se plaisent tous deux dans la torture, ainsi que dans les liens incassables qui unissent deux jumeaux…. » Cessant toute activité aussi soudainement qu'il l'avait commencée, il tendit le livre à celui ou celle qui s'avérait le plus proche. « Continuez la lecture » articula-t-il d'un air détaché, absorbé par un quelconque bruit qu'il crut provenir de la pièce voisine, et embourbé dans la curiosité d'un sixième sens qui lui disait de s'y rendre. N'ayant pas l'intention de paraître hautain dans ses actes, il les invita ensuite à le rejoindre. Ce, une fois qu'il fut en face d'un meuble, une construction imposante aux larges tiroirs de fer qui, fut un jour, furent très certainement très difficiles à braquer.

D'une main distraite pendant qu'il détaillait du regard l'ameublement renversé, il fouilla les rapports, sachant précisément quels noms il était bon chercher, et lesquels il pouvait passer sous silence, sans crainte de se tromper. « On dirait qu'c'est ici qu'ils gardaient les rapports plus détaillés. Ils étaient certainement très méfiants. Ils d'vaient avoir beaucoup de conflits internes j'suppose » Des recherches, analyses, encore et encore, défilant sous leurs yeux. Avec le crâne prêt à exploser par des infusions si conséquentes d'informations, il vit le but approcher. « Là, c'est les dossiers individuels. Ça se peut qu'ils soient plusieurs, donc s'il y en a certains que vous soupçonnez, n'hésitez pas à y jeter un oeil » Il saisit, pour sa part, le dossier des numéros vingt-cinq et six, mais s'aperçut bien vite à quel point ce dernier était fin, peu volumineux quant à son contenu. C'était raté, il le savait. L'ayant ouvert, il vit que les pages avaient été arrachés, et s'assure que ce n'était point le seul. Il remarqua avec horreur que tel était vraisemblablement le cas. Dans une frénésie qui fut sienne jadis, mais dont il ne faisait plus tellement preuve récemment, il s'élança, traversant la plupart des murailles qui les séparaient de tout le reste de l'étage, et observant de près tout ce qu'il vit cassé, endommagé, renversé, ou autres. Quand il revient, à peine quelques minutes plus tard, auprès de Devaraj, il semblait mener une profonde réflexion. Il fit comme un rapport. « Des meubles ont été renversés, mais le manque de poussière sur les faces pourtant les plus exposées, montrent que c'est récent. Si on ajoute ça au fait que des gens aient été arraché, et que je ne les ai trouvé nulle part alors.. » Il se tut, comme s'il put taire également une vérité qui était pour eux particulièrement gênante, et importune. Car vouloir résoudre, et trouver chaussure au pied déchaussé de la pauvre orphelin psychopathe, était ce qu'envisageait de prime abord le démon. Et voilà que les choses venaient de se compliquer.

Traînant le chaman et laissant sa compagne garder les trésors qu'ils y avaient trouvés, ils se forcèrent un chemin, de nouveau, jusqu'à la salle sans fenêtre dans laquelle reposait l'innommable jeune femme. « Quelqu'un est-il venu te voir dernièrement ?? »  Son ton était insistant, et la jeune femme de marbre. « Cela dépend. Combien de temps, pour toi, puis-je compter dans 'dernièrement' ? » , « Réponds et m*rde ! » Désarçonnée par la visible colère de son interlocuteur, elle réfléchit. « Cela fait déjà quelques années, au moins. Une dizaine je dirais, mais il y a trois ans, je crois, mais c'est très approximatif.. Je sais que c'était particulièrement bruyant à l'extérieur » S'étant enquis auprès de cette dernière de ce qui lui plût, il accourut de nouveau à l'endroit même où de telles suspicions avaient vu le jour. « L'homme qui s'est introduit ici.. » Il les conduit jusque dans une pièce, à l'opposé du bureau où ils se trouvaient jusque là. Il gratta une tâche noirâtre au sol, avant d'aller se poser sur un meuble, visiblement ennuyé. « Est sûrement mort, et j'ignore s'il a pris les papiers avec lui, ou s'il les a caché quelque part.. Il était à la recherche de quelque chose, et ce n'était probablement pour venir en aide à la veuve ni à l'orphelin. S'il a vraiment pris les documents avec lui, ça va être impossible de les recouvrer. On devra, dans le pire des cas, en fabriquer des faux je suppose » Il soupira, las de tous ces ennuis supplémentaires qui venaient de s'échouer sur ses épaules. « Tu pense pouvoir interroger les esprits aux alentours ? Tu penses qu'ils en sauront quelque chose ? De ce qu'il est devenu notamment ? » Kai avait un mauvais pressentiment, et il espérait seulement ne pas le voir se réaliser…

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Jeu 13 Aoû 2015, 23:08

La pièce sans fenêtre [ Pv Devaraj ] Bloggi11

Que de charmants personnages dont Kai commença à lire la description dans le rapport poussiéreux qu'il venait de dénicher... Devaraj attrapa le bouquin sous le regard sournois de Khaal et continua allègrement la lecture.
-"Intéressant ces deux jumeaux... Voyons-voir la suite : numéro trente, concierge et en charge de "repousser" les intrus, fournit régulièrement des nouveaux cadavres. Numéro trente-cinq : geôlier, cherche à élever des chiens de gardes à l'aide des potions du numéro vingt. Numéro-quarante et un : astronome anciennement reconnu, souvent prit à déambuler dans les couloirs les yeux hagards, numéro cinquante : anciennement empoisonneur et actuellement cuisinier de la maison."
Sa main referma l'épais volume et il jeta un regard sans conviction sur l'étagère devant lui, dénichant encore d'autres sombres noms encore visibles sur les tranches des livres. Si les anciens propriétaires avaient cherché à ouvrir un asile de renom, cela aurait pu marcher du tonnerre à première vue...

Il soupira et grimaça en suivant Kai, traversant meubles et murs, et n'espérant pas trouver grand chose là-bas non plus. S'il avait d'abord pensé pouvoir trouver quelque chose de concret dans les archives, il se rendait maintenant compte qu'il manquaient les pièces les plus importantes au puzzle. Et entendre le compte rendu de son compagnon ne fit que confirmer ses soupçons.
-"Voilà qui est fâcheux..." susurra le chaman, qui avait l'air cependant plus amusé qu'autre chose, une lueur défiante brillant dans ses yeux.
Il devint évident qu'il y avait encore d'autres acteurs attendant leur entrée en coulisses et que ces derniers ne leur étaient pas favorables... Mais qui qu'ils soient et quoi qu'ils aient tenté pour les éloigner des secrets ensevelis, il restait toujours d'autres étages à explorer pour tenter de leur arracher la vérité, et Devaraj n'en démordra pas, déjà parce-qu'il avait son corps qui l'attendait dans les sous-sols et ensuite parce-que le fait qu'on lui cache quelque chose ne faisait que décupler par dix son envie de savoir quoi.  Toucher à l'interdit, voilà qui était passionnant. Il en devint heureux que des imbéciles aient prit la peine d'arracher des pages et renverser des meubles, car cela rendait la tâche encore plus divertissante.

Revenant sur terre après s'être extasié un court instant sur les tournants imprévus de la situation, il suivit Kai, qui décidément avait l'air d'avoir les idées claires et concises. Après être retourné voir l'esprit et être revenu sur les lieux du-dit crime, il étudia silencieusement la question.
-"On ne triche pas en fabriquant des faux papiers voyons..." finit-il par lâcher en lançant un faux air de reproche à son compagnon. Si l'homme était mort sur les lieux, Devaraj doutait qu'il ai eut le temps de cacher quoique ce soit puisqu'il avait été de toute évidence prit sur les faits. Il ne restait plus qu'à trouver son cadavre dans ce cas, ou bien chercher une autre source d'information.
Lançant un regard en biais avec Khaal, il vit que ça ne l'enchantait pas d'aller taper la discussion au ramassis de fous qui devaient traîner dans les quatre coins du manoir. Mais c'était cependant leur seule option pour le moment.

Et ils ne tardèrent pas à en faire les frais. Quelques portes plus loin dans le couloir, le chaman manqua de faire une crise cardiaque quand il faillit percuter une forme blanche qui sortait de la pièce. Observant son air fiévreux et ses yeux perdus au loin, il eut la sensation d'avoir déjà vu quelqu'un comme ça... dans les livres précédemment lus.
-"...Enchanté... numéro quarante-et-un...je suppose ?"
N'obtenant aucune réponse, il leva les yeux aux ciels et continua, comprenant qu'il n'arrivera probablement jamais à obtenir quoique ce soit de celui-ci. Il en croisa alors un qui semblait être passionné par les peintures murales, ou du moins ce qu'il en restait. Après lui avoir cité tous les noms des portraits et s'être étalé sur leurs histoires, l'esprit daigna enfin lui expliquer que oui, il avait un jour vu passer un groupe de personnes qui s'étaient dirigées vers les cuisines.

-"Peut-être qu'ils ont mangé le cadavre pour pas qu'on le trouve ?" lâcha alors nonchalamment Devaraj en se retournant vers Kai. Il ne rigolait qu'à moitié. Après tout, les cuisines pouvaient être un excellent  lieu de torture quand on y réfléchissait, surtout qu'il était à peu près certain que la cuisine de ce manoir-là n'était pas...comme les autres, et que numéro cinquante avait du la customiser à sa volonté...

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Lun 14 Déc 2015, 23:32


Combien de sujets avaient-ils enfermés ici, sans rire ? Cette organisation était-elle... Si vieille ? Shaë avait parlé d'une dizaine d'années au bas mot... Et les deux protagonistes savaient qu'ils avaient déjà commencé les expériences avant de prendre les deux sœurs pour cobayes. Elles portaient les numéros neuf et dix, signes d'une activité antérieure.
Au fond, Kai était intéressé par le dénouement de l'histoire, la résolution finalement de l'énigme des jumelles. Mais c'était tout. Il se fichait du reste, des sorciers, et de tout ce qui entourait ce lieu mystique. Happé bêtement dans un mauvais roman de série B, il avait abandonné pour demander un tribut à ces esprits déments. Après tout, il doutait qu'elles puissent faire quoi que ce soit pour l'empêcher de dormir entre ces murs... Car tel était son but, piètre et démesuré par rapport à la situation. L'heure n'était pas au repos ni à la fainéantise.

La voix de Devaraj lui fit lever le nez de ses indices. Lui ayant passé le livret pour s'occuper d'autre chose, voire derrière les murs même, la voix de l'esprit résonnait à travers les cloisons, comme mille notes de musique. Leur forme éthérée leur donnait une portée toute autre sur la dimension actuelle, n'en déplaise au démon « C'est amusant de voir comment ils prenaient des... employés, dont ils se servaient également comme cobayes. Ils avaient confiance pour laisser leurs expériences en liberté dans le domaine, tu ne trouves pas ? » L'attention du cornu se porta sur des reliques poussiéreuses conservées de-ci, de-là sur le secrétaire devant lequel il se trouvait. Il renchérit alors « Je n'ai pas connu beaucoup de sorciers, leurs pratiques me sont inconnues. Je sais le strict minimum, c'est à dire qu'ils cherchent le pouvoir et la connaissance. Comme tant d'autres après tout... Et ils ont dû faire de cet endroit leur propriété, leur base d'opérations. Seulement, elle a plus l'air d'avoir appartenu à une vieille famille de vampires, qu'à des magiciens ratés. » Malheureusement, Kai était dépourvu de culture autant que d'intelligence. Aligner deux mots était déjà un exploit, alors mieux valait ne pas trop forcer sur la capacité à raisonner.

Ainsi, lorsqu'il proposa les faux documents, ce fut d'un chaman légèrement taquin, qu'il reçut la réponse. À son tour, un sourire amusé apparut sur son visage, alors qu'il s'était à nouveau retrouvé dans la même pièce que lui « Tu as raison. La solution de facilité n'est souvent pas la meilleure. J'espère qu'elle n'a pas donné d'échéance, car nous allons passer beaucoup de temps dans cette bâtisse... » Effectivement, il n'était pas question de dissimuler la vérité, de la camoufler, ou de la repeindre. Mieux valait la chercher ardemment. Il détestait faire ça, c'était synonyme de perte de temps, mais de toute façon, du temps, il en avait. Croisant les bras, il releva le menton « Tu avais l'air d'être familier avec les jumelles. Sais-tu ce qu'elles sont ? Je veux dire, est-ce seulement de simples fantômes, comme les légendes les décrivent ? Comme nous en ce moment ? » Il était curieux. Curieux de connaître la vérité lui aussi. Devaraj affichait, depuis le début, des signes d'un contentement qu'il n'arrivait pas à identifier. Pourquoi ? Ils étaient enfermés, prisonniers, bagnards devant exercer un travail forcé... Mais le Chaman avait l'air satisfait. Ailleurs, dans son monde, appréciant d'être mis à l'épreuve. Ce n'était pas une réaction normale. La logique voulait donc qu'il l'interroge. Après tout, Kai, démon jouissant d'une fierté démesurée, appréciait bien la présence de cet être étrange, hors du commun. Comme à chaque fois qu'il se rapprochait de quelqu'un. C'était toujours hors-du-commun.

~

Le corps complètement vide, ne ressentant ni froid, ni peur, ni appréhension, Kai suivit son compère à la trace, se dirigeant lentement vers les cuisines. Pourquoi se presser ? Rien ne l'était. Pressant. Quel mot désagréable. Non, le corps léger, il était bien sous cette forme. Sans douleur, sans problèmes, sans souffrance, sans lourdeur. Il s'étonnait de ne pas se languir -quand bien même le pouvait-il- de son corps matériel qui dormait au sous-sol dans les bras d'une âme vengeresse.
Encore une fois, ce fut la voix du Chaman qui le sortit de ses rêveries. Il s'adressa à quelqu'un qu'il ne vit pas. Regardant son visage, Kai remarqua qu'il le suivait des yeux, avant d'abandonner la partie « Pas de réponse ? » Apparemment non. Bien, le chemin continuait alors, jusqu'à une autre pause. De là, Devaraj s'intéressa à des tableaux. Le Démon ne comprit pas de suite, ne faisant pas le lien avec ce que lui pouvait voir, et pas lui. Il avait du mal à se faire à cette réalité éthérée, ce monde des morts et des vivants. Le Chaman avait un pied dans les deux, et ça, ça ne rentrait pas dans la pauvre logique du cornu. Attendant patiemment dans un premier temps, il finit par s'impatienter et préféra aller voir, ailleurs, si d'autres indices n'étaient pas dissimulés.

La pièce dans laquelle il entra était assez vaste, comme une salle de bal. La lune traversait les fenêtres, et certaines étaient brisées, dû aux affres du temps « Charmant... Ça lui plairait surement... » Même son murmure résonna de mille voix communes. Le démon planait, lévitait à travers toute la longueur de la salle, avant de croiser des miroirs. Étrangement, il ne vit pas son reflet. Tiquant là dessus, il commença à s'énerver, essayant, par tous les moyens, de se voir. Mais sa vanité n'eut pas raison du phénomène naturel du lieu. Son corps éthérée était invisible pour ceux qui n'étaient pas comme lui. Et les miroirs ne reflétaient que le vivant des personnes.
Tout à coup, une porte claqua. Confortable depuis son mirador, il regarda une âme noire entrer dans la pièce et la traverser quasiment au pas de course. Se faisant discret, n'ouvrant même pas la bouche, il la poursuivit, la rattrapa, et fouilla ses poches. Il n'y avait rien. Du moins, rien d'intéressant. Se servant d'une bourrasque de vent comme excuse, il effraya le malheureux en faisant tomber une antiquité qui se brisa à terre « Bordel de... Quelle c*nn*rie de venir ici... » Mettant la main sur son coeur, le type reprit sa course pour arriver à l'autre porte qu'il emprunta.
Kai finit par revenir alors vers le Chaman, qui venait de finir à point nommé son excursion artistique « Eh bha, faut pas être pressé... M'enfin, ouais ce serait marrant qu'ils soient maléfiques et cannibales. Ca dorerait pas mal leur tableau. » Pour le coup, ce serait des Sorciers bien gratinés ! « Allons-y, nous verrons là-bas la finalité. Pareil ils se font un petit festin. » Rien n'en était moins sur cependant...

La porte des cuisines étaient largement ouverte, et du bruit émanait de l'intérieur. Lumière, ambiance, ce n'était pas festif, mais il y avait de la vie, contrairement à eux. Kai fit un signe de tête à son ami, avant de se mettre dans l'embrasure de la porte. Ils ne risquaient, de toute façon, pas de les voir. Préférant se taire, ils assistèrent à une scène assez normale. Quelques sorciers se trouvaient là, peu bavards. Sur la table au centre, il y avait largement les signes d'un festin dévoré la veille au soir. Ils avaient raté le coche.
Lançant un regard entendu à son ami, Kai fut déçu de constater qu'il ne pouvait pas tuer ces êtres malfaisants dans le but de les voler. Un chuchotement retentit de sa bouche alors « Tu penses qu'ils peuvent nous entendre... ? »

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Dim 20 Déc 2015, 21:47

"Tu parles des fantômes comme s'il s'agissait de simples contes et légendes." Devaraj sourit, un peu moqueur. "Je ne peux pas t'en dire plus, ne m'en veux pas..." Cette fois-ci, c'était clairement fait exprès pour titiller un peu son camarade. De toute façon le chaman était obligé de garder le silence sur tout ce qui touchait au cycle de la Vie et de la Mort et aux ombres. Il se voyait très mal ne pas respecter les règles imposées, et encore moins trahir son peuple. "Mais les fantômes existent. Tu en deviendra un, un jour, et moi aussi. " Il rigola, comme s'il avait hâte que cette étape de sa "vie" arrive. En effet, ce n'est parce-que l'on meurt que l'on s'arrête de vivre. Pour le meilleur comme pour le pire, il y avait encore autre chose après. En dehors de cette singulière situation dans laquelle il se retrouvait actuellement, Devaraj avait déjà par sa propre magie le pouvoir de sortir son esprit de son corps. Mais c'était un processus compliqué à exécuter et à maintenir... Fatiguant, dangereux, et peu pratique. Au fond, il était très curieux de savoir ce que signifiait réellement "mourir". Bien sûr, il connaissait tout les détails du Cycle, mais l’expérimenter par lui-même restait le moyen le plus fiable pour être sûr d'en comprendre toutes les subtilités. Car il avait beau l'observait de près et trouvait cela fascinant, il lui manquait toujours quelque chose pour réellement saisir ce qu'était la Vie et la Mort. Rêvassant un peu, il suivit son compagnon, oubliant un moment le pourquoi de leur venue en ces lieux.

Un claquement de porte le réveilla brusquement. Par réflexe inutile, il évita l'individu qui venait de se ruer à l'intérieur de la pièce, regardant Kai le fouiller et l'effrayer. Observant la scène, il remarqua que l'homme avait l'air particulièrement paniqué et fuyant et en déduisit qu'on l'avait forcé à venir ici et qu'il n'avait pas l'air de s'en réjouir. Pour quelle raison ? Cela restait un mystère... Mais plus pour longtemps. Cet intrus tombait à point nommé, il était l'élément qui leur manquait pour avancer dans l'enquête, une aide inespérée qui leur évitera de chercher dans le vide, puisqu'il s'agissait maintenant de le suivre et de le surveiller, tout simplement. "La solution la plus logique ressemblerait à celle-ci : il y a eut un conflit interne et l'homme qui est venu ici cherchait à s'emparer des comptes-rendus des expériences pour s'en servir à ses propres fins. D'autres l'ont tué pour l'en empêcher et ont récupéré les documents. Et maintenant, tous les coupables liés à ce manoir se réunissent pour décider de la marche à suivre après cette trahison de l'un d'entre eux. Ça me semble plausible non ?" proposa le chaman tout en suivant des yeux leurs proie qui avançait dans les couloirs. "Tu l'as dit toi-même, les Sorciers cherchent le pouvoir et la connaissance. Cela veut dire que l'honneur n'a aucune valeur à leurs yeux et que le mensonge est un moyen comme un autre pour arriver à leurs fins."

Bientôt rejoints par Khaal, les trois esprits suivirent discrètement le nouvel arrivant, direction les cuisines et la salle à manger. Devaraj du avouer qu'il fut un peu déçu de se retrouver dans une ambiance presque normale. Dans la pièce se tenait un petit groupe de personnes devant des restes de banquets. Il s'était imaginé quelque chose de plus... saisissant, mémorable, qui aurait collé à l'image qu'il se donnait de la cuisine et des résidents. Regardant Kai, il haussa un sourcil et haussa les épaules. Est-ce-que leurs voix pouvaient être entendues même sous cette forme ? "J'en sais fichtre rien." répondit-il, tout sourire. Bah oui, puisqu'il ne savait pas, le meilleur moyen d'en être sûr c'était de tester. De toute façon ils étaient invisibles et donc potentiellement immunisés contre tout mal, alors ils ne risquaient pas grand chose. Et puis la Mort ne faisait plus peur au chaman depuis longtemps maintenant. Il ne voyait donc aucun intérêt à être prudent. D'un signe de tête, il envoya Khaal inspecter le fond de la pièce et les cuisines. De toute évidence, les sorciers ne pouvaient ni les voir ni les entendre. Un avantage précieux, pour le moment.

Le chaman avait du mal à suivre et à comprendre les paroles du petit groupe. Mais il s'aperçut vite que c'était une conversation houleuse et que certains semblaient colériques pendant que d'autres restaient perdus dans leurs réflexions. Ils cherchaient sûrement à prendre des décisions importantes et à résoudre certaines polémiques. Mais peu importe, ce qui intéressait Devaraj, c'était plus les papiers qui venaient d'être déposés sur la table qu'autre chose. Il était presque certains qu'il s'agissait de ce qu'ils cherchaient pour leur enquête. Cela dit, ça allait être compliqué de les récupérer, car d'une part il faudra détourner suffisamment l'attention des sorciers et d'autre part ils allaient bien avoir du mal à s'emparer de la pile de documents sans leurs corps humains ! Voilà que leur avantage se transformait déjà en faiblesse...
Accablé par cette constatation, le chaman ne s'avoua pourtant pas vaincu. Puisqu'ils ne pourraient pas voler les livres, il faudra se servir des personnes présentes pour en connaître le contenu. Il s'approcha donc discrètement de la table, zieutant sur les documents.
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Sam 03 Sep 2016, 11:33


Le démon grogna face à l'impertinente remarque du chaman. Il vit ce sourire, certes moqueur, comme une pointe de déviance, avec des nuances de supériorité. Il y avait beaucoup de choses que le cornu ignorait, et si son emprise ne s'étalait pas jusqu'au monde des morts, il considérait celui des vivants comme son royaume. Il représentait les frontières jusqu'où son pouvoir pourrait aller, qu'il pourrait gouverner sans peur et d'une main impitoyable. Il n'avait que faire si les esprits agissaient en légendes, ou si un acte véritable se cachait derrière ces ombres éthérées, tout droit provenues du froid le plus lugubre. Dans le corps de l'une d'entre elles, il comprit qu'elles n'avaient d'entraves que fussent le temps ou l'espace. Elles pouvaient tout traverser, elles pouvaient déjouer le cours du temps. Ce dernier n'avait pas d'influence sur leur corps brumeux, mais ce n'est pas pour autant qu'ils avaient un pied sur le monde des mortels. Kai était certain de leur être supérieur, par le seul fait qu'il était encore vivant. « Et même s'ils ne l'étaient pas, ça changerait rien à leur inutilité » Blessé quelque peu dans son orgueil, il continuait son chemin, sachant toutefois que son camarade faisait de l'existence des esprits un phénomène bien réel. Qu'il se refusât de lui en dire plus, ne fut pas des dénis les plus plaisants, mais qu'il ajoutât quelques paroles, comme pour le renseigner un peu plus, atténua cette aigreur. « On est condamnés à le devenir quoi. Que des siècles me séparent de cet ennui mortel… » dit-il d'un air exaspéré, comme s'il le sentait déjà sur ses vieilles peaux, résonner sur ses cicatrices qui auraient pu lui être mortelles. La mort n'était pour lui pas envisageable, et apprendre que la mort ne délivrait pas l'individu de toute peine et de toute attache, n'était pas une nouvelle des plus rassurantes. Cela rassure souvent la plupart des hommes, de se dire qu'un paradis les attendra une fois leur vie de péchés sur ces terres révolue. Or, il va sans dire que l'équilibre du monde n'a rien d'une si enviable destinée. Ils effleurent toujours le même sol, croisent toujours les mêmes cruautés, sauf qu'ils n'en sentent pas l'énorme souffrance. Étais-ce positif d'avoir cette seconde chance ? Alors que la vie les a quitté et qu'il ne reste même plus le corps pour accueillir l'âme ? Un retour en arrière est infaisable, inadmissible.

Le claquement de porte sortit le démon de sa rêverie. Il fut perfide, comme à son habitude, scrutant et harassant l'homme qui était loin de se douter de quoique ce soit. Il écouta attentivement, alliant certains éléments à la théorie qu'il avait d'ores et déjà forgée dans son esprit. « Et si on ajoute à cela, le fait que leurs espions l'ont intercepté et laissé pour mort, tout en surveillant cet endroit, cela expliquerait pourquoi on s'est aperçu de notre présence aussi vite. Ils ont procédé à une fouille avant notre arrivée, car ils n'ont pas trouvé tout ce qu'ils auraient voulu, pour le mettre en lieu sûr de toute évidence. » C'était une idée comme une autre, colportée par les divers éléments qu'ils avaient trouvés. « Je pense qu'on est bons » fit-il d'un air suffisant, satisfait, un sourire narquois au bout des lèvres tourné vers son acolyte. Il n'avait, depuis le commencement, la moindre envie de mener ce projet à bien, hormis pour le fait que son corps se trouve emprisonné et qu'il appréciait assez la petite ombre qui se trouvait dans les sous-sols. Son histoire et ses mots lui plaisaient. Ils auraient pu être des amis proches tous deux, s'était-il dit avec une pointe d'ironie. Ils suivirent les nouveaux arrivants jusque dans les cuisines. Une scène banale les y attendait. Kai perdait progressivement tout intérêt pour l'endroit et leurs occupants, et comment le lui en vouloir. L'expérience répondit à sa question, qui aurait pu paraître idiote au premier abord, si elle ne l'était pas réellement. Il ne craignait pas le danger, mais ses sens étaient paralysés par une curiosité à toute épreuve, qu'il exerçait en continu. Il ne voyait aucun intérêt à être prudent, et l'était de ce fait très rarement. Les blessures qui marquaient sa peau, des balafres qui déchiraient ses membres, prouvaient indéniablement qu'il n'usait pas des prérogatives de défense. Il préférait foncer, tête la première, tel un inconscient. Cela finirait par le tuer, s'il ne s'assagissait pas avec le temps.

Comme Devaraj, il resta silencieux quelques instants le temps d'écouter attentivement la discussion du petit groupe. Sans compter les remarques insolentes et injures en tout genre dirigées à l'un et l'autre des personnages, une conversation des plus houleuses, ils menaient une véritable réflexion. Le chaman profita d'un moment de latence pour examiner les papiers qui lui étaient visibles. À rien ne leur servirait de retenir toutes ces informations. « Tout ce qu'il faut faire, c'est les détruire. D'après leur agitation, je suis sûr que des renforts arrivent. Et bien plus haut gradés. Ils sont tellement importants qu'ils ne savent pas où se mettre ces bambins. Il faut qu'on trouve un moyen d'incendier les documents, qu'ils ont précieusement entreposé ici et réunis. Ce qui nous est très utile, comment ne pas en profiter ? » Il eut un sourire presque obsédé, et ses yeux écarquillés montraient clairement un démon qui vient de chasser et qui encercle sa proie pour la démunir. Il invita son acolyte à faire un dernier tour de la maison, avant de rejoindre les sous-sols. L'affaire de la morte et détenue était plus que résolue, et ils n'avaient qu'à lui divulguer toute la vérité pour que cette dernière leur rende gentiment leur enveloppe charnel et qu'ils mènent à bien leur sombre projet. Leur route, leur échappatoire était toute tracée. Ils n'avaient qu'à créer une petite étincelle pour que le feu prenne. Les flammes noires semblaient absolument indiquées pour la besogne. Les documents seraient irrécupérables, et pourtant les deux coupables seraient introuvables, soit à cause d'une petite séance d'hypnose soit car la forêt aurait brûlé juste derrière eux. De toute manière, ils étaient libres, et c'est ce qui importait. La conclusion était des plus ennuyantes, le démon est le premier à en témoigner.

† 1 111 mots
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La pièce sans fenêtre [ Pv Devaraj ]

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