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 Le poulpe divin [Event PV Soma]

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Mer 18 Mai 2016 - 18:53


Assisté par un makila qui le soutenait dans sa progression, le Démon avait échappé de justesse à une meute de loups affamés. Sa force avait été considérablement affaiblie lors d’une succession de péripéties qui l’avaient contraint à renoncer à un bijou d’une grande valeur, laissant ainsi un beau joyau lui glisser entre les doigts. Depuis, il déambulait un peu par hasard à la bordure de l’immense océan à la recherche d’un abri pour se reposer, s’autorisant parfois à prendre une pause bien méritée en égarant son regard dans l’horizon. Il n’était pas très familier de l’eau en général, et même s’il était plutôt bon nageur, il évitait le plus souvent cet élément contraire à celui de son habitat naturel. Une petite baignade ne lui ferait peut-être pas de mal, ne serait-ce que pour soulager sa jambe qui lui l’affectait terriblement depuis sa dernière bataille. Au moins, l’océan avait pour remède de le consoler par sa douce mélodie, les vagues frappant intempestivement les récifs. Réfléchissant un instant, il se laissa finalement convaincre par son désir de décontraction. Retirant alors ses bottines, il s’imprégna partiellement dans l’eau — assez chaude — qui opéra immédiatement sur sa cheville endolorie. C’est par un murmure de satisfaction qu’il émit son plaisir, qui fut toutefois de courte durée lorsque la voix écorchée d’un homme à l’accent prononcé le fit soubresauter à l’autre bout de la rive. Cherchant l’origine de celle-ci, il tomba rapidement sur la présence d’une foule, rassemblée en contrebas d’une colline sur laquelle reposait le fameux orateur. La curiosité de son récit le laissa pantois tellement ce dernier lui semblait invraisemblable, tant dans son contexte que dans ses détails scrupuleusement méritoires d’un consommateur compulsif d’herbe de vie.

Ses gesticulations rajoutaient considérablement de drama à quelque chose qui paraissait malgré tout bien plus désopilant que ce qu’il s’efforçait de transmettre. Un poulpe et une divinité, autant dire que les deux composants ne se conciliaient pas très bien, et pourtant il clamait haut et fort sa véracité. Regagnant peu à peu sur la côte, Zane écourta son plaisir en renfilant ses bottines, mais aussi sans perdre une once de ce qu’il continuait de raconter, davantage par indiscrétion que véritable intérêt. De toute façon, le conte de ce vaudou l’amusait assez pour mériter de s’y attarder. Contre toute attente, il réclama de l’aide à ceux qui souhaitaient embarquer dans l’aventure de ce fameux bâton perdu. Alors qu’il terminait à peine de se chausser, il comprit avec lucidité que personne n’allait se lancer dans cette stupide quête. D’ailleurs, ceux qui l’écoutaient jusqu’à maintenant renoncèrent à lui porter du crédit. À plus forte raison, tous s’indignèrent et s’écartèrent de la place, préférant visiblement retourner vaquer à leurs occupations. Le bellâtre n’était pas très compatissant quand il s’agissait de rendre des services, mais il s’approcha toutefois de l’individu désappointé en grimpant au sommet de la colline, son pouce calé dans le ceinturon qui œuvrait à maintenir son épée correctement. « Les honnêtes gens ne sont plus ce qu’ils étaient. Refuser de parcourir l’océan à la recherche d’un Dieu poulpe, manifestement ils ne savent pas ce qu’ils ratent. » Ce dernier aurait pu se sentir bafoué par tant d’ironie, mais ce ne fut pas le cas, bien au contraire.

Son visage exprimait un ravissement qu’il n’avait pas l’habitude de voir chez ceux qu’il importunait. Le bonheur de voir un inconnu s’approcher de lui était donc plus élevé que la menace à laquelle il pouvait correspondre en temps normal. Le vaudou se précipita vers lui, prenant ses deux mains comme s’il tenait à les garder près de lui, sûrement par crainte de le voir lui aussi s’écarter. Ce type avait au moins tous les symptômes pour indiquer qu’il avait passé une soirée arrosée la veille, mais qu’importe. La manière dont il le fixait dans le blanc des yeux ainsi que la façon qu’il avait de le supplier était particulièrement troublante, mais aussi, il lui jurait que les Aetheri ne le remercieraient jamais assez en ces temps de guerre. En vérité, le Démon était bien plus captivé par les nombreuses richesses qu’il pourrait déterrer en cherchant bien. La mer débordait de trésors insoupçonnés, et si en plus on lui offrait de quoi respirer tout à fait ordinairement sous l’eau, alors à quoi bon décliner ? La carte qu’il lui transmit indiquait — d’après ses dires — l’emplacement d’une grotte qui imposait d’y faire un arrêt. En pleine écoute, Zane remarqua toutefois la présence d’une jeune femme, un peu plus en retrait. « Hey ! Toi, là-bas ! Approche ! » Ce qu’elle faisait ici lui était complètement égal. Il comptait bien l’embarquer avec lui, de gré ou de force.




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Lun 18 Juil 2016 - 0:24


Cela faisait plus d’un jour que Soma avait trouvé refuge dans un campement sommaire où beaucoup de rescapés vivaient pour un temps indéterminé. Tous venaient de différents horizons : très peu venaient du Continent Calme, comme elle, tandis que d’autres cherchaient à fuir les embuches que tendaient les païens par-delà les Collines. Une fois que les Orishas eurent amarré dans un Port provisoire, Soma et son mari débarquèrent sur le Continent Naturel. Ils cherchèrent un moyen de contacter leurs familles respectives, sans succès ce qui amena le couple à se séparer dans un village abordant  les plaines de Bouton d’Or. Vernic préférait trouver un autre moyen maritime pour rejoindre le Continent Dévasté alors que Soma, consciente des risques, cherchait plutôt un moyen de les contacter un pied à terre. La méthode, elle l’ignorait encore ; chose certaine, elle ne reverrait pas Vernic un certain temps, idée qui lui plaisait. Ainsi, elle fit la rencontre de Kewanee dans le dit village, une femme extraordinairement normale, une compagne de voyage agréable dont la conversation ne manquait pas et d’un groupe de voyageurs qui décidèrent ensemble de remonter jusqu’à Libertas. C’est seulement aux abords de la forêt d’Emeraudes que le groupe se scinda en deux. Beaucoup évitaient les grandes villes comme Stenfek, comme Soma, qui avait eu le temps de voir sur le sillon de leur marche des villages entièrement brûlés, des familles décimées et des populations agressives ou apeurées. Ils ignoraient tous la situation dans les villes et ne voulaient certainement pas être piégé entre des murs de pierres.

Perdue, elle l’était, c’était certain dans ces grands terres où l’horizon se fondait entre la terre et le ciel, où les arbres vivaient en Rois sur les forêts entières. Ils n’étaient pas à l’abri des pro-Sympans, ces païens aux armes vives et redouter sans merci. Ce fut ainsi que le groupe choisit de longer les plages et de s’écarter des sentiers battus. Chacun vivait dans la peur de voir des autochtones surgir de nulle part. Ils avaient ainsi une vision ouverte sur une partie du territoire, ce qui n’était négligeable à l’heure actuelle. Un matin, Soma se réveilla avec une nausée si virulente qu’elle perdit ses forces déjà peu conséquente. Pour survivre, une femme du groupe l’a pris par pitié à sa charge et l’aida à continuer. Sans la femme dont elle oublia le nom mais pas le visage, Soma arriva à un camp près du rivage de l'Océan, saine et sauve. Elle apprit par la même occasion son état de femme enceinte ce qui, bien sûr, ne l’enchanta pas le moins du monde.

Elle venait de se lever quand un allumé du cerveau déblatéra des propos incompréhensibles pour une âme si endormie. La nausée la prit d’un coup et elle s’échappa le temps nécessaire. Personne ne s’intéressait à ce que le bougre disait, tous étaient bien trop préoccupés par leur famille, par la situation générale. Bien des murmures avaient été lancées dans le camp et l’Océan était non sans doute une source de mystères terrifiants. Soma en particulier qui n’avait prêté aucune attention jusqu’à ce qu’elle aille mieux de nouveau. Ses côtes étaient bandées mais le fait de toujours fuir depuis plusieurs semaines ne lui avaient pas permis de se soigner correctement. En plus d’apprendre son état actuel, la jeune sorcière se sentait déposséder de tous ses moyens.

Plus tard dans la journée,  alors que le gourou commençait à perdre de sa verve, un guerrier à la stature impressionnante imposa sa pensée en appuyant les dires du vieil homme face aux centaines de réfugiés qui vivaient là. Les deux surplombaient le campement du haut de la colline, cachant les dernières lueurs du soleil aux pauvres hères qui siégeaient en bas. Tous se tournèrent vers lui et l’écoutèrent, y compris Soma qui aidait les femmes à dépecer les lièvres piégés la nuit dernière. Tous arrêtèrent leur tâche momentanément. Quand il eut terminé, peu de personnes se remirent à leur devoir assigné ; tous attendirent plus ou moins que l’homme inconnu continue de parler. La jeune femme eut soudain un haut le cœur, ce qui détacha ses yeux de l’envoûtant orateur. Elle se dépêcha de boire la boisson chaude qui trônait à ses pieds pour calmer ses maux de ventre. Soudain, le temps sembla se figer quand tout le monde posa un œil sur elle. On venait de lancer une sentence irrévocable. Le guerrier la désignait pour l’accompagner dans la quête de l’homme fou. Elle eut la désagréable impression d’avoir une Damoclès au-dessus de la tête et l’ordre donné fut presque immédiatement exécuté. Quand elle manqua de trébucher sur le pan de sa robe à moitié déchirée par son long voyage du bout du monde, deux hommes l’aidèrent à se relever. Un messie venait d’arriver et il ne fallait surtout pas gâcher l’instant. Le passage jusqu’à lui ne se fit plus sans encombre ; la voie était libérée comme si un Aether venait de choisir son messager. Sur son passage, elle entendit quelques femmes parler de son statut mais aucune d’elles n’osa dire qu’elle était enceinte, pas même Soma qui après avoir été désigné, l’avait presque oublié.

Le guerrier n’avait pas le profil d’un paysan, ni d’un réfugier. Certes le sel du vent marin avait rongé ses vêtements mais Soma devinait la qualité du cuir. Elle rangea une des de cheveux bouclées dans le tissus qui conservait sa tête des intempéries. Sa tenue, miséreuse, n’avait rien d’enviable avec le temps ; elle s’était délaissée de tous objets de valeur au cours du voyage pour échapper à un quelconque vol et les seuls biens précieux qu’elle gardait à présent, pressaient sa poitrine.
Soma, incrédule, demanda :
    « Mais… Tu-… On ? » Elle ne comprenait toujours pas l’intérêt qu’elle aurait dans l’affaire. « Sous l’eau ? L’Océan ? … Mais… Comment ? »
    « Merci ô seigneur ! Merci, que les Aetheri vous bénissent ! » priait l’homme religieux. « Je vous offrirais ma fille et sa dote, si vous y parvenez ! Elle est vierge oui-oui, elle est pieuse et bonne. Si vous revenez avec le sceptre du Dieu Poulpe ! »
    « Il y a plein de vierges pieuses et bonnes sans avoir besoin de se tuer ! » s’exaspéra la jeune sorcière face aux deux hommes.

Le guerrier l’intimidait beaucoup trop pour qu’elle ose poser son regard plus d’une seconde sur lui. Alors elle se tourna vers le religieux. Quelques versets dans une langue familière et ténébreuse lui revinrent en mémoire pour maudire les gens lâches de cette espèce, qu’elle se garda pour elle-même.
Voyant qu’elle n’avait plus vraiment le choix entre la noyade ou la lapidation -car elle était sûre qu'un refus était impensable-, elle opta pour la noyade. Méthode qu’elle jugea beaucoup plus douce que l’autre. Ses yeux mordorés et bruts croisèrent ceux du guerrier aussi noirs que la nuit sans lune et sans étoiles. Soma était décidée sans savoir pourquoi à le suivre jusque dans les Abysses.

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Mar 2 Aoû 2016 - 0:24

Pourquoi l’avoir élue elle ? La réponse échappait à Zane lui-même. Il aurait eu plus de chance de mener à bien la mission du prophète s’il s’était contenté de cueillir sa fleur parmi les belliqueuses ; une suite logique que ne souhaitait pas engendrer l’homme. La brise glaciale de la côte avait caressé sa bobine pour qu’il s’y tourne dans une direction bien distincte. D’une certaine façon, la chanceuse avait été favorisée par les Dieux, c’est pourquoi le Démon ne lui permettrait plus de reculer. Il salua la volontaire en inclinant son visage, les yeux à moitié clos et le sourire attendrissant. Et puis elle ne manquait pas de charme pour le commun des mortels, alors pourquoi se serait-il privé d’une associée ? Le gourou leur prépara un sac en toile dans lequel dormaient les potions qui allaient leur servir à respirer sous l’eau. Elles étaient limitées, autant sur la durée que sur la quantité ; ils devraient les consommer avec prudence. Ramassant la musette qu’il plaça sur ses larges épaules, il tendit sa main ouverte. « Puisque nous allons faire un bout de chemin ensemble, j’estime qu’apprendre à nous connaitre n’est pas une corvée. Coiffeur de père en fils, on me louange sur tous les continents comme le merveilleux Zane. Et tu es ? » Après les cérémonies d’usage, il précipita l’urgence de la quête qu’on leur avait livrée en la bousculant de plusieurs mots d'ordre tels que des « Dépêches-toi ! » ou encore de nombreux « Allez ! » à répétitions. Si le Diable ne tenait pas en place, c’était assurément à cause de l’objet qu’ils devaient récupérer. Un bijou fort en convoitise, pour qui savait reconnaitre le caractère des reliques perdues.

S’arrêtant aux pieds des vagues qui attendaient de les dévorer, il s’appropria une fiole ; retira le bouchon puis la porta à ses lèvres. Il regarda Soma. « Honneur aux Dames ! » Apostropha-t-il en riant, posant sa main dans le creux de ses reins ; une légère pression servant à la faire plonger tête la première dans le bassin. Zane sauta à son tour après s’être assuré qu’aucun tissu superficiel ne recouvrait son anatomie. Il n’avait qu’un large ruban maintes fois noué qui camouflait ses propres bijoux. Quoi qu’il en soit, le prophète n’avait pas menti sur les bienfaits de sa marchandise. Zane se sentait comme un poisson dans l’eau, dépourvu de tout inconvénient qui aurait naturellement dû le résoudre à remonter à la surface dès l’entrouverture de ses lèvres. N’ayant pas de problèmes particuliers sous l’eau, le Démon s’élançait profondément dans les abysses à l’aide de grandes brassées. « Tu sais pourquoi je t’ai pris avec moi ? Car tu ferais un excellent repas pour les Sirènes au cas où je devrais m’en débarrasser. » Il gloussa perfidement, trouvant cette ruse pour le moins géniale. Après tout, les appâts mouvants constituaient un butin de choix pour ces Vampires des mers. Aucune prédatrice de ces bas-fonds n’aurait de gosier assez redoutable pour mastiquer sa forte musculature. Au risque de se péter les dents, elles n’oseraient pas. Quand bien même, il existait bon nombre d’autres créatures anonymes au sein de cet élément instable. En nageant au milieu de tous ces animaux, Zane se rendait compte qu’il ne connaissait pas le nom du quart d’entre eux.

Soudain, il s’arrêta pour consulter sa carte étanche, semblant oscillant quant au chemin qu’ils avaient patrouillé jusqu’alors. En face d’eux, enfoncé dans les tréfonds reposait le squelette d’un navire : un galion, plus précisément. « Je sais qu’il n’apparait pas sur le dessin, mais nous devrions aller y faire un tour. Comme on dit dans les royaumes du nord, le plaisir avant tout. » Il n’était pas certain concernant ce dernier dicton, mais lui l’employait en tout cas régulièrement. Zane se retourna habilement par un roulé-boulé pour saisir la main de Soma, après quoi il s’enfonça à son tour dans les ténèbres de ce cimetière, là où toute lumière semblait avoir été aspirée par un puissant enchanteur. Une fois près du dit bateau, il lâcha sa main afin de forcer sur une partie de la coque pour l’arracher. Il se faufila ensuite à l’intérieur, heureux de constater qu’il ne s’était pas trompé en apercevant la montagne d’or qui gisait sur ce qui était sans doute l’ancienne cabine du capitaine. « Tu penses qu’il aura besoin de cet or ? Je vais en prendre quelques-unes. Souvenir, souveniiiir. » Chantonna le Diable comme s’il s’amusait à perdre son temps dans des activités qu’ils auraient facilement pu esquiver. Lorsqu’il se retourna pour s’adresser une nouvelle fois à Soma, il se frotta la nuque d’un air un peu gêné. « hm. C'est ennuyeux. On dirait qu’elle te trouve appétissante. » Une chimère aux dents acérées avait pris soin de les restreindre. Zane ne tenait pas à se battre. C’est ainsi qu’il l’avait décidé.

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Mer 10 Aoû 2016 - 14:51


Cette eau salée d’apparence plate et calme cachait tant de mystères que Soma aurait préféré découvrir dans les livres plutôt qu’en vrai. Le vent marin avait tanné la peau cuivrée de la jeune femme, si bien qu’elle ne faisait plus la différence entre une brise chaude ou froide tant sa peau s’était épaissie suite aux intempéries et à la mauvaise condition de vie qu’elle avait depuis des lunes. Elle défit le voile qui protégeait ses cheveux en mauvais état. A la seconde où elle les détacha, ils gonflèrent. Des boucles imparfaites et de différentes formes vinrent surplomber sa tête ; à eux seuls ses cheveux sombres tenaient comme si chaque mèche possédait une vie.  Elle n’arrivait plus à les dompter, la forme générale était incertaine et chose sûre ; la forme ne se pliait pas face aux vents même forts. Puis elle déposa le tissu de jute sur la baie et se retourna pour faire face aux biens que le gourou offrait. Elle le vit se mouvoir, si aisément. Il était beau et de son élégance se dégageait une certaine énergie qui affola le cœur malade de la sorcière. Elle se surprit à lui sourire et à acquiescer comme si chacune de ses phrases étaient divines. Et elles l’étaient. Fils de coiffeur ? Soma eut cru voir en face d’elle un Roi. Coiffait-il la tête des Aetheri, était-il le cordonnier d’Ezechiel et le postier d’Edel ? Il tenait bien son titre, Merveilleux. Sa chevelure était celle d’un Lion, les femmes devaient l’envier pour sa beauté et les hommes pour son charisme. Il la regardait. Ses prunelles obscures brillaient d’une malice signe d’une intelligence qui la dépassait outre mesure. Elle était bête face à l’homme, elle ne pouvait être que stupide.

« On m’appelle Soma. » Même son nom sonnait l’imbécilité et sa petite voix indiquait la faiblesse face à la merveilleuse montagne.

Zane l’Incroyable, le Majestueux. Elle ne pouvait pas prononcer son prénom sans l’écorcher d’un ton sotto-voce. Son prénom était tranchant et c’était une langue aiguisée qui devait le prononcer, pas celle indomptée de Soma. Aussitôt perdue dans ses songes, il lui rappela la quête que le gourou leur avait sommée. Un bâton, il fallait ramener un bâton. Somazéline se retourna face à la mer. A chaque ordre, le corps de la sorcière fut parcouru de décharges très désagréables. Elle devait être rapide, plus prompt. Efficace. Elle arriva aux niveaux des vagues qui vinrent lui lécher les pieds puis les englober. L’eau était froide et la sensation loin d’être confortable. Son esprit était bien trop préoccupé par le guerrier à côté d’elle pour être concerné par son propre sort, la mort. Elle ne savait pas nager ni respirer sous l’eau. Elle défit ses affaires qui lui seraient un surplus, le fils du gourou les attrapa au vol. Zane le Magnifique lui tendit une fiole précipitamment, qu’elle se hâta de boire sans réfléchir à d’éventuelles conséquences. Elle frissonna. Le liquide était immonde, le goût citronné rappela à la sorcière les sols qu’on lave, mélangé à une sorte d’algue marine salée. Elle faillit le vomir mais la main pressante du guerrier dans le bas du dos lui fit avaler le rejet. Soma se retrouva ainsi dos nu quand elle s’engouffra dans l’eau glacial et ne se retourna pas pour dire adieu à la terre qui l’avait jadis accueillie en son sein.


Un rictus forcé par le rire du guerrier se figea sur le coin des lèvres de Soma. Elle était peut-être heureuse de mourir ainsi. Une fois la tête sous l’eau, son corps continua de faire semblant de marcher, la force de la gravité la gardant à la surface, dû à l’air qu’elle gardait jalousement dans ses poumons. Quelques secondes plus tard, elle recracha absolument tout, manquant de s’étouffer et découvrit que la potion avait fonctionné. Synonyme de noyade, elle respirait paniquée, bien qu’en réalité, son corps ne se gorgeait point d’eau. La magie faisait en sorte de tenir une bulle qu’elle ne percevait pas du tout, tout autour de sa tête. Elle vit Zane le Magnifique nager avec une aisance déconcertante. Ses puissants muscles entraînaient dans son sillon quelques poissons qui se mirent à le suivre tel un prédateur, comme si le guerrier allait cracher de la nourriture. Soudain il se retourna, Soma ne le suivait pas de très peu ce qui la garda du choc qu’il infligea autour de lui. Les poissons qui s’étaient accommodées à sa puissance se retrouvèrent sur le dos, balayés par le fort courant dominant qu’il imposa d’une brasse. Le guerrier eut une mine inquiétante, se dévoilant dans les profondeurs. Le cœur de la jeune sorcière tambourinait déjà assez fort dans sa poitrine, le flux sanguin manquant de rompre une artère. Ses paroles décontenancèrent la sorcière bien qu’elle n’y vit pas un mal, plutôt une évidence. Les forts mangent les plus faibles, un enseignement de la vie qu’on lui avait inculqué. Or Zane le Magnifique s’encombrait d’un appât, ça sonnait comme une logique absolue dans les oreilles de Soma. Pour autant, si la Mort n’avait pas encore pointé le bout de sa faux, la jeune sorcière ne voulait pas mourir. Elle ne se le répétait pas assez dans ces occasions, mais elle tenait fortement à la vie. Même quand elle s’était persuadée d’une mort inévitable, elle espérait qu’un Aether vienne la secourir, qu’une main divine la propulse pour l’aider à survivre. De plus, on venait de la désigner pour accomplir une grande chose, alors mourir n’était pas une option, mais un refus d’obtempérer. La sorcière survivrait même si le requin en face d’elle la donnait en pâture aux créatures des profondeurs. Elle vivrait.

Cette pensée ne la rassura pas pour autant. Alors que la jeune femme s’entêtait à nager en faisant mine de marcher – ce qui la distançait considérablement du guerrier – il la rattrapa pour l’enfoncer avec lui vers un navire coulé. Il tira tellement fort sur le bras de Soma qu’elle sentit son os se déboîter. La forte pression l’empêchant de parler, elle eut une mine semblant vouloir crier. Elle crut s’évanouir, mais il la lâcha et en laissant, il réduit fortement la douleur qu’il venait de provoquer. Elle ne se ressaisit pas immédiatement, ne sachant pas trop où poser les pieds ni même où regarder. Bien sûr, ses yeux bronzites observèrent les gestes du grand costaud qui jouissait d’avoir trouvé un trésor bien plus estimable que le bâton du gourou. La sorcière s’approcha en effectuant quelques mouvements de jambes mal coordonnés et envia le butin que le guerrier venait de trouver. Il s’était jeté dessus comme un loup sur une proie, sauf qu’ici, les pièces ne débattaient pas. La sorcière regarda tout autour d’elle. Ce monde qu’elle n’avait pas eu le temps d’observer était d’un bleu verdâtre affreux. Les plantes poussaient sur toutes les parois de la cabine dans laquelle ils se retrouvaient, si bien qu’elle ne discernait plus l’empreinte humaine tant ses yeux n’étaient pas accommodés à l’ambiance sous-marine. Si Zane ne l’avaient pas vu, Soma ne l’aurait même pas deviné. Même les pièces étaient protégées par cette couleur abominable, rendant la découverte difficile voire impossible pour un inexpérimenté. Le guerrier fouillait pour trouver des biens précieux qu’il pourrait emporter. Soma se frotta l’épaule droite et tenta malheureusement de remettre en place l’objet qui la ferait souffrir si elle ne faisait rien. Le mouvement n’était pas évident, il fallait écarter un minimum l’os du bras pour ne pas se blesser d’avantage, mais assez pour pouvoir le replacer correctement. Le claquement qui se produisit eut l’effet escompté ; Soma prise de vertiges déposa son dos nu contre les planches pourries de la cabine. Son bras était remis. Le temps qu’elle ferme les yeux, Zane le Magnifique l’éprouva une nouvelle fois. Un monstre sensiblement proche de la forme d’un serpent de mer ondula d’abord autour de lui sans s’y attarder et au moment où le guerrier la regarda amusé, la créature se dirigea vers Soma.

Ses dents étaient vilainement aiguisées, faites pour découper la chair à avaler. Soma ne distingua son corps que lorsqu’elle fut encerclée et sentit la viscosité de la bête. En tentant d’aller à contre-sens des écailles, elle s’y râpa et s’ouvrit le bout de l’index. Flairant le sang immédiatement, et un potentiel garde-manger, la chose eut un bref mouvement la gueule ouverte et vint s’enfoncer dans le bois fragile de la cabine. Soma s’était dégagée à temps, la créature n’était pas furieuse ni pressée, elle poursuivait sa proie simplement. La sorcière n’était pas rapide, elle tentait de courir sans succès. L’évidence des gestes à faire n’était pas facile à assimiler, contrairement à Zane le Magnifique, Soma était comme une pierre sous l’eau. La marche était compliquée voire impossible, alors courir, il fallait user de ses bras, dont un rendu fragile par la poignée du guerrier. Elle quitta la cabine où se trouvait le Coiffeur incroyable pour s’enfoncer un peu plus dans un couloir encombré par les vieilles planches. Elle ne savait pas où elle allait, juste trouver une cachette peut-être pour se protéger. A l’intersection d’un couloir, Soma attendit. Elle dégagea de sa poitrine une dague familiale et se plaqua le plus possible au mur. Quand l’espèce de serpent passa, la main gauche de Soma était assez haute pour planter la nageoire de la créature. Surprise par l’attaque inattendue d’une pauvre proie, le serpent détala en bousculant absolument tout sur son passage, même Soma. Le corps de la sorcière fut brutalement secoué contre la paroi, des particules de cette mousse marine se décollèrent.

Alors qu’elle se redressait en sentant ses côtes blessées, elle entendit un bruit qui ne la rassura pas pour autant. Un grincement long et sinistre résonna dans la longue cavité dans laquelle elle était et soudain elle sentit dans son dos la mousse la caresser. La partie dans laquelle elle se trouvait était déjà bien penchée. Pensant au pire, la sorcière se précipita sans pouvoir aller vite dans l’un des hublots ouverts qui donnaient sur les coraux de l'autre côté. Son corps était si maigre qu’elle passa en s’accrochant la jupe qui lui servait de sous-vêtement. Déjà abîmée, le tissus s’effila et finit par se déchirer. Elle s’en rendit compte en étant gênée dans sa sortie et tira volontairement dessus. La partie du bateau dans laquelle elle avait été était simplement plus penchée que les autres parties. Fragilisé par les ravages du temps, il céderait un jour ou l’autre, le temps était peut-être venu. Quelques créatures inconnues en sortirent précipitamment, dérangées dans leur repos très certainement. Ils passèrent près de Soma sans s’y attarder. La jeune sorcière ne vit pas Zane le magnifique tout de suite. Elle laissa son corps sombrer  jusqu’aux coraux sur lequel elle trouva un appui sur quoi s’accroupir, observant le long procédé. Un craquement brisa une partie de la coque extérieure déjà atteinte et la moitié seulement se mit à glisser vers une faille maritime aussi haute que l’infini pouvait lui donner. La sorcière s’approcha de bonds lunaires et lents vers le rebord sans y distinguer le fond. Elle décida dans un élan de suivre le convoi qui coulait à présent, la force de l’objet entraînant absolument tout sur son passage pour plonger dans des profondeurs incertaines.

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Jeu 29 Sep 2016 - 14:20

La soudaine manifestation de cette créature avait de quoi effrayer Soma ; en dépit de sa taille relativement élevée, elle était d’autant plus diligente qu’elle était intempérante. Les bras croisés contre une épaisseur de bois vermoulu, l’homme mesurait les agissements de la sorcière avec une euphorie spéculative. Il était presque jaloux de la voir si pugnace pour essayer de survivre et de se débarrasser du prédateur. Ce sentiment soudé à l’adrénaline, Zane l’avait égaré depuis si longtemps qu’il ne parvenait même plus à visualiser l’intensification d’un tel plaisir. Se trouver sur le fil du rasoir et réussir malgré tout à s’en sortir, voilà bien quelque chose qu’il aurait souhaité se réapproprier, bien plus que tout l’or qui pouvait résider en ce monde. Stationnaire dans son coin, les pupilles du démon déterminèrent le moindre de ses déplacements erratiques, et lorsque enfin elle le fit fuir au détriment d’une grande partie de ses forces, il frappa activement dans ses mains afin de témoigner de son assouvissement du moment. Elle avait réussi à le surprendre, même s’il n’avait pas douté une seule seconde du succès de sa tâche. Se redressant, il fit pression sur la coque avec ses pieds dans le but de diviser complètement la carcasse du navire. Se faisant, l’avant sombra alors dans les abysses, là où justement elle venait de se diriger. S’appuyant sur le mât, l’homme la rattrapa ainsi très vite en profitant du poids de l’engin. « On comptait s’en aller sans le magnifique Z ? Il ne faut jamais rejeter les miracles, ma grande, surtout quand ce même miracle est aussi ravissant que moi. » Lorsqu’il passa à côté d’elle, il l’attira à lui par le bienfait de la magie, la déposant sur la proue du bateau. « Nous avons perdu assez de temps avec cette bestiole. Et puis tu auras sûrement de meilleures occasions pour te faire manger. Enfin, si tu y tiens. » En effet, dans les profondeurs de l’océan rôdait une multitude d’autres prédateurs, mais contrairement au précédent, ceux-ci restaient à l'écart au lieu de se rapprocher.

Ils étaient incontestablement dominés par l’aura du Diable qu’il ne cessait d’émettre viscéralement durant toute leur chute. Dès l’instant où la modénature d’une caverne se présenta à eux, il quitta son poste pour la rejoindre. « Je pense que nous sommes sur la bonne voie. Ne me demande pas pourquoi, c’est certainement une question de talent. » Désormais dans les tréfonds de cette caverne, Zane pénétra au travers d’une profusion d’algues qui fermentaient jusqu’à la surface. Elles étaient particulièrement incommodantes, même pour lui qui ne manquait pourtant pas de dynamisme. Elles semblaient vivre d’elles-mêmes au point de croitre pour s’enrouler autour de son poignet et de ses mollets. Il tira néanmoins fermement dessus pour se défaire de leurs emprises, s’extirpant en dehors de ce piège marin. « Si tu as besoin d’aide, appelle-moi. Je n’interviendrais pas, mais j’adore entendre les plaintes des femmes. » En revanche, même si elle parvenait à se dépêtrer d’elle-même, ils n’étaient pas au bout de leurs surprises. En effet, au-delà du premier obstacle s’en trouvait un second. Celui-ci s’apparentait à une cheminée étroite composée essentiellement de vase, ce qui compliquant rudement la tâche de la montée. Jetant un coup d’œil vers sa partenaire, il comprit qu’elle ne réussirait pas à l’emprunter à cause du manque d’énergie flagrant qui commençait à l’asservir. Prenant ainsi de l’avance, il sema résolument ses doigts dans la roche, créant par la même quelques orifices qui permettraient à Soma de le suivre sans paraître trop handicapé.

Arrivé au sommet, il se mit à plat ventre puis lui tendit une liane qu'elle pouvait saisir pour remonter d'un coup. « Ma générosité me perdra, mais c’est bien parce que je t’aime bien. Allez ! On se bouge le train. Je vois le bout du tunnel. » Et ce n’était pas peu dire, car dès lors qu’ils furent tous deux arrivés à destination, un torrent de lumière les aveugla partiellement. C’était la sortie. Émergeant le premier, le Démon ne fut pas très choqué d’être accueilli par une sorte de tribu à l’élocution incompréhensible. L’accent avec lequel ils maniaient la langue le rendit farouche avant de s’expliquer qu’ils avaient très probablement atterri au bon endroit. Il se tourna machinalement vers Soma, comme si elle était la seule à pouvoir percer leur dialecte. « Toi qui as certainement vécu avec des paysans durant une grande partie de ton enfance, tu dois comprendre ce qu’ils veulent déclarer hein ? Rassure-moi. » En attendant de trouver une explication plausible, la bête se véhicula au sein de la tribu comme un virus se propageait dans le corps d’un individu. Il tendait à retrouver le bâton sacré du Dieu Poulpe, persuadé qu’il était caché dans les environs. Pour compléter ses recherches, il n’hésitait pas à s’infiltrer dans les étranges habitations, quitte à entreprendre plus de ravages que de bien. Des petits hommes commencèrent à s’accrocher à sa jambe dans l’espoir de l’arrêter, mais c’était peine perdue.


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Le poulpe divin [Event PV Soma]

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