À mon habitude et par passion de liberté et de fraîcheur d’esprit, je parcourais les bois en courant à pleine vitesse. Bien que cela m’arrive à de rares occasions, j’avais pour but d’atteindre un lieu précis. À l’inverse de ce que vous pouvez croire, je n’avais aucune intention de me rapprocher des gens. Je n’avais personne que je voulais voir en particulier non plus. Je n’étais qu’un simple solitaire des bois, sans attache à la civilisation. Mes seuls amis étaient la nature et ses merveilles ainsi qu’Atles. Alors, certain peuvent se questionner à propos de mes pensées. La raison pour laquelle je tenais à aller quelque part précisément était la météo. Enfin, la météo ne justifiait pas à elle seule mes motivations. C’était le résultat qu’elle avait sur le comportement des gens. La pluie en somme. Lorsque les temps se faisaient mauvais, les gens ne sortaient jamais de leur maison, préférant la chaleur de leur foyer qu’à la froide pluie et le vent fort. À moins que leur magie leur permette d’altérer la température mais ça, c’était une autre histoire. La différence qu’il y avait entre moi et ces personnes était là. J’étais un solitaire qui rejetait tout contact avec les civilisations, cependant, à cause de ces habitudes, je n’avais aucun moyen de savoir les nouvelles du monde qui m’entourait. J’avais besoin de ces connaissances. Je ne participais pas à l’évolution des villes mais savoir était ce qui me rattachait à ce que j’avais banni.

Ce qu’il fallait comprendre aussi, c’était que ma soif de connaissance ne m’encourageait pas à aller en milieu complètement urbain. Qu’il y ait de la pluie ou du beau temps, aller au cœur d’une cité égalait à une rencontre obligatoire avec les gens. Ce que je ne voulais pas. Mon détachement vis-à-vis des personnes s’appliquait aussi bien aux jours normaux qu’aux journées de récolte d’informations. Sauf que rechercher les nouvelles sans aller en ville était assez complexe. Tous les lieux qui pouvaient me renseigner sur les actualités étaient sans l’ombre d’un doute bondé de présence humaine. Alors, je devais rechercher un endroit où il n’y aurait personne – ou du moins, pas beaucoup – et trouver quelque chose, un objet ou une affiche, qui me ferait part des dernières actualités. Mais où? Ce n’était pas comme si ces Terres étaient remplies de lieux correspondants à tous ces critères. De ma connaissance, il n’y en avait qu’un seul : le Jardin Animalier. C’était la seule place où je pouvais trouver ce que je recherchais sans pour autant m’éloigner de la nature et des arbres. En plus, c’était bondé de créature de toutes sortes, d’où le nom de ce Jardin. Les chances que j’y croise quelqu’un par un temps pluvieux étaient sans doute amoindries et j’appréciais assez ce lieu pour m’y aventurer sans hésitation.

Je modifiai ma trajectoire de course en bifurquant vers la gauche. D’après les souvenirs que je conservais, le Jardin Animalier devait être dans cette direction. Difficile d’oublier, c’était entre les troncs de ses arbres que j’avais rencontré pour la première fois Atles. Derrière moi, des bruits de sabots résonnèrent à mes oreilles. Un son de brindilles qui craquent s’ajoutèrent à la mélodie accompagné d’un hennissement de joie. Je n’eus pas besoin d’arrêter ma course ou de regarder pour savoir qui venait à moi. De toute façon, elle ne tarderait pas à me rattraper. Je lui donnais juste cinq secondes pour qu’elle atteigne ma hauteur. Un. Le souffle de l’animal était désormais perceptible dans mes oreilles. Deux. Les sabots frappaient le sol juste à ma droite. Trois. La crinière immaculée d’Atles me bloqua la vue. La jument frotta son large museau sur ma joie, heureuse de me voir. Atles avait mis trois secondes pour me venir à moi. Deux secondes de moins de ce que j’avais estimé au départ.

Ce cheval m’impressionnera toujours. Malgré la pluie et le vent, elle était venue m’accompagner. Sa fourrure rousse mouillée paraissait brune maintenant et sa crinière, plutôt grise que blanche. Tout ce chemin parcouru, juste pour la satisfaction d’être venu avec moi. La loyauté d’Atles me touchait énormément. Je lui caressai la crinière, un large sourire au visage. Ma précieuse amie poussa un hennissement, contente, et alla devant moi. Je laissai un rire s’échapper de ma gorge. Depuis le temps que nous nous connaissions, elle n’avait pas changé du tout. Sa fierté et son sentiment d’être la chef de notre duo l’encourageait à se placer à l’avant et être la meneuse. Ce n’était pas tout à fait vrai puisque je la considérai comme mon égal mais de toute manière, question de vitesse, je ne la battrai certainement jamais. Les minutes s’écoulaient rapidement et la distance qui restait entre moi et le Jardin rapetissait à vue d’œil. Je distinguai déjà les différentes structures du lieu et les arbres qui nous entouraient commençaient à avoir la taille d’arbre nain. Nous y étions.

Le Jardin n’avait pas vraiment changé depuis la dernière fois. Les étendues vertes a coupé le souffle, les bâtiments de pierres, la grotte que j’apercevais au loin et évidemment, les animaux. Une vue spectaculaire que j’adorai et appréciai beaucoup. C’était toujours aussi magnifique. Perdu dans ma contemplation des lieux, le but de ma venue ne tarda pas à être repoussé dans un coin de mon esprit. Maintenant, toute mon attention était portée sur les végétaux et les sculptures de cristal qui décorait la place. Les feuilles des arbres étaient si vertes. Le bois des troncs étaient si riche. Que c’était beau! Sans oublier les statues… Les statues? Curieux, je m’avançai vers les œuvres de cristal, les analysants dans les moindres détails. J’étais sûr et certain que ces statues n’étaient pas là avant mais je devais avouer qu’elles étaient vraiment jolies. Le détail et la finesse de ces œuvres appartenaient à la main d’un professionnel et la couleur du cristal était tout simplement… époustouflante! À elles seules, ces statues avaient piqué toute ma curiosité. Atles, qui se tenait debout à mes côtés, posa sa tête sur la mienne, les yeux rivés sur ce que je regardais. Aucun de nous deux ne vit alors la personne s’approcher de nous.